Le peuplement humain en Eurasie : l`Asie centrale montagneuse et
Transcription
Le peuplement humain en Eurasie : l`Asie centrale montagneuse et
+ Models ANTHRO-2295; No of Pages 34 Disponible en ligne sur www.sciencedirect.com L’anthropologie xxx (2008) xxx–xxx http://france.elsevier.com/direct/ANTHRO/ Article original Le peuplement humain en Eurasie : l’Asie centrale montagneuse et les piémonts sous-himalayens du Plio-Pléistocène à l’Holocène, origines, évolution humaine et migrations The human settlement in Eurasia: The mountainous Central Asia and the Sub-Himalayan piedmonts from Pliopleistocene to Holocene, origins, human evolution and migrations Anne Dambricourt Malassé UMR 5198 CNRS, département de Préhistoire du Muséum national d’histoire naturelle, institut de paléontologie humaine, 1, rue René-Panhard, 75013 Paris, France Résumé En 1996 et 1997, une équipe du laboratoire de Préhistoire du Muséum national d’histoire naturelle engage des prospections dans le nord de l’Hindou Kouch (district de Chitral), en coopération avec le département d’Archéologie et des Musées du gouvernement de Karachi ainsi qu’avec le département d’Archéologie de l’université de Peshawar. Le but de ces missions vise à établir une étude des connections entre l’Asie centrale et l’Inde du Nord-Ouest (Potwar, Punjab) dès le Pléistocène inférieur (Soanien) et à comprendre l’origine des chasseurs-cueilleurs épipaléolithiques/néolithiques héritiers du Soanien, disparus au cours de l’âge du bronze. L’approche paléoanthropologique soulève des questions qui mettent en cause le paradigme des origines africaines de l’Homo sapiens asiatique. Depuis 2003, l’équipe poursuit ses investigations dans l’Inde du Nord-Ouest (chaîne frontale des Siwaliks, État du Punjab) en coopération avec le département des Affaires culturelles, d’Archéologie et des Musées du Punjab pour tenter de comprendre les origines du Soanien (Mode 1) et les modalités de son évolution jusqu’à l’Holocène. # 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Adresse e-mail : iphadm@mnhn.fr. 0003-5521/$ – see front matter # 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.anthro.2008.04.008 Pour citer cet article : Dambricourt Malassé, A., Le peuplement humain en Eurasie : l’Asie centrale montagneuse et les piémonts sous-himalayens du Plio-Pléistocène à l’Holocène, origines, évolution humaine et migrations, L’Anthropologie (2008), doi:10.1016/j.anthro.2008.04.008 + Models ANTHRO-2295; No of Pages 34 2 A. Dambricourt Malassé / L’anthropologie xxx (2008) xxx–xxx Abstract During the years 1996 and 1997, a team of the Laboratory of Prehistory, National Museum of Natural History, Paris, and of the Departments of Archaeology, Karachi and Peshawar University, Pakistan, leads the first prehistoric field investigation in the District of Chitral, Hindu Kush, close to the Wakhan Corridor (the Amu Daria course in the Pamir). Problematics are the origins and the becoming of the Epipaleolithic/ Neolithic hunters-gatherers known in the Pamir Plateau and the Gissar Range, the lithics tradition of which share common roots with the Sub-Himalayan Soanian tradition (Mode 1). A second field investigation has been conduced in the North West India, where Soan developed from Early Pleistocene, in the Frontal Range of the Siwaliks and Himachal Pradesh during the years 2003, 2005 and 2006 in cooperation with the Department of Archaeology and Museums of Punjab, India. New discoveries in both countries support new hypothesis for the understanding of human evolution in Asia and Homo sapiens origins. # 2008 Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. Mots clés : Hindou Kouch ; Inde ; Asie centrale ; Pamir ; Haute Asie ; Punjab ; Plio-Pléistocène ; Holocène ; Soanien ; Épipaléolithique ; Homo erectus ; Homo sapiens Keywords: Hindu Kush; India; Central Asia; Pamir; Punjab; High Asia; Plio-Pleistocene; Holocene; Soanian; Epipaleolithic; Homo erectus; Homo sapiens 1. Introduction Dans l’une de ses synthèses majeures, le préhistorien tadjik Vadim Ranov (1972) concluait : « Grâce à nos travaux (1956–1960), c’est au Pamir occidental que les étapes du peuplement de régions aussi inhospitalières pour l’homme ont été le mieux étudiées (. . .). Les hautes montagnes de l’Asie centrale sont entourées de tous côtés par des pays où l’occupation paléolithique est attestée. Les sites de l’Ordos, des nouveaux gisements de Mongolie, de l’Alashan, du Se Tchouen et surtout de l’Inde nous indiquent des voies de pénétration possibles vers les hauts plateaux du Thibet et les massifs montagneux du Kouen-Lun. L’Himalaya et l’Indou Kouch peuvent avoir été peuplés par le Sud. Ils correspondent aux deux premières zones que nous avons définies. Il semble que la zone alpine, entaillée de profondes vallées ne soient finalement pratiquement pas explorée ». Ces zones inexplorées correspondent aux écosystèmes les plus élevés classés comme zone 4 par Vadim Ranov, ce sont les hauts massifs et hautes vallées de l’Hindou Kouch. En 1995, une équipe du laboratoire de Préhistoire du Muséum national d’histoire naturelle s’est engagée dans l’étude du peuplement préhistorique et protohistorique de cette région encore inexplorée de l’Asie centrale. L’origine de cette recherche remonte à la découverte de pétroglyphes observés dans les hauts massifs de l’Hindou Kouch en 1988, par un linguiste, Erik L’Homme (1999) et un naturaliste attaché au laboratoire des Reptiles et Amphibiens du Muséum, Jorge Magraner (Dambricourt Malassé et Gaillard, 2002). Ces pétroglyphes se situent à près de 4000 m d’altitude, dans le haut massif de la Shah Jinali (« plateau noir » en khowar), dans la province des Frontières Nord-Ouest du Pakistan au nord du district de Chitral (Fig. 1). Ces chaînes bordent le couloir du Wakhan, le cours supérieur de l’Amu Daria, un diverticule de l’Afghanistan séparant le Pakistan du Tadjikistan. Ces régions les plus septentrionales de l’Hindou Kouch étaient encore vierges de prospection. La voie d’accès naturelle est la vallée de la Kunar en Afghanistan, un affluent de la rivière Kaboul qui rejoint l’Indus à l’est de Peshawar au Pakistan. En remontant vers le nord-est, la Kunar se Pour citer cet article : Dambricourt Malassé, A., Le peuplement humain en Eurasie : l’Asie centrale montagneuse et les piémonts sous-himalayens du Plio-Pléistocène à l’Holocène, origines, évolution humaine et migrations, L’Anthropologie (2008), doi:10.1016/j.anthro.2008.04.008 + Models ANTHRO-2295; No of Pages 34 A. Dambricourt Malassé / L’anthropologie xxx (2008) xxx–xxx 3 Fig. 1. Localisation du district de Chitral (Hindou Kouch, Pakistan). Fig. 1. Localisation of Chitral District (Hindu Kush, Pakistan). retrouve au Pakistan et prend le nom de Chitral, puis elle devient la Yarkhun dans son lit supérieur où elle se rapproche des hauts massifs de la Shah Jinali, ainsi que du Pamir. La puissante rivière glaciaire Chitral s’inscrit donc dans le réseau des grandes rivières qui alimentent l’Indus, lequel creuse son lit dans l’épais plateau lœssique du Potwar après avoir traversé les Siwaliks, les piémonts himalayens riches en faunes continentales miocènes. Au nord de la Shah Jinali s’étendent les hauts plateaux du Pamir et au-delà, les chaînes kirghizes de l’Alaï et du Tien Shan (Fig. 2), de vastes territoires montagneux explorés depuis la fin des années 1950 par Vadim Ranov. Les campagnes de prospections ont inventorié de nombreux pétroglyphes découverts entre 3000 et 3300 m d’altitude dans le Badakhshan, à Ljangar-Kisht, une région de l’Hindou Kouch proche de la Shah Jinali (Ranov, 1960), ainsi qu’à 3500 m dans un ravin situé à Vybist-Dara (Ranov, 1976). Les scènes de ces trois localités ainsi que leurs patines sont comparables, elles reprennent des thèmes similaires dont les plus anciennes sont rapportées à l’âge du bronze. Vadim Ranov découvrit également dans les gorges de Kurteke à 4200 m d’altitude des peintures rupestres sur les parois d’une cavité, située à une quarantaine de kilomètres au sudouest de Murghab, dans le Pamir, la grotte Shakhti (Ranov, 1961). Ces fresques seraient l’œuvre de chasseurs mésolithiques, voire du début du Néolithique (Gupta, 1979). Les thèmes sont des scènes de chasse illustrant de grands mammifères tels que des ours ou des yacks blessés par des flèches (Bar Yosef et al., 1984). Les quelques pétroglyphes de la Shah Djinali s’ajoutent à ce corpus déjà considérable et d’une grande richesse iconographique. Les scènes représentent en l’occurrence un canidé en présence des bovidés aux contours frustres, tandis qu’ailleurs ce sont des gravures plus élaborées, d’une Pour citer cet article : Dambricourt Malassé, A., Le peuplement humain en Eurasie : l’Asie centrale montagneuse et les piémonts sous-himalayens du Plio-Pléistocène à l’Holocène, origines, évolution humaine et migrations, L’Anthropologie (2008), doi:10.1016/j.anthro.2008.04.008 + Models ANTHRO-2295; No of Pages 34 4 A. Dambricourt Malassé / L’anthropologie xxx (2008) xxx–xxx Fig. 2. Vue satellite de l’Asie centrale, de l’Inde du Nord-Ouest et de la Haute Asie, avec les bassins de l’Amu Daria (dépression Afghano-tadjike, lœss au sud de la chaîne de Gissar), le Pamir (Markansou, Murghab), Chitral (mission 1996– 1997, Hindou Kouch, la haute vallée de la Yarkhun), le Tien Shan, le bassin de l’Indus (Plateau du Potwar, Salt Range, Pabbi Hills, Sohan Valley), l’Inde du Nord-Ouest, (Punjab, Himachal Pradesh et chaîne frontale des Siwaliks mission 2003, 2005–2007). Fig. 2. Satellite view of Central Asia, North Western India and High Asia, Amu Daria (Afghano-tadjike depression, Gissar Range), Pamir (Markansou, Murghab), Chitral (mission 1996–1997, Hindu Kush, Yarkhun Valley), Tien Shan, Indus (Potwar Plateau, Salt Range, Pabbi Hills, Sohan Valley, North Western India (Punjab, Himachal Pradesh, Siwaliks Frontal Range, mission 2003, 2005–2007). facture plus fraîche, figurant des hommes en armes montés sur des chevaux. La présence de ces pétroglyphes, dans un environnement peu accessible et peu fréquenté, suggère que l’on s’intéresse au peuplement humain de ces hauts massifs plutôt qu’aux hautes vallées, en replaçant l’Asie centrale montagneuse dans l’histoire géologique et climatique continentale qui la caractérise. Les pétroglyphes s’observent sur l’ensemble des territoires de l’Asie centrale et de la Haute Asie, depuis les hautes vallées et hauts massifs de l’Hindou Kouch jusqu’aux grandes plaines kazakhes (Francfort, 1986, 1999 ; Francfort et Jacobson, 2004). En 1978, A.H. Dani de l’université Quaid-i-Azam à Islamabad et Karl Jettmar ont inventorié un millier de pétroglyphes dans la haute vallée de l’Indus (Jettmar, 1979, 1989 ; Hallier, 1991). Celle-ci constitue la voie de communication la plus directe entre le sous-continent indien et le bassin du Tarim qui donne accès à la Chine du Nord, à l’Altaï, à la Mongolie et, au-delà, aux grandes plaines de Sibérie. Les hautes vallées sont encaissées mais certains cols ( pass) restent accessibles. Les difficultés de pénétration sont l’altitude à plus de 4000 m, la forte déclivité des pentes et les conditions climatiques selon les glaciations, mais ces contraintes géomorphologiques et physiologiques n’ont jamais empêché les êtres humains non seulement de s’y aventurer, mais également de s’y implanter, en petit nombre, chasseurs-cueilleurs ou pasteurs-nomades. Vadim Ranov subdivisa donc la Haute Asie en quatre zones géographiques ; les plaines, les vallées de moyennes montagnes, la zone de relief alpin (par exemple la gorge Darya où fut Pour citer cet article : Dambricourt Malassé, A., Le peuplement humain en Eurasie : l’Asie centrale montagneuse et les piémonts sous-himalayens du Plio-Pléistocène à l’Holocène, origines, évolution humaine et migrations, L’Anthropologie (2008), doi:10.1016/j.anthro.2008.04.008 + Models ANTHRO-2295; No of Pages 34 A. Dambricourt Malassé / L’anthropologie xxx (2008) xxx–xxx 5 découverte la grotte de Teshik Tash [Zautolosh] dans la chaîne de Gissar [Baisun Tau] à 1500 m d’altitude) et les hautes vallées « vallées ‘‘proluvio-alluviales’’ entre les montagnes du Pamir et les syrtes du Tien-Chan. Avec le Thibet, c’est la zone d’occupation humaine la plus élevée ». On doit également à Gupta (1979) l’ouvrage qui fut longtemps la référence sur l’étude des relations entre l’Asie centrale et l’Inde du Nord-Ouest, Archaeology of Soviet Central Asia and the Indian Bordelands. L’auteur développe en détail les différentes traditions culturelles. Particulièrement exhaustif et sans équivalent depuis 30 ans, nous complèterons cette synthèse des principales découvertes acquises depuis, afin de mieux situer les résultats des campagnes de prospections poursuivies dans le Chitral entre 1996 et 1997, puis dans le Punjab entre 2003 et 2007. L’intérêt de ces recherches demeure le même, quel que soit le regard porté sur la problématique sous-continentale, qu’il s’agisse de considérer la Haute Asie comme une région géographique particulièrement étendue, traversée des voies de pénétration depuis la grande plaine indo-gangétique, ou bien, comme une immense biozone malgré tout habitable, et reconnaissable à la durée des implantations traditionnelles depuis le début du Pléistocène inférieur, fluctuant entre ses piémonts et ses hauts plateaux, au gré de l’extension des glaciers dont l’influence est capitale. De récentes recherches consacrées aux glaciers de Nanga Parbat, situés au nord-est du Pakistan, ont permis d’identifier les périodes de leur extension maximale et d’observer des asynchronismes avec les phases glaciaires arctiques (William et al., 2000 ; Kuhle, 2001, 2005). Si l’Asie centrale montagneuse fait figure d’un troisième pôle glaciaire, elle ne s’en situe pas moins à une latitude équivalente au nord du Maroc, ce qui en fait une région de l’Eurasie tout à fait singulière en période interglaciaire. Le Nanga Parbat est l’un des huit plus hauts sommets de la chaîne himalayenne, il n’existe pas de dénivellation aussi importante ailleurs dans le monde ; entre les fonds de vallée et les cimes, la paroi sud s’élève sur 4500 m. Situé à une limite thermique, le massif montagneux enregistre donc les variations climatiques du sud soumis aux moussons subtropicales et celle du nord soumis au climat continental. Les périodes d’intense accumulation de glace correspondent aux phases interglaciaires, car l’Asie du Sud-Ouest est alors dominée par un climat chaud et humide qui se traduit par des fortes moussons se déversant sur les reliefs ; la chute des températures englace ainsi les hautes vallées. En période de moindre pluviosité, l’air étant trop sec, le volume d’eau glacée ne peut être maintenu, de sorte que le front des langues glacières recule. Une phase d’extension s’est produite au Pléistocène supérieur entre 60 000 et 30 000 ans, puis au stade isotopique 2, entre 24 000 et 11 000 ans. On peut donc supposer qu’entre 30 et 24 ka, la faune était davantage représentative d’un environnement clément et qu’il n’était pas difficile pour les tribus de chasseurs-cueilleurs vivant sur les piémonts de communiquer par les cols des hautes vallées et de se déplacer entre les réseaux hydrographiques des bassins supérieurs de l’Indus et de l’Amu Daria. Il se produisit une dernière extension des glaciers dès le début de l’Holocène, vers 9000 ans BP, achevée vers 5500 ans BP. Les études ont montré qu’une baisse brutale de température survenue vers 8400 à 8000 ans BP en serait la cause, suivie d’une augmentation des précipitations hivernales entre 7000 à 5500 ans BP. Un asynchronisme s’observe donc entre les périodes interglaciaires continentales et l’englacement des hautes vallées. Ces asynchronismes constituent des conditions d’isolement rapide et durable pour les populations humaines comme pour les espèces animales et végétales, qui contribuent à la compréhension de leur évolution biologique et comportementale. Or dès le Mésolithique, un petit nombre d’entre elles occupaient déjà les hautes vallées ainsi que les hauts plateaux du Pamir, laissant des sols d’occupation caractéristiques d’une tradition de chasseurscueilleurs se rapportant au Mode 1 qui se suit jusqu’à l’arrivée de pasteurs-nomades de l’âge du Pour citer cet article : Dambricourt Malassé, A., Le peuplement humain en Eurasie : l’Asie centrale montagneuse et les piémonts sous-himalayens du Plio-Pléistocène à l’Holocène, origines, évolution humaine et migrations, L’Anthropologie (2008), doi:10.1016/j.anthro.2008.04.008 + Models ANTHRO-2295; No of Pages 34 6 A. Dambricourt Malassé / L’anthropologie xxx (2008) xxx–xxx bronze. Cet isolat géographique coïncide avec la dernière période glaciaire identifiée entre 8400 et 5500 ans BP. Ces asynchronismes climatiques furent très probablement à l’origine de la raréfaction de la circulation entre les hauts plateaux, les hautes vallées et les piémonts, ils favorisèrent les isolements génétiques des populations préhistoriques adaptées aux conditions de vie en altitude. Leur origine et leur évolution biologique restent à découvrir car les restes humains sont rares, quatre squelettes d’adultes et d’enfants découverts au Tadjikistan sur le site montagnard de Tutkaul permettent d’en connaître véritablement l’identité. 