l`anémie nutritionnelle
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l`anémie nutritionnelle
l’a ’an némi émiee nut utrritio ionn nnel elle le Edité pa parr Jane Ba Badh dhaam Micha chael el B. Zimmerm mermaann Klaus Kra raem emer er S IG IGHT HT AN AND D LI LIFE FE P R ES ESS SE 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 1 Le guide de l’anémie nutritionnelle 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 2 Le guide de 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 3 l’anémie nutritionnelle Edité par Jane Badham JB Consultancy, Johannesbourg, Afrique du Sud Michael B. Zimmermann Institut fédéral de technologie, Zurich, Suisse Klaus Kraemer SIGHT AND LIFE, Bâle, Suisse SIGHT AND LIFE Presse 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 4 4 Enoncé de mission de SIGHT AND LIFE SIGHT AND LIFE est une initiative humanitaire de DSM. Elle vise à assurer une amélioration significative et viable en nutrition humaine et santé en encourageant des partenariats entre universités et agences gouvernementales et intergouvernementales, en générant et en échangeant des informations scientifiques et en formant des réseaux durables. Copyright© SIGHT AND LIFE 2007 Tous droits réservés. Les publications de SIGHT AND LIFE peuvent être obtenues auprès de: SIGHT AND LIFE Presse c/o SIGHT AND LIFE / DSM Nutritional Products Ltd PO Box 2116, 4002 Bâle Suisse Téléphone: +41 61 815 8756 Fax: +41 61 815 8190 Email: info@sightandlife.org Site Internet: www.sightandlife.org Les demandes d’autorisation pour reproduire ou traduire les publications de SIGHT AND LIFE doivent être soumises à l’adresse ci-dessus. Les avis, textes, tableaux et figures contenus dans cette publication ne représentent pas nécessairement le point de vue de SIGHT AND LIFE et sont sous l’unique responsabilité de leurs auteurs. 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Photo de couverture par Ulla Lohmann, Allemagne Graphisme de la couverture par Graphic art studio, Grenzach-Wyhlen, Allemagne Composition et impression par Burger Druck, Waldkich, Allemagne Traduction par Isabelle Lestienne-Deloze, Paris, France ISBN 3-906412-46-6 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 5 Préface PREFACE AU GUIDE DE L’ANEMIE NUTRITIONNELLE Deux cent millions d’enfants de moins de cinq ans, vivant principalement en Afrique subsaharienne et en Asie du Sud, n’atteignent pas leurs pleines performances cognitives, motrices et socio-affectives en raison de carences en micronutriments et d’une mauvaise stimulation. Ces enfants échoueront probablement dans leur scolarité, ne parviendront pas à atteindre pleinement leur possibilité financière et demeureront piégés dans le cycle de la pauvreté. Une réalité tragique. En mai 2002, l'assemblée générale des Nations Unies a à nouveau souligné que le contrôle de l’anémie nutritionnelle devrait être l’un des buts de développement global accompli dans les premières années de ce nouveau millénaire. Malheureusement, peu de progrès ont été rapportés depuis dans la lutte globale contre l’anémie et les données de l’OMS montrent que 818 millions de femmes et d’enfants de moins de cinq ans sont toujours affectés par ce problème de santé publique, et ce, principalement dans les pays en développement. Environ un million d'entre eux meurent chaque année. Cela montre toute l’ampleur du problème et met en exergue le besoin urgent d’action. SIGHT AND LIFE a toujours soutenu les interventions concernant les questions de malnutrition en micronutriments, dont la carence en fer et les anémies nutritionnelles, et a, de fait, souhaité publier un livre sur le sujet. En un seul volume, celui-ci met pour la première fois en lumière tous les facteurs critiques entourant l’anémie, avec les contributions des principaux scientifiques dans leurs expertises respectives. Chaque chapitre traite en détail d'une question spécifique. Il est devenu clair que le contrôle efficace de l’anémie exige des solutions intégrées, établies en fonction des possibilités et des besoins particuliers à chaque pays. Les composantes d'une telle approche comprennent la supplémentation en micronutriments des groupes les plus vulnérables (en particulier 5 les enfants et les femmes en âge de procréer), la fortification des aliments, la diversification et l’éducation alimentaires, ainsi que la prévention des maladies telles que le paludisme, les infections causées par les nématodes, et autres infections endémiques chroniques. Mais tandis que chacune de ses composantes peut aider à réduire le poids de l’anémie, aucune n'est capable de réaliser à elle seule l’ampleur de la tâche. Le but de ce guide est de vous donner un résumé complet concernant les questions clés, en partant des données de prévalence et des statistiques, jusqu’à l’économie, en passant par le diagnostic, les conséquences fonctionnelles et les informations de base sur chacun des micronutriments supposés être impliqués, directement ou indirectement, dans l'anémie. Ce guide ne contient pas toute l'information et ne donne pas toutes les réponses, mais son intention est de délivrer une vue d'ensemble des dernières avancées scientifiques et des défis auxquels le monde a à faire face, tandis que nous organisons, effectuons et dirigeons des interventions, afin de régler ce qui est indubitablement le plus grand problème nutritionnel actuel. Nous sommes confiants dans le fait que l'information, la connaissance et l’éclairage que vous apporteront ce guide, vous permettront de devenir une partie de la solution en vous engageant activement afin de soutenir, programmer ou mener des recherches qui feront la différence. Jane Badham Michael B. Zimmermann Klaus Kraemer 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 6 15.07.2008 A PROPOS DES EDITEURS 13:56 Uhr Seite 6 Editeurs JANE BADHAM Jane est diététicienne et possède un master en nutrition de l’université du Nord-Ouest, campus Potchefstroom, en Afrique du Sud. Elle est actuellement directrice générale de JB Consultancy, une agence de communication et stratégie santé qui conseille l'industrie pharmaceutique, l’industrie agroalimentaire, les organisations humanitaires et les médias. Jane est également directrice du programme gouvernemental "5-a-Day for Better Health TRUST" en Afrique du Sud, qui encourage la consommation de fruits et légumes. Elle participe au comité de direction de l’Alliance internationale des fruits et légumes (IFAVA), ainsi qu’à l’équipe d'organisation de l’African Nutrition Leadership Program (ANLP). MICHAEL ZIMMERMANN Michael a obtenu son doctorat en médecine à l’école universitaire de médecine à Vanderbilt et son master en sciences de la nutrition à l'université de Californie à Berkeley, toutes deux aux Etats-Unis. Il est actuellement directeur de recherche au laboratoire de nutrition humaine de l'Institut fédéral de technologie (ETH), à Zurich en Suisse, professeur invité à l’université de Wageningen aux Pays-Bas, et gère la chaire internationale santé et micronutriments doté par Unilever. Les recherches de Michael se concentrent sur la nutrition et le métabolisme, dont les effets des carences en micronutriments sur la fonction thyroïdienne, ce qui lui a rapporté de nombreuses récompenses. KLAUS KRAEMER Klaus a obtenu son doctorat en sciences de la nutrition à l'université de Giessen, en Allemagne. Il est actuellement secrétaire général de SIGHT AND LIFE, une initiative humanitaire de la société DSM impliquée dans nombre d'activités visant à assurer une amélioration significative et viable en nutrition, santé et bien-être de l’Homme. Klaus a plus de vingt ans d'expérience en recherche dans le domaine de la santé et de l’innocuité des vitamines, minéraux, caroténoïdes, et nutraceutiques. Il travaille au sein de plusieurs sociétés professionnelles consacrées à la nutrition, aux vitamines et aux antioxydants, a publié beaucoup d'articles scientifiques et coédité cinq livres. Auteurs ayant contribué au Livre sur l’Anémie Nutritionnelle (Nutritional Anemia Book) 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 15.07.2008 13:56 Uhr CONTRIBUTEURS Contributeurs HAROLD ALDERMAN Banque Mondiale, région Afrique, Washington DC, Etats-Unis; halderman@worldbank.org JANE BADHAM JB Consultancy, consultante en communication et stratégie sanitaire, Johannesbourg, Afrique du Sud; jbconsultancy@mweb.co.za HANS-KONRAD BIESALSKI Institut de Biochimie et de Nutrition, Université de Hohenheim, Hohenheim, Allemagne; biesal@uni-hohenheim.de MARTIN BLOEM Programme Alimentaire Mondial (PAM), Rome, Italie; martin.bloem@wfp.org TOMMASO CAVALLI-SFORZA Nutrition et Hygiène des Aliments, Bureau Régional du Pacifique Occidental, Organisation Mondiale de la Santé (OMS), Manille, Philippines; cavalli-sforzat@wpro.who.int MARY COGSWELL Division Nutrition et Activité Physique, Centre de prévention et de contrôle des maladies (CDC), Atlanta, Etats-Unis IAN DARNTON-HILL Section Nutrition, UNICEF, New York, Etats-Unis; idarntonhill@unicef.org OMAR DARY Projet A2Z, Academy for Educational Development, Washington DC, Etats-Unis; odary@aed.org BRUNO DE BENOIST OMS, Genève, Suisse; debenoistb@who.int SASKIA DE PEE PAM, Rome, Italie; sdepee@compuserve.com Seite 7 INES EGLI Institut des Sciences Alimentaires et Nutrition, Institut Fédéral Suisse de Technologie (ETH), Zurich, Suisse; ines.egli@ilw.agrl.ethz.ch JÜRGEN ERHARDT Université d’Indonésie, SEAMEO-TROPMED, Jarkarta, Indonésie; erhardtj@gmx.de ALISON D. GERNAND Bloomberg School of Public Health, Université Johns Hopkins, Baltimore, Etats-Unis; agernand@jhsph.edu GARY R. GLEASON Friedman School of Nutrition Science and Policy, Université Tufts, Boston, Etats-Unis; ggleason@inffoundation.org EVA HERTRAMPF DÌAZ Institut de Nutrition et des Technologies Alimentaires (INTA), Université du Chili, Santiago, Chili; ehertram@inta.cl SUSAN HORTON Université Wilfrid Laurier, Waterloo, Canada; shorton@wlu.ca RICHARD HURRELL Institut des Sciences Alimentaires et Nutrition, ETH, Zurich, Suisse; richard.hurrell@ilw.agrl.ethz.ch ALAN JACKSON Institut de Nutrition Humaine, Université de Southampton, Southampton, UK; aaj@soton.ac.uk AFAF KAMAL-ELDIN Département des Sciences Alimentaires, Université Suédoise des Sciences Agricoles, Uppsala, Suède; afaf.kamal-eldin@lmv.slu.se KLAUS KRAEMER SIGHT AND LIFE, Bâle, Suisse; klaus.kraemer@sightandlife.org SEAN LYNCH Eastern Virginia Medical school, Norfolk, Etats-Unis; srlynch@visi.net M.G. VENKATESH MANNAR The Micronutrient Initiative, Ottawa, Canada; vmannar@micronutrient.org 7 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 15.07.2008 13:56 Uhr 8 ERIN MCLEAN OMS, Genève, Suisse; mcleane@who.int Seite 8 Contributeurs REGINA MOENCH-PFANNER Global Alliance for Improved Nutrition (GAIN), Genève, Suisse; rmoenchpfanner@gaingeneva.org; CHRISTINE A. NORTHROP-CLEWES Northern Ireland Centre for Food and Health (NICHE), Université d’Ulster, Corelaine, UK; c.clewes@ulster.ac.uk MANUEL OLIVARES INTA, Université du Chili, Santiago, Chili; molivare@inta.cl NEAL PARAGAS Institut de Nutrition Humaine, Université Columbia, New York, Etats-Unis; np2014@columbia.edu KLAUS SCHÜMANN Université Technique de Munich, Freising, Allemagne; kschuemann@schuemann-muc.de JOHN M. SCOTT Ecole de Biochimie et Immunologie, Trinity College, Dublin, Irlande; jscott@tcd.ie NEVIN SCRIMSHAW International Nutrition Foundation, Boston, Etats-Unis; nevin@cyperportal.net RICHARD SEMBA Ecole de Médecine, Université Johns Hopkins, Baltimore, Etats-Unis; rdsemba@jhmi.edu NOEL SOLOMONS Centre d’Etudes pour l’Affaiblissement Sensoriel, le Vieillissement et le Métabolisme (CeSSIAM), Guatemala City, Guatemala; cessiam@guate.net.gt ALFRED SOMMER Bloomberg School of Public Health, Université Johns Hopkins, Baltimore, Etats-Unis; asommer@jhsph.edu ELISABETH STOECKLIN R & D Nutrion Humaine et Santé, DSM Nuttritional Products Ltd, Kaiseraugst, Suisse; elisabeth.stoeklin@dsm.com BRIAN THOMPSON Organisation des Nations Unies pour l’alimentation et l’agriculture (FAO), Rome, Italie; brian.thompson@fao.org DAVID THURNHAM NICHE, Université d’Ulster, Corelaine, UK; di.thurnham@ulster.ac.uk MELODY C. TONDEUR Division Gastroentérologie, Hépatologie et Nutrition, Hôpital des Enfants Malades, Toronto, Canada; melody.tondeur@sickkids.ca MARET G. TRABER Linus Pauling Institute, Départment des Sciences Alimentaires et de l’Exercice, Université d’Etat de l’Orégon, Corvallis, Etats-Unis; maret.traber@oregonstate.edu; RICARDO UAUY INTA, Université du Chili, Santiago, Chili; ricardo.uauy@lshtm.ac.uk KEITH P. WEST Bloomberg School of Public Health, Université Johns Hopkins, Baltimore, Etats-Unis; kwest@jhsph.edu DANIEL WOJDYLA Ecole de Statistique, Université Nationale de Rosario, Argentine MICHAEL ZIMMERMANN Laboratoire de Nutrition Humaine, ETH, Zurich, Suisse; michael.zimmermann@ilw.agrl.ethz.ch STANLEY ZLOTKIN Département de Pédiatrie, Sciences Nutritionnelles et Santé Publique, Université de Toronto, Canada; stanley.zlotkin@sickkids.ca 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt SOMMAIRE 15.07.2008 17:35 Uhr Seite 9 Sommaire Préface CHAPTIRE 2 CHAPTIRE 3 CHAPTIRE 4 CHAPTIRE 5 CHAPTIRE 6 CHAPTIRE 7 CHAPTIRE 8 CHAPTIRE 9 CHAPTIRE 10 CHAPTIRE 11 CHAPTIRE 12 CHAPTIRE 13 5 A propos des éditeurs 6 Sommaire 9 Contributeurs CHAPTIRE 1 9 Prévalence mondiale de l'anémie chez les enfants d’âge préscolaire, les femmes enceintes et les femmes en âge de procréer Erin McLean, Ines Egli, Mary Cogswell, Bruno de Benoist et Daniel Wojdyla La gestion de l’anémie nutritionnelle en situation d’urgence Venkatesh Mannar Economie de gestion de l’anémie nutritionnelle Harold Alderman et Susan Horton Diagnostic de l’anémie nutritionnelle: évaluation en laboratoire du statut en fer Hans-Konrad Biesalski et Jürgen G. Erhardt Vue d'ensemble de la signification fonctionnelle de la carence en fer Gary Gleason et Nevin S. Scrimshaw Métabolisme du fer Sean Lynch Optimisation de la biodisponibilité du fer des composés utilisés pour la fortification des aliments Richard Hurrell et Ines Egli Interactions avec le cuivre et le zinc dans l’anémie: une perspective de santé publique Manuel Olivares, Eva Hertrampf et Ricardo Uauy Anémie nutritionnelle: les vitamines du groupe B John M. Scott La vitamine A dans l’anémie nutritionnelle Keith P. West, Jr., Alison D. Gernand et Alfred Sommer La place du stress oxydatif et de la vitamine E dans l’anémie Maret G. Traber et Afaf Kamal-Eldin Le sélénium Richard Semba Interactions entre fer et vitamine A, riboflavine, cuivre, et zinc dans l'étiologie de l’anémie Michael Zimmermann 7 11 12 13 15 16 18 21 22 24 26 28 30 31 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 10 CHAPTIRE 14 CHAPTIRE 15 CHAPTIRE 16 CHAPTIRE 17 CHAPTIRE 18 CHAPTIRE 19 CHAPTIRE 20 CHAPTIRE 21 CHAPTIRE 22 15.07.2008 17:35 Uhr Seite 10 Sommaire L’anémie en situation de dénutrition sévère (malnutrition) Alan Jackson Infection et étiologie de l’anémie David Thurnham et Christine Northrop-Clewes Monter des programmes pour prévenir plus efficacement l’anémie Saskia de Pee, Martin Bloem, Regina Moench-Pfanner et Richard Semba Approches gagnantes: les Sprinkles Stanley Zlotkin et Melody Tondeur Sécurité des interventions de réduction des anémies nutritionnelles Klaus Schümann et Noel W. Solomons Importance et limitations de la fortification des aliments dans la gestion des anémies nutritionnelles Omar Dary Approches alimentaires de lutte contre la carence en fer Brian Thompson Perspectives globales : accélérer les progrès en prévenant et en contrôlant l’anémie nutritionnelle Ian Darnton-Hill, Neal Paragas et Tommaso Cavalli-Sforza Conclusions et perspectives de recherche Klaus Kraemer, Elisabeth Stoecklin et Jane Badham 32 34 36 40 41 47 48 50 53 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 1 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 11 1 · Prévalence mondiale de l'anémie PREVALENCE MONDIALE DE L'ANEMIE CHEZ LES ENFANTS D’AGE PRESCOLAIRE, LES FEMMES ENCEINTES ET LES FEMMES EN AGE DE PROCREER Erin McLean, Ines Egli, Mary Cogswell, Bruno de Benoist et Daniel Wojdyla Quel est le problème et que savons-nous? L'anémie constitue un vaste problème de santé publique associé à un risque accru de morbidité et de mortalité, surtout pour les femmes enceintes et les jeunes enfants. Il s’agit d’une maladie aux causes multiples, à la fois nutritionnelles (carences en vitamines et en minéraux) et non nutritionnelles (infections), qui surviennent fréquemment en parallèle. On suppose qu'un des facteurs de contribution les plus courants est le manque de fer, et l’anémie résultant de cette carence en fer est considérée comme l’un des dix principaux contributeurs au poids global des maladies. L'Organisation Mondiale de la Santé (OMS) possède parmi ses mandats la mission d’informer ses Etats Membres de la situation de santé globale dans le monde. Il a été décidé de mettre à jour les estimations concernant l'anémie et de fournir une image actuelle de la situation, en particulier chez les groupes de population à haut risque. Cela a été réalisé par la production d’estimations des prévalences d'anémie, au niveau global et au niveau des régions Nations Unies (NU), chez les enfants d’âge préscolaire, les femmes enceintes et les femmes en âge de procréer. Les données ont été rassemblées entre 1993 et 2005, en utilisant soit l'étude nationale représentative la plus récente du pays, soit au moins deux études représentatives des pays frontaliers. Quand les données d’un pays n’étaient pas disponibles, la prévalence d'anémie a été estimée à partir d’équations de régression utilisant l’Indice de Développement Humain des Nations Unies (United Nations Human Development Index) et les indicateurs de santé provenant de la base de données statistiques de la santé mondiale (WHOSIS). La couverture variait selon les régions NU et était plus importante en Amérique du Nord, en Asie et en Afrique, tandis que l’Europe et l’Océanie avaient une couverture inférieure. Les estimations sont basées sur les 192 Etats membres de l’OMS, et représentent ainsi 99,8 % de la population globale. 11 Que savons-nous de la prévalence globale de l'anémie? • La prévalence globale de l'anémie chez les enfants d’âge préscolaire est de 47,4 %. • La prévalence globale de l'anémie chez les femmes enceintes est de 41,8 %. • La prévalence globale de l'anémie chez les femmes hors grossesse est de 30,2 %. • Globalement, 818 millions de femmes (avec ou sans grossesse) et de jeunes enfants souffrent d'anémie, et plus de la moitié d’entre eux, environ 520 millions, vivent en Asie. • La prévalence la plus élevée pour les trois groupes de population se trouve en Afrique, mais le nombre d’individus affectés est plus important en Asie. • En Asie, 58 % des enfants d’âge préscolaire, 56,1 % des femmes enceintes et 68 % des femmes hors grossesse sont anémiques. • Plus de la moitié de la population mondiale des enfants d’âge préscolaire et des femmes enceintes réside dans des pays où l'anémie représente un problème de santé publique sévère. • Les pays présentant un problème de santé publique sévère étaient regroupés en Afrique, en Asie, en Amérique latine et aux Caraïbes. • L'Afrique et l'Asie sont les régions les plus affectées par l’anémie et, comme il s’agit également des régions les plus pauvres, cela suggère un lien entre anémie et développement. • L'anémie est trois fois plus répandue en Europe qu’en Amérique du Nord, peut être en raison du fait que l'Europe inclut des pays avec différents profils sociaux et économiques, ou du fait d’une faible couverture des données relatives à l’Europe comparée aux données recueillies pour l’Amérique du Nord, ou peut être aussi en raison de la forte proportion d’aliments fortifiés en fer en Amérique Nord et donc des forts apports en fer issus de ces aliments. A noter que ces estimations ne sont pas quantitativement comparables aux estimations antérieures puisque les méthodologies utilisées sont différentes. Elles présentent des limites mais sont basées sur les meilleures informations disponibles, ce qui en fait un bon point de départ pour suivre les avancements de la suppression de l’anémie. A partir de ces estimations, l’ampleur de l’anémie nutritionnelle ou de l'anémie ferriprive est difficile à évaluer puisque la plupart des études utilisées ne concernaient pas les causes de l'anémie et se limitaient uniquement à la mesure des taux d’hémoglobine. 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 12 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 12 2 · Action urgente requise en faveur de l’anémie nutritionnelle Quelle est la direction à suivre? D’une manière générale, presque la moitié des enfants d’âge préscolaire et des femmes enceintes et près d'un tiers des femmes hors grossesse souffrent d'anémie. Comme les estimations représentent une large part de la population, il est possible qu'elles reflètent la prévalence globale réelle de l'anémie au sein de ces groupes. Cependant, les estimations des régions NU peuvent être plus précises pour certaines populations et certaines zones géographiques en raison de la variabilité considérable de la couverture selon les régions. Pour les enfants de moins de deux ans, l'anémie représente une source d’inquiétude majeure, car leur croissance rapide exige des besoins en fer importants que l’alimentation échoue souvent à couvrir, notamment dans les pays à faibles revenus. Afin de profiter du plein usage de ces données de prévalence, les informations concernant les causes de l’anémie devraient être collectées dans chacune des études ciblant cette pathologie. Ainsi, les interventions visant à prévenir l'anémie pourront être mieux adaptées à la situation locale et être, par conséquent, plus efficaces. Quel est le message clé? L'anémie reste un souci de santé publique considérable. Ces nouvelles estimations sont susceptibles de refléter la situation actuelle et constituent un bon point de départ pour suivre les avancées générales dans le domaine. Les futures études doivent inclure des données sur les causes de l'anémie, car leur absence altère notre capacité à résoudre cet important problème de santé publique. LES FAITS: • Les enfants préscolaires sont âgés de 0 à 4,99 ans, les femmes hors grossesse sont celles ayant entre 15 et 49,99 ans, et aucun âge n'a été défini pour les femmes enceintes. • Les limites de concentration en hémoglobine fixées par l’OMS pour définir l’anémie sont de 110 g/l pour les enfants d’âge préscolaire et les femmes enceintes, et de 120 g/l pour les femmes hors grossesse. • La prévalence de l'anémie en tant que problème de santé publique est catégorisée par l’OMS comme suit: • < 5 % - pas de problème • 5−19 % - problème de santé publique léger • 20−39 % - problème de santé publique modéré • > 40 % - problème de santé publique sévère. • La prévalence globale de l'anémie chez les enfants d’âge préscolaire est de 47,4 %. • La prévalence globale de l'anémie chez les femmes • • • • • • • • enceintes est de 41,8 %. La prévalence globale de l'anémie chez les femmes hors grossesse est de 30,2 %. Globalement, 818 millions de femmes (avec ou sans grossesse) et de jeunes enfants souffrent d'anémie et plus de la moitié d’entre eux, environ 520 millions, vivent en Asie. La prévalence la plus élevée pour les trois groupes de population se trouve en Afrique, mais le nombre d’individus affectés est plus important en Asie. En Asie, 58 % des enfants d’âge préscolaire, 56,1 % des femmes enceintes et 68 % des femmes hors grossesse sont anémiques. Plus de la moitié de la population mondiale des enfants d’âge préscolaire et des femmes enceintes résident dans des pays où l'anémie représente un problème de santé publique sévère. Les pays présentant un problème de santé publique sévère étaient regroupés en Afrique, en Asie, en Amérique latine et aux Caraïbes. L'Afrique et l'Asie sont les régions les plus affectées par l’anémie et, comme il s’agit également des régions les plus pauvres, cela suggère un lien entre anémie et développement. L'anémie est trois fois plus répandue en Europe qu’en Amérique du Nord. 2 ACTION URGENTE REQUISE EN FAVEUR DE L’ANEMIE NUTRITIONNELLE Venkatesh Mannar Quel est le problème et que savons-nous? Le but des Nations Unies de réduire d’un tiers la prévalence de l'anémie d’ici à 2010 est loin d’être atteint. L'anémie nutritionnelle reste fréquente dans beaucoup de pays du monde et son éradication au travers d’interventions efficaces doit constituer une priorité en termes d’attention et d’action. Une carence en fer précoce dans l’enfance a un impact négatif significatif sur le développement physique et intellectuel de l’enfant. Il y a eu une intensification des efforts dans plusieurs pays ce qui donne de l’espoir sur le fait que les interventions peuvent représenter des réussites viables. Il est toutefois admis qu'il n'existe pas de solutions faciles et que les interventions efficaces possèdent leurs inconvénients, mais il semblerait que le manque de priorité des politiques à sup- 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 13 13 3 · Influence de l’économie sur l’anémie nutritionnelle primer l’anémie nutritionnelle constitue l'inquiétude majeure. Il y a une urgence à agir. Qu'a-t-il été accompli? Au cours des dix dernières années, il y a eu des développements clés: • Plus de consensus techniques • Une meilleure compréhension des conditions nécessaires à une supplémentation efficace • Une connaissance et une expérience suffisantes (surtout chez les femmes enceintes) pour concevoir et mettre en œuvre des programmes efficaces • Des directives techniques et par programme pour une planification efficace • Une meilleure information sur la stabilité et la biodisponibilité des composés de fer • Une reconnaissance par l'industrie alimentaire de la nécessité de la fortification • La faisabilité de la double fortification du sel • La technologie pour fortifier le riz en fer et en acide folique • Une augmentation des travaux parvenant à une amélioration variétale des principales cultures • Une plus grande connaissance du lien entre statut en fer et infection. Quelle est la direction à suivre? Les inquiétudes sont que bien que l’efficacité de la supplémentation en fer ait été montrée lors d’expériences contrôlées, la supplémentation sur le terrain ne semble pas apporter une amélioration significative de la prévalence de l'anémie. De plus, les données soutenant la fortification des aliments à grande échelle manquent encore et n'ont pas été systématiquement documentées. Il semble que des progrès seraient réalisés uniquement si: 1. Les questions clés sont abordées et des instructions consensuelles développées 2. Des ponts sont construits entre science/technologie et acteurs de terrain 3. L'application de la supplémentation sur le terrain est renforcée 4. La fortification universelle des aliments de base avec des niveaux considérables de nutriments est entièrement acceptée 5. Des moyens créatifs d'augmentation de la teneur en fer de l'alimentation sont explorés 6. Une amélioration de l'absorption du fer provenant de l'alimentation est recherchée 7. Il y a une meilleure compréhension des interactions entre micronutriments et autres composants alimentaires, et aussi des autres causes de l'anémie 8. Un marketing social et un changement des comporte- ments d’aide sont encouragés 9. Il y a une combinaison d’une bonne réglementation et d’une éducation publique solide et appropriée 10. Une approche multi-interventions est acceptée si elle inclut des apports nutritionnels adéquats (supplémentation, fortification, modification alimentaire, biofortification) et une réduction des infections concomitantes 11. Il y a plus de soutien concluant à tous les niveaux, formant des alliances stratégiques et un engagement pour l’action 12. Il y a des soutiens solides à l’échelle mondiale pour pousser l'action vers l’avant. Quel est le message clé? Il y a un besoin urgent d’action, mais cette action doit considérer plusieurs facteurs pour réussir et rester viable. LES FAITS: • La carence en fer pourrait empêcher 40 à 60 % des enfants des pays en développement d’atteindre leur pleine capacité mentale. • L’OMS répertorie la carence en fer parmi les dix risques les plus sérieux dans les pays où la mortalité infantile est élevée et associée à une forte mortalité des adultes. • Les interventions visant la déficience en fer font partie des interventions de santé publique les plus rentables. • Le rapport coûts-bénéfices des programmes concernant le fer est estimé à 200:1. • Parmi une liste de 17 investissements possibles pour le développement, les retours sur investissements des programmes concernant les micronutriments sont en deuxième position juste derrière les programmes de lutte contre le SIDA. 3 INFLUENCE DE L’ECONOMIE SUR L’ANEMIE NUTRITIONNELLE Harold Alderman et Susan Horton Pourquoi l’évaluation économique est-elle importante? Les gains économiques provenant de l’intérêt porté à toute déficience en micronutriment viennent à la fois des réductions de coût et d’une productivité accrue. Ils 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 14 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 14 3 · Influence de l’économie sur l’anémie nutritionnelle incluent une baisse de la mortalité, une réduction des dépenses de soin, une baisse de la morbidité, une amélioration de la productivité et des bénéfices intergénérationnels au travers d’une amélioration de la santé. Dans le cas de l’anémie ferriprive, l’évaluation économique nécessite de déterminer les coûts de la carence en fer en dollars, afin d’estimer les conséquences dans une unité de mesure commune aux autres demandes de ressources publiques (concernant à la fois les interventions de santé et hors du domaine de la santé). Ceci est en contraste avec le calcul de l’efficacité d'un programme en terme d’augmentation de l'espérance de vie ou d’années de vie corrigées du facteur invalidité (“disability-adjusted life years”, DALY). Il se révèle également important d’évaluer l'impact économique des interventions en termes de coûts et de bénéfices. Il y a plusieurs questions cruciales à considérer lorsque l’on réalise des évaluations économiques: • L’intervention peut avoir plus d'un résultat (p.ex. une intervention sur les femmes enceintes peut à la fois réduire les petits poids de naissance et la mortalité maternelle via une modification du taux d'hémoglobine de la mère); • Certaines interventions n’affectent pas seulement l’anémie, mais ont aussi d’autres conséquences sur la santé et sur l’économie (p.ex. la vermifugation peut être efficace pour améliorer les taux d’hémoglobine ainsi que l’absorption de la vitamine A); • La mesure de la rentabilité via le résultat d'intérêt final (p.ex. la mortalité) coûte habituellement trop cher et prend trop de temps; on lui préfère donc souvent l’utilisation d’indicateurs directs (p.ex. la proportion d’anémiques ou le taux d’hémoglobine); • La rentabilité varie selon l'échelle du programme (p.ex. les coûts peuvent diminuer avec le temps s’il existe des coûts fixes pouvant être étendus sur de plus grands programmes); • Il y a des distinctions entre coûts publics et coûts privés (p.ex. le coût d'un dollar venant des revenus du gouvernement est généralement supérieur à celui d’un dollar pour l'économie). Comment les bénéfices économiques de gestion de l'anémie sont-ils évalués? Deux approches clés sont utilisées: 1. Le calcul des gains attendus en termes économiques si un cas d'anémie était évité. Cette approche est utile pour effectuer des comparaisons des coûts d'intervention. 