Budget: leplan derigueur sansprécédent deHollande

Transcription

Budget: leplan derigueur sansprécédent deHollande
L’UMP ÉCHAPPE À LA FAILLITE,
MAIS PAS AU RISQUE D’IMPLOSION
Israël: des missiles du Hamas
atteignent Jérusalem et Tel-Aviv
FRANCE – LIRE PAGES 6-7
INTERNATIONAL – LIRE PAGE 2
Jeudi 10 juillet 2014 - 70e année - N˚21609 - 2 ¤ - France métropolitaine - www.lemonde.fr ---
Budget:
le plan
de rigueur
sans précédent
de Hollande
t «Le Monde » dévoile le détail des coupes
budgétaires pour 2015-2017: les ministères
de la défense, de l’écologie et l’audiovisuel
sont à la diète ; les crédits de l’éducation, de
la recherche et de l’intérieur sont préservés
t Les dépenses de fonctionnement de l’Etat
et des opérateurs publics seront réduites
t Le gouvernement est parvenu à faire
voter les mesures du pacte de responsabilité
Fondateur : Hubert Beuve-Méry
LE BRÉSIL
TRAUMATISÉ
PAR UNE DÉROUTE
HISTORIQUE
t La Seleçao a subi
une défaite inédite face à
l’Allemagne (7-1) en demi-finale
de sa Coupe du monde
t Récits d’une soirée
de cauchemar, entre larmes
de colère et rires de honte
Le capitaine
David Luiz,
après la défaite.
LIRE PAGES 23 À 25
AP PHOTO/THEMBA HADEDE
LIRE P. 8 ET L’ANALYSE DE PATRICK ROGER P. 21
Le président divise son camp mais impose ses réformes
E
mporté par son dépit et sa colère, JeanLuc Mélenchon a porté, mardi
8 juillet, un juste diagnostic : « Si les 46
députés PS et EELV qui se sont abstenus
sur le budget de la Sécurité sociale avaient
voté contre, a observé le coprésident du Parti
de gauche, le pacte de responsabilité, projet
scélérat de François Hollande, aurait été
repoussé. Tels sont les couteaux sans lame. »
Six mois après en avoir détaillé le contenu,
devant la presse, le 14 janvier, François Hollande vient ainsi de faire adopter des économies
sur les dépenses publiques et son pacte de res-
UK price £ 1,80
ÉDITORIAL
ponsabilité, fondé sur des baisses de charges
pour les entreprises, avec, en contrepartie,
des engagements pour l’emploi.
Malgré une légère remontée dans les sondages, le président est toujours au sommet de
l’impopularité. La défiance est telle qu’elle
atteint le noyau dur de son électorat. Sa majorité est aussi relative que fragile. A l’Assemblée nationale, aucun « frondeur » socialiste
LE REGARD DE PLANTU
n’a voté contre le projet de loi de finances rectificative (PLFR), et ils n’étaient plus que 33, au
lieu de 41 au départ, à s’abstenir sur celui de la
Sécurité sociale. Mais ils sont encore 33…
AuSénat, où le Parti communistea pris l’habitude de voter avec la droite, ce qui a
conduit, mardi, au rejet – sans conséquences –, du PLFR, la gauche n’a plus de majorité.
Il n’empêche : avec l’aide d’un premier ministre plutôt efficace, M. Hollande avance, et, in
fine, il fait adopter ses réformes.
C’est au moment où la trajectoire des allégements de cotisations et d’impôts, prévue
par le pacte de responsabilité jusqu’en 2017,
était fixée que la troisième conférence sociale
du quinquennat de M. Hollande s’achevait.
En la boycottant partiellement, la CGT et FO,
qui campent dans l’opposition, espéraient
paralyser cet exercice de dialogue social. Il
n’en a rien été. Loin d’être l’échec annoncé, la
conférence sociale – « un accélérateur du dialogue social », selon Manuel Valls – a donné
du grain à moudre aux acteurs sociaux prêts
à négocier et à rechercher des compromis.
Les absents ont fait l’erreur de croire que,
sans eux, le train des réformes, auxquelles ils
sont opposés, resterait bloqué en gare. Les
syndicats réformistes – CFDT, CFTC, CFE-CGC,
UNSA – ont marqué des points, et le patronat,
qui avait agité (avec succès) la menace du boycott, affiche sa satisfaction. M. Valls a toutefois saisi l’occasion de lui rappeler que « la
mobilisation dans les branches n’est pas encore à la hauteur ». Et qu’« il faut accélérer ! ».
Sans être aussi audacieux (ou libéral) que
l’avait été Gerhard Schröder en Allemagne,
François Hollande réussit à imposer peu à
peu son réformisme. Mais il a trop tardé, et ce
succès a un coût. Les dommages collatéraux –
politiques,avec des «frondeurs » qui ne désarmeront pas, syndicaux, avec une CFDT ébranlée dans sa relation de confiance avec le pouvoir – seront durables. Et, surtout, les réformes courageuses, comme le pacte de responsabilité, risquent de mettre plusieurs années
avant de donner des fruits. Pour obtenir des
résultats, en premier lieu sur la réduction
d’un chômage qui ne cesse de s’envoler,
M. Hollande ne peut compter que sur une
reprise de la croissance.Or celle-ci est désespérément aux abonnés absents. p
AUJOURD’HUI
Le pape
réforme
tous azimuts
On le dit fatigué,
mais François poursuit son aggiornamento de l’Eglise:
réforme de la curie,
de la «banque du
Vatican», discours
tranché sur la pédophilie et la Mafia.
Ornikar
bouscule les
auto-écoles
Les associations du
secteur demandent
en justice l’interdiction du site Ornikar.
Cette jeune start-up
casse les prix du permis en contournant
le système
des auto-écoles.
Offensive
des médias
en Afrique
INTERNATIONAL – P. 4
CAHIER ÉCO – P. 5
CAHIER ÉCO – P. 2
En mal d’audience,
les médias français
guignent le marché
africain de l’information. Journaux –
parmi lesquels
Le Monde –
et télévisions rivalisent de projets.
LIRE NOS INFORMATIONS PAGE 8
AVIGNON
Bonheur et déceptions
Mahabharata-Nalacharitam,
mis en scène par le Japonais
Satoshi Miyagi, a envoûté
les spectateurs du Festival. Cette
pièce de deux heures se concentre
avec bonheur sur l’un des
épisodes du livre sacré de l’Inde.
En revanche, deux spectacles
très attendus, adaptés d’œuvres
d’Hölderlin et de Bernardo
Carvalho, ont déçu les festivaliers.
LIRE PAGE 14
Algérie 180 DA, Allemagne 2,40 ¤, Andorre 2,20 ¤, Autriche 2,50 ¤, Belgique 2 ¤, Cameroun 1 800 F CFA, Canada 4,50 $, Côte d’Ivoire 1 800 F CFA, Croatie 19,50 Kn, Danemark 30 KRD, Espagne 2,30 ¤, Finlande 3,80 ¤, Gabon 1 800 F CFA, Grande-Bretagne 1,80 £, Grèce 2,40 ¤, Guadeloupe-Martinique 2,20 ¤, Guyane 2,50 ¤, Hongrie 950 HUF, Irlande 2,40 ¤,
Italie 2,40 ¤, Liban 6500 LBP, Luxembourg 2 ¤, Malte 2,50 ¤, Maroc 12 DH, Norvège 28 KRN, Pays-Bas 2,40 ¤, Portugal cont. 2,30 ¤, La Réunion 2,20 ¤, Sénégal 1 800 F CFA, Slovénie 2,50 ¤, Saint-Martin 2,50 ¤, Suède 35 KRS, Suisse 3,40 CHF, TOM Avion 450 XPF, Tunisie 2,40 DT, Turquie 9 TL, USA 4,50 $, Afrique CFA autres 1 800 F CFA
2
international
0123
Jeudi 10 juillet 2014
Tsahal frappe Gaza en réponse aux tirs du Hamas
Le mouvement islamiste, ciblé par des raids israéliens qui ont fait au moins 32 morts, a visé Tel-Aviv et Jérusalem
Gaza
Envoyée spéciale
A
ssisesur les ruinesde samaison éventrée de Khan Younès, dans le sud de la bande
de Gaza, Rihab se repasse péniblement le fil des événements. Mardi
8 juillet, en début d’après-midi, sa
belle-fille Sawsan reçoit un appel
sec, lapidaire, qu’elle attribue à l’armée israélienne : « Vous avez cinq
minutes pour fuir. Prenez les
enfants. » A 55 ans, Rihab connaît
bien l’avertissement, souvenir
funeste des heures terribles de l’hiver 2008, lors de l’opération
« Plomb durci ». Elle s’exécute, traverse hors d’haleine l’arrière-cour
et trouve refuge dans la rue.
Avec fracas, une fusée éclairante s’abat d’abord sur le toit, tirée
depuis un drone israélien, en guise
de sommation. Le missile d’un F16
achève l’édifice. La maison des
Al-Kaware est éventrée. Au premier étage, un réfrigérateur est
seul à avoir résisté à l’explosion.
Des tapis pendent à l’extérieur, le
long des parpaings bruts.
La reprise des
assassinats ciblés
provoque une grande
nervosité dans
les rangs du Hamas
et du Jihad islamique
A quelques mètres de là, Rihab
se rend compte, effarée, qu’elle a
oublié de prévenir son frère,
Ahmed, de l’imminence de la frappe. Il fait partie des huit victimes
dénombrées par les services de
secours de Gaza, avec un enfant de
8 ans et deux adolescents. Il y a également au moins 25 blessés.
Cette frappe de représailles est
la plus meurtrière depuis le début
de l’opération israélienne « Bordure protectrice ». Le premier
ministre israélien, Benyamin
Nétanyahou, avait ordonné cette
opération pour rétablir le calme
dans le sud d’Israël, soumis la
veille à plus de 80 tirs de roquettes. Son objectif affiché : la destruction des infrastructures du Hamas
et des autres groupes de l’enclave
palestinienne et la liquidation de
leurs responsables.
L’attaque de Khan Younès, que
les brigadesEzzedine Al-Qassam, la
branche armée du Hamas, ont
rebaptisé « le massacre d’enfants
à Khan Younès » est pour elles un
« crime de guerre ». Elle constitue
une « ligne rouge » pour le mouvement islamistedu Hamas,qui désignait, mardi soir, « tous les Israéliens» comme des cibles potentielles. Sa branche armée a promis,
mardi, une nuit sans sommeil aux
Israéliens : « Ne rêvez pas de calme. » L’avertissement a été suivi
d’effets. Des roquettes longue por-
Un tir de missile israélien contre la maison de la famille Al-Kaware a fait huit morts, mardi 8 juillet, à Khan Younès, dans le sud de la bande de Gaza. EMAN MOHAMMED POUR « LE MONDE »
tée, M-75 et R160, ont atteint dans
lasoiréeleszonesdeJérusalem, TelAviv, mais aussi Haïfa, dans le nord
d’Israël. Au total, les factions palestiniennes ont lancé sur ces villes et
versle sud d’Israëlquelque120 projectiles, dont 23 ont été interceptés
par le dispositif antimissiles baptisé « Dôme de fer ». Dans tout le
pays, la population s’est précipitée
dans les abris antiaériens.
Durant la journée de mardi et
dans la nuit qui a suivi, le ciel a
grondé plus de 160 fois, mais la
panique n’a pas envahi les rues de
Gaza, où les hommes occupent le
temps du jeûne, assis sur des chaises posées sur les trottoirs, indifférents aux échos des bombardements : « Les gens ne sursautent
même plus lorsqu’il y a des frappes.
Tout cela est si familier », soupire
Moussa Assanah, artisan dans le
centre de Gaza-ville.
Devant sa boutique, rue
El-Wehda, il nettoie les dégâts de
l’attaque qui s’est déroulée, sous
ses yeux, une demi-heure plus tôt.
Une odeur âcre flotte encore. Entêtante. Le véhicule de Mohammed
Shaaban,unresponsabledelabranche armée du Hamas, venait de
franchir l’intersection, lorsqu’il a
été pulvérisé, en une fraction
deseconde, àquelquesmètresdesa
vitrine. Il a entendu les cris des passants atteints par le souffle enflammé. Des restes de chairs carbonisées mêlés à des morceaux de carrosserie ont été catapultés dans le
magasin, faisant exploser la vitrine. A l’intérieur, Ramis, 27 ans, semble presque faire abstraction de la
scènequ’ilvientdevivre:«Desmorceauxdecadavre,nousavons l’habitude d’en voir ici. Ce n’est pas notre
première guerre. J’aurais aimé être
Principales villes touchées par...
... les tirs de roquettes
du Hamas contre Israël
LIBAN
... les raids israéliens
contre le Hamas
Golan
SYRIE
Haïfa
Portée des missiles longueportée du Hamas
ISRAËL
Hadera
8 juillet : quatre combattants
palestiniens tués par l’armée
israélienne lors d’une tentative
d’attaque d’une base militaire
près de Zikim
Mer
Méditerranée
GA ZA
Tel-Aviv CISJORDANIE
Gaza
Khan Younès
Ashdod
Sdérot
Jérusalem
Ramat Raziel
JORDANIE
Nousseirat
Roquette
Grad améliorée
(48 km)
ÉGYPTE
M-75, R160 et autres
roquettes de longue portée
(75 km)
25 km
SOURCE : AFP
dans cette voiture, car je serai fier de
mourir en martyr.»
Mode opératoire privilégié de
l’opération israélienne « Bordure
protectrice », la reprise des assassinats ciblés provoque une grande
nervosité dans les rangs du Hamas
et du Jihad islamique. Depuis lundi soir, une quinzaine de maisons
ont été visées. Les membres du
mouvement islamiste – en treillis
ou en civil – ont complètement
déserté les rues et les bâtiments
officiels, qu’ils dirigeaient de facto, en dépit de l’accord de réconciliationavec leFatah. Tous ontchangé d’adresse, et, pour les figures de
premier plan, consigne a été donnée de rester jusqu’à nouvel ordre
dans des abris souterrains, tenues
au plus grand secret.
Sur les sites des maisons bombardées, personne ne se risque à
confirmer ou infirmer l’identité et
l’affiliationdela«cible»àunebranche armée. Les hautes fonctions
occupées par Hafez Hamad dans le
Jihad islamique ont justifié une
exception. Des voisins et des responsables gazaouis ont confirmé
qu’il avait été tué, avec des membres de sa famille, dans un raid sur
sa maison à Beit Hanouna, dans la
nuit de lundi à mardi. Cela porte à
au moins 32 le nombre des victimes palestiniennes en 24 heures,
parmi lesquels de nombreux civils.
Invisibles sur la scène publique,
les messages des factions armées
sont délivrés, chaque soir dans les
mosquées, avant la rupture du jeûne. Non loin des ruines de la maison des Al-Kaware, le muezzin
appelle les Gazaouis à la « résistance », une « obligation » renforcée
durant la période du ramadan. En
dépit de l’affaiblissement régional
du Hamas, la population continue
de pleinement soutenir les actions
militaires des factions gazaouies,
lors des vagues d’affrontements
avec Israël, du moins en apparence. A l’extérieur de la mosquée, de
petits groupes d’hommes se disposent aux abords ou sur les toits des
maisons, cibles potentielles de
représailles. Aucun d’entre eux ne
redoute une intervention terrestre israélienne. Un mélange de résignation, d’incrédulité, et de défi. A
l’image de Kamel, un voisin des
Al-Kaware : « Les Israéliens n’oseront pas. Ils resteront dans les airs,
protégés par leurs avions. Qu’ils
essaient d’entrer, on les attend. » p
davantage de pression sur les épaules», estime Daniel Levy, expert au
sein du Conseil européen pour les
affaires étrangères.
L’opinion, qui boude de plus en
plus les partis centristes pour les
deux extrêmes, exige désormais
une décision claire, qu’elle soit
diplomatique ou militaire, estime
Ofer Zalzberg, de l’International
Crisis Group. Le risque de ne pas
agir est désormais plus grand que
l’inaction pour le premier ministre israélien. Il s’est maintenu électoralement grâce à sa capacité à
apporter la sécurité.
Le Hamas a montré mardi sa
capacité et sa détermination à porter des coups. « Le Hamas ne baissera pas d’un ton. Il ne peut pas se
permettre de céder face à la population et aux autres mouvements
palestiniens », analyse le spécialiste Jean-François Legrain. Affaibli,
il est défié par des groupes plus
radicaux, comme le Jihad islamique, qui suit sa propre logique.
Le seul espoir de désescalade
repose peut-être sur une médiation étrangère. Les appels des EtatsUnis à la retenue ne suffiront pas.
Les espoirs se tournent vers une
nouvelle médiation égyptienne.
«Elle est rendue plus difficile qu’en
2012 du fait de l’hostilité entre le
président égyptien Abdelfattah
Al-Sissi et le Hamas. L’Egypte ne
s’active pas ou n’a pas la capacité à
travailler dans le sens d’une désescalade», estime M. Lévy. Et il faudra convaincre le Hamas de renoncer à des conditions qu’il pose,
jugées inacceptables pour Israël,
telles que la libération de prisonniers ou le transfert de fonds sous
son autorité pour payer les salaires des fonctionnaires de Gaza. p
Hélène Prudhon
Deux camps poussés à la surenchère par leurs divisions
Analyse
La retenue n’est plus de mise. Une
réaction en entraînant une autre,
Israël et le Hamas s’orientent
inexorablement vers la guerre
totale qu’ils tentent d’éviter
depuis l’enlèvement, le 12 juin, de
trois jeunes Israéliens près d’une
colonie juive en Cisjordanie,
imputé au mouvement islamiste
par Tel-Aviv. Chaque camp tentait
depuis, tant bien que mal, de préserver le statu quo qui prévalait
depuis le cessez-le-feu tacite, négocié sous l’égide de l’Egypte lors de
l’opération israélienne « Pilier de
défense » dans la bande de Gaza
en novembre 2012.
Ce cessez-le-feu a été définitivement rompu avec la mort, lundi
7 juillet, de sept combattants du
Hamas, tués selon le mouvement
dans un raid israélien. Mettant en
application leur promesse de vengeance, les brigades Ezzedine
Al-Qassam, la branche armée du
Hamas, ont inondé le sud d’Israël
d’une pluie de roquettes.
L’image de milliers d’Israéliens
aux abris a décidé le premier
ministre Benyamin Nétanyahou à
lancer l’opération « Bordure protectrice». Une «opération graduelle et sans limite de temps » destinée à rétablir le calme, en visant
les infrastructures militaires et
les responsables du Hamas et des
autres groupes de l’enclave palestinienne. En même temps, il agitait la menace d’une offensive terrestre en mobilisant plus de
40 000 réservistes.
Pour M. Nétanyahou, tout
autant que pour l’état-major, une
offensive au sol est le pire des scénarios. Depuis le 30 juin, il a fait
front contre les faucons de son
gouvernement, les ministres Avigdor Lieberman et Naftali Bennett, qui réclament une opération
de grande envergure pour éradiquer le Hamas.
« Réoccuper l’enclave »
Outre le coût d’une telle opération, estimé à 3,2 millions d’euros
par l’Institut israélien d’études sur
la sécurité nationale (INSS), elle
soumettrait la population israélienne à une pluie de roquettes
pendant des semaines, voire des
mois. Stratégiquement, briser le
Hamas n’est pas plus souhaitable
pour Israël. Cela laisserait le
champ libre à des mouvements
plus radicaux ou même à des cellules djihadistes naissantes dans la
bande de Gaza.
Huit ans après le désengagement, Israël n’aurait alors d’autre
choix que de réoccuper l’enclave
palestinienne. « M. Nétanyahou ne
veut pas cela, personne ne le veut
en Israël », assure Shlomo Brom,
chercheur à l’INSS.
En lançant l’opération,
M.Nétanyahou misait sur son
effet dissuasif pour obtenir « le calme pour le calme». La même stratégie avait été appliquée pendant
l’opération « Pilier de défense », où
plus de 75 000 réservistes avaient
été rappelés pour une opération
aérienne de huit jours. Cette fois,
chaque camp joue la surenchère,
pour imposer ses conditions ou en
réponse à des pressions internes.
Outre les pressions politiques,
M.Nétanyahou doit gérer une opinion qu’il a contribué à chauffer à
blanc après l’enlèvement des jeunes Israéliens. «En gérant l’opération comme un kidnapping, alors
que l’armée savait dès le début
qu’ils étaient morts, il s’est mis
Hélène Sallon
0123
international & europe
Jeudi 10 juillet 2014
3
Amnesty dénonce
le «coût humain»
de la politique
migratoire de l’UE
En quinze ans, quelque 23000personnes
seraient mortes en tentant de gagner l’Europe
Bruxelles
Bureau européen
D
epuis 2000, au moins
23 000 personnes ont perdu la vie en tentant de
gagner l’Europe. Ce nombre
devrait croître compte tenu de la
détermination des Etats de l’Union
à fermer leurs frontières, selon une
enquête publiée mercredi 9 juillet
par Amnesty International et intitulée « Le coût humain de la forteresse Europe ».
L’Italiene veut plus
financerseule
lesopérations
desurveillance et de
sauvetage,quicoûtent
9millions parmois
L’organisation juge « au moins
discutable » l’efficacité des mesures prises, au fil des années, pour
décourager les immigrants illégaux et les candidats-réfugiés,
maisestime « incalculable » le coût
humain payé par « des populations parmi les plus vulnérables ».
Amnesty souligne que, en l’espace
de six ans, l’UE a dépensé 2 milliards d’euros pour la surveillance
de ses frontières et 700 millions
seulement pour améliorer la situation des demandeurs d’asile et des
réfugiés. Amnesty déplore aussi
que, au mépris de toute règle, des
Etats comme la Grèce, la Bulgarie
ou l’Espagne refoulent des
migrants sans même examiner
leur demande d’asile.
L’étude est présentée alors que
l’Europe se prépare sans doute à
affronterdenouvelles vagues d’immigration. Depuis le lancement de
l’opération « Mare Nostrum », en
octobre 2013, à la suite du drame de
Lampedusa– 400 naufragés –,l’Italie a vu 73 700 migrants franchir
ses frontières.
Les conflits en Syrie et en Irak,
l’afflux de réfugiés en Jordanie ou
en Liban, l’instabilité au Sahel,
dans la Corne de l’Afrique, voire en
Ukraine (dont 2 000 ressortissants
ont demandé l’asile au cours des
dernièressemaines):un « arc d’instabilité » s’est mis en place aux
confins de l’Union. Quelque 80 %
des immigrants qui entrent sur
sonterritoire lefont parvoie terrestre. Mais ceux qui fuient la guerre
et la violence transitent par l’Egypte et, surtout, la Libye.
A Tripoli, les autorités affirment
que 3 millions d’illégaux sont
actuellement dans le pays, venant
d’autres régions d’Afrique. La
Libye n’a mis en place aucun système d’asile et n’a pas signé la
Convention de l’ONU relative au
statut des réfugiés. Or, c’est de ses
côtes que partent 96 % de ceux qui
arrivent en Italie, selon le présidentdu conseilitalien, MatteoRenzi. Président en exercice du Conseil
européen, il compte faire de la politique migratoire une priorité.
Son gouvernement, dépassé par
l’ampleurdes arrivées de migrants,
dit vouloir « aider » les autorités
libyennes, avec l’appui de l’ONU.
Un réfugié syrien à Athènes, en février 2013. Ancien officier de police, passé du côté des rebelles anti-Assad, il a été emprisonné trois mois
dans une cellule avec cinquante autres détenus, dans un camp grec proche de la frontière avec la Turquie. JOHN KOLESIDIS/REUTERS
Et, selon Rome, l’opération de surveillance et de sauvetage « Mare
Nostrum », qui coûte 9 millions
d’euros par mois, ne peut plus être
financée exclusivement par l’Italie.
M. Renzi voudrait passer le flambeau à Frontex, l’agence européenne de surveillance des frontières.
Pourtant, le budget de Frontex a
été réduit de 5 % en 2013 (passant à
89 millions d’euros pour 2014),
alors que, partout, on clame la
nécessité de renforcer son rôle.
Quant à l’action « sur le terrain »,
en Libye, c’est une antienne. A en
croire l’Italie, c’est désormais le
Haut-Commissariat aux réfugiés
des Nations unies qui voudrait la
piloter. Le gouvernement Renzi
dément vouloir se défaire du fardeau mais s’estime, trop seul, voire abandonné par ses partenaires.
Le projet d’une aide à Tripoli se
heurte à deux obstacles majeurs :
le chaos qui règne en Libye et le
manque d’engagement de nombreux Etats européens. Certaines
capitales ne cachent pas leur réticence à financer « Mare Nostrum »
ou une autre opération qui
auraient, d’après eux, un « rôle
incitatif » : sachant que les
migrants vont être récupérés, les
passeurs multiplient à souhait les
départs, mettant en danger de
nombreuses vies.
Amnesty International s’en
prend au principe même d’une
« police des frontières européen-
nes » exercée par la Libye et payée
par l’Union, sans préoccupation
pour les droits de l’homme, alors
que, dans ce pays et d’autres qui
joueraient le même rôle, les étrangers sont fréquemment privés de
statut, exploités, brutalisés.
Malgré l’insistance italienne,
les Vingt-Huit étalent toujours
leurs divisions. Une réunion informelle des ministres de l’intérieur,
à Milan, mardi 8 juillet, a confirmé
que les pays du Sud reprochent
toujours à ceux du Nord de ne pas
faire suffisamment d’efforts pour
accueillir des migrants. Et ils sont
accusés, en retour, de ne pas surveiller leurs frontières.