2. Les premiers peuplements de l’Asie centrale et de la Haute Asie montagneuses Les traces d’occupation humaine en altitude datées du Pléistocène sont très rares. Certains sites pamiriens dans la région de Murghab et de Karasu sont associés à des formations pléistocènes (Ranov et Sidorovo, 1979) ; elles sont également attestées dans le Tien Shan à 2000 m par quelques industries sur galets découvertes en contexte géologique (On Archa, Kirghizstan). Ces artéfacts forment un assemblage rapporté au Paléolithique inférieur composé de galets aménagés, d’éclats et de très rares bifaces (de longs galets sont parfois considérés comme des nucléus bifaciaux de grande taille avec une surface corticale). Ce type d’assemblage s’observe également au Kazakhstan, à Borykazgan au pied des collines de Karatau (Little Karatau). Cette industrie peu différenciée, des chopper-chopping tools, flaketools, amorphous cores (Gupta, 1979), est considérée comme la plus ancienne d’Asie centrale, datée entre 900 et 800 ka (Ranov, 1989). Les découvertes favorables à un peuplement humain perceptible dès la fin du Pliocène se situent dans le Potwar, le « coin » au nord-ouest de la péninsule indienne où les deux plaques indiennes et eurasiennes s’affrontent le plus activement depuis 50 millions d’années (Fig. 2). La rareté des sites pléistocènes en Haute Asie montagneuse ne signifie donc pas une absence de peuplement au Pléistocène inférieur ; cette dynamique a certainement été très lente, les traces d’occupation ont aussi bien pu disparaître sous l’effet de la double érosion due à la surrection des chaînes et aux langues glaciaires. Au début du Pléistocène, les piémonts himalayens formaient des collines de faible altitude (500 m) ; en deux millions d’années, les paysages, les reliefs et la faune se sont considérablement modifiés. La surrection himalayenne a non seulement surélevé les piémonts, elle a également provoqué la formation des plaines colluviales sur de très grandes surfaces, recouvrant les prairies et les mares et provoquant ainsi l’extinction ou la migration de nombreux troupeaux (Gaur, 1987). Ainsi, les voies de pénétration du sous-continent indien vers la Haute Asie ou la Chine occidentale étaient moins accidentées qu’à la fin du Pléistocène. À la suite de l’orogenèse, les piémonts de l’Asie centrale se couvrent de lœss au Tien Shan ainsi que dans les dépressions du Ferghana et de l’Amu Daria, au sud de l’Hindou Kouch et du Cachemire bordés par le plateau du Potwar (Dodonov, 1991). Les plus anciens artéfacts ont été découverts dans les ravinements de ces lœss, dès 1935, dans les anciennes terrasses de la rivière Soan (actuel Pakistan) et plus récemment à Riwat, une localité située au sud d’Islamabad où quelques éclats en quartzite ont été relevés en contexte stratigraphique et datés de 1,9 Ma (Dennell et al., 1989 ; Rendell et al., 1987, 1989 ; Larick et Ciochon, 1996). Jusqu’à cette découverte, les plus anciennes industries étaient constituées de bifaces, d’une part, et des galets aménagés et éclats roulés, d’autre part, qualifiés de Soanien (Gaillard et Mohapatra, 1988 ; Gaillard, 1995, 1996). Le Soanien est caractéristique des terrasses fluviatiles de l’Inde du Nord-Ouest, qu’il s’agisse des piémonts ou de la grande plaine du Punjab. Son origine est encore mal comprise d’autant que cette tradition s’est maintenue jusqu’à l’Holocène (Dambricourt Malassé, 2008 ; Gaillard et al., en préparation), tandis que l’Acheuléen Pour citer cet article : Dambricourt Malassé, A., Le peuplement humain en Eurasie : l’Asie centrale montagneuse et les piémonts sous-himalayens du Plio-Pléistocène à l’Holocène, origines, évolution humaine et migrations, L’Anthropologie (2008), doi:10.1016/j.anthro.2008.04.008 + Models ANTHRO-2295; No of Pages 34 A. Dambricourt Malassé / L’anthropologie xxx (2008) xxx–xxx 7 y est rare et n’a pas duré. Il n’est donc pas impossible que l’industrie sur galet soit la plus ancienne comme l’attesteraient des artéfacts récoltés de l’autre côté de la frontière au Pakistan. Au nord de l’Hindou Kouch, les lœss ont formé les piémonts de la dépression Afghano-tadjike où ceux-ci peuvent atteindre une puissance de deux cents mètres de hauteur. Les plus anciens paléosols sont datés de deux millions d’années, mais les premières industries connues sont plus tardives. Découvertes à Kouldoura, elles se suivent selon une succession de paléosols datés de 850–800 à 200 ka. Les artéfacts sont des galets aménagés majoritairement dans des roches éruptives, les bifaces y sont absents (Ranov, 1993). Les industries du Pléistocène moyen s’observent au site de Kouldoura, certaines d’entre elles sont la continuité du Paléolithique inférieur comme à Karataou, daté de 250 ka, où certains éléments se rapprochent du Soanien, montrant une grande ressemblance avec les artéfacts des régions lœssiques de la Chine. « L’industrie de la culture de Karatau se caractérise par une technique de taille des galets (non laminaires) et par une typologie propre aux cultures des galets en Asie centrale, en Chine du Nord et en Asie du Sud-Est » (Vinogradov et Ranov, 1988). Les conclusions de Gupta (1979) se sont orientées vers une origine indienne en référence aux artéfacts découverts sur les anciennes terrasses piémontaises de la Beas et la Sutlej situées dans l’Himachal Pradesh (nord-ouest de l’Inde) : « It is probable that the Soan culture, originating in the Beas-Sutlej basin moved westward in the Soan Region, crossed the Himalaya and then reached the Pamir-Alai system of mountains at a very early stage, somewhere during the uppermost Middle Pleistocene period ». Cette hypothèse peut se défendre, compte tenu de l’ancienneté de la présence humaine dans le bassin supérieur de l’Indus et à la condition de conserver le paradigme des origines africaines de la lignée humaine, alors que de nouveaux éléments l’ont fragilisé depuis la découverte des quatre crânes de Dmanissi datés de 1,77 Ma définis comme Homo georgicus, anatomiquement proches d’Homo ergaster (de Lumley et al., 2004). Toutefois, l’ensemble des fossiles illustrant la plus vieille espèce du genre Homo montre une telle dispersion géographique entre l’Asie du Sud (Modjokerto), l’Afrique de l’Est et l’Eurasie, alliée à une telle diversité anatomique d’un même patron craniofacial (Spoor et al., 2007), qu’il est devenu nécessaire de repousser l’âge géologique de l’apparition de la lignée humaine à 3 Ma (Boëda, 2005). La très grande ancienneté du genre est confortée par celle d’artéfacts récoltés au nord du Rift israélien à Yiron avec quelques éclats plus vieux de 2,4 Ma, ainsi qu’en France à SaintElbe avec une industrie datée entre 2,4 et 2,2 Ma, de même qu’en Afrique, dans la vallée de l’Omo (2,5 Ma) et à Kada Gona et Ounda Gona (2,6–2,5 Ma). Pour autant, il conviendrait de se faire une représentation des origines de l’homme cohérente avec ses origines animales, dans le sens où les premières populations adoptaient le mode de vie des grands anthropoïdes ; l’invention de la taille des galets pour la production d’éclats a, de notre point de vue, été plus tardive que l’émergence biologique du genre Homo. La recherche des plus vieux fossiles humains peut se fonder sur d’autres arguments, comme la compréhension des processus à l’origine de leur émergence. En Asie orientale, la présence humaine s’observerait en Chine vers 2 à 2,4 Ma selon l’étude d’une faune associée à de l’industrie lithique découverte dans la grotte de Renzidong, pour laquelle un quart des restes appartient à des espèces pliocènes (Jin et al., 2000 ; Huang et Zhang, 2007). Plusieurs localités du bassin lœssique de Nihewan ont également livré des sols d’occupation humaine dont la plus ancienne date de 1,6 Ma (Zhu et al., 2004). À ces sites s’ajoute la grotte de Longgupo (Wanpo et al., 1995) si les âges de 1,4 à 1,8 Ma se confirment pour les artéfacts et la faune (Boëda, 2005). Un fragment de corps mandibulaire gauche comprenant une Pour citer cet article : Dambricourt Malassé, A., Le peuplement humain en Eurasie : l’Asie centrale montagneuse et les piémonts sous-himalayens du Plio-Pléistocène à l’Holocène, origines, évolution humaine et migrations, L’Anthropologie (2008), doi:10.1016/j.anthro.2008.04.008 + Models ANTHRO-2295; No of Pages 34 8 A. Dambricourt Malassé / L’anthropologie xxx (2008) xxx–xxx prémolaire et deux molaires avait été attribué à un hominien, mais il s’est avéré appartenir à une espèce de grand anthropoïde asiatique proche de Lufengpithecus, tandis qu’une incisive serait celle d’un homme moderne (Etler et Guoxing, 1998 ; Etler et al., 2001 ; Wu, 2002). L’origine du peuplement de l’Asie centrale peut donc aussi bien provenir du sous-continent indien par le sud, que de l’Asie orientale, selon que la lignée humaine se sera dégagée des espèces de grands anthropoïdes africains ou asiatiques. En effet, le modèle d’une parenté avec les Australopithécinés n’a jamais véritablement emporté le consensus depuis les expertises du paléontologue Pierre Teilhard de Chardin pour le compte de la Wenner-Gren Foundation. Cette dichotomie est confortée par l’étude du squelette podal (Deloison, 2004) et soutenue, par ailleurs, par la découverte du type des mutations génétiques à l’origine des deux lignées. Dans les deux cas, elles affectent les mêmes gènes précoces du développement embryonnaire commun aux espèces asiatiques et africaines de grands anthropoïdes, sans lien causal avec une adaptation nécessaire à l’extension de la savane (Dambricourt Malassé, 1988, 2006 ; Dambricourt Malassé et al., 1998 ; Chaline et al., 1996, 1999, 2000). Le bassin de l’Indus, voire celui du Gange qu’il rejoint à proximité de Chandigarh, sera vu différemment selon l’une ou l’autre des hypothèses, celle d’une origine africaine, ou celle d’une parenté avec les grands anthropoïdes miocènes découverts dans les piémonts himalayens et les karts de la province du Yunnan en Chine. Dans tous les cas de figure, ces grands réseaux hydrographiques sont des voies de communication entre la Haute Asie, l’Asie du Sud et du SudEst et la plaque continentale arabo-africaine. Les eaux glaciaires himalayennes qui alimentent l’Indus se jettent dans l’océan Indien sans qu’aucune barrière naturelle ne vienne dévier leurs cours, à l’exception de la Sutlej (Himachal Pradesh) suite à la récente formation d’une petite chaîne frontale dans la grande plaine du Punjab. Le delta de l’Indus, géographiquement proche du littoral de la péninsule arabique, constitue ainsi la plus ancienne voie de communication entre l’Asie continentale et la corne africaine. Si les populations porteuses de la tradition soanienne ont migré vers l’Asie centrale montagneuse au début du Pléistocène inférieur, et si aucune civilisation véritablement acheuléenne ne s’y observe avant le Pléistocène moyen, le Soanien au sens large (Mode 1, quelle que soit la taille des galets et des éclats) peut être considéré comme la plus ancienne technologie lithique parvenue aux piémonts de l’Hindou Kouch et de l’Himalaya. Sa pérennisation dans l’Inde du Nord-Ouest ainsi qu’en Asie centrale montagneuse, résulterait alors de l’implantation des populations adaptées à ces biotopes montagneux et leurs périphéries immédiates. Les populations héritières de la tradition acheuléenne, provenant du sous-continent, seraient parvenues jusqu’aux piémonts sans que l’on sache encore expliquer l’origine de leur disparition, alors que le Soanien semble perdurer jusqu’à l’Holocène (Dambricourt Malassé, 2007 ; Gaillard et Dambricourt Malassé, 2008 ; Gaillard et al., en préparation). 3. Les données paléoanthropologiques dans leur contexte archéologique Les plus anciens fossiles humains connus en Asie centrale ont été découverts au Kirghizstan dans la grotte de Sel’-Ungur (Ferghana), située à 2000 m d’altitude dans la vallée de Sokh (Davis et Ranov, 1999). Ces restes sont constitués des dents et de quelques éléments du squelette postcrânien attribués à Homo erectus (Islamov, 1990), associés aux premières industries acheuléennes clairement identifiées. Le site daterait de 650 à 600 ka. L’Acheuléen apparaît également à Yangadazha et Koulboulak dans la région de Tachkent. De l’avis des préhistoriens, ces assemblages correspondent à une migration depuis les régions du sud de la mer Caspienne (Iran). L’origine phylétique de ces fossiles humains serait donc à rechercher vers le Proche-Orient. Pour citer cet article : Dambricourt Malassé, A., Le peuplement humain en Eurasie : l’Asie centrale montagneuse et les piémonts sous-himalayens du Plio-Pléistocène à l’Holocène, origines, évolution humaine et migrations, L’Anthropologie (2008), doi:10.1016/j.anthro.2008.04.008 + Models ANTHRO-2295; No of Pages 34 A. Dambricourt Malassé / L’anthropologie xxx (2008) xxx–xxx 9 Les fossiles humains deviennent plus fréquents à partir du Pléistocène supérieur. En Ouzbékistan, un fragment d’épiphyse fémorale a été découvert dans la grotte d’Aman Kutan (sud de la région de Samarcande) en association avec une industrie moustérienne datée de 100 à 40 ka (Ranov et al., 1979). Il s’agirait d’un Néandertalien. Mais c’est surtout le site de Teshik Tash qui a livré le plus de données paléoanthropologiques avec le crâne complet et quelques éléments du squelette postcrânien d’un adolescent néandertalien. La datation reste cependant imprécise. Les espèces animales et la végétation trouvées en association dans le sol d’habitat sont récentes et s’observent encore dans l’environnement immédiat de la grotte et à la même altitude : cheval, daim, ours, léopard, ainsi que différentes espèces de rongeurs et d’oiseaux. Les préhistoriens ont conclu que le site était encore occupé à la phase la plus tardive du Pléistocène supérieur : « It may suggest that the Middle Palaeolithic people lived here during the interpluvial or interglacial times of the last few stages of the Pleistocene period » (Gupta, 1979). La disparition des dernières populations néandertaliennes eurasiennes serait bien plus tardive en Asie qu’en Europe et au Proche-Orient, à l’instar des dernières lignées asiatiques non sapiens représentées par les fossiles d’Homo floresiensis en Asie du Sud-Est. Des restes humains fossiles ont été découverts plus récemment dans la grotte Obi-Rahmat au nord-est de Tachkent, ainsi que dans la grotte d’Anghilak (Glantz et al., 2003). Les fossiles d’Obi-Rahmat, datés entre 90 et 40 ka, correspondent à un minimum de deux enfants attribuables à Homo sapiens. Le faciès de l’industrie lithique fait l’objet de discussion, son appartenance au groupe Levallois-Moustérien ne serait pas probante, il pourrait s’agir d’un faciès MoustérienSoanien, d’origine locale en continuité avec les populations du Paléolithique moyen (Gupta, 1979). Le faciès soanien dit aussi « asiatique » s’observe au site de Kara Bura. Le Paléolithique supérieur est rare en Asie centrale (Vishnyatsky, 1999), deux sites de plein air sont connus en deux localités majeures, au Tadjikistan avec le site de Shugnou à 2000 m d’altitude sur une ancienne terrasse de la rivière Iakhsou dans la région de Khovaling et en Ouzbekistan à Samarcande. Les sols d’occupation humaine de Shugnou s’étagent entre 20 et 10,7 ka, l’industrie correspondrait à une évolution locale du Moustérien marquée par l’apparition du débitage laminaire. En revanche, l’industrie lithique de Samarcande, qui se situerait entre 15 ka et un maximum de 20 ka (Gupta, 1979), a conservé la tradition du galet aménagé (Mode 1) qui se retrouve en Sibérie, en Mongolie et Inde du Nord-Ouest. Ces deux localités n’ont pas livré de fossiles humains. En revanche, en Afghanistan, sur les versants nord de l’Hindou Kouch qui bordent la dépression Afghano-tadjike au Badakhshan, la grotte de Darri-i-kur, proche du village de Baba Darwesh, a livré une industrie moustérienne ainsi qu’un fragment de temporal comprenant le rocher. Celui-ci est daté entre 50 et 30 ka et correspond à un Homo sapiens caractérisé par une hypertrophie vasculaire significative d’une adaptation à la vie en altitude (Angel, 1972 ; Gaillard et Dambricourt Malassé, 2008). Dès le début de l’Holocène, les sites se multiplient en haute altitude et perdurent jusqu’à l’apparition des populations porteuses de l’âge du bronze. Le Mésolithique et le Néolithique ont été particulièrement étudiés dans les hauts plateaux du Pamir, ainsi que dans la chaîne de Gissar (versant nord du bassin supérieur de l’Amu Daria) où depuis les premières recherches engagées dans les années 1960, 300 sites ont été répertoriés entre 800 et 1700 m d’altitude. Il en ressort une unité historique et culturelle étroitement liée au contexte géomorphologique, basée sur la conservation de la tradition du galet aménagé (Mode 1). Au Pamir, parmi les sites les mieux étudiés, figure Osh Khona (Markansou) découvert dans une dépression des hauts plateaux à 4200 m d’altitude, proche de la limite frontalière avec le Kirghizstan. L’occupation humaine y est observée depuis 9500 ans BP pendant deux millénaires Pour citer cet article : Dambricourt Malassé, A., Le peuplement humain en Eurasie : l’Asie centrale montagneuse et les piémonts sous-himalayens du Plio-Pléistocène à l’Holocène, origines, évolution humaine et migrations, L’Anthropologie (2008), doi:10.1016/j.anthro.2008.04.008 + Models ANTHRO-2295; No of Pages 34 10 A. Dambricourt Malassé / L’anthropologie xxx (2008) xxx–xxx mais de façon discontinue. Il n’apparaît aucune trace d’agriculture, ni trace probante de domestication, la mauvaise conservation des restes des capridés, au milieu d’une faune sauvage, n’autorise pas la détermination précise des espèces (Ranov et Sidorovo, 1979). Dans la chaîne de Gissar qui prolonge le Pamir au nord de l’Amu Daria (Fig. 2), la localité tadjike de Tutkaul située à près de 2000 m fut occupée, elle aussi, depuis la période mésolithique et se développa pendant toute la période néolithique, en quatre sites différents. Le second horizon daté entre 10 020 ! 