2. L’estimation de l'impact sur le PNB si les taux d'anémie pouvaient être réduits. Cette approche mesure les gains individuels et crée une motivation plus forte pour changer la volonté politique. Les résultats des bénéfices économiques peuvent être présentés en coûts, soit en terme de productivité, donnant des estimations de sensibilité, soit en termes de DALY, qui sont ensuite convertis en dollars. Chaque approche possède ses avantages et ses inconvénients. Il est important de reconnaître que placer des chiffres précis sur la valeur économique implique de poser une série d’hypothèses et exige de s’adapter au contexte spécifique du pays. Par ailleurs, toutes ces approches mesurent différents concepts et ne peuvent donc pas être directement comparées. Quels sont les coûts économiques d'une réduction de l’anémie? Qu’elle soit estimée en coût par DALY épargné, ou en rapport coûts-bénéfices calculé, la fortification en fer est l’une des interventions de santé publique disponibles les plus intéressantes. • Le coût de la fortification par personne et par an se situe entre 0,10 et 1,00 $ US. • La fortification maison est relativement nouvelle et soulève de formidables promesses pour certains groupes de population, d’autant que les coûts peuvent se révéler intermédiaires entre la fortification et la supplémentation. • Les coûts de supplémentation par personne sont estimés autour de 2,00 à 5,00 $ US; à noter cependant que, souvent, les coûts rapportés ne couvrent pas complètement les coûts personnels, ce qui conduit à des programmes décevants. La recherche opérationnelle est nécessaire à la conception de programmes qui soient rentables sur le terrain. • Dans une étude, le coût de la vermifugation périodique a été estimé à 3,50 $ US par an pour augmenter la participation scolaire d'un enfant. Un programme combinant vermifugation et supplémentation a estimé en utilisant plusieurs hypothèses que l'intervention pourrait mener à un résultat supplémentaire attendu de 29,00 $ US pour un coût de 1,70 $ US. L’importance de la vermifugation a peut-être été négligée, car elle fonctionne en synergie avec la fortification et la supplémentation. • Il y a peu d'études ayant montré la rentabilité des jardins potagers et de l’augmentation de l’élevage de petits animaux. • Les approches de biofortification sont prometteuses, mais supposent de larges coûts fixes de recherche; néanmoins, les coûts différentiels d’opération pour la 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 15 15 4 · Evaluation en laboratoire de la teneur en fer production d’une récolte présentant une disponibilité augmentée du fer dépassent peu les coûts généraux des productions habituelles. En utilisant diverses hypothèses, la stratégie pourrait fournir une valeur globale en terme d’avantages nutritionnels de plus de 694 millions de $ US, ce qui représente un rapport coûts-bénéfices de 19 ou un retour interne de 29 %. Quels sont les résultats des évaluations économiques qui ont été entreprises? Il est clair (voir LES FAITS ci-dessous) que l'anémie, à tous les stades de la vie, fait peser un lourd poids sur la santé et a un impact négatif potentiel fort sur la productivité et donc sur le revenu et le PIB. La perte totale par personne résultant d’altérations physiques et cognitives s’élève à des milliards par an, ce qui est considérable comparé aux modestes coûts de réduction de l’anémie nutritionnelle. Quel est le message clé? Les études d'impact économique montrent que gérer l'anémie nutritionnelle peut avoir un effet significatif sur la productivité, le revenu et le poids que représente la santé. La détermination de l’impact économique total (gain économique et rentabilité) de toute intervention exige une connaissance experte et doit se baser sur les spécificités du programme, du pays et sur les mesures souhaitées pour le résultat. LES FAITS: • Une étude a estimé que, dans les pays en développement, un cinquième de la mortalité périnatale et un dixième de la mortalité maternelle seraient attribuables à la carence en fer. • On estime que 1,5 % des morts à travers le monde sont attribuables au déficit en fer. • En termes de DALY, l'anémie représente également 35 millions de perte d’années de vie en bonne santé (2,5 % de perte globale de DALY). • Les interventions basées sur le fer chez l’adulte ont montré une productivité accrue d’environ 5 % dans le domaine des travaux manuels légers et jusqu’à 17 % dans celui des travaux manuels lourds. • Une étude indonésienne a montré des effets positifs sur le revenu des travailleurs autonomes s’élevant à 20 % pour les hommes et à 6 % pour les femmes. • Une série d'études indique qu’une variation de quotient intellectuel d’un demi écart-type se répercute sur le salaire de la région à hauteur de 5 %. • On peut déduire des effets de l’anémie sur le développement cognitif que cette pathologie réduit potentiellement le salaire des adultes de 2,5 %. • • • • • Le coût de la fortification par personne et par an se situe entre 0,10 et 1,00 $ US, avec un rapport coûtsbénéfices allant de 6:1 (bénéfices physiques des adultes) à 9:1 (en incluant les bénéfices cognitifs estimés des enfants). On estime que les coûts de la supplémentation par personne se situent entre 2,00 et 5,00 $ US; notons toutefois que ces coûts ne couvrent souvent pas complètement les coûts personnels. Les programmes de supplémentation sont 5 fois plus coûteux que la fortification en termes de DALY. Dans une étude, le coût de la vermifugation a été estimé à 3,50 $ US par an pour augmenter la participation scolaire d’un enfant. On estime que les programmes combinant vermifugation et supplémentation pourraient avoir des répercutions positives sur les salaires, avec un bénéfice attendu de 29,00 $ US pour un coût de 1,70 $ US. 4 EVALUATION EN LABORATOIRE DE LA TENEUR EN FER Hans-Konrad Biesalski et Jürgen G. Erhardt Quel est le problème et que savons-nous? La nutrition joue un rôle important dans l'anémie et, de tous les nutriments impliqués, le fer se trouve être l’élément le plus crucial. Par conséquent, l’évaluation de la teneur en fer est bien souvent essentielle au diagnostic de l'anémie. En général, la carence en fer se met en place via trois étapes consécutives: épuisement des réserves en fer, érythropoïèse et anémie ferriprive. Ces trois étapes peuvent être analysées sur le plan biochimique par une mesure de l'hémoglobine (Hb), de la ferritine et du récepteur soluble à la transferrine (sTfR). Bien qu'il existe des indicateurs cliniques et que l'évaluation des apports en fer puisse être utile, le diagnostic repose principalement sur ces marqueurs biochimiques, qui sont les seuls à présenter la spécificité et la sensibilité nécessaires. Malheureusement, les méthodes permettant de les mesurer coûtent cher et sont, pour la plupart, difficiles à réaliser. A quel point les différents indicateurs biochimiques sont-ils précis et utiles? Il y a trois indicateurs importants pour mesurer le statut en fer: 1. L’hémoglobine (Hb): la mesure de l’Hb est essentie- 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 16 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 16 5 · Signification fonctionnelle de l’anémie par carence martiale lle au diagnostic de l'anémie nutritionnelle et fait partie des méthodes les plus courantes, les plus faciles et les moins onéreuses. Des kits sont disponibles chez différents fabricants et il existe également de petits hémoglobinomètres portables utilisables sur le terrain. La mesure de l’Hb n'est cependant pas très sensible, ni très spécifique à la carence en fer (seul le troisième stade affecte la synthèse d’Hb). Ainsi, pour déterminer si le déficit en fer est responsable de l’anémie, il est habituellement nécessaire d'inclure d'autres indicateurs. 2. La ferritine: la ferritine est actuellement considérée comme le plus important indicateur du statut en fer, car sa concentration chute dès le premier stade de la déficience en ce minéral. Par conséquent, il s’agit de l'indicateur le plus sensible et le coût des kits de dosage ELISA de la ferritine ou d’autres méthodes de mesure est relativement bas. A noter toutefois que beaucoup de facteurs, dont l’infection et l’inflammation, peuvent augmenter la concentration en ferritine, de sorte qu’une valeur haute n'indique pas nécessairement une bonne teneur en fer. De fait, il est important de mesurer également les paramètres d’infection aiguë (protéine c-réactive, PCR) et chronique (glycoprotéine-α1, GPA). 3. Le récepteur soluble à la transferrine (sTfR): la mesure de cet indicateur est de plus en plus utilisée pour identifier la carence en fer dans des situations où l’infection fait rage, car il est bien moins influencé par ce paramètre infectieux que les autres indicateurs. Il n'est pas aussi sensible que la ferritine, mais plus que l’Hb. Jusqu'à présent, il n’existe pas de standard certifié au niveau international et chaque méthode/kit possède ses propres valeurs seuils. Les mesures du sTfR sont encore beaucoup plus chères que celles de la ferritine. Le rapport sTfR sur ferritine constitue l’indicateur le plus sensible du statut en fer, puisqu’il permet le calcul des réserves en fer en mg par kg de poids corporel. Par conséquent, il constitue l’étalon or de la moelle osseuse qui fait défaut dans la définition de la déficience en fer. En plus de ces indicateurs, les trois suivants peuvent parfois se révéler également intéressants: 1. La saturation en fer de la transferrine plasmatique et le volume globulaire moyen (VGM): ces paramètres sont des indicateurs bien établis et relativement peu coûteux à mesurer, mais utiles uniquement dans des conditions cliniques où le matériel pour leur détermination est disponible. 2. L’hématocrite: cet indicateur est très facile à mesurer mais, puisqu’il est encore moins sensible que l’Hb pour identifier la déficience en fer, il n’est pas très utile pour diagnostiquer l’anémie nutritionnelle. 3. Zn-protoporphyrine (ZnPP): il s’agit d’une mesure simple, robuste et utile au dépistage de la carence en fer, mais elle exige un appareil spécial. A noter que le plomb, même à des niveaux normaux d’exposition environnementale peut augmenter la concentration en ZnPP. Néanmoins, dans la plupart des cas, cela ne pose pas de problème. Quelle est la direction à suivre? Il est généralement admis que la combinaison de l’Hb, de la ferritine, du sTfR et des paramètres d'infection (PCR, GPA) constitue le meilleur indicateur pour mesurer le statut en fer, mais quatre éléments clés restent à améliorer au niveau des recherches en cours: la réduction des coûts; l’amélioration du débit des mesures; l’augmentation de leur sensibilité/spécificité et de leur robustesse. Un autre défi majeur est de collecter le sang sur le terrain aussi facilement et de manière aussi fiable que possible. La collecte des échantillons sanguins sur papier-filtre est une alternative aux échantillons veineux car elle ne nécessite pas de centrifugation, de congélation ou de transport respectant la chaîne du froid. Malheureusement, les tâches de sang séchées présentent des limites et exigent que des protocoles stricts soient respectés. Quel est le message clé? La combinaison de l’Hb, de la ferritine, du sTfR et des paramètres d'infection (PCR, GPA) constitue le meilleur indicateur pour mesurer le statut en fer. Mais, pour assurer la mise en oeuvre et l’exactitude des interventions, en particulier dans les pays en développement, des recherches supplémentaires sont nécessaires afin de réduire le coût des mesures, d’améliorer leur robustesse et de trouver des méthodes de terrain plus faciles. 5 VUE D'ENSEMBLE DE LA SIGNIFICATION FONCTIONNELLE DE L’ANEMIE PAR CARENCE MARTIALE Gary Gleason et Nevin S. Scrimshaw Quel est le problème et que savons-nous? L'anémie ferriprive est la déficience en micronutriment et même, plus globalement, la déficience nutritionnelle la 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 17 5 · Signification fonctionnelle de l’anémie par carence martiale 17 plus répandue dans le monde. Il existe trois stades différents de déficit en fer. Le premier, l’épuisement des réserves en fer, n’a pas de conséquence fonctionnelle. Cependant, lorsque ces réserves sont épuisées et que les tissus commencent à manquer de fer, la situation conduit à une déficience. Les effets négatifs pour les individus déficients en fer, mais qui ne souffrent pas directement d’anémie, incluent une altération des capacités cognitives, une diminution de la capacité physique, et une baisse de l’immunité. Il y a donc des conséquences délétères à la carence en fer avant même que l’anémie ferriprive n’apparaisse. Lorsqu’elle est sévère, cette étape finale peut s’avérer fatale. évitée. Cette situation se révèle encore plus grave chez les enfants de petits poids de naissance, ce qui est fréquent lorsque la mère est malnutrie pendant la grossesse. Ainsi, l’OMS et l'UNICEF recommandent que les enfants de petits poids de naissance dans les populations présentant de hauts niveaux d'anémie reçoivent des suppléments de fer à partir de 2 mois et jusqu'à 24 mois. Lorsque les enfants grandissent et commencent leur scolarité, des études ont montré que les anémiques présentaient les performances les plus faibles. Cela conduit à de sérieuses implications quant à l'efficacité de l'éducation, surtout dans les pays en développement où l'anémie est très répandue. Qu'a-t-il été accompli? La réduction de l’anémie ferriprive à la naissance et dans la petite enfance a bénéficié d’une intensité considérable en raison de son association avec une altération des performances psychomotrices, ainsi que des modifications comportementales qu’elle engendre. Bien que certains déficits du développement puissent être corrigés par un traitement à base de fer, les études les plus récentes suggèrent que des différences d'adaptations cognitives et sociales demeurent, et sont susceptibles de devenir permanentes. Le risque de carence en fer est élevé après la naissance et au cours de la petite enfance, car les réserves reçues à la naissance sont utilisées pour assurer les fonctions normales et la croissance, tandis que seuls environ 50 % des besoins en fer d'un enfant de 6 mois peuvent être couverts par le lait maternel. Ainsi, l’allaitement maternel continu ne fournira que la moitié du fer nécessaire à l'enfant et, pour beaucoup d'enfants, l'autre moitié (+ 4 mg / jour) devra provenir d’aliments de complément fortifiés ou d’une supplémentation si l'anémie veut être La recherche montre également l'impact du statut en fer sur: • La capacité physique – la carence en fer réduit les performances physiques ce qui a notamment été constaté chez les travailleurs agricoles. • La morbidité due au rôle du fer dans plusieurs mécanismes biologiques impliqués dans la réponse immunitaire aux infections. Il reste néanmoins quelques sujets à discussion et quelques questions non résolues, en particulier en ce qui concerne les relations entre la supplémentation en fer des jeunes enfants non déficients en fer et le paludisme. Des recherches supplémentaires sont nécessaires. Les nouvelles recommandations de l’OMS sont que l’anémie ferriprive devrait être dépistée chez les jeunes enfants dans les régions où le paludisme est endémique avant que l’on ne leur donne des suppléments de fer. Il y a moins de controverses au regard des autres infections, mais la prudence est encore de rigueur. Les preuves indiquent une baisse de la résistance à l’infection chez les individus déficients en fer. Cependant, s’ils sont sévèrement malnutris et anémiques, les mécanismes corporels qui privent les agents pathogènes de fer peuvent être perturbés par un surplus de ce minéral (en particulier en administration parentérale). Dans ces circonstances, avant que le système immunitaire ne se soit remis des effets de la carence en fer, les pathogènes peuvent se développer de manière explosive avec des effets désastreux pour l'individu. • La régulation de la température – la carence en fer sévère abaisse la capacité du corps à maintenir sa température dans un environnement froid. • L’excès de fer et les maladies chroniques - des inquié- Pendant la grossesse, l’anémie ferriprive est répandue car la mère a besoin de fer supplémentaire pour fabriquer le sang nécessaire à l’expansion de son volume sanguin (augmentation de ± 20 %) et aussi pour assurer les besoins du placenta et du foetus en plein développement. Ainsi, pendant la seconde moitié de la grossesse, bien qu’il ait été montré que les femmes enceintes absorbaient plus de fer provenant de la nourriture, même chez les femmes en bonne santé, les besoins en fer sont très difficiles à couvrir par l’alimentation. L'anémie pendant la grossesse est associée à une augmentation de la morbidité et de la mortalité de la mère et de l'enfant, et à de petits poids de naissance. Chez les mères anémiques, les grossesses arrivent 30−45 % moins souvent à un terme favorable, et les nouveaux-nés des mères anémiques ont moins de chances de disposer de réserves normales en fer - ils commencent donc leur vie avec un handicap. Contrer la déficience en fer et la carence martiale de la grossesse à la naissance de l’enfant et tout au long de son enfance s’avère donc crucial, et les interventions doivent donc commencer très tôt dans le cycle de vie. 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 18 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 18 6 · Métabolisme du fer tudes ont été soulevées au sujet de relations possibles entre réserves en fer élevées et maladies cardiovasculaires ou cancers. Bien que les études entreprises ne soient pas concluantes, elles indiquent le besoin de recherches complémentaires dans ce domaine. Quelle est la direction à suivre? En général, les effets négatifs de la carence en fer sur la santé, la capacité physique, les performances au travail, les performances cognitives et le comportement peuvent être corrigés en apportant du fer en quantité et sous une forme appropriées. Les stratégies pour assurer un apport adéquat en fer incluent une combinaison de la promotion d’une alimentation diversifiée avec des aliments riches en fer, une fortification en micronutriments des aliments de base et une fortification ciblée ou une supplémentation en fer pour les groupes de population à haut risque ou ayant des besoins particulièrement élevés. Si l’anémie ferriprive modérée à sévère apparaît dans la petite enfance, les effets sur la cognition peuvent être irréversibles. Le fer devrait être regardé comme une épée à double tranchant, dont le manque mais aussi l’excès peuvent avoir des conséquences délétères considérables sur un individu. Quel est le message clé? Les conséquences fonctionnelles de la carence en fer et ses impacts économiques et sociaux à long terme ont mené à un objectif global de réduction de la prévalence d'anémie de 30 % entre 2000 et 2010. En 2007, il n’y a pas eu de progrès substantiel dans la plupart des pays en développement, et l'anémie ferriprive devrait toujours être considérée comme une priorité surtout dans les groupes de population à haut risque: femmes enceintes, nouveaux-nés et jeunes enfants. Il existe néanmoins quelques régions où la prudence est de rigueur, afin d’éviter un impact potentiellement négatif des interventions. LES FAITS: • Dans beaucoup de pays en développement, on estime qu’une femme enceinte sur deux, et que plus d'un enfant d’âge préscolaire sur trois, sont anémiques. • Dans les pays où la consommation de viande est faible, jusqu'à 90 % des femmes sont ou deviennent anémiques pendant leur grossesse. • On estime que 800 000 décès à travers le monde sont attribuables à l’anémie ferriprive qui reste parmi les quinze principaux facteurs de contribution au poids global de la maladie. • Lorsqu’elle est exprimée en DALY, l’anémie ferriprive représente 25 millions ou 2,4 % du total des DALY. • • • • • Le corps d’un homme normal contient au total ± 4,0 g de fer et une femme normale en moyenne 2,5 g. Approximativement 73 % du fer de l’organisme se trouve dans l'hémoglobine des globules rouges circulants et dans la myoglobine du muscle, 12 % dans les protéines de stockage du fer, et 15 % dans des douzaines d'enzymes particulièrement importantes car essentielles au fonctionnement de toutes les cellules et de tous les tissus. En dessous des niveaux normaux d'hémoglobine, la capacité au travail physique est corrélée linéairement à ce niveau d'hémoglobine. Cette relation est particulièrement significative lorsque la concentration en hémoglobine chute en dessous de 100 g/L, taux qui se trouve 20 à 40 g/L en dessous de la limite inférieure pour les adultes normaux. L'anémie modérée est définie par un taux d’hémoglobine de 70−90 g/L, et l’anémie sévère par un taux d’hémoglobine inférieur à 70 g/L. Chez les mères anémiques, les grossesses arrivent 30−45 % moins souvent à un terme favorable, et leurs nouveaux-nés ont moins de chances de disposer de réserves normales en fer. L’objectif global au niveau national est de réduire la prévalence de l'anémie, dont la carence en fer, de 30 % entre 2000 et 2010. Dans la plupart des pays en développement, le rythme des progrès obtenus jusqu’en 2007 devra être accéléré pour espérer atteindre ce but. 6 METABOLISME DU FER Sean Lynch Que savons-nous? Le fer joue un rôle vital dans le transport et le stockage de l'oxygène, le métabolisme oxydatif, la prolifération cellulaire et beaucoup d'autres processus physiologiques. Mais il a aussi une propriété centrale qui lui permet de recruter les donneurs d'électrons et de participer aux processus redox. Cette propriété explique également sa toxicité potentielle au travers de la génération de radicaux libres. En outre, le fer est un nutriment essentiel à tous les organismes pathogènes connus. Librement disponible, le fer peut grandement augmenter leur virulence. Par conséquent, il n’est pas surprenant que le corps humain a finement régulé les processus d’absorption, de transport et de 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 19 6 · Métabolisme du fer stockage du fer, qui assurent une réserve disponible pour la croissance et le fonctionnement cellulaires. Dans le même temps, ces processus limitent sa participation aux réactions générant des radicaux libres potentiellement toxiques. Ils évitent également que les pathogènes aient un accès direct au fer. Approximativement 75 % du fer de l’organisme est présent au sein de composés métaboliquement actifs. Les 25 % restants constituent une réserve dynamique continuellement renouvelée. Cette réserve assure une provision adéquate pour le fonctionnement normal des organes en dépit des variations à court terme liées à son absorption ou aux pertes de l’organisme. Elle répond également aux demandes urgentes quand les besoins sont augmentés. Les réserves de fer qui ont été utilisées sont alors remplacées progressivement grâce à une absorption accrue. Le pool de transferrine circulante répond quant à lui pratiquement à tous les besoins fonctionnels. Il n’équivaut qu’à environ 3 mg de fer chez les adultes, mais une quantité dix fois supérieure (± 35 mg) circule chaque jour dans ce pool, dont environ 80 % destiné à la production de globules rouges. La majeure partie du fer transféré de la réserve dynamique au pool de transferrine circulante provient du fer récupéré suite au traitement de l'hémoglobine des globules rouges ayant atteint la fin de leur vie d’une durée d’environ quatre mois. Le fer absorbé entre également dans ce pool, mais il ne représente que 1−1,5 mg par jour. La libération du fer dans la circulation est finement régulée en fonction des besoins. Elle peut être divisée ou multipliée plusieurs fois. Quoi qu’il en soit, chez les individus normaux présentant des réserves de fer adéquates, la saturation en fer de la transferrine (la proportion de la protéine qui transporte du fer à un instant donné) est maintenue autour de 35 %. Quelles sont les récentes avancées ayant amélioré notre compréhension du métabolisme du fer? La découverte récente d'un petit peptide cationique riche en cystéine, appelé hepcidine, produit par le foie, circulant dans le plasma et excrété par les urines, a révolutionné notre compréhension de la régulation de l’absorption et du stockage du fer. L’hepcidine semble avoir un rôle fondamental dans l’assurance du maintien des réserves ferriques à un niveau optimal, dans la régulation de l’approvisionnement en fer de l’ensemble des cellules de l’organisme en fonction de leurs besoins fonctionnels et dans le blocage de l'absorption du fer inutile au niveau de l'intestin. Ce peptide agit comme un régulateur négatif de la libération des réserves et de l’absorption intestinale. De hauts niveaux d’hepcidine réduisent le taux de libération du fer de réserve et son absorption intestinale, via 19 une liaison au seul exportateur de fer cellulaire connu, la ferroportine, et provoquant sa dégradation. L'expression de l'hepcidine est induite indépendamment par l'accumulation du fer de réserve et par l’inflammation. Elle est supprimée quand les réserves en fer sont épuisées, et par l’anémie, l’hypoxémie et l’érythropoïèse accélérée. L’hepcidine permet aux tissus de l’organisme de recevoir la bonne quantité de fer pour couvrir leurs besoins fonctionnels. Cependant, toutes les cellules ont également la capacité de réguler leur propre économie de fer interne en augmentant ou en diminuant l'expression des récepteurs à la transferrine, lesquels sont indispensables à la récupération par les cellules du fer issu du pool de transferrine circulante. Depuis longtemps, il est connu que la balance en fer est maintenue par le contrôle de l’absorption. Néanmoins, des avancées considérables dans notre compréhension des processus de régulation de l'absorption ont eu lieu récemment. L'absorption se produit tout d’abord au niveau de l'intestin grêle, via les entérocytes mûrs situés au sommet des villosités duodénales. Deux transporteurs, le transporteur apical spécifique HCP1 (Heme Carrier Protein 1) et le transporteur de métal divalent DMT1 (Divalent Metal Transporter 1), semblent modérer l'entrée de la majeure partie, si ce n’est de tout, le fer alimentaire dans les cellules de la muqueuse intestinale. Le fer héminique est toujours aisément absorbé. Les molécules d'hème intactes sont transportées dans les entérocytes. Cependant, l'hème ne représente qu’une petite partie du fer alimentaire, même pour les personnes qui mangent beaucoup de viande ou de poisson. Le fer est majoritairement présent sous d'autres formes communément regroupées sous le terme de fer non héminique. Ce fer est transporté dans les entérocytes par le DMT1, mais il doit d’abord être solubilisé et réduit à l'état ferreux. De plus, dans l’alimentation, divers facteurs, et en particulier les phytates et les polyphénols, peuvent empêcher la liaison entre le fer non héminique et le DMT1, avec comme conséquence une absorption inhibée. La possibilité que des récepteurs spécifiques à d'autres formes de fer alimentaire aient un rôle significatif dans l'absorption nécessite de plus amples éclaircissements. Comme indiqué ci-dessus, l’absorption est régulée par la ferroportine via le contrôle des exportations du fer depuis les entérocytes du duodénum jusqu’au pool de transferrine circulante. Ces entérocytes ont une courte durée de vie et le fer qui n'est pas transféré à la circulation est perdu lorsque les cellules exfolient. L'absorption du fer non héminique est également régulée au moment de l’entrée dans les entérocytes par des modifications de l'expression du DMT1. 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 20 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 20 6 · Métabolisme du fer Quels sont les besoins en fer au cours de la vie humaine? Le fer se trouve dans pratiquement tous les aliments. L’apport en fer alimentaire est donc relié à l’apport énergétique. Les besoins en fer sont plus élevés dans les deuxième et troisième trimestres de grossesse. Ce besoin est couvert par l’utilisation des réserves de la mère, accumulées avant la conception et pendant le premier trimestre du fait de l’arrêt des menstruations, ainsi que par l’augmentation marquée de l’absorption au cours du deuxième et du troisième trimestres. Les besoins sont également élevés chez les jeunes enfants en particulier entre 6 et 18 mois. Une fois que les réserves en fer de la naissance sont épuisées, le statut en fer des jeunes enfants dépend des aliments de complément car la teneur en fer du lait humain est faible. Malheureusement, dans beaucoup de pays en développement, les aliments de complément traditionnels sont de piètres sources de fer biodisponible. Par conséquent, les enfants de 6 à 18 mois sont fréquemment déficients en ce minéral. Les besoins sont accrus au cours de la poussée de croissance durant l’adolescence et dès le début des menstruations chez les filles. Enfin, les femmes en âge de procréer sont à risque de déficience en fer en raison de leurs pertes en fer menstruelles. Les besoins sont moindres chez les hommes et les femmes ménopausées. Quels troubles du bilan ferrique peut-on rencontrer? Les trois désordres courants du bilan ferrique sont la déficience, la surcharge en fer et l'anémie inflammatoire (également appelée anémie des maladies chroniques). 