Récemment, le Conseil européen a affirmé que la politique
migratoire devait être l’un des
cinq axes majeurs de l’action de
l’UE. Et Jean-Claude Juncker, le président désigné de la Commission,
a évoqué l’idée d’un commissaire
s’occupant à temps plein de ce dossier.S’il était nommé,il devrait s’attaquer prioritairement au manque de solidarité entre les pays. p
Jean-Pierre Stroobants
Edirne
Istanbul
Mur de 10,5 km
GRÈCE
Mer Egée
Athènes
TURQUIE
Samos
Didim
Mer de Crète
100 km
«Mais on les traite comme des criminels à la frontière grecque, afin
de les décourager d’entrer. Un travail de contrôle des frontières est
opéré par les pays du sud de l’Europe – les pays de transit –, mais est
encouragé et financé par les pays
du Nord, souvent destination finale
de ces migrants », explique
M.Dubost.
« Cellules de commissariat »
Selon un rapport d’Amnesty
International paru mercredi
9juillet, entre 2007 et 2013,
l’Union européenne a attribué un
peu plus de 207 millions d’euros à
la Grèce pour renforcer son contrôle aux frontières et augmenter ses
capacités de détention par l’intermédiaire du Fonds européen pour
les frontières extérieures. Une
dizaine de centres de rétention ont
ainsi été construits à travers le
pays, pour une capacité d’accueil
d’environ 6 000 personnes. La
Cour européenne des droits de
l’homme a dénoncé à plusieurs
reprises les conditions catastrophiques dans ces centres, jugés «inhumains et dégradants ».
Selon un rapport de Médecins
sans frontières datant du 1er avril,
faute de place, « les autorités ont
également recours à l’enfermement des migrants dans les cellules
des commissariats où les conditions sont encore plus mauvaises ».
Depuis 2006, dans le cadre de
l’agence européenne de coordination aux frontières Frontex, près
de 20 pays collaborent à la surveillance des frontières grecques,
soit terrestres avec le programme
« Poseidon Land », soit maritimes
(« Poseidon Sea »). En août 2012, le
gouvernement grec a lancé l’opération « Aspida » (« bouclier »), financée, selon Amnesty International,
à hauteur de 6 millions d’euros
par le Fonds européen des frontières extérieures. 1800 policiers supplémentaires ont été déployés le
long des frontières terrestres avec
la Turquie et un mur de 10,5km,
muni de 25 caméras, a été érigé le
long du fleuve Evros, dans le nordest du pays.
Pour les autorités grecques,
l’opération porte ses fruits puisque, selon les données de la police
nationale, le nombre de clandestins arrêtés par la police est passé
de 76 878 en 2012 à 43 002 en 2013,
soit une baisse de 44 %. « En réalité,
les migrants se sont déportés vers
des routes plus dangereuses et
notamment vers les îles de la mer
Egée et la Bulgarie. Entre août 2012
et mars 2014, au minimum 188 personnes ont disparu en mer Egée »,
soutient Jean-François Dubost.
C’est cette route, entre le port turc
de Didim et l’île grecque de Samos,
que Lamna Dayoub a finalement
empruntée en juin pour entrer en
Grèce. Son objectif aujourd’hui,
rejoindre le Royaume-Uni pour y
demander l’asile politique. p
Adéa Guillot
- photo : © Karine Lhemon
C’est une très jeune femme, 20 ans
à peine, à la silhouette gracile, presque fragile, mais au regard droit et
déterminé. Assise sur des tapis
multicolores avec une dizaine
d’autres Syriennes dans un appartement communautaire d’Athènes, Lamma Dayoub raconte son
épopée pour arriver jusqu’en Grèce. Sa traversée de la Turquie, son
arrivée à Istanbul et puis son transfert en minivan jusqu’au petit village d’Edirne, à l’ouest du pays, face
à la Grèce. «Le passeur turc nous a
fait monter sur de petits bateaux
gonflables et nous avons traversé
de nuit le fleuve Evros, mais les policiers grecs nous ont renvoyés vers
la Turquie, alors qu’on leur a bien
dit qu’on était syriens et qu’on
demandait l’asile politique. »
Le refoulement de clandestins
est une pratique illégale aux termes du droit européen et des
conventions internationales sur le
droit des réfugiés. «Les autorités
grecques ont beau nous dire qu’il
s’agit d’événements isolés, nos différentes enquêtes dans le pays prouvent qu’il s’agit d’une politique délibérée et systématique de la part
d’Athènes», affirme Jean-François
Dubost, responsable du programme réfugiés et migrants d’Amnesty International France.
La Grèce est devenue ces dernières années l’une des principales
portes d’entrée de migrants en
Europe. En provenance de pays en
guerre ou instables politiquement
– Syrie, Afghanistan, Ethiopie ou
Afrique du Nord –, nombre de ces
migrants sont a priori des candidats naturels à l’asile politique.
RÉP. DE BULGARIE
MACÉDOINE
Ev r o
Athènes
Correspondance
s
La Grèce verrouille sa frontière
et refoule les candidats à l’asile politique
Parce qu’elle est une femme, Isabelle n’a pas les
mêmes chances que Pierre, car elle sera prise en charge
beaucoup plus tard au moment de son infarctus.
Pour que les femmes ne soient plus les grandes oubliées de la prise
en charge des maladies cardiovasculaires, la Fédération Française
de Cardiologie et 23 organisations après 4 ans d’États Généraux
dans toute la France, demandent la mise en place d’un Plan Cœur et
remettront le Livre Blanc au Gouvernement le 17 octobre prochain.
Vous aussi soutenez ce combat en signant comme déjà 130 000 Français,
la pétition : www.fedecardio.org
4
0123
international & europe
Jeudi 10 juillet 2014
Le papeFrançois
imposeun rythme
accéléréde réformes
Le souverain pontife veut changer en profondeur
le Vatican et faire évoluer l’image de l’Eglise
Rome
Correspondant
O
n le dit fatigué au point
d’avoir dû annuler, il y a
quelques jours, une visite
auprès des malades de l’hôpital
Gemelli de Rome. « Il va très bien »,
assure le service de presse du Vatican. Levé dès 4 h 30 dans la résidence Sainte-Marthe où il a préféré
s’installer dans 70 m2, négligeant
les vastes appartements pontificaux, le pape François veut tout
contrôler. Dédaignant le piano, les
promenades et les études théologiques chers à son prédécesseur
Benoît XVI, il se consacre entièrement à sa mission de réformer
l’Eglise.
Coursecontre la montre ? Stratégiepourprendredevitesselesrésistances d’une partie de la curie et de
certains évêques qui dénoncent
anonymement sur Internet « la
démagogie», «la confusion», voire
« le populisme » du successeur de
saint Pierre ? « C’est beaucoup plus
simple, explique Marco Politi, vaticaniste du journal Il Fatto quotidiano.Ilamisenplacediversescommissions,leuradonnéuncalendrierprécis, et maintenant il recueille les
fruits de sa méthode. »
Dernier exemple : le remplacement de l’industriel allemand
Ernst von Freyberg, placé à la tête
de l’Institut des œuvres de religion
(IOR) par Benoît XVI peu avant sa
démission en 2013, qui doit céder
la main au Français Jean-Baptiste
de Franssu, mercredi 9 juillet. Une
commission, dont le mandat arrive à terme, devait réformer en profondeur l’Institut, plus connu sous
le nom de « banque du Vatican ».
Une autre a déjà disparu : celle
chargée de la réforme des structures financières du plus petit Etat
du monde, qui a rendu ses conclusions. Un secrétariat à l’économie
est en cours de création. Son
objet ? Remettre en ordre tout ce
qui touche aux finances, de la rétribution des employés aux appels
d’offres. Parallèlement, l’Administration du patrimoine du siège
apostolique (APSA), qui gère les
immenses biens immobiliers du
Vatican, est appelée à devenir une
sorte de banque centrale.
Toujours côté coulisses, le « C8 »,
le conseil des huit cardinaux à qui
le pape a confié le soin de l’aider à
réformer la curie, a été élargi à
Pietro Parolin, le numéro deux du
Vatican,finconnaisseurdesesarcanes. Une manière de mieux contrôler le rythme des travaux de cette
commission. Chargé de se prononcer sur les grandes structures que
constituent le gouvernorat de la
Le pape François dans la basilique Saint-Jean-de-Latran, à Rome, le 19 juin. GREGORIO BORGIA/AP
cité du Vatican (administration
centrale), la secrétairerie d’Etat
(gouvernement) et la banque, ce
conseil planche également sur le
rôle des couples mariés, des femmes et des laïcs dans les deux
conseils pontificaux consacrés justement aux laïcs et à la famille.
Côté cour, le pape exerce un
ministère de la parole aux retombées médiatiques toujours plus
retentissantes. Pour exemple, la
réception, lundi, de six victimes
d’actes de pédophilie représentant
les dizaines de milliers d’enfants et
d’adolescents abusés par des ecclésiastiquesdurantlescinquantedernières années. Le pape a passé trente minutes avec chacune d’entre
elles.Emu,iladéclarélorsdelamesse que le clergé devra désormais
« rendre des comptes ». La douleur
des victimes et les suicides « pèsent
sur la conscience de l’Eglise ». Allusionclaireausilencedecertainsévêques, il a demandé « pardon pour
l’omission de dirigeants qui n’ont
pasrépondu de manièreadéquate à
des rapports sur des abus sexuels».
Dénonçant « cette complicité
Un Français à la tête de la «banque du Vatican»
Profil
On ne lui a laissé que trois minutes pour se décider de faire partie
de la commission de réforme des
structures économiques du Vatican au mois d’août 2013. Cornaqué, selon le quotidien La Croix,
par Mgr Lucio Vallejo Balda, le
numéro deux de la préfecture
pour les affaires économiques, qui
a repéré ce financier « souriant, au
regard perçant, courtois et diplomate», Jean-Baptiste Douville de
Franssu devait être projeté, mercredi 9 juillet, à la tête de l’Institut
pour les œuvres de religion (IOR).
Après le banquier Ettore Gotti
Tedeschi (Santander Italie), poussé
à la démission, et l’industriel Ernst
von Freyberg, nommé en 2013 par
BenoîtXVI, le Français devient le
troisième patron en cinq ans de la
« banque du Vatican ».
A la tête de la société de conseil
en fusions-acquisitions Incipit,
basée à Bruxelles, M. Douville de
Franssu a multiplié bénévolement les allers-retours à Rome
depuis l’été 2013. Diplômé de Sup
de Co-Reims, ancien directeur de
la Caisse des dépôts ou de la filiale
européenne de la société américaine d’investissement Invesco, le
financier de 51 ans se voit, selon le
quotidien catholique, à la tête de
la « banque commerciale du Vatican » au service d’un « grand chef
SOMALIE
Vasteassautdes chababcontre
lepalaisprésidentiel à Mogadiscio
MOGADISCIO. Des combattants islamistes chabab ont mené,
mardi 8 juillet au soir, un vaste assaut contre le palais présidentiel à Mogadiscio, l’un des sites les plus protégés de la capitale somalienne, avant de se faire exploser. Le président Hassan Cheikh Mohamoud et le premier ministre Abdiweli
Cheikh Ahmed, à la tête des institutions de transition soutenues par la communauté internationale, ne se trouvaient pas
sur place au moment de l’attaque et sont « tous les deux en
sécurité », selon des sources officielles. « Il y avait au moins
neuf assaillants, tous ont été tués et la situation est sous contrôle », a déclaré un responsable. p – (AFP.)
Corée du Nord Pyongyang tire deux nouveaux
missiles en mer du Japon
SÉOUL. Selon un porte-parole de l’état-major sud-coréen, la Corée
du Nord a tiré, mercredi 9 juillet, deux missiles de courte portée
en mer du Japon depuis sa province de Hwanghae (est). Pyongyang avait menacé la semaine dernière de poursuivre ses tests
avec des missiles guidés, défiant l’Occident qui l’avait appelé à
ralentir son programme d’armement. Le Nord avait déjà tiré le
2 juillet deux missiles de courte portée à la veille de la visite en
Corée du Sud du président chinois Xi Jinping, qui avait accordé la
priorité à Séoul pour son voyage dans la péninsule. – (AFP.)
Malaisie Un homme condamné à mort
pour le meurtre d’une jeune Française
KUANTAN. Un Malaisien de 39 ans a été condamné à mort, mercredi 9 juillet, après avoir été déclaré coupable par la justice du
meurtre d’une jeune touriste française, Stéphanie Foray, 30 ans,
en mai 2011, sur Tioman, une île touristique sur la côte orientale
malaisienne. Le cadavre de la jeune femme avait été retrouvé
trois mois après sa disparition, enfoui sous le sol d’une grotte. La
police avait rapidement interpellé un commerçant de l’île qui
aurait tué la Française pour avoir refusé ses avances. – (AFP.)
d’entreprise, présent, très direct et
d’une grande exactitude » qui
n’est autre que le pape François.
Mais l’IOR, qui fut mêlée à de
nombreux scandales politicofinanciers, illustre aujourdh’ui les
efforts du Vatican pour respecter
les recommandations du Conseil
de l’Europe sur la lutte contre le
blanchiment des capitaux et le
financement du terrorisme
(Moneyval). Mardi, la banque a
publié ses comptes. Sans surprise,
l’IOR a vu son bénéfice s’effondrer
en 2013, passant de 86,6 millions
d’euros à 2,9 millions. « La réforme», explique-t-on au Vatican.
La fermeture de 3 000 comptes
douteux ou dormants, le blocage
de 1 300 autres, la décision de
concentrer les activités de l’IOR
« sur les institutions catholiques,
les membres du clergé, les
employés ou anciens employés du
Vatican (…), les ambassades et
diplomates accrédités auprès du
Saint-Siège », ont eu un coût.
Mais tout va mieux. L’IOR, créé
en 1942 et riche de 6,3 milliards
d’euros d’actifs, affiche déjà, pour
les six premiers mois de 2014, un
bénéfice de 57,4 millions. Tellement mieux qu’il est temps pour
le pape François de procéder à l’arrivée « d’une nouvelle équipe dirigeante, travaillant sous une nouvelle structure de gouvernance ». p
Ph. R.
inexplicable », il a poursuivi : «Il n’y
a pas de place dans l’Eglise pour
ceux qui commettent ces abus, et je
m’engage à ne pas tolérer que du
malsoitfaitàunmineurparunindividu, qu’il soit religieux ou autre. »
Le pape, qui poursuit et accentue dans ce domaine une évolution initiée par son prédécesseur, a
constitué en mars une commission pour la protection de l’enfance, composée pour moitié de femmeset d’hommes, delaïcs etde religieux, dont une ancienne victime
irlandaise. Mais, pour certaines
associations de lutte contre la
pédophilie, ce discours n’est qu’un
«nouvel exercice de relations publiques ». Elles continuent de reprocher au Vatican le secret des enquêtes canoniques et le manque de collaboration de l’Eglise avec les autorités civiles.
Pourtant, loin des discours et
des bonnes intentions, François a
rappelé à Rome le nonce apostolique polonais Josef Wesolowski, en
poste depuis près de six ans en
République dominicaine. Accusé
de pédophilie, il a été réduit à l’état
laïc au mois de juin, ouvrant la
voie à la possibilité d’un autre procès, pénal cette fois, à Saint-Domingue ou en Pologne.
Plus symbolique mais tout aussi disruptif, son déplacement il y a
quelques semaines en Calabre, où
il s’en est pris aux membres des
clans mafieux, allant de fait beau-
coup plus loin, en paroles du
moins, que ses prédécesseurs qui
se bornaient au rappel rituel du
commandement « Tu ne tueras
point ». « Ceux qui, dans leur vie,
ont choisi cette voie du mal, comme les mafieux, ne sont pas en communion avec Dieu, ils sont excommuniés, a tonné le pape le 21 juin.
Ce mal doit être combattu. »
Lenonce apostolique
polonaisJozef
Wesolowski,accusé de
pédophilie,a étéréduit
àl’état laïc en juin
Engagé sur le double front des
réformes internes et du changement de l’image extérieure de
l’Eglise, le pape tiendra-t-il le rythme ? Passera-t-il l’obstacle de la
résistance des uns et de la mauvaise volonté des autres ? « Sa démarche est très participative, explique
M. Politi. Il sait qu’on ne peut pas
changer l’Eglise en créant le “parti
du pape”, qu’il faut la participation
de tous. Il doit relancer le style de
Vatican II : un maximum de liberté
d’expression pour construire le
consensus. » Malgré ses 77 ans et
ses « coups de pompe », François a
letemps pour lui. Cet été, il neprendra pas un jour de vacances. p
Philippe Ridet
Pêche en eau profonde: la France accusée d’avoir menti
Selon des ONG, l’Etat a ignoré les données dont il disposait sur les dégâts de cette pratique
L
a France a-t-elle ignoré délibérément ses propres données
scientifiques pour s’opposer
au projet européen d’interdiction
de la pêche en eau profonde ? Huit
organisations non gouvernementales posent la question dans un
communiqué rendu public mardi
8 juillet, en s’appuyant sur deux
rapports inédits de l’Institut français de recherche pour l’exploitation de la mer (Ifremer).
Selon les ONG – dont Bloom,
Greenpeace, le WWF ou encore la
Fondation GoodPlanet –, les données de l’Ifremer sur la pêche profonde montrent que les dégâts
environnementaux du chalutage
profond sont aussi considérables
que le nombre d’emplois dépendant de cette activité est faible.
Les tonnages débarqués par la
pêche en eau profonde représentent à peine 1 % de la pêche française. « En 2012, seuls 12 chalutiers
français fréquentaient des profondeurs de plus de 600 m plus de 10 %
de leur temps. Et seulement 10 navires ont opéré à plus de 800 m plus
de 10 % de leur temps », avancent
les ONG. « Le nombre de navires
ayant une activité au chalutage de
fond en eau profonde est faible »,
conclut ainsi le rapport de l’Ifremer, cité par les ONG.
Celles-ci font valoir que la position officielle française, portée à
Bruxelles par le secrétaire d’Etat
chargé des transports, de la mer et
de la pêche, Frédéric Cuvillier, est
enopposition avecles donnéesproduitesparl’Ifremer. «Une éventuelle interdiction de certains engins de
pêche,sans discernement, auraitde
trèslourdes conséquencessocio-économiques et ne serait pas acceptable », avait-il ainsi expliqué à la
commissaire européenne à la
pêche, Maria Damanaki, lors du
Conseil européen du 17 juillet 2012
consacré au projet d’interdiction
de la pêche profonde. M. Cuvillier
n’a pas donné suite aux sollicitations du Monde.
« Nous réclamions ces données
depuis le Grenelle de la mer, en
2009, tempête Claire Nouvian,présidente de l’association Bloom. Ce
sont pourtant des données publiques, produites par un établissement public, grâce à de l’argent
public ! » De son côté, l’Ifremer précise que ses données scientifiques
sont toujours accessibles, mais
que « les avis et les rapports rendus
à la demande des pouvoirs publics
n’appartiennent pas à l’Ifremer,
qui ne peut décider seul de les
publier ».
Isabelle Laudon, coordinatrice
des politiques publiques au WWF,
confiequeles associationsontsaisi,
en avril, la Commission d’accès aux
documents administratifs pour
obtenir l’accès aux deux rapports.
« Maintenant que nous les avons,
nous comprenons pourquoi il était
si difficile d’y avoir accès », ajoute-t-elle. C’est finalement sur décision de Ségolène Royal, la ministre
de l’écologie, du développement
durable et de l’énergie, et ministre
de tutelle de Frédéric Cuvillier, que
l’Ifremer les a publiés le 2 juillet.
« Conflit d’intérêts »
Ces rapports précisent également les données de capture des
bateaux et, partant, certains des
dégâts environnementaux liés au
chalutage profond. Ces dégâts
sont globalement bien documentés dans la littérature scientifique
internationale mais, dit Claire
Nouvian, « les chiffres de l’Ifremer
ont estomaqué ». « En 2012, treize
espèces de requins profonds ont
représenté environ 6 % des captures réalisées par des chalutiers fran-
çais spécialisés dans la pêche profonde et ont été rejetées mortes à la
mer, indique-t-elle. Or 11 de ces
13 espèces sont menacées d’extinction, selon les critères de l’Union
internationale pour la conservation de la nature. »
Dans une lettre ouverte à Ségolène Royal, les associations demandent que la France revoie sa position sur la pêche profonde pour le
prochain Conseil européen, prévu
le 15 juillet. D’autant que, depuis le
début de l’année, l’enjeu économiquereprésentépar lapêche profonde a encore perdu en importance.
« Après la décision de Carrefour
de retirer les produits de la pêche
profondedeses étals,Intermarché a
annoncé que sa flotte [Scapêche] ne
pêcherait plus au-delà de 800 m, ce
qui n’aura pas d’impact en termes
d’emplois, explique Philippe Germa, directeur général du WWF. Il ne
reste aujourd’hui guère qu’un
bateau directement concerné par
une interdiction de pêcher au-delà
de cette limite et son port d’attache
est Boulogne-sur-Mer,ville dontFrédéric Cuvillier est élu. On est là dans
une situation qui s’apparente à un
conflit d’intérêts. » p
Stéphane Foucart
0123
international & planète
Jeudi 10 juillet 2014
Les espèces protégées,
proies des nouveaux riches
dans les pays émergents
5
Entre «l’homme du peuple» et un ancien
général, l’Indonésie choisit son avenir
Joko Widodo revendique sa victoire à l’élection présidentielle, après les premières estimations
La Chine est le plus gros marché des trafics qui
menacent éléphants, rhinocéros et grands félins
S
ombre tableau pour les éléphants, les rhinocéros, les
tigres, les léopards et les
grandssinges.Des animauxemblématiques dont le sort et la survie
sont au cœur de la 65e session du
comité permanent de la Convention sur le commerce international
des espèces de faune etde flore sauvages menacées d’extinction
(Cites), réunie du 7 au 11 juillet à
Genève. Les travaux de plus de
400participants, venus de 72 pays,
se sont ouverts sur un constat très
alarmant : « Les années récentes ont
connuunpicsurl’échellede lacriminalité liée aux espèces sauvages.»
Certes, rappelle un rapport sur
«la lutte contre la fraude » présenté
mercredi matin, « cela fait des
décennies que nous sommes
confrontés au commerce illégal des
espèces sauvages ». Mais on assiste
à une « flambée dans l’échelle de ce
commerce » qui s’explique, pour
partie, par «la participation accrue
de groupes criminels organisés et
parfois de milices rebelles ». Conséquence : « Dans le monde entier, à
mesure qu’elles intensifient leur lutte contre le commerce illégal des
espèces sauvages,les autoritéschargées de la lutte contre la fraude font
face à des situations de plus en plus
difficiles et complexes.»
Cette criminalité a aujourd’hui
de nouveaux ressorts. « Nous assistons à un changement inquiétant
de la demande pour certaines espèces : l’affichage d’une nouvelle
richesseplutôt que l’usage enmédecine traditionnelle », constate John
Scanlon, secrétaire général de la
Cites. Les proies ne sont plus seulement recherchées pour leurs prétendues vertus thérapeutiques ou
aphrodisiaques, comme la poudre
de corne de rhinocéros, mais surtout comme produits de luxe et
signes extérieurs d’opulence.
C’est le cas pour la peau ou les
griffes de tigre, mais aussi pour sa
viande, ou encore pour le « vin de
tigre», une décoction d’alcool de riz
où a macéré une carcasse du félin
censée soigner les rhumatismes et
qui est devenue en Chine un breuvage de nouveaux riches. C’est aussilecaspourlepangolin,mammifère d’Asie et d’Afrique dont la peau
et les écailles sont prisées par l’industrie de la mode, tandis que la
chair, dont les jeunes mères chinoises continuent à croire qu’elle stimule la production de lait, est aussi
considéréecomme unmets raffiné.
« La Chine est montrée du doigt,
car, hausse du pouvoir d’achat
aidant, elle constitue le plus gros
marché de ce commerce illégal.
Mais le phénomène est mondial »,
note la Cites. De fait, le guépard fait
fureur, comme animal de compagnie et de prestige, dans les pays du
Golfe, principale destination des
spécimens capturés ou élevés en
captivité en Afrique. Et l’Europe
n’est pas en reste pour les peaux de
python – dont le commerce n’est
pas interdit mais seulement
contrôlé –, qui finissent en bottes,
ceintures et autres sacs à main.
180 pays, 33 000 espèces
Cites La Convention sur le commerce international des espèces
de faune et de flore sauvages
(Cites) menacées d’extinction
a été adoptée en 1973.
Elle a été ratifiée par 180 pays.
Faune et flore La Cites a décidé
de la protection, à des degrés
divers, de 5 000 espèces animales
et 28 000 espèces végétales. Pour
la majorité, le commerce est autorisé mais étroitement contrôlé.
Protection maximale Un peu
plus de 900 espèces menacées de
disparition imminente bénéficient
de l’interdiction totale
de commerce international.
Dans tous les cas, le profit reste
biensûrlenerfd’untrafictrèslucratif, chiffré, hors commerce du bois
et des produits de la mer, à 20 milliards de dollars (près de 15 milliards d’euros) par an. Début juillet,
l’ONG Save the Elephants, dont le
siège est au Kenya, a ainsi rapporté
que le prix de l’ivoire provenant
d’abattages en Afrique a triplé sur
le marché chinois entre 2010 et
2014, pour atteindre plus de
2 000 dollars le kilo. Le déclin des
éléphants d’Afrique, dont l’effectif
a chuté de 20 millions d’individus
au début du XXe siècle à seulement
un demi-million, est précisément
au centre des préoccupations de la
réunion de Genève.
En 2013, surl’ensemble du continent, plus de 20 000 pachydermes
ont été abattus pour leur ivoire.