170 ans BP et 9100 ! 140 ans BP a livré quatre squelettes d’Homo sapiens comprenant deux adultes et deux enfants (Kiyatkina et Ranov, 1971). Un crâne néolithique est également connu dans le premier horizon du site Sai-Saied. Enfin, de nouveau à Darra-i-Kur, sur les reliefs bordant le sud de la dépression occupée par l’Amu Daria, un horizon plus tardif, daté de 4000 ans BP a livré trois sépultures de chèvres domestiques, dont une contenant des fragments de deux ou trois crânes d’enfant, l’industrie rapportée à cet horizon reste proche des traditions sibériennes ou du nord-ouest de l’Inde. Les deux localités d’Osh Khona (Markansou) et de Tutkaul illustrent un ensemble de sites caractéristiques d’une économie de prédation et de cueillette où n’apparaissent ni poterie, ni aucun type d’industrie témoignant d’un abandon de la chasse. On constate au contraire une production intensive d’éclats à partir des galets aménagés trouvés le plus souvent à l’état d’ébauche. Le support des industries de la période néolithique de Gissar est très varié : pierres siliceuses à gros grain, roches magmatiques, blocs de calcaire siliceux, schistes, silex mais de mauvaise qualité. Les sites sont proches d’affleurements d’anciennes alluvions et ont été choisis en fonction de l’approvisionnement, le but étant une production importante d’éclats. En effet, tous ne sont pas retouchés à l’inverse des rares silex. De rares microlithes géométriques ont été récoltés aux différents horizons de Tutkaul et ne permettent pas de conclure à un mode de vie passé maître de la culture des graminées. La faune et les assemblages lithiques montrent que les populations implantées dans les hautes vallées et les hauts plateaux de l’Asie centrale étaient des chasseurs-cueilleurs et non des agriculteurs ou des éleveurs. Le plus intéressant fut de constater l’originalité des industries lithiques avec la fréquence élevée des galets taillés et des éclats de type Soanien et la pauvreté en silex comme en débitage laminaire. Cette association est plus proche des industries du Pléistocène inférieur de Mode 1 récoltées sur les terrasses du nord-ouest du sous-continent indien que de toute autre tradition plus récente (Acheuléen, Moustérien, Paléolithique supérieur laminaire). L’origine culturelle et anthropologique de ces chasseurs-cueilleurs néolithiques reste méconnue, la thèse défendue par Vadim Ranov est celle d’un enracinement géographique. Les études comparatives ont naturellement pris en considération la possibilité d’influences technologiques provoquées par l’arrivée de différents peuplements successifs (Masson, 1988 ; Ranov et al., 1995) et elles se poursuivent (Brunet, 2002). Toutefois après 40 années de recherche, Vadim Ranov et son école ont conclu qu’un Épipaléolithique autochtone s’est maintenu jusqu’à l’âge du bronze, ce ne sont donc pas les Homo sapiens d’Europe et du ProcheOrient qui ont peuplé les hauts plateaux du Pamir et les versants nord de l’Hindou Kouch. Les moyennes et hautes vallées du Tadjikistan correspondent aux limites de l’aire d’extension de chasseurs-cueilleurs adaptés aux milieux montagnards, que ce soient les vallées étroites et encaissées couvertes de forêts giboyeuses, les hauts plateaux ou leurs piémonts. Ces populations forment ce que Ranov a choisi d’appeler les « civilisations de Gissar » (Guissar ou encore Hissar) et de Markansou : « Dans l’ensemble, la technique qui domine au Pamir est proche de celle des industries à galets aménagés, analogues à la Civilisation de Guissar » (Ranov, 1972). Il les considère comme des implantations des tribus d’origine asiatique, se déplaçant aussi bien dans les piémonts himalayens que dans les hautes vallées du Tien Shan et Pour citer cet article : Dambricourt Malassé, A., Le peuplement humain en Eurasie : l’Asie centrale montagneuse et les piémonts sous-himalayens du Plio-Pléistocène à l’Holocène, origines, évolution humaine et migrations, L’Anthropologie (2008), doi:10.1016/j.anthro.2008.04.008 + Models ANTHRO-2295; No of Pages 34 A. Dambricourt Malassé / L’anthropologie xxx (2008) xxx–xxx 11 de l’Alaï, voire dans l’Altaï et la Mongolie (Gupta, 1979). Il conclut ainsi : « La ressemblance entre les civilisations de Karataou et Hissar est fondée sur le large développement de la taille du galet, et le caractère identique des outils en galets (choppers, choppings), de la typologie instable des nucléi, et des outils. Il existe des données qui permettent d’affirmer que l’industrie du galet ne disparaît même pas au Paléolithique moyen ni au Mésolithique, existant soit comme partie intégrale des nouvelles cultures à industries lamellaires, soit indépendamment, comme ligne parallèle de développement (. . .). En partant des dernières découvertes d’industries sur galets du Paléolithique inférieur au Tadjikistan (Karatoau, Lakhouti I), on peut parler de ses origines autochtones locales » (Ranov, 1972). L’origine des chasseurs-cueilleurs de Markansou, de Gissar et en particulier ceux de Tutkaul connus par les quatre squelettes, ainsi que les motifs de leur implantation à des altitudes aussi élevées, constituent l’une des questions les plus intéressantes du peuplement humain d’Asie centrale. De mêmes, les causes de leur disparition du Pamir et des chaînes de Gissar demeurent non résolues (Amosova et al., 1993). Si la néolithisation le long des oasis de l’Amu Daria apporte quelques explications à des traces d’influence locales, l’implantation de petites exploitations ne semble pas avoir dépassé les moyennes vallées. Aujourd’hui encore, ce sont des familles de pasteurs pratiquant la transhumance qui se rencontrent dans ces hauts massifs ; l’explication est donc ailleurs. Quand on compare l’actuelle désertification des hauts plateaux en lieu et place du site de Markansou, c’est d’avantage vers un brutal déséquilibre écologique que se trouveront des éléments de réponse, lié aux fluctuations glaciaires holocènes. L’âge du bronze marque une nouvelle phase de pénétration facilitée par la régression des glaciers, mais il est peu probable que dans une telle immensité l’arrivée de quelques nouvelles tribus de pasteurs-nomades, comme les Sakas en provenance de la Haute Asie, ait provoqué l’abandon des habitations de chasseurs-cueilleurs. Il est plus vraisemblable de considérer les effets du réchauffement climatique modifiant non seulement la géographie des paysages, mais aussi l’étagement des niches écologiques. Les espaces giboyeux, comme les forêts primaires qui couvrent encore les pentes raides du Chitral, gagnent les massifs de l’Hindou Kouch et de l’Himalaya, tandis que la plaine de l’Amu Daria devient l’une des zones les plus désertiques de l’Asie centrale. Les populations ont donc très probablement migré vers le sud du Pamir, à partir de 5500 ans BP, notamment vers la vallée de la Yarkhun ; l’occupation des sites épipaléolithiques et néolithiques par des populations de l’âge du bronze peut dès lors aussi bien refléter des convergences de choix d’implantation (exposition, proximité de cours d’eau), ces localités étant abandonnées. La perspective de découvrir des haltes de chasse ou des sites contemporains du Chalcolithique, voire de l’âge du bronze, dans la vallée de Chitral et de la Yarkhun, était donc fondée. Les hautes vallées de Gissar ainsi que les hauts plateaux du Pamir ont été peuplés par les derniers chasseurs-cueilleurs montagnards épipaléolithiques/néolithiques de l’Asie centrale. L’originalité de ces populations tient à la parenté asiatique de leur technique de débitage qui se rapproche des industries lithiques tardives de Chine, de Sibérie, mais aussi de Birmanie et de Thaïlande. Leur origine semble provenir du Soanien découvert en bordure sud de l’Hindou Kouch et de l’extrémité occidentale de la chaîne himalayenne. Rapporté au Pléistocène inférieur et moyen, le Soanien est probablement hérité des plus anciennes techniques de débitage apparues en Inde vers deux millions d’années et visibles, elles aussi, en bordure sud de l’Hindou Kouch. 4. La problématique des paléopeuplements Les tribus de chasseurs-cueilleurs de Gissar et Markansou constituent un thème de recherche paléoanthropologique inexploré. Si la pérennisation d’une technique de débitage remontant au Pour citer cet article : Dambricourt Malassé, A., Le peuplement humain en Eurasie : l’Asie centrale montagneuse et les piémonts sous-himalayens du Plio-Pléistocène à l’Holocène, origines, évolution humaine et migrations, L’Anthropologie (2008), doi:10.1016/j.anthro.2008.04.008 + Models ANTHRO-2295; No of Pages 34 12 A. Dambricourt Malassé / L’anthropologie xxx (2008) xxx–xxx Paléolithique inférieur indien interpelle les préhistoriens, c’est en raison d’une problématique paléoanthropologique qui concerne leur origine géographique, d’une part, et l’origine phylogénétique de leurs ancêtres, d’autre part. L’Hindou Kouch n’est pas une réelle barrière naturelle, ses massifs n’ont plutôt jamais été favorables au développement de l’agriculture sinon dans ses fonds de vallées qui forment d’authentiques oasis, tandis que les pentes d’une importante déclivité permettent essentiellement le pâturage. En revanche, les forêts primaires à plus de 3000 m d’altitude sont giboyeuses et ont aussi bien pu attirer les chasseurs-cueilleurs en période interglaciaire, qu’ils proviennent des piémonts sud de l’Hindou Kouch dès le Pléistocène inférieur, ou du Pamir depuis le réchauffement de l’Holocène. La recherche des origines des chasseurs de Markansou et de Gissar en relation avec des Homo sapiens de l’Inde du Nord-Ouest rejoint ainsi les conclusions de Ranov et de Gupta : « In the Himalayan foothills, the Siwaliks formations, traversed by the Indus system, from Peshawar valley in Pakistan to the Kangra Valley in India, formed the original habitat of the Palaeolithic men in northern India. Located in the low range of the Pamir-Alaï system (the Gissar, Baba Tag (. . .) traversed by the Amu and Syr and their tributaries) the region from southern Kazakhstan to Tajikistan formed the original habitat of Palaeolithic men of Central Asia. Geographically, these two areas are contiguous (. . .). We are now in a position to visualize not only a parallel and similar development of the Palaeolithic cultures in India and Soviet Central Asia, but also their occasional contacts » (Gupta, 1979). Observer ces contacts consistait à organiser des campagnes de prospection dans l’une des régions de l’Hindou Kouch les plus difficiles d’accès, ainsi que dans les piémonts himalayens de l’Himachal Pradesh et les anciennes terrasses des puissantes rivières himalayennes comme la Sutlej (Dambricourt Malassé, 2008). Les missions du laboratoire de Préhistoire du Muséum national d’histoire naturelle seront ainsi les premières à s’engager dans l’étude du peuplement humain aux limites du Pamir et de l’Hindou Kouch en remontant le cours supérieur des rivières dont les eaux glaciaires rejoignent celles de l’Indus (Fig. 2). 5. La mission Hindou Kouch 1996 et 1997 Deux premières missions financées par le ministère des Affaires étrangères se sont déroulées en 1996 et 1997 dans le district de Chitral. Ces régions particulièrement sauvages sont accessibles par des sentiers de chèvres. L’un des objectifs étant la découverte des restes humains en contexte archéologique, la mission consista dans un premier temps à prospecter dans les massifs calcaires du sud du district de Chitral, à hauteur de quelques grottes ou abris (Fig. 3), dans une vallée adjacente à la Yarkhun, la Chitral Gol (Gaillard et al., 2002 ; Gaillard et Dambricourt Malassé, 2002, 2008). Ces grottes sont particulièrement difficiles d’accès, compte tenu de la déclivité des pentes, la découverte d’un sol archéologique aurait nécessité une infrastructure adaptée, toutefois la plus importante d’entre elles fut sondée en raison de l’importance de son remplissage. Il s’agit d’une vaste caverne, dont l’accès est protégé par une haute paroi. Le sondage permit de constater la présence des foyers associés à de la poterie datant des périodes historiques. Il est fort probable que le remplissage contienne également des niveaux mésolithiques ou épipaléolithiques, car quelques outils sur galets en calcaire tendre ont été collectés aux alentours de la grotte. Dans un second temps, les prospections se sont concentrées au nord du district de Chitral sur les anciennes terrasses de la Yarkhun en limite des frontières afghanes et chinoises (Figs. 2 et 4). Plusieurs assemblages de galets aménagés relativement en place furent découverts à 3400 m d’altitude sur un ancien lit de la rivière, notamment au lieu-dit Zesht-Zo-Goush et Lasht Salvalior Pour citer cet article : Dambricourt Malassé, A., Le peuplement humain en Eurasie : l’Asie centrale montagneuse et les piémonts sous-himalayens du Plio-Pléistocène à l’Holocène, origines, évolution humaine et migrations, L’Anthropologie (2008), doi:10.1016/j.anthro.2008.04.008 + Models ANTHRO-2295; No of Pages 34 A. Dambricourt Malassé / L’anthropologie xxx (2008) xxx–xxx 13 Fig. 3. Massif calcaire de Chitral Gol, grande infractuosité rocheuse visible de loin avec une très forte déclivité (cliché A. Dambricourt Malassé). Fig. 3. The large Cave of Chitral Gol (picture A. Dambricourt Malassé). (Fig. 5). Au total quatre sites ont été repérés. La mission de 1997 poursuivit les prospections à des altitudes plus élevées jusqu’à la pass de Boroghol qui permet la communication entre la Yarkhun et le cours supérieur de l’Amu Daria. Quelques artéfacts allochtones ont été récoltés à proximité d’une mare saisonnière et du col ; ils attestent d’un apport exogène incontestable. Les deux missions totalisent six sites répartis le long d’anciennes terrasses de la Yarkhun et de colluvions. Fig. 4. La Yarkhun et le Pamir en arrière plan (cliché A. Dambricourt Malassé). Fig. 4. Yarkhun River and in background, the Pamir mountains (picture A. Dambricourt Malassé). Pour citer cet article : Dambricourt Malassé, A., Le peuplement humain en Eurasie : l’Asie centrale montagneuse et les piémonts sous-himalayens du Plio-Pléistocène à l’Holocène, origines, évolution humaine et migrations, L’Anthropologie (2008), doi:10.1016/j.anthro.2008.04.008 + Models ANTHRO-2295; No of Pages 34 14 A. Dambricourt Malassé / L’anthropologie xxx (2008) xxx–xxx Fig. 5. Industrie