1. La déficience en fer reste la carence en micronutriment la plus répandue à travers le monde. Elle constitue toujours une condition acquise résultant d'une alimentation contenant trop peu de fer biodisponible. Dans les pays en développement, les aliments traditionnels contiennent généralement de grandes quantités d'inhibiteurs de l'absorption du fer, notamment des phytates et des polyphénols. De plus les observations récentes indiquent que les maladies qui affectent le duodénum, en particulier les infections à H. pylori et les maladies coeliaques, pourraient être plus répandues que ce qui est alors soupçonné et qu'elles pourraient avoir une importante contribution. De nouvelles recherches sont nécessaires pour confirmer ces observations et établir leur pertinence potentielle quant à la prévention des déficiences en fer alimentaire. Enfin, les maladies causant des pertes sanguines, en particulier les infections à ankylostomes, contribuent de manière importante à la forte prévalence des carences en fer dans beaucoup de pays en développement. 2. La surcharge en fer est beaucoup moins fréquente que la carence. La surcharge systémique primaire (hémochromatose) résulte presque toujours d'une spécificité génétique affectant l’hepcidine ou la ferroportine et perturbant, de fait, la régulation du transport du fer. La forme courante de surcharge en fer chez les Caucasiens, l’hémochromatose HFE, résulte d'un déficit relatif en hepcidine. La surcharge en fer secondaire se produit lors d’une thalassémie et d’une anémie sidéroblastique car le traitement de ces situations pathologiques exige des transfusions de sang répétées, et l’érythropoïèse accélérée, caractéristique de ces troubles, réduit l'expression de l'hepcidine. 3. L'anémie inflammatoire est caractérisée par une baisse de la libération du fer de réserve, une absorption réduite, de faibles concentrations plasmatiques en fer et en transferrine, une restriction de l’approvisionnement en fer disponible pour la production de globules rouges et une anémie légère ou modérée. L'expression accrue de l'hepcidine explique presque toutes les conséquences de cette pathologie, généralement considérée comme une adaptation de l'hôte pour répondre à la présence de pathogènes et rendre le fer moins disponible. Quel est le message clé? Des avancées majeures ont été réalisées dans la compréhension de la physiologie du métabolisme du fer chez l’humain et la physiopathologie des troubles qui lui sont associés, même si beaucoup de questions restent encore sans réponse. La recherche dans ce domaine est donc indispensable. La connaissance gagnée a toutefois fourni un socle scientifique solide permettant d’élaborer des approches de lutte contre la déficience nutritionnelle en fer. LES FAITS: • Les êtres humains disposent normalement de 40 à 50 mg de fer/kg de poids corporel. • Approximativement 75 % du fer de l’organisme est présent au sein de composés métaboliquement actifs; les 25 % restants constituent une réserve dynamique renouvelée continuellement. • L’approvisionnement en fer des cellules de l’organisme est rigoureusement régulé par le contrôle de l'absorption et la libération des réserves. • L’hepcidine a un rôle central dans le contrôle de la balance en fer. • La carence et la surcharge en fer, ainsi que l’anémie inflammatoire, constituent les troubles du métabolisme du fer les plus courants. La déficience en fer 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 21 7 · Optimisation de la biodisponibilité du fer résulte d’une alimentation contenant des teneurs en fer biodisponible insuffisantes pour satisfaire les besoins; la surcharge primaire en fer est causée par des mutations génétiques héréditaires conduisant à une dysrégulation de l'hepcidine ou à des altérations des récepteurs ferroportine; l'anémie inflammatoire est le résultat d’une expression accrue de l'hepcidine induite par les cytokines inflammatoires. 7 OPTIMISATION DE LA BIODISPONIBILITE DU FER DES COMPOSES UTILISES POUR LA FORTIFICATION DES ALIMENTS Richard Hurrell et Ines Egli Quel est le problème et que savons-nous? Dans toute intervention de fortification, il est difficile d'assurer l'efficacité des fortifiants utilisés. La biodisponibilité s’avère d’une importance cruciale pour atteindre cette efficacité. Il a été montré que la biodisponibilité des composés ferriques par rapport au sulfate ferreux (valeur de biodisponibilité relative, VBR) était utile pour la classification de leur potentialité à fortifier les aliments. Cependant, l'efficacité des aliments fortifiés en fer dépend, non seulement, de l’absorption absolue du composé de fer qui est influencée par sa VBR, mais aussi, par la quantité de fortifiant ajoutée, le statut en fer du consommateur et la présence dans le repas d'inhibiteurs (p.ex. acide phytique) ou d’activateurs de l'absorption du fer (p.ex. acide ascorbique). Qu'a-t-il été accompli? Concernant la fortification des aliments, l'OMS a publié des directives qui incluent des recommandations sur les composés de fer à privilégier et un protocole pour déterminer les niveaux de fortification en fer. Quels sont les composés ferriques recommandés? Bien qu'un ordre de préférence pour les composés ferriques ait été communiqué par l’OMS, il doit être noté que la préférence doit également dépendre du véhicule utilisé, et les directives listent donc les composés les plus appropriés à ajouter aux différents véhicules: farines de céréales, aliments à base de céréales, produits laitiers, produits du cacao, condiments. Chaque composé possède aussi des avantages et des inconvénients spécifiques qui doivent être évalués individuellement. 21 Le fer électrolytique est la seule poudre de fer élémentaire recommandée. Le fer atomisé et les poudres de fer réduites au dioxyde de carbone ne sont pas recommandés notamment en raison de leur VBR basse. Le fer réduit à l’hydrogène et les poudres de fer carbonylique pourraient être recommandés lorsqu’ils seront mieux documentés. Par ailleurs, le NaFeEDTA (fer EDTA) n’est pas recommandé pour la fortification des aliments de complément car il existe trop peu d’études chez les jeunes enfants, le comité d’experts commun FAO/OMS sur les additifs alimentaires a donc posé des limites le concernant dans ses recommandations. Quelle est l’importance de la biodisponibilité relative (VBR)? La VBR est importante pour classer les différents composés de fer par rapport au sulfate ferreux dont la VBR est fixée à 100. Ce classement se base sur la capacité du composé ferrique à intégrer l’hémoglobine chez les rats anémiques ou, plus récemment, sur l’évaluation de l’absorption du fer chez l’homme par des techniques isotopiques. Ainsi, quatre catégories de composés ferriques ont été développées. Chaque catégorie et chaque composé présente des avantages et des inconvénients qui doivent être considérés individuellement, en se basant spécifiquement sur le véhicule sélectionné pour la fortification. Les caractéristiques des composés peuvent également varier selon la méthode de fabrication, et leur VBR peut être influencée par le véhicule alimentaire et le statut en fer du sujet, ce qui amène parfois de façon inattendue à des VBR particulièrement basses. • Catégorie 1: facilement soluble dans l'eau et avec une VBR proche de 100 chez les adultes. Malheureusement, les composés de cette catégorie ont tendance à causer des changements de couleur et de saveur inacceptables. Ils incluent le sulfate ferreux, le gluconate ferreux, le lactate ferreux et le citrate ferrique d’ammonium. • Catégorie 2: faiblement soluble dans l'eau mais facile à dissoudre dans l'acide dilué des sucs gastriques, il a donc une VBR de 100. Ces composés causent moins de modifications organoleptiques du fait de leur faible solubilité dans l’eau. Cette catégorie inclut le fumarate ferreux et le succinate ferreux. • Catégorie 3: insoluble dans l'eau et faiblement soluble dans l’acide dilué, causant donc peu de modifications sensorielles, mais ayant une VBR inférieure et plus variable. Cette catégorie inclut le pyrophosphate ferrique, le pyrophosphate ferrique micronisé dispersible (MDFP), l’orthophosphate ferrique et les composés de fer élémentaire. • Catégorie 4: l'avantage de ces composés réside dans 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 22 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 22 8 · Interactions avec le cuivre et le zinc le fait, qu’en présence d'acide phytique, ils ont une VBR 2 à 3 fois supérieure à celle du sulfate ferreux. Ils sont cependant plus enclins à provoquer des modifications sensorielles que les composés des catégories 2 ou 3. Cette catégorie inclut les chélates d'acides aminés et le NaFeEDTA. Comment peut-on augmenter la biodisponibilité du fer utilisé pour la fortification? Il y a cinq voies majeures pour améliorer la biodisponibilité du fer à ajouter aux aliments: 1. L'acide ascorbique est le composé le plus communément ajouté pour l'amélioration de l'absorption du fer, mais il est sujet à des pertes en cas de traitement et de stockage. L’acide ascorbique agit de manière dose dépendante et la recommandation générale est un rapport molaire acide ascorbique sur fer de 2:1 pour les produits à faible teneur en phytates et de 4:1 pour les produits riches en phytates. 2. L'acide érythorbique est un stéréoisomère de l'acide ascorbique qui semble avoir un effet encore meilleur, mais il est plus sensible à l’oxydation ce qui peut limiter son utilité. 3. Les acides organiques, bien qu'ils augmentent l'absorption du fer, ne représentent pas une option (à l'exception possible des jus de fruits), car les grandes quantités requises pour cet effet provoquent des modifications de saveur inacceptables dans la plupart des véhicules. 4. Les complexes EDTA, Na2EDTA et CaNa2EDTA sont des additifs alimentaires acceptés qui pourraient être utilisés pour augmenter l’absorption du fer des composés hydrosolubles. 5. La dégradation de l’acide phytique (un inhibiteur fort de l'absorption du fer), par l'addition de phytases exogènes ou par l'activation de phytases natives dans les grains de céréales en milieu aqueux et en conditions de pH et de température contrôlées, peut constituer une technique appropriée pour les aliments de complément à faible coût à base de céréales et de légumineuses. Quels niveaux de fortification recommande-t-on? Lorsque l’on définit des niveaux de fortification, la clé réside dans la connaissance de la composition de l'alimentation habituelle, afin d’estimer la biodisponibilité du fer à 5, 10 ou 15 %, et de posséder une information détaillée sur les apports alimentaires en fer dans la population ciblée. Le but ultime est de calculer la quantité de nutriment supplémentaire requis au quotidien, afin que seulement 2,5 % de la population ciblée ait un apport inférieur au besoin moyen estimé (BME). Quand de hauts niveaux de fortification sont exigés pour atteindre l’objectif visé, il faut également prendre soin de s’assurer que les autres groupes de population ne dépassent pas les limites supérieures. A noter que la méthode servant à déterminer le BME ne devrait pas être utilisée pour estimer la prévalence d’apports en fer inadéquats, puisque les apports en fer de certains sous-groupes de population (p.ex. les femmes réglées et les enfants) ne sont pas distribués normalement. Dans ces groupes de population, il est recommandé d’utiliser l'approche complète fondée sur les probabilités (full probability approach) afin de définir le niveau de fortification. L’OMS fournit des tables de probabilité pour cela. Quel est le message clé? Techniquement, nous savons maintenant comment concevoir une alimentation efficacement fortifiée en fer. Cette connaissance est disponible dans les directives de l’OMS. Lorsque l’on conçoit un aliment fortifié en fer, le fabricant de l’aliment doit choisir le composé de fer présentant la plus haute VBR, ne causant aucun changement sensoriel ou seulement des changements limités dans l’aliment, et qui soit rentable. En parallèle, le niveau de fortification devrait être basé sur les besoins et les habitudes alimentaires du consommateur. Les infections répandues et les déficiences concomitantes en d'autres micronutriments peuvent entraver son efficacité. Par ailleurs, il ne doit pas être oublié qu'une fabrication, un système de distribution, un contrôle qualité et des procédures de suivi efficaces, ainsi que des mesures de santé interactives et un bon marketing social, doivent également être mis en place pour que l’intervention soit un succès. 8 INTERACTIONS AVEC LE CUIVRE ET LE ZINC DANS L’ANEMIE: UNE PERSPECTIVE DE SANTE PUBLIQUE Manuel Olivares, Eva Hertrampf et Ricardo Uauy Quel est le problème et que savons-nous? Le cuivre et le zinc sont des nutriments essentiels et des carences en ces deux minéraux conduisent à l'anémie. Les études expérimentales ont montré un effet inhibiteur du zinc sur l’absorption du fer et il a été proposé que ces deux micronutriments rivalisent pour une voie d’absorp- 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 23 8 · Interactions avec le cuivre et le zinc tion commune, toutefois les mécanismes exacts impliqués dans cette interaction au niveau de l'absorption ne sont pas encore totalement compris. Il a également été démontré que de fortes doses de zinc inhibent l'absorption du cuivre et peuvent produire un déficit en ce dernier élément, ce qui pourrait indirectement affecter le statut en fer et mener à l’anémie. Le zinc et le cuivre ont une interaction antagoniste au sein de l'érythrocyte. La pertinence de ces interactions en terme de santé publique a été considérée comme limitée dans le passé, mais des études récentes montrent qu’une supplémentation combinant fer et zinc est moins efficace qu’une simple supplémentation en fer seul pour réduire la prévalence de l'anémie et améliorer le statut en fer. A noter que certaines études n'ont pas confirmé cet effet potentiellement nuisible du zinc, et que trois études, portant sur des sujets vraisemblablement déficients en fer et en zinc, ont démontré une augmentation plus importante de l'hémoglobine après une supplémentation combinée en ces deux minéraux qu'avec une supplémentation en fer ou en zinc seul. Dans les pays en développement, la carence en fer coexiste avec des déficiences en d’autres micronutriments et avec les infections, et les récentes recherches montrent que les carences en cuivre et en zinc pourraient constituer un facteur contribuant à augmenter la fréquence des infections. De plus, les infections aiguës sont une cause reconnue d'anémie légère à modérée. La résistance aux infections se détermine par une fonction immunitaire saine, et le cuivre et le zinc sont tous deux nécessaires au bon fonctionnement du système immunitaire. En plus des altérations du système immunitaire, la déficience en zinc peut contribuer à une sensibilité accrue aux pathogènes et plusieurs études ont montré une incidence plus élevée de diarrhées et d’infections aiguës des voies respiratoires inférieures dans les cas de carence en zinc. Il a également été prouvé que la supplémentation en zinc pouvait réduire l’incidence du paludisme. Cependant, un effet immunosuppresseur a été observé à des doses très élevées de supplémentation en zinc, mais cela peut être en partie expliqué par une déficience secondaire en cuivre induite par un excès de zinc. La neutropénie est une manifestation clinique fréquente d’une carence en cuivre, ce qui pourrait être le lien entre une fréquence accrue d'infections sévères des voies respiratoires inférieures décrites chez les enfants déficients en cuivre. La modification des marqueurs du statut en fer concorde avec la sévérité du processus infectieux. Cette connaissance a conduit à l’utilisation du dosage du récepteur à la transferrine sérique pour aider à l'interprétation du statut 23 en fer dans les populations présentant une forte proportion d'infections. Quel est l'essentiel du métabolisme du cuivre? Le cuivre est un oligoélément essentiel, principalement absorbé au niveau du duodénum par un mécanisme qui n’est pas encore complètement compris, mais la forme chimique du cuivre dans la lumière de l’intestin affecte grandement son absorption. L'absorption apparente varie de 15 à 80 % (habituellement entre 40 et 60 %) et est déterminée par l’hôte et par des facteurs liés à l’alimentation (apports et statut nutritionnel), dont certains restent à définir. Lorsque sa solubilité augmente, le cuivre est absorbé plus efficacement, et il semble que les protéines animales, le lait humain et l’histidine rehaussent son absorption, tandis que le lait de vache, le zinc, l’acide ascorbique et les phytates la diminuent. La carence en cuivre est habituellement la conséquence de faibles réserves à la naissance, d’apports en cuivre alimentaire inadéquats, d’une absorption faible et de besoins accrus induits par une croissance rapide ou des pertes en cuivre augmentées, et résulte souvent de facteurs multiples. La carence en cuivre acquise est un syndrome clinique se manifestant principalement chez les enfants, et plus fréquemment chez les enfants prématurés (surtout ceux de très faible poids de naissance) et ceux recevant exclusivement une alimentation à base de lait de vache, et devrait être soupçonné chez les enfants sujets à des épisodes diarrhéiques prolongés ou récurrents. Il semblerait que la cause la plus commune de déficience clinique manifeste soit une réserve en cuivre insuffisante pendant la récupération nutritionnelle chez les enfants malnutris. De forts apports oraux en zinc et en fer réduisent l’absorption du cuivre et pourraient prédisposer à une carence. Les manifestations cliniques courantes sont l’anémie (92 %), la neutropénie (84 %) et des malformations osseuses. Les changements hématologiques sont attribués à plusieurs mécanismes et sont complètement annulés par une supplémentation en cuivre, mais restent insensibles à une thérapie basée uniquement sur le fer. Le manque de cuivre alimentaire et des imperfections génétiques touchant au métabolisme du cuivre ont des effets significatifs sur le métabolisme du fer et la résistance des globules rouges au stress oxydatif, ce qui peut contribuer au poids de l'anémie. De plus, le cuivre est également associé à des altérations des défenses de l’hôte ce qui pourrait augmenter le risque d’anémie consécutive à une infection. Le manque de cuivre pourrait être intégré au diagnostic différentiel de l’anémie non réceptive à la 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 24 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 24 9 · Anémie nutritionnelle: Les vitamines du groupe B supplémentation en fer. L’excès de cuivre peut également contribuer à l’anémie en induisant l’hémolyse. Quel est l'essentiel du métabolisme du zinc? Le zinc est présent en grande quantité dans les cellules, ce qui rend difficile l’étude des mécanismes dépendants du zinc pour déterminer sa fonction physiologique. Néanmoins, il est clair que le zinc joue un rôle central dans la croissance, la différenciation et le métabolisme cellulaires. Le résultat de la grossesse, la croissance et le développement du fœtus, la croissance verticale, la sensibilité aux infections et le développement neurocomportemental sont autant de fonctions cruciales affectées par le statut en zinc. Le zinc est absorbé au niveau de l’intestin grêle: une absorption affectée par la forme chimique du zinc et la présence d’inhibiteurs et d’activateurs, et qui s’adapte aux besoins physiologiques. La teneur corporelle totale en zinc se situe entre 1,5 et 2,5 g et est déterminée par les apports alimentaires, le statut nutritionnel en zinc et la biodisponibilité du zinc dans l’alimentation. Les principales causes de déficience en zinc sont de faibles apports, des besoins accrus, une malabsorption, des pertes augmentées et une utilisation altérée. Les premières descriptions de sujets sévèrement carencés en zinc comprenaient l’anémie, mais ceci pourrait venir d’une déficience en fer associée ou de l’effet particulier du zinc sur la maturation des globules rouges. Le mécanisme d’érythropoïèse altérée n’est pas encore pleinement compris. La carence en zinc peut contribuer au poids de l’anémie en altérant l’érythropoïèse et en réduisant la résistance des globules rouges au stress oxydatif, affaiblissant les défenses de l’hôte. De plus, de fortes doses de supplémentation en zinc interfèrent avec les absorptions du cuivre et du fer, et peut également nuire à la mobilisation du fer et aux réponses immunitaires. Quel est le message clé? Bien que la pertinence potentielle des interactions entre le zinc, le cuivre et le fer en terme de santé publique reste indéterminée, ces minéraux ont un impact très probable sur le poids de l'anémie, directement et indirectement via l’infection, et ne doivent pas être ignorés dans le cadre des interventions nutritionnelles de lutte contre l'anémie. 9 ANEMIE NUTRITIONNELLE: LES VITAMINES DU GROUPE B John M. Scott Quel est le problème et que savons-nous? Bien que l'anémie dans les pays en développement soit majoritairement due à la déficience en fer, une partie pourrait être attribuable à un manque de vitamines du groupe B, en particulier en vitamine B9 (folates) et en vitamine B12. Cette anémie est macrocytaire, mais avec présence, dans la moelle osseuse, de précurseurs anormaux des globules rouges, appelés mégaloblastes. La présence concomitante d’une déficience en fer conduit à une anémie souvent normocytaire. Cela peut entraîner des problèmes de diagnostic et, par conséquent, ce qui est attribué à une pure déficience en fer peut fréquemment se révéler partiellement dû à une carence en folates ou en vitamine B12, et la véritable prévalence de ces carences en vitamines B est donc difficile à établir. Certains nutriments ne présentent pas de risque de carence en raison de leur niveau adéquat dans la plupart des régimes. D'autres, en revanche, présentent des risques particuliers pour certains individus et sous certaines conditions. Pour les vitamines du groupe B, il y a un large spectre de risques entre la biotine et l’acide pantothénique rarement déficients dans l’alimentation, tandis que les carences en vitamine B12 et en folates causent d’importantes préoccupations. Ces deux vitamines ont plusieurs répercussions clés sur la santé, notamment au cours de la grossesse, à la fois pour la mère et pour l’enfant à naître. En effet, les développements de l'embryon et du foetus peuvent être retardés par une carence en vitamine B9 ou B12. Un développement cognitif altéré et des mortalités et morbidités augmentées à l’âge adulte sont également des causes d’inquiétude, en plus des cas parfaitement prouvés de risque accru de spina bifida, défauts du tube neural (DTN) et autres défauts de naissance. Qu'a-t-il été accompli? Vers la fin du 19e siècle, il a été admis qu'une anémie macrocytaire, avec un nombre de globules rouges circulants supérieur à la normale, accompagnée de précurseurs d’hématies anormaux dans la moelle osseuse, était le résultat d’une déficience en folates ou en vitamine B12, et que ces deux déficiences étaient interreliées en raison de leur interdépendance biochimique. Le traitement de la carence en folates, avec des folates alimentaires ou plus 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 25 9 · Anémie nutritionnelle: Les vitamines du groupe B communément via une forme d’acide folique de synthèse, et le traitement de la carence en vitamine B12, avec de la vitamine B12, produisent habituellement une totale rémission de l'anémie. Cependant, dans le cas d’une carence en vitamine B12 ayant déjà conduit à une neuropathie avancée, il pourra demeurer des dommages résiduels. Généralement, la carence en vitamine B12 résulte soit d'une déficience alimentaire directe (courante chez les végétaliens), soit d’une malabsorption due à une absence d’acide gastrique ou à un facteur intrinsèque nécessaire à l’absorption. La déficience nutritionnelle peut être traitée soit par fortification, soit par supplémentation, comme peut l’être une atrophie gastrique. La malabsorption due à un manque de facteur intrinsèque exige un traitement parentéral. Il y a une inquiétude majeure concernant le fait qu’une déficience en vitamine B12 puisse être malencontreusement prise pour une déficience en folates et donc être traitée avec de l'acide folique. En effet, cela résulterait en une biosynthèse d’ADN normalisée donnant l'impression que l'anémie a été traitée avec succès. Cependant, cela ne traiterait pas la neuropathie qui nécessite un apport en vitamine B12; de fait, la neuropathie progresserait vers un stade plus avancé et irréversible. Le fait de masquer une déficience en vitamine B12 par une supplémentation en acide folique est un phénomène dose-dépendant, supposé ne pas se produire pour des apports inférieurs à 1000 µg (ou 1,0 mg) d'acide folique par jour. Dans les pays en développement, la prévalence d'anémie mégaloblastique pourrait être sous-diagnostiquée en raison de la prévalence concomitante très fréquente de la carence en fer. Que savons-nous au sujet des folates? Les folates, composés dérivés de l’acide folique, sont instables, incomplètement biodisponibles et ne se trouvent pas en grande densité dans les aliments, exception faite du foie, mais qui n’occupe pas une grande place dans la plupart des régimes alimentaires. Les meilleures sources de folates sont les légumes, mais dans les pays en développement, des apports alimentaires insuffisants sont courants, d’où une forte prévalence de carence en folates. De plus, il y a une forte augmentation des besoins en cette vitamine au cours de la grossesse et de l’allaitement. Aggravant encore davantage le problème: un polymorphisme touchant une des enzymes dépendantes de la vitamine B9 a été récemment découvert. Or, ce polymorphisme, très répandu dans certaines populations, augmente les besoins en folates jusqu’à 30 %; ce qui veut dire que la carence en folates, à la fois dans les pays 25 développés et en développement, est courante et doit être particulièrement prise en considération avant et pendant la grossesse. Par conséquent, la supplémentation en acide folique avant, pendant et après la grossesse est maintenant reconnue comme essentielle indépendamment du statut nutritionnel de la femme. Il y a quelques inquiétudes concernant le fait que de hauts niveaux de supplémentation en acide folique puissent accélérer la croissance de tumeurs existantes, citées le plus fréquemment au sujet du cancer colorectal, mais cela pourrait également être le cas pour d'autres cancers. Les experts recommandent que des recherches complémentaires soient menées, mais estiment que les preuves sont actuellement insuffisantes pour justifier un arrêt de la fortification en acide folique. Celle-ci est obligatoire dans plus de 40 pays et envisagée par beaucoup d'autres, principalement sous l’impulsion des politiques de santé publique afin de prévenir les DTN. Que savons-nous au sujet de la vitamine B12? La vitamine B12 entre dans la chaîne alimentaire de l’homme exclusivement au travers des sources animales via la viande, le lait, les produits laitiers et les oeufs. Sa synthèse est totalement absente chez les végétaux de tout genre, elle ne se retrouve donc dans de tels aliments qu’en cas de contamination bactérienne ou de fermentation, puisque les enzymes nécessaires à sa synthèse sont uniquement présentes dans les bactéries et quelques algues. Pour ces raisons, les végétariens, et plus particulièrement les végétaliens, sont à haut risque d’apports alimentaires insuffisants. Dans beaucoup de pays en développement, les personnes ayant de faibles apports en aliments d’origine animale, en raison d’un manque d'accessibilité et d’un coût élevé, présentent également un haut risque de carence en vitamine B12. Contrairement aux folates, dans la plupart des régimes les niveaux de vitamine B12 dépassent l’apport journalier recommandé (AJR) et il est donc surprenant que la carence en cette vitamine soit aussi répandue. Cette prévalence a été attribuée à la présence d'hypochlorhydrie due à une atrophie gastrique et à l'absence d'acide favorisant la libération de la vitamine B12 des aliments. De telles hypochlorhydries sont censées se produire dans des proportions considérables au sein de toutes les populations, et plus spécifiquement chez les personnes âgées chez qui la prévalence peut aller jusqu’à 30 %. Il a également été suggéré que cette atrophie gastrique pourrait être plus fréquente dans certains groupes ethniques. La carence en vitamine B12, par suite d'une absorption altérée, peut aussi être le résultat d'une anémie pernicieuse qui constitue une maladie auto-immune spécifique rédui- 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 26 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 26 10 · La vitamine A dans l’anémie nutritionnelle sant, ou éventuellement supprimant, l'absorption active de la vitamine B12 de l'alimentation. Sa prévalence semble varier entre 1 et 4,3 %, mais globalement elle est relativement faible comparée à celle de l’atrophie gastrique. L'effet négatif de sa malabsorption concerne la vitamine B12 liée aux composés alimentaires et non la vitamine B12 libre contenue dans les suppléments ou dans les aliments fortifiés. Les sujets souffrant d’anémie pernicieuse doivent recourir à l’injection pour obtenir de la vitamine B12. Quid des autres vitamines du groupe B? Des apports extrêmement faibles en riboflavine (vitamine B2), pyridoxine (vitamine B6), acide nicotinique (vitamine B1), thiamine et acide pantothénique peuvent provoquer des carences en nutriments classés comme essentiels; cependant, la prévention et la conséquence de carences ou de réserves insuffisantes en folates et en vitamine B12 constituent de loin les questions de santé publique les plus importantes. Quel est le message clé? Il semblerait qu’il faille accorder, dans le cadre de la lutte contre l’anémie, une attention supplémentaire au statut en folates et peut-être aussi en vitamine B12 des individus, et notamment des femmes enceintes et allaitantes. Les résultats des essais d'intervention semblent indiquer que le fer donné quotidiennement avec d’autres micronutriments serait plus efficace pour contrer l’anémie. Il est impossible d’identifier quel composant d’une préparation multivitaminique peut, par sa nature même, entraîner une réponse; cependant la fortification avec de faibles doses d’acide folique et de vitamine B12 offre un moyen intéressant et rentable pour réduire les DTN et supprimer l’anémie mégaloblastique dans les pays en développement. LES FAITS: • La supplémentation en acide folique avant, pendant et après la contraception, peut réduire la prévalence de spina bifida et d'autres défauts du tube neural de plus de moitié, et peut-être même jusqu’aux trois-quarts. • Le fait de masquer une déficience en vitamine B12 par une supplémentation en acide folique est un phénomène dose-dépendant, supposé ne pas se produire pour des apports inférieurs à 1000 µg (ou 1,0 mg) d'acide folique par jour. • Le niveau maximum d’apport tolérable pour l'acide folique est fixé à 1000 µg. • La recherche au Canada montre que la fortification en folates à hauteur de 100 µg/jour entraîne 50 à 70 % • • • • • de réduction de la prévalence de DTN. La détection d’une carence en folates peut s’effectuer en dosant le taux de folates sériques ou, de préférence, le taux de folates des globules rouges, mais les niveaux doivent être très bas pour qu’une carence soit diagnostiquée. La détection d’une carence en vitamine B12 peut s’effectuer en dosant le taux de vitamine B12 sérique ou comme recommandé plus récemment l’holotranscobalamine, mais, comme pour les folates, les niveaux doivent être très bas pour qu’une carence soit diagnostiquée. Les biomarqueurs du statut, tels que l'homocystéine sérique ou l'acide méthylmalonique, sont utiles, mais ne permettent pas d’établir une conclusion définitive, et sont en général peu disponibles. La carence en vitamine B12 est un problème sévère dans le sous-continent Indien, au Mexique, en Amérique centrale, en Amérique du Sud et dans certaines régions d'Afrique. Il est rapporté que la prévalence d'anémie pernicieuse pourrait être de 1 à 4,3 %, mais l'atrophie gastrique se révèle bien plus fréquente et considérée comme courante chez les personnes âgées (jusqu’à 30 %). 