Bien que ce chiffre soit en recul par
rapport au record de l’année 2011
(environ 25 000 animaux tués),
« les niveaux de braconnage continuent à dépasser largement le taux
de croissance naturelle de l’espèce,
ce qui entraîne une nouvelle baisse
des populations d’éléphants dans
toute l’Afrique ». Dans certaines
régions existe « une menace immédiate d’extinction locale ».
Les raisons de ce massacre sont
connues : pauvreté, déficit de gouvernance de certains Etats, corruption, pression de la demande. Huit
pays ont été ciblés par la Cites comme les plus impliqués dans la chaîne du commerce illégal de l’ivoire :
l’Ouganda, la Tanzanie et le Kenya
(pays d’origine), la Malaisie, le VietnametlesPhilippines(paysdetransit), la Chine et la Thaïlande (pays
de consommation).
Dans les pays du
Golfe, c’est le guépard
qui fait fureur comme
animal de compagnie
et de prestige
Aucune sanction n’a jusqu’ici
été prise à leur encontre, mais chacund’entreeuxaétésommédeprésenter, lors de la réunion de Genève, un « plan d’action national pour
l’ivoire », portant à la fois sur la
législation, l’action contre la fraude
au niveau national et international, l’information et l’éducation.
« Plus de 65 % des actions
[engagées par les huit pays] sont
soit substantiellement réalisées,
soit en bonne voie de réalisation », a
indiqué, mardi, le secrétariat général de la Cites. Ce qui a permis « une
nette augmentation du nombre de
saisiesimportantes d’ivoire (cargaisons de plus de 500 kg) réalisées en
Afrique en 2013 ». Pour autant, les
résultats de cette simple mise sous
surveillance des Etats fautifs restent mitigés. Ainsi, la mise en
œuvre de la majorité des actions
annoncées par la Thaïlande ou les
Philippines est jugée « difficile »,
« peu claire » ou « imprécise ». Il en
va de même pour la moitié de celles prévues par l’Ouganda.
Que faire? La réunion deGenève
n’a pas le pouvoir décisionnel des
grandes conférences des parties de
la Cites, dont la prochaine se tiendra en octobre 2016 en Afrique du
Sud. Seule cette conférence plénière est habilitée à inclure de nouvelles espèces dans la liste des animaux et des végétaux protégés. La
session de Genève pourrait néanmoins adresser un avertissement à
des pays jugés trop laxistes, voire
préconiser des sanctions. Mais force est de constater que, malgré la
mise en place, depuis 2010, d’un
Consortium international de lutte
contre la criminalité liée aux espèces sauvages, auquel participe
Interpol, ce combat a, jusqu’ici, globalement échoué. p
Pierre Le Hir
Des Indonésiens votent sur l’île de Bali, mercredi 9 juillet. FIRDIA LISNAWATI/AP
Djakarta
Envoyé spécial
L
’élection présidentielle du
mercredi 9 juillet pourrait
bien marquer un tournant
dans l’histoire d’une démocratie
indonésienne de seulement quinze ans d’âge. L’affrontement des
deux candidats en lice, que tout
sépare, est en effet considéré par
bien des votants comme le choix
crucial entre deux options : soit la
préservation desacquis démocratiques conquis après la chute du dictateur Suharto en 1998, soit leur
possible remise en question.
Sur le ring électoral s’affrontent
deux hommes à l’histoire contrastée: d’uncôté legouverneur de Djakarta et favori des sondages Joko
Widodo, alias « Jokowi » comme
tout le monde le surnomme, qui
revendique déjà la victoire au vu
des premières estimations, qui le
créditent de 53 % des voix. Agé de
53 ans et originaire de Solo, une ville du centre de Java dont il a été le
maire, il y est né dans une baraque
enbambou.Son entreprisedefabrique de meubles lui a ensuite permis d’accéder à la classe moyenne,
mais il reste fondamentalement
un homme du peuple.
La façon dont il a su gérer sa
ville natale et Djakarta depuis son
élection au poste de gouverneur
lui a valu une formidable popularité, surtout chez les plus démunis.
Iln’est pasrare de voir ce fande rock’n’roll débarquer à l’improviste
dans des bidonvilles ou des quartiers excentrés, pour écouter les
doléances. Tout cela lui a valu la
réputation d’un homme politique
proche des gens. Un contraste saisissant avec les comportements
habituels sous ces latitudes.
En face de lui, son adversaire se
nomme Prabowo Subianto. A
62 ans, cet ancien général des forces spéciales est marqué par l’héritage de l’ère Suharto, l’ancien
« Duce » indonésien, dont il fut
longtemps marié avec la fille. Né
dans une famille javanaise aisée et
aristocratique,son frère est milliardaire et il a passé une partie de sa
jeunesse en Suisse, à Singapour et
au Royaume-Uni.
Son anglais est impeccable, ce
qui n’est pas le cas de sa réputation
en matière de droits de l’homme :
en 1998, alors que s’écroule le régime de son ancien mentor Suharto,
à la suite d’une série de manifestations durement réprimées, il fait
enlever plusieurs militants prodémocratie. Ceux-ci ont été torturés,
jetés dans des cachots de casernes
du Kopassus, les forces spéciales.
Sur 22 disparus, l’ex-général ne nie
pas avoir fait enlever neuf militants, qui ont réchappé aux mauvais traitements, mais il n’évoque
jamais les treize autres, qui n’ont
pas été retrouvés.
«Prabowo est un criminel», tonne Bambang Dwihardono, ex-maire de la grande ville de Surabaya et
membre du Parti démocrate indonésien de lutte (PDI-P), qui a investi
Jokowi comme candidat à la présidentielle: « Imaginez ce qu’il pourrait faire s’il devenait président ! »
« C’était un officier assez incompétent, dont les liens familiaux
avec Suharto lui ont permis de
monter en grade », juge l’un de ses
anciens condisciples de haut
niveau dans l’armée, qui préfère
rester anonyme : « Il n’a absolument pas les qualités pour devenir
chef de l’Etat ». Une opinion que ne
partage pas Suko Widodo, professeurde politique dela communication dans une université de Surabaya : « Si Prabowo gagne, nous
aurons un gouvernement discipliné, efficace. La réputation de
Jokowi est très exagérée. »
La lourdeur
de la bureaucratie
et la corruption
continuent à freiner
la marche
indonésienne
La campagne électorale a été
aussi contrastée que la personnalité des deux candidats : Jokowi est
un piètre orateur, l’organisation
de ses déplacements dans le pays a
été des plus chaotiques et ses prestations lors des cinq débats télévisés qui l’ont confronté à Prabowo
ont souvent manqué de pugnacité. Même si sa réputation de bon
administrateur n’est plus à faire,
ses connaissances en matière de
politique internationale et sa capacité à conduire les affaires d’un
pays qui ne se gère pas comme une
municipalité restent à prouver.
Prabowo Subianto, pour sa part,
a su se présenter comme l’incarnation d’un chef ayant la carrure
nécessaire à assurer la stabilité du
pays. Les moyens utilisés par l’ancien officier ont été clairement disproportionnés en comparaison de
ceux de Jokowi. Dans les campagnes, on dit que les sbires de Prabowo et de son Parti du mouve-
ment de la grande Indonésie
(Gerindra) auraient généreusement distribué des subsides.
L’Indonésie est un défi pour ses
gouvernants : comment gérer une
nation de 240 millions d’habitants, un archipel de 13 466 îles où
coexistent 360 groupes ethniques
aux 719 langues répertoriées ? Et
dont la population, à près de 90 %
musulmane, fait de cette république la plus grande terre d’Islam du
monde, mais cependant flanquée
de minorités chrétiennes, bouddhistes, confucéennes…
Les succès économiques de ces
dernières années sont indéniables, même si la piètre qualité des
infrastructures, la lourdeur de la
bureaucratieet la corruption continuent à freiner la marche indonésienne vers le succès.
Mais l’évolution du niveau de
vieestréelle:siunecentainede mil-
lions d’Indonésiens continuent de
vivre avec deux dollars par jour, ils
n’étaient que 5 % de la population à
pouvoir en dépenser quatre en
2003 alors qu’ils sont aujourd’hui
18 % à en avoir les moyens.
Les deux candidats en lice font
tous les deux assauts de défense
du patriotisme économique et
défendent l’idée d’un certain protectionnisme. Ce qui commence à
inquiéter les investisseurs étrangers. Ces derniers font cependant
plus confiance à Joko Widodo, perçu comme un réformiste dont la
victoire symboliserait la fin d’un
système : si Prabowo gagnait, révèle un sondage de la Deutsche Bank,
56 % des étrangers vendraient ce
qu’ils avaient acquis en Indonésie
alors que 74 % des entrepreneurs
interrogés seraient prêts à investir
si Jokowi l’emportait. p
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6
0123
Jeudi 10 juillet 2014
L’UMP échappe à la faillite,
mais pas au risque d’implosion
Grevé par une dette de 74,5millions d’euros,
le parti va devoir s’imposer un plan de rigueur drastique jusqu’en 2017
L
ros, dans les actifs de l’UMP. Un
calcul visant à masquer l’ampleur
des dettes abyssales du parti sous
sa présidence. Ces pertes sont « en
grande partie liées aux dépenses
importantes réalisées en 2012 pendant la campagne présidentielle »,
a noté Alain Juppé, à l’issue du
bureau politique.
Le parti, en proie à de graves difficultés de trésorerie depuis plusieurs années, se trouve au bord
du gouffre. Mais il a une chance de
se redresser, contrairement à ce
qu’affirmaient certains ténors, tel
Christian Estrosi, qui le donnait
déjà pour « mort ». Alain Juppé a
affirmé que l’UMP pouvait survivre jusqu’en 2017 s’il se conformait à des « exigences fortes ». Il
n’y a en revanche aucune certitude au-delà.
Les banques ont en effet accepté de maintenir l’UMP sous perfusion durant les trois prochaines
années, à condition qu’elle rembourse de manière croissante ses
dettes : 5 millions d’euros en 2015,
11 millions l’année suivante et…
27,5 millions en 2017. L’effort est
conséquent. Pour y parvenir, un
plan de rigueur drastique s’impose. « La première des exigences,
c’est de maintenir un niveau de
recettes suffisant par les cotisations de nos membres et par les
dons», a expliqué Alain Juppé, sou-
’UMP est enfin fixée sur sa
santé financière. L’état de ses
comptes a été dévoilé lors
d’un bureau politique sous haute
tension, mardi 8 juillet, en fin
d’après-midi. Verdict ? Le parti reste menacé de mort mais il respire
encore.
Sa situation est alarmante : ses
dettes s’élèvent actuellement à
74,5 millions d’euros. Elles étaient
d’un montant de 79,1 millions d’euros à la fin de l’année 2013, selon
les résultats de l’audit commandé
par la direction provisoire, le trio
Juppé-Fillon-Raffarin et le secrétaire général, Luc Chatel. Sur cette
somme, 40 millions correspondent à des pertes accumulées les
années passées et 39,1 millions au
solde de l’emprunt contracté pour
l’achat du siège parisien du parti,
rue de Vaugirard.
Le niveau d’endettement, proche de 80 millions d’euros, correspond au chiffre évoqué par François Fillon, le 29 juin, sur RTL. En
revanche, il est très largement
supérieur à celui de « 24,1 millions
d’euros », avancé par Jean-François
Copé, le 8 avril, pour se défendre
face aux accusations dans l’affaire
Bygmalion. L’ex-président de
l’UMP, qui a démissionné le 27 mai,
atoujours minimiséle niveaud’endettement en intégrant la valeur
du siège, estimé à 38 millions d’eu-
Le déficit record de 2012
RECETTES ET DÉPENSES, en millions d’euros
97,9
100
Dépenses
80
Recettes
60
40
Campagne
présidentielle
20
Campagne
présidentielle
0
2007
2008
2009
2010
2011
2012
SOURCE : CNCCFP
étaient positifs, dès 2011, la hausse
des dépenses a fait progresser la
dette du parti.
On peut aussi s’interroger sur
la forte différence entre le déficit
de 2012 et celui de 2007, autre
année présidentielle, qui était quatre fois moindre. p
L’UMP A AFFICHÉ en 2012 un exercice déficitaire de près de 40 millions d’euros. Ce record survient,
il est vrai, après plusieurs années
où l’équilibre comptable n’a pas
semblé la première préoccupation de la direction du parti. Si les
exercices 2008, 2009 et 2010
L’envolée des frais de meetings
RÉPARTITION DES FRAIS, en millions d’euros
33,3
35
30
Communication
et meetings
25
20
Campagne
présidentielle
15
Campagne
présidentielle
Salaires
10
5
Frais de voyage
Charges except.
0
2007
2008
2009
2010
2011
2012
SOURCE : CNCCFP
LE PLUS IMPORTANT poste de
dépense pour 2012 est celui de la
communication (publicité, tracts,
etc.) et des meetings : plus de
33 millions d’euros, le triple de
l’année précédente et plus du
quintuple du budget 2010 !
Avec plus de 22 millions d’euros, les seuls meetings représentent les deux tiers de ce poste. Là
encore, le différentiel avec 2007
saute aux yeux : l’UMP avait alors
dépensé 14 millions d’euros, dont
7 en meetings.
Autre hausse marquée, celle
des frais de déplacements : de
2,8 millions d’euros en 2010, ils
ont grimpé à 9,7 en 2012, largement plus que pour 2007 (6,1 millions d’euros). Mais le parti n’a
qu’à peine réduit ses coûts salariaux. p
lignant que 143 000 adhérents
étaient à jour de cotisation au
30 juin, soit « 85 % du nombre espéré en 2014 ».
Luc Chatel exclut de recourir à
un plan social, mais le parti doit
aussi réduire de 20 % ses dépenses
de fonctionnement, autrement
dit,baisser sa masse salariale. François Fillon et Alain Juppé ont dans
leur viseur des protégés de JeanFrançois Copé et de Nicolas Sarkozy, dont Geoffroy Didier, qui touche 8 500 euros brut du parti en
tant que collaborateur de Brice
Hortefeux.
Lescopéistesetles
sarkozystesdénoncent
des«boulespuantes»
etaccusentlecamp
Fillond’êtrederrière
ces«coupsbas»
La nouvelle direction veut poursuivre l’effort après avoir déjà
poussé vers la sortie l’ancien directeur général, Eric Cesari, la directrice financière, Fabienne Liadzé, et
le directeur de la communication,
Pierre Chassat. Le triumvirat
entend réaliser des économies sur
les salaires de dix cadres du parti
touchant plus de 8 000 euros par
mois. François Fillon a d’ailleurs
obtenu qu’une analyse ait lieu en
interne pour savoir si les postes
des 85 permanents de l’UMP sont
rémunérés à hauteur de leurs prestations.
Enfin, cette cure d’austérité
contraint le parti à réduire la voilure sur les dépenses dites «d’animation politique » d’ici à 2017 : le coût
des meetings et des campagnes
électorales ne devra pas excéder
19,2 millions d’euros pendant les
trois prochaines années. Une
gageure pour un parti qui entre
dans une phase politique majeure
avecle congrèsà l’automneet laprimaire en 2016 en vue de la présidentielle l’année suivante. En comparaison, l’UMP avait consacré
44 millions d’euros à cette même
« animation » en 2006-2007. La
direction provisoire a indiqué
avoir mis de côté 9,1 millions d’euros pour les campagnes présidentielle et législative, dont 2 millions
pour l’organisation de la primaire.
Une manière de sécuriser la tenue
de ce scrutin, que Nicolas Sarkozy
souhaiterait contourner.
Cette bataille de chiffres, sur
fond de rivalité dans l’optique de
2017, donne lieu à des règlements
de comptes internes. Le bureau
politique s’est déroulé dans « une
ambianceexécrable»,selondesparticipants. Un sujet a enflammé la
réunion: les fuites dans la presse.
Ces derniers jours, plusieurs
médias ont fait état d’avantages
dont auraient disposé des proches
de Jean-François Copé. Selon
Le Canard enchaîné, l’UMP aurait
réglé des factures téléphoniques de
Rachida Dati à hauteur de
10 000 euros par an, ainsi que
13000 euros de frais de transports
pour l’année 2013. De son côté, Le
Journal du dimanche a rapporté
que l’UMP aurait réglé
24 000 euros de billets d’avion, en
2013, pour l’épouse de M. Copé.
Furieux, les copéistes et les
sarkozystes dénoncent des « boules puantes » et accusent le camp
Fillon d’être derrière ces « coups
bas ». « Attention à ne pas utiliser
des méthodes de la mafia », a mis
en garde Rachida Dati, mardi
matin, sur LCI. Jean-François Copé,
lui, a directement attaqué son
rival François Fillon lors du bureau
politique, en lançant dans sa direction : « Certains s’amusent à faire
fuiter des infos, cen’est pas acceptable. »
Les dirigeants de droite sont si
François Fillon, Luc Chatel, Jean-Pierre Raffarin et Alain Juppé lors du point
divisés que la survie de l’UMP ne
dépend pas uniquement de sa
situation financière. Loin de là. Un
mal plus profond ronge le parti de
l’intérieur. « Ce qui nous mine le
plus, c’est l’ambiance mortifère qui
règne au siège, confie Nadine
Morano. On a atteint un niveau de
détestation incroyable entre
nous. » Alain Juppé résume ce sentiment : « Ce n’est pas ses finances
qui plomberont l’UMP. C’est son
incapacité à se rassembler autour
d’objectifs communs. » p
Alexandre Lemarié
Une dette qui plombe le parti
LA DETTE DE L’UMP risque de
poursuivre longtemps le parti, et
en premier lieu son futur président, puisque celui-ci héritera du
passif. Comme les autres formations politiques en France, l’UMP
est une association loi 1901 dont
le président est le représentant
légal. « Selon les statuts de l’UMP,
le président représente le parti
dans tous les actes de la vie civile,
ce qui inclut nécessairement le
règlement de factures et implique
également d’en assumer les conséquences, à moins qu’il n’y ait eu
délégation de pouvoirs », explique
Jean-Christophe Ménard, avocat
et spécialiste du droit des partis
politiques.
Depuis le départ de Jean-François Copé, le 27 mai, le parti est
dans une situation juridique
étrange : il n’a plus de président.
La question de la responsabilité
juridique de la dette peut donc se
poser. Passée cette période de
« vacance », le futur président sera
responsable de la dette devant les
créanciers.
Responsable mais pas forcément coupable. En déposant plainte en son nom (ou alors après le
dépôt d’une plainte par un adhérent ou un créancier) et lors d’un
procès pénal, le président d’une
association peut éventuellement
mettre en cause la gestion de ses
prédécesseurs ou de la personne à
qui il avait délégué son pouvoir
de décision. C’est d’ailleurs le sens
de la défense de M. Copé, qui a
expliqué le 26 mai sur BFM-TV
qu’il n’était pas impliqué dans la
gestion quotidienne des finances
de l’UMP. En cas de procès, la justice peut également conclure que
le parti a subi une escroquerie ou
un abus de confiance qui a amené
celui-ci à dépenser plus que de raison. Le président peut alors être
exonéré de ses responsabilités.
Mais c’est à la justice d’en décider
après une enquête.
Liquidation judiciaire
Alors que les dirigeants ont été
contraints de donner des gages
aux banquiers pour assurer la survie du parti, des voix se sont élevées pour des changements plus
radicaux : changement de nom ou
fondation d’un nouveau mouvement.
Ces idées ne feraient toutefois
pas échapper les dirigeants de
l’UMP à leur responsabilité face à
la dette. « Le changement de nom
est une décision du parti qui ne
change strictement rien aux créances dues par l’UMP et aux responsabilités éventuellement encourues », analyse Me Ménard.
Et si l’UMP disparaissait pour
laisser sa place à une nouvelle
entité ? Cette éventualité passerait par une dissolution de l’association votée par les adhérents ou
imposée par un tribunal. Un liquidateur judiciaire serait alors chargé de faire l’inventaire des actifs
et des passifs.
Mais les responsables de l’UMP
ne seraient pas exonérés. « Pendant toute la période de liquidation, le parti et ses organes conservent leur personnalité juridique,
et leur responsabilité peut toujours être engagée », assure
Me Ménard. p
Matthieu Goar
L’explosion de l’endettement
DETTE, en millions d’euros
Emprunts et dettes bancaires
Emprunts et dettes divers
Dette fournisseurs
Dettes fiscales et sociales
Autres dettes
108,5
100
75
50
55,6
50,0
27,9
25
37,7
19,4
0
2007
2008
2009
2010
2011
2012
SOURCE : CNCCFP
Portrait Le député UMP
L’homme qui
P
arfois, il parle aux arbres. A
ses 150 sorbiers et autres alisiers qu’il a plantés de ses
mains, sur les hauts plateaux de
l’Aubrac, à 1 108 mètres d’altitude.
« Un arbre, ça pousse droit, quel
que soit le temps », dit-il.
Mais ça, c’est quand il est sur ses
terres, dans sa circonscription de
Lozère. Car à 55 ans, le député UMP
Pierre Morel-A-L’Huissier, tendance humaniste chère à Jean-Pierre
Raffarin, fréquente Paris au moins
deux jours par semaine.
Et depuis quelque temps, il s’est
découvert, persiflent certains de
ses collègues, une vocation : il
pourfend, vilipende – c’est devenu
à la mode –, bref, éparpille son propre parti, et il parle, cette fois, sur
toutes les chaînes d’information
continue. Son patronyme à rallonge n’est plus un souci. Enfin.
« J’ai envie de sortir de ma cave,
assume-t-il. Trop, c’est trop. » Avocat spécialisé en droit administratif, il s’est réveillé un dimanche, il a
pris sa plus belle plume, et il a écrit
au procureur de Paris, déposant
une plainte visant les irrégularités
financières de l’UMP. Avec sept
autres de ses collègues, il entend se
constituer partie civile dans l’affaire Bygmalion, au nom des militants, pour comprendre où est passé l’argent, comment s’est creusée
la dette de 74,5 millions d’euros.
« Je veux la transparence, trop
d’élus se considèrent comme intouchables, explique l’élu. L’opacité
est organisée à l’UMP. Les dirigeants du parti ne peuvent se
constituer partie civile, car ils peuvent être inquiétés par les juges.
Tenez, on ne sait même pas combien et comment sont rétribués les
22 collaborateurs de l’UMP à l’Assemblée nationale. On se retrouve
avec un triumvirat au statut douteux à la tête du parti, il faut tout
nettoyer, faire péter l’abcès. »
A bien y regarder, ces combats
ne sont pas nouveaux chez lui.
Simplement, ils sont d’actualité. Il
a vu un créneau, s’y engouffre. Il
dit ne pas lorgner grand-chose. Il
prendrait bien, éventuellement, le
0123
france
Jeudi 10 juillet 2014
7
«Pas une seule autorité
dans le parti n’a enrayé
un fonctionnement délétère»
Pour le sociologue Pierre Lascoumes, «les partis politiques
ne font pas leur travail» en ne contrôlant pas les candidats
Entretien
P
ierre Lascoumes est sociologue, directeur de recherche
au CNRS. Il a notamment
publié Une démocratie corruptible. Arrangements, favoritisme et
conflits d’intérêt (Seuil, 2011).
Les premières lois sur le financement de la politique datent des
années 1990. Comment expliquer l’impuissance à réguler l’argent de la vie publique ?
C’est une question majeure. Je
fais partie des observateurs de ces
changements depuis trente ans et
je suis plutôt d’un naturel optimiste. Je pensais qu’il y aurait un effet
degénération,un effetd’apprentissage des nouvelles règles, une peur
du risque. Et je m’interroge en
voyant que pour une nouvelle
génération,celledesSarkozy,BalkanyouCahuzac,lerapportàla légalité de l’argent dans la politique reste
trouble. Ils donnent l’impression
de pérenniser un système dans
lequel la fin justifie les moyens.
Je pense que les partis politiques ne font pas leur travail. Il
serait normal, quand un parti présente un candidat, qu’il se sente
tenude lui donner une sorte d’éducation civique, sur les transgressions à ne pas commettre, les
règles des marchés publics, etc.
presse qui a suivi le bureau politique de l’UMP, mardi 8 juillet. CYRIL BITTON/FRENCH-POLITICS POUR « LE MONDE »
Mais à l’UMP, n’est-ce pas
le contraire qui s’est passé ?
de la Lozère Pierre Morel-A-L’Huissier vilipende son propre parti
se voyait en chevalier blanc de la droite
poste de trésorier de l’UMP, s’il se
libérait, pour insuffler « une rectitude ».
En avril 2013, il était déjà
l’auteur d’une proposition de loi
visant à interdire toute personne
condamnée pour trafic d’influence, corruption ou favoritisme de se
présenter à des élections. Nicolas
Sarkozy appréciera.
« C’est un citoyen comme les
autres,
s’emporte
Pierre
Morel-A-L’Huissier, et encore, tout
mis en examen ne fait pas le
“20 heures” de TF1 ! En plus, il n’a
parlé que de lui, jamais de nous, en
traitant les magistrates de “dames”… Il est plombé par toutes ses
affaires, il nous tire vers le bas. »
A
dire
vrai,
Pierre
Morel-A-L’Huissier fait tout pour
se faire remarquer. Avocat, il a mis
son activité entre parenthèses
pour éviter les conflits d’intérêts, il
copine avec des élus de gauche,
défendla ruralité,partage la gamelle de ses électeurs, réclame désor-
mais la création d’une commission d’enquête sur les financements publics… Bref, il se mêle de
tout. Et donc, maintenant, il s’exprime.