de Lasht Savalior – mission 1996 (cliché A. Dambricourt Malassé). Fig. 5. Lasht Savalior artefacts – expedition 1996 (picture A. Dambricourt Malassé). Les localités de Lasht Savalior et Zesht-Zo-Gousht sont les plus riches. Le site de Lasht semble correspondre à une halte de chasse établie sur une ancienne terrasse à 400 m du cours actuel de la Yarkhun et à une quinzaine de mètres au dessus du niveau de la rivière. La terrasse est formée des galets roulés de grande taille, notamment de blocs de gneiss. Les artéfacts sont dispersés sur une surface d’environ 150 m2, fabriqués dans un même type de roche dure métamorphique, l’amphibolite. La typologie des outils se rapproche des artéfacts découverts dans le Cachemire et correspond à des galets choisis pour leur forme, souvent triangulaire et plane, avec un aménagement des bords. Ce sont des choppers. Les éclats sont rares mais cette absence peut s’expliquer par l’enfouissement des pièces plus petites. Une datation indirecte est possible. Les parois rocheuses et les gros blocs des hautes vallées sont patinés d’un brun très sombre que l’on retrouve sous forme de gros blocs roulés dans une des terrasses de la Yarkhun. Cette patine est caractéristique de la dernière phase glaciaire pléistocène. Le démantèlement des blocs patinés remonte à une activation de l’érosion qui entraîna un surcreusement du lit de la Yarkun et la formation de nouvelles terrasses constituées en majorité de ces blocs sombres, elles sont datées de 8000 ans BP. Une nouvelle phase est identifiée vers 5000 ans BP avec la formation de nouvelles terrasses. Les industries lithiques se trouvent en surface sur les terrasses les plus récentes, elles ne seraient donc pas plus anciennes que 5000 ans BP, un âge plus jeune que celui des sites du Pamir et de Gissar. Les deux missions ont donné des résultats concluants, la lacune des connaissances entre les deux grands réseaux hydrographiques de l’Amu Daria et de l’Indus est donc comblée par la découverte d’un type d’industrie lithique caractéristique des hautes vallées himalayennes (Cachemire). Les sites de la Yarkun attestent de la présence des tribus de chasseurs-cueilleurs à l’âge Chalcolithique, alors que ceux-ci ont disparu de Gissar et du Pamir. Ces sols d’occupation confirment la possibilité d’un déplacement des chasseurs de la civilisation de Markansou vers les vallées du sud de l’Hindou Kouch, très probablement à partir de 5500 ans BP après l’épisode glaciaire qui caractérise l’Holocène de l’Asie centrale montagneuse. Pour citer cet article : Dambricourt Malassé, A., Le peuplement humain en Eurasie : l’Asie centrale montagneuse et les piémonts sous-himalayens du Plio-Pléistocène à l’Holocène, origines, évolution humaine et migrations, L’Anthropologie (2008), doi:10.1016/j.anthro.2008.04.008 + Models ANTHRO-2295; No of Pages 34 A. Dambricourt Malassé / L’anthropologie xxx (2008) xxx–xxx 15 6. La mission « Siwaliks », Inde du Nord-Ouest 6.1. Le contexte historique La première expédition engagée dans le Cachemire, le Potwar et les Siwaliks date de 1935. Dirigée par le géologue allemand Helmut de Terra pour le compte de la « Yale Cambridge India Expedition », l’équipe comprenait le géologue et paléontologue français Pierre Teilhard de Chardin, conseiller de la « Geological Survey of China » et un jeune archéologue Thomas Thomson Paterson (de Terra et al., 1934, 1936 ; Teilhard de Chardin, 1935 ; de Terra et Teilhard de Chardin, 1936 ; de Terra et Paterson, 1939). Les géologues prospecteront le Cachemire puis le Potwar où ils découvriront le Soanien. Descendant la plaine fluviale de l’Indus, ils gagnent le Baluchistan récoltant différentes espèces fossiles, puis prospectent la vallée de la Narmada où Teilhard repère les premiers artéfacts et s’attend à trouver des fossiles humains, avant de poursuivre leur prospection jusqu’à Madras. Ils réunissent ainsi de nombreux artéfacts et relèvent plusieurs coupes stratigraphiques qui permirent de dresser un premier aperçu des origines du peuplement humain sur le sous-continent indien. Les prospections les plus prometteuses débutent dans la Salt Range (actuel Pakistan), des collines formant la bordure occidentale du Potwar, faisant face à la grande plaine alluviale de la Jhelum laquelle se prolonge vers le Punjab indien (Fig. 6). Les premiers artéfacts sont prélevés dans des colluvions, ou d’anciennes terrasses de la Soan (Sohan) qui donnera son nom à ce faciès. Une trentaine de pièces en quartzite roulé évoquent le « chelléen » découvert antérieurement à Madras (sud-est de l’Inde), en même temps que des « galets appointés, non roulés, la Sohan Industry. Ma conviction s’affirme que les gens de la Sohan Industry se sont installés sur des graviers contenant déjà les bifaces (peut-être déjà roulés) » (Teilhard de Chardin, 1935). Les Fig. 6. Localisation des sites paléolithiques dans le nord-ouest du sous-continent indien : 1 : rivière Soan (plateau du Potwar) ; 2 : Pabbi Hills ; 3 : Frontal Range et Hoshiarpur ; 4 : Bilaspur (piémonts himalayens) ; 5 : Ropar (cité harappéenne) ; 6 : Jandhian, placés sur la carte de Sankalia (1974). Fig. 6. Localisation of palaeolithic sites in the north-western Indian Peninsule: 1: Sohan River (Potwar Plateau); 2: Pabbi Hills; 3: Frontal Range and Hoshiarpur; 4: Bilsapur (Himalayan Piedmonts); 5: Ropar (harappan city); 6: Jandhian (original map in Sankalia, 1974). Pour citer cet article : Dambricourt Malassé, A., Le peuplement humain en Eurasie : l’Asie centrale montagneuse et les piémonts sous-himalayens du Plio-Pléistocène à l’Holocène, origines, évolution humaine et migrations, L’Anthropologie (2008), doi:10.1016/j.anthro.2008.04.008 + Models ANTHRO-2295; No of Pages 34 16 A. Dambricourt Malassé / L’anthropologie xxx (2008) xxx–xxx relevés des coupes stratigraphiques et la patine des bifaces permettent au préhistorien d’envisager la présence de deux traditions distinctes, l’Acheuléen et le Soanien, mais dans un ordre chronologique inverse de celui attendu : « l’existence d’une industrie plus ancienne (biface) se confirme. Les pièces se trouvent sensiblement à la même place que la Sohan Industry mais jamais dans la base des limons eux-mêmes, uniquement dans le gravier de base, et elles sont d’ordinaire, très roulées » (Teilhard de Chardin, 1935). Dès lors, la problématique du peuplement humain subhimalayen est posée. Explorant la Chine, l’Inde, la Birmanie et l’Indonésie, mais aussi l’Afrique de l’Est, Pierre Teilhard de Chardin est alors le paléontologue de loin le plus expérimenté parmi les préhistoriens de la première moitié du XXe siècle (Dambricourt Malassé, 2004). Cette expérience lui permettra de développer une synthèse sur les origines de l’homme dans une vaste perspective intercontinentale et pluridisciplinaire. En tant que paléontologue de terrain, spécialiste de l’évolution des mammifères, il adoptera pour les origines de l’homme les méthodes de la paléontologie animale et de l’anatomie comparée. Il développera la notion de phylum, distinguant, de cette façon, la diversification géographique – ou « buissonnement » (Sinanthropus, Pithecanthropus) – de l’apparition du morphotype originel (le « verticille » ou la « tige »), départ d’un nouveau buissonnement. Cette notion prendra toute son acuité dans les années 1950 avec la découverte en Afrique du Sud des premiers australopithèques ; considérant qu’ils formaient une lignée à part déjà bien différenciée et appliquant le principe d’une dichotomie buissonnante, Teilhard de Chardin situera l’émergence de l’homme en amont de Paranthropus robustus et d’Australopithecus africanus. Il repoussera l’apparition des deux groupes zoologiques à un âge géologique bien plus ancien que le Pléistocène et localisera géographiquement ce point d’émergence dans le nord de l’Afrique de l’Est, sur la base de nouvelles industries lithiques. Ces déductions ont été confortées en raison des nombreuses missions organisées en Afrique de l’Est ; en revanche, son interprétation de deux lignées distinctes a donc rarement été suivie. Il n’est pas impossible qu’elle fut une appréciation correcte. La découverte des artéfacts du Potwar présageait de la grande ancienneté de l’homme, la datation des niveaux prospectés se précisera 40 ans plus tard lorsqu’en 1979, Ishtiaq Khan, directeur général d’Archéologie et des Musées du gouvernement du Pakistan, reprend l’étude géochronologique dans le cadre d’une coopération poursuivie avec l’université de Cambridge (Allchin, 1995). Les séquences stratigraphiques suivaient jusqu’alors la distinction des quatre glaciations européennes, sans prise en considération des phénomènes tectoniques liés à la surrection de la chaîne himalayenne. La chronostratigraphie nécessita une réactualisation. L’université de Peshawar, en coopération avec Robin Dennell de l’université Sheffield et Helen Rendell, reprend ainsi l’étude du peuplement humain. Les nouvelles prospections de la Soan Valley permettent de découvrir entre 1981 et 1985 les nouveaux artéfacts de Riwat, en deux localités distinctes (Hurcombe, 2004). L’une est un sol daté de 1,9 Ma, la seconde de 45 ka, il s’agit d’un assemblage de nucléus et d’éclats avec un remontage. La plus ancienne des deux localités a livré un petit nombre d’éclats en quartzite typiquement anthropiques (enlèvements corticaux et éclats retouchés) avec un éclat cortical en place. De 1986 à 1990, les recherches se poursuivent sur l’autre rive de la Jelhum, dans les Pabbi Hills, un anticlinal de formations continentales observables sur deux millions d’années (2,5–0,5 Ma) ; 40 000 fossiles seront récoltés ainsi que 350 artéfacts dispersés en surface, correspondant à des nucléus et des éclats (Hurcombe et Dennell, 1992). Une dernière mission est organisée en 1999 (Dennell et al., 2005, 2006). Après le Potwar, les plus anciennes traces d’occupation humaine en Inde se rapportent à une culture acheuléenne découverte à Isampur, dans l’État du Karnataka, où des restes fauniques ont Pour citer cet article : Dambricourt Malassé, A., Le peuplement humain en Eurasie : l’Asie centrale montagneuse et les piémonts sous-himalayens du Plio-Pléistocène à l’Holocène, origines, évolution humaine et migrations, L’Anthropologie (2008), doi:10.1016/j.anthro.2008.04.008 + Models ANTHRO-2295; No of Pages 34 A. Dambricourt Malassé / L’anthropologie xxx (2008) xxx–xxx 17 été datés d’environ un million d’années (Blackwell et al., 2001 ; Paddayya et al., 2002). Les traces d’activités humaines, en revanche, demeurent inconnues sur les berges occidentales de la vallée de l’Indus (Sankalia, 1974). Les recherches se concentrent alors sur les périodes néolithiques et sur la phase de transition avec la civilisation de l’Indus (Harappa, Mohendjo Daro), montrant quelle pouvait être l’étendue des peuplements protohistoriques de l’Indus. Les piémonts tadjiks ont livré en effet les vestiges d’une colonie harappéenne à Shortugaï (Francfort et Pottier, 1978). Depuis la fin du Pliocène, le peuplement humain n’a donc jamais cessé de suivre ce cheminement naturel de l’Indus à l’Amu Daria. La « Yale Cambridge Expedition » a donc permis de définir les grandes lignes du premier peuplement humain connu sur le sous-continent indien. Suite à la partition entre l’Inde et le Pakistan (1947–1948), les prospections s’intensifient dans le Punjab indien. La chronologie du peuplement se révèle complexe en raison des multiples facteurs climatiques et tectoniques qui ont transformé la topologie des paysages et bouleversé les repères chronostratigraphiques. Cette chronologie s’observe sur la base d’une stratigraphie composée de conglomérats observés en discordance sur les derniers niveaux du Pliocène, nommé Pinjore et Tatrot. Dans le Potwar, le plus ancien conglomérat, ou boulder conglomerate, s’observe à partir de deux millions d’années en discordance sur un synclinal dont les formations continentales datent du Tertiaire et du Secondaire. Ce synclinal résulte de la collision du plateau continental indien avec la plaque eurasienne. Ses formations sont particulièrement riches en espèces fossiles, les plus anciennes, donc les plus profondes, se retrouvant émergées dans les piémonts himalayens. C’est dans ce contexte géomorphologique qu’Helmut de Terra, Teilhard de Chardin et Peterson traversant les Siwaliks depuis le Cachemire ont pu recueillir les fossiles de grands anthropoïdes (Ramapithecus, Sivapithecus, 12–15 Ma). Au cours du Quaternaire, les formations continentales de l’Inde péninsulaire ont continué de subir des plissements de terrains, tandis que suite à une intensification de l’orogenèse, d’importants dépôts de colluvions himalayennes ont commencé à recouvrir la pénéplaine, formant des cônes de déjection qui marquent la fin du Siwalik Supérieur (Pléistocène supérieur). Ces anciennes colluvions ont été plissées à leur tour au cours du Pléistocène final, voire au début de l’Holocène, formant la petite chaîne frontale des Siwaliks. La datation des localités archéologiques observées sur ces colluvions est établie sur la base de la succession des terrasses de rivières himalayennes sectionnant les piémonts, la Beas et la Banganga (Sankalia, 1974). Le Soanien apparaît en surface sur des colluvions du Pléistocène inférieur et se retrouve sur des terrasses plus récentes. Les préhistoriens distinguent alors une graduation dans les assemblages : le Early Soanian, formé de choppers de grandes tailles, roulés, émoussés comme Graziosi (1964) en a récoltés dans la vallée de la Sohan en 1960, le Late Soanian et l’Evolved Soanian. Il s’agit de choppers, de discoïdes, de racloirs, de nucléus et de nombreux éclats, montrant une tendance générale à une réduction des proportions. Un rappel des différentes étapes de la recherche préhistorique permet de mieux cerner les unités de temps et d’espace de la problématique soanienne et de son évolution locale. En 1953, l’Archaeological Survey of India organise de nouvelles prospections dans la vallée de la Beas et de Banganga (Fig. 7) situées à l’est des Pabbi Hills (Krishnaswami, 1953), ces formations fossilifères prospectées dans le cadre des récents programmes pakistanais. En 1954, les recherches se déportent à l’est de la Beas et gagnent les terrasses d’un affluent de la puissante rivière himalayenne Sutlej. Cet affluent (le dun Sohan à ne pas confondre avec la vallée Sohan du Potwar) sépare les piémonts himalayens de la chaîne frontale des Siwaliks. En 1955 et 1956 les prospections s’étendent davantage encore vers l’est, sur les terrasses d’un second affluent de la Sutlej, le dun de Pinjore Nalagahr ou vallée de la Sarsaqui sépare également les piémonts de la Pour citer cet article : Dambricourt Malassé, A., Le peuplement humain en Eurasie : l’Asie centrale montagneuse et les piémonts sous-himalayens du Plio-Pléistocène à l’Holocène, origines, évolution humaine et migrations, L’Anthropologie (2008), doi:10.1016/j.anthro.2008.04.008 + Models ANTHRO-2295; No of Pages 34 18 A. Dambricourt Malassé / L’anthropologie xxx (2008) xxx–xxx Fig. 7. Chronologie des phases tectoniques et des formations géologiques des Siwaliks, nord-ouest du sous-continent indien (extrait de Gaillard et Mishra, 2001). Fig. 7. North-Western Siwaliks: chronology of tectonic phases and geological deposits (in Gaillard and Mishra, 2001). chaîne frontale. Toutes ces campagnes qui sillonnent les terrasses subhimalayennes au nord de la chaîne frontale, récoltent des artéfacts caractéristiques du Soanien. À partir de 1960 et jusqu’en 1974, les recherches s’intensifient vers le nord-ouest de l’Inde, dans le Jammu et le Cachemire et permettent de découvrir de l’Acheuléen. À partir de 1979 apparaissent les premières synthèses (Mohapatra et Singh, 1979a, 1979b). Il s’en dégage une vue d’ensemble montrant un gradiant géographique dans la répartition des industries soaniennes, les plus anciennes se trouvant vers le Pakistan. La présence d’industries acheuléennes du côté indien commence également à se préciser dans le sens perçu par Pierre Teilhard de Chardin, en position stratigraphique sous-jacente au Soanien connu jusqu’alors sur les terrasses plus récentes. Quelques bifaces et hachereaux sont récoltés au pied du versant sud de la petite chaîne frontale des Siwaliks (Mohapatra, 1981, 1990), autrement dit dans les niveaux inférieurs, mais remontés en surface par suite d’un jeu de failles parallèles à l’axe de la chaîne himalayenne. À partir des années 1990 commencent les études comparatives entre le Soanien et l’Acheuléen pour tenter d’en comprendre d’éventuelles relations (Gaillard et Mohapatra, 1988 ; Gaillard, 1995) tandis qu’aucun de ces assemblages n’était associé à un contexte fossilifère pour espérer trouver des restes fauniques, voire humains. Ce n’est qu’en 2002, qu’une équipe de géologues met à jour dans la vallée de Srinagar, au Cachemire, une Pour citer cet article : Dambricourt Malassé, A., Le peuplement humain en Eurasie : l’Asie centrale montagneuse et les piémonts sous-himalayens du Plio-Pléistocène à l’Holocène, origines, évolution humaine et migrations, L’Anthropologie (2008), doi:10.1016/j.anthro.2008.04.008 + Models ANTHRO-2295; No of Pages 34 A. Dambricourt Malassé / L’anthropologie xxx (2008) xxx–xxx 19 industrie lithique en association avec un crâne de proboscidien de taille exceptionnelle. Le paléosol est recouvert par un horizon pléistocène (Srivastava et al., 2002). Une nouvelle synthèse tente de faire le point des connaissances depuis (Chauhan et Gill, 2002). Alors que la mission prévue dans l’Hindou Kouch se met en place, Mukesh Singh (1993, souspresse) engage des prospections dans les piémonts de l’Himachal Pradesh. En 2002, un projet de coopération se structure entre le laboratoire de Préhistoire du Muséum et le département d’Archéologie et des Musées de Chandigarh (Punjab, Inde). Les prospections se développent depuis 2003, avec une première fouille poursuivie en automne 2006 sur le versant nord de la chaîne frontale des Siwaliks. Les premières prospections se sont déroulées sur près de 1300 km à travers cinq districts : Roupnagar (Ropar), Nangal, Hoshiarpur, Hamilpur et Bilaspur (Fig. 6). Elles couvrent une totalité de 13 localités réparties entre les piémonts de l’Himachal Pradesh (abri et grottes), et la chaîne frontale des Siwaliks, tant sur les versants nord et sud qu’à l’intérieur même de cette petite chaîne particulièrement éventrée par des jeux de failles et de très nombreux ravins (ou choes). La plus intéressante des localités correspond à un site connu depuis 1970, riche en petits choppers et nombreux éclats en « quartier d’orange ». Il s’agit d’un site soanien de plein air, en position primaire, proche du village de Jandhian, en bordure nord de la chaîne frontale des Siwaliks. 