10 LA VITAMINE A DANS L’ANEMIE NUTRITIONNELLE Keith P. West, Jr., Alison D. Gernand et Alfred Sommer Quel est le problème et que savons-nous? Au-delà du fer, l'anémie peut être causée ou aggravée par nombre de déficiences nutritionnelles. En particulier, la carence en vitamine A peut conditionner le métabolisme du fer à plusieurs niveaux au cours de son parcours interne et dans le système réticulo-endothélial en augmentant le risque d’érythropoïèse et d’anémie par manque de fer. Bien que controversés, il existe quatre mécanismes plausibles par lesquels la vitamine A peut affecter le risque d’anémie: en influençant le stockage du fer dans les tissus et sa libération dans la circulation; en ayant un effet régulateur direct sur l’érythropoïèse; en modifiant la séquestration et la libération du fer, associées à la réponse aux infections, dans les tissus; et en exerçant un effet sur l’absorption du fer. La majorité des preuves corrobore plutôt les deux premiers mécanismes. Par conséquent, le contrôle de la carence en vitamine A, qui coexiste sou- 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 27 10 · La vitamine A dans l’anémie nutritionnelle vent avec la déficience en fer dans les populations sousalimentées, peut être important dans la prévention de l’anémie, qu’elle soit attribuable à la malnutrition ou à l’inflammation associée à l’infection. La vitamine A possède deux fonctions de base. La première est celle d'un cofacteur dont le rôle consiste à maintenir le bon fonctionnement des cellules photoréceptrices cônes du fond de l’oeil et permettre la vision en condition de faible luminosité. Une déficience en vitamine A peut donc mener à une perte de vision nocturne. La seconde, susceptible d’expliquer les divers effets de la vitamine A sur l’hématopoïèse, implique la régulation de la transcription nucléaire et la synthèse protéique qui affectent la croissance, la différenciation, le métabolisme et la longévité cellulaires. Son rôle se révèle plus évident au sein des couches internes de l’épithélium de l'oeil qui deviennent sèches (kératinisées) du fait d’un manque de vitamine A ce qui, dans sa forme la plus sévère, mène à la xérophtalmie. Cependant, la vitamine A aide également à réguler le fonctionnement de beaucoup d'autres types cellulaires, dont ceux impliqués dans l'immunité, la croissance osseuse et la production de globules rouges. Ces nombreuses fonctions affectées par une carence en vitamine A (CVA) ont diverses conséquences sur la santé, regroupées en une catégorie de troubles (TCVA) qui incluent la xérophtalmie et la cécité qui en résulte, une sévérité accrue des infections, l’anémie, un ralentissement de la croissance et même la mortalité. En raison de son étendue et de sa sévérité, la déficience en vitamine A reste la principale cause de cécité pédiatrique et un déterminant nutritionnel majeur d'infections sévères et de mortalité chez les enfants des pays en voie de développement. De plus, la carence en vitamine A de la mère s’élève au rang des principaux problèmes de santé publique. Les degrés et les conditions sous lesquels le déficit en vitamine A peut également contribuer à l’anémie sont bien moins appréciés, ce qui ajoute de l'importance à sa prévention. La carence en vitamine A résulte d'une alimentation chroniquement pauvre en aliments riches en vitamine A préformée ou en caroténoïdes, ses composés précurseurs (notamment le β-carotène). Les aliments sources de vitamine A préformée sont le foie, l’huile du foie de morue, le lait, le fromage et les aliments fortifiés, tandis que les principales sources de caroténoïdes provitamines A sont les fruits jaunes, les tubercules oranges et jaunes, et les légumes à feuilles vert foncé. Qu'a-t-il été accompli? Sur une échelle globale, d’énormes avancées ont été réa- 27 lisées pour réduire le poids de la carence en vitamine A et les risques induits en termes de cécité et de mortalité chez les enfants. Il est parfaitement admis qu’une réduction concomitante du risque d'anémie constitue un bénéfice pour le contrôle de la santé publique, en dépit de preuve substantielle reliant ces deux conditions. Des études cliniques datant de la première moitié du siècle dernier, et nombre d’études observationnelles dans les pays en développement datant du milieu du 20e siècle, indiquent une corrélation positive logique s’étalant de 0,2 à 0,9 entre rétinol sérique et concentration sanguine en hémoglobine. Au cours d’une étude dans les années 1970, huit hommes privés de vitamine A sur une période de plusieurs mois ont développé une anémie ne répondant pas au fer mais réactive à une réplétion en vitamine A, suggérant que la vitamine A serait nécessaire à l’obtention d’une bonne réponse hématologique au fer. Des études postérieures chez des enfants et des femmes anémiques ont révélé de piètres réponses de l'hémoglobine au fer dans le cas d’un statut limite ou déficient en vitamine A, et des réponses de l'hémoglobine notablement améliorées avec de la vitamine A seule ou associée au fer. La supplémentation en vitamine A semble stimuler le métabolisme du fer par des voies susceptibles d’améliorer la production ou la survie des globules rouges. Cette approche semble également capable d'exercer des effets positifs sur les taux d'hémoglobine et réduire le risque d'anémie dans les populations déficientes en vitamine A. En présence d'infections, telles que les infections à ankylostomes, le paludisme, la tuberculose ou le VIH, chacune étant susceptible d’affecter le métabolisme de la vitamine A et du fer provoquant par là des effets hématologiques inconnus, la vitamine A peut s’avérer moins efficace dans le contrôle de l’anémie. Aussi, le léger effet de cette vitamine sur l’hématopoïèse peut être perceptible dans les populations nutritionnellement équilibrées. Quelle est la direction à suivre? La carence en vitamine A continue à représenter un problème nutritionnel majeur dans le monde en développement, affectant la vision, la résistance aux infections, la croissance et la survie. Elle est de plus en plus reconnue comme une cause contribuant à l'anémie. Les interventions visant à réduire l’anémie nutritionnelle chez les femmes et les enfants devraient considérer la prévention des autres déficiences alimentaires pouvant accroître les effets de la prophylaxie du fer, tels que ceux de la vitamine A. La reconnaissance de ce lien pourrait stimuler la co-évaluation des statuts en fer et en vitamine A lors de l’examen de l’anémie dans les populations à haut risque. Les chercheurs devraient continuer à élucider les interactions entre la vitamine A et le fer. Tandis que l’on peut 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 28 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 28 11 · La place du stress oxydatif et de la Vitamine E dans l’anémie supposer réduire le risque d’infection sévère grâce à la vitamine A, son effet dans la réduction des anémies d'infection exige encore des travaux, puisque son influence sur le métabolisme du fer peut être brouillé par le type et la sévérité des infections, chez les individus malades ou au sein d’une population. La recherche continuant son cours, grâce aux interventions basées sur la vitamine A, les professionnels de terrain peuvent globalement s'attendre à une hausse du statut hématologique des populations carencées et anémiques. Néanmoins, il doit être gardé à l'esprit qu’il ne faut attendre de la vitamine A qu’elle ait un effet majeur sur l’anémie du fait des déficiences directes en fer, des infections par les nématodes, du paludisme, et des autres causes d’inflammation chronique modérée à sévère. Quel est le message clé? La supplémentation en vitamine A, seule ou en combinaison avec du fer, est susceptible de réduire le poids de l'anémie dans les régions où la carence en vitamine A constitue un problème de santé publique. Cette supplémentation a prouvé son efficacité à doses fortes, à un rythme occasionnel, hebdomadaire ou quotidien, et via l’alimentation en consommant des aliments fortifiés en vitamine A. Les effets sont plus clairs en l’absence de maladie infectieuse et dans les populations nutritionnellement déficientes. LES FAITS: • La carence en vitamine A est la principale cause de cécité pédiatrique et représente un déterminant nutritionnel majeur d’infection sévère et de mortalité chez les enfants des pays en voie de développement. • On estime que 125 à 130 millions d’enfants d’âge préscolaire sont déficients en vitamine A et que 20 millions de femmes enceintes ont un statut en vitamine A limité ou déficient. • Les troubles de la carence en vitamine A incluent la xérophtalmie, une sévérité accrue des infections, une faible croissance, l’anémie et une augmentation de la mortalité. • La vitamine A affecte les niveaux d'hémoglobine car elle est impliquée dans le métabolisme du fer et la production des globules rouges. • La carence en vitamine A contribue à l’anémie nutritionnelle, probablement en restreignant l'utilisation du fer pour la fabrication de l'hémoglobine. • La supplémentation en vitamine A peut réduire le risque d’anémie légère à modérée dans les populations déficientes en vitamine A et anémiques. • Les avantages hématopoïétiques de la vitamine A ont plus de chances d’être constatés lorsque l'anémie n'est pas due à des maladies infectieuses sévères telles que les infections à ankylostomes, le paludisme, le VIH et la tuberculose. 11 LA PLACE DU STRESS OXYDATIF ET DE LA VITAMINE E DANS L’ANEMIE Maret Traber et Afaf Kamal-Eldin Quel est le problème et que savons-nous? L'anémie peut être la conséquence d'un ensemble de déficiences nutritionnelles, de troubles héréditaires et/ou d'infections ou d’expositions à certaines toxines et à des médicaments. L'anémie peut conduire à divers problèmes de santé, puisque l'oxygène requis par l’organisme est transporté par les globules rouges, et que le stress oxydatif, combinaison d’une surproduction d'espèces réactives de l'oxygène et d’un potentiel antioxydant altéré, peut être généré par le fer libéré des globules rouges endommagés. Le stress oxydatif est associé à l’anémie. De plus, l'érythrocyte constitue un site majeur de localisation des défenses antioxydantes dans le sang, car il contient les antioxydants intracellulaires enzymatiques. Les antioxydants de faibles poids moléculaires, en particulier les vitamines C et E, fournissent une protection supplémentaire significative. Qu'est-ce que le stress oxydatif? Le stress oxydatif représente un déséquilibre entre, d’une part, la production de radicaux libres et d’espèces réactives de l'oxygène et, d’autre part, la protection par les enzymes antioxydantes et les antioxydants de faibles poids moléculaires. Un radical libre est une espèce chimique contenant un ou plusieurs électrons non-couplés, capables d'exister de manière indépendante. Une espèce possédant un électron non-couplé a tendance à réagir très rapidement avec d'autres molécules, et donc à causer des altérations radicalaires. Les radicaux libres peuvent endommager littéralement toutes les molécules y compris les protéines, l’ADN, les glucides et les lipides. La peroxydation des lipides est particulièrement dangereuse, car il s’agit d’une chaîne de réactions produisant des radicaux. Qu’est-ce que la vitamine E et comment fonctionne-t-elle? Le terme de vitamine E fait référence au groupe de huit 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 29 11 · La place du stress oxydatif et de la Vitamine E dans l’anémie composés phytochimiques manifestant l'activité antioxydante de l’α-tocophérol, mais seul ce dernier permet de couvrir les besoins humains en cette vitamine. La vitamine E, notamment l’α-tocophérol aux propriétés liposolubles et anti-oxygènes, est un puissant désactivateur de radicaux peroxyl. Elle stoppe la peroxydation lipidique. Chez les êtres humains, la déficience en vitamine E se produit par suite d’une malabsorption des lipides, car l'absorption de la vitamine E est, non seulement, dépendante de l’apport en graisse de l’alimentation, mais également, des mécanismes d’absorption des lipides. Contrairement à d'autres vitamines liposolubles possédant des protéines de transport plasmatiques spécifiques, les diverses formes de vitamine E sont transportées dans le plasma de manière non spécifique par les lipoprotéines. Il y a plusieurs moyens par lesquels les tissus peuvent obtenir de la vitamine E; néanmoins, les mécanismes de libération de l’α-tocophérol des tissus sont inconnus. De plus, aucun organe n'est réputé fonctionner comme un organe de stockage pour l’α-tocophérol. Contrairement à d’autres vitamines liposolubles, la vitamine E ne s’accumule pas dans le foie à des niveaux toxiques, ce qui suggère que son excrétion et son métabolisme sont importants pour prévenir des effets délétères. La carence en vitamine E se produit du fait de caractères génétiques anormaux touchant à l’α-tocophérol (résultant en un syndrome nommé AVED ou Ataxie avec déficit isolé en vitamine E) et par suite de divers syndromes de malabsorption des graisses. Le principal symptôme de déficience est une neuropathie périphérique, mais l'anémie représente également une conséquence de niveaux en vitamine E inadéquats. A la fois l’anémie et la neuropathie périphérique semblent se produire suite à des dégradations radicalaires du fait d’un manque d’α-tocophérol. Quel est le rôle de la vitamine E chez le sujet malnutri? Le statut en vitamine E peut être mis à mal au cours de l’anémie par suite d’un stress oxydatif accru causé par l’hémolyse des érythrocytes. En dépit d’une grande diversité, le stress oxydatif constitue le dénominateur commun à tous les types d'anémie. Une protéine hépatique est nécessaire au maintien de concentrations plasmatiques normales en α-tocophérol, et ce n'est donc pas surprenant que des symptômes de déficience en cette vitamine aient été rapportés chez des enfants ayant des apports alimentaires sévèrement restreints, ce qui ne limite pas seulement les apports en vitamine E, mais également ceux en protéines nécessaires à la synthèse de la protéine hépatique nécessaire au métabolisme de la vitamine. Le degré auquel la carence en 29 vitamine E est associée au kwashiorkor et/ou au marasme n'est pas clair, car l'évaluation du statut en vitamine E chez les enfants malnutris reste difficile, et il n'est donc pas certain qu’une supplémentation en cette vitamine soit salutaire, à moins que le problème métabolique soit résolu. Dans les cas d'anémie ferriprive, non seulement il y a une production réduite en hémoglobine et en d’autres protéines contenant du fer, mais les membranes de l'érythrocyte sont également plus sensibles à l’oxydation. Les recherches ont montré que la supplémentation en fer chez des individus déficients pouvait augmenter le stress oxydatif, mais le traitement avec une combinaison de fer et de vitamines A, C et E donnait de bons résultats en terme de normalisation de ce stress. Que peut-on dire de la vitamine E dans le cadre de la thalassémie et des maladies drépanocytaires? Thalassémie et maladies drépanocytaires constituent des désordres héréditaires liés à l'hémoglobine et causant l’anémie. Environ 90 millions de personnes à travers le monde portent des gènes défectueux entraînant la thalassémie. Une anémie légère à sévère, associée aux conséquences d’une thalassémie, résulte d’un stress oxydatif, et certains recommandent la supplémentation en vitamines C et E des personnes possédant ce profil. Le stress oxydatif se manifeste également dans la drépanocytose, une maladie inflammatoire chronique, pour laquelle la supplémentation en vitamine E peut présenter un avantage. Que peut-on dire de la vitamine E dans le cadre du paludisme? Le paludisme est endémique dans beaucoup de parties du monde et les recherches montrent que l’on trouve des taux élevés de biomarqueurs du stress oxydatif dans les érythrocytes infectés par le paludisme, et que ces taux diminuent lorsque l'individu se remet. Les conclusions de nombreuses études suggèrent que des défenses antioxydantes améliorées sont utiles pour augmenter les réponses immunitaires appropriées. Cependant, de façon intéressante, la recherche met également en évidence qu'un niveau de stress oxydatif peut être important pendant le traitement du paludisme, bien qu'il contribue négativement à la santé générale en induisant peut-être une anémie résultant de la destruction des globules rouges. Ainsi, l'individu peut bénéficier d’une supplémentation postérieure en vitamine E. La vitamine E a-t-elle un rôle à jouer dans le VIH et le sida? L'anémie est courante dans les cas de VIH / sida et l'anémie sévère est associée à un risque accru de mortalité. 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 30 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 30 12 · Le sélénium Une récente revue d’essais cliniques suggère qu'il n’existe actuellement aucune stratégie thérapeutique utile pour diminuer l’anémie dans le cadre d’une infection au VIH et, en dépit de résultats positifs, il y a peu d'interventions avec des antioxydants suggérant que, depuis les premières données rapportées, leur succès reste limité. Néanmoins, il a été montré que la vitamine E pouvait améliorer la réponse immunitaire de l'hôte, et il est donc raisonnable d’envisager qu’une supplémentation en vitamines C et E pourrait se révéler bénéfique pour soutenir la fonction immunitaire au cours de différentes maladies infectieuses. Quel est le message clé? De nombreux types d'anémie sont associés à un statut faible en vitamine E. Tandis que la déficience peut être causée par de mauvais apports alimentaires, les anémies pourraient également résulter d’un transport altéré de la vitamine E vers les tissus ou d’une augmentation du stress oxydatif. Cela met en exergue le besoin crucial, non seulement de supplémentation en vitamine E, mais également de soutien alimentaire adéquat tenant compte de tous les nutriments. LES FAITS: • Le terme de vitamine E fait référence au groupe de huit composés phytochimiques venant de l'alimentation et manifestant l'activité antioxydante de l’α-tocophérol, mais seul l’α-tocophérol lui-même permet de couvrir les besoins humains en vitamine E. • Le Food and Nutrition Board des Etats-Unis a défini la limite inférieure de l’α-tocophérol plasmatique à 12 µmol/L chez les adultes sains et normaux. • Il a été montré que les enfants ayant un taux d’α-tocophérol plasmatique de 8 µmol/L en raison d’une malnutrition présentaient des malformations neurologiques sensibles à la vitamine E. • Environ 90 millions de personnes à travers le monde portent des gènes défectueux conduisant à la thalassémie. • Le paludisme explique environ 2,7 millions de morts par an et il y a environ 500 millions d’épisodes rapportés chaque année. 12 LE SELENIUM Richard Semba Quel est le problème et que savons-nous? L'anémie est courante chez les sujets âgés et la prévalence de l’anémie augmente avec l’âge s’associant à de nombreux effets délétères. Environ un tiers des anémies se manifestant dans les populations à haut risque ne trouve pas d’explication, et la déficience en sélénium pourrait potentiellement en expliquer une partie. Le rapport entre le statut en sélénium et l'anémie n'est pas encore bien caractérisé chez les êtres humains. La déficience en sélénium devrait être considérée comme une cause possible d'anémie qui exige de plus amples investigations pour une confirmation. Le sélénium est un oligo-élément essentiel et un constituant normal de l'alimentation. L’apport alimentaire varie grandement à travers le monde car les niveaux de sélénium naturels dans les aliments reflètent les concentrations du sol. Les sources alimentaires les plus riches en sélénium sont les abats et les fruits de mer. Dans les tissus humains, il est principalement présent sous forme de deux acides aminés en contenant. Ses fonctions biochimiques sont liées à son rôle dans les sélénoprotéines, et plusieurs de celles-ci sont des enzymes antioxydantes. L'absorption du sélénium n'est pas régulée et seulement 50−100 % du sélénium alimentaire est absorbé. En général, des apports insuffisants n'ont pas de répercussions cliniques évidentes, bien que des niveaux faibles aient été associés à une sensibilité accrue au stress oxydatif et à un plus haut risque de cancer et même de maladies coronariennes. Le besoin en sélénium pour la prévention des maladies chroniques n'a toutefois pas encore été définitivement déterminé. Qu'a-t-il été accompli? La recherche a montré que de faibles niveaux de sélénium sériques semblaient être indépendamment associés à l’anémie chez les sujets âgés (> 65 ans). De plus, une forte corrélation entre de faibles concentrations plasmatiques en sélénium et en hémoglobine a également été observée dans des études sur le même type de population. Néanmoins, la direction de l'association n'est pas claire, mais pourrait potentiellement être liée au rôle du sélénium dans le maintien d'une concentration optimale en glutathion peroxydase, un antioxydant clé des érythrocytes, ou à une inflammation et à un stress oxydatif augmentés. 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 31 13 · Interactions entre fer et vitamine A, riboflavine, cuivre et zinc Quelle est la direction à suivre? Les observations d'une association entre des niveaux de sélénium faibles et l’anémie chez les sujets âgés, hommes et femmes, soulèvent une question de santé publique potentiellement importante: la carence en sélénium a-telle été négligée en tant que cause dans l'anémie? Des recherches supplémentaires sont nécessaires, afin d’établir la pertinence du rôle potentiel du sélénium dans la pathogénèse de l'anémie. Quel est le message clé? La recherche montre que le sélénium peut être associé à l’anémie, mais des travaux plus centrés dans ce domaine sont nécessaires afin d’établir la pertinence de ce lien. 13 INTERACTIONS ENTRE FER ET VITAMINE A, RIBOFLAVINE, CUIVRE ET ZINC DANS L'ETIOLOGIE DE L'ANEMIE Michael Zimmermann Quel est le problème et que savons-nous? On estime qu'environ la moitié des cas d'anémie est due à une déficience en fer et le reste à d’autres causes, comme d'autres carences nutritionnelles, des troubles infectieux, des hémoglobinopathies et des différences ethniques des niveaux normaux d’Hb. La prévalence de l'anémie est particulièrement élevée dans les pays en développement où les déficiences en micronutriments coexistent souvent. Une déficience en un micronutriment peut influencer l'absorption, le métabolisme et/ou l’excrétion d’un autre micronutriment. Les interactions entre déficience en fer et en quatre autres micronutriments - vitamine A, riboflavine (vitamine B2), cuivre et zinc – représentent un intérêt particulier dans l'anémie. Il y a de nombreuses années que le lien entre la déficience en vitamine A et l'anémie a été reconnu mais, bien qu'améliorer le statut en vitamine A augmente souvent le taux d'hémoglobine et réduise l’anémie, le mécanisme exact reste incertain. Bien que les données d'études cliniques chez l’homme soient équivoques, la déficience en riboflavine peut également altérer l’érythropoïèse et contribuer à l’anémie. De plus, il est également connu que la déficience en cuivre joue négativement sur l’absorption du fer alimentaire, mais puisque les carences en cuivre sont rares dans la population générale, cette interaction 31 ne constitue pas une priorité de santé publique. Enfin, bien que les données ne mettent pas en évidence le rôle de la déficience en zinc dans l'anémie, les carences en fer et en zinc coexistent souvent et les suppléments contenant ces deux minéraux pourraient donc être intéressants pour les populations vulnérables. On note cependant que plusieurs études ont suggéré que la supplémentation en zinc pourrait réduire l'efficacité du fer. Que savons-nous du lien entre déficience en fer et en vitamine A? La déficience en vitamine A affecte plus de 30 % de la population globale et les groupes les plus vulnérables sont les femmes en âge de procréer, les nouveau-nés et les enfants, également les plus vulnérables à l’anémie. En général, les enquêtes dans les pays en développement ont rapporté des corrélations positives entre concentrations en rétinol sérique et en hémoglobine, avec des associations plus fortes dans les populations ayant un statut plus faible en vitamine A. Cependant, les données des études humaines s’intéressant à l'influence de la vitamine A sur l’absorption sont ambiguës, et indiquent que des recherches complémentaires sont nécessaires afin de clarifier l'effet réel de cette vitamine sur l’absorption du fer. De plus, le mécanisme par lequel la vitamine A exerce son effet sur l’érythropoïèse reste vague, bien que plusieurs mécanismes aient été proposés. Des études d'intervention suggèrent que, dans les régions où les apports en vitamine A et en fer sont faibles, une double fortification ou supplémentation serait plus efficace pour contrôler l’anémie qu’un apport en vitamine A ou en fer seul. Que savons-nous du lien entre déficience en fer et en riboflavine? La riboflavine est exigée dans beaucoup de voies métaboliques. La déficience en riboflavine est courante dans les régions où les apports en produits laitiers et en viande sont faibles, et où les enfants d’âge scolaire constituent un groupe à haut risque de carence. Il semble que la carence en cette vitamine B puisse, en plus de ses autres symptômes, altérer l’érythropoïèse et contribuer à l’anémie des suites de plusieurs mécanismes ayant été proposés. Même si ces mécanismes ont été étudiés chez l’animal, il y a peu de données humaines. Les données des études qui ont été menées suggèrent que l'effet du statut en riboflavine sur l'hémoglobine est variable et peut être contredit par l'étiologie multifactorielle de l'anémie. A noter que les données de nombreux travaux, contrairement aux études pionnières, ne soutiennent pas l’idée d’un effet nuisible de la déficience en riboflavine sur l’anémie. 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 32 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 32 14 · L’anémie en situation de dénutrition sérvère Que savons-nous du lien entre déficience en fer et en cuivre? La déficience en cuivre est une cause rare d'anémie et le moyen par lequel cette déficience provoque un état anémique est incertain. Il est cependant admis que l'anémie en résultant est sensible à une supplémentation alimentaire en cuivre, mais pas en fer. Il est constaté que, bien que la déficience en cuivre réduise l’absorption du fer alimentaire et conduise à une anémie ferriprive, elle reste rare dans la population générale et il est donc peu probable qu’elle soit d'importance pour la santé publique. Que savons-nous du lien entre déficience en fer et en zinc? L'anémie ferriprive résulte fréquemment d’une faible absorption du fer alimentaire due à des apports en viande faibles et à des apports élevés en inhibiteurs (p.ex. phytates, polyphénols). De façon intéressante, ces mêmes facteurs alimentaires diminuent la biodisponibilité du zinc. Même si les données ne permettent pas d’affirmer que la déficience en zinc joue un rôle dans l'anémie, les déficiences en fer et en zinc coexistent souvent et les suppléments contenant ces deux minéraux pourraient être intéressants pour les groupes de population vulnérables. Cependant, il est à noter que plusieurs études ont suggéré qu’une supplémentation concomitante en zinc pouvait réduire l'efficacité du fer, et quelques études indiquent que, lorsque les suppléments de zinc sont donnés avec les suppléments de fer, le statut en fer ne s'améliore pas autant que lorsque le fer est donné seul. Des recherches complémentaires sont donc absolument nécessaires pour clarifier l'effet du zinc adjoint à une supplémentation en fer. Quel est le message clé? La prévalence de l'anémie est particulièrement élevée dans les pays en développement où coexistent souvent plusieurs carences en micronutriments, et une déficience en un micronutriment peut influencer le statut d'un autre. Bien que de plus amples investigations soient exigées, la vitamine A, la riboflavine, le cuivre et le zinc peuvent être importants, parallèlement au fer, lors de la lutte contre l’anémie nutritionnelle. 