Prises de position
« Quand Nadine Morano parle,
je mets le casque. Où est sa légitimité ? Comme Valérie Debord,
d’ailleurs, elles ont été battues aux
élections législatives ! Ca fait une
mélasse, tout ça. Moi, je ne suis pas
procureur, ni Zorro, je ne veux pas
être le René Dosière de la droite.
Mais à un moment donné, il faut
assumer ses convictions. Parler
avec un Carignon ou un Balkany,
non ! »
Ses convictions à lui paraissent
fortement ancrées. « Mon combat
n’a rien d’artificiel », martèle-t-il. Il
veut ainsi supprimer la réserve
parlementaire, cette dotation
financière attribuée à l’Assemblée
nationale, souhaite que l’indemnité de représentation et de frais de
mandat allouée à tout député soit
certifiée par un commissaire aux
comptes. Il entend aussi que tout
fonctionnaire ou élu ayant eu
connaissance de délits soit tenu de
saisir la justice, sous peine de sanctions. En deux mandats et demi, il
a déposé une dizaine de propositions de loi, toutes à caractère
financier.
Autant de prises de position qui
hérissent ses chers collègues. Pierre Morel-A-L’Huissier n’en a cure.
Comme il balaie les critiques
quand on mentionne son passé de
directeur du cabinet de Jacques
Blanc, alors président du conseil
régional du Languedoc-Roussillon, élu grâce aux voix du Front
national. « A aucun moment on n’a
signé d’accord avec le FN », jure-t-il.
S’il prend trop de coups, il repartira chez lui, continuera à parcourir ses 6 000 kilomètres mensuels,
par tous les temps. « Servir, pas se
servir », assène-t-il. p
Pierre Morel-A-L’Huissier, à l’Assemblée nationale, le 8 juillet. ALBERT FACELLY POUR « LE MONDE »
Gérard Davet
Pas une seule autorité dans le
parti n’a enrayé un fonctionnement délétère, en effet. On voit
bien que cette difficulté à respecter
les règles, ce sentiment d’impunité
se retrouve dans d’autres grandes
organisations. Regardez ce qu’il
s’est passé à la BNP… La sanction
américaine a été très forte parce
«Aujourd’hui,
certainscandidats
sontsaisispar l’hubris,
ladémesure. Il ya un
espritdémocratique
faible»
que les autorités avaient attiré l’attention de la banque sur certains
dysfonctionnements. Le gendarme avait déjà sifflé. En interne, des
personnes avaient transmis des
mails à la hiérarchie pour l’avertir
des dangers encourus. Les dirigeants n’en ont pas tenu compte.
Ils ont pris le risque.
La politique donne l’impression
qu’elle n’a jamais assez d’argent
pour s’exercer…
Dans les années 1990, il y a eu
un consensus pour enrayer une
sorte de folie des grandeurs, l’affichage 4 × 4, les spots télévisés, bref
l’américanisation des campagnes
– d’où l’institution d’un plafonnement des dépenses. Il fallait aller
vers plus de sobriété. Mais aujourd’hui, certains candidats sont saisis par l’hubris, la démesure, qui
est une composante humaine. Des
spirales un peu folles se mettent
en mouvement. Il y a un esprit
démocratique faible.
Le contrôle externe ne peut
s’exercer pendant les campagnes,
il a toujours lieu a posteriori avec
le contrôle des comptes de campagne. Peut-être faudrait-il établir,
comme dans une entreprise, des
bilansintermédiaires, des commissaires aux comptes, un suivi, sans
attendre une échéance annuelle.
Un ex-président, Nicolas Sarkozy, placé en garde à vue puis mis
en examen pour « corruption
active », dans quelle mesure estce une première, alors que
d’autres présidents ont été éclaboussés par les affaires ?
Rappelons que, sous la IIIe Répu-
blique, le président Jules Grévy a
dû démissionner parce que son
gendre, le député Daniel Wilson,
faisait « commerce » de décorations. La seule qualification qui
existait alors était la corruption.
Lesjuges ont estimé qu’elle ne pouvait être appliquée à Wilson parce
que ce n’était pas lui qui prenait la
décision d’attribuer les médailles.
D’où un scandale dans le scandale
qui a conduit à créer l’accusation
de « trafic d’influence ».
Sous Valéry Giscard d’Estaing,
seule lapressea misen cause leprésident pour l’affaire des diamants
et celle des avions renifleurs, mais
il n’a pas été inquiété. En ce qui
concerne François Mitterrand, je
«Le rapport de forces
entre le monde
politique et le monde
judiciaires’est
transformé»
dirais que si des événements tels
que le naufrage du Rainbow Warrior ou les écoutes téléphoniques
ordonnées par l’Elysée avaient eu
lieu aujourd’hui, le président
auraitcertainement été mis encause. Quant à Jacques Chirac, dont le
nom a été évoqué dans cinq ou six
affaires judiciaires différentes, une
seule a abouti,celle desemploisfictifs de la Ville de Paris qui lui a valu
d’être convoqué devant un tribunal correctionnel.
Ce qui fait la différence avec
Nicolas Sarkozy c’est qu’il est à la
fois mis en cause pour des faits
supposés qui ont eu lieu pendant
sa présidence mais aussi après. On
n’est jamais allé aussi loin dans les
poursuites avec une garde à vue et
une mise en examen, même si Jacques Chirac a été mis en examen
deux fois. Sur une trentaine ou
une quarantaine d’années, le rapport de forces entre le monde politique et le monde judiciaire s’est
transformé. L’indépendance de la
justice s’affirme. Elle est allée en se
renforçant depuis le début des
années 1990. Il est devenu possible d’entreprendre des démarches
qui auraient été entravées il y a dix
ou vingt ans.
La justice est-elle de plus en
plus implacable avec les présidents de la République, malgré
le statut pénal de 2007 et l’immunité qui l’accompagne ?
Ce que l’on observe pour les
anciens présidents de la République n’est pas un fait exceptionnel,
c’est plutôt le résultat d’un changement d’attitude des magistrats en
général envers les politiques. Au
début, on parlait toujours des
« petits juges », comme si c’étaient
des individus. C’est beaucoup plus
profond et collectif : c’est la hiérarchie qui accepte, comprend et
soutient les actions des procureurs
et des juges d’instruction.
Pour le comprendre, il ne faut
pas voir ce phénomène comme un
accroissement du nombre de
juges « de gauche », ce serait absurde. Depuis plusieurs années, on
assiste à un renouvellement de la
magistrature, à une diversificationsociale et culturelle. Lesmagistrats d’aujourd’hui sont, si j’ose
dire, plus légalistes, ils s’accrochent davantage aux textes au
lieu de s’asseoir dessus, ils sont
moins soumis. Le procureur Eric
de Montgolfier évoquait une profession qui marchait la nuque baissée en cherchant des médailles.
Je pense aussi que la féminisation de la profession a joué. Les
magistrates accèdent à des postes
importants et ont joué un rôle très
positif. Je les crois encore plus soucieuses de légalité et du respect des
règles. Elles sont certainement
moins accommodantes et ont une
conception élevée de leur mission
et de leur fonction. Il faut parler de
cela avec prudence mais c’est un
mouvement continu quis’observe.
Quelles sont les conséquences
des attaques de Nicolas Sarkozy
contre les juges ?
Là encore, un retour en arrière
s’impose. Il y a quand même eu,
sous Nicolas Sarkozy, une dégradation des relations entre l’exécutif
et la justice. Il s’est permis de tenir
des propos envers la magistrature
contre lesquels celle-ci a adopté
une attitude molle. Traiter les
juges de « petits pois », en 2007,
c’est un humour qui frise l’insulte,
surtout lorsqu’on est chef de l’Etat,
garant de l’exercice de la justice.
Ilne fautpas voir dans les événements actuels une « vengeance »,
ce n’est pas la question. Mais la plupart des juges de France, même
s’ils doivent être équitables, portent une attention particulière à ce
que dit l’ancien président. Parmi
les responsabilités d’un chef
d’Etat, assurer le bon fonctionnement de la justice induit que toute
atteinte ou non-respect de sa part
dégrade aussi l’image de sa fonction. Imaginez qu’un instituteur
censé protéger sa classe passe son
temps à la dénigrer… p
Propos recueillis par
Béatrice Gurrey
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0123
france
Jeudi 10 juillet 2014
Budget: les ministères les plus frappés par la rigueur
Matignon a rendu, mardi 8juillet, ses ultimes arbitrages. L’Etat réduira ses dépenses de 18milliards d’euros d’ici à 2017, dont 8milliards dès 2015
C
’est le troisième acte du pacte de responsabilité : la mise
en musique des 50 milliards
d’euros d’économies prévues d’ici
à2017. Après des semaines de négociations et d’entretiens ministère
par ministère – engagés, côté Bercy, par letandem Bernard Cazeneuve-Pierre Moscovici et poursuivis
par le duo Christian Eckert-Michel
Sapin –, les ultimes arbitrages ont
été rendus par Matignon.
Les ministres vont recevoir
avant la fin de la semaine leur
feuille de route – les « lettres plafonds » – fixant leur budget pour
les trois ans à venir : la défense, Bercy, l’écologie et les transports sont
les plus visés par ce plan de réduction des dépenses sans précédent.
Mercredi 9 juillet, le gouvernement présentait à l’Assemblée,
dans le cadre du débat d’orientation des finances publiques, les
grandes lignes du budget triennal
2015-2017, avant la présentation au
Parlement, à l’automne, du projet
de loi de finances pour 2015.
«L’objectif des 18 milliards d’économies prévus par le programme
de stabilité pour l’Etat et ses agences
est maintenu. Il n’est pas revu à la
baisse», se félicite Christian Eckert,
le secrétaire d’Etat chargé du budget. En 2015, l’effort s’élèvera à près
de 8 milliards d’euros. Comme à
l’habitude, cette réduction s’entend par rapport à la progression
attendue des dépenses de l’Etat. En
valeur, celles-ci, hors charge de la
dette et pensions, hors transferts
aux collectivités territoriales et à
l’Union européenne, diminueront
de 1,8 milliard d’euros en 2015,
2,1milliards en 2016 et 2,3milliards
en 2017 par rapport à la loi de finances initiale (LFI) pour 2014.
Sur le périmètre des dépenses
de l’Etat incluant les transferts aux
collectivités territoriales, la baisse
par rapport à la LFI 2014 sera de
4,2 milliards d’euros en 2015,
2,2 milliards supplémentaires en
2015 et 5,2 milliards en 2017, soit
11,6 milliards d’euros en trois ans.
«L’Etat fait plus d’efforts que les collectivités territoriales », fait-on
remarquer à Bercy,alors que cellesci vont voir leurs dotations baisser
de 11 milliards d’euros sur la période. La Sécurité sociale, pour sa
part, contribuera à hauteur de
21 milliards d’euros à la diminution de la dépense publique.
Pour réaliser ces économies, le
gouvernement se défend d’avoir
appliqué « une logique de rabot
Le détail des économies programmées
CRÉDITS ET POSTES PAR MINISTÈRE, en millions d’euros
50
Budget de l’Etat :
milliards d’euros
d’économies programmées sur trois ans...
Par années
21
milliards
en 2015
13
16
milliards
en 2016
milliards
en 2017
Par postes
18
milliards
Etat
11
21
milliards
Sécurité sociale
... impliquant une forte réduction
des dépenses de l’Etat
en milliards d’euros (hors charges de la dette et provisions)
Loi de finances Projet de loi de
initiale 2014
finances 2015 PLF 2016
278,5
Ecart par rapport
à la LFI 2014
274,3
– 4,19
272,1
PLF 2017
266,9
– 6,35
– 11,52
SOURCE : MINISTÈRE DES FINANCES
uniforme ». « Nous avons fait un
travail très fin, très politique, assure M. Eckert. Beaucoup vont parler
de rigueur, je ne pense pas. Il s’agit
plutôt de redonner du sens à la
dépense, de mieux la cibler et de
veiller à ce qu’il n’y ait pas d’effet
récessif. » Au-delà des plafonds par
ministère, c’est une stratégie inédite de maîtrise de la dépense publique qui a été définie, en arrêtant
des principes d’action par des
mesures transversales, qui concerneront tous les ministères.
La programmation triennale
prévoit une maîtrise renforcée des
dépenses des opérateurs de l’Etat,
qui avaient connu lors du précé-
Le Sénat rejette le projet de loi de finances rectificative
Comme pour tous les textes budgétaires présentés depuis l’arrivée de François Hollande au pouvoir, le Sénat a rejeté, mardi
8 juillet, le projet de loi de finances rectificative adopté la semaine précédente par l’Assemblée,
qui prévoit notamment 4 milliards d’euros d’économies. L’opposition s’est réunie en une
milliards
Collectivités
territoriales
majorité de circonstance composée d’élus communistes et de la
droite pour voter contre la première partie du texte, qui porte
sur les recettes. En revanche,
socialistes, écologistes et RDSE
(à majorité PRG) ont voté pour.
Le texte reviendra donc pour
une seconde lecture à l’Assemblée, qui aura le dernier mot.
Projet de loi de finances 2015
Ecart par rapport
à la LFI 2014
Education nationale, enseignement supérieur et recherche
69 157
Défense
31 941
Affaires sociales et santé
15 118
Intérieur
15 020
Finances et comptes publics
13 712
Ecologie, développement durable et énergie
13 033
Travail, emploi et dialogue social
10 437
Logement et égalité des territoires
7 510
Justice
6 369
Affaires étrangères et développement international
4 516
Agriculture, agroalimentaire et forêt
4 071
Culture et communication
3 233
Services du premier ministre
2 057
Outre-mer
2 014
Economie, redressement productif et numérique
1 708
Droits des femmes, ville, jeunesse et sports
914
Décentralisation, réforme de l’Etat et fonction publique
204
dent quinquennat une importante progression. Dès 2015, ils vont
voir leurs moyens limités de
1,1 milliard d’euros par le plafonnement des taxes affectées et les prélèvements sur fonds de roulement. La rationalisation des interventions des agences et des opérateurs va être poursuivie afin de
« renforcer la lisibilité et l’efficacité
de l’action publique », assure Bercy. L’Institut national de la veille
sanitaire (InVS), l’Institut national
de prévention et d’éducation pour
la santé (Inpes) et l’Etablissement
de préparation et de réponse aux
urgences sanitaires (Eprus)
devraient ainsi être regroupés au
sein d’un même institut.
Autre levier d’économies : les
dépenses de fonctionnement de
l’Etat. « La modernisation des
achats publics, la mutualisation et
la simplification des règles administratives et des moyens informatiques permettront de dégager des
marges de manœuvre sans remettre en cause la qualité du service
public », prévoit le gouvernement
dans son rapport préparatoire au
débat d’orientation, que Le Monde
s’est procuré. L’Etat entend également adapter ses services publics
à la nouvelle carte des collectivités
territoriales. Cela devrait se traduirepar une réorganisation des services déconcentrés de l’Etat.
Il s’agit enfin de « mieux cibler »
les interventions de l’Etat. Cela
L’exécutif compte
«mieux cibler»
les interventions
de l’Etat, notamment
sur le logement et les
politiques agricoles
concernera, notamment, les politiques d’intervention sur les zones
franches, le logement ou les politiques agricoles. « Il faut éviter les
empilements de dispositifs et l’arrosage large, qui n’a pas fait la preuve
de son efficacité », défend M.Eckert.
Le budget triennal qui va être
présenté devrait permettre de respecter les missions prioritaires
réaffirmées par François Hollande
tout en prévoyant une stabilité glo-
Créations et
suppressions
de postes
PLF 2016
PLF 2017
1 154
9 421
69 393
69 756
– 643
– 7 500
32 345
32 759
201
– 150
15 395
15 596
44
116
14 819
15 053
– 333
– 2 491
13 373
12 929
– 454
– 515
13 027
13 083
– 346
– 150
9 897
9 207
112
– 319
7 606
7 448
99
600
6 312
6 346
– 50
– 220
4 610
4 347
– 243
– 25
3 995
3 992
– 82
15
3 136
3 057
14
100
2 050
2 037
5
2
2 062
2 104
– 157
– 55
1 684
1 683
– 47
–6
931
956
203
202
–2
bale des effectifs et de la masse
salariale de la fonction publique à
l’horizon 2017. A l’éducation nationale, la création de 29 644 emplois
supplémentaires d’ici à 2017 est
programmée : 9 421 le seront dès
2015, renforcés par le financement
de 69 000 contrats aidés. Dans la
recherche et l’enseignement supérieur, la création de 3 000 emplois
supplémentaires, dont 1 000 en
2015, est prévue.
Le ministère de l’intérieur bénéficiera, lui, de 405 créations d’emplois en 2015. Des moyens supplémentaires vont être accordés à la
mission « immigration, asile et
intégration » avec la mise en
œuvre d’une réforme de l’asile qui
devrait se traduire par une réduction des délais d’instruction. A la
justice, 1 834 emplois supplémentaires vont être créés entre 2015 et
2017, qui contribueront notamment à la création de postes de
conseillers pénitentiaires d’insertion et de probation.
Parmi les postes qui ont fait
polémique ces derniers temps, les
crédits budgétaires de la défense
devraient garantir la mise en
œuvre intégrale de la loi de programmation militaire, grâce à un
deuxième redéploiement de
250 millions d’euros du programme d’investissement d’avenir et
par des ressources supplémentaires exceptionnelles de 500 millions en 2015.
Jusqu’au dernier moment, la
ministre de la culture et de la communication, Aurélie Filippetti,
aura bataillé pour sanctuariser
son budget. Elle y est parvenue, au
final, pour les crédits de la culture,
qui enregistrent une légère progression. Mais au prix d’une mise
à contribution de l’audiovisuel
public, qui va voir la contribution
de l’Etat (300 millions d’euros en
2014) diminuer progressivement
jusqu’à extinction totale en 2017.
Si certains ministères, comme
Bercy et le Quai d’Orsay, se sont
pliés sans difficulté à la discipline
générale, il a fallu, pour d’autres,
réglerlesderniersarbitragesàMatignon,voireà l’Elysée, mêmesi, estime M. Eckert, « dans l’ensemble, les
choses se sont bien passées, il n’y a
pas eu de gros affrontements ». p
Patrick Roger
Manuel Valls parie sur l’essoufflement des «frondes» politiques et syndicales
CENT JOURS et pas d’abdication à
l’horizon, bien au contraire.
Manuel Valls, en poste à Matignon depuis un peu plus de trois
mois, a dû faire face, mardi
8 juillet, à un double front sur sa
gauche. Boycotté à la conférence
sociale par les syndicats CGT, FO
et FSU, combattu à l’Assemblée
par une trentaine de députés PS
qui se sont abstenus lors du vote
du projet de loi de finances rectificative de la sécurité sociale, le premier ministre a néanmoins réussi
à « avancer », son maître mot
depuis douze semaines.
Mais à quel prix politique, à
long terme, pour le gouvernement et pour le président de la
République, alors que l’exécutif
semble de plus en plus se couper
d’une partie de la base électorale
qui a fait sa victoire en 2012 ?
Qu’importent les tensions :
pour l’instant, ça passe, semble
dire M. Valls. Certes, plusieurs syndicats de poids ont claqué la porte
de la conférence sociale, reprochant au premier ministre son
approche du dialogue social. Mais
au final, celui-ci a obtenu mardi
un satisfecit général des partenaires sociaux restés à la grand-messe gouvernementale.
« Elle a été assez constructive »,
a déclaré Pierre Gattaz, le président du Medef. « Il y a des avancées réelles, c’est pour cela que la
CFDT se devait d’être présente. Il
valait mieux être dans la salle
qu’en dehors », s’est félicité le leader du syndicat, Laurent Berger.
Dans son discours de clôture,
M. Valls a présenté une série de
mesures qui, sans être spectaculaires, contentent tous les interlocuteurs qui avaient choisi de rester.
La CFDT a ainsi acquis une extension du dispositif garantie jeunes,
sorte de revenu de solidarité acti-
ve (RSA) pour les moins de 25 ans,
à 50 000 jeunes en 2015 puis
100 000 en 2017. Le syndicat des
cadres CFE-CGC a obtenu des
annonces sur une possible baisse
de la taxation de l’épargne salariale. Et le Medef peut se féliciter du
retour partiel des aides de
1 000 euros à l’embauche d’apprentis qui avaient été supprimées par le gouvernement
Ayrault.
« Postures »
Minorant le boycott des autres
syndicats en « geste ponctuel »
auquel il ne veut pas « donner une
portée excessive », M. Valls s’est
même payé le luxe de remettre
sur la table le sujet « sensible » des
seuils sociaux, alors que M. Hollande n’en avait pas parlé lundi.
Une négociation sur le sujet doit
démarrer cet automne, à la grande satisfaction du patronat.
Au même moment, à l’Assemblée, le gouvernement a fait voter
mardi le volet social du pacte de
responsabilité. Là encore, Matignon ne s’attarde que sur le résultat final, écartant les 35 députés
socialistes « frondeurs » qui se
sont abstenus sur ce texte fondamental, symbole d’une majorité
durablement fissurée. « Ils étaient
41 frondeurs [lors du vote du plan
d’économies de 50 milliards d’euros, le 29 avril]. Ils sont 33. Le gouvernement tient bon et la contestation diminue », estime le député
de l’Essonne Carlos Da Silva, proche de Manuel Valls.
Pour le premier ministre, qui
prend sans cesse à témoin l’opinion publique, les syndicats et les
députés frondeurs ne seraient
que dans des « postures » d’arrièregarde alors que lui incarnerait la
gauche « moderne » qui « bouge ».
« Il n’y a rien de nouveau, ce sont
toujours les mêmes qui contestent,
on ne découvre rien », minimisaitil dimanche 6 juillet, en marge de
son déplacement à Vauvert
(Gard).
Manuel Valls considère qu’il
peut « accélérer » sans craindre
une sortie de route car, à ses yeux,
« il n’y a pas d’alternative » à la
politique qu’il mène avec le chef
de l’Etat. Reprenant en cela la rhétorique du « TINA » (« There is no
alternative ») de l’ex-premier
ministre britannique Margaret
Thatcher dans les années 1980, il
estime que la colère syndicale ne
se traduit pas par des mobilisations d’envergure dans la rue, de
même que la « fronde » d’une partie du PS ne présente pour l’instant aucun débouché politique
crédible.
Toujours populaire selon les
sondages, le premier ministre
entraîne donc avec lui une large
majorité des parlementaires socialistes qui ne souhaitent pas nuire
davantage au gouvernement.
Mais jusqu’à quand ? « Valls va
trop vite, il s’emballe au risque de
s’isoler, car il oublie que sa ligne
politique était ultra-minoritaire à
gauche à la primaire de 2011. Si
demain ses sondages baissent, il
risque de le payer cher », avertit le
député « frondeur » Laurent Baumel (PS, Indre-et-Loire).
L’intéressé balaie l’argument.
« Je sais ce que l’on dit : “Valls, il est
pas mal, mais il n’y arrivera pas,
ça va être trop dur.” Moi, je veux
prouver qu’avec du volontarisme
et de l’énergie, on peut y arriver et
que le climat dans le pays peut
commencer à changer », expliquait-il dimanche lors de son
déplacement à Vauvert. p
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exposé are available on the website of the city of Duisburg.
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rubrique à partir de
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Please note that the negotiation language is German.
-427
av. JC
1772
2001
PALAIS GARNIER
LE
MONDE
DE DEMAIN.
PARLONS-EN
AUJOURD’HUI.
#LeMondeFestival
2014
20-21 SEPT. 2014
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PROGRAMME ET BILLETTERIE SUR LEMONDE.FR/FESTIVAL
0123
france
Jeudi 10 juillet 2014
Un texte de compromis sur la réforme
pénale sauve la peine de probation
Députés et sénateurs ont mis fin mardi au duel entre Manuel Valls et Christiane Taubira
L
a contrainte pénale, cette peine de probation effectuée en
milieuouvert, sansemprisonnement, dans le but de prévenir la
récidive et de favoriser la réinsertion, va finalement voir le jour en
France. C’est la fin d’un long bras de
fer entre la ministre de la justice
Christiane Taubira et le premier
ministre Manuel Valls sur la réforme pénale, par assemblées parlementairesinterposées : la commission mixte paritaire (CMP), chargée mardi 8 juillet de trouver un
accord entre les versions très différentes de l’Assemblée nationale et
du Sénat, a signé un texte commun
enfin de matinée, après une semaine de rudes négociations.
La querelle est ancienne :
Manuel Valls, alors ministre de l’intérieur, avait imposé, en août 2013,
un arbitrage qui vidait en grande
partie de sa substance le projet de
loi de la garde des sceaux sur la peine de probation et la prévention de
larécidive.Christiane Taubira avait
mis son mouchoir dessus en espérant que le Parlement rétablirait
l’équilibre.Or,l’Assembléenationale a adopté le 5 juin une version de
la réforme pénale très compatible
avec les souhaits du nouveau premier ministre. Le rapporteur de la
commission des lois, Dominique
Raimbourg (PS, Loire-Atlantique),
a, contre son sentiment profond,
déployé mille ruses pour ne pas
froisser Matignon.
Le Sénat, au contraire, a voté le
26 juin un texte radical, sous l’impulsion de Jean-Pierre Michel, rapporteur (PS, Haute-Saône), contre
l’avis officiel de Christiane Taubira, à la torture entre son souhait de
revenir à la version initiale de la
chancellerie et sa loyauté gouvernementale. Dominique Raimbourg et Jean-Pierre Michel
étaient bien sûr, au fond, d’accord
sur l’essentiel. Restait à faire avaler la pilule à Matignon.
Ça n’a pas été sans mal. Les deux
rapporteurs, appuyés par les deux
présidents des commissions des
lois, Jean-Jacques Urvoas pour l’Assemblée et Jean-Pierre Sueur pour
le Sénat, ont rudement négocié
pendant une semaine pour sauver
l’essentiel d’un texte dont le premier ministre ne voulait pas.