6.2. Résultats préliminaires 6.2.1. Le site soanien de Jandhian Le site domine le dun Sohan, bien circonscrit sur d’anciennes colluvions érodées de la Sutlej, déposées directement sur les formations tertiaires du Pinjore. Ce site occupe la partie basse d’une sorte de cuvette avec une extension sur l’un de ses flans (Fig. 8). Connu pour ses choppers, il s’est avéré riche en nombreux éclats corticaux de facture fraîche, non émoussés, deux éclats trouvés en sondage étaient encore en connexion. Ce site est exceptionnel par la quantité de matériel lithique récolté, il permet, pour la première fois, la reconstitution des chaînes opératoires du Soanien, alors que jusqu’à présent, les artéfacts étaient majoritairement ramassés hors contexte archéologique. Ce site présente donc le double intérêt d’apporter notamment : " une connaissance plus précise du Soanien compte tenu de ses assemblages : choppers, nucléus, de nombreux éclats avec surface corticale, d’autres plus rares sans cortex et retouchés ; " un âge approximé. L’étude consiste en sondage, carroyage, ramassage des artéfacts en surface et analyse du contexte chronostratigraphique. La topographie accidentée résulte du plissement holocène des terrains plio-pléistocènes. Ce Soanien est de facture fraîche et la dimension des pièces lithiques est plutôt de petite taille, les nucléus sur galets font une quinzaine de centimètres dans leur plus grande longueur, les éclats plus petits varient entre l’esquille et les « quartiers d’orange » typiques. L’industrie se rapporterait donc au Soanien final et correspondrait à un Épipaléolithique (Fig. 9). L’étude détaillée de l’industrie lithique est en cours (Gaillard et al., en préparation). La concentration des artéfacts en partie basse, leur raréfaction vers les pentes les plus raides, l’aspect frais, non patiné des éclates et de choppers, permet de penser que l’occupation est probablement postérieure à la tectonique dite postsiwalik, même si la datation des colluvions reste imprécise. Cette conclusion qui ferait de ce site, un habitat des périodes néolithiques, est aussi celle soutenue par le géomorphologue Karir (1985). Il n’est pas impossible que le site ait subi également de légères secousses depuis son occupation. Pour citer cet article : Dambricourt Malassé, A., Le peuplement humain en Eurasie : l’Asie centrale montagneuse et les piémonts sous-himalayens du Plio-Pléistocène à l’Holocène, origines, évolution humaine et migrations, L’Anthropologie (2008), doi:10.1016/j.anthro.2008.04.008 + Models ANTHRO-2295; No of Pages 34 20 A. Dambricourt Malassé / L’anthropologie xxx (2008) xxx–xxx Fig. 8. Site de Jandhian vu en direction du sud-est, depuis le point culminant. 1 : colluvions, partie basse du site ; 2 : formations tertiaires sur lesquelles reposent les colluvions ; 3 : colluvions sur la partie haute du site. Au fond la plaine alluviale de la Sutlej (cliché A. Dambricourt Malassé). Fig. 8. Jandhian: 1: colluvions with artefacts in the low part; 2: Pliocene deposits; 3: colluvions in the upper part (picture A. Dambricourt Malassé). 6.2.2. Les niveaux plio-pléistocènes de la chaîne frontale des Siwaliks À l’intérieur même de la chaîne frontale, de nombreuses cuvettes et ravins laissent apparaître des formations fossilifères continentales datant du Pliocène (Pinjore) ainsi que des niveaux à gros galets (colluvions) en partie supérieure d’âge pléistocène. Un éclat en quartzite émoussé de grande taille a été récolté dans l’une de ces anciennes terrasses, il n’entre pas dans les assemblages connus du Soanien plus récent (Gaillard et al., en préparation). Les prospections de 2007 ont confirmé la présence d’artéfacts en place dans ces colluvions pléistocène, proches de niveaux fossilifères. Leur identification est en cours. Les niveaux les plus anciens apparaissent également au pied des versants sud de la chaîne frontale, la localité d’Atbarapur (district de Hoshiarpur) est connue pour la fréquence des bifaces (Kumar et Rishi, 1986 ; Rishi, 1989). Un hachereau et deux bifaces ont été récoltés en 2003, un âge pléistocène supérieur peut être avancé. Les prochaines missions continueront de prospecter les formations plio-pléistocènes affleurant dans la chaîne frontale des Siwaliks, riches en niveaux fossilifères et en artéfacts, Pour citer cet article : Dambricourt Malassé, A., Le peuplement humain en Eurasie : l’Asie centrale montagneuse et les piémonts sous-himalayens du Plio-Pléistocène à l’Holocène, origines, évolution humaine et migrations, L’Anthropologie (2008), doi:10.1016/j.anthro.2008.04.008 + Models ANTHRO-2295; No of Pages 34 A. Dambricourt Malassé / L’anthropologie xxx (2008) xxx–xxx 21 Fig. 9. Artéfacts de Jandhian : nucléus sur galet, choppers, éclats corticaux et éclats retouchés (cliché A. Dambricourt Malassé). Fig. 9. Jandhian assemblage: core-flakes, choppers, cortical flakes and retouched flake (picture A. Dambricourt Malassé). notamment dans la région de Chandigarh qui réunit les meilleures conditions de fossilisation d’hominidés pléistocènes. Ces recherches ont également pour but de découvrir les premières traces d’industries sur galet (Mode 1) pour les situer par rapport à l’Acheuléen. En résumé, l’Inde du Nord-Ouest s’est imposée comme une biozone plio-pléistocène particulièrement favorable à la découverte des plus anciennes espèces du genre Homo ; les derniers niveaux pliocènes se suivent depuis plus de deux millions d’années et sont particulièrement fossilifères. Sur ces formations tertiaires se sont accumulés à partir du Pléistocène, des dépôts de lœss et des colluvions qui ont subi des déformations au cours du Quaternaire et à des rythmes différents selon les localisations, alors que des populations humaines occupaient déjà les bords des rivières himalayennes. Les industries se retrouvent dans ces dépôts quaternaires depuis le Pléistocène inférieur avec deux traditions lithiques, soanienne et acheuléenne. Le Soanien est une industrie sur galet comportant de nombreux éclats peu différenciés, il s’inscrit dans la tradition des choppers et chopping-tools (Mode 1) et perdure jusqu’à l’Holocène. L’Acheuléen est plus élaboré avec des bifaces et des hachereaux (Mode 2), mais il s’observe de façon plus sporadique et reste encore relativement rare. Les relations entre l’Acheuléen et le Soanien ne sont pas encore éludées (Gaillard et Mishra, 2001). De notre point de vue, elles ne peuvent faire l’économie d’une étude plus générale, non seulement portant sur celle des différents peuplements humains mais aussi, et surtout, celle d’une problématique paléoanthropologique clairement posée depuis l’origine des premiers hommes. Pour citer cet article : Dambricourt Malassé, A., Le peuplement humain en Eurasie : l’Asie centrale montagneuse et les piémonts sous-himalayens du Plio-Pléistocène à l’Holocène, origines, évolution humaine et migrations, L’Anthropologie (2008), doi:10.1016/j.anthro.2008.04.008 + Models ANTHRO-2295; No of Pages 34 22 A. Dambricourt Malassé / L’anthropologie xxx (2008) xxx–xxx 7. La problématique paléoanthropologique La problématique paléoanthropologique est triple, elle se pose à différents niveaux avec pour l’Asie centrale montagneuse : " l’adaptation physiologique à la haute altitude ; " l’origine phylogénétique des Homo sapiens. Les différents peuplements du nord-ouest du sous-continent indien soulèvent la question de l’origine des Homo sapiens asiatiques et celles du genre Homo en Asie. 7.1. L’adaptation à l’altitude L’adaptation physiologique est induite par la raréfaction de l’oxygène due à la baisse de la pression atmosphérique. Le développement fœtal est directement affecté par ces conditions, il s’en trouve ralenti. On conçoit difficilement qu’aucune transformation physiologique ne se soit produite pour les populations du Pamir pendant 2000 ans, vivant à plus de 4000 m d’altitude. Cela est plus qu’une hypothèse, le rocher de Darra-i-kur trouvé au nord de l’Hindou Kouch présente des particularités anatomiques spectaculaires, comme une hypertrophie des canaux vasculaires et un diamètre du méat acoustique interne trois fois plus large que la moyenne actuelle (Angel, 1972). Ces caractéristiques signifient la nécessité pour l’organisme de compenser la raréfaction du taux en oxygène par une augmentation du volume de sang par unité de temps. Une microévolution de cette nature, très précoce dans le développement de l’organisme, liée à une succession d’isolements génétiques est donc vraisemblable et probable. Quant à l’homme de Darra-i-kur, l’altitude relativement basse de la grotte où son fragment de temporal a été recueilli, seul reste squelletique retrouvé sans contexte sépulcral, n’est probablement pas représentative de ses conditions de vie (Gaillard et Dambricourt Malassé, 2008). Cet exemple observé au Pléistocène supérieur reflète vraisemblablement le type d’évolution biologique le plus fréquent que l’on puisse rencontrer en Asie centrale montagneuse depuis le Pléistocène inférieur. Toutefois, compte tenu de l’échelle de temps, il est nécessaire de commencer par distinguer l’unité morphogénétique en présence, autrement dit l’organogenèse qui précède le développement fœtal, ou encore les huit semaines du développement embryonnaire depuis la fécondation. En effet, la biologie du développement intra-utérin aussi bien que post-natale ne sera pas la même selon que l’on considère celle de la plus vieille espèce du genre Homo, ou celle de l’Homo sapiens. Cette distinction entre organogenèses ne ressort pas de la nomenclature linnéenne (Dambricourt Malassé, 1992), or l’espèce sapiens forme à elle seule une unité de plan morphogénétique embryonnaire, qui correspond à l’évolution de celle apparue avec le genre Homo (Dambricourt Malassé, 1988). Le terme de sapiens équivaut donc à celui de Homo, sans rapport aucun avec les concepts d’espèce et de genre ; l’organogenèse sapiens est biologiquement l’équivalente de celle commune aux erectus, habilis, ergaster, georgicus, neanderthalensis, autant d’espèces ou de sous-espèces ou encore de chrono-espèces, qui partagent la même organogenèse embryonnaire depuis l’apparition de ce qu’il est convenu de nommer Homo, par distinction entre un grand singe fossile et un Australopithéciné. Cette unité de plan organogénétique renvoie à celle plus commune de patron, ou de pattern, employé pour les formes finales adultes. La distinction est établie sur la conformation des anciens tissus cartilagineux cranio-faciaux acquise entre la septième et la huitième semaine post-ovulatoire, en particulier la position de la loge cérébelleuse et le prognathisme de l’étage moyen et inférieur de la face (Dambricourt Malassé, Pour citer cet article : Dambricourt Malassé, A., Le peuplement humain en Eurasie : l’Asie centrale montagneuse et les piémonts sous-himalayens du Plio-Pléistocène à l’Holocène, origines, évolution humaine et migrations, L’Anthropologie (2008), doi:10.1016/j.anthro.2008.04.008 + Models ANTHRO-2295; No of Pages 34 A. Dambricourt Malassé / L’anthropologie xxx (2008) xxx–xxx 23 2006). La voûte est induite par la formation tardive des hémisphères cérébraux, c’est à dire au cours de la période fœtale, elle n’est donc pas nécessairement significative de l’identité sapiens, même si la néocorticalisation s’observe de façon évidente avec les formes évoluées tardives d’Homo en Afrique, en Europe et en Asie du Sud-Est. L’évolution du crâne cérébral concerne l’intégralité du système nerveux central, aussi bien le tronc cérébral et le cervelet dont les positions sont fixées précisément au terme de la période embryonnaire, avant l’encéphalisation fœtale. L’élévation de la voûte liée à la complexité croissante des hémisphères cérébraux s’observe depuis Homo georgicus jusqu’aux Homo erectus indiens comme le crâne d’Hathnora (de Lumley et Arun Sonakia, 1985 ; Sonakia et Biswas, 1998), mais il en va différemment de la position de leur loge cérébelleuse qui reste inchangée après deux millions d’années, fixée avant la formation de la voûte et son enroulement antéro-postérieur (Dambricourt Malassé, 2008). 7.2. Homo sapiens et Homo erectus sensu largo L’Asie centrale s’inscrit parmi les grands complexes géomorphologiques asiatiques favorables à l’isolat des populations dérivées de la plus vieille espèce du genre Homo, comme ce fut le cas sur l’île de Florès avec le nanisme d’Homo floresiensis dont les restes fossiles ont été datés entre 18 et 12 ka. La grande proximité anatomique avec les Homo erectus asiatiques confirme la stabilité génétique de leur organogenèse différente de celle de sapiens. Cette stabilité est révélée par la position de la loge cérébelleuse et le moulage endocrânien du lobe temporal, celui-ci n’est pas plus basculé vers l’avant et le bas qu’Homo georgicus, ce qui est cohérent avec le prognathisme ou l’angle ouvert de la symphyse mandibulaire. Si ce fossile était un sapiens, les deux arcades alvéolodentaires seraient en retrait relativement aux bases osseuses, la mandibule montrerait un mentum osseum et la paroi antéro-postérieure de la loge cérébelleuse serait donc plus développée vers l’avant et sous l’apophyse mastoïde (Dambricourt Malassé, 2008). Ces différences trouvent leur origine dans les contraintes de développement qui apparaissent au terme de la période embryonnaire et elles ne s’observent donc pas sur Homo floresiensis. Cette parenté avec une espèce non sapiens a été confirmée, précisément sur la base de semblables considérations, avec l’étude des osselets du poignet. Leur embryogenèse ne correspond pas à celle de sapiens, mais à celle d’une espèce de l’organogenèse Homo ayant vécu avant 200 ka (Tocheri et al., 2007). La distinction entre les deux embryogenèses est donc claire, les difficultés évoquées tiennent au paradigme d’une évolution graduelle et progressive d’où sont absents les notions de plan d’organisation (pattern), les stases et les équilibres ponctués fréquents en paléontologie animale (Gould et Eldredge, 1977 ; Dambricourt Malassé, 1993 ; Chaline et al., 1996, 1999, 2000 ; Dambricourt Malassé et al., 1998). Des populations d’Homo erectus asiatiques ont donc vécu jusqu’à la fin du Pléistocène supérieur grâce à un isolement reproductif. Cet endémisme a favorisé l’expression d’une plasticité génétique commune à différentes espèces de mammifères, le nanisme. Au regard des travaux de Ranov qui ont bien démontré l’indépendance des scénarios évolutifs entre l’Asie centrale et l’Europe ou le Proche-Orient, le cas de Florès n’est pas surprenant. Concernant l’industrie lithique, celle inventoriée dans le même niveau stratigraphique s’apparente à des artéfacts découverts dans une autre grotte de l’île et datée de 880 à 800 ka, en sorte qu’Homo floresiensis peut être l’héritier de cette tradition (Brumm et al., 2006). Le débat portant sur la capacité des hommes de Florès à produire des éclats laminaires repose sur un a priori sans fondement biologique, à savoir que la taille des hémisphères cérébraux limiterait les capacités cognitives. L’encéphalisation de la lignée humaine est un processus de complexification par émergence de réseaux de neurones entre les aires corticales et sous-corticales, concomitante d’une vascularisation plus étendue avec, d’une part, la Pour citer cet article : Dambricourt Malassé, A., Le peuplement humain en Eurasie : l’Asie centrale montagneuse et les piémonts sous-himalayens du Plio-Pléistocène à l’Holocène, origines, évolution humaine et migrations, L’Anthropologie (2008), doi:10.1016/j.anthro.2008.04.008 + Models ANTHRO-2295; No of Pages 34 24 A. Dambricourt Malassé / L’anthropologie xxx (2008) xxx–xxx néoformation d’anastomoses au niveau des méninges et, d’autre part, de capillaires sanguins en contact avec des synapses. Ce processus a été graduel jusqu’aux Homo erectus les plus tardifs. La vascularisation du cerveau de Florès est de ce fait plus significative que la réduction de son volume, elle reflète la complexité des connections établies entre les zones corticales et sous-corticales productrices d’hormones, nécessaires à la création d’outils élaborés, qualifiés de contrefactuels en neurosémantique (Aït Hamou, 2005). 