14 L’ANEMIE EN SITUATION DE DENUTRITION SEVERE (MALNUTRITION) Alan Jackson Quel est le problème et que savons-nous? L'anémie se trouve habituellement être une particularité associée à beaucoup de situations pathologiques. Dans la plupart des cas, la malnutrition sévère s’accompagne d’une anémie qui constitue une part inhérente au processus d'adaptation réductive associé à la perte de poids, à la réduction de la masse maigre et à la présence d'oedème. Cependant, la cause spécifique de l'anémie est également rendue complexe par les déficiences associées en micronutriments spécifiques, la destruction accrue des globules rouges et la suppression progressive de la formation de nouvelles cellules sanguines, résultant de la réponse inflammatoire aux infections multiples. Ainsi, l'anémie associée à une dénutrition sévère, ou à une malnutrition avec oedème pendant l’enfance ou à l'âge adulte, n'est pas spécifique, mais s’accompagne habituellement d’une incapacité à utiliser efficacement le fer, et donc à augmenter la quantité de fer présent sous forme de réserve ou sous forme libre dans l’organisme. Une thérapie impliquant du fer à ce stade augmente la mortalité. Etant donné la complexité des interactions possibles dans les conditions établies, il peut s’avérer très difficile de déterminer l’enchaînement par lequel un facteur a pu servir de déclencheur, puis a interagi avec d'autres facteurs, qui par la suite ont contribué à l’anémie et y ont joué un rôle secondaire. Qu'a-t-il été accompli? Les termes marasme, kwashiorkor, kwashiorkor marastique, carence protéique, déficiences énergétique et protéino-énergétique, ont tous été utilisés à différents moments pour décrire ce qui est maintenant qualifié de dénutrition sévère ou sans oedème. Il y a un consensus émergent sur le fait qu’il existe deux caractéristiques clés permettant de définir l'essence des processus sousjacents menant à un état malnutri, sans qu’elles soient nécessairement spécifiques aux aspects détaillés des multiples causes complexes également sous-jacentes: 1. Un apport alimentaire inadéquat dû, soit à un manque d’appétit, soit à une disponibilité limitée en nourriture, conduit à un syndrome d’émaciation avec une perte de poids relative et associée à un ensemble de changements adaptatifs complexes au niveau des différents tissus et organes. 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 33 14 · L’anémie en situation de dénutrition sérvère 2. La présence d'une pathologie spécifique sous-jacente, tel qu'une infection ou une alimentation de faible qualité, ensemble et séparément, peut prédisposer à un apport alimentaire réduit et pose, de plus, des problèmes d’intégrité métabolique qui favorisent la formation d'oedème. Il existe quatre processus clés qui contribuent ensemble et séparément à l’anémie: 1. L’adaptation réductive L'anémie traduit un aspect de l'adaptation de l’organisme à une réduction des apports alimentaires et à une diminution de l’activité métabolique. Elle devrait être différenciée de l'anémie associée à des troubles chroniques. L’érythropoïèse, à un stade précoce, peut être normale ou aggravée par un taux d’hémoglobine inférieur résultant d'une réduction de la durée de vie des globules rouges. Dans les stades plus tardifs, plus avancés, lorsque le métabolisme des tissus chute, l'érythropoïèse n’est plus stimulée et la masse cellulaire hématique décroît. 2. Les déficiences en nutriments spécifiques La multiplication et la différenciation des précurseurs d’hématies avec la formation d'érythrocytes matures qui apparaissent finalement dans la circulation est un processus complexe qui nécessite le plein approvisionnement en nutriments et en intermédiaires métaboliques. Un manque en un seul de ces éléments nutritifs limitera la formation de globules rouges, leur intégrité structurelle et leur capacité fonctionnelle. En sus des besoins des autres cellules, les globules rouges ont un besoin spécifique en ces nutriments qui sont directement impliqués dans la formation d'hémoglobine. 3. L’infection Il y a une interaction complexe entre infection et nutrition insuffisante qui se prédisposent l’une et l’autre et s’aggravent mutuellement. Dans la malnutrition sévère, les effets de l'infection sur l’anémie peuvent être directement mis en rapport avec une infection spécifique ou indirectement avec une réponse inflammatoire ou immunitaire plus générale. Ces éléments, ensemble et séparément, limiteront la disponibilité des nutriments pour la formation des globules rouges et augmenteront la probabilité d'anémie. 4. L’hémolyse, dommage pro-oxydant L'environnement hostile auquel l’hématie est exposée reflète ce à quoi doivent faire face toutes les autres cellules de l’organisme. La sensibilité exacerbée de l’hématie aux dommages pro-oxydants la prédispose à une durée de vie raccourcie qui augmente l’impor- 33 tance de la conservation du fer sous une forme inoffensive. Une augmentation du fer de réserve et/ou du fer intracellulaire libre peut provoquer un stress prooxydant et induire une pathologie cellulaire. Une augmentation de la perte en globules rouges, en réponse à toute limitation de la production de ces cellules, conduit inévitablement à une réduction de la masse des hématies et à une augmentation du fer de réserve. L’anémie, en tant que réduction de la masse de globules rouges circulants, peut résulter d'un changement d’équilibre entre les taux de synthèse et de destruction des globules rouges, en supposant qu’il n’y ait aucune perte externe de sang. La réduction de la synthèse des globules rouges peut faire partie de la réponse adaptative générale, ou bien venir d’une contrainte concernant la disponibilité énergétique ou un nutriment spécifique. Les modifications du taux de destruction résulteraient quant à elles de la production de cellules de faible qualité, plus vulnérables, et donc plus susceptibles d'avoir une durée de vie raccourcie en raison d’un environnement hostile engendré par des perturbations infectieuses, nutritionnelles ou métaboliques. Dans le cas de la synthèse des globules rouges, il peut y avoir de sévères changements au niveau de la moelle osseuse, mais ceux-ci semblent être potentiellement réversibles en totalité à l’aide d’un traitement réussi et d’un bon rétablissement. Cependant, même après une récupération pondérale, il semble qu’il y ait besoin d’un temps supplémentaire pour arriver à une restauration complète de la formation des globules rouges, ce qui entraîne une contrainte progressive sur l’érythropoïèse. Pendant le stade aigu de la maladie, il y a une accélération progressive de la formation de globules rouges, mais associée à une contrainte concernant l'utilisation efficace du fer disponible. La présence notable de dépôts de fer dans le système réticulo-endothélial, notamment au niveau de la moelle, du foie et de la rate, constitue une caractéristique importante de cette étape qui doit être mise en exergue. Ces dépôts peuvent être visibles via l’hémosidérine, ou en utilisant des techniques appropriées permettant d’identifier le fer libre. Cela rend problématique l'identification et la caractérisation de la "déficience en fer" et entraîne d’importantes implications pour son traitement. Quel est le traitement requis? La probabilité qu'un individu meurt d'une période de dénutrition sévère ou survive avec une chance raisonnable de rétablissement dépend, non seulement, de ce qui est fait en termes de soins immédiats, mais aussi beau- 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 34 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 34 15 · Infection et étiologie de l'anémie coup, de l'ordre dans lequel les différentes interventions sont menées. L'identification et la classification des stades de malnutrition sévère se basent sur deux caractéristiques: la perte de poids relatif et la présence d'oedème. Les approches de traitement inappropriées sont celles qui se concentrent sur la guérison de l'oedème via l’usage de diurétiques, la correction de l’émaciation via l’approvisionnement en nourriture, ou le traitement des caractéristiques biochimiques anormales du sang par l’apport direct de nutriments spécifiques. Il est maintenant admis que chacune de ces approches contribue au risque d’une augmentation de la mortalité, à moins qu’une attention spécifique ne soit prêtée à la correction des dommages cellulaires associés aux carences et aux déséquilibres complexes en nutriments. Bien que l'anémie puisse être liée à la déficience en fer et qu’elle possède beaucoup des spécificités visibles de cette carence, le problème qui se pose à court terme relève plus d’une incapacité à utiliser efficacement le fer de l’organisme, que d’un déficit immédiat. Une thérapie avec du fer à ce stade augmente la mortalité. Avec un traitement approprié, lorsque les infections sont contrôlées et que les déficiences en nutriments spécifiques sont corrigées, les compétences cellulaires réapparaissent. La masse maigre peut être progressivement restaurée et la masse de globules rouges accrue, tandis que le fer entrera dans la composition de l’hémosidérine et de la ferritine. À certains stades du processus de rétablissement, le fer de réserve est susceptible d'être insuffisant pour satisfaire la demande, dans ce cas une situation plus classique de déficience en fer apparaît et la supplémentation en fer devient nécessaire et appropriée. Quel est le message clé? Les preuves accumulées montrent que l'anémie liée à la malnutrition sévère représente, d’une part, une conséquence de multiples facteurs et, d’autre part, une interaction entre l’adaptation à un apport alimentaire inadéquat et l'impact d'autres stress associés à l’infection ou à un déséquilibre alimentaire. Les contraintes concernant l'utilisation efficace du fer entraînent une augmentation du fer inutilisé, en dépit d'une absence d’augmentation du poids total de fer dans l’organisme. Dans cette situation, la supplémentation en fer est dangereuse. Afin d’éviter de causer plus de mal que de bien, il est donc essentiel de comprendre le contexte général de l'anémie liée à la malnutrition sévère et de s’assurer de l’usage d'interventions appropriées aux moments opportuns. LES FAITS: • Les termes marasme, kwashiorkor, kwashiorkor marastique, carence protéique, déficiences énergétique et protéino-énergétique, ont tous été utilisés à dif- • • • férents moments pour décrire ce qui est maintenant qualifié de dénutrition sévère ou sans oedème. Les nouveau-nés et les enfants qui souffrent de malnutrition sévère ont fréquemment des taux d’hémoglobine ou d’hématocrites modérément réduits, respectivement 80 à 100 g/L et 30 % à 35 %. En moyenne, la durée de vie normale d'un globule rouge est de 120 jours, mais elle peut être beaucoup plus courte chez les enfants malnutris. En dépit d'un faible taux d’hémoglobine, il y a une augmentation à la fois du fer stocké et du fer cellulaire libre, et la supplémentation en fer augmente la mortalité. 15 INFECTION ET ETIOLOGIE DE L'ANEMIE David Thurnham et Christine Northrop-Clewes Quel est le problème et que savons-nous? Anémie et maladies sont très fréquentes dans les pays en développement. On sait que la réponse inflammatoire à la maladie stimule une série de modifications dans le métabolisme du fer qui conduisent à l’anémie si l'inflammation se prolonge. On note néanmoins qu’un statut insuffisant en fer résultant d’une inflammation ne représente pas une véritable déficience en fer, mais plutôt une redistribution du fer qui peut prédominer en dépit de réserves normales. Les nouveau-nés sont précisément exposés à l’infection et à l’inflammation, et il s’avère alors nécessaire de développer leur système immunitaire. Cependant, des expositions trop fréquentes augmenteront le risque d'anémie. Les infections parasitaires contribuent également à l’inflammation et à l’anémie. Ainsi, dans les pays en développement où il y a de fortes prévalences de diarrhées, de vomissements, de fièvre, de paludisme et d’infections par des helminthes, l'anémie est courante. Les tentatives de réduction de la prévalence d'anémie ont été progressives pendant plus de deux décennies, mais la situation est encore courante. L’une des raisons de cet échec apparent pourrait venir de l’hypothèse selon laquelle la "déficience en fer" serait la seule cause d’anémie. Or, aujourd’hui, il est largement admis que l’anémie constitue une conséquence à la fois de l'inflammation et d’un apport en fer alimentaire biodisponible insuffisant. 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 35 15 · Infection et étiologie de l'anémie Qu'a-t-il été accompli? Il y a maintenant une meilleure reconnaissance du fait que les infections sont responsables d’une grande partie des anémies dans les pays en développement, par conséquent, il est accepté que l’infection et la réponse inflammatoire peuvent également jouer un rôle initiateur important. L’exposition fréquente à des maladies endémiques encourage une réponse inflammatoire ainsi qu’un statut en fer insuffisant, et augmente le risque d'anémie en altérant la synthèse d’érythrocytes et/ou en raccourcissant la durée de vie des globules rouges. Le fait que cela s’accompagne d’une déficience en fer métabolique dépendra de la capacité de l’individu à conserver des réserves en fer via l’absorption, les pertes et la biodisponibilité du fer alimentaire, afin de maintenir un taux d'hémoglobine normal. Il doit également être gardé en mémoire que la maladie réduit l'appétit – plus fréquemment un individu est malade, plus il est susceptible d’être malnutri. Quel est le rapport entre infection et anémie? Les nouveau-nés sont rarement anémiques à la naissance. Les conditions d’hypoxie relative in utero conduisent à de fortes concentrations en hémoglobine à la naissance, mais lorsque l'oxygénation du sang de l’enfant s’améliore, l'érythropoïèse cesse et les concentrations en hémoglobine chutent au cours des deux premiers mois de la vie. A l'âge de 4 à 6 mois, les réserves en fer sont limitées ou épuisées, et l’apport et la biodisponibilité du fer alimentaire deviennent critiques. Jusqu'à 4 mois, le lait maternel est la principale source de fer alimentaire et de facteurs immunitaires protecteurs pour la croissance des enfants, mais lorsque la consommation d’aliments de complément augmente, l’exposition aux pathogènes de l'environnement augmente également, de même que la fréquence de lutte contre les maladies. De tels jeunes enfants sont dépendants de bonnes sources de fer alimentaire pour maintenir leur statut hématologique, puisque l'absorption du fer sera minime pendant les périodes d’anorexie et bloquée par la fièvre et l’inflammation. Bien que la fréquence des épisodes infectieux décline avec le développement de l'immunité humorale et l’augmentation des apports alimentaires chez les enfants plus âgés, ceux-ci sont moins influencés par les maladies infectieuses, mais le maintien des réserves en fer peut être mis en danger par les pertes. Le fer de l’organisme est précieusement conservé, mais le risque de schistosomiase ou d’ankylostomiase augmente avec l’âge, et les parasites à l’origine de ces pathologies peuvent causer des saignements chroniques et des pertes en fer. Ainsi, les maladies infectieuses, les parasites intestinaux et une alimentation pauvre se cumulent et privent les enfants de fer dès leur petite enfance. Les recherches montrent que même une 35 anémie légère altère les capacités cognitives, augmente le risque de naissance prématurée et réduit la productivité. Il apparaît donc clairement qu'il est possible que l’inflammation puisse être un facteur étiologique clé responsable de l'initiation et de la présence continue de l'anémie dans les pays en développement. L’élévation du taux de protéines de phase aiguë (PPA) sert de marqueur de l’inflammation subclinique. Trois de ces protéines sont particulièrement utiles. La protéine créactive (PCR) et l’antichymotrypsine-α1 (ACT) sont les marqueurs les plus précis de l’inflammation; ils augmentent au cours des six premières heures de l’infection, atteignent leurs concentrations maximales en 24-48 heures et chutent habituellement lorsque les signes cliniques commencent à apparaître. Les concentrations en glycoprotéine-acide-α1 (GPA, également connue sous le nom d’orosomucoïde) sont beaucoup plus lentes à augmenter et n’atteignent leur concentration maximale qu’au bout de 2 à 5 jours après l’infection et constituent donc plus un marqueur chronique de l’inflammation. Là où ces protéines sont augmentées, elles indiquent que le métabolisme du fer est altéré et que ces modifications causées par l’inflammation peuvent contribuer à la prévalence d'anémie dans la population. En utilisant ces protéines, il est possible d'identifier au sein d’une population apparemment saine les personnes pouvant incuber une maladie, celles s'étant récemment remis d'une maladie ou celles en convalescence plus tardive. Quelle est la direction à suivre? • Infection et inflammation jouent un rôle important dans l'étiologie de l'anémie, et il est recommandé que les protéines de la phase aiguë PCR et GPA soient contrôlées avant et après supplémentation et mesurées parallèlement à la ferritine. • La recherche a montré que dans la plupart des cas, les suppléments de fer donnent de petits avantages et augmentent même la prévalence d'infections. Ceci peut maintenant être expliqué grâce à notre connaissance de l'inflammation. Si l’anémie chez les personnes apparemment en bonne santé est principalement due à une inflammation subclinique, cela explique pourquoi la supplémentation en fer est si peu efficace pour faire baisser la prévalence d'anémie, étant donné que le fer ne guérit pas les infections. De plus, le fer alimentaire supplémentaire, donné à des enfants exposés à des infections fréquentes, peut perturber l’équilibre délicat entre les cytokines pro- et antiinflammatoires. • La recherche montre que les suppléments de vitamine A réduisent un peu l'inflammation et permettent la 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 36 • 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 36 16 · Monter des programmes pour prévenir plus efficacement l’anémie mobilisation du fer pour restaurer l’hématopoïèse; la supplémentation en vitamine A devrait donc précéder la supplémentation en fer. La recherche doit déterminer si les vers, tels que l’Ascaris, contribuent à l’anémie via l’inflammation et il est également nécessaire de déterminer si l’hepcidine récemment découverte, qui augmente avec l’inflammation et bloque l’absorption et la mobilisation du fer, est produite localement dans l’intestin. Quel est le message clé? L’infection et l'inflammation jouent un rôle important dans l’étiologie de l'anémie et ne doivent être négligées dans aucune intervention. Les suppléments de fer doivent être donnés avec prudence, mais le risque de conséquences délétères peut être modifié par le statut en vitamine A. Il semblerait donc prudent que les interventions basées sur le fer soient précédées par des supplémentations en vitamine A, avec ou sans traitement anti-helminthe, selon les conditions locales. La voie de l'infection et de l’inflammation est relativement nouvelle et son effet sur l’anémie nécessite plus de recherches. LES FAITS: • On estime que 2 milliards de personnes à travers le monde sont anémiques. • Dans les pays en développement, 40−50 % des enfants de moins de 14 ans et des femmes en âge de procréer souffrent d’anémie. • Les enfants âgés de 5 à 14 ans et les femmes enceintes présentent le plus haut risque d'anémie avec une prévalence respectivement estimée à 48 et 52 %. • Globalement, on estime que 200 millions de personnes sont infectées par la schistosomiase et que 600 millions d’autres vivent dans des régions endémiques. • On estime que 1,3 milliard de personnes sont globalement affectées par des ankylostomes. • On estime que 900 millions de personnes dans le monde sont infectées par la trichocéphalose. • Approximativement 1500 millions de personnes sont globalement infectées par l’Ascaris. 16 MONTER DES PROGRAMMES POUR PREVENIR PLUS EFFICACEMENT L’ANEMIE Saskia de Pee, Martin Bloem, Regina Moench-Pfanner et Richard Semba Quel est le problème et que savons-nous? Le Sommet Mondial pour les Enfants de 1990 a fixé des objectifs pour l’élimination des déficiences en micronutriments, notamment à cause de leur forte prévalence et de leurs conséquences sévères dans les pays en développement dont certains commencent à émerger. Un progrès substantiel a été réalisé dans le combat contre la carence en vitamine A (CVA) et des progrès similaires, voire supérieurs, ont été réalisés pour combattre les troubles liés à la déficience en iode (TDI). Cependant, la connaissance de l’impact de l’anémie ferriprive sur le développement mental est relativement récent; ainsi, combattre cette anémie auprès des jeunes enfants ne représentait pas un but majeur lors du sommet mondial, et les progrès dans son élimination ont donc pris du retard. Pourquoi le contrôle de l'anémie ferriprive a-t-il pris du retard? Il y a eu plusieurs raisons suggérées pour expliquer que le contrôle de la carence en fer et de l'anémie n’ait pas été appliqué à grande échelle. Ces raisons incluent: la focalisation sur ce qui devrait être exigé pour appliquer l'approche privilégiée de façon à augmenter l’observance et la couverture de l’intervention; l’évaluation de suppléments alternatifs et de fréquences d’administration des doses améliorant l’observance et donc l’impact; et l’évaluation de ce qui devrait être communiqué à ceux qui somment d’accélérer le contrôle de l’anémie ferriprive. Cependant, il semblerait que le coeur du problème soit qu'il existe, au niveau global comme au niveau des pays, un manque de moyen pour s’assurer que des mesures efficaces sont appliquées. La situation peut, par conséquent, être en grande partie due au fait que des composants opérationnels du contrôle de l'anémie ferriprive sont bien moins développés en comparaison de la recherche et développement (R&D), et que ces deux aspects ne sont pas suffisamment reliés par la communication. La communication comprend le fait de générer un soutien politique, ainsi que de financer et de motiver l’acceptation de meilleures pratiques nutritionnelles auprès des familles et des communautés, au travers de programmes d’éducation et de promotion de la santé. Un programme équilibré avec des composantes interconnectées est 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 37 16 · Monter des programmes pour prévenir plus efficacement l’anémie nécessaire pour assurer une réduction efficace de l'anémie ferriprive. Pourquoi la communication concernant le contrôle de l’anémie ferriprive est-elle difficile? Dans le cas du contrôle de la CVA et des TDI, l'approche utilisée est celle dite de "la balle orientée", dans laquelle on accentue simplement l’usage respectivement de capsules de vitamine A et de sel iodé. Dans le cas de l'anémie ferriprive, en revanche, le concept de l’intervention et la stratégie de mise en oeuvre ne sont pas les mêmes pour chaque situation et nécessitent d'impliquer plusieurs secteurs. Quels sont les problèmes concernant l’anémie nutritionnelle et quelles sont les solutions envisageables? Anémie versus déficience en fer Problème: l'anémie n’est pas seulement due à une déficience en fer et la déficience en fer ne mène pas toujours à l’anémie. Contexte: En raison de ce problème, il y a eu un débat progressif au sujet de ce que devrait être le but de l'intervention - seulement réduire la déficience en fer et l’anémie ferriprive ou réduire également l’anémie due à d'autres causes, telles que le paludisme, les infestations par les helminthes, les déficiences en d'autres micronutriments etc. Parce qu'une approche efficace exige une connaissance des causes fondamentales de l'anémie, rassembler les données sur ces causes est prioritaire et, la plupart du temps, aucune action n'est menée jusqu'à ce que celles-ci soient claires. Solution: Se concentrer sur les faits suivants devrait faciliter la prise de décisions concernant les programmes à appliquer: • Plus de 2 milliards de personnes sont anémiques et les estimations du nombre de personnes affectées par la déficience en fer sont encore plus élevées. Par conséquent, il est improbable qu’une population puisse être affectée par une anémie qui ne serait pas due dans une certaine mesure à une déficience en fer, ni que la déficience en fer soit la seule cause à sous-tendre l'anémie. • Les besoins en fer pendant l’enfance et la grossesse sont si élevés qu’il est pratiquement impossible de les couvrir via l'alimentation seule. Ces besoins peuvent être couverts uniquement par l'alimentation lorsque celle-ci contient une quantité significative d’aliments fortifiés et de fer héminique provenant d’aliments d’origine animale. Ainsi, la déficience en fer chez les personnes de ces tranches d'âge est pratiquement 37 obligatoire et la question n'est pas de savoir si une intervention avec du fer, un mélange de multi-micronutriments et/ou un contrôle de l'infection aura un impact sur la déficience en fer et l’anémie, mais plutôt d’identifier quelle stratégie sera la plus efficace. Au lieu de déterminer l'ampleur précise à laquelle chaque facteur joue un rôle, l’attention devrait se concentrer sur l’identification des causes connues pour être les plus importantes, tout en surveillant l'impact de ces mesures sur la déficience en fer et l’anémie dans la population, afin d’ajuster et de bien calibrer le programme. Le raisonnement justifiant cela: ne rien faire nuit plus que ne pas traiter tous les cas, uniquement parce que certaines causes ne sont pas encore identifiées. Nutrition, santé, développement ou conséquences économiques Problème: Depuis longtemps, la supplémentation en fer a été promue en tant que moyen pour prévenir et traiter l’anémie, un terme très médical qui n’évoquait pas grand chose à l’esprit des décideurs politiques et des gouvernements soucieux de stimuler la croissance économique etc. Contexte: L'anémie a été décrite comme un état dans lequel l'oxygène est transporté en quantité insuffisante à travers l’organisme et les personnes souffrant d'anémie comme étant plus facilement fatiguées (léthargiques), ayant une productivité au travail plus faible et de moins bons résultats scolaires, tandis que l'anémie sévère augmentait le risque de mortalité maternelle. Cette description s’appuyait principalement sur la compréhension des nutritionnistes et des professionnels du corps médical. Cependant, les conséquences sur les capacités mentales actuelles et futures des enfants, sur le développement d'une nation, ainsi que les conséquences économiques n'étaient pas suffisamment mises en avant auprès des différents secteurs concernés, tels que celui du bien-être économique de l'enfant, de l'éducation etc. Solution: Le fait que les dégâts causés par la déficience en fer sur les capacités mentales d'un jeune enfant sont irréversibles pour le restant de sa vie, et que le PIB chute lorsque la déficience en fer et l’anémie ne sont pas traitées, devrait constituer les messages clés pour mobiliser l'action sur la lutte contre la déficience en fer et l’anémie auprès des divers secteurs. Approches de santé publique médicales versus alimentaires Problème: Quand l'anémie est considérée comme un problème médical, les solutions cherchées pour traiter ce 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 38 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 38 16 · Monter des programmes pour prévenir plus efficacement l’anémie problème se concentrent sur une approche médicale. Ceci implique d’identifier, avant d'agir, la cause précise pour chaque population; de donner les nutriments manquants à fortes doses, afin de traiter au lieu de prévenir l’anémie; et de délivrer des messages ciblés sur le traitement d’un problème perçu ou présumé. Contexte: Puisque la déficience en fer et l’anémie sont si répandues, l'existence du problème peut être supposée et l’action devrait donc être menée en conséquence. Cependant, dans le même temps, il est difficile d’appliquer cela à un niveau individuel du fait que la plupart des personnes souffrant d'anémie ou de déficience en fer n'en est pas informée, et est donc moins susceptible de prendre des suppléments pendant une longue période, alors même que ces personnes perçoivent qu’un tel traitement améliorerait nettement leur condition. Solution: Parce qu'un tiers de la population mondiale souffre de déficience en fer et d’anémie, à l'origine en raison de leur alimentation qui ne suffit pas à satisfaire leurs besoins, une approche alimentaire visant à augmenter les apports en fer et en d’autres micronutriments de la population entière, et ciblant en particulier les groupes les plus à risque, se révèle être l’approche ayant le plus de sens. De tels apports augmentés devraient être maintenus pendant une longue période et perçus comme une voie pour promouvoir une bonne santé et protéger le développement cognitif. De plus, en augmentant les apports en fer de tout le monde et en utilisant une approche basée sur l’alimentation, les femmes entameront leur grossesse avec des réserves plus élevées, qui réduiront la marge entre besoins et apports pendant la grossesse. Le plus grand défi d'une approche alimentaire est de trouver un moyen d’augmenter suffisamment les apports des groupes les plus à risque, les jeunes enfants et les femmes enceintes. Le meilleur moyen d’assurer la consommation d'une quantité de micronutriments suffisamment élevée est d’ajouter des fortifiants dans le bol alimentaire d’un individu, une stratégie connue sous le nom de fortification maison. Peu d'expériences réussies ont été décrites Problème: Les expériences de supplémentation en fer et acide folique pendant la grossesse sont mitigées et les décideurs semblent toujours y réfléchir à deux fois avant de s’engager plus avant dans des programmes de contrôle de l'anémie ferriprive chez les femmes enceintes et/ou les jeunes enfants. C’est pourquoi il y a peu d'expériences décrivant des programmes réussis, notamment chez les jeunes enfants. Contexte: La plupart des recherches sur la déficience en fer et l’anémie ont été menées par des institutions académiques et se sont donc concentrées sur l’acquisition de nouvelles connaissances concernant la faisabilité technique des interventions, plutôt que sur leur faisabilité opérationnelle. La conséquence de cela semble être que l’attente personnelle des scientifiques à propos du programme est de conclure sur ce qui est le mieux, tandis qu’ils vont chercher à améliorer les interventions potentielles et tester de nouvelles préparations, de nouveaux protocoles de mesure, des combinaisons de micronutriments etc. En même temps, les programmes qui sont menés sur une base régulière ne laissent souvent pas assez de place à l’organisation et à l’évaluation, et ne se révèlent donc pas très efficaces pour communiquer sur les succès et les leçons à en tirer. Solution: Il devrait y avoir un plus grand lien entre la communauté scientifique R&D et ceux mettant en œuvre les programmes afin, d’une part, de s’assurer que le plus grand investissement est bien mis dans l’évaluation de la faisabilité opérationnelle des interventions prometteuses et, d’autre part, de surveiller et d’évaluer entièrement leur mise en oeuvre. Ces expériences devraient être appliquées à une échelle suffisamment importante. Les projets mis en application sont souvent trop petits et les conclusions qui en sont tirées ne permettent pas de les appliquer à plus grande échelle, à une province entière ou à un pays. Communiquer et interpréter les nouveaux résultats de recherche et les exceptions Problème: Les nouveaux résultats et rapports de recherche, dans les cas où aucun avantage n’a été trouvé, ou même, où des effets négatifs de la supplémentation en fer ou en multi-micronutriments ont été constatés, conduisent souvent à la conclusion que ces suppléments devraient être évités pour tout le monde à cause du risque de conséquences négatives. Contexte: Scrimshaw a suggéré les idées fausses suivantes qui pourraient entraver la mise en œuvre de programmes: • Le mythe selon lequel la déficience en fer est plus difficile à prévenir que les TDI et la CVA. Ceci se base en grande partie sur le fait que, pour l’instant, peu de programmes réussis ont été appliqués pour le contrôle de la déficience en fer, comparé au contrôle de celles en vitamine A et en iode. • Le mythe selon lequel la supplémentation en fer peut augmenter la sévérité des infections. Trois articles ont examiné la preuve de cette considération et ont conclu que seuls les très jeunes enfants (moins de deux 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 39 16 · Monter des programmes pour prévenir plus efficacement l’anémie • • • mois), les enfants sévèrement malnutris présentant des complications cliniques, et les enfants des régions où le paludisme est très endémique et où aucun bon programme de contrôle de cette maladie n’a été appliqué, ne devraient pas recevoir de suppléments à doses élevées en fer (> 10 mg / jour). Les aliments fortifiés peuvent être prodigués aux enfants dans les régions à haute endémicité du paludisme. Au jour d’aujourd’hui, il n’y a pas assez d’arguments pour savoir si les fortifiants maisons, dont la plupart fournissent 10−12,5 mg de fer à mélanger avec un repas, sont sûrs dans ces régions à haute endémicité du paludisme et, par conséquent, il a été recommandé que ceux-ci ne soient fournis que dans des circonstances parfaitement contrôlées. L'augmentation des diarrhées constatée chez les enfants ayant reçu du fer était trop faible pour avoir une signification clinique. La supposition selon laquelle les thalassémies et autres hémoglobinopathies constituent des contreindications à la supplémentation en fer. Dans certaines régions du monde, l'anémie est rendue complexe par la thalassémie et les hémoglobinopathies. Dans les cas sévères de thalassémie, il peut y avoir une surcharge en fer. La supplémentation habituelle en fer pendant la grossesse dans les régions à fortes prévalences de thalassémie et d'hémoglobinopathies donne des réponses hématologiques extrêmement variables. Cependant, il ne semble pas y avoir de rapport concernant les complications qui surviennent avec la supplémentation habituelle en fer pendant la grossesse, complications liées à la thalassémie et aux hémoglobinopathies dans la population. L'idée selon laquelle le dépistage est nécessaire avant la supplémentation à cause de la prévalence d’hémochromatose. La prévalence d’homozygotes pour l’hémochromatose est très faible (< 0,5 %) et le gène pour la forme classique d’hémochromatose est répandu uniquement dans les populations dont les origines ancestrales se trouvent en Europe du Nord. Quant au risque de surcharge en fer chez les personnes souffrant d’hémochromatose, les experts ne pensent pas qu’il s’agisse d’une raison pour supprimer le fer pour les personnes à risque de carence qui vivent dans les pays en développement. La découverte selon laquelle la fortification et la supplémentation en fer pourraient augmenter le risque de maladie coronaire et de cancer. Une relation possible entre statut en fer et risque de maladie cardiovasculaire et de cancer a été le sujet de plusieurs études d'observation récentes. Jusqu'ici, il n’y a aucun argument valable montrant l’existence d’une telle relation ou un éventuel rapport causal. 