Les sénateurs ont clairement
indiqué qu’il n’était pas question
de céder sur la suppression des tribunaux correctionnels pour
mineurs, une réforme de Nicolas
Sarkozy contestée par tous les professionnels, mais dont Manuel
Valls s’accommodait fort bien
pour ne pas laisser de place au
moindre soupçon de laxisme. Il a
fallu attendre la veille de la CMP,
lundi 7 juillet, pour débloquer le
processus : la chancellerie s’est
engagée par écrit, dans un commu-
Prostitution: le Sénat
supprime en commission
la pénalisation des clients
La députée PS Maud Olivier plaide pour que
soit rétabli un des «piliers» de sa proposition
L
La garde des sceaux, Christiane Taubira, à l’Assemblée nationale, le 4 juin. FRANÇOIS GUILLOT/AFP
niqué publié à 17 heures, à les supprimer « au premier semestre
2015 ». Le Sénats’en estsatisfait et le
premier ministre a enfin signé la
lettre de mission qui convoquait la
CMP quelques heures plus tard.
Le texte final est évidemment
un compromis, et personne ne
doute qu’il faudra remettre bientôt l’ouvrage sur le métier. La chancellerie a d’ailleurs prévu de faire
un point dans deux ans sur l’application de la réforme et ses conséquences, « qui méritent d’être très
finement analysées », indique
Dominique Raimbourg.
Chaque assemblée a fait un pas
vers l’autre. Les peines planchers
sont bel et bien supprimées – les
deux chambres étaient d’accord.
La contrainte pénale est créée,
mais dans la version de l’Assemblée : elle pourra s’appliquer aux
délits punis d’une peine d’emprisonnement d’un maximum de
cinq ans, avant d’être étendue à
tous les délits au 1er janvier 2017. Le
Sénat prévoyaitde larendreobligatoire pour une liste nominative de
petits délits, histoire de forcer la
main aux magistrats. Cette option
sera examinée dans deux ans par
le gouvernement.
Le Sénat a en revanche obtenu
de maintenir la possibilité d’aménager les peines des condamnés à
deux ans de prison ferme, ou à un
an pour les récidivistes, comme
La victoire, discrète,
après un an et demi
de pesants combats,
revient finalement
à la garde des sceaux
c’est le cas aujourd’hui. L’Assemblée voulait revenir sur ces seuils,
sous l’amicale pression de Manuel
Valls, au risque d’incarcérer les
tout petits délinquants dans des
maisons d’arrêt déjà saturées.
Un autre point hérissait les
sénateurs : la surveillance judiciaire des sortants de prison, votée par
l’Assemblée nationale, qui donnait à la police et aux préfets des
pouvoirs exorbitants. Le recours
L’USM satisfaite d’une version « davantage équilibrée »
L’Union syndicale des magistrats
(USM, majoritaire) était dubitative quant aux conclusions de la
conférence de consensus qui
avaient servi de préparation à la
loi en février 2013, elle s’inquiétait du texte de l’Assemblée et
était hostile à celui du Sénat. Elle
s’est finalement félicitée mardi
8juillet du compromis du texte,
« davantage équilibré », qui vient
« étoffer l’éventail des peines pro-
noncées par la juridiction de jugement, lui permettant d’adapter au
mieux la peine à la gravité des
faits et à la personnalité de son
auteur ». L’USM constate que « la
majeure partie de ses propositions sur le respect des libertés
individuelles mais également sur
un objectif d’efficacité et de pragmatisme a été suivie », mais reste
« très inquiète » des moyens
affectés à la réforme.
aux écoutes et à la géolocalisation
sera finalement réservé aux plus
graves infractions.
Enfin, le suivi des personnes
sous contrainte pénale sera réservé, après jugement, aux services
pénitentiairesd’insertionetdeprobation, comme l’avait prévu l’Assemblée, et non partagé avec les
associations, ce qui inquiétait les
professionnels. Le Sénat a obtenu
l’atténuation des peines pour les
malades mentaux incarcérés, avec
desobligationsdesoinetlasuspension de la détention provisoire
pour des raisons de santé.
La victoire, discrète, après un an
et demi de pesants combats,
revient finalement à Christiane
Taubira, qui ne peut s’en réjouir, au
risque de froisser son premier
ministre : la garde des sceaux s’est
poliment déclarée « très satisfaite
des travaux conduits par les deux
assembléesdans l’examen de ce texte important », mais doit une fière
chandelle aux deux rapporteurs et
aux présidents des commissions
des lois, notamment Jean-Pierre
Sueur, qui a joué un rôle décisif.
Le texte, qui devrait être définitivement adopté par l’Assemblée
le 16 juillet et par le Sénat le 17, est
certes imparfait, mais pose enfin
les bases d’une nouvelle peine, la
contrainte pénale, dont l’avenir
dépend de la façon dont les magistrats vont s’en saisir. Mais la réforme traduit un réel changement de
philosophie. Il existe désormais
trois types de sanctions pénales
pour les délits : la prison, la probation et les amendes. C’est déjà une
petite révolution. p
Franck Johannès
a pénalisation des clients de
prostituées par une amende
de 1 500 euros ne figure plus
dans la proposition de loi de « lutte
contre le système prostitutionnel »
votée par l’Assemblée nationale
fin novembre 2013. Les sénateurs
de la commission spéciale constituée pour l’occasion ont voté sa
suppression lors de l’examen à
huis clos du texte, par 16 voix,
contre 12 favorables et 2 abstentions. Le rapport de la commission
spéciale a ensuite été adopté.
Cette suppression n’est en théorie pas définitive. La poursuite du
parcours parlementaire du texte
pourrait changer la donne. « Après
untelvote,ilne sera pasinscrità l’ordredu jour auSénat », préditcependant la sénatrice (Val-de-Marne,
EELV) Esther Benbassa.
Depuis plusieurs semaines, les
doutes sur la volonté gouvernementale de le voir adopté se font
jour. Alors que la pénalisation des
clients est soutenue par la ministre
des droits des femmes, Najat Vallaud-Belkacem, la ministre de la
justice, Christiane Taubira, n’a pas
caché ses interrogations lors de
son audition par les sénateurs, le
2 juillet. Elle avait cependant appelé à « ne pas céder sur les principes ».
Le vote du Sénat est en tout cas
uncoup dur pour l’auteur dela proposition de loi, la députée PS de
l’Essonne Maud Olivier, qui avait
déjà dû remplacer, au moment de
déposer son texte, la peine de prison avec sursis pour les clients par
une amende. Elle appelle dans un
communiqué les parlementaires
et le gouvernement à « rétablir » ce
qui constitue l’un des « piliers » de
la proposition de loi et demande
son inscription à l’ordre du jour.
Selon les partisans de la pénalisation, dissuader les clients est
indispensable à la lutte contre la
prostitution, ainsi que le proxénétisme et la traite des êtres
humains qui lui sont associés. Elle
permet aussi d’affirmer une opposition à la « marchandisation du
corps humain ».
« Problème de cohérence »
La proposition de loi prévoit
également la suppression du délit
de racolage, afin d’inverser la charge pénale qui pèse aujourd’hui sur
les prostituées. Pour ses opposants, cependant, la mesure risque
d’avoir des effets délétères : déplacements des personnes prostituées vers des lieux encore plus
éloignés, donc plus exposés au
danger, hausse du recours aux
intermédiaires, exigences accrues
des clients, encouragés par la baisse de la demande à exiger des rapports sans préservatif… Certains
de ces effets sont déjà décrits par
des personnes prostituées, car de
nombreux clients pensent la
mesure déjà en application.
Ce sont ces raisons qui ont été
mises en avant par le sénateur
(Manche, PS) Jean-Pierre Godefroy,
quiprésidaitla commission spéciale, avec ses collègues, dans leur
amendement.Enoutre,ilsontajouté des motifs juridiques. « Cette disposition pose un problème de cohérence, car on ne pourra pasconcilier
juridiquementlefaitquelaprostitution soit autorisée en France, ajouté
àl’absence desanction detout racolage, avec la pénalisation des
clients », écrivent-ils dans leur long
texte de présentation. Selon eux,
les moyens mis en œuvre pour verbaliser les clients « pourraient être
autrement mieux employés » s’ils
étaient affectés à la lutte contre le
proxénétisme et la traite. p
Gaëlle Dupont
Laïcité Deux femmes refoulées de Wissous Plage
Richard Trinquier, maire UMP de Wissous (Essonne), a refusé le
5 juillet l’entrée de la plage artificielle de la ville à deux femmes
voilées au motif que la loi de 2004 sur le port de signes religieux
en milieu scolaire s’applique au lieu. L’association locale Al Madina, qui veut mettre en place des cours d’arabe et de religion dans
la ville, menace de porter plainte contre le maire. – (AFP.)
Ile-de-France Coup d’accélérateur pour le métro
du Grand Paris
Manuel Valls a annoncé mercredi 9 juillet que les aéroports de
Roissy et d’Orly ainsi que le plateau de Saclay (Essonne) seraient
desservis par le futur métro automatique, Grand Paris Express, en
2024 plutôt qu’en 2027, comme le prévoyait le calendrier initial.
Politique Création d’un nouveau courant au PS
Les députés socialistes Karine Berger (Hautes-Alpes), Yann Galut
(Cher), Alexis Bachelay (Hauts-de-Seine) et Valérie Rabault (Tarnet-Garonne), rapporteure du budget, ont annoncé mercredi
9 juillet la création d’une nouvelle sensibilité au Parti socialiste :
Cohérence socialiste. Ils devraient formuler des propositions de
fond précises lors de l’université d’été de La Rochelle, fin août.
L’OCDE note la gestion de l’argent de poche des élèves
U
n « PISA nouveau » est
livré mercredi 9 juillet.
Non contente d’évaluer le
niveau des élèves de 15 ans en maîtrise de leur langue maternelle et
en sciences, dans son Programme
de suivi des acquis des élèves
(PISA) devenu une référence internationale, l’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) présente « les compétences en culture financière des
élèves de 15 ans » issus de 18 pays.
Les petits Français s’y retrouvent (comme d’ordinaire) mal
classés. Ils sont au 10e rang
ex aequo avec la Fédération de
Russie et tout près de la Slovénie.
Pas sûr, cette fois, que les piètres
performances de la France émeuvent beaucoup. Le plus intéressant dans ces résultats reste le
fait que 80 % ont un compte bancaire à 15 ans et que 67 % gagnent
déjà de l’argent. Fallait-il entrer
dans le protocole de l’OCDE pour
apprendre cette information
qu’un institut de sondage aurait
fait émerger sans faire plancher
1 068 élèves de 225 établissements ? En 2010, quand cette nouvelle évaluation a été créée, la
question s’est posée.
Vision du monde
A l’époque, le ministère français de l’éducation nationale est
partagé. D’un côté, la Direction de
l’évaluation, de la prospective et
de la performance (DEPP) émet
un avis « réservé » sur la participation de la France à cette enquête.
Façon polie de faire savoir qu’il
est inutile d’évaluer les élèves
français en gestion de leurs finances personnelles. La DEPP avance
deux raisons. D’abord ces compétences sont déjà mesurées dans
l’évaluation de mathématiques
de la même OCDE. Et puis on n’en-
seigne même pas la gestion financière dans le système français !
Seuls 20 % des élèves de seconde
générale y sont sensibilisés.
Le ministre de l’éducation de
l’époque, Luc Chatel, ne l’entend
pas de cette oreille et décide que
la France en sera coûte que coûte.
Cette évaluation n’aura pas de lendemain : la gauche a annoncé le
retrait de la France de la session
2015. Les Allemands et les Britanniques, eux, avaient refusé d’emblée cette drôle d’évaluation.
L’organisation internationale
avait pourtant bien fait les choses. En rendant gratuite la participation à la première session, elle
espérait appâter. L’OCDE cherche
à innover et à se diversifier dans
ce secteur lucratif de l’évaluation
des élèves, où elle s’est imposée.
Outre cette envie de devenir
évaluateur à tout-va, l’OCDE veut
aussi faire passer sa vision du
monde. En avril 2010, devant le
comité directeur de PISA, le secrétariat général de l’OCDE rappelait
que « la crise financière qu’a traversée le monde entier en
2009-2010 a montré la nécessité
d’avoir des systèmes financiers
bien gérés. Les pays dont les populations ont le plus de compétences
financières pourront tirer parti de
ces ressources pour mieux relever
les défis financiers auxquels ils
seront confrontés dans l’avenir ».
Pour ceux qui n’auraient pas
compris, la crise financière mondiale était moins due à la rapacité
des banques et à la déréglementation des marchés financiers
qu’au manque d’éducation des
populations. Avec un tel raisonnement, il est urgent que chaque
adolescent apprenne à gérer son
argent de poche : il en va de l’avenir de la planète. p
Maryline Baumard
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RetRouv ion 2013
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ANNONCE LÉGALE
DÉTENTEURS DES TITRES DE LA DETTE ARGENTINE.
OFFRES D’ÉCHANGE SOUVERAIN 2005-2010
RÉGIES PAR LA LOI ARGENTINE
La République Argentine fait savoir aux Détenteurs des titres de la dette
argentine ayant adhéré aux Offres d’échange souverain de 2005 et de 2010
régies par la Loi argentine (« Titres locaux ») qu’elle a réalisé en temps et
en forme le paiement des montants correspondant à l’échéance des intérêts
des nouveaux titres émis dans le cadre des Offres d’échange souverain
2005-2010, en exécution des obligations assumées par notre pays. Ces
fonds doivent être distribués aux Détenteurs par les agences de compensation intermédiaires.
Dans ce sens, il est à souligner que le 27 juin 2014 la Cour du District Sud
de New York a reconnu, suite à une présentation réalisée par la Citibank,
que les ordres pari passu prononcés dans le cadre de l’affaire NML Capital,
Ltd., et al, v. Republic of Argentina n’empêchent pas le recouvrement des
titres régis par la loi argentine, si bien que les montants déposés en temps et
en forme par la République Argentine devraient être reçus normalement
par les Détenteurs des titres locaux.
En tout état de cause, il est communiqué que la conduite de tout agent intermédiaire de ne pas distribuer les montants déposés aux Offres d’échange
souverain 2005-2010 des titres locaux est contraire à leurs obligations légales et/ou contractuelles et porte atteinte aux droits et aux intérêts des
Détenteurs ayant adhéré aux Offres d’échange souverain 2005-2010.
Détenteurs des titres de la dette argentine.
Offres d’échange souverain 2005-2010 régies par la loi des États-Unis
L
a République Argentinefait savoir
aux Détenteurs des titres de la dette
argentine ayant adhéré aux Offres
d’échange souverain de 2005 et de
2010 régies par la Loi des États-Unis
que, en exécution des obligations assumées par
notre pays dans les Prospectus 2005 et 2010 et
dans le Trust Indenture du 2 juin 2005 modifié le
30 avril 2010, la République Argentine – tel qu’il
a été informé par l’Annonce légale du 27 juin
2014 – a réalisé en temps et en forme le dépôt des
montants correspondant à l’échéance des intérêts des nouveaux titres émis dans le cadre des
Offres d’échange souverain 2005-2010.
Ces fonds doivent être distribués aux Détenteurs
par la Bank of New York Mellon, en tant
qu’Agent fiduciaire ainsi que par les banques intermédiaires et agents de paiement respectifs, qui
ont déjà été dûment enjoints par la République
Argentine afin qu’ils exécutent leurs obligations
concernant le recouvrement par les Détenteurs
des fonds déjà déposés en temps et en forme par
la République Argentine, et qui font partie de
leur propriété.
Le 27 juin 2014, dans le cadre de l’affaire NML
Capital, Ltd., et al, v. Republic of Argentina,
Monsieur le Juge Thomas Griesa a empêché la
distribution des fonds déposés en temps et en
forme par la République Argentine pour
l’échéance des intérêts ayant eu lieu le 30 juin
2014. Ces sommes font partie de la propriété des
Détenteurs ayant adhéré aux Offres d’échange
souverain 2005-2010, dans le cadre du Trust
Indenture et de la législation applicable.
La République Argentine ratifie que les Détenteurs ont un droit absolu et inconditionnel au
recouvrement des montants déposés par la République Argentine sur le compte fiduciaire de
l’Agent fiduciaire (Bank of New York Mellon),
ce patrimoine étant une propriété exclusive des
Détenteurs, et aucun tiers ne pouvant porter atteinte audit droit. L’Agent fiduciaire (Bank of
New York Mellon) a l’obligation, dans tous les
cas, d’administrer et de distribuer ledit patrimoine au bénéfice des Détenteurs, ne pouvant ni
retenir ni rembourser de manière valable ces
montants à la République Argentine.
Par conséquent, la conduite de l’Agent fiduciaire
de ne pas distribuer les montants déposés aux
Détenteurs des Offres d’échange souverain 20052010 (ou toute demande en justice dans ce but)
entraîne une violation de ses obligations face au
Trust Indenture, de la législation applicable, et
porte atteinte aux droits et aux intérêts des Détenteurs ayant adhéré aux Offres d’échange souverain 2005-2010, conformément aux Sections
3.1, 4.5, 4.9 et 5.1, entre autres, du Trust Indenture.
La présente annonce légale est publiée dans le
but de communiquer aux Détenteurs ayant adhéré aux Offres d’échange souverain de 2005 et de
2010 régies par la Loi des États-Unis l’exécution
effective par la République Argentine de ses obligations par rapport à ces derniers, des Prospectus respectifs et du Trust Indenture, dans le cadre
des législations argentine et étrangère applicables, toute responsabilité et/ou inexécution
susceptible d’être imputée à la République Argentine étant écartée dans le cas où un ordre judiciaire ou une conduite de l’Agent fiduciaire
(Bank of New York Mellon) viendrait directement ou indirectement à obstruer, empêcher ou
suspendre le recouvrement de l’échéance des intérêts ayant eu lieu le 30 juin 2014, et/ou à porter sur le patrimoine fiduciaire des Détenteurs
déposé le 27 juin 2014 sur les comptes de l’Agent
fiduciaire (Bank of New York Mellon).
i- Le Trust Indenture (du 2 juin 2005, modifié le
30 avril 2010) établit, dans ses parties pertinentes :
Article 3.5. Paiements. (a) Afin de prévoir le
paiement du capital et des intérêts concernant les
Titres de toute Série au fur et à mesure que ceuxci deviennent exigibles, la République s’engage à
payer, directement ou indirectement, sur un
compte du Fiduciaire dans le Bureau du fidéicommis sociétaire ou dans le Bureau du Fiduciaire convenu par celui-ci et la République (ou,
en cas de paiements libellés en une monnaie
autre que le dollar américain, dans le lieu établi
dans une Autorisation), au plus tard à 13h00,
heure locale du lieu de paiement, au plus tard le
jour ouvrable avant chaque date de paiement des
intérêts ou chaque date de paiement du capital
(ci-après la « Date de paiement ») de ces Titres,
avec des fonds immédiatement disponibles en
dollars américains (ou dans la monnaie spécifiée
dans les Termes des titres de la série par rapport
à laquelle le paiement doit être effectué), un
montant qui (conjointement avec les fonds que le
Fiduciaire aurait à ce moment-là et qui se trouveraient disponibles à cette fin) sera suffisant pour
régler le montant total des intérêts, du capital ou
des deux, ainsi que tout autre montant qui, le cas
échéant, deviendrait exigible concernant ces
Titres dans la Date de paiement mentionnée. Sur
réception effective desdits fonds conformément
au présent Article 3.5(a), le Fiduciaire appliquera ce montant au paiement devant être fait à cette
Date de paiement. Tant que cette application
n’est pas effectuée, le Fiduciaire maintiendra ces
montants en vertu d’un fidéicommis au bénéfice
exclusif du Fiduciaire et des Détenteurs ayant
droit à ces montants conformément à leurs droits
respectifs. La République n’aura aucun droit sur
ces montants.
Article 4.5. Application du produit. Toute
somme reçue par le Fiduciaire conformément à
cet article sera appliquée en suivant l’ordre précisé par la suite, à la date ou aux dates établie(s)
par le Fiduciaire et, dans le cas où se réaliserait la
distribution de ces montants en tant qu’acompte
du capital ou des intérêts, après avoir présenté les
Titres de la série pour laquelle les sommes auraient été reçues et avoir apposé un sceau (ou
tout autre notation) faisant foi du paiement ; ou
bien après avoir émis des Titres pour des montants de capital réduits en échange des Titres présentés, dans le cas où ils seraient payés partiellement ; où après leur remise, dans le cas où le
paiement serait total :
PREMIÈREMENT : Au paiement de tous les
montants dus au Fiduciaire ou tout représentant
ou Partie désignée du Fiduciaire par rapport au
présent Contrat ou aux Titres de toute série, y
compris (à titre d’exemple) les montants dus
conformément à l’Article 5.6 ;
DEUXIÈMEMENT : Dans le cas où le capital
des Titres de cette série ne serait pas à ce moment-là exigible, au paiement des intérêts encourus et en demeure concernant cette Série de titres
selon l’ordre d’échéance des mensualités desdits
intérêts, les intérêts étant calculés (dans la mesure où ils n’auraient pas été recouvrés par le Fiduciaire) par rapport à ces mensualités échues
des intérêts au même taux que celui stipulé dans
ces Titres, et devant réaliser ces paiements proportionnellement aux Personnes ayant droit à
ceux-là, sans aucune discrimination ou préférence ;
TROISIÈMEMENT : Dans le cas où le capital
des Titres de cette série serait à ce moment-là
exigible, au paiement du montant total étant dû
à ce moment-là et pas encore payé par rapport à
tous les Titres de cette série, correspondant au
capital et aux intérêts, au taux d’intérêt stipulé
dans ces Titres ; dans le cas où ces sommes s’avéreraient insuffisantes pour régler de manière intégrale le montant total exigible concernant les
Titres de cette série, au paiement du capital et
des intérêts, sans aucune préférence ou priorité
du capital sur les intérêts, des intérêts sur le capital, de toute mensualité des intérêts sur une autre
mensualité des intérêts, ou de tout Titre de cette
série sur un autre Titre de la même série, de manière proportionnelle au montant total du capital
et des intérêts encourus mais non pas réglés.
Article 4.9. Droit inconditionnel des Détenteurs
des Titres à percevoir le capital et les intérêts.
Sous réserve des dispositions de l’article 4.8, tout
Détenteur des titres aura le droit absolu et inconditionnel à percevoir le paiement du capital et
des intérêts concernant leur Titre à la date
d’échéance établie pour ce paiement exprimée
sur le Titres (avec des modifications possibles
conformément à l’article 7) et à entamer des actions dans le but d’en exiger tout paiement. Ce
droit ne sera pas modifié sans le consentement
de ce Détenteur.
Article 5.1. Obligations et responsabilités du Fiduciaire. Le Fiduciaire s’engage à exécuter seulement les obligations spécifiquement établies par
le présent Contrat.
Il ne sera pas interprété que les dispositions du
présent Contrat libèrent le Fiduciaire de responsabilité pour ses actions ou omissions fautives, sa
mauvaise foi, ses actes dolosifs ou l’inexécution
de ses devoirs fiduciaires, compte tenu des dispositions du présent Contrat et/ou des Termes des
Titres de toute série lui conférant des facultés fiduciaires, des facultés de tout autre nature, des
autorisations ou des facultés discrétionnaires,
parmi lesquelles sont comprises (à titre
d’exemple) :
(a) Les devoirs et les obligations du Fiduciaire
seront déterminés exclusivement par les dispositions expresses du présent Contrat et le Fiduciaire n’aura aucune responsabilité au-delà de
l’inexécution des devoirs et des obligations spécifiquement établis dans le présent Contrat. Ne
sera pas non plus imputé au Fiduciaire un engagement ou obligation implicite dans le présent
Contrat ;
(b) s’il n’y a pas de faute grave ou comportement
dolosif du Fiduciaire, celui-ci pourra se fonder
de manière concluante, en tout ce qui concerne
la véracité des déclarations et l’exactitude des
opinions exprimées dans le présent, dans les déclarations, certificats ou opinions facilités au Fiduciaire, remplissant les conditions du présent
Contrat ; mais dans le cas des déclarations, des
certificats ou des opinions qui, conformément
aux dispositions du présent contrat, doivent se
faciliter spécifiquement au Fiduciaire, celui-ci
aura l’obligation de les inspecter afin de déterminer s’ils remplissent formellement les conditions
du présent Contrat seulement ;
(c) le Fiduciaire n’aura aucune responsabilité
pour les erreurs d’appréciation commises de
bonne foi par un Fonctionnaire responsable ou
des Fonctionnaires responsables du Fiduciaire, à
moins qu’il soit prouvé que le Fiduciaire a com-
mis une faute grave dans la détermination des
faits pertinents ;
(d) le Fiduciaire n’aura aucune responsabilité
pour toute action ou omission propre concernant les Titres de toute série faite de bonne fois
conformément aux instructions des Détenteurs
des titres de, au moins, la Majorité du montant
du capital agrégé à payer des Titres de cette série,
ce qui comprend (entre autres) des questions relatives au moment, à la méthode et au lieu de
promotion d’une procédure pour se prévaloir
d’un recours dont dispose le Fiduciaire ou à
l’exercice d’une faculté fiduciaire ou de tout
autre nature étant conférée au Fiduciaire conformément au présent Contrat ;
(e) sous réserve de tout autre disposition établie
dans le présent Contrat, en aucun cas ne sera responsable ni le Fiduciaire ni aucun agent de paiement fiduciaire ni aucune Partie désignée par le
Fiduciaire de conformité ou en relation avec le
présent Contrat pour des dommages et intérêts
indirects, spéciaux, incidents, punitifs ou médiats de toute nature, y compris, entre autres, le
manque à gagner, soit prévisible ou non, même
si le Fiduciaire ou si cet agent de paiement fiduciaire ou Partie désignée a été informé de cette
possibilité et au-delà de la forme de l’action pour
laquelle ces dommages et intérêts seraient réclamés ;
(f) dans le cas ou une inexécution aurait lieu
conformément au présent concernant les Titres
de toute série, et dans le cas où le Fiduciaire aurait une connaissance effective de cette inexécution, le Fiduciaire notifiera cette inexécution aux
Détenteurs des Titres ; cependant, il est établi
que, en cas d’inexécution du caractère indiqué
dans l’article 4.1(ii) concernant les Titres de cette
série, ladite notification sera faite au moins 30
jours suivant le moment de cette inexécution.