7.3. Les mécanismes génétiques de transition entre Homo erectus et Homo sapiens Le squelette d’Homo floresiensis confirme les conclusions concernant l’existence d’une unité de plan d’organisation anatomique qui se maintient au-delà de la variabilité et des microévolutions pendant de longues périodes géologiques. Celles-ci ont atteint 20 millions d’années pour l’organisation anatomique des grands singes, puisque suffisamment d’espèces ont survécu au-delà de la crise miocène, trois millions d’années pour les Australopithécinés, mais cette organogenèse a disparu alors que celle du genre Homo était déjà dispersée en Eurasie et en Afrique. En fin de compte, l’existence d’une variété d’Homo erectus après deux millions d’années de dérives génétiques, de microévolutions et d’adaptations est la norme. De même, l’absence de formes transitoires est conforme aux modalités des mécanismes génétiques propres à la régulation de l’embryogenèse. La difficulté réside dans la double nécessité de rendre compte de l’extinction d’une organogenèse qui peuplait deux continents, l’Afrique et l’Eurasie, d’une part, et de l’apparition d’une nouvelle organogenèse, celle des sapiens, d’autre part, car non seulement toutes deux relèvent de la régulation ou dérégulation des processus qui prévalent au développement de l’embryon, mais aussi et surtout, elles sont indissociables de modalités qui ne sont perceptibles qu’entre les stases. En d’autres termes, les mutations qui affectent la régulation de l’organogène du genre Homo sont elles-mêmes liées aux mutations à l’origine de cette organogenèse. Ces mécanismes n’excluent pas l’adaptation à des conditions de vie écologique favorables, elles sont évidentes, mais sans ce déterminisme phylogénétique très probablement couplé à des phénomènes de dérégulation abortifs, l’apparition des sapiens serait impossible. La sélection naturelle agit ici de façon drastique et non pas cumulative. Les paramètres pour comprendre les origines de l’Homo sapiens en Asie sont multiples entre : " la stabilité ontogénétique de la charpente craniosacrée et appendiculaire commune aux populations vivant en Afrique et en Eurasie ; " les différents processus de néocorticalisation et de néovascularisation multirégionaux d’origine fœtale ; " les conditions environnementales, climatiques et géomorphologiques. La haute altitude agira donc sur la plasticité de la période fœtale de l’une ou l’autre des deux organogenèses, comme le nanisme aura été une adaptation à des conditions de vie insulaire, mais le facteur de la transformation organogénétique d’Homo en sapiens est interne. Où et dans quelles circonstances cette mutagenèse a-t-elle eu lieu, est-il possible que des foyers soient apparus en Asie ? Le peuplement de l’Asie centrale montagneuse et des piémonts himalayens révèle la pérennisation de l’industrie sur galet jusqu’aux périodes néolithiques de l’Holocène, caractérisée par la production élevée d’éclats toujours plus diversifiés, ce qui suppose un isolement culturel vis-à-vis des populations porteuses de traditions plus récentes. Il n’apparaît pas de Paléolithique Pour citer cet article : Dambricourt Malassé, A., Le peuplement humain en Eurasie : l’Asie centrale montagneuse et les piémonts sous-himalayens du Plio-Pléistocène à l’Holocène, origines, évolution humaine et migrations, L’Anthropologie (2008), doi:10.1016/j.anthro.2008.04.008 + Models ANTHRO-2295; No of Pages 34 A. Dambricourt Malassé / L’anthropologie xxx (2008) xxx–xxx 25 supérieur, ni de Mésolithique dans le Nord-Ouest de l’Inde, les industries sont épipaléolithiques. Une telle pérennisation sur près de deux millions d’années soulève une question paléoanthropologique majeure ; les hominidés ayant vécu à Riwat vers 1,9 Ma étaient proches d’Homo georgicus ou des Homo erectus de Mojokerto. Mais qui étaient les chasseurs-cueilleurs auteurs du Soanien à la fin du Pléistocène, étaient-ce des Homo erectus tardifs comme Homo floresiensis ou des Homo sapiens comme à Darra-i-kur ? Le hiatus est celui d’une cartographie paléoanthropologique continentale considérable qui s’étend du delta de l’Indus jusqu’à la Haute Asie et la Chine occidentale. Si les chasseurs épipaléolithiques/néolithiques de l’Asie centrale montagneuse sont des Homo sapiens ayant migré vers 9000 ans BP depuis les piémonts himalayens, il est impossible de dire quand leurs ancêtres Homo sapiens sont apparus dans l’Inde du Nord-Ouest. La continuité soanienne soushimalayenne peut cacher une discontinuité dans le peuplement, avec l’arrivée des hommes anatomiquement moderne n’ayant jamais connu d’autres traditions que celle de la production d’éclats sur galet. Mais cette hypothèse n’évacue pas celle nécessaire pour la cohérence des données historiques, d’une évolution d’Homo erectus asiatiques selon les modalités définies précédemment, c’est-à-dire de nature saltationniste. 8. Les données anthropologiques méso-néolithiques du nord de l’Hindou Kouch et de l’Inde L’horizon 2 de Tutkaul, situé à 2000 m d’altitude sur une surface de plus de 2500 m2, a été occupé pendant près 1000 années. Les fouilles ont dégagé quatre squelettes peu connus. Un seul article leur est consacré, limité à une étude générale des crânes. Les restes humains se trouvaient dans la couche culturelle, sans aucune trace de fosses et de rituels, le site atteignant jusqu’à deux mètres d’épaisseur de limons argileux d’origine alluviale. De nombreux foyers se superposent tandis que par endroit le sol est stabilisé sur de petites surfaces (4 m2) par un dallage de pierre. Le mieux conservé des squelettes est celui d’un adulte (401) qui avait été déposé dans une légère dénivellation du sol d’occupation atteignant un cailloutis sous-jacent, puis recouvert du limon riche de déchets lithiques. Les deux mains étaient glissées sous la tête, les jambes fortement repliées en décubitus. Les enfants (402 et 403) moins bien conservés formaient une sépulture double, couchés sur le côté, tandis que le quatrième individu (404) avait la disposition du corps et des membres du premier squelette, mais moins bien conservé. Le crâne 401 est décrit de la façon suivante : « Le crâne est massif, les os sont épais, la protubérance occipitale bien développée, les apophyses mastoïdes assez puissantes, sont fortes mais brèves. Le front est fuyant, la glabelle est boursouflée, les arcades sourcilières sont fortement développées dans leur premier tiers. Les bosses frontales sont fortement exprimées, l’occipital n’est pas déformé et fortement saillant, la protubérance est bien développée. Les dents du maxillaire inférieur se sont toutes conservées, elles sont en parfait état, l’émail dentaire est usé, la seconde molaire est plus petite que la première, les sutures ne sont pas synostosées. Une déformation postmortem comprime le crâne latéralement. On notera un puissant mésognathisme du squelette facial, les orbites sont très basses, de forme rectangulaire en surplomb ». La denture maxillaire est manquante, mais l’os alvéolaire porte les marques d’une cicatrisation. Concernant le sexe de l’individu, les auteurs sont hésitants et ne font pas référence au bassin, à cette époque seul le crâne avait été prélevé pour étude. Le second crâne adulte est partiellement conservé « non déformé, dolichocéphale, un front fuyant avec de faibles bosses frontales, la suture coronale n’est pas synostosée, l’occipital est saillant, la crête d’insertion des muscles est bien développée ». Les deux enfants ont entre cinq et six ans (A 402) et quatre ans (A 403). Ils sont dolicocéphales avec un occipital « fortement Pour citer cet article : Dambricourt Malassé, A., Le peuplement humain en Eurasie : l’Asie centrale montagneuse et les piémonts sous-himalayens du Plio-Pléistocène à l’Holocène, origines, évolution humaine et migrations, L’Anthropologie (2008), doi:10.1016/j.anthro.2008.04.008 + Models ANTHRO-2295; No of Pages 34 26 A. Dambricourt Malassé / L’anthropologie xxx (2008) xxx–xxx Tableau 1 Dispersion du torus angularis en Eurasie et en Afrique au cours du Pléistocène Table 1 Dispersal of the torus angularis in Eurasia and Africa during the Pleistocene Afrique 1 2 3 4 5 6 7 8 9 10 11 12 13 14 ER 1470 ER 1813 ER 3883 ER 3733 OH 2 OH 4 LH 18 KNM WT 15 000 Ndutu Bouri Atlanthrope 4 Bodo Djebel Irhoud 2 Kabwe Torus angularis Non Non Non Non – Pseudotorus Non Non Non Non Non – Non Oui Proche-Orient 15 16 17 Shanidar Amud Tabun Non Non Non Europe 18 19 20 21 22 23 24 25 26 27 28 29 30 31 32 33 34 35 36 37 38 Dmanissi D 2700 Dmanissi D 2280 Dmanissi D 2282 Dmanissi D 3444 Atapuerca 5 Ceprano Tautavel Castel di Guido Reilingen Saccopastore 2 Steinheim Petralona Gibraltar Mont Circée Neanderthal La Quina Spy Krapina Cova Negra La Ferrassie La Chapelle-aux-St Non Non Oui Non Non Oui Oui Oui Oui Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Non Asie 39 40 41 42 43 44 45 46 Ngandong 3 Ngandong 5 Ngandong 6 Ngandong 7 Ngandong 8 Sangiran 17 Ngawi Sambugmachan 1 Non Oui Oui Non – Oui Oui Oui Pour citer cet article : Dambricourt Malassé, A., Le peuplement humain en Eurasie : l’Asie centrale montagneuse et les piémonts sous-himalayens du Plio-Pléistocène à l’Holocène, origines, évolution humaine et migrations, L’Anthropologie (2008), doi:10.1016/j.anthro.2008.04.008 + Models ANTHRO-2295; No of Pages 34 27 A. Dambricourt Malassé / L’anthropologie xxx (2008) xxx–xxx Tableau 1 (Suite ) 47 48 49 50 51 52 53 54 Grogol Wetan Narmada-Hathnora Mapa Dali Lantian Yunxian EV 1901 Yunxian EV 1902 Hexian Oui Oui – Oui – Non Non Oui saillant ». Les auteurs concluent « L’association de caractères cromagnons et équatoriaux (crâne 401) dénonce l’existence d’un type anthropologique non encore différencié ». Ces squelettes font l’objet d’un programme d’étude en cours. L’hypothèse d’une origine orientale, tournée vers le bassin du Tarim n’est pas à exclure non plus selon ce que révèleront les futures découvertes, comme celle d’une calotte d’Homo sapiens en Mongolie orientale décrite par Fabrice Demeter (Coppens et al., 2008) associée à une faune pléistocène. Le frontal présente des caractères plésiomorphes et atteste de l’existence de populations sapiens robustes dans ces régions montagneuses qui s’étendent de l’Asie centrale à la Mongolie. Le bassin supérieur de l’Indus n’a pas encore livré de restes humains datant des périodes préhistoriques permettant des comparaisons avec Tutkaul ; de la grande plaine du Punjab, on ne connait que des populations harappéennes. L’Inde centrale est mieux documentée avec des squelettes mésolithiques et néolithiques (Kennedy, 1999 ; Kennedy et al., 1991, 1992 ; Kennedy et Elgart, 1998 ; Walimbe, 1990 ; Walimbe et Tavares, 1996 ; Walimbe et Paddaya, 1998 ; Walimbe et al., 2001). L’observation de ces crânes entreposés au Deccan College (Pune) a permis de constater sur un crâne néolithique du site de Tekka Lakota (État du Karnataka) la présence du torus angularis bien différencié. Ce caractère anatomique a son importance. Cet épaississement de la table corticale externe de l’os pariétal, situé à hauteur de l’astérion, est un caractère discret d’Homo erectus, quasiment absent chez Homo sapiens qui, quand il existe, est peu marqué et circonscrit à l’Asie. La comparaison de 54 crânes non sapiens montre une répartition et une fixation géographique du torus angularis au cours du Pléistocène tout à fait significative (Tableau 1). Cet épaississement est visible depuis les plus vieilles espèces connues, mais uniquement en Eurasie ; il est présent en effet sur l’un des quatre crânes d’Homo georgicus. Sur un total de 20 crânes européens incluant les Néandertaliens, il ne s’observe que sur les plus anciennes populations avec Ceprano, Arago, Castel di Gudo et Reilingen. Il n’apparaît plus sur les crânes d’Atapuerca, il ne se voit sur aucun Néandertalien, d’Europe ou d’Orient, il est absent des plus vieux fossiles Homo sapiens (Omo 1, Herto, Qafzeh). Quant aux populations africaines, sur les 12 crânes considérés, il en est absent depuis les premiers fossiles contemporains de Dmanissi. Le crâne OH 4 ne présente pas de torus angularis au sens ostéologique, la suture ptériaque est déprimée donnant l’impression d’un relief, mais il ne s’agit pas d’un épaississement de l’os cortical. De tous les crânes ou pariétaux suffisamment bien conservés, seul le crâne tardif de Kabwe (Rhodésie, 200 ka) présente ce relief. En revanche, en Asie sa fréquence est proportionnellement incomparablement plus élevée : le torus angularis apparaît sur neuf fossiles pour un total de 13 crânes avec Sangiran 17, Sambungmachan 1, Ngandong 5, Ngandong 6, Ngawi et Grogol Wetan en Indonésie, Dali et Hexian en Chine, Hathnora en Inde. Son développement varie en fonction du sexe (Widianto et Grimaud Hervé, 2000). Face à une telle dispersion dans le temps et l’espace, la présence du torus angularis sur des crânes néolithiques indiens peut difficilement s’expliquer autrement que par une parenté génétique avec des Homo erectus indiens. Une origine asiatique de l’Homo sapiens (Pope, 1992) est tout à fait vraisemblable. Cette étude devrait se compléter de la comparaison des Pour citer cet article : Dambricourt Malassé, A., Le peuplement humain en Eurasie : l’Asie centrale montagneuse et les piémonts sous-himalayens du Plio-Pléistocène à l’Holocène, origines, évolution humaine et migrations, L’Anthropologie (2008), doi:10.1016/j.anthro.2008.04.008 + Models ANTHRO-2295; No of Pages 34 28 A. Dambricourt Malassé / L’anthropologie xxx (2008) xxx–xxx populations harappéennes entreposées à Calcutta (civilisation chalcolithique de l’Indus). Il serait intéressant de vérifier si le torus angularis est également présent sur les crânes néolithiques de Merghar (Pakistan) et sur le crâne de Pahiyangala découvert dans une grotte au Sri Lanka et daté de 37 000 ans. 9. Conclusion Quelle que soit l’origine des relations génétiques et/ou phylogénétiques entre des populations indiennes d’Homo erectus et d’Homo sapiens de l’Asie centrale et du nord-ouest de l’Inde, on comprend que ces populations se sont satisfaites d’une technique de débitage de galet, simple et efficace. Depuis les colluvions formant les pénéplaines sous-himalayennes jusqu’aux hautes moraines des massifs pamiriens, ces populations n’ont jamais manqué de matière première, les cônes de déjection, les terrasses des puissantes rivières himalayennes n’ont jamais cessé d’offrir un choix de matière première parmi les plus dures. Il leur suffisait de remonter les terrasses des rivières à la faveur des périodes de réchauffement pour se fournir en galets. La difficulté se pose en