39 Solution: Il s’avère plus important de ne pas perdre de vue les très fortes prévalences de déficience en fer et d’anémie, ou leurs graves conséquences et la cause sous-jacente qui est une alimentation défectueuse. Les conclusions de la recherche devraient être entièrement examinées et leur applicabilité à la situation des différentes populations évaluées. En effet, elles devraient permettre de régler avec précision et de mettre en oeuvre plus efficacement les programmes de contrôle de la déficience en fer et de l'anémie, au lieu de stopper des programmes, ce qui se traduit par le fait que la majorité de la population est laissée sans traitement à cause d'une minorité qui pourrait présenter une légère augmentation du risque. Cette situation s'est produite récemment en réponse à la découverte d'une mortalité plus élevée chez les enfants, dans une région où le paludisme est hautement endémique, alors qu’ils étaient supplémentés en fer en absence de mesure de contrôle du paludisme. Que l’augmentation du risque fût faible, que ces découvertes n'aient pas été observées dans une région différente où la transmission du paludisme était sous contrôle en utilisant des moustiquaires de lit traitées et en traitant les cas suspects, ajouté au fait que le paludisme était très fortement endémique dans la région, n’a pas suscité beaucoup d’intérêt dans les discussions qui ont suivi la publication de ces résultats. Quelle est la direction à suivre? Puisque les prévalences de déficience en fer et d’anémie sont aussi fortes et que les conséquences pour les individus et les populations sont si sévères, le point central devrait être de mettre en œuvre des programmes de contrôle. L’argumentation devrait se concentrer sur les avantages pour le développement précoce de l'enfant et donc sa réussite ultérieure dans la vie et l’augmentation de sa productivité qui, au final, bénéficient à l'économie de la nation. Les programmes devraient promouvoir une approche alimentaire, incluant la fortification des aliments de base et des condiments pour la population générale, ainsi qu’une fortification maison pour les groupes cibles spécifiques, puisque ces programmes sont: • plus viables, • moins perçus comme le traitement d'une condition, • applicables dans les régions endémiques au paludisme. Quand un programme à grande échelle est rendu effectif, il est essentiel que sa couverture, son observance et son efficacité soient évaluées. Quel est le message clé? Le contrôle de la déficience en fer et de l’anémie a pris 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 15.07.2008 40 13:56 Uhr Seite 40 17 · Approches gagnantes – les sprinkles du retard par rapport à ceux des TDI et de la CVA. Ce contrôle devrait être accéléré en se concentrant sur le fait que l’alimentation de beaucoup de personnes n’apporte pas une quantité de fer adéquate, ce qui doit être résolu au travers d’une approche alimentaire incluant une fortification (maison) et, en parallèle, mais ne dépendant pas de celle-ci, des méthodes de lutte contre les autres causes d’anémie. Les conséquences de l'anémie et de la déficience en fer sur le développement cognitif, la productivité et le développement économique doivent être mises en exergue. Et pour avancer le plus efficacement possible, les programmes et les politiques devraient être entièrement surveillés, évalués et communiqués. 17 APPROCHES GAGNANTES – LES SPRINKLES Stanley Zlotkin et Mélody Tondeur Quel est le problème et que savons-nous? Les recommandations actuelles INACG/OMS/UNICEF sont de fournir une supplémentation quotidienne en fer à tous les enfants de poids de naissance normal dans les premières années de vie, à partir de 6 mois, là où la prévalence d'anémie est inférieure à 40 %, et de continuer la supplémentation jusqu'à 24 mois quand la prévalence est supérieure ou égale à 40 %. Le problème est qu’il existe peu d’options pour supplémenter en fer les nouveau-nés et les jeunes enfants. Les sirops (au sulfate ferreux) ont été la première stratégie, mais le goût désagréable et métallique, la coloration sombre des dents et la gêne abdominale qu’ils provoquaient ont rendu l’adhésion difficile. De plus, des problèmes techniques de courte durée de conservation, de coût de transport élevé et de difficulté à administrer correctement les gouttes ont entravé la réussite des interventions. Le concept de fortification maison est arrivé il y a une dizaine d’années, lorsque le contrôle de l'anémie ferriprive est devenu une priorité, tandis que les interventions alors disponibles semblaient ne pas être efficaces pour atteindre les populations les plus vulnérables. Cela a conduit au développement de Sprinkles qui sont des sachets unidoses contenant un mélange de micronutriments en poudre à mélanger directement dans la nourriture. Les études montrent une bonne efficacité des Sprinkles qui sont bien tolérés et faciles à administrer. Actuellement, il y a deux formulations facilement disponibles – la "formulation pour l’anémie nutritionnelle" (nutritional anemia formulation) et la "formulation complète en micronutriments" (complete micronutrient formulation), mais d'autres micronutriments peuvent y être ajoutés selon les conditions locales. La contribution des Sprinkles à une bonne alimentation complémentaire a été examinée au travers de la promotion actuelle de pratiques de sevrage appropriées, auprès des femmes enceintes et allaitantes, et des zones d'aide humanitaire et des actions d'urgence. Qu’a-t-il été accompli? Le problème de l'anémie ferriprive chez les enfants a en grande partie disparu en Amérique du Nord suite à la fortification des aliments vendus dans le commerce, en fer et en d’autres micronutriments essentiels. Malheureusement, fortifier les aliments du commerce a eu un succès limité dans les pays en développement puisque les aliments achetés en magasin, notamment ceux destinés aux jeunes enfants, ne sont pas très disponibles ou accessibles. Des sachets unidoses de micronutriments en poudre (Sprinkles) ont été développés pour résoudre les problèmes et les limitations des interventions de fortification traditionnelle. Le fer (fumarate ferreux) est encapsulé à l’intérieur d’une fine couche de lipides qui lui empêche d’interagir avec la nourriture, limitant ainsi les modifications de goût, de couleur et de texture des aliments. D’autres micronutriments peuvent être ajoutés au fer, en fonction des déficiences et des besoins locaux. Les personnels soignants peuvent également être facilement renseignés sur leur usage et ces fortifiants peuvent être ajoutés à tout aliment semi-solide, après cuisson et avant de servir. De plus, le concept est applicable via des programmes et aucune barrière culturelle n'a été identifiée. Des études avec des isotopes stables ont été menées pour évaluer la biodisponibilité du fer et du zinc encapsulés. Des études basées sur des communautés dans plusieurs pays, impliquant des nouveau-nés et des enfants anémiques et non-anémiques, ont évalué l'efficacité, la biodisponibilité, la dose, l’acceptabilité et la sécurité des Sprinkles. Les résultats montrent que: • L’emballage en unidose et la distribution d'une quantité limitée préviennent la prise de doses excessives, ainsi un enfant devrait consommer beaucoup de sachets (plus de 20 / jour) avant que ne se pose un problème de toxicité. Le risque de surdose est donc inférieur comparé aux préparations liquides. • Les nouveau-nés souffrant d’anémie ferriprive absorbent le fer des Sprinkles environ deux fois aussi efficacement que les nouveau-nés déficients en fer et non-anémiques. • La dose de fer de 12,5 mg recommandée par l’OMS est efficace et suffisante. 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt • • • • 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 41 18 · Sécurité des interventions de réduction des anémies nutritionnelles Les sprinkles contenant 12,5 mg de fer donné pendant 2 mois sont appropriés à la réduction de l'anémie, mais cette prise devrait être répétée plus d'une fois par an (c-à-d. 2 mois tous les 6 mois). Le seul effet secondaire rapporté est le noircissement des selles, ce qui est normal puisque la majorité du fer est excrétée avec les selles. Une moyenne de 70 % des sachets requis a été consommée, indiquant un haut niveau d'acceptation. Les Sprinkles sont efficaces pour prévenir et traiter l’anémie. Quelle est la direction à suivre? L'impact du fer sur l’accroissement de la sévérité des infections, à la fois parasitaires (paludisme) et bactériennes, reste une question importante mais non résolue. On considère que si l'absorption rapide du fer dépasse la capacité de liaison à la transferrine, il existe une possibilité d’augmentation de la prolifération des pathogènes (via le fer libre non lié à la transferrine). La forme et la dose de fer influera sur le taux d'absorption. On suppose que la forme encapsulée du fer dans les Sprinkles, et le fait qu'ils sont ajoutés aux aliments, conduira à une alternative plus sûre pour les autres formes de supplémentation en fer. Cependant, des recherches sont encore nécessaires. La recherche et développement des Sprinkles pour les femmes enceintes et allaitantes est en cours, tout comme leur utilisation pour l’aide humanitaire et pour l’alimentation d'urgence. Le succès des Sprinkles et l’échelle des interventions dans lesquelles les utiliser tiennent à deux éléments clés: premièrement, définir des méthodes de distribution viables qui permettent d’atteindre les populations les plus vulnérables dans les pays sous-développés, et, deuxièmement, s'assurer que les interventions bénéficient également d’une stratégie de marketing social. Le partenariat avec les organisations spécialisées dans ces régions est décisif. Le plus grand défi pour le futur sera de plaider pour l’adoption des Sprinkles dans les politiques nutritionnelles des pays sous-développés. Quel est le message clé? La fortification maison, qui utilise des sachets unidoses contenant un mélange de micronutriments en poudre et directement mélangé dans la nourriture (Sprinkles), constitue une voie sûre et efficace pour atteindre les groupes vulnérables dans les pays sous-développés et 41 vaincre la plupart des limitations des interventions traditionnelles visant à lutter contre l’anémie nutritionnelle. LES FAITS: • Les experts OMS/UNICEF estiment que plus de 750 millions d’enfants dans le monde souffrent de carence en fer et d’anémie. • Les symptômes de toxicité du fer se produisent quand les apports se situent entre 20 et 60 mg de fer par kg de poids corporel. • Une étude a montré que les Sprinkles sont rentables, avec une valeur par DALY sauvé estimée à 12,20 $ US et un coût par mort évité de 406 $. • Les avantages cognitifs s’associent à la prévention de l'anémie ferriprive et sont estimés à 37 $ gagnés pour chaque $ dépensé, lorsqu’ils sont traduits en réussite académique et en emploi au final à l’âge adulte. 18 SECURITE DES INTERVENTIONS DE REDUCTION DES ANEMIES NUTRITIONNELLES Klaus Schümann et Noel W. Solomons Quel est le problème et que savons-nous? Les anémies sont répandues dans les pays en développement et étaient autrefois considérées comme découlant de déficiences nutritives. Toutefois, il est maintenant reconnu que de plus en plus d'anémies n’ont pas d'origine nutritionnelle et proviennent plutôt des suites d’une maladie chronique ou d’une hémoglobinopathie. Par conséquent, il est important de considérer la sécurité, soit thérapeutique, soit prophylactique, des interventions de santé publique et des interventions cliniques, de même que les avantages que présente l'allègement des déficiences en prodiguant des nutriments, puisqu’il peut également y avoir des risques associés chez les individus ayant suffisamment ou trop de ce nutriment. Le principe primordial de tout programme d’intervention reste de s’assurer qu'il ne cause pas de tort. Les problèmes d’innocuité surviennent parce qu’une exposition excessive aux vitamines et aux minéraux impliqués dans l’anémie nutritionnelle peut provoquer, directement ou indirectement, des conséquences délétères, et même des effets toxiques. Inquiétude majeure: des individus spécifiques, ou des sous-groupes au sein d’une 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 42 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 42 18 · Sécurité des interventions de réduction des anémies nutritionnelles population, peuvent, soit se trouver excessivement exposés à des micronutriments via des suppléments ou des aliments fortifiés dans leur alimentation habituelle, soit avoir des réactions idiosyncrasiques à d'autres mesures impliquées dans le contrôle de santé publique de l'anémie. Il est donc clair que protéger la santé de la population implique à la fois de réduire le risque d'anémie nutritionnelle et de protéger les individus des possibles conséquences délétères des interventions. Il est admis que les professionnels de terrain et les autorités de santé publique doivent s’assurer de certaines normes, de façon à garantir la sécurité de toute intervention. Il est capital de considérer les trois stratégies majeures d'interventions: 1. La supplémentation Les suppléments peuvent contenir plus que les besoins physiologiques journaliers en un nutriment, en particulier pour le fer. De plus, les questions de contrôle qualité quant à la fabrication, aux excédents et aux dosages sont importantes. Dans le cas de la supplémentation en fer, il est capital d'éviter de nouveaux déséquilibres qui peuvent survenir suite à des effets corrosifs induits par le fer, ou des dommages oxydatifs résultant de la prise involontaire d’une dose excessive. 2. La fortification Quand des nutriments exogènes sont placés dans la nourriture, la variation de consommation des aliments fortifiés au sein d’une population devient importante. Par exemple, pour l’huile de cuisson ou le sucre, il peut y avoir un ratio quantitatif de dix entre les personnes en consommant le plus et celles en consommant le moins. Par conséquent, il est important que le niveau de fortification fournisse un taux d’exposition sûr pour la distribution de consommateurs la plus large. 3. La diversification alimentaire L'intervention visant à promouvoir les aliments comme source de nutriments n'est pas sans poser des problèmes de sécurité potentiels, et peut encourager un modèle alimentaire moins sain en augmentant les apports alimentaires et donc le risque de maladie chronique. Des apports perturbés en viande rouge, source naturelle de fer biodisponible, pourrait, par exemple, augmenter le risque de cancer du côlon et beaucoup de maladies associées à une forte consommation de graisses saturées. Toute intervention doit être ciblée. Le groupe présentant l’apport moyen le plus bas devrait être la cible inhérente des programmes d'intervention portant sur les micronu- triments. Il est important de noter que, chercher à augmenter l’apport moyen de la population peut se révéler inefficace (dissémination des ressources là où elles ne sont pas nécessaires et ne ciblant pas ceux qui en ont le plus besoin) et même potentiellement dangereux (poussant certains à la limite supérieure de la distribution, avec un apport encore plus élevé qu’habituellement). Dans tout programme d'intervention, il est crucial qu'il y ait une évaluation diagnostique et une surveillance. FER Quelles sont les préoccupations d’innocuité concernant le fer? Par la nature de ses caractéristiques physicochimiques et de ses interactions biologiques avec les autres composés, le fer présente un ensemble de défis pour que son application soit sûre: • Effets gastro-intestinaux: les doses de fer auxquelles les individus peuvent être exposés quotidiennement via la combinaison des aliments, des fortifiants dans l'alimentation et des suppléments, sont particulièrement importantes. Les limites supérieures d’apports tolérables en fonction de l'âge ont été fixées aux Etats-Unis. Elles sont de 40 mg/jour dans l'enfance et l’adolescence, puis de 45 mg/jour à l’âge adulte. La plupart des effets secondaires communs des préparations de fer orales sont d’ordre gastro-intestinal: nausée, vomissement et incommodité épigastrique; et le niveau d'effet délétère observé le plus faible pour une seule dose a été placé entre 50 et 60 mg. L’apport en fer oral provoque également une coloration noire inoffensive des selles et, chez environ 6 % des individus, diarrhée ou constipation sont également possibles. • Effets athérogéniques: il y a eu quelques observations controversées quant à une corrélation entre apport en fer alimentaire et risque d’infarctus aigu du myocarde, mais cette association pourrait également être liée à la consommation concomitante du repas et donc à l’apport en graisse saturée et en cholestérol. • Effets de l'inflammation: la supplémentation en fer augmente les indicateurs de stress oxydatif. • Infections bactériennes: le problème de cet aspect est que le fer constitue un nutriment nécessaire aux mécanismes de défense à la fois des pathogènes et de l'hôte. Cependant, il semblerait que la supplémentation en fer oral chez les enfants déficients soit majoritairement bénéfique et réduise la prévalence d'infection. 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 43 18 · Sécurité des interventions de réduction des anémies nutritionnelles Que devrait-on considérer concernant la supplémentation en fer? • La supplémentation thérapeutique en fer utilise des doses orales élevées, entre 50 et 400 mg/jour de fer; elle peut être gérée individuellement et devrait être continuellement ajustée en fonction de la demande. • Il est essentiel que toute intervention sur le fer soit accompagnée d’un traitement des infections par les vers. • La supplémentation prophylactique en fer dans deux sous-groupes de population, d’une part, les femmes enceintes et, d’autre part, les nouveau-nés et jeunes enfants de 6 à 24 mois, est recommandée au niveau international. • La distribution prénatale de fer et d’acide folique combinés en comprimé est très importante. • La supplémentation complète de tous les jeunes enfants peut être problématique, car la dose n'est souvent pas contrôlée et adaptée aux changements de besoins des enfants déficients et, chez les enfants ayant un bon statut en fer, il y a un risque accru de déséquilibres causés par un excès de fer. De récents travaux de recherche sur la supplémentation en fer dans des régions endémiques au paludisme lui ont attribué une augmentation inquiétante de l’incidence d'effets délétères et de mort. La supplémentation en fer chez les enfants déficients dans les régions endémiques au paludisme n’est donc pas recommandée. Quid de la fortification en fer? La fortification des formules infantiles et des aliments de complément est courante depuis longtemps, mais le nombre et la diversité d'autres aliments contenant du fer ajouté (des aliments de base traditionnels jusqu’aux boissons et aux condiments) augmentent. Contrairement aux aliments de base qui contribuent seulement à une fraction des besoins journaliers d'un individu, les formules infantiles et les aliments de complément fortifiés fournissent jusqu'à 100 % des apports journaliers d’un jeune enfant, et doivent donc être formulés avec un fer de densité et de biodisponibilité appropriées. Il est important de noter que deux densités de fortification différentes sont exigées pour les enfants de 6 à 24 mois, afin d’éviter une surexposition dans la tranche d'âge la plus haute. La fortification des grains de céréale est obligatoire dans beaucoup de pays et les niveaux d'ajout se situent autour de 20 à 50 mg/kg selon le composé de fer utilisé, et fournissent généralement au maximum 22 % des besoins journaliers en fer. A noter que l'augmentation involontaire de l'exposition au sodium peut être une préoccupation quand les condiments sont fortifiés. Les directives de l’OMS sur la fortification des aliments en micronutriments sont d’un grand intérêt. 43 Quid de la biofortification en fer? La biofortification fait référence à la modification génétique des cultures alimentaires hautement énergétiques telles que riz, blé, maïs, pommes de terre et manioc. Cette technologie utilise les techniques de sélection systématique ou génétique pour développer des cultures de base riches en micronutriments. Contrairement aux autres méthodes, les besoins en traitement centralisé et en logistique complexe sont évités. Le fait que le sol contienne suffisamment d'oligoéléments constitue un prérequis à une biofortification réussie, ce qui peut nécessiter une fertilisation afin d’éviter un épuisement du sol. Il existe également des controverses concernant la modification génétique qui peut être réalisée par sélection conventionnelle ou pour optimiser les teneurs et la disponibilité en micronutriments. Quid de la diversification nutritionnelle pour augmenter l’apport en fer? Encourager les populations à diversifier leur alimentation pour y inclure des sources plus riches en certains micronutriments largement déficients constitue une stratégie importante, particulièrement pertinente lorsqu’il s’agit du fer. Encourager les jardins individuels ou scolaires ne présente généralement pas de risque d'excès du fait des faibles teneurs en fer dans les fruits et légumes et de sa faible biodisponibilité. D'autres interventions encouragent l’augmentation de la consommation de viande via l’élevage de petits ruminants ou la subvention de l’achat de viande, ainsi que de volaille et de poisson. La consommation excessive de fer est improbable, et la sécurité de l'intervention dépend des conditions sanitaires et des conséquences à long terme des maladies chroniques associées à des apports en viande élevés. Quelle est l’influence du retardement du pincement du cordon ombilical sur la teneur en fer du sang? La recherche montre que retarder le clampage du cordon ombilical constitue une mesure prophylactique efficace, permettant d’augmenter jusqu'à 50 % le statut en fer à la naissance et offrant la possibilité de plus longues périodes d'allaitement. Il y a cependant des inquiétudes quant à une augmentation du risque d’hyperbilirubinémie, mais les différentes méta-analyses montrent des résultats contradictoires. VITAMINE B12 Quid de l’innocuité de la vitamine B12? La vitamine B12 est associée à l’anémie et son absence résulte en une anémie hypoproliférative avec présence de gros globules rouges macrocytaires immatures dans la 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 44 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 44 18 · Sécurité des interventions de réduction des anémies nutritionnelles circulation. La vitamine B12 est remarquable pour sa grande marge d’innocuité et aucune limite supérieure d’apport tolérable en fonction de l'âge n'a été fixée. Le traitement traditionnel de l'anémie mégaloblastique par carence en vitamine B12 est une unique dose intramusculaire d’environ 200 µg de cyanocobalamine parentérale. La seule préoccupation importante d’innocuité entourant ces injections concerne les infections virales transmissibles par le sang et l'usage d’aiguilles stériles à manipuler prudemment. Par ailleurs, des doses orales de 1000− 2000 µg de cyanocobalamine se sont également révélées efficaces. La supplémentation prophylactique en vitamine B12 est pratiquement inconnue en tant que mesure de politique de santé, en revanche, la fortification en vitamine B12 est pratiquée. ACIDE FOLIQUE Que devrait-on envisager concernant les folates? Les folates ont un rapport à la fois primaire et secondaire avec l’anémie nutritionnelle. Il est important de noter que les recommandations journalières pour les apports n’ont pas été fixées à un niveau permettant uniquement sa fonction hématologique, mais à un niveau plus élevé pour la prévention des défauts du tube neural. Un apport excessif en folates est associé à des conséquences délétères et l'inquiétude majeure concerne la possibilité de masquage d’une déficience sous-jacente en vitamine B12. Pour l’anémie macrocytaire due à une carence en folates, un programme de supplémentation quotidienne à des doses de 500−5000 µg peut être prescrit et il est prudent de donner de la vitamine B12 dans le même temps. Quand l'acide folique est donné en intervention prophylactique, on cible les groupes à risque de défauts du tube neural et la dose est de 400 µg, qu’elle soit donnée seule ou en combinaison avec du fer, ou avec du fer et d’autres micronutriments. La supplémentation habituelle en fer et acide folique dans les populations présentant un fort taux de paludisme n’est pas recommandée. La fortification en acide folique est largement pratiquée et l’OMS spécifie 1,3 mg/kg de produit nutritionnel comestible comme étant la quantité maximale à ajouter pour la fortification des aliments de base, et un maximum de 27 µg d'acide folique par portion de 40 kcal de produit pour les autres aliments fortifiés vendus dans le commerce. VITAMINE A Quelles sont les questions clés autour de l’innocuité de la vitamine A? Intrinsèquement, la carence en vitamine A n'est pas une cause d'anémie nutritionnelle; cependant, il a été montré qu’un statut adéquat en vitamine A avait un rôle annexe dans l’optimisation de l’utilisation du fer. La limite supérieure d’apport tolérable quotidien a été fixée à 10 000 IU (3030 µg d’équivalent rétinol). L’exposition totale à la vitamine A devrait être limitée à une dose cumulative permettant de maintenir une concentration en vitamine A hépatique inférieure à 300 µg/g, ce que l’on estime être le seuil de toxicité. La consommation journalière régulière de 30 mg de vitamine A sous forme rétinoïde est associée à une toxicité chronique. Maintenir des apports élevés en β-carotène (un caroténoïde provitamine A) produit une coloration jauneorange de la peau, inoffensive d’un point de vue dermatologique. Certains travaux de recherche ont montré un risque de mort augmenté lorsque du β-carotène isolé était utilisé en suppléments journaliers à une dose de 30−50 mg au cours d’essais cliniques sur des individus prédisposés au cancer du poumon (fumeurs, ouvriers travaillant en contact avec l'amiante). Quid de la supplémentation et de la fortification en vitamine A? La supplémentation en vitamine A fait partie du régime pour la réhabilitation intensive des enfants souffrant