Aux fins du présent Article, le terme « inexécution » signifie tout événement qui constitue ou
qui, après la notification de l’écoulement du
temps, deviendrait un Cas d’inexécution concernant les Titres de cette série ; et
(g) aucune des dispositions contenues dans le
présent Contrat ou dans les termes et conditions
des Titres de toute série requerra que le Fiduciaire utilise, paie en avance ou risque ses propres
fonds ou, d’une autre manière, engage sa responsabilité patrimoniale personnelle pour cause de
l’exécution de ses devoirs ou de l’exercice de ses
droits ou facultés, dans le cas où il y aurait des
motifs raisonnables à croire qu’il ne peut pas être
garanti au Fiduciaire de manière satisfaisante le
remboursement desdits fonds ou une indemnité
suffisante pour cette responsabilité ;
En cas de Titres d’une série régis par la loi d’Angleterre, ne sera appliqué l’article 1er de la Loi
des fiduciaires de 2000 (Trustee Act 2000) du
Royaume-Uni à aucune fonction du Fiduciaire.
Il est établi que, dans le cas où le Fiduciaire ne
montrerait pas le degré de diligence requise pour
sa qualité de fiduciaire, compte tenu des dispositions du présent Contrat et/ou des Termes de
titres de toute série lui conférant des facultés fiduciaires, des facultés de toute nature, des autorisations ou des facultés discrétionnaires, aucune
disposition du présent Contrat le libérera ni lui
donnera d’indemnité par rapport à toute responsabilité qui autrement lui serait attribuée pour
faute grave, inexécution dolosive, inexécution
des devoirs ou inexécution du fidéicommis dont
il serait responsable.
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Détenteurs des titres de la dette argentine.
Offres d’échange souverain 2005-2010 régies par la loi d’Angleterre et du Pays de Galles
L
a République Argentine fait savoir
aux Détenteurs des titres de la dette
argentine ayant adhéré aux Offres
d’échange souverain de 2005 et de
2010 régies par la Loi d’Angleterre et
du Pays de Galles (« Euro Bonos ») que, en exécution des obligations assumées par notre pays
dans les Prospectus 2005 et 2010 et dans le Trust
Indenture du 2 juin 2005 modifié le 30 avril
2010, la République Argentine – tel qu’il a été
informé par l’Annonce légale du 27 juin 2014 – a
réalisé en temps et en forme le paiement des
montants correspondant à l’échéance des intérêts des nouveaux titres émis dans le cadre des
Offres d’échange souverain 2005-2010.
Ces fonds doivent être distribués aux Détenteurs
par la Bank of New York Mellon, en tant
qu’Agent fiduciaire ainsi que par les banques intermédiaires et agents de paiement respectifs, qui
ont déjà été dûment enjoints par la République
Argentine afin qu’ils exécutent leurs obligations
concernant le recouvrement par les Détenteurs
des fonds déjà déposés en temps et en forme par
la République Argentine, et qui font partie de
leur propriété.
Le 27 juin 2014, dans le cadre de l’affaire NML
Capital, Ltd., et al, v. Republic of Argentina,
Monsieur le Juge Thomas Griesa a empêché la
distribution des fonds déposés en temps et en
forme par la République Argentine pour
l’échéance des intérêts ayant eu lieu le 30 juin
2014. Ces sommes font partie de la propriété des
Détenteurs ayant adhéré aux Offres d’échange
souverain 2005-2010, dans le cadre du Trust
Indenture et de la législation applicable.
La République Argentine ratifie que les Détenteurs ont un droit absolu et inconditionnel au
recouvrement des montants déposés par la République Argentine sur le compte fiduciaire de
l’Agent fiduciaire (Bank of New York Mellon),
ce patrimoine étant une propriété exclusive des
Détenteurs, et aucun tiers ne pouvant porter atteinte audit droit. L’Agent fiduciaire (Bank of
New York Mellon) a l’obligation, dans tous les
cas, d’administrer et de distribuer ledit patrimoine au bénéfice des Détenteurs, ne pouvant ni
retenir ni rembourser de manière valable ces
montants à la République Argentine.
Il est aussi à ajouter que les titres « Euro Bonds »
se trouvent hors de la juridiction de la Cour du
District Sud de New York à la charge dudit magistrat. Ainsi, tel qu’il a été dénoncé par le
Groupe des détenteurs des titres appelé « Euro
Bondholders » lors de sa présentation du 29 juin
2014, Monsieur le Juge Thomas Griesa a outrepassé sa juridiction en prononçant les ordres pari
passu, lesquels ne peuvent aucunement atteindre
de manière valable la procédure de recouvrement des titres « Euro Bonds ». Premièrement,
parce qu’un juge des États-Unis n’a pas compétence pour obstruer des tiers étrangers dans
l’exécution de leurs obligations contractuelles et
légales sur un territoire étranger, en vertu de la
loi étrangère. Et deuxièmement, parce qu’un
juge des États-Unis n’a pas non plus compétence
pour porter atteinte au recouvrement des titres
régis par les lois d’Angleterre et du Pays de
Galles et payés en euros conformément à une
procédure de règlement qui ne passe pas par les
États-Unis.
De fait, le 27 juin 2014, la Cour du District Sud
de New York a statué, suite à une présentation
réalisée par la Citibank, que les ordres pari passu
prononcés dans le cadre de l’affaire NML Capital, Ltd., et al, v. Republic of Argentina n’empêchent pas le recouvrement des titres régis par
la loi argentine, reconnaissant ainsi qu’elle n’a
pas juridiction sur ces derniers.
De plus, il est à ajouter que le système d’inscription en comptes (book-entry) des titres maintenus à Euroclear S.A./N.V. jouit d’immunité inconditionnelle de saisie conformément à
l’Article 11 du Décret royal coordonnée N° 62
du 10 novembre 1967, qui est à son tour renforcé
par l’Article 9 de la Loi du 28 avril 1999 mettant
en place la Directive concernant le caractère définitif du règlement de l’UE tel qu’amendé par
l’Article 15 de la Loi du 19 novembre 2004 et des
lois ultérieures, protégeant virtuellement ainsi
tout transfert de sommes d’argent fait à Eu-
roclear et des comptes de règlement en espèces
maintenus à Euroclear.
Par conséquent, la conduite de l’Agent fiduciaire
de ne pas distribuer les montants déposés aux
Détenteurs des Offres d’échange souverain 20052010 (ou toute demande en justice dans ce but)
entraîne une violation de ses obligations face au
Trust Indenture, de la législation applicable, et
porte atteinte aux droits et aux intérêts des Détenteurs ayant adhéré aux Offres d’échange souverain 2005-2010, conformément aux Sections
3.1, 4.5, 4.9 et 5.1, entre autres, du Trust Indenture.
La présente annonce légale est publiée dans le
but de communiquer aux Détenteurs ayant adhéré aux Offres d’échange souverain de 2005 et de
2010 régies par la Loi d’Angleterre et du Pays de
Galles l’exécution effective par la République
Argentine de ses obligations par rapport à ces
derniers, des Prospectus respectifs et du Trust
Indenture, dans le cadre des législations argentine et étrangère applicables, toute responsabilité
et/ou inexécution susceptible d’être imputée à la
République Argentine étant écartée dans le cas
où un ordre judiciaire ou une conduite de l’Agent
fiduciaire (Bank of New York Mellon) viendrait
directement ou indirectement à obstruer, empêcher ou suspendre le recouvrement de l’échéance
des intérêts ayant eu lieu le 30 juin 2014, et/ou à
porter sur le patrimoine fiduciaire des Détenteurs déposé le 27 juin 2014 sur les comptes de
l’Agent fiduciaire (Bank of New York Mellon).
i- constitué par Knighthead Capital Management, LLC, Redwood Capital Management,
LLC, Perry Capital LLC, VR Global Partners,
LP, Monarch Master Funding 2 (Luxembourg)
S.à.r.l., Silver Point Capital LP, QVT Fund IV
LP, QVT Fund V LP, Quintessence Fund LP et
Centerbridge Partners.
ii. “Aucun participant (autre que l’opérateur ou
l’agent de réglement), aucune contrepartie et
aucun tiers ne pourra saisir, séquestrer ou bloquer autrement un compte de réglement en espèces maintenu auprès de l´opérateur d’un Systeme o d’un agent de réglement en espèces, ou
un transfert en espèces, à travers une institution
financière de Belgique ou étrangère, pour crédit
sur ce compte de reglement en espèces” (article 9
de la Loi belge du 28 avril 1999 mettant en
oeuvre la Directive sur la Fermeté du Réglement
de l ‘Union Européene, avec les amendements
contenus à l’article 15 de la loi du 19 novembre
2004).”
iii- Le Trust Indenture (du 2 juin 2005, modifié le
30 avril 2010) établit, dans ses parties pertinentes
Article 3.5. Paiements. (a) Afin de prévoir le
paiement du capital et des intérêts concernant les
Titres de toute Série au fur et à mesure que ceuxci deviennent exigibles, la République s’engage à
payer, directement ou indirectement, sur un
compte du Fiduciaire dans le Bureau du fidéicommis sociétaire ou dans le Bureau du Fiduciaire convenu par celui-ci et la République (ou,
en cas de paiements libellés en une monnaie
autre que le dollar américain, dans le lieu établi
dans une Autorisation), au plus tard à 13h00,
heure locale du lieu de paiement, au plus tard le
jour ouvrable avant chaque date de paiement des
intérêts ou chaque date de paiement du capital
(ci-après la « Date de paiement ») de ces Titres,
avec des fonds immédiatement disponibles en
dollars américains (ou dans la monnaie spécifiée
dans les Termes des titres de la série par rapport
à laquelle le paiement doit être effectué), un
montant qui (conjointement avec les fonds que le
Fiduciaire aurait à ce moment-là et qui se trouveraient disponibles à cette fin) sera suffisant pour
régler le montant total des intérêts, du capital ou
des deux, ainsi que tout autre montant qui, le cas
échéant, deviendrait exigible concernant ces
Titres dans la Date de paiement mentionnée. Sur
réception effective desdits fonds conformément
au présent Article 3.5(a), le Fiduciaire appliquera ce montant au paiement devant être fait à cette
Date de paiement. Tant que cette application
n’est pas effectuée, le Fiduciaire maintiendra ces
montants en vertu d’un fidéicommis au bénéfice
exclusif du Fiduciaire et des Détenteurs ayant
droit à ces montants conformément à leurs droits
respectifs. La République n’aura aucun droit sur
ces montants.
Article 4.5. Application du produit. Toute
somme reçue par le Fiduciaire conformément à
cet article sera appliquée en suivant l’ordre précisé par la suite, à la date ou aux dates établie(s)
par le Fiduciaire et, dans le cas où se réaliserait
la distribution de ces montants en tant
qu’acompte du capital ou des intérêts, après
avoir présenté les Titres de la série pour laquelle
les sommes auraient été reçues et avoir apposé
un sceau (ou tout autre notation) faisant foi du
paiement ; ou bien après avoir émis des Titres
pour des montants de capital réduits en échange
des Titres présentés, dans le cas où ils seraient
payés partiellement ; où après leur remise, dans
le cas où le paiement serait total :
PREMIÈREMENT : Au paiement de tous les
montants dus au Fiduciaire ou tout représentant
ou Partie désignée du Fiduciaire par rapport au
présent Contrat ou aux Titres de toute série, y
compris (à titre d’exemple) les montants dus
conformément à l’Article 5.6 ;
DEUXIÈMEMENT : Dans le cas où le capital
des Titres de cette série ne serait pas à ce moment-là exigible, au paiement des intérêts encourus et en demeure concernant cette Série de titres
selon l’ordre d’échéance des mensualités desdits
intérêts, les intérêts étant calculés (dans la mesure où ils n’auraient pas été recouvrés par le Fiduciaire) par rapport à ces mensualités échues
des intérêts au même taux que celui stipulé dans
ces Titres, et devant réaliser ces paiements proportionnellement aux Personnes ayant droit à
ceux-là, sans aucune discrimination ou préférence ;
TROISIÈMEMENT : Dans le cas où le capital
des Titres de cette série serait à ce moment-là
exigible, au paiement du montant total étant dû
à ce moment-là et pas encore payé par rapport à
tous les Titres de cette série, correspondant au
capital et aux intérêts, au taux d’intérêt stipulé
dans ces Titres ; dans le cas où ces sommes s’avéreraient insuffisantes pour régler de manière intégrale le montant total exigible concernant les
Titres de cette série, au paiement du capital et
des intérêts, sans aucune préférence ou priorité
du capital sur les intérêts, des intérêts sur le capital, de toute mensualité des intérêts sur une autre
mensualité des intérêts, ou de tout Titre de cette
série sur un autre Titre de la même série, de manière proportionnelle au montant total du capital
et des intérêts encourus mais non pas réglés.
Article 4.9. Droit inconditionnel des Détenteurs
des Titres à percevoir le capital et les intérêts.
Sous réserve des dispositions de l’article 4.8, tout
Détenteur des titres aura le droit absolu et inconditionnel à percevoir le paiement du capital et
des intérêts concernant leur Titre à la date
d’échéance établie pour ce paiement exprimée
sur le Titres (avec des modifications possibles
conformément à l’article 7) et à entamer des actions dans le but d’en exiger tout paiement. Ce
droit ne sera pas modifié sans le consentement
de ce Détenteur.
Article 5.1. Obligations et responsabilités du Fiduciaire. Le Fiduciaire s’engage à exécuter seulement les obligations spécifiquement établies par
le présent Contrat.
Il ne sera pas interprété que les dispositions du
présent Contrat libèrent le Fiduciaire de responsabilité pour ses actions ou omissions fautives, sa
mauvaise foi, ses actes dolosifs ou l’inexécution
de ses devoirs fiduciaires, compte tenu des dispositions du présent Contrat et/ou des Termes des
Titres de toute série lui conférant des facultés fiduciaires, des facultés de tout autre nature, des
autorisations ou des facultés discrétionnaires,
parmi lesquelles sont comprises (à titre
d’exemple) :
(a) Les devoirs et les obligations du Fiduciaire
seront déterminés exclusivement par les dispositions expresses du présent Contrat et le Fiduciaire n’aura aucune responsabilité au-delà de
l’inexécution des devoirs et des obligations spécifiquement établis dans le présent Contrat. Ne
sera pas non plus imputé au Fiduciaire un engagement ou obligation implicite dans le présent
Contrat ;
(b) s’il n’y a pas de faute grave ou comportement
dolosif du Fiduciaire, celui-ci pourra se fonder
de manière concluante, en tout ce qui concerne
la véracité des déclarations et l’exactitude des
opinions exprimées dans le présent, dans les déclarations, certificats ou opinions facilités au Fiduciaire, remplissant les conditions du présent
Contrat ; mais dans le cas des déclarations, des
certificats ou des opinions qui, conformément
aux dispositions du présent contrat, doivent se
faciliter spécifiquement au Fiduciaire, celui-ci
aura l’obligation de les inspecter afin de déterminer s’ils remplissent formellement les conditions
du présent Contrat seulement ;
(c) le Fiduciaire n’aura aucune responsabilité
pour les erreurs d’appréciation commises de
bonne foi par un Fonctionnaire responsable ou
des Fonctionnaires responsables du Fiduciaire, à
moins qu’il soit prouvé que le Fiduciaire a commis une faute grave dans la détermination des
faits pertinents ;
(d) le Fiduciaire n’aura aucune responsabilité
pour toute action ou omission propre concernant les Titres de toute série faite de bonne fois
conformément aux instructions des Détenteurs
des titres de, au moins, la Majorité du montant
du capital agrégé à payer des Titres de cette série,
ce qui comprend (entre autres) des questions relatives au moment, à la méthode et au lieu de
promotion d’une procédure pour se prévaloir
d’un recours dont dispose le Fiduciaire ou à
l’exercice d’une faculté fiduciaire ou de tout
autre nature étant conférée au Fiduciaire conformément au présent Contrat ;
(e) sous réserve de tout autre disposition établie
dans le présent Contrat, en aucun cas ne sera responsable ni le Fiduciaire ni aucun agent de paiement fiduciaire ni aucune Partie désignée par le
Fiduciaire de conformité ou en relation avec le
présent Contrat pour des dommages et intérêts
indirects, spéciaux, incidents, punitifs ou médiats de toute nature, y compris, entre autres, le
manque à gagner, soit prévisible ou non, même
si le Fiduciaire ou si cet agent de paiement fiduciaire ou Partie désignée a été informé de cette
possibilité et au-delà de la forme de l’action pour
laquelle ces dommages et intérêts seraient réclamés ;
(f) dans le cas ou une inexécution aurait lieu
conformément au présent concernant les Titres
de toute série, et dans le cas où le Fiduciaire aurait une connaissance effective de cette inexécution, le Fiduciaire notifiera cette inexécution aux
Détenteurs des Titres ; cependant, il est établi
que, en cas d’inexécution du caractère indiqué
dans l’article 4.1(ii) concernant les Titres de cette
série, ladite notification sera faite au moins 30
jours suivant le moment de cette inexécution.
Aux fins du présent Article, le terme « inexécution » signifie tout événement qui constitue ou
qui, après la notification de l’écoulement du
temps, deviendrait un Cas d’inexécution concernant les Titres de cette série ; et
(g) aucune des dispositions contenues dans le
présent Contrat ou dans les termes et conditions
des Titres de toute série requerra que le Fiduciaire utilise, paie en avance ou risque ses propres
fonds ou, d’une autre manière, engage sa responsabilité patrimoniale personnelle pour cause de
l’exécution de ses devoirs ou de l’exercice de ses
droits ou facultés, dans le cas où il y aurait des
motifs raisonnables à croire qu’il ne peut pas être
garanti au Fiduciaire de manière satisfaisante le
remboursement desdits fonds ou une indemnité
suffisante pour cette responsabilité ;
En cas de Titres d’une série régis par la loi d’Angleterre, ne sera appliqué l’article 1er de la Loi
des fiduciaires de 2000 (Trustee Act 2000) du
Royaume-Uni à aucune fonction du Fiduciaire.
Il est établi que, dans le cas où le Fiduciaire ne
montrerait pas le degré de diligence requise pour
sa qualité de fiduciaire, compte tenu des dispositions du présent Contrat et/ou des Termes de
titres de toute série lui conférant des facultés fiduciaires, des facultés de toute nature, des autorisations ou des facultés discrétionnaires, aucune
disposition du présent Contrat le libérera ni lui
donnera d’indemnité par rapport à toute responsabilité qui autrement lui serait attribuée pour
faute grave, inexécution dolosive, inexécution
des devoirs ou inexécution du fidéicommis dont
il serait responsable.
PRÉSIDENCE DE LA NATION RÉPUBLIQUE ARGENTINE
Contact : Mme Analía RACH. Tél. +54 (11) 41 14 95 95. Courriel : privada@jefatura.gob.ar
Ministère des Affaires étrangères et du Culte de la République Argentine. Esmeralda 1212, Buenos Aires, C1007ABR. République Argentine.
Tél. + 54 (11) 48 19 70 00 ÿ info@cancilleria.gob.ar ÿ http://www.mrecic.gov.ar/
La rédaction du Monde n’a pas participé à la réalisation de ce supplément
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culture
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Jeudi 10 juillet 2014
Réjouissons-nous, la paix est enfin là!
«Mahabharata-Nalacharitam», mis en scène par le Japonais Satoshi Miyagi, a envoûté les spectateurs
Théâtre
Avignon
Envoyée spéciale
E
nfin,la beautéa étéaurendezvous d’un soir. C’était mardi
8 juillet, à la Carrière de Boulbon,avec Mahabharata-Nalacharitam, dont la première représentation, prévue la veille, lundi 7 juillet,
avait dû être annulée à cause de
l’orage. Un orage si violent qu’il a
endommagé une des tours du
Palais des papes et rendu impraticable la piste menant à la Carrière
de Boulbon, à une douzaine de kilomètres d’Avignon.
Cet endroit magnifique, ovale,
minéral et sauvage, qui ouvre sur
le ciel de la garrigue, ne serait
jamais devenu un lieu de spectacles si, en 1985, Peter Brook ne
l’avait choisi pour créer… Le Mahabharata, précisément. Le spectacle
durait douze heures, c’était une
inoubliable traversée de la nuit.
Cette année, il dure à peine deux
heures, et c’est un bonheur, signé
par le Japonais Satoshi Miyagi.
Avignon découvre ce metteur
en scène de 55 ans qui a fait un
choix très particulier. Contrairement à Peter Brook, qui suivait le
fil du livre sacré de l’Inde, retraçant les guerres entre les familles
royales des Pandava et des Kaurava, Satoshi Miyagi se concentre sur
un épisode du Mahabharata où
l’on ne se bat pas. C’est l’histoire
d’une princesse au charme inégalé, Damayanti, que les dieux du
paradis auraient aimé voir s’unir à
l’un d’entre eux, mais qui choisit
d’épouser un mortel, le roi Nala.
Douze ans durant, le couple est
heureux et le royaume prospère.
Mais, un jour, Nala reçoit la visite
de son frère, qui vient d’un royaume voisin, et lui inculque le vice du
jeu. Nala perd tout, jusqu’à son
épouse aimée, à qui il ne veut pas
faire partager son sort misérable
d’homme jeté sur les routes.
AinsivaleNalacharitam,quiverra le couple se retrouver après de
multiples aventures que Satoshi
Miyagiabordeenpuisant auxsources de la tradition du kabuki, du nô
et du bunraku. Il y a, dans son art,
des subtilités multiples qui échappent à un esprit occidental. Mais
cela n’a aucune importance. Ce qui
compte, c’est ce que l’on voit à la
Carrière de Boulbon, où les spectateurs sont enserrés dans un cercle
offrant aux vingt comédiens et dix
musiciens une céleste aire de jeu.
Les musiciens sont aux percussions (gamelan, djembé…), les
comédiens pratiquent la division
dutravail,ensomme :certainss’ex-
Répétition de la pièce « Mahabharata-Nalacharitam », du Japonais Satoshi Miyagi, à la Carrière de Boulbon, près d’Avignon, le 5 juillet. BERTRAND LANGLOIS/AFP
priment par la parole, d’autres par
le corps. C’est à la fois très simple, et
très sophistiqué. Et surtout très
beau, non pas de cette beauté qui
coupe le souffle, mais de celle qui
libère de la pesanteur, comme un
envol vers un monde où tout n’est
que présence légère de l’instant.
Quelle merveille que ces costumes, dont certains sont en papier !
Quelle merveille que ces interprètes, unis comme les doigts de la
main, experts et facétieux ! On
n’est pas près d’oublier Kazunori
Abe, le narrateur, qui parfois s’exprime en français (et chante
même Sur le pont d’Avignon), ni
Micari, l’interprète de Damayanti,
éblouissante de bout en bout.
Quand, à la fin, elle tend son bras
nu vers le ciel, dans un geste parfait, on pense autant aux dieux du
théâtre qu’à ceux du Mahabharata. Bref, on est heureux, et prêt à
croire à la chute du Nalacharitam :
« Réjouissez-vous, la paix est là ! »
Mais, en ce 8 juillet, cette paix
s’est méritée. Elle est arrivée après
la première d’un autre spectacle,
Don Giovanni. Letzte Party (« Don
Giovanni. Dernière fête »), donné à
l’Opéra-Théâtre en fin d’après-
Quelle merveille
que ces costumes,
dont certains
sont en papier!
Quelle merveille
que ces interprètes,
experts et facétieux!
midi, qui récusait toute tranquillité, d’une manière intempestive.
Selon les dires mêmes de son metteur en scène, Antu Romero Nunes,
né en 1983 en Allemagne, de
parents chiliens, c’est une « putain
de comédie » inspirée par l’opéra
de Mozart et de Da Ponte. Elle vient
du Thalia Theater de Hambourg,
où l’argent ne manque pas. Il y a
plus de vingt interprètes sur le plateau, dont sept musiciennes (piano, percussions, basse, saxophone,
flûte,trompette…)habillées de noir
néo-punk, et furieusement efficaces. Johannes Hofmannleur a composé des airs qui détournent ceux
de Mozart et accentuent la débandade voulue par la mise en scène.
Car il s’agit, une fois de plus en
Allemagne, de déconstruire une
œuvre, en la mettant cul par-dessus chemise et en la modernisant
jusqu’à l’outrance. Cela commence
parunescèneoù Leporello,portant
une méchante robe de chambre
sur son costume d’époque, invitele
public à se livrer à des exercices de
mise en voix. Puis descend des cintres une sorte de vaisseau spatial,
constitué de trois cercles avec des
projecteurs, dont émerge, sous des
fumigènes, un Don Giovanni déca-
dent, avec une perruque en forme
de choucroute, qui, lui aussi,
s’adresseauxspectateurs :«Mesdames, sachez que je suis à votre entière disposition. Messieurs, sachez
que je suis ouvert, pardon, que je
suis aussi à votre disposition. »
Le ton est donné. Ce sera celui de
l’appelausexe, parce qu’il n’y a rien
de mieux à faire pour contrer la
mort. Vieille rengaine, direz-vous.