termes de paléoanthropologie. Les chasseurs-cueilleurs du nord-ouest de l’Inde, héritiers du Soanien, et ayant vécu à la fin du Pléistocène, étaient contemporains d’Homo floresiensis. Étaient-ce des Homo sapiens ou des formes évoluées tardives d’Homo erectus indiens ? Si les industries soaniennes inventoriées dans les anciennes terrasses des rivières himalayennes comme le Sutlej ont perduré jusqu’aux périodes néolithiques, doit-on considérer leurs auteurs comme des Homo sapiens semblables aux chasseurs-cueilleurs de Tutkaul ? Dans cette perspective, comment peut-on expliquer le continuum de la tradition du Mode 1 sans poser l’hypothèse d’une évolution biologique des Homo erectus asiatiques en Sapiens ? Peut-on raisonnablement exclure cette hypothèse devant la fréquence d’un caractère comme le torus angularis fixé génétiquement en Asie et absent des plus vieux Homo sapiens africains ? De toute évidence, sa formation ne dépend pas de la position de la loge cérébelleuse, autrement dit, de la position des muscles de la nuque. Il s’agit d’un caractère discret fixé génétiquement et indépendant de la différenciation du morphotype. Des gènes d’Homo erectus asiatiques vieux d’au moins 800 ka étaient manifestement présents dans l’ADN des populations néolithiques vivant en Inde centrale. Leur parenté avec les Homo erectus vivant à Hathnora est logique, tandis que leur ascendance directe avec les plus vieux Homo sapiens d’origine africaine devient moins évidente. L’apparition d’Homo sapiens dépend des mutations intéressant l’intégralité de l’organogenèse, du pôle céphalique au bassin, avec des effets épigénétiques sur l’ontogenèse de l’organisme, ces modalités évolutives ne sont ni graduelles, ni cumulatives. De ce fait, il est impossible de distinguer sur la seule base des données morphologiques et métriques, laquelle des populations tardives d’Homo erectus africaines ou asiatiques, serait l’ancêtre des Homo sapiens asiatiques. Ce sont donc bien des caractères discrets qui autorisent la reconnaissance des liens des parentés comme le torus angularis. La somme des données archéologiques, anthropologiques et mésologiques montre donc que l’ont peut difficilement se satisfaire du modèle s’appuyant sur la thèse d’une lignée d’Homo sapiens quittant l’Afrique vers 160 000 ans, se substituant aux formes tardives d’Homo erectus asiatiques promises à l’extinction. La thèse d’une assimilation génétique est encore plus difficile à défendre et les raisons sont de deux ordres. Elle pose la difficulté de l’interfécondité entre populations issues de la même souche africaine après deux millions d’années de séparation, la viabilité des hybrides n’est pas évidente. La question abordée par Daniel Garrigan et Sarah Kingan parvient à des conclusions similaires (Garrigan et Kingan, 2007). En admettant le modèle Pour citer cet article : Dambricourt Malassé, A., Le peuplement humain en Eurasie : l’Asie centrale montagneuse et les piémonts sous-himalayens du Plio-Pléistocène à l’Holocène, origines, évolution humaine et migrations, L’Anthropologie (2008), doi:10.1016/j.anthro.2008.04.008 + Models ANTHRO-2295; No of Pages 34 A. Dambricourt Malassé / L’anthropologie xxx (2008) xxx–xxx 29 des flux géniques continus accompagnés de migrations dans les deux sens Asie/Afrique à la faveur de passages possibles entre les détroits d’Ormuz et de Bab el Mandeb, il n’en demeure pas moins une difficulté majeure. Ce modèle d’un « croissant fertile » explique la présence d’un torus angularis sur Kabwe, mais il s’agit d’un Homo erectus tardif, au même titre que son contemporain indien Hathnora. Ce modèle gradualiste n’est plus valable dès que l’on considère Sapiens : il ne s’agit pas de l’hybridation entre deux sous-espèces de la même organogenèse, mais de deux embryogenèses séparées par une évolution saltationniste qui a modifié le développement céphalocaudal de l’embryon. Comment deux embryogénèses aussi différentes auraient-elles pu n’en former qu’une seule ? Quand bien même y aurait-il eu des croisements, les embryons ne pouvaient pas être viables. La barrière génétique est inhérente au processus mutagène. La question n’est pas résolue et en soulève une tout aussi complexe, celle de foyers isolés en Asie du Sud et en Afrique de l’Est, mais convergents. En quoi cette hypothèse ne serait-elle pas recevable lorsque ces convergences finissent par apparaître comme une caractéristique de l’évolution des hominidés ? Des convergences procédant par gradualisme se sont produites tout au long du Pléistocène avec l’encéphalisation dans des régions géographiques diamétralement opposées comme en Europe occidentale et en Asie du Sud-Est sans avoir reçu d’explication satisfaisante. Les convergences sont plus significatives encore avec l’apparition des Australopithécinés et du genre Homo ; ce sont deux organogenèses montrant les mêmes tendances embryonnaires, avec un squelette axial qui se verticalise jusque dans l’endocrâne, là où la chorde dorsale se prolonge jusqu’au postsphénoïde (Dambricourt Malassé, 2006). La proximité des caractères craniofaciaux est telle, que les paléoanthropologues font désormais appel à des critères anatomiques d’origine embryonnaire, comme les trois canaux semi-circulaires de l’oreille interne, pour établir la distinction entre les deux taxons. L’organisation des canaux dans les trois plans de l’espace permet au cerveau de contrôler la posture, elle est acquise au cours de la formation de l’embryon. Celle-ci est restée inchangée entre les Australopithécinés et les grands singes actuels d’Afrique (gorille, chimpanzé) et d’Asie (orang-outan), alors que la verticalisation du postsphénoïde est acquise. En revanche, avec le genre Homo, elle diffère par un écartement entre le canal latéral et le canal postérieur probablement en relation avec la dynamique d’inflexion du post-sphénoïde et des rochers, différente de l’Australopithéciné (Dambricourt Malassé et al., 2000). C’est sur ce critère que deux fossiles sud-africains, SK847 et STW53, ont pu être distingués (Spoor et al., 2007), le premier est un Homo habilis, le second est un Australopithèque. Avec le recul d’un âge géologique de 3 Ma et l’évidence des mutations génétiques très proches de celles à l’origine des Australopithécinés, il paraît tout à fait plausible d’envisager un enracinement de la lignée humaine dans une population de grands anthropoïdes. Et puisque ces mutations concernent l’organogenèse commune aux paninés et aux ponginés, on ne voit plus pour quelles raisons ce type de mutations n’aurait pu se produire dans le génome de grands anthropoïdes asiatiques. De nombreuses espèces vivaient en Chine sous les latitudes subtropicales ainsi que dans les plaines arborées qui bordaient une chaîne himalayenne moins accidentée qu’au Pléistocène. La plupart se sont éteintes avec la crise miocène, à laquelle n’auraient échappé que les ancêtres des orangs-outans et les Gigantopithèques. Toutefois, les fossiles pléistocènes de ces deux genres sont extrêmement rares, le Gigantopithèque n’est connu que par quatre corps mandibulaires. Si des hominidés (au sens d’un équilibre bipède permanent) sont apparus en Afrique orientale en milieu arboré, vers 4,4 Ma (le fragment de base crânienne d’Ardipithecus ramidus), des convergences génétiques ont aussi bien se produire dans des populations de grands anthropoïdes d’Asie du Sud, permettant de poser l’hypothèse d’une origine asiatique du genre Homo. Dans cette perspective, les fossiles seraient associés aux Pour citer cet article : Dambricourt Malassé, A., Le peuplement humain en Eurasie : l’Asie centrale montagneuse et les piémonts sous-himalayens du Plio-Pléistocène à l’Holocène, origines, évolution humaine et migrations, L’Anthropologie (2008), doi:10.1016/j.anthro.2008.04.008 + Models ANTHRO-2295; No of Pages 34 30 A. Dambricourt Malassé / L’anthropologie xxx (2008) xxx–xxx Gigantopithèques ainsi qu’aux autres espèces de mammifères pour les mêmes raisons écologiques qui les auront guidés à survivre dans leur environnement de prédilection. Ces mécanismes de convergence existent dans d’autres phylums, ils pourraient également se produire à différentes échelles de l’organisation de la mémoire génétique du développement, graduelle et microévolutive comme avec l’encéphalisation, mais aussi saltationniste et macroévolutive. La prise en considération des caractéristiques saltationnistes qui ont prévalu à l’apparition de l’organogenèse Homo, permettra peut-être d’apporter des éléments d’explication à l’apparition de foyers d’Homo sapiens convergents. La question reste toujours posée de comprendre pourquoi des chasseurs-cueilleurs néolithiques, ayant vécu dans les piémonts de l’Himalaya et du Pamir, ont hérité d’une tradition soanienne qui ne semble pas avoir connu d’autres techniques de débitage que celle du galet taillé, présente en Asie centrale et en Inde du Nord-Ouest, depuis au moins 800 000 ans. Remerciements Je tiens à remercier Ivana Pranic et Marie-Jeanne Koffmann pour la traduction du texte de Kitkna et Ranov sur les squelettes de Tutkaul, ainsi qu’Erik L’Homme pour l’iconographie sur les pétroglyphes de la Shah Jinali, en hommage à Vadim Alexandrovith Ranov (1925–2006) et Jorge Magraner (1958–2002). Références Aït Hamou, K., 2005. Ma grand-mère est âgée de 12 000 ans. Revue Transdisciplinaire de Plasticité Humaine, Plastir 2, 1– 12. Allchin, B., 1995. Early human occupation in the Northern Punjab, Pakistan: an overview of the Potwar project of the British Archaeological Mission to Pakistan (1981–1991). In: Wadia, S., Korisettar, R., Kale, V.S. (Eds.), Quaternary Environments and Geoarchaeology of India. Geological Society of India, Bangalore, pp. 150–167. Amosova, A.G., Ranov, V.A., Filimonova, T.G., 1993. Les énigmes de la culture de Hissar.In: Découvertes des civilisations d’Asie centrale. Les dossiers d’archéologie, vol. 185. pp. 14–21. Angel, L., 1972. A middle Paleolithic temporal bone from Darra-i-kur, Afghanistan. Transactions of the American Philosophical Society 62, 54–56. Bar Yosef, O., Corvinus, G., Hahn, J., Lood-Wissowa, H., Muller-Beck, H., Ono, A., Paddaya, K., Ranov, V.A., 1984. Neue Forschungen Zur Altsteinzeit. Verlag C.H. Beck, München. Blackwell, B.A.B., Fevrier, S., Blickstein, J.I.B., Paddayya, K., Petraglia, M., Jhaldiyal, R., Skinner, A.R., 2001. ESR dating of an Acheulean quarry site at Isampur, India. Journal of Human Evolution 40, A3. Boëda, E., 2005. Paléotechnologie ou anthropologie des techniques ? Arob@se, Édition de l’Université de Rouen-I, pp. 46–64. Brumm, A., Aziz, F., van den Burgh, G.D., Morwood, M.J., Moore, M.W., Kurniawan, I., Hobbs, D.R., Fullagar, R., 2006. Early stone technology on Flores and its implications for Homo floresiensis. Nature 441, 624–628. Brunet, F., 2002. Asie centrale : vers une redéfinition des complexes culturels de la fin du Pléistocène et des débuts de l’Holocène. Paléorient 28, 9–24. Chaline, J., Durand, A., Marchand, D., Dambricourt Malassé, A., Deshayes, M.J., 1996. Chromosomes and the origins of apes and Australopithecines. Human Evolution 11, 43–60. Chaline, J., Dambricourt Malassé, A., Did, B., Magniez-Jannin, F., Marchand, D., Courant, F., Millet, J.J., 1999. Quantification de l’évolution morphologique du crâne des hominidés et hétérochronies. Comptes Rendus de l’Académie des Sciences de la Terre et des Planètes 326, 291–298. Chaline, J., Durand, A., Dambricourt Malassé, A., David, B., Magniez-Jannin, F., Marchand, D., 2000. Were climatic changes a driving force in hominid evolution? In: Hart, M.B. (Ed.), Climates: Past and Present, vol. 181Geological Society, London, pp. 185–198, special publication. Chauhan, P.R., Gill, G.S., 2002. The impact of geological and anthropogenic processes on prehistoric sites on Siwalik slopes: a case study. Bulletin of the Indian Geologists’ Association, vol. 35. Department of Geology, Panjab University, Chandigarh, pp. 71–81. Pour citer cet article : Dambricourt Malassé, A., Le peuplement humain en Eurasie : l’Asie centrale montagneuse et les piémonts sous-himalayens du Plio-Pléistocène à l’Holocène, origines, évolution humaine et migrations, L’Anthropologie (2008), doi:10.1016/j.anthro.2008.04.008 + Models ANTHRO-2295; No of Pages 34 A. Dambricourt Malassé / L’anthropologie xxx (2008) xxx–xxx 31 Coppens, Y.D., Tseveendorj, F., Demeter, T., Turbat, P.H., Giscard, P.H., 2008. Découverte d’une calotte crânienne d’un Homo sapiens archaïque dans le nord-est de la Mongolie. Comptes Rendus Palévol, doi:10.1016/j.crpv.2007.12.004. Dambricourt Malassé, A., 1988. Hominisation et fœtalisation. Comptes Rendus de l’Académie des Sciences de Paris 307 (2), 199–204. Dambricourt Malassé, A., 1992. L’hominisation et la théorie des systèmes dynamiques non linéaires. Revue de Biologie Mathématique no 117–119. Dambricourt Malassé, A., 1993. Continuity and discontinuity during modalities of hominization. Quaternary International 19, 85–100. Dambricourt Malassé, A., 2004. Teilhard en Occident en tant que scientifique et l’état de la coopération franco-chinoise dans les domaines de la paléontologie et de la préhistoire. In: Sciences et progrès humain, Institut of Vertebrate Paleontology and Paleoanthropology, Académie des sciences de Chine, Pékin. Éditions Aubin, St-Étienne. Dambricourt Malassé, A., 2006. Évolution du chondrocrâne et de la face des grands anthropoïdes miocènes jusqu’à Homo sapiens, continuités et discontinuités. Comptes Rendus Palévol 5, 109–117. Dambricourt Malassé, A., 2007. Mission française préhistorique en Inde (Punjab). Département de Préhistoire du MNHNUMR 5198 CNRS. 29 octobre–2 décembre 2007. Archives du Centre de Documentation de l’expertise du Muséum national d’histoire naturelle, Paris. Dambricourt Malassé, A., 2008. Embryogenic cranial evidences in fossil hominids, taxonomical and phylogenetical implications in human palaeontology. In: Sankhyan, A.R. (Ed.), Hominoïd and Human Evolution with Special Reference to Asia: New Evidences and New Interpretations, 16th Congress of the International Union of Anthropological and Ethnological Sciences (IUAES), Kunming, China, 2008. Dambricourt Malassé, A., Deshayes, M.J., Magniez-Jannin, F., Chaline, J., Marchand, D., 1998. A solution to human paradox: fundamental ontogenies and heterochronies. Human Evolution 14, 277–300. Dambricourt Malassé, A., Martin, J.P., de Kerviler, E., 2000. Neural tube, spheno-occipital flexion and semi-circular canals in fossil and modern hominids. Actes du Colloque International Symposium Paleoanthropology, Beijing, 12– 17 October 1999, Acta Anthropologica Sinica (Suppl. 19), 82–89. Dambricourt Malassé, A., Gaillard, Cl., 2002. Qui était Jordi Magraner. Acta Geographica 1507, 49–50 (174e année). Davis, R.S., Ranov, A.V., 1999. Recent work on the Paleolithic of Central Asia. Evolutionary Anthropology Issues, news and reviews 8-5, 186–193. de Lumley, M.A., Gabounia, L., Vekua, A., Lordkipanidze, D., 2004. Les restes humains du Pliocène final et du début du Pléistocène inférieur de Dmanissi, Géorgie (1991–2000). I – Les crânes 2280, D 2282, D 2700. L’Anthropologie 110, 1–110. de Lumley, M.A., Arun Sonakia, A., 1985. Première découverte d’un Homo erectus sur le continent indien à Hathnora, dans la moyenne vallée de la Narmada. L’Anthropologie 89, 13–61. de Terra, H., de Teilhard de Chardin, P., Hawkes, J., 1934. Palaeolithic industries in the North West Punjab and Kashmir and their geological significance. Memoirs of the Connecticut Academy of Science and Art 3, 1–15. de Terra, H., Teilhard de Chardin, P., Paterson, T.T., 1936. Joint geological and prehistoric studies in the late Cenozoic in India. Science 83, 233–236. de Terra, H., Paterson, T.T., 1939. Studies on the Ice Age of India and Associated Human Cultures, 493. Carnegie Institution Publication. Carnegie Institute, Washington, D.C. de Terra, H., Teilhard de Chardin, P., 1936. Observations on the Upper Siwalik formation and later Pleistocene deposits in India. Proceedings of the American Philosophical Society 76, 791–822. Deloison, Y., 2004. La préhistoire du piéton. Plon, Paris. Dennell, R.W., Rendell, H., Hailwood, E, 1989. Artéfacts du Pliocène tardif dans le nord du Pakistan. L’Anthropologie 92, 927–930. Dennell, R.W., Coard, R., Beech, M., Anwar, M., Turner, A., 2005. Locality 642, an Upper Siwalik (Pinjor Stage) fossil accumulation in the Pabbi Hills, Pakistan. Journal of the Palaeontological Society of India 50, 83–92. Dennell, R.W., Coard, R., Turner, A., 2006. The biostratigraphy and magnetic polarity zonation of the Pabbi Hills, northern Pakistan: an Upper Siwalik (Pinjor Stage) Upper Pliocene – Lower Pleistocene fluvial sequence. Palaeogeography, Palaeoclimatology, Palaeoecology 234, 168–185. Dodonov, A.E., 1991. Loess of Central Asia. GeoJournal 24, 185–1994. Etler, D.A., Crummett, T.L., Wolpoff, H., 2001. Longgupo: early Homo colonizer or late Pliocene Lufengpithecus survivor in South China? Human Evolution 16, 1–12. Etler, D.A., Guoxing, Z., 1998. Asian fossils and African origins. Journal of Human Evolution 34, 1–7. Francfort, H.-P., 1986. Prospections archéologiques au Nord-Ouest de l’Inde, Rapport préliminaire 1983–1984. Éditions Recherche sur les Civilisations (ERC), pp. 1–112. Francfort, H.-P., 1999. Répertoires des pétroglyphes d’Asie centrale. De Boccard, Paris. Pour citer cet article : Dambricourt Malassé, A., Le peuplement humain en Eurasie : l’Asie centrale montagneuse et les piémonts sous-himalayens du Plio-Pléistocène à l’Holocène, origines, évolution humaine et migrations, L’Anthropologie (2008), doi:10.1016/j.anthro.2008.04.008 + Models ANTHRO-2295; No of Pages 34 32 A. Dambricourt Malassé / L’anthropologie xxx (2008) xxx–xxx Francfort, H.-P., Jacobson, E., 2004. Approaches to the study of petroglyphs of North and Central Asia. Archaeology Ethnology Anthropology of Eurasia 18, 53–78. Francfort, H.-P., Pottier, M.-H., 1978. Sondage préliminaire sur l’établissement protohistorique harappéen et postharappéen de Shortugaï (Afghanistan du N.-E.). Arts Asiatiques 34, 29–86. Gaillard, C., 1995. An Early Soan assemblage from the Siwaliks: a comparison of processing sequences between this assemblage and an Acheulian assemblage from Rajasthan. In: Wadia, S., Korisettar, R., Kale, V.S. (Eds.), Quaternary Environments and Geoarchaeology of India. Geological Society of India, Bangalore, pp. 231–245. Gaillard, C., 1996. Processing sequences in the Indian Lower Palaeolithic: examples from the Acheulian and the Soanian. Bulletin of the Indo-Pacific Prehistory Association 14, 57–67. Gaillard, Cl., Dambricourt Malassé, A., Magraner, J., Maitrerobert, A., Voisin, J.L., Nasir, A., 2002. Discovery of recent lithic industries with archaic features in the Hindu Kush range (Chitral district, North Pakistan). Bulletin of the IndoPacific Prehistory Association 6, 25–33. Gaillard, Cl., Dambricourt Malassé, A., 2002. Early human occupations in the western Himalaya and border regions. In: Extended Abstract of the International Conference on Quaternary Climate, Tectonics and Environment of the Himalaya: Comparison with other Regions, Department of Geology, Kuman University, Nainital, India 78. Gaillard, Cl., Dambricourt Malassé, A., 2008. Les principales étapes de l’occupation humaine en bordure de l’Himalaya occidentale. L’Anthropologie 112 . Gaillard, Cl., Mishra, S., 2001. The Lower Palaeolithic in South Asia. In: Semah, F., Falguères, Ch., Grimaud Hervé, D., Semah, A.-M. (Eds.), Origine des peuplements et chronologie des cultures paléolithiques dans le Sud-Est Asiatique. Semenanjung-Artcom, Paris, pp. 73–91. Gaillard, C., Mohapatra, G.C., 1988. Étude typométrique d’une industrie soanienne des Siwaliks du nord-ouest de l’Inde. L’Asie centrale et ses rapports avec les civilisations orientales des origines à l’âge du fer. Mémoires de la mission archéologique française en Asie centrale, vol.1. Boccard, Paris, pp. 67–75. Garrigan, D., Kingan, S.B., 2007. Archaic human admixture. A view from the genome. Current Anthropology 28, 895–902. Gaur, R., 1987. Environment and Ecology of Early Man in Northwest India: Geological and Palaeontological Evidences. B.R. Publishing Corporation, New Delhi. Glantz, M.R., Suleymanov, R., Hugues, P., Schauber, A., 2003. Anghilak cave, Uzbekistan: documenting Neandertal occupation at the periphery. Antiquity 77. Gould, S., Eldredge, N., 1977. Punctuated equilibria: the tempo and mode of evolution reconsidered. Paleobiology 3, 115– 151. Graziosi, P., 1964. Prehistoric research in northwestern Punjab: Italian Expeditions to the Karakorum (Ks) and Hindu Kush. Prehistory. Anthropology 1, 1–249. Gupta, S.P., 1979. Archaeology of Soviet Central Asia and the Indian Borderlands, 1 and 2. B.R. Publishing Corporation, Delhi. Hallier, U.W., 1991. Petroglyphen in North Pakistan. Antike Welt 22, 2–20. Huang, W., Zhang, P., 2007. Les plus anciennes occupations humaines en Chine. L’Anthropologie 111, 166–181. Hurcombe, L., 2004. The lithic evidence from the Pabbi Hills. In: Dennell, R. (Ed.), Early Hominin Landscapes in Northern Pakistan; Investigations in the Pabbi Hills, 1265. B.A.R. International Series, Oxford, pp. 222–291. Hurcombe, L., Dennell, R., 1992. A pre-acheulean in the Pabbi Hills: towards a re-definition of the early Palaeolithic in Pakistan. In: Jarrige, C. (Ed.), South Asian Archaeology 1989: Papers from the 10th International Conference of South Asian Archaeologists in Western Europe. Prehistory Press, Wisconsin, pp. 133–136. Islamov, Y.I., 1990. Sel’oungour, un nouveau site du paléolithique inférieur en Asie centrale. L’Anthropologie 94, 675–688. Jettmar, K., 1979. Rock-carvings and stray finds in the mountains of North Pakistan. In: Taddei, M. (Ed.), Archaeology Before Excavation, 2. South Asian Archaeology, Naples, pp. 917–926. Jettmar, K., 1989. In: Jettmar, K., König, D., Thewalt, V. (Eds.), Antiquities of Northern Pakistan, Reports and Studies, 1–2. Verlag Philipp von Zabern, Mainz. Jin, C.Z., Zheng, L.T., Dong, W., Liu, J.Y., Xu, X.Q., Han, L.G., 2000. The Early Pleistocene deposits and mammalian fauna from Renzidong, Fanchang, Anhui province, China. Acta Anthropologica Sinica 19, 184–198 (en chinois). Karir, B.S., 1985. Geomorphology and Stone Age Culture of North-Western India. Sundeep Prakashan, Delhi. Kennedy, K.A.R., 1999. Paleoanthropology of South Asia. Evolutionary Anthropology 8, 165–185. Kennedy, K.A.R., Sonakia, A., Chiment, J., Verma, K.K., 1991. Is the Narmada hominid an Indian Homo erectus? American Journal of Physical Anthropology 86, 475–496. Kennedy, K.A.R., Misra, V.N., Lukacs, J.R., Tiwari, S.C., Wakankar, V.S., 1992. Skeletal Biology of the Human Remains from the Mesolithic and Palaeolithic Levels of Bhimbetka Rockshelters of Madhya Pradesh, India. Indian Society for Prehistoric and Quaternary Studies, Pune. Pour citer cet article : Dambricourt Malassé, A., Le peuplement humain en Eurasie : l’Asie centrale montagneuse et les piémonts sous-himalayens du Plio-Pléistocène à l’Holocène, origines, évolution humaine et migrations, L’Anthropologie (2008), doi:10.1016/j.anthro.2008.04.008 + Models ANTHRO-2295; No of Pages 34 A. Dambricourt Malassé / L’anthropologie xxx (2008) xxx–xxx 33 Kennedy, K.A.R., Elgart, A.A., 1998. South Asia: India and Sri Lanka. Hominid remains: an update. In: Orban, R., Semal, P. (Eds.), Anthropologie et préhistoire, 8. Institut Royal des Sciences Naturelles de Belgique, Brussels, pp. 95. Kiyatkina, T.P., Ranov, V.A., 1971. Perviy Antropologickie Naxodki Kamennogo veka Tadjikictan (neoliticeckhe erepa yz Tutkaula). Voproc Antroplologii (Archives d’Anthropologie) 37, 149–156. Krishnaswami, V.D., 1953. Progress in prehistory. Ancient India 9, 53–79. Kuhle, M., 2001. The maximum Ice Age (LGM) glaciation of the Central and South Karakorum: an investigation of the heights of its glacier levels and ice thicknesses as well as lowest prehistoric ice margin positions in the Hindukush, Himalaya and in East-Tibet on the Minya Konka-massif. GeoJournal 54, 109–396. Kuhle, M., 2005. The past Hunza Glacier in connection with a Pleistocene Karakoram ice stream network during the last Ice Age (Würm). In: Kreutzmann, H. (Ed.),Karakoram in Transition – The Hunza Valley. Oxford University Press, Oxford. Kumar, M., Rishi, K.K., 1986. Acheulian elements from Hoshiarpur region (Punjab). Man and Environment 10, 141–142. L’Homme, E., 1999. Langue et culture de l’ancien royaume de Chitral au Pakistan. L’Harmattan, Paris. Larick, R., Ciochon, R.L., 1996. The African emergence and early Asian dispersals of the genus Homo. American Scientist 84, 538–552. Masson, V.M., 1988. Les cultures anciennes d’Asie Moyenne : dynamique du developpement, occupation des aires écologiques Rapports culturels. L’Asie centrale et ses rapports avec les civilisations orientales des origines à l’âge du Fer. Mémoires de la Mission Archéologique Française en Asie centrale, 1. 31–35. Mohapatra, G.C., 1981. Acheulian discoveries in the Siwalik frontal range. Current Anthropology 22, 433–435. Mohapatra, G.C., 1990. Soanian–Acheulian relationship. Bulletin of Deccan College Postgraduate and Research Institute 49, 251–259. Mohapatra, G.C., Singh, M., 1979a. Prehistoric investigations in a Sub-Himalayan valley, Himachal Pradesh, India. Current Anthropology 20, 600–602. Mohapatra, G.C., Singh, M., 1979b. Stratified Occurrence of Lithic Artifacts in the Siwalik Frontal Range of Western SubHimalaya, 10. Panjab University Research Bulletin (Arts), pp. 1–2. Paddayya, K., Blackwell, B.A.B., Jhaldiyal, R., Fevrier, S., Chaderton II, D.A., Blickstein, J.I.B., Skinner, A.R., 2002. Recent findings on the Acheulian of the Hunsgi and Baichbal valleys, Karnataka, with special reference to the Isampur excavation and its dating. Current Science 83, 641–647. Pope, G.P., 1992. Craniofacial evidence for the origin of modern humans in China. Yearbook of Physical Anthropology 35, 243–298. Ranov, V.A., 1960. Naskal’nye izobrazhenija u kishlaka Ljangar (Zapadnyj Pamir) [Représentations rupestres du village de Ljangar, Pamir occidental]. Izv. Otd. Obsh. Nauk AN Tadzh. SSR [Comptes Rendus du Département des Sciences Sociales de l’Académie des Sciences de la République Sociale Soviétique Tadjike] 1 (22). Ranov, V.A., 1961. Stone Age Engravings in the Shakhta Cave. Sovetskaya Ethnografia. Ranov, V.A., 1972. Le peuplement préhistorique de la Haute-Asie (d’après l’exemple de l’Asie centrale soviétique). L’Anthropologie 76, 5–20. Ranov, V.A., 1976. Izuchenie naskal’nikh izobrazhenij Zapadnogo Pamira [Étude des représentations rupestres du Pamir occidental]. Arkeologicheskie raboty v Tadzhikistane, vyp. 12, Dushanbe [Travaux Archéologiques du Tadjikistan]. Ranov, V.A., 1989. Les sites très anciens de l’âge de la pierre en URSS. In: Les premiers peuplements humains de L’Europe. Actes du 114e Congrès national des Sociétés savantes de Paris. pp. 209–216. Ranov, V., 1993. Tout commence au Paléolithique.In: Découverte des civilisations d’Asie centrale. Les dossiers de l’archéologie, 185. pp. 4–13. Ranov, V., Davis, R.S., Aigner, J.S., Gabori, M., Gallus, A., Marks, A.E., Mohapatra, G.C., Movius Jr., H.L., Zeiler, I.S., 1979. Towards a new outline of Soviet Central Asia Palaeolithic. Current Anthropology 20, 249–270. Ranov, V.A., Carbonell, E., Rodriguez, X.P., 1995. Kuldara: earliest human occupation in Central Asia in its Afro-Asian context. Current Anthropology 36, 337–346. Ranov, V.A., Sidorovo, I.F., 1979. The Pamirs as Man’s Habitat. In: Gupta, S.P. (Ed.), Archaeology of Soviet Central Asia and the Indian Borderlands, 1. B.R. Publishing Corporation, Delhi. D.K. Publishers’ Distributors, New Delhi, pp. 173–176. Rendell, H.M., Hailwood, E., Dennell, R.W., 1987. Paleomagnetic dating of a two-million-year-old artefact-bearing horizon at Riwat, Northern Pakistan. Earth and Planetary Sciences Letters 85, 488–496. Rendell, H.M., Dennell, R.W., Halim, M.A., 1989. Pleistocene and Palaeolithic Investigations in the Soan Valley, Northern Pakistan, 544. B.A.R. International Series, pp. 1–364. Rishi, K.K., 1989. Palaeoliths from Atbarapur (Punjab). Department of Cultural Affairs, Archaeology and Museums, Chandigarh, Punjab, pp. 1–43. Sankalia, H.D., 1974. The Prehistory and Protohistory of India and Pakistan. Deccan College and Postgraduate Research Institute, Pune. Pour citer cet article : Dambricourt Malassé, A., Le peuplement humain en Eurasie : l’Asie centrale montagneuse et les piémonts sous-himalayens du Plio-Pléistocène à l’Holocène, origines, évolution humaine et migrations, L’Anthropologie (2008), doi:10.1016/j.anthro.2008.04.008 + Models ANTHRO-2295; No of Pages 34 34 A. Dambricourt Malassé / L’anthropologie xxx (2008) xxx–xxx Singh, M., 1993. Industries lithiques du complexe supérieur de la Caune de l’Arago, Tautavel, Pyrénées Orientales. Comparaison avec les industries du complexe moyen. Thèse du Muséum national d’histoire naturelle de Paris, 2 tomes. Singh, M., sous-presse. Prehistoric Investigations in the Roop Nagar District of Punjab, India. Man and Environment, Pune. Sonakia, A., Biswas, S., 1998. Antiquity of the Narmada Homo erectus, the early man of India. Current Science 75, 391–393. Spoor, F., Leakey, M.G., Gathogo, P.N., Brown, F.H., Antón, S.C., McDougall, I., Kiarie, C., Manthi, F.K., Leakey, L.N., 2007. Implications of new early Homo fossils from Ileret, east of Lake Turkana, Kenya. Nature 448, 688–691. Srivastava, R., Bhatt, G.M., Dar, A.M., Lone, M.S., Shalla, M.S., 2002. Report of a new Elephantine skull from Quaternary sediments of Pampore, Srinagar (Jammu and Kashmir). In: Abstracts of the International Conference on ‘‘Quaternary Climate, Tectonics and Environments of the Himalaya: Comparison with other Regions’’, Nainital, 11th–15th March 2002, pp. 86–87. Teilhard de Chardin, P., 1935. Lettres inédites à l’Abbé Gaudefroy et à l’Abbé Breuil. Éditions du Rocher, Monaco, 1988. Tocheri, M.W., Orr, C.M., Larson, S.G., Sutikna, Th., Jatmiko, Wahyu Saptomo, E., Due, R.A., Djubiantono, T., Morwood, M.J., Jungers, W.L., 2007. The primitive wrist of Homo floresiensis and its implications for hominin evolution. Sciences 317 (5845), 1743–1745. Vinogradov, A.V., Ranov, V.A., 1988. La périodisation de l’âge de la pierre en Bactriane ancienne. L’Asie centrale et ses rapports avec les civilisations orientales des origines à l’âge du fer. Actes du Colloque francosoviétique, Paris, 19–26 novembre 1985, Mémoires de la Mission Archéologique Française en Asie Centrale 1, 49–51 Boccard 1988. Vishnyatsky, L.B., 1999. The Paleolithic of Central Asia. Journal of World Prehistory 13, 69–122. Walimbe, S.R., 1990. Human skeletal remains. In: Dhavalikar, M.K., Shinde, V.S. (Eds.), Excavation at Kaothe, Shubbangana Atre. Deccan College, Pune, pp. 111–231. Walimbe, S.R., Behera, P.K., Mushrif, V., 2001. A human skeleton discovered from the rock shelter site of Deulga Hills (District Sambalpur), Orissa. Man and Environment XXVI 99–107. Walimbe, S.R., Paddaya, K., 1998. Human skeletal remains from the Neolithic Ashmoind site at Budihal, Gulbarga District, Karnataka. Bulletin of the Deccan College Research Institute 58–59, 11–47. Walimbe, S.R., Tavares, A., 1996. Evolving trends in skeletal biology in the Indian Sub-Continent: a case study on the incipient agricultural populations of Deccan Plateau. In: Wadia, S., Korisettar, R., Kale, V.S. (Eds.), Quaternary Environments and Geoarchaeology of India. Essay in Honour of Professor S. N. Rajaguru, 32. Geological Society of India, Bangalore, Memoir, pp. 515–529. Wanpo, H., Ciochon, R., Yumin, G., Larick, R., Qiren, F., Schwarcz, H., Yonge, C., de Vos, J., Rink, W., 1995. Early Homo and associated artefacts from China. Nature 378, 275–278. Widianto, H., Grimaud Hervé, D., 2000. Un nouveau crâne humain fossile dans le dôme de Sangiran (Java, Indonésie). Comptes Rendus de l’Académie des Sciences, Series 2A, Sciences de la Terre et des Planètes 330, 883–888. William, M.P., Sloan, V.F., Shroder, J.F., Sharma Jr., P., Clarke, M.L., Rendell, H.M., 2000. A synchronous glaciation at Nanga Parbat, northwestern Himalaya Mountains, Pakistan. Geology 28, 431–434. Wu, X.Z., 2002. Longgupo hominoid mandible belongs to ape. Acta Anthropologica Sinica 21 (Suppl.), 19–24. Zhu, R.X., Potts, R., Xie, F., Hoffman, K.A., Deng, C.L., Shi, C.D., 2004. New evidence on the earliest human presence at high northern latitudes in northeast Asia. Nature 431, 559–562. Pour citer cet article : Dambricourt Malassé, A., Le peuplement humain en Eurasie : l’Asie centrale montagneuse et les piémonts sous-himalayens du Plio-Pléistocène à l’Holocène, origines, évolution humaine et migrations, L’Anthropologie (2008), doi:10.1016/j.anthro.2008.04.008
Similar documents
Excursion 99 Glaciations quaternaires dans les Alpes franco
C'est à l'époque des « moraines externes » définies depuis Penck comme Riss que les glaciers alpins ont contruit les moraines frontales les plus éloignées de la chaîne. Les alluvions fluvio-glaciai...
More information