de malnutrition protéino-énergétique sévère. Un enregistrement strict est exigé. On ne recommande plus de donner des suppléments à forte dose de vitamine A aux femmes allaitantes après l'accouchement afin d’assurer la teneur en vitamine A du lait. L’OMS ne spécifie pas de limite d’innocuité pour la fortification en vitamine A des aliments de base, bien que cette fortification soit courante. Il est suggéré qu’une telle fortification devrait fournir au moins 15 % des besoins quotidiens en vitamine A du groupe cible, mais ne devrait pas excéder 30 %. Pour les produits du commerce, l’OMS recommande une addition maximale de 60 µg de vitamine A par portion de 40 kcal. Y a-t-il un rôle pour la biofortification en vitamine A? La biofortification est un axe de recherche naissant dans les interventions visant les micronutriments et sa promotion est coordonnée par l'initiative Harvest Plus. Des variétés de carottes et de patates douces riches en provi- 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 45 18 · Sécurité des interventions de réduction des anémies nutritionnelles tamine A ont été développées et l'exposition à ces formes de β-carotène devrait être sûre pour la population. RIBOFLAVINE Y a-t-il des problèmes d’innocuité avec la riboflavine? Le carence en riboflavine n'est pas une cause d'anémie nutritionnelle, cependant, comme la vitamine A, la riboflavine est un nutriment utile pour maximiser la réplétion, arbitrée par le fer, d'une pleine masse de globules rouges. Puisqu’il n’y a aucun effet délétère associé à la riboflavine, aucune limite supérieure d’apport tolérable quotidien ne lui a été assignée. Des doses orales quotidiennes d'environ 2 mg sont utilisées pour traiter les individus atteints d’hyporiboflavinose. Généralement, la riboflavine est également ajoutée aux suppléments multinutriments et à la fortification des céréales principales auxquelles on ajoute typiquement une concentration allant jusqu'à 200 mg/kg de farines de céréale. CUIVRE Quelles sont les questions d’innocuité en rapport avec le cuivre? La déficience sévère en cuivre produit une anémie hypochromique microcytaire, mais ne représente pas un problème de santé publique, puisque la carence en cuivre primaire est rarement constatée et se produit presque exclusivement chez les nouveau-nés et les jeunes enfants nourris avec des laits formulés à faible teneur en cuivre, ou chez des adultes sous nutrition totalement entérale ou parentérale. L'anémie secondaire à une déficience en cuivre pourrait cependant être mise en rapport avec les interventions utilisant du zinc à des niveaux supérieurs aux limites tolérables. Le cuivre est un puissant émétique, provoquant des nausées et des vomissements quand il est ingéré, même en faible quantité, et un apport chronique excessif a été associé à une élévation anormale du taux de cholestérol LDL. La limite supérieure d’apport tolérable quotidien est fixée à 10 mg pour les adultes aux États-Unis, contre 5 mg dans l’Union Européenne. L'anémie par déficience en cuivre a été traitée avec succès à l’aide de doses de 1−2 mg/jour de cuivre sous forme de sulfate, chez les adultes et les jeunes enfants, et des quantités allant jusqu’à 9 mg/jour en doses divisées, sûres et tolérables pour les adultes. Ainsi, là où du zinc 45 est donné à forte dose, le cuivre devrait entrer dans la formulation du supplément, afin de prévenir un déséquilibre des apports en cuivre par le zinc. INTERVENTIONS AVEC DE MULTIPLES MICRONUTRIMENTS Que devrait-on considérer concernant l’innocuité des interventions avec de multiples micronutriments? Du fait que les déficiences en nutriments se trouvent souvent combinées, il y a eu un glissement d’une fortification en un seul nutriment vers des interventions avec de multiples micronutriments. Les recherches, menées dans le domaine génésique et chez les enfants, ont montré des effets contradictoires des supplémentations multinutriments et il semblerait que des interactions à la fois biologiques et nutriment-nutriment en soient responsables. Des recherches complémentaires sont nécessaires, car la combinaison de plusieurs nutriments compliquent l’attribution de conséquences positives ou négatives sur la santé, de combinaisons spécifiques, dans des conditions spécifiques. Quelle est la direction à suivre? Des études récentes montrant un effet négatif de la supplémentation en fer dans les régions endémiques au paludisme suggèrent que, d’une part, des travaux de recherche sont nécessaires dans le domaine, afin de développer et de tester des procédures adéquates et économiques pour la détermination du statut en fer à grande échelle, et nous rappelle, d’autre part, que les programmes d'intervention peuvent avoir des conséquences négatives. Le contrôle de la sécurité est un point crucial. Dans toute intervention de fortification, le profil de risque de la population devrait être estimé avec soin et mis à jour régulièrement. Quel est le message clé? Les interventions de contrôle de l’anémie nutritionnelle sont conçues dans le but d’obtenir un résultat positif sur la santé publique. Il reste néanmoins possible de menacer des vies et de nuire à la réputation des programmes d'intervention. Les recherches en cours dans tous les domaines d'intervention (supplémentation, fortification et diversification alimentaire), utilisant des formulations avec un seul ou plusieurs nutriments, doivent donc continuer. Les responsables politiques et les professionnels de santé publique se doivent d’être intransigeants avec le principe selon lequel chaque programme d'intervention doit être sûr pour tous les consommateurs et doit conduire à une amélioration ou à un maintien de la santé globale. 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 46 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 46 18 · Sécurité des interventions de réduction des anémies nutritionnelles LES FAITS: • La carence en fer explique environ la moitié des anémies dans les pays en développement et l’on suggère que l'autre moitié proviendrait d’un manque de cuivre, zinc, folates ou vitamines A, B2, B12 ou C. • Le principe primordial de toute intervention doit être "premièrement, ne pas faire de mal". • Les doses habituelles des suppléments nutritionnels sont: • 30−60 mg de fer pour un adulte de 70 kg, • un maximum de 120 mg de fer pendant la grossesse, • 2 mg de fer / kg pour les enfants. • En général, les effets secondaires du fer ne sont pas constatés après des apports oraux de 30−60 mg. • Une dose orale de 180−300 mg de fer / kg de poids corporel peut s’avérer mortelle pour les êtres humains, mais des doses orales inférieures à 10−20 mg de fer/kg de poids corporel représentent un niveau de non-observation d’effet délétère (No observed adverse-effect-level, NOAEL). • Aux Etats-Unis, il existe des limites supérieures d’apport tolérable quotidien liés à l'âge pour le fer. La limite a été fixée à 40 mg/jour pour les nouveau-nés et les jeunes enfants, et à 45 mg/jour pour les adultes. • Les directives de l’OMS sur la fortification alimentaire en micronutriments fournissent une information détaillée sur les niveaux de fortification basés sur l’innocuité et les contraintes technologiques et financières. Elles peuvent être commandées sur le site Web de l’OMS. • Les directives de l’OMS suggèrent que l’on ne peut ajouter plus de 3 mg de fer fortifiant à une portion de 50 g d’aliment solide ou à 250 ml de boisson – contribuant à un maximum de 22 % des besoins journaliers en fer fournis par une alimentation avec une disponibilité biologique élevée. • La supplémentation en fer dans les régions endémiques au paludisme n'est pas recommandée, en raison des résultats d'études récentes montrant une incidence accrue d'effets délétères et de mort. • Le traitement traditionnel de l'anémie mégaloblastique par carence en vitamine B12 est une dose unique intramusculaire d’environ 200 µg de cyanocobalamine parentérale. Des doses orales de 1000−2000 µg de cyanocobalamine se sont également révélées efficaces. • La limite supérieure d’apport tolérable quotidien pour les folates est fixée à 1000 µg/jour pour les adultes. • Pour l’anémie macrocytaire due à une carence en folates, un programme de supplémentation quotidienne à des doses de 500 à 5000 µg peut être prescrit, et il est prudent de donner de la vitamine B12 • • • • • • • • • • • • dans le même temps. L’acide folique donné en intervention prophylactique cible les groupes à risque de défauts du tube neural et la dose est de 400 µg, qu’elle soit donnée seule ou en combinaison avec du fer ou du fer et d’autres micronutriments. A noter: la supplémentation habituelle en fer et acide folique dans les populations présentant un fort taux de paludisme n’est pas recommandée. L’OMS spécifie 1,3 mg/kg de produit nutritionnel comestible comme la quantité maximale d’acide folique pouvant être ajoutée pour la fortification des aliments de base, et un maximum de 27 µg par portion de 40 kcal de produit pour les autres aliments fortifiés vendus dans le commerce. La limite supérieure d’apport tolérable quotidien a été fixée à 10 000 IU (3030 µg d’équivalent rétinol) pour la vitamine A. L’exposition totale à la vitamine A devrait être limitée à une dose cumulative permettant de maintenir une concentration en vitamine A hépatique inférieure à 300 µg/g, ce que l’on estime être le seuil de toxicité. La consommation journalière régulière de 30 mg de vitamine A sous forme rétinoïde est associée à une toxicité chronique. L’OMS ne spécifie pas de limite d’innocuité pour la fortification en vitamine A des aliments de base, mais il est suggéré qu’une telle fortification devrait fournir au moins 15 % des besoins quotidiens en vitamine A du groupe cible et ne devrait pas excéder 30 %. Pour les produits du commerce, l’OMS recommande une addition maximale de vitamine A de 60 µg par portion de 40 kcal. On ne recommande plus de donner des suppléments à forte dose de vitamine A aux femmes allaitantes après l'accouchement afin d’assurer la teneur en vitamine A du lait. Des doses orales quotidiennes d'environ 2 mg de riboflavine sont utilisées pour traiter les individus atteints d’hyporiboflavinose. Généralement, la riboflavine est également ajoutée aux suppléments multinutriments et dans la fortification des céréales principales, auxquelles on en ajoute typiquement une concentration allant jusqu'à 200 mg/kg de farines de céréale. La limite supérieure d’apport tolérable quotidien est fixée à 10 mg pour les adultes aux Etats-Unis, contre 5 mg dans l’Union Européenne. L'anémie par carence en cuivre a été traitée avec succès à l’aide de doses de 1−2 mg/jour de cuivre sous forme de sulfate chez les adultes et les jeunes enfants, et des quantités allant jusqu’à 9 mg/jour en doses divisées, sûres et tolérables pour les adultes. 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt • 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 47 19 · Importance et limitations de la fortification des aliments Là où du zinc est donné à forte dose, le cuivre devrait entrer dans la formulation du supplément, afin de prévenir un déséquilibre des apports en cuivre par le zinc. 47 fabricant alimentaire prend l’initiative de fortifier des produits afin d’augmenter ses ventes et ses profits. Permet une couverture très réduite dans les pays en développement. IMPORTANCE ET LIMITATIONS DE LA FORTIFICATION DES ALIMENTS DANS LA GESTION DES ANEMIES NUTRITIONNELLES Omar Dary Il y a, de plus, un concept relativement nouveau, à savoir la fortification au niveau du ménage. Il s’agit de la consommation de suppléments alimentaires (habituellement sous forme de poudre) mélangés à la nourriture au cours des repas. Dans le cas de la fortification de masse, son principal avantage sur les autres interventions est qu'elle utilise déjà la distribution et les systèmes commerciaux existants et, par conséquent, le coût est fondamentalement restreint aux vitamines et minéraux ajoutés, ainsi qu’aux procédés de fortification. Quel est le problème et que savons-nous? Deux approches principales sont utilisées pour contrôler les carences en micronutriments dans les populations: supplémentation et fortification alimentaire. Les suppléments sont très denses en vitamines et minéraux afin de fournir de grandes quantités de nutriments en une ou quelques doses. Leur formulation peut être adaptée aux besoins d'un groupe de population spécifique. Ils sont conçus pour délivrer les quantités de micronutriments recommandées et éviter les interactions entre micronutriments et inhibiteurs de l'absorption. Leur consommation nécessite, cependant, une décision volontaire et éclairée, et les études montrent que son acceptation et la couverture de la population par la supplémentation sont faibles. Un aliment fortifié est un produit comestible fabriqué par l'industrie alimentaire avec une composition nutritionnelle améliorée (ajout de vitamines et minéraux). La fortification alimentaire pourrait être considérée comme l’approche la plus favorable et la plus rentable si elle dispose du soutien des industriels. Néanmoins, même dans ces conditions, il y a beaucoup de facteurs susceptibles de limiter son utilisation potentielle et son efficacité. Il existe des directives de l’OMS pour la fortification alimentaire et celles-ci identifient trois approches: 1. La fortification de masse – Addition de micronutriments aux aliments généralement consommés par la population générale. Fournit une meilleure couverture de la population, mais ne peut satisfaire que partiellement les besoins en micronutriments des sous-groupes à risque. 2. La fortification ciblée – Elle se concentre sur la couverture spécifique des sous-groupes à risque. L’apport peut alors être suffisant pour satisfaire les besoins nutritionnels. 3. La fortification en fonction du marché – Là où un Quelles sont les limitations possibles à la fortification de masse? • La sélection du véhicule est un facteur extrêmement important à considérer. Le faible coût d’utilisation de la fortification de masse s’avère vrai dans un contexte industriel où l’aliment est produit par des centres de production officiels et centralisés. • Le facteur de dilution du fortifiant dans l’aliment doit être élevé,c-à-d. une petite quantité de fortifiants dans une grande quantité d’aliment. • L’augmentation du prix du produit due à la fortification devrait être minime, sinon il sera difficile d'obtenir l’acceptation du consommateur et d'établir une situation équitable parmi les producteurs. • La teneur en vitamines et en minéraux est déterminée à partir des individus qui consomment l’aliment en grande quantité, et donc l’apport supplémentaire en micronutriments donné aux individus les plus à risque, consommant fréquemment l’aliment en moins grande quantité, peut se révéler insuffisant si l’on n’utilise qu’un seul véhicule fortifié. Par conséquent, des mesures complémentaires peuvent aussi être nécessaires. • Des barrières technologiques peuvent limiter les niveaux et les formes de micronutriments à incorporer à des véhicules spécifiques, notamment en raison de changements organoleptiques indésirables. Il s’agit de la principale limitation à l’apport de quantités de fer suffisantes via les farines fortifiées. 19 Contrôler l’anémie nutritionnelle dans le groupe cible des jeunes enfants de moins de 24 mois demande une attention et des produits spéciaux, tels que les aliments de complément (fortification ciblée) et les suppléments alimentaires spécifiques à l’âge. Mais un autre groupe important exige toute l’attention: les femmes en âge de procréer. 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 48 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 48 20 · Approches alimentaires Comment peut-on évaluer l'impact potentiel des interventions de fortification? Les directives de l’OMS proposent des estimations des bénéfices potentiels à utiliser la proportion de la population située au-dessous et au-dessus des besoins moyens estimés (BME). Cependant, il est difficile d'estimer le profil de la distribution des BME dans les populations et il est donc suggéré qu'un calcul indirect des BME supplémentaires obtenus à partir des aliments fortifiées est valable. Comme norme, il est proposé qu’un aliment apportant au moins 20 % des BME pourrait être qualifié de bonne source et ceux en apportant 40 % comme excellente source. L'importance de la fortification de masse pourrait être estimée grâce au nombre absolu et relatif d'individus des groupes vulnérables atteignant ces catégories de BME. Quel est le rôle du contrôle et de la mise en application? Le succès de toute intervention dépend d’abord de l'assurance que la(les) population(s) cible(s) reçoi(ven)t les micronutriments en quantité et qualité requises. Ceci rend essentielles les actions de contrôle et d'assurance qualité par les producteurs, ainsi que l’inspection et la mise en application par les autorités gouvernementales. Les valeurs de référence et les critères d’acceptation répondant à la réalité des programmes doivent être fixés, mais sont malheureusement fréquemment négligés dans l’organisation des programmes. Les micronutriments et les prémixes devraient être certifiés en termes de quantités et de qualité des micronutriments, d’innocuité microbiologique, et devraient être surveillés par les autorités gouvernementales. Quel est le message clé? Les produits fortifiés ainsi que les suppléments alimentaires semblent être une voie raisonnable pour commencer à réduire l’anémie ferriprive dans les pays en développement. Cependant, le défi reste de s’assurer que de telles stratégies puissent être permanentes et viables. La fortification alimentaire doit relever plusieurs défis, mais ceux-ci peuvent être gagnés via la détermination de standards, le contrôle qualité, la certification, la surveillance et la mise en application par les gouvernements. LES FAITS: • Le coût total pour couvrir les besoins moyens estimés (BME) en la plupart des micronutriments (excepté en calcium et vitamine C) des femmes en âge de procréer se situe entre 0,25 et 1,00 $ US par an. • Dans la fortification de masse en condition réellement industrielle, approximativement 80−90 % du • • coût correspond à l’achat des micronutriments, à l'exception du riz pour lequel 50−90 % du coût est lié à la production de grains fortifiés. Dans la supplémentation, le coût des micronutriments ne correspond qu’à 10−40 % du coût total. Cependant, la supplémentation exige un système de distribution, lequel est déjà en place dans la fortification de masse. Le fer est un nutriment difficile à fournir via la fortification de masse, en particulier s’il s’agit de satisfaire les besoins des femmes en âge de procréer. Par conséquent, la fortification ciblée et la supplémentation préventive doivent être gardées à l'esprit pour la gestion complète des anémies nutritionnelles. 20 APPROCHES ALIMENTAIRES DE LUTTE CONTRE LA CARENCE EN FER Brian Thompson Quel est le problème et que savons-nous? La carence en fer est un problème social et de santé publique, sérieux et répandu. Bien que les taux de prévalence soient souvent plus élevés parmi les femmes et les enfants, la déficience en fer peut affecter la croissance, le développement et les performances de tous. L’échelle et l’ampleur du problème, combinés à l’impact fonctionnel qu’ont de telles déficiences sur la qualité de vie, du point de vue à la fois physiologique et socio-économique, nécessitent l'adoption urgente de mesures de contrôle connues et efficaces. Nous savons que, dans la majorité des cas, la cause principale de malnutrition en micronutriments est un apport alimentaire faible, à la fois en termes de quantité totale de nourriture consommée et de contribution d’aliments riches en micronutriments dans cette alimentation. Par conséquent, la FAO encourage un ensemble d’actions qui incitent une augmentation de l’apport, de l’accès et de la consommation d'une quantité, d’une qualité et d’une variété adéquates d’aliments, pour toutes les populations. Dans les pays en développement où les déficiences en micronutriments occupent une place prédominante dans un contexte d'insécurité alimentaire, couvrir les besoins totaux en énergie à partir d'une alimentation diversifiée et riche en micronutriments reste un défi majeur. Dans de tels cas, là où l'insécurité alimentaire est poussée par la 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 49 20 · Approches alimentaires pauvreté et le sous-développement agricole, la FAO concentre son soutien sur des stratégies basées sur l’alimentation, dont la diversification alimentaire et la fortification des aliments, visant à augmenter la disponibilité et la consommation d'une alimentation riche en micronutriments et nutritionnellement adéquate, constituée à partir d'une variété d’aliments disponibles, jusqu’à ceux dont la disponibilité est plus incertaine. De telles interventions, largement axées sur l’alimentation, ont tendance à être négligées en faveur de la fortification singulière et de programmes de supplémentation, intéressants par leur simplicité et leur rentabilité apparentes. En pratique, cependant, beaucoup de ces programmes s’avèrent difficile à gérer, plus cher que prévu pour être mis en oeuvre, et moins efficace que promis. Par conséquent, pour lutter contre les déficiences en fer et en d'autres micronutriments, nous avons besoin de nous assurer qu'une approche totalement exhaustive soit menée en attirant l’intérêt et le soutien du pays et des donateurs, et que la diversification alimentaire soit reconnue comme essentielle et ne soit pas laissée pour compte. Quelle est la direction à prendre? La promotion de l'amélioration/diversification alimentaire, en plaçant au centre l’amélioration de l’apport en fer biodisponible, via une plus grande consommation de produits animaux et de fruits et légumes, notamment pour leurs apports en vitamine C, constitue l’intervention privilégiée, car elle peut mener à des améliorations viables, non seulement du statut en fer, mais aussi en d’autres micronutriments. Ni la supplémentation ni la fortification ne peuvent être efficaces à elle seule. Depuis que les approches alimentaires apportent de meilleures chances de réussite durable et d’application de grande envergure pour contrôler les déficiences en fer et en d'autres micronutriments, l’augmentation de la disponibilité et de la consommation d'une alimentation nutritionnellement adéquate doit être mise à l’ordre du jour des politiques de développement. Les déficiences en micronutriments doivent être prises en main en se concentrant sur un ensemble général de stratégies de renforcement mutuel incluant la diversification alimentaire, la fortification, la supplémentation, ainsi que des mesures de santé publique. Ces stratégies menées de front fournissent une couverture et un impact maximums, et cette approche complète doit être largement mise en œuvre, si l’on veut combattre et venir à bout de ce problème crucial. 49 Littéralement tous les modèles alimentaires traditionnels peuvent satisfaire les besoins nutritionnels de la population. Cependant, une des principales causes d'anémie ferriprive dans les pays à faible revenu est la faible biodisponibilité du fer dans des régimes pauvres dont la base repose principalement sur les céréales et les tubercules, puisque ceux-ci contiennent de grandes quantités d'inhibiteurs de l’absorption du fer. Ci-dessous se trouvent des actions pratiques et des interventions qui peuvent faciliter l'accès et la consommation d’une alimentation adéquate et nutritive, et donc augmenter la biodisponibilité du fer, notamment chez ceux pour qui la nourriture manque et chez les plus vulnérables aux déficiences: • Mettre en oeuvre un élevage commercial et la production de légumes et de fruits à grande échelle, pour fournir des aliments avec des micronutriments accessibles à prix raisonnables à tous les échelons de la population. • Stimuler le secteur agricole communautaire à petite échelle et encourager les sources alimentaires potentielles, parmi lesquels de nombreux légumes à feuilles et légumineuses contenant d’importantes quantités de fer, avec un intérêt spécial porté sur l’augmentation de la consommation de produits animaux ayant une biodisponibilité élevée du fer et contenant des composés riches en fer facilitant son absorption. • Augmenter la teneur en micronutriments des sols et des plantes pour améliorer la composition des aliments végétaux, et améliorer les pratiques agricoles pour augmenter les rendements. • Développer la sélection des cultures, via des modifications conventionnelles ou génétiques (biofortification), afin d’augmenter les teneurs en micronutriments des récoltes. • Introduire la diversification des cultures pour promouvoir des récoltes riches en micronutriments. • Discuter des règles qui interdisent le jardinage urbain ou qui réduisent la disponibilité ou la vente d’aliments frais par les vendeurs ambulants. • Examiner la rentabilité de la production, du traitement et de la vente des aliments riches en micronutriments. • Examiner les pratiques de traitement, de conservation et de préparation, qui réduisent les pertes, augmentent les composés alimentaires facilitant l’absorption et minimisent l'impact des inhibiteurs de l'absorption. • Faire des efforts d’éducation destinés à garantir une distribution appropriée de la nourriture au sein de la famille, étant donné les besoins des membres les plus vulnérables. 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 50 • • 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 50 21 · Perspectives globales Développer des directives diététiques basées sur l’alimentation (Food Based Dietary Guidelines, FBDG) et des programmes publics d’éducation et de communication nutritionnelle pour provoquer des changements des comportements alimentaires. Améliorer la qualité et la sécurité alimentaire, ainsi que fixer et mettre en vigueur des règles de contrôle qualité et d’hygiène. Quel est le message clé? Les déficiences en micronutriments ne peuvent être vaincues qu’en menant une approche complète assurant que toutes les personnes ont accès et consomment des quantités adéquates d’aliments nutritifs. Ceci ne relèvera pas seulement le statut en fer, mais aussi les niveaux des autres micronutriments. La diversification et l’amélioration alimentaire constituent une part essentielle des stratégies alimentaires et une clé pour une réussite et un maintien à long terme des interventions visant l’anémie nutritionnelle. Cette approche est à relier au droit à la nourriture, une promesse dont l’accomplissement signifie que tout le monde doit pouvoir accéder à une alimentation variée, qui consiste en un ensemble d’aliments apportant toute l'énergie, ainsi que des macro et micronutriments en quantité suffisante, pour lui permettre d’être productif et en bonne santé. LES FAITS: • La sécurité alimentaire existe quand tout le monde, à tout moment, dispose d’un accès physique, social et économique à des aliments nutritifs, sains et en quantité suffisante pour couvrir ses besoins et respecter ses préférences alimentaires, afin d’avoir une vie active et d’être en bonne santé. • Environ 854 millions de personnes ont faim, 20 millions d’enfants de moins de cinq ans souffrent de malnutrition sévère et autour d’1 million d’enfants meurent chaque année des suites de la malnutrition. Plus de deux milliards de personnes - plus de 30 % de la population mondiale - est anémique. • L'Asie présente le nombre de cas d'anémie le plus élevé, tandis que l'Afrique possède les plus hauts taux de prévalence d'anémie chez les enfants d’âge préscolaire. • Les causes sous-jacentes de niveaux aussi élevés de malnutrition sont la pauvreté et le sous-développement agricole conduisant à l’insécurité alimentaire. Satisfaire les besoins énergétiques globaux et une diversité alimentaire constitue le défi majeur. • L’apport journalier recommandé (AJR) en fer pour les hommes se situe entre 9 mg, dans les régimes avec une biodisponibilité du fer élevée, et 27 mg lorsque la • • • • biodisponibilité n’est que de 5 %. Chez les femmes avant la ménopause (âgées de 19 à 50 ans), l’AJR en fer est de 59 mg. Les stratégies alimentaires, en augmentant la disponibilité et la consommation d’aliments riches en micronutriments et nutritionnellement adéquats, constituent des voies viables d'amélioration de la nutrition. Le fer héminique des aliments issus de la chair animale (viande, volaille, poisson) est bien absorbé avec une absorption moyenne de 25 %, variant de 40 % pendant une déficience en fer à 10 % lorsque les réserves en fer sont constituées. Le fer non-héminique, présent dans les aliments d’origine végétale tels que les céréales, les légumes secs, les légumineuses, les graines, les noix et les légumes, ont un taux d'absorption de 2 à 10 % selon l’équilibre dans le repas entre inhibiteurs et facilitateurs de l'absorption du fer. L’addition de légumes et de fruits contenant de l'acide ascorbique peut doubler ou tripler l'absorption du fer. Chaque repas devrait contenir de préférence au moins 25 mg d'acide ascorbique. 