Oui, mais Antu Romero Nunes
(qu’Avignon découvre, lui aussi),
est encore jeune : il a besoin de s’en
servir pour faire passer sa révolte et
son désir de vivre. A certains
moments, son texte a des accents à
la Rodrigo Garcia : ce sont les
meilleurs, ceux où l’on sent une
vraie mélancolie. A d’autres, il fait
et dit n’importe quoi. Mais il a du
talent, il invente des images furieuses avec le vaisseau spatial de
lumières, et il laisse les comédiens
aller au bout de leurs délires, qui ne
manquent pas de sel, ni d’ironie.
Du coup, le public suit. On voit
des dizaines de femmes passer de
la salle à la scène, où elles sont invitées à danser pendant l’entracte.
Quand le spectacle reprend, Don
Giovanni, totalement ivre, marche
entrelesfemmesquichantentcomme il le ferait entre des tombes. La
mort, incarnée par une comédienne, le prend par la main. La fête est
finie. «Continuez à chanter », dit-il.
Il s’en va. Les spectateurs aussi. p
Brigitte Salino
Mahabharata-Nalacharitam, mis en
scène par Satoshi Miyagi. Carrière de
Boulbon, à 22 heures, jusqu’au 19 juillet
(relâche le 16). Durée : 1 h 50.
De 10 ¤ à 38 ¤ (en japonais surtitré).
Don Giovanni. Letzte Party, d’après
Mozart et da Ponte. Mise en scène par
Antu Romero Nunes. Opéra-Théâtre,
à 18 heures, jusqu’au 11. Durée : 2 h 30
(en allemand surtitré). De 10 ¤ à 28 ¤.
Tél : 04-90-14-14-14.
Allemagne-Brésil, match nul à Avignon
Deux spectacles pourtant très attendus, adaptés d’œuvres d’Hölderlin et de Bernardo Carvalho, ont déçu les festivaliers
Théâtre
Avignon
Envoyée spéciale
D
écidément, les dieux du
théâtre grondent et tempêtent à Avignon, en ce début
de Festival. Après (et avant ?) les
grèves intermittentes, après les
trombes d’eau qui ont conduit à
l’annulation deplusieurs représentations, voilà le mal ultime : la
déception. Elle empoisse sournoisement l’atmosphère, alors que
plusieurs spectacles présentés
comme des découvertes ou des
temps forts du Festival n’ont
– c’est une litote – pas répondu aux
attentes.
Ce fut le cas déjà avec The
Humans, d’Alexandre Singh, et
désormais, avec Dire ce qu’on ne
pense pas dans des langues qu’on
ne parle pas, comme avec
Hypérion. La situation, hélas, pourrait se résumer ainsi : Brésil-Allemagne, match nul.
Deces deux spectacles,on attendait beaucoup. Le premier, Dire ce
qu’on ne pense pas dans des langues qu’on ne parle pas, qui peut
sans hésiter se voir décerner le
prix de plus beau titre de pièce du
festival, est signé par un metteur
en scène brésilien que l’on ne
connaissait pas, Antonio Araujo.
Dans l’Hôtel des Monnaies d’Avignon, réquisitionné pour l’occasion, il emmène les spectateurs
dans une déambulation qui suit
les pas d’une jeune femme revenant dans son pays d’origine (le
Brésil, par exemple) après être
devenue, dans son pays d’adoption (qui pourrait être la France),
un exemple parfait de « yuppie »
brillante et pleine de certitudes.
Mondialisation, crise économique et morale, perte d’identité et
de repères, islamisme, montée de
nouveaux fascismes, exclusion,
trafics divers… La pièce, écrite par
Bernardo Carvalho, brasse. Beaucoup. Sans bien maîtriser ce qu’elle manipule, et dans une écriture
qui n’a pas grand-chose à envier à
ces sitcoms qui inondent l’ensemble du continent sud-américain.
Le spectacle compose une forme
de chaos, utilisant tous les espaces
de l’Hôtel des Monnaies. Coup de
poing à tous les étages.
Mais ni le propos grossièrement dénonciateur, ni le jeu,
d’une médiocrité assez rare à Avignon, ne peuvent convaincre. Ni,
surtout, la manière de manipuler
et de prendre en otage le spectateur, comme lors de cette scène
d’émeute qui, sans doute, vise à
placer le « bourgeois » dans une
situation inconfortable mais bien
peu réflexive. Rideau.
Avec Hypérion, de Friedrich Hölderlin, que signe Marie-José Malis,
la nouvelle directrice du Théâtre
de la Commune d’Aubervilliers
(Seine-Saint-Denis), on est évidemment dans un tout autre registre.
Las ! C’est une souffrance que l’on
ne souhaiterait voir infliger à personne, et surtout pas à des jeunes
gens qui découvriraient le théâtre,
que ces cinq heures interminables
et affligeantes d’ennui.
Marie-José Malis transforme le
texte sublime de l’auteur allemand, un des plus beaux de la littérature européenne, en un prêche
pour une « nouvelle Eglise » que
La pièce écrite par
Bernardo Carvalho
brasse. Beaucoup.
Dans le spectacle de
Marie-José Malis, rien
ne s’incarne: ni les
«personnages», ni les
idées, ni le sentiment
les spectateurs qui ne seraient pas
des adeptes avertis d’Hölderlin
seraient bien en peine de définir.
Rien ne s’incarne, dans ce spectacle de patronage: ni les « personnages », ni les idées, ni le sentiment,
pourtant si brûlant aujourd’hui,
d’une « fin de l’histoire », de
l’échec des révolutions (française,
grecque, arabes…) et d’un désir de
renouveau et de changement du
monde.
Certes, la matière n’est pas facile à porter à la scène. Leroman épistolaire écrit par l’auteur allemand
en 1797 sur les ruines de la Révolution française et les flammèches
de l’insurrection grecque naissante n’est pas exactement théâtral,
avec ses longs passages lyriques et
déclamatoires. Comme le note le
poète Philippe Jaccottet, qui l’a
magnifiquement traduit en français, il est écrit dans une langue
effusive et empreinte de « mélancolique solennité », mais ne propose pas de narration au sens classique du terme, avec des personnages caractérisés. C’est un chant,
celui d’un poète désespérément
tendu vers la recherche de son
« butin de beauté » pour « combler
les lacunes de la vie humaine ».
De là à en faire une messe, il n’y
a qu’un pas que franchit allègre-
ment cet Hypérion sous Xanax,
plombé par son décor indigent de
taverne grecque et par un jeu d’acteur à la fois emphatique et apathique. Ni le K.-O. debout envoyé
dans la figure par Antonio Araujo,
ni la léthargie irrépressible provoquée par Marie-José Malis ne permettent de se saisir de l’état du
monde tel qu’il est, c’est-à-dire
bien mal en point. Que faire ? Pas
grand-chose. Si ce n’est dire des
choses qu’on pense dans une langue qu’on parle, peut-être. p
Fabienne Darge
Dire ce qu’on ne pense pas
dans des langues qu’on ne parle pas,
de Bernardo Carvalho. Mise en scène
par Antonio Araujo. Hôtel des Monnaies,
à 21 heures, 22 heures ou minuit,
jusqu’au 17 juillet. Durée : 2 heures.
Hypérion, de Friedrich Hölderlin.
Mise en scène par Marie-José Malis.
Théâtre Benoît-XII, à 18 heures,
jusqu’au 16 juillet. Durée : 5 heures.
Tél : 04-90-14-14-14. De 14 ¤ à 28 ¤.
0123
culture
Jeudi 10 juillet 2014
L’art de la chorégraphie
distordu avec fulgurance
par Thomas Lebrun
15
Jean-Baptiste Carpeaux, sculpteur
érotomane, arriviste et incompris
Le Musée d’Orsay, à Paris, consacre une rétrospective à l’artiste mal-aimé de l’Empire
«Lied Ballet» met en scène, à Avignon,
dix interprètes, dont un pianiste et un chanteur
Arts
Danse
Avignon
Envoyée spéciale
U
ne danse fière, décidée, une
danse qui ne boude pas son
plaisir. La voilà, la danse de
Thomas Lebrun. Elle fait irruption
sur le plateau du Cloître des carmes avec un jeune couple qui se
tient main dans la main et se pose
côte à côte, droit comme un « i ». Il
est rejoint par six interprètes, tous
habillés en noir, qui s’élancent
d’un coup sec comme on débouche une bouteille.
La franchise avec laquelle Lied
Ballet, pièce pour dix interprètes
dont un pianiste et un chanteur,
marque son territoire à grands pas
nets et mouvements de bras, donne une idée de son appétit sans
limites.Tout est bon, tout est possible sur le plateau qui secoue un
panel d’humeurs et de styles.
Etilyenadans cettepièce ouvertement référencée de Thomas
Lebrun! Le directeurduCentre chorégraphique de Tours convoque
ici, pour les mettre à sa sauce, les
nombreuses influences qui traversent, plus ou moins explicitement,
l’écriture chorégraphique contemporaine et la sienne en particulier.
Lied Ballet, dont l’écriture aiguë
progresse par à-coups, entrelace
différentes strates, accrochées à la
structure en trois actes du ballet
académique : danse-théâtre avec
des textes récités en chœur par les
interprètes, expressionnisme à
grands renforts de grimaces et de
statuaires, abstraction pure et
sèche,classiquetendance pantomime. Le tout réinventé, distendu,
tordu,parfoisaubord del’effondrement…
La photo de famille en noir et
blanc de ce Lied Ballet, aux images
souvent fulgurantes, renvoyant
l’image d’un casting contemporain dépareillé, constitué de personnalités bien trempées, est loin
des canons classiques trop univoques.
Lied Ballet, comme son titre l’indique, se cogne à deux pans de la
culture musicale et chorégraphique pour n’en faire qu’une bouchée… en trois temps. Des lieder de
Franz Schubert, Gustav Mahler et
Alban Berg, chantés enlive par Benjamin Alunni, servent de trame au
récit des danseurs. Leurs thèmes –
l’amour, la mort, la nature, l’errance… – noyautent les situations et
les actions du spectacle, qui circule
entre soli, pas de deux, de trois et
tableaux de groupe, comme le
veut tout ballet qui se respecte.
A trop enfoncer le clou
Le ton de manifeste de Lied Ballet déborde parfois de façon un peu
trop évidente. A vouloir enfoncer
le clou d’une histoire de la danse
qui relie hier et aujourd’hui, Thomas Lebrun prend le risque de se
coincer dans une démonstration,
avec ce que cela entraîne de vissé et
de sérieux. Pour cet homme extrêmement libre dans les thèmes et
les esthétiques depuis la création
de sa compagnie en 2000 – il a évoqué l’identité masculine, les corps
différents, le sida –, il importait
apparemment de revendiquer une
généalogie chorégraphique loin
desconceptsà la mode.Mais fallaitil à ce point l’affirmer ?
Si les deux premiers actes, d’une
beauté nerveuse, réservent des
séquences magnétiques avec des
élansjuvéniles,desénergiesélectriques, le troisième, axé sur le corps
de ballet et les mouvements de
groupe, si réussi soit-il avec ses
ports de bras circulaires, finit par
sentirla fin del’exercice. C’est dommage tant le propos d’ensemble
tient remarquablement la route.
Thomas Lebrun aurait gagné à
ruer (un peu) dans les brancards
comme il sait si bien le faire. Un
bon coup de chausson peut parfois
réveiller le frisson. p
Rosita Boisseau
Lied Ballet, de Thomas Lebrun,
jusqu’au 13 juillet au Cloître des carmes
à 22 heures.
INSTANTANÉ THÉÂTRE
Sergi Lopez, l’homme
est un drôle d’animal
Avignon
Envoyée spéciale
Chaque édition du « off » d’Avignon recèle des pépites. Gageons
que 30/40 Livingstone deviendra
l’un des spectacles les plus courus
cette année. Derrière ce titre en
apparence énigmatique se cache la
performance de Sergi Lopez et de
son compère Jorge Pico. L’acteur
catalan préféré du cinéma français
(Harry, un ami qui vous veut du
bien, Une liaison pornographique…) et le comédien et metteur
en scène valencien livrent un
réjouissant face-à-face entre un
homme mal dans sa peau parce
qu’en mal d’aventure (Sergi Lopez)
et une créature à tête de cerf, muette, craintive et joueuse de tennis
(Jorge Pico). Surprenant ? Résolument. Absurde ? Délicieusement.
Ecrite, mise en scène et interprétée par les deux artistes et amis
espagnols, cette pièce drolatique
a des allures de fable anthropologique et humaniste. Dans sa quête d’émancipation et d’exploration, Sergi Lopez, avec son accent
chaleureux et familier, se donne
sans compter. Il danse comme un
gamin, s’amuse de son ventre
grassouillet (« le corps, c’est juste
une carcasse, un outil »), se déshabille, se rhabille, geint, s’emballe
et se moque, dans une scène inoubliable, du village VIP des tournois tennistiques. Il s’éclate, et
son plaisir est communicatif.
L’homme est un drôle d’animal,
à la fois insatisfait et sûr de lui, en
quête de liberté mais sans cesse rattrapé par ses habitudes et son éducation; qui tue le père avant de
finir par lui ressembler. Sergi
Lopez confronte chacun d’entre
nous à notre capacité bien fragile
de résistance. Jorge Pico, bois dressés sur la tête, n’a pas besoin de
mots pour mettre cet explorateur
à la petite semaine face à ses
contradictions terriblement
humaines. Ses gestes et ses regards
disent tout. Le plus civilisé des
deux n’est pas celui qu’on croit.
30/40Livingstone fait partie
des cinq spectacles soutenus par
l’Institut public espagnol RamonLlull dans le cadre de la troisième
édition d’« Avignon à la catalane».
Après 80 représentations en Espagne et quelques dates sur les scènes de Montbéliard (Doubs) et de
Perpignan, ce pas de deux devrait
connaître un bel avenir. p
Sandrine Blanchard
30/40 Livingstone, jusqu’au 27 juillet,
tous les jours à 19 h 25
au Théâtre La Luna, 1, rue Séverine.
Réservations : 04-90-86-96-28
D
e Jean-Baptiste Carpeaux
(1827-1875), les Parisiens et
lestouristes –ceuxquiprennent le temps de lever les yeux –
connaissent La Danse, conçue
pour l’Opéra construit par Charles
Garnier,etle groupedes quatreparties du monde sur la fontaine de
l’Observatoire. En passant, ils en
admirentpeut-être lesnusen mouvement, mais ignorent sans doute
combien les deux sculptures ont
été d’abord maltraitées.
Quand La Danse est dévoilée en
1869 , son obscénité supposée suscite une polémique telle qu’une
nuit une bouteille d’encre noire
est lancée contre elle et qu’elle
aurait été retirée si la chute de
Napoléon III n’avait fait oublier
l’affaire. Même drame pour la fontaine : quand le modèle final est
révélé en 1872, la critique y voit
« quatre femmes déshabillées,
dégingandées, [qui] se démènent
d’un ahuri et furieux ».
Le titre de l’exposition très complète que le Musée d’Orsay lui
consacre – la première depuis très
longtemps – contient donc un
sous-entendu. C’est « Un sculpteur
pour l’Empire », et non « de l’Empire », car le pouvoir n’a pas été pour
Carpeaux le mécène et le protecteur dont celui-ci avait rêvé.
Carpeauxexalte
la nudité féminine
en pressant l’argile
comme une chair.
Il réduit l’anatomie
aux gorges, aux
ventres,aux cuisses
A 30 ans, ce provincial, fils
d’une dentellière et d’un maçon,
enfin Prix de Rome après six
échecs successifs au concours,
veut furieusement être le grand
sculpteur officiel français, comblé
de commandes et d’honneurs –
d’argent aussi. Il est prêt à tout faire pour y parvenir, des bustes et
têtes de Napoléon III, de l’impératrice Eugénie, de leur fils le Prince
impérial, de la princesse Mathilde
et des dames de la cour. Du prince,
dont il se fait nommer professeur
de dessin, il multiplie les effigies.
La mère veut une statue en pied, le
père un buste. Carpeaux exécute
les deux et ajoute le chien préféré
de l’enfant. Variantes et réductions en bronze ou marbre se succèdent.
Conséquence de ces manœuvres : quand l’Empire tombe, en
1870, Carpeaux se retrouve dans la
position de l’artiste compromis
avec un régime détesté et doit se
réfugier un temps à Londres avec
lessiens, suivantlafamilleimpériale dans son exil. Quand il revient à
Paris, il n’y a plus, naturellement,
que peu d’amis. Il meurt bientôt,
couvert de dettes et abandonné
par son aristocratique épouse.
Le pire est qu’en dépit de ces
preuves de docilité l’empereur
l’aide assez peu. Il défend le groupe
que Carpeaux place sur le pavillon
de Flore, au Louvre, et que l’architecte Hector-Martin Lefuel veut
décapiter parce qu’il rompt les
lignes de son dessin. Mais il le
lâche quand La Danse est attaquée
et ne lui commande pas le buste
d’Eugénie tant espéré. Si Carpeaux
finit par l’exécuter, c’est à son
compte, l’impératrice posant de
guerre lasse, revêche.
Ne voir dans cette histoire
qu’une fable morale – le courtisan
puni, l’arriviste dégringolé – serait
cependant esquiver la question
principale : pourquoi, en dépit de
tous ses efforts, Carpeaux n’arrive-t-il pas à plaire ? La réponse est
dans ses dessins, ses peintures, ses
modelages de terre et nombre de
« La Danse », 1869. PATRICE SCHMIDT/MUSÉE D’ORSAY
« Dernier autoportrait », 1874.
HERVÉ LEWANDOWSKI/MUSÉE D’ORSAY
ses plâtres : quand il ne se retient
pas, l’art de Carpeaux est cru, violent, dramatique ou érotique. Il ne
peut pas s’en empêcher, dirait-on.
Les censeurs pudibonds de La Danse l’ont senti du fond de leur bigoterie : cet homme n’est pas de leur
côté. Il exalte la nudité féminine
en pressant l’argile comme une
chair. Il réduit l’anatomie aux gorges, aux ventres, aux cuisses.
Des ménades acéphales se tordent ou étirent des membres longs
et souples comme les tentacules
du poulpe obscène d’Hokusai.
Quand il esquisse des groupes,
qu’il s’efforce ensuite de rendre
moins scandaleux, ce sont des
agrégats de nus des deux sexes
pressés les uns contre les autres.
Quand ilpeint, c’estavec uneintensité expressionniste qui balafre la
toile de grands gestes rouges et
ocre et change les bals masqués
aux Tuileries en parades sexuelles
ou en préparatifs d’orgies.
Ses études dessinées d’après
modèle ont une densité physique
très sensible et l’on ne s’étonne pas
que ses deux artistes préférés
soient Michel-Ange et Géricault.
Les sujets qu’il se donne hors de
toute commande publique, ce
sont Ugolin – scène d’anthropophagie d’après Dante – ou un
jeune Pêcheurà la coquille au sourire et au geste équivoques. Le voisinage, d’une vitrine à l’autre, dans
le même espace exigu, des études
réalisées à l’atelier sans contrainte,
et des œuvres rendues publiques
est plus convaincant qu’aucun discours : Carpeaux l’officiel et Carpeaux l’obsédé s’affrontent sans
répit.
Cette tension extrême se déclare avec évidence dans les autoportraits peints, manifestes paroxystiques. Il s’y montre les yeux exal-
tés, dignes de l’autoportrait en fou
(Le Désespéré) de Courbet, son
exact contemporain, tout aussi
érotomane que lui, comme on sait.
A quelques pas de ces tableaux
tragiques se trouve un buste de
marbre, une dame à six rangées de
perles et couronne de fleurs, le
genre de Carpeaux qui ne nous
intéresse plus aujourd’hui. Mais le
nez est cassé, le menton écrasé, le
cou coupé.
La marquise de La Valette, une
dame chic, n’avait pas été contente
de ce portrait, où elle ne se jugeait
pas assez rajeunie. A peine étaitelle sortie de son atelier que Carpeaux le massacra de rage à la masse. C’était en 1861, au début de sa
carrière.Que, commencéede la sorte, elle ait fini douloureusement
ne surprend donc pas. Carpeaux
valait mieux que ses ambitions
sociales, bien mieux. Il est heureux qu’une exposition le rappelle
enfin. p
philippe dagen
Carpeaux, un sculpteur pour l’Empire,
Musée d’Orsay, 1, rue de la Légiond’Honneur, Paris 7e.
www.musee-orsay.fr
Du mardi au dimanche de 9 h 30
à 18 heures, le jeudi jusqu’à 21 h 45.
Entrée : de 8,50 à 11 euros.
Jusqu’au 28 septembre.
16
0123
culture & styles
Tous les sujets qui fâchent
le président russe sont
sur le tapis à «Manifesta»
Jeudi 10 juillet 2014
Voyage La déambulation est permise dans la plus grande métropole du nord-ouest des
Etats-Unis, de l’historique Pike Place Market à l’EMP, musée né grâce au cofondateur de Microsoft
Seattle, comme un Indien dans la ville
La biennale, organisée à Saint-Pétersbourg,
épingle la politique de Vladimir Poutine
B
oycotter ou participer ?
Depuis l’été 2013, les artistes
invités par la biennale européenne Manifesta, organisée cette
année à Saint-Pétersbourg jusqu’au 31 octobre, se posent cette
question cornélienne. L’amendement d’une loi homophobe suivie
parlacriseen Ukraineet lerattachement de la Crimée à la Russie ont
exacerbé leur malaise. Initialementconvié,lecollectifpétersbourgeois Chto Delat s’est retiré, tout
comme le Polonais Pawel Althamer. Peu avant l’inauguration, The
Moscow Times titrait même :
« Manifesta pourrait être annulé,
selon Kasper König », déformant
curieusement les propos du commissaire allemand de cette édition.
Francis Alÿs a fracassé
une Lada verte contre
unarbre dans la cour
de l’Ermitage,
exutoirespectaculaire
aux frustrations
et frictions
Or, l’événement a bel et bien été
inauguré le 28 juin, au forceps.
« Pourquoi aurais-je boycotté ?
Qu’aurais-je eu à perdre ?, interroge l’artiste helvète Thomas Hirschhorn. Quand on fait un boycott,
il faut accepter de sacrifier quelque
chose. Je l’ai fait en n’exposant pas
en Suisse de 2004 à 2008. »
Pour Manifesta, il a conçu un
immeuble soviétique dont la façade se serait effondrée. Seuls quelques tableaux constructivistes
tiennent encore au mur, comme
pour interroger le pouvoir de l’art.
Son confrère belge Francis Alÿs a,
lui, fracassé une vieille Lada verte
contre un arbre dans la cour de l’Ermitage, exutoire spectaculaire
aux frustrations et frictions. « Un
boycott ne sert que si cela dérange
quelqu’un, estime-t-il. Ici, tout le
monde s’en fiche. »
La biennale est en effet tout
juste « tolérée » dans le fief de Vladimir Poutine. Aux premiers jours
de la manifestation, la municipalité, qui a pourtant dépensé 3 millions d’euros, n’avait déployé
aucun affichage pour la promouvoir. « Personne ne veut de Manifesta ici », admet Kasper König, qui ne
cache rien des tensions budgétairesni de lacomplexité bureaucratique. Seul un homme a bataillé ferme, Mikhaïl Piotrovski, directeur
Roxana Azimi
Manifesta, jusqu’au 31 octobre,
Ermitage, Saint-Pétersbourg,
www.manifesta10.org
ARTS
Succès pour deux expositions de
chefs-d’œuvre français en Chine
Deux expositions de chefs-d’œuvre de la peinture française, organisées au printemps à Pékin et Shanghaï, ont rencontré un succès inattendu avec plus d’un demi-million de visiteurs, a annoncé mardi 8 juillet l’ambassade de France.
Un total de 350 000 Chinois ont afflué à la rétrospective consacrée à Claude Monet à Shanghaï.
De son côté, le Musée national de Chine a dû organiser des plages
d’ouverture nocturnes pour accueillir les quelque 150 000 amateurs venus admirer les « dix chefs-d’œuvre de la peinture française » prêtés par Paris pour marquer ses cinquante ans de relations
diplomatiques avec Pékin. Parmi les toiles exposées figuraient
Le Bal du moulin de la Galette, d’Auguste Renoir, Le Matador, de
Pablo Picasso, et le Portrait en pied de Louis XIV en grand costume
royal, de Hyacinthe Rigaud. – (AFP.) p
Musique Garth Brooks annule ses concerts
à Dublin en raison de « nuisances sonores »
Les cinq concerts que la star de la country Garth Brooks devait
donner à Dublin en juillet pour son retour sur scène, après treize
ans d’absence, ont été annulés, mardi 8 juillet, en raison d’un
conflit avec la Ville. A la suite de plaintes de riverains du stade
Croke Park où devaient avoir lieu les concerts, le conseil municipal avait décidé de n’autoriser que trois des cinq dates prévues.
L’Américain a préféré tout annuler. – (AFP.)
Le musée Experience Music Project et la Space Needle, haute de 184 mètres. FRÉDÉRIC REGLAIN/DIVERGENCE
Seattle
F
aites le test : qu’évoque
autour de vous Seattle, la
plus grande ville de l’Etat de
Washington? Lescinéphiles penseront au film de Nora Ephron sorti il
y a plus de vingt ans, Nuits blanches à Seattle ou, éventuellement à
Bruce Lee… Les fans de musique
citeront Jimi Hendrix, Quincy
Jones ou Kurt Cobain. Une grande
majorité précisera que cette ville
est le berceau de Boeing, de Microsoft, d’Amazon et de Starbucks…
Bien sûr, Seattle c’est tout cela.
Mais c’est surtout une ville de
600 000 habitants – 3 millions en
comptant la banlieue – attachante.
L’une de ces villes que l’on aime au
premier contact, très verte. Devenue une destination nord-américaine « tendance » à l’instar de
New York, Miami, San Francisco
ou Las Vegas, cette ville à taille
humaine de l’extrême nord-ouest
des Etats-Unis provoque un vrai
coup de cœur tant elle a à offrir.
Un conseil : partir à la découverte du Pike Place Market, ce marché
plus que centenaire, connu dans
tous les Etats-Unis, de bon matin.
Non seulement la déambulation y
est plus facile – les cars de touristes
n’y ont pas encore déversé leur flot
de clients– maisles étals sontencore impeccables, comme tirés au
cordeau…
On y croise un grand nombre
d’Américains, généralement plus
habitués aux supermarchés, qui
viennent faire le plein de produits
frais, légumes ou produits de la
mer comme les fameuses pattes
de king crabe, des poissons ou des
fleurs. Il faut voir les poissonniers
s’envoyer les saumons par-dessus
les étals et parfois par-dessus la
tête des chalands ! Ne pas oublier
au passage de mettre une pièce,
voire un billet, dans le Bronze Pig.
Cette sculpture, symbole du marché, créée par un artiste du Puget
Sound, est en fait une tirelire qui,
chaque année, vient en aide à plusieursassociations caritatives locales.
Au sortir du marché, pourquoi
ne pas prendre un café dans le premier Starbucks de la chaîne, tout
de bois revêtu, qui a ouvert en 1971.
Ilsuffit de remonter Pine Street jusqu’à la Cinquième Avenue pour
prendre le Monorail qui conduit
vers Seattle Center. Agé d’un demisiècle,ce train, trèsfuturiste à l’époque de sa construction, est aujourd’hui délicieusement désuet.
Qu’importe, il a le mérite de bien
fonctionner – les départs se font
toutes les dix minutes – et, surtout, il donne un autre point de
vue sur l’une des artères les plus
fréquentées de la ville.
Dans ce seul quartier, on peut
aisément passer une demi-journée tant les possibilités de visites
sont nombreuses. Dans un premier temps, la meilleure façon de
voir et comprendre Seattle est de
grimper au sommet de la Space
Needle (« l’aiguille de l’espace »),
dont le slogan publicitaire affirme
« Seattle starts here » (« Seattle
démarre ici »). Cette tour est,
Sur Skid Road,
les bûcherons
faisaient autrefois
glisser les troncs
d’arbre enduits
de graisse d’ours
depuis 1962, date de son érection
pour l’Exposition universelle, l’icône de la ville. Avec ses 184 mètres
de haut et sa plate-forme panoramique à 360˚, elle offre sur Seattle
et sa banlieue une vue sans égale :
on distingue la péninsule Olympique, le mont Rainier et la chaîne
des montagnes des Cascades.
Enredescendant, leChihuly Garden and Glass, centre d’art ouvert
il y a deux ans, mérite le détour. On
peut y découvrir l’œuvre de Dale
Chihuly, artiste local, peu connu
en France, mais exposé dans plus
de 200 musées à travers le monde,
dont le prestigieux Victoria and
Albert Museum de Londres. Ce ver-
rier, né en 1941 à Tacoma, près de
Seattle, a étudié l’art du verre,
notamment à Murano, en Italie. Il
réalise des structures monumentales et colorées en verre, souvent
inspirées des fleurs et de la forêt.
A quelques pas se trouve une
autre icône de Seattle : l’Experience Music Project (EMP). Né grâce à
la volonté – et aux finances – de
Paul Allen, cofondateur de Microsoft, ce musée, dessiné et conçu
par Frank Gehry, est un succès :
pas moins d’un demi-million de
visiteurs en 2013.
Comme son nom l’indique, il
fait la part belle à la musique, rock
surtout, celle de Jimi Hendrix, de
Nirvana et de bien d’autres. On
peut y voir des clips et des concerts
de rock sur écran géant, jouer de la
musique, s’habiller vintage pour
réaliser des « selfies » inoubliables.
Les différentes vitrines recèlent
des trésors : guitares et instruments d’artistes célèbres, costumes de scène ayant tous appartenus à des stars du rock. La boutique attenante regorge de vinyles,
CD, DVD et autres « goldies » à collectionner. Les sous-sols du musée
sont consacrés à la science-fiction :
un costume original de Superman
porté par Christopher Reeve,
l’authentique fauteuil du Capitaine Kirk de Star Trek et quelques
créatures tout droit sorties d’Alien…
Bill Gates, l’autre fondateur de
Microsoft, n’est pas en reste. A
quelques centaines de mètres de là
s’élèvent sa Fondation et son « visitor center ». Santé, environnement, éducation, autant de thè-
Carnet de route
Y aller
Au départ de la France, il faut une
dizaine d’heures de vol. La compagnie américaine Delta est la seule
à proposer un vol quotidien et
sans escale à destination de l’aéroport de Seattle-Tacoma. Tarif
en classe économique à partir de
887 euros.
L’archipel San Juan
Pour aller à Friday Harbor (à l’est
de l’île de San Juan), au départ de
Seattle, une liaison directe en
hydravion (40 minutes) pour environ 90 dollars par personne.
Kenmoreair.com.
Il y a également des ferries au
départ d’Anacortes avec les
Washington State Ferries
(Wsdot.wa.gov/ferries) ou Clipper Vacations (Clippervacations.com) au départ de Seattle.
Voir les orques à partir de Friday
Harbor (90 dollars pour une croisière de trois heures).
Sanjuansafaris.com
Se renseigner
Pour recevoir une documentation
gratuite et pour tout renseignement, contactez l’office de tourisme de Seattle/Etat de Washington. Tél. : 01-44-77-88- 06 ;
e-mail : seattlewashingtonstate@ecltd.com.
Sur Internet : Seattle-tourisme.fr
Pratique
Climat : tempéré de type océanique. Sur la côte, les étés sont
doux alors que le climat est très
différent à l’est des Cascades,
où les étés sont chauds et
secs. Décalage horaire avec la
France : – 9 heures.
ÉTATS-UNIS
CA N A DA
Archipel de San Juan
Seattle
Chaîne des Cascades
Saint-Pétersbourg
du Musée de l’Ermitage, qui
accueille l’événement dans le
Palais d’hiver et dans sa labyrinthique extension contemporaine.
Bien que chiche en découvertes
pour la communauté arty, cet
accrochage sans concept articulé
autour d’intuitions n’a rien de
l’« exposition gentille et polie » que
redoutait Chto Delat. Tous les
sujets qui fâchent le président russe sont sur le tapis. A commencer
par l’Ukraine, qu’évoque le photographe Boris Mikhailov, parti couvrir les événements de Maïdan, la
place de l’Indépendance, à Kiev,
investie pendant des mois par les
manifestants.
Sa cadette Alevtina Kakhidze a
suivi de près ce mouvement
contestataire. Sa présence à Manifesta lui a valu les critiques de ses
proches. Refusant tout dogmatisme, la jeune femme se pose plutôt
en médiatrice pour déciller le
public local.
C’est à leurs questions qu’elle
répondra par le biais d’une performance, le 22 juillet, en racontant sa
vision détaillée de Maïdan. « Le
boycott ne ferait qu’isoler la Russie
et n’aiderait en rien la situation en
Ukraine, estime-t-elle. Ce qui est
important, c’est comment les gens
voient l’Ukraine ici. Je les écoute et
je constate qu’ils ne connaissent
pas grand-chose. »
Autresujet tabou, l’homosexualité n’a pas non plus été mise sous
le boisseau. Les deux artistes pétersbourgeois mis à l’honneur, Timur
Novikov et Vladislav MamyshevMonroe, tous deux décédés, ont
toujours revendiqué leur homosexualité.
Novikov figure d’ailleurs dans
la série des « Grands Hommes »
que la peintre Marlene Dumas a
installée à l’Ermitage. Cet inventaire aquarellé passe en revue les célébrités gays, de l’écrivain Nicolas
Gogol au journaliste Anton Krasovsky, congédié en 2013 de la télévision russe pour avoir fait son
coming out.
C’est surtout dans le dense programme public conçu par la Polonaise Joanna Warszaque les discussions à la fois sur l’art et l’actualité
iront bontrain. «Onne peutpas faire comme si de rien n’était, reconnaît la jeune curatrice. Mais il faut
continuer, essayer du moins. » Kasper König, lui, ne doute pas de l’impact à long terme de cette Manifesta : « L’art ne change pas le monde,
mais il peut aider à gérer ses contradictions. » p
Océan Pacifique
Arts
ÉTAT
DE
WASHINGTON
Colum
O R EG O N
bia
200 km
mes chers au couple Gates sont
abordés ici. Le slogan, affiché à l’entrée, est un programme à lui tout
seul : « Arrive curious, leave inspired... » (« Entrer curieux, ressortir
inspiré»). La Fondationa un tel succès local que les tour-opérateurs la
mettent désormais au programme de leur visite pour les touristes
étrangers.
Un autre quartier mérite que
l’on s’y promène, celui de Pioneer
Square, l’un des coins historiques
de Seattle devenu aujourd’hui
branché. C’est ici que l’on trouve
les plus anciens immeubles de la
ville qui datent généralement de la
fin du XIXe siècle. Dès 1860, les premiers colons s’installèrent autour
de Yesler Way, connu aujourd’hui
sous le nom de Skid Road. Sur cette
rue en pente, les bûcherons faisaient glisser les troncs d’arbre
enduits de graisse d’ours. Ce bois,
qui servait à la construction, était
expédié vers Portland ou San Francisco.
Au centre du quartier, on peut
difficilement ignorer Pioneer Place et son immense totem, réplique
de celui volé aux Indiens Tlingits
vers 1890. Non loin du totem, on
trouve le buste du chef indien
Sealth, dont le nom servit à baptiser la ville. On ne peut pas rater,
non plus, le Pioneer Building,
immeuble victorien construit
après l’incendie de Seattle de 1889
etdevenu l’une des fiertés architecturales de la ville.
Le magazine américain Fortune
ne s’est pas trompé : plusieurs fois,
la ville a été récompensée en étant
élue « best big place to live in the
US ». Ville portuaire, semblable à
une île, Seattle reste une terre de
métissage. N’inclut-elle pas le troisième plus grand Chinatown des
Etats-Unis ? Mais c’est surtout un
lieu dans lequel il fait bon déambuler même si l’un de ses surnoms
est « Rainy City », la ville pluvieuse… p
François Bostnavaron
0123
mode
Jeudi 10 juillet 2014
17
Haute couture|automne-hiver 2014-2015
La couture
enrichit sa table
des matières
En s’appuyant sur des volumes
simples, les créateurs travaillent
les textures et effets de surface
P
as de haute couture sans coupe parfaite. Cette discipline
qui repose sur l’art du surmesure est une science exacte
quand il s’agit d’exploiter les données mathématiques du corps
pour réaliser un vêtement. Il y a
dans tout cela une idée de confort
et d’aisance. Une pièce couture
moderne est un beau modèle aux
lignes simples mais extrêmement
bien construites. Ces architectures
s’appuient sur un autre atout de la
couture : les matières exploitées
sans limite de temps, de budget ou
d’idée.
Là aussi, tout est affaire de dosage. La broderie de trop est un poison dont l’élégance se remet rarement. Quand la posologie est
dépassée, on dénonce la « couturasse». Malgré ces dangers, les couturiers se sont concentrés sur ces
détails de surface, parfois à peine
visibles à l’œil nu – mais moins
c’est évident et plus c’est chic. Et
pour le chic, option décalé, on peut
faire confiance à Karl Lagerfeld.
La broderie de trop
est un poison dont
l’élégance se remet
rarement. Quand
la posologie est
dépassée, on dénonce
la «couturasse»
Pour Chanel, il a puisé dans sa
grande culture pour imaginer une
collection « Le Corbusier va à Versailles ». Il s’est inspiré d’une réalisation du grand architecte datant
desannées 1930: une terrasse d’appartement parisien associant
grands volumes blancs épurés et
détails baroques. Fonctionnalité
et ornement se répondent à travers la collection où les robes de
Madone futuriste aux volumes
ovoïdes croisent des silhouettes à
carrures aiguës et étroites sur jupe
évasée stricte qui révèle l’ourlet
d’une « culotte à la française » (un
short cycliste). Les formes pures
sont quasiment sans couture, les
broderies post-baroque ou les bordures de plumes ne font que souligner gracieusement les architectures minimalistes.
Pour réaliser ses silhouettessculptures, Lagerfeld s’est appuyé
sur ce qu’il appelle la « boîte à
outils de Chanel » : ces fameux
métiers d’art (brodeur, plumassier, bottier,etc.) achetés par lamaison et auxquels il peut demander
toutes les prouesses. Et celles de la
saison sont plus étonnantes que
jamais : broderie en béton (de
micro-carrés sur fil extra légers),
textile néoprène (pour les grandes
robes blanches), dentelle caoutchouc, cocktail de tulle et plumes
de vautour, soie effet papier, broderies de métal réalisées à partir
des composants de montres venus
de l’atelier d’horlogerie.
La recherche d’effets neufs ne
met jamais en péril l’élégance de la
Bouchra Jarrar.
ELENE USDIN
POUR « LE MONDE »
ligne. Tout a l’air facile et naturel.
Les filles se promènent en tongs
extra-plates, portent des bagues et
broches de haute joaillerie avec la
même aisance que des pièces fantaisie, et la mariée ne cache pas
vraiment sa grossesse dans sa robe
aux rondeurs trompe-l’œil. Avec
une collection aussi novatrice que
désirable, Karl Lagerfeld démontre sans vraiment le chercher qu’il
estautant un vraicouturier moderne que l’amuseur public dont la
marionnette en fourrure baptisée
« Karlito » vient de sortir chez Fendi.
La maison Bouchra Jarrar n’a
pas l’envergure du géant Chanel
mais sa fondatrice cultive un raffinement textile qui pourrait servir
d’exemple à bien des labels émergents. La Française a créé un langage vestimentaire où le blouson de
cuir et la ligne tailleur tiennent
une place importante. Son vestiaire d’hiver les exploite dans une formule athlétique où la grâce et
l’énergie cohabitent. Les pantalons de satin façon jogging ont
beaucoup d’allure, tout comme les
robes tee-shirts zippées qui
mêlent cuir velouté et textile tissé
main à partir de fils dont les militaires font des écussons, et de fibre
métalliséepour latouche de lumière. Les robes de mousseline fauve
aux plissés graphiques et cols de
maille façon polo, des rayures de
plumes posées une à une et accompagnées d’un granité de cristaux
sur une veste sans manches, des
gabardines rose tendre qui
habillent blouson à basques et pantalon droit, les creusés des dos à la
rigueur sensuelle enrichissent ce
répertoiremodernedont on savoure le luxe infiniment discret.
Chanel.
ELENE USDIN
POUR « LE MONDE »
Armani Privé.
ELENE USDIN POUR « LE MONDE »
Ulyana Sergeenko est une créatrice russe amoureuse de l’art de la
couture, une perfectionniste cultivée qui évolue loin des clichés
d’une Russie clinquante. Elle s’emploie à défendre et à sauvegarder
des savoir-faire textiles menacés
danssonpays et qu’elleutilise dans
des collections qui se suivent comme des contes. Le dernier renvoie à
la Russie soviétique du début du
XXe siècle, à son art de la propagande sous influence constructiviste.
Dentelles fines au crochet réalisées
à la main, broderies métalliques
elles aussi sorties d’un atelier rare,
gazes de soie volatiles comme une
fumée de cigarette venues du
Japon (la Russie d’aujourd’hui ne
possède plus cette technique de tis-
sage) habillent ses silhouettes
sculptures comme prises dans une
bourrasque. Ce que l’on peut lui
reprocher ? Trop de perfectionnisme dans le stylisme étouffe un peu
le propos mais l’expérience gagnée
àchaque collectiondevrait corriger
cela.
Travailler ses gammes de matières demande une attention
constante. Un peu trop d’enthousiasme et une surdose arrive,
même – et peut être surtout –
quand on est doué pour le contrôle,
habitué à l’épure. Giorgio Armani
est un maître du minimalisme glamour à l’italienne. Il ouvre son
show couture, Armani Privé, avec
des archétypes « armaniens » : des
silhouettes géométriques, ici sous
influences sixties, en noir, blanc et
rouge. Une laine texturée sur un
manteau corolle, un crêpe de laine
à motifs abstraits, une mousseline
à gros pois : la ligne tient. Les franges de vinyle rebrodées de strass
soulignentunenotefuturiste originalebientôtcontrediteparuneavalanche de tulle qui déferle sur les
jupes, engloutit les épaules, voile le
regard. Les motifs de pois mutent
en pompons prisonniers des
résilles et la collection se prend
dans son propre filet. Parfois, toujours mieux et plus est l’ennemi du
bien. Surtout dans une saison couture qui cultive un luxe caché pour
mieux en profiter égoïstement,
une délicieuse fausse modestie. p
Carine Bizet
18
0123
disparition & carnet
Jeudi 10 juillet 2014
Historien
Paris.
Georges Le Rider
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En 2005. DR
H
istorienquirenouvela l’approche
économique du
monde antique
par sa connaissance des sources
numismatiques, Georges Le Rider
est mort le 3 juillet à Givors (Rhône),àl’âgede86 ans.Néle27 janvier
1928 à Saint-Hernin (Finistère), ce
fils d’instituteurs catholiques eut
une enfance difficile, marquée peu
après sa naissance par la perte de
son père, des suites des gaz inhalés
durant la Grande Guerre, puis, à
l’âge de 8 ans, par celle de sa mère.
Orphelin et pupille de la nation, il
sera pensionnaire et boursier tout
au long de son parcours scolaire.
27 janvier 1928 Naissance
à Saint-Hernin (Finistère)
1989 Membre de l’Institut
de France
1993-1998 Collège de France
3 juillet 2014 Mort à Givors
(Rhône)
Autermedesesétudessecondaires à Quimper, cet élève à l’esprit
scientifique affûté et aux aptitudes
littéraires exceptionnelles prépare
à Paris, au lycée Louis-le-Grand, le
concours d’entrée à l’Ecole normale supérieure. Reçu en 1948, il y fait
la rencontre, déterminante, d’Henri Seyrig (1895-1973), qui vient de
créer l’Institut français d’archéologie du Proche-Orient (Ifapo). Le
savant devient une sorte de mentor pour le jeune étudiant. Presque
un père. De fait, les deux hommes
échangeront, jusqu’à la mort de
l’aîné, une correspondance d’une
exceptionnelle fécondité. Seyrig
mesure ses talents hors pair. Aussi
lui fixe-t-il un véritable plan de carrière pour le recruter plus tard à
son côté au Liban. Georges Le Rider
passe ainsi l’agrégation de lettres
classiques avant de gagner Rome,
puis Athènes en décembre 1952 en
qualité de membre de l’Ecole française d’archéologie – c’est là que
naît son fils Jacques, futur germaniste et philologue de renom.
En septembre 1955, il s’embarque pour Beyrouth, où Henri Seyrig l’accueille à l’Institut français.
Sitôt revenu à Paris, le voilà conservateur au Cabinet des médailles de
la Bibliothèque nationale le 1er octobre 1958, avec la perspective de succéder à l’historien et numismate
Jean Babelon (1889-1978), directeur
du département en poste depuis
1937. Ce qui advient en 1961. GeorgesLeRider succèdeen 1975 à Etienne Dennery comme administrateur général de la Bibliothèque
nationalesurl’interventiondu président Giscard d’Estaing, soucieux
de « rajeunir » l’institution.
Il se lie d’amitié avec auteurs et
artistes, suscitant de belles expositions, notamment celle consacrée
en 1978 à son ami le poète Léopold
Sédar Senghor, ainsi que des dons
substantiels, dont une partie de la
collection Seyrig. Il obtient que soit
rénové le Musée du Cabinet, qu’il
inaugureen1981,peuavantdequitterlepostepourladirectiondel’Institut français d’études anatoliennes d’Istanbul (1981-1984).
Parallèlement à ce cursus administratif, il enseigne. Dès 1964 comme directeur d’études à la IVe section de l’Ecole pratique des hautes
études. A l’université de Lille, où il
enseigne l’histoire grecque
(1968-1969), plus tard à l’université
de Paris IV-Sorbonne (1984), jusqu’àsonélectionauCollègedeFrance en 1993. Sa phénoménale aptitudeà la synthèse faitque ses travaux
dépassent l’apport méticuleux à
l’histoire des monnaies pour problématiser les liens entre le numéraire, le politique et le social. Dès
son doctorat d’Etat obtenu en 1965
–aussitôtpubliée, lathèseprincipale, Suse sous les Séleucides et les Parthes, paraît un an avant la thèse
complémentaire, Monnaies crétoises du Ve au Ier siècle av. J.-C. –, Le
Riderrepense l’approche historienne de la monnaie, croisant la
connaissanceéruditedunumismate, ses aspects politiques et ses
effets économiques majeurs.
Reconnaissance mondiale
Moins pointue que sa récente
synthèses sur Les Séleucides et les
Ptolémées. L’héritage monétaire et
financier d’Alexandre le Grand (en
collaboration avec François de
Callataÿ, 2006), sa lumineuse Naissance de la monnaie. Pratiques
monétaires de l’Orient ancien (PUF,
2001) est la meilleure introduction
à sa démarche.
Elu le 19 mai 1989 à l’Académie
des inscriptions et belles-lettres, au
fauteuil de l’égyptologue Georges
Posener, le nouveau membre de
l’Institut ponctue un parcours sans
faute par son entrée au Collège de
France, donnant, le 9 mars 1994, sa
leçoninauguraleàlachaired’histoire économique et monétaire de
l’Orient hellénistique.
Le prestige universitaire de ce
savant hors norme – enseignant
une saison à Princeton, il ne comptait plus les doctorats honoris causa et les académies et sociétés internationales qui le cooptèrent – lui
assurait une reconnaissance mondiale. L’homme restait pourtant
simple,modestemême,réjouicomme un enfant quand ses pairs le
célébraient. Ainsi, son élection au
Collège de France le laissa émerveillé – tant il se sentait, depuis le
temps des études, comme un
«enfant de la République », éternellementredevable àcetteméritocratie républicaine qui l’avait promu
de pupille sans soutien aux plus
hautes destinées du savoir et de sa
conservation. p
Philippe-Jean Catinchi
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Xx)0T'-3,%vKNXN'TˆR)
AU CARNET DU «MONDE»
Naissance
Londres. Paris.
Mireille,
son épouse,
Anne et Philippe,
ses enfants,
Julie, Rémi, Claire,
ses petits-enfants
Et toute la famille,
M Germaine Kerridge,
son épouse,
M. Eric Kerridge,
son fils,
Mlle Gaëlle Kerridge,
sa fille,
M. Alan Kerridge,
son frère,
ont l’immense chagrin de faire part
du décès de
ont la tristesse d’annoncer le décès de
M. Marc CHAUVEINC,
inspecteur des bibliothèques,
survenu le 6 juillet 2014.
L’incinération aura lieu le 11 juillet,
à 14 h 30, au crématorium du cimetière
du Père-Lachaise, salle Mauméjean,
Paris 20e.
29, rue Miollis,
75015 Paris.
est née
le 5 juillet 2014.
Alès.
Paris.
Les familles Djian, Bryf, Ollie, Parkiet,
Vincent, Benhamou,
ont la douleur de faire part du décès
de leur mère, grand-mère, belle-mère
et tante,
Mme Emilie BENHAMOU,
survenu le 28 juin 2014, à Paris,
à l’âge de quatre-vingt-huit ans.
L’inhumation a eu lieu le vendredi
4 juillet, à Fontainebleau.
Pour le repos de son âme.
Gérard Biraud,
son époux,
Ses belles-sœurs, beau-frère, nièces,
neveux, petites-nièces et petits-neveux,
des familles Biraud, Claisse, Geffrier, Harel,
Ses cousins des familles Arnould,
Bédin, Biraud, Estrangin, Givelet, Jouan,
de Valmont,
Ses amis
Et voisins,
ont le profond chagrin de faire part
du décès de
Pierrette BIRAUD,
née BOURGEOIS,
enlevée à leur tendre affection
le 4 juillet 2014.
La cérémonie de recueillement aura
lieu à Genève, le vendredi 11 juillet,
à 17 heures, en la chapelle de la Cluse,
89, boulevard de la Cluse, où il est dès
maintenant possible de se rendre auprès
de la défunte.
Le samedi 6 septembre, à 11 h 30,
sa famille et ses amis se réuniront pour
l’inhumation de ses cendres, dans
le caveau familial du cimetière d’AubignéRacan (Sarthe), à proximité du Manoir
de Champmarin.
155, avenue Charles de Gaulle,
92200 Neuilly-sur-Seine.
champmarin@gmail.com
La famille de
Jeanne CALO
a le regret d’annoncer sa disparition,
survenue le 20 juin 2014, à Princeton,
NJ (USA), à l’âge de quatre-vingt-dix-huit
ans.
Conformément à ses souhaits, elle a été
incinérée dans la plus stricte intimité.
survenu le 3 juillet 2014,
à l’âge de soixante-dix ans.
« Ô mort, où est ta victoire ? »
Nerval.
M. et Mme Marc Knobel
et leurs enfants,
Mme Lucienne Knobel,
sa sœur,
M. Albert KNOBEL,
M Madeleine Consigny