21 PERSPECTIVES GLOBALES: ACCELERER LES PROGRES DE PREVENTION ET DE CONTROLE DE L’ANEMIE NUTRITIONNELLE Ian Darnton-Hill, Neal Paragas et Tommaso Cavalli-Sforza Quel est le problème et que savons-nous? Les anémies nutritionnelles, notamment l’anémie ferriprive, sont actuellement le plus grand problème global de nutrition. Elles affectent principalement les femmes et les enfants, et ont un impact négatif significatif sur les chances de nombreuses nations d’améliorer leur développement économique et la santé de leur population. Malheureusement, dans la première décennie depuis que les Nations Unies se sont fixées comme objectif de réduire d’un tiers la carence en fer, aucun progrès n'a été réellement réalisé. Bien qu’il y ait peu de succès documentés concernant le traitement de ce problème à un niveau de santé publique dans les pays les moins riches, il y a de nombreuses années d'expériences via différents programmes et une vaste connaissance scientifique se trouve derrière la compréhension du complexe métabolisme du fer. De manière étonnante, beaucoup de choses 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 51 21 · Perspectives globales restent encore inconnues et de nouveaux aspects continuent à émerger de la recherche en cours. Les régimes alimentaires pauvres mènent à des niveaux élevés de carence en fer et en d’autres micronutriments et sont aggravés par des facteurs alimentaires inhibant, tels que les phytates, les fortes infestations par des parasites et des infections telles que le paludisme, ainsi que des facteurs socioculturels, dont la pauvreté et les différences homme/femme, chacun d’eux contribuant aux niveaux élevés d'anémie constatés dans les populations les plus pauvres. Comment le risque d'anémie est-il affecté par l’âge? Les distributions normales d'hémoglobine varient en fonction de facteurs génétiques, de l’âge et du sexe, du stade de grossesse, de l’altitude et de la consommation de tabac. Ces variations affectent l'interprétation des valeurs d'hémoglobine et d'hématocrite. De plus, le risque d'anémie ferriprive varie tout au long du cycle de vie, avec plusieurs périodes de grande vulnérabilité. Cette variation est due aux changements des réserves ferriques, aux niveaux des apports et aux besoins liés à la croissance ou aux pertes en fer. Les groupes les plus vulnérables sont: • les enfants de 6 mois à 5 ans, • les femmes en âge de procréer, • les femmes enceintes, • les personnes âgées. Quelle est la raison clé de l'échec apparent de nombreux programmes visant à réduire la prévalence? Une des raisons clés de l’échec des programmes est que beaucoup ont été conçus selon l’hypothèse que la seule cause d'anémie était la carence en fer. Mais, en réalité, il y a d’autres causes principales à l'anémie: • la déficience en fer alimentaire; • les maladies infectieuses comme le paludisme, les infections à ankylostomes, la schistosomiase, le VIH/sida, la tuberculose et d'autres maladies chroniques, dont presque toutes les maladies inflammatoires perdurant plusieurs mois et quelques malignités; • les déficiences en d'autres micronutriments clés dont les folates, la vitamine B12, la vitamine C, la vitamine A, les protéines, le cuivre et d'autres minéraux; • des facteurs héréditaires affectant les globules rouges, tels que la thalassémie; • une hémorragie aiguë sévère (telle que pouvant se produire à l'accouchement); • les pertes de sang chroniques (p.ex. dans l’ulcère gastroduodénal); • un traumatisme. 51 Pour des programmes d'intervention efficaces et un contrôle adéquat de leur impact, la meilleure information est nécessaire, non seulement sur le statut en fer des populations, mais aussi sur les autres causes d'anémie. Même lorsque toutes les causes connues sont prises en considération, dans beaucoup de populations à haut risque, une grande proportion d'anémie reste inexpliquée. Pourquoi y a-t-il un manque d'information? Une raison au manque d'informations sur les autres causes d'anémie est que seuls les dosages d’hémoglobine ou d'hématocrite peuvent être exécutés en routine sur le terrain, pendant que les multiples tests biochimiques plus précis sont en général menés uniquement dans les pays disposant des ressources adéquates, sous des conditions de recherche spécifiques. Des avancées en matière de méthodes de laboratoire à faible coût permettant la détermination des causes d'anémie, soit sur le terrain, soit plus tard en laboratoire, sans réfrigération des échantillons (tâches séchées), contribueraient grandement à une meilleure évaluation des causes d'anémie et permettraient des interventions plus appropriées. Quels rôles jouent les secteurs public et privé dans la prévention de l’anémie? Une des principales contraintes dans la lutte contre l’anémie et les autres déficiences en micronutriments réside dans la propension des gouvernements (et des donateurs) à investir suffisamment pour améliorer l’alimentation et réduire les inégalités sociales, ce qui exige des investissements à long terme afin d’améliorer l’approvisionnement, la distribution et la consommation d’aliments d'origine animale et végétale, et nécessite de cibler ceux qui sont dans le plus grand besoin. De plus, les systèmes de santé dans les pays les plus affectés manquent sérieusement de ressources. Ces facteurs impliquent des problèmes d'accès et de coûts apparentés, puisque les plus forts taux de dénutrition affectent habituellement les populations des régions rurales éloignées, et que ces individus n’occupent en général pas le premier plan des inquiétudes de la classe politique urbaine. Par conséquent, il est important de garder la dénutrition à l’ordre du jour de la planification nationale, afin de renforcer la responsabilité du gouvernement pour qu’il offre, à l’ensemble de son peuple, une bonne santé et un bon statut nutritionnel. Il s’agit d’un exercice complexe qui requiert la collaboration des différentes sphères de la société - gouvernement national, gouvernement local, secteurs privés de l’alimentaire et de la santé, médias, associations de consommateurs et organismes communautaires. 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 52 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 52 21 · Perspectives globales Le rôle que les industries alimentaires et de santé peuvent jouer est crucial pour toutes les stratégies clés, depuis les efforts pour améliorer l’approvisionnement, la distribution et la consommation d'aliments animaux et végétaux, jusqu’à la fortification et la supplémentation. La réduction de l'anémie sera très probablement atteinte via une combinaison des trois principales approches (supplémentation, fortification et diversification alimentaire), tout en s’intéressant également à la réduction des inégalités sociales – étant donné que les anémies résultent le plus souvent de la pauvreté. Fortification des aliments: elle peut offrir une solution partielle de moyen à long terme et représente probablement l’approche la plus rentable. Cependant, elle exige que les producteurs alimentaires travaillent avec des fournisseurs de premix de micronutriments, et que les consommateurs et la communauté de santé publique encouragent le gouvernement à adopter une législation et une réglementation, ainsi qu’à engager une communication efficace sur l'importance de cette approche via les médias, afin que la population l’accepte. Il y a eu à la fois des succès et des échecs en fortifiant les aliments en fer, et les aliments fortifiés commercialement ne sont pas toujours disponibles ou accessibles aux personnes les plus à risque. Supplémentation: ces programmes devraient être appréhendés comme une occasion d'encourager de meilleures alimentations, du fait qu’ils représentent la méthode la moins durable pour gérer les déficiences, qu’elles soient dues à des apports alimentaires inadéquats et/ou à d'autres facteurs. Interventions basées sur l’alimentation: le rôle de ces interventions dans la gestion de l’anémie nutritionnelle n'a pas été clairement élucidé, mais il existe quelques travaux intéressants dans cette voie. La disponibilité, l’accessibilité et les apports limités en aliments d’origine animale au niveau des ménages, ainsi que le manque de connaissances quant à leur importance dans l'alimentation et pour la santé, contribuent à des alimentations de faible qualité qui ont un profond impact sur les apports en micronutriments essentiels qui jouent un rôle dans le statut en fer. Dans de nombreux cas, les secteurs privés et non-gouvernementaux peuvent avoir de multiples avantages dans le lancement d’interventions de soins médicaux, en plus des faibles aides gouvernementales. Les gouvernements doivent être tenus responsables du bien-être des plus pauvres. Dans les pays où les deux secteurs ont œuvré ensemble avec les communautés, nous rencontrons les plus grandes chances de succès. Quelles sont les leçons clés à retenir? De façon générale, les contraintes identifiées et les facteurs facilitateurs dans la gestion de l’anémie nutritionnelle peuvent être regroupés comme suit: • facteurs socioculturels (pauvreté, discrimination homme/femme); • facteurs de prise en charge (ciblage, approches de supplémentation, de fortification et basées sur l’alimentation); • systèmes (de santé, marketing du secteur privé, logistique); • utilisateurs (accessibilité, observance). Il semblerait que pour les interventions réussies, les principaux facteurs exigés sont une logistique améliorée, une meilleure observance et une participation des différentes parties prenantes. De plus, toute intervention doit être considérée comme une simple partie d'une stratégie globale. Les approches intégrées au niveau des communautés exigent des combinaisons d’interventions incluant des actions de vermifugation de masse, d’éducation sanitaire, d’amélioration de l’approvisionnement en eau et du système sanitaire, ainsi qu’une supplémentation multiple en micronutriments. S’ils sont délivrés sous forme de suppléments, par fortification ou par d'autres canaux, y compris des programmes de réduction de la pauvreté, le fer et les autres micronutriments pertinents doivent faire l’objet d’évaluations réalistes, en termes d’accessibilité et de disponibilité. Ceci peut inclure l’évaluation de la viabilité des systèmes de santé, de la faisabilité du marketing social et de la portée de l'éducation sanitaire. Quelle est la direction à suivre? Un statut en fer adéquat est nécessaire à une bonne santé générale, en particulier chez les nouveaux-nés, les jeunes enfants et les femmes enceintes. Le consensus de Copenhague a attribué une forte rentabilité aux programmes axés sur le fer et les autres micronutriments. Il y a maintenant des preuves significatives que l’absence de gestion de la déficience en fer et des autres anémies coûtera, aux pays concernés, jusqu'à 2 % de PNB et altèrera le développement intellectuel de leurs enfants et la future productivité économique nationale. La santé internationale et les partenaires nationaux doivent s’appuyer fermement sur ces déclarations, afin que des mesures et des approches cohérentes se renfor- 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 53 53 22 · Conclusions et perspectives de recherche cent l'une l'autre et que les interventions bien organisées et bien menées deviennent une réalité. Quel est le message clé? Les anémies nutritionnelles constituent actuellement le plus vaste problème global dans le domaine de la nutrition. Une approche complète basée sur des interventions multiples est nécessaire pour obtenir une réussite viable et doit inclure une amélioration des conditions sociales par des mesures d’allégement de la pauvreté, ainsi qu’une augmentation du nombre de mesures directes de fortification, de supplémentation et de perfectionnement des soins médicaux. Néanmoins, les pays doivent entamer les interventions eux-mêmes et ne devraient pas attendre que tous les aspects d'un programme soient en place, puisque chaque intervention individuelle aura des effets et que le besoin d’action est grand. LES FAITS: • 200 millions d’enfants de moins de 5 ans n’atteignent pas leur total développement cognitif et socio-affectif, du fait de la dénutrition, dont la déficience en fer, et d’une mauvaise stimulation. • Le poids global attribué à l'anémie ferriprive s’élève à 841 000 morts et 35 057 000 DALY. • On estime que la valeur médiane des pertes de productivité dues à la déficience en fer est d’environ 4,00 $ US par personne ou 0,9 % du PIB. • Il a été calculé que la productivité des ouvriers agricoles adultes anémiques, ou autres travailleurs manuels de force, était réduite de 1,5 % pour chaque 1 % de baisse de leur concentration en hémoglobine au-dessous du seuil fixé pour une santé normale. • On estime que l'élimination de l’anémie sévère durant la grossesse réduit potentiellement de 13 % le poids de la maladie chez la mère. • On s’attend à ce que 2,5 % de toute population moyenne tombe en-dessous de la limite fixée par l’OMS pour le fer. Par conséquent, l'anémie ferriprive est considérée comme un problème de santé publique lorsque la prévalence des faibles concentrations en hémoglobine dépasse 5 % de la population. • L'anémie sévère durant la grossesse est définie par un taux d’hémoglobine inférieur à 70 g/L et requiert un traitement médical. • L'anémie très sévère est définie par un taux d’hémoglobine inférieur à 40 g/L et constitue une urgence médicale. • Les évaluations suggèrent que fortifier la farine avec du fer peut permettre d’augmenter de 5 % le Q.I. national, d’augmenter de 2 % le PIB national et d’éliminer 60 000 décès de femmes enceintes chaque année. • Fortifier avec de l'acide folique peut réduire significativement les 200 000 cas de défauts du tube neural répertoriés chaque année chez les nouveaux-nés. 22 CONCLUSIONS ET PERSPECTIVES DE RECHERCHE Klaus Kraemer, Elisabeth Stoecklin et Jane Badham Introduction Il est peu probable d’atteindre l’objectif des Nations Unies de réduire d’un tiers la prévalence de l’anémie d’ici 2010. L'anémie nutritionnelle reste commune dans beaucoup de pays du monde et son éradication via des interventions efficaces doit être une priorité en termes d’attention et d’actions. L'anémie altère la croissance et le développement individuels, ainsi que le développement socio-économique, familial, communautaire et national. Malheureusement, sur les dernières décennies, peu de réussites ont été documentées concernant le traitement du problème à un niveau de santé publique, bien qu'il y ait maintenant une grande somme d'expériences par programme, ainsi qu’une vaste quantité croissante de données scientifiques et de nouvelles informations sur le métabolisme du fer et le rôle des autres éléments nutritifs dans l’étiologie de l'anémie nutritionnelle. Cependant, beaucoup de choses sont encore inconnues et nombre de nouvelles zones nécessitant l’attention et l’intérêt de la recherche continuent à émerger. Ce dernier chapitre vise à résumer quelques-unes des conclusions sorties des chapitres précédents, à attirer l'attention sur l’ampleur inchangée du problème et les implications économiques qui en résultent, et à déterminer les points cruciaux pour aller de l’avant dans la gestion de l’anémie nutritionnelle; et ce, en spécifiant les facteurs critiques pour les futures recherches sur les micronutriments et en identifiant les composantes clés, gages du réel fonctionnement des programmes et des interventions. Dimension du problème Précédemment, les estimations globales de la prévalence d'anémie n'incluaient pas de données nationales représentatives pour la Chine, qui représente environ 20 % de la population mondiale. Dans cet ouvrage, de nouvelles estimations globales sur la prévalence d’anémie chez les 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 54 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 54 22 · Conclusions et perspectives de recherche enfants d’âge préscolaire et les femmes enceintes ou non ont été publiées, compilées par l’Organisation Mondiale de la Santé (OMS) dans le cadre de son système d’informations sur la nutrition minérale et vitaminique (Vitamin and Mineral Nutrition Information System, VMNIS). Les études prises en compte dans la base de données ont permis d’évaluer l’anémie en mesurant l’hémoglobine via la méthodologie standard et en excluant celles qui utilisaient les signes cliniques pour confirmer la prévalence d’anémie. Uniquement les données représentatives des pays ont été incluses dans l'analyse et ajustées en fonction des seuils fixés par l’OMS (Hb < 110 g/L pour les enfants d’âge préscolaire et les femmes enceintes et Hb < 120 g/L pour les femmes hors grossesse). Pour les enfants d’âge préscolaire et les femmes, les études nationales couvrent une large proportion de la population et les données indiquent un lourd poids global de l'anémie, bien que la proportion d'anémie sévère reste encore inconnue. L'analyse suggère que pratiquement 50 % des enfants d’âge préscolaire sont affectés dans le monde, les taux les plus élevés se trouvant en Afrique (64,6 %) et en Asie (47,7 %). Ce chiffre correspond à près de 300 millions d’enfants de moins de cinq ans. La prévalence de l'anémie est de 41,8 % chez les femmes enceintes et de 30,2 % chez celles non enceintes. Globalement, 818 millions de femmes (enceintes ou non) et d’enfants de moins de cinq ans sont affectés par l’anémie. Les études concernant l’Asie du Sud indiquent des valeurs de prévalence beaucoup plus élevées chez les femmes enceintes et les adolescentes. Quatre messages clés peuvent être retenus de l'analyse: 1. Un nombre plus élevé de pays devrait évaluer plus précisément la prévalence d'anémie au niveau national et également déterminer le degré de sévérité de l'anémie. 2. Les pays devraient évaluer plus en détail la carence en fer, puisque que l’on ne connaît pas encore les parts d'anémie imputables à la déficience en fer et aux autres causes. Il est important de distinguer l’anémie due à des causes nutritionnelles, de l’anémie conséquente à des infections endémiques chroniques (p.ex. paludisme, infections par des helminthes, VIH/sida). 3. L'inflammation subclinique peut être très courante chez des personnes apparemment saines, et peut mener à une mauvaise classification de l'anémie. 4. Une évaluation plus comparative des avantages et des inconvénients des méthodes actuellement disponibles pour la mesure du statut en fer (ferritine, sTfR et indicateurs d'infection/d’inflammation) est requise, en plus de la réduction des coûts de ces analyses, tout en maintenant leur précision. Fragilité et fatigue ont longtemps été associées uniquement à l’anémie ferriprive. Des travaux de recherche récents pointent cependant des conséquences fonctionnelles avant même le début des manifestations cliniques de l'anémie. Les études longitudinales indiquent qu’une déficience chronique en fer durant l’enfance retarde de manière permanente les développements cognitifs, moteurs, et socio-affectifs. Il s’agit d’une problématique particulièrement grave étant donné que plus de 200 millions d’enfants de moins de cinq ans, vivant principalement en Asie du Sud et en Afrique subsaharienne, n’atteignent pas leur plein potentiel de développement cognitif et socio-affectif du fait de la malnutrition, comprenant les déficiences en fer et en iode, et d’une mauvaise stimulation. Ces enfants échoueront probablement à l’école, passeront à côté de leur possibilité de revenus et resteront donc dans le piège de la pauvreté. Il existe un consensus partagé par de nombreux scientifiques internationaux, au sein des universités ou des agences des NU, selon lequel une priorité nationale et globale devrait être donnée à la prévention de l’anémie, même légère, chez les nouveaux-nés et les jeunes enfants, du fait du risque d’altération de leur développement intellectuel. Le fait que, chez les enfants allaités, environ 50 % seulement de leurs besoins en fer puissent être couverts par le lait maternel pendant les six premiers mois, indiquant un besoin de supplémentation précoce chez tous les enfants, constitue également une préoccupation majeure. Dans le passé, le traitement des vastes conséquences de la carence en fer et de l'anémie se concentrait sur le problème médical, plutôt que sur les répercussions mentales et économiques. Le gain économique de la réduction de toute déficience en micronutriment vient à la fois de la réduction des coûts et de l’augmentation de la productivité. Ceci comprend une mortalité, une morbidité et des coûts de soins médicaux réduits, une productivité améliorée, ainsi que des avantages intergénérationnels au travers d’une meilleure santé globale. Il est clair que l'anémie, à tous les stades du cycle de vie, est associée à un poids significatif pour la santé et peut engendrer un fort impact négatif sur la productivité et donc également une perte de revenus et de produit intérieur brut (PIB); les estimations actuelles font état de pertes de plus de 50 milliards $ US. La perte totale par personne due à des déficits physiques et cognitifs s’élève à des milliards par an, avec une différence significative quand on la compare aux modestes coûts de diminution de l’anémie nutritionnelle. Nous avons tiré cinq conclusions clés de l'analyse: 1. Les interventions basées sur le fer chez les adultes ont 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 55 22 · Conclusions et perspectives de recherche 2. 3. 4. 5. montré leurs impacts positifs sur la productivité, d’environ 5 % pour les travaux manuels légers et jusqu’à 17 % pour les travaux plus lourds. On peut en déduire que l'anémie réduit potentiellement les salaires à l’âge adulte (du fait de ses effets cognitifs) de 2,5 %. La fortification en fer est l’une des interventions de santé publique les plus intéressantes, en termes d’années de vie corrigées du facteur d’invalidité (DALY) épargnées ou de rapport coûts-bénéfices. Le coût par personne et par an de la fortification se situe entre 0,10$ et 1,00 $ avec un rapport coûts-bénéfices de 1:6 (bénéfices physiques des adultes) ou allant jusqu’à 1:9 (en incluant les bénéfices cognitifs estimés des enfants). Les coûts par personne de la supplémentation sont de 2,0 à 5,00 $, mais sont cinq fois plus chers que la fortification en termes de DALY, et on note que les résultats des programmes à grande échelle ont été décevants. Des recherches supplémentaires doivent être menées d'urgence, afin de quantifier la perte économique due au retard mental imputable à l’anémie ferriprive. Points critiques des recherches sur l'anémie en rapport avec les micronutriments Il n'y a aucune solution facile pour vaincre le fléau que représente l'anémie. L'étiologie de l'anémie est complexe et multifactorielle et il semble que de multiples micronutriments (vitamines et minéraux) aient un rôle clair dans la prévention de l'anémie nutritionnelle, ainsi que dans l’amélioration globale de la nutrition et de la santé. Le défi est de créer des combinaisons optimales de micronutriments qui fonctionneront mieux ensemble et agiront en synergie. Aucune intervention unique ne parviendra à renverser ou à prévenir l’anémie dans une population. Cependant, il existe encore peu d'informations scientifiques concernant l’utilisation de multiples micronutriments dans la prévention de l'anémie nutritionnelle. De plus, les conclusions des premières études cliniques restent controversées et certaines nécessitent d’être interprétées avec prudence. Plusieurs facteurs doivent être considérés lorsque l’on organise des études en vue de futures interventions avec des aliments fortifiés ou des suppléments dans des populations avec des statuts nutritionnels et des états de santé altérés: 1. Les facteurs nutritionnels L'impact de l'alimentation habituelle, dont les compositions en micro et macronutriments, devrait être 55 évalué en priorité. Une alimentation de faible qualité, souvent due à des apports limités en aliments d’origine animale, mais également en fruits et légumes, est une des principales causes de déficiences multiples en micronutriments se produisant de manière cumulative et non isolée. En outre, la faible biodisponibilité des nutriments dans des régimes riches en aliments d’origine végétale contenant des composants, tels que les phytates et les polyphénols, limite l'absorption du fer et des autres oligoéléments. 2. L’environnement sanitaire et les facteurs non nutritionnels Les maladies infectieuses telles que le paludisme, la tuberculose, le VIH/sida, les infections parasitaires et certaines inflammations chroniques, constituent d'autres facteurs contribuant à l’anémie et affaiblissant l’état nutritionnel et de santé. Par conséquent, il est important de prendre en compte l'environnement sanitaire global et de contrôler et/ou traiter toute maladie sous-jacente. Il est nécessaire qu’une approche d'interventions intégrées considère chaque groupe de population dans son contexte épidémiologique, socio-économique et culturel. 3. La population ciblée Les segments de population les plus vulnérables sont les femmes enceintes et allaitantes, les nouveaux-nés, les jeunes enfants et les adolescentes. L'enfance est la tranche d'âge dans laquelle les déficiences en micronutriments commencent et progressent avec des conséquences potentiellement sévères pour la vie future, cependant une nutrition pauvre peut débuter in utero. Ainsi, une nutrition et un état de santé adéquats devraient constituer de fortes priorités pendant la grossesse et l’enfance. Le message est clair: une approche du cycle de vie prenant en compte les divers besoins des différentes populations ciblées est indispensable. 4. Les apports recommandés et la composition en micronutriments La dose optimale et la composition en micronutriments utiles à des interventions efficaces sont encore inconnues. Les risques potentiels d'interactions doivent être pris en compte lorsque les programmes de fortification des aliments ou de supplémentation sont entamés, notamment lorsqu’ils sont dirigés vers des groupes de population ayant un statut nutritionnel généralement faible. Les interactions entre plusieurs micronutriments (p.ex. fer, zinc, et autres minéraux, et facteurs antinutritionnels inhibant l’absorption du 082438_Guidebook_Inhalt_F.qxp:Inhalt 56 15.07.2008 13:56 Uhr Seite 56 22 · Conclusions et perspectives de recherche fer) semblent être particulièrement importantes. Différentes combinaisons et doses, ainsi que de nouvelles formes d’administration des micronutriments, nécessitent encore d’être testées. 5. La distribution via le système de santé Il est également important de prendre en considération les programmes de prévention existants, tels que les supplémentations avec de fortes doses de vitamine A, ou de fer et d’acide folique, et le contrôle des maladies parasitaires et du paludisme. Ces programmes doivent être intégrés et menés avec soin via de nouveaux essais cliniques. 6. La durée Les résultats à long terme et l'efficacité ne sont cependant pas totalement définis en matière de nutrition, santé et bien-être général et devraient devenir prioritaires. Les points finaux des études à court et long termes varient significativement. Les résultats fonctionnels, comme l’identification de bons indicateurs des effets, sont nécessaires et devraient être définis comme finalités des études. Monter des programmes et des interventions qui marchent La connaissance scientifique concernant les interventions s’est étendue au delà du fer et un ensemble d'autres nutriments (tels que la vitamine A et de multiples micronutriments), de même que les maladies infectieuses et les infestations parasitaires, sont maintenant pris en compte. De plus, il est désormais reconnu que les interventions ne prennent pas toujours la tournure que l’on espérait, considérant, par exemple, les résultats montrant de possibles effets négatifs dans les régions endémiques au paludisme. Par ailleurs, il apparaît que les stratégies alimentaires, telles que la biofortification et la diversification alimentaire, sont également importantes. Il semblerait que, bien qu’un angle spécifique soit souvent privilégié ou une approche recommandée, le message clé devrait être que toutes les causes et les approches d’interventions admises et documentées doivent fonctionner ensemble, et que la supplémentation, la fortification (aliments et maison), la biofortification, les approches alimentaires, ainsi que les mesures de santé publique, doivent être appréhendées et pratiquées ensemble car elles sont complémentaires les unes aux autres. Pour le succès et la viabilité à long terme des programmes de contrôle de l'anémie nutritionnelle, tous les facteurs et toutes les options doivent être regardés dans leur ensemble et ajustés, afin de s’adapter aux conditions locales et aux besoins spécifiques. Le contrôle de l'anémie ferriprive est différent de celui des autres déficiences connues, telles que les TCVA ou TDI, pour lesquelles les approches type 'balle orientée', respectivement avec des capsules ou une fortification, semblent fonctionner. Une statistique grave: en 2000, le nombre de suppléments de fer fournis par l’UNICEF aux pays en développement n’a permis de couvrir que 3 % de toutes les femmes enceintes dans ces pays - avant même de considérer l’observance. Le fait que les composantes opérationnelles du contrôle de l'anémie ferriprive sont bien moins développées que les efforts de recherche et développement, et que, en général, ni l'un ni l'autre de ces aspects ne sont liés à la communication, ce qui inclut le soutien politique, le financement, l’encouragement de l’acceptation de meilleures pratiques nutritionnelles, l’éducation sanitaire et la promotion de la santé, pointe un obstacle majeur à atteindre les objectifs globaux. En réalité, le plus grand défi ne se trouve probablement pas dans le besoin de recherches scientifiques supplémentaires, bien qu'il y ait encore beaucoup de questions sans réponse et de place pour des axes nouveaux ou renouvelés, mais plutôt dans le besoin de communication et d’interprétation des conclusions et des exceptions de la recherche, afin d’affiner les programmes. La communication de soutien doit se concentrer sur les avantages au cours du cycle de vie et sur l'impact associé des interventions sur l’amélioration de la productivité qui mènent, au final, à une poussée économique, à la fois des individus et des pays. Il y a deux moyens clés pour mobiliser l'action auprès des divers secteurs, en vue d’éradiquer la carence en fer et l’anémie: insister sur le fait que les dommages causés au développement intellectuel du fait de la déficience en fer dans la petite enfance sont irréversibles dans la vie future et quantifier la perte de PIB lorsque la carence en fer n’est pas traitée. Nous avons besoin de ponts efficaces entre science et technologie, entre fournisseurs de services et politiques et aussi décideurs financiers. Le problème n'est pas le manque de connaissances pour trouver des solutions sur mesure, mais plutôt un manque d’engagements politiques et financiers clairs pour entreprendre des interventions adaptées à l’ampleur du problème. Le problème est clairement décrit. Il reste à accepter le défi et à accélérer l'action. 082438_Guidebook_Frz_Umschlag.qxp:Guidebook_Umschlag 14.07.2008 10:57 Uhr Le but de ce gui guide de es estt de vo vous us don onner ner un résu ésum mé comple lett concernant le less ques questio tions ns clés clés,, en parta tant nt de dess donné nnées es de pré prévalence valence et des statis tatistiqu tiques, es, jusqu’ jusqu’àà l’économ l’éc onomie ie,, en pas passant sant par le diag diagn nos ostic tic,, les consé onsé-quen ences ces foncti onctionnell onnelles es et le less in inffor ormation mationss de base sur chac hacun un des micronutr cronutriments iments su supp ppo osés êt être re imp implliq iqu ués, direct irecteement ou indirecte ndirecteme ment, nt, dan anss l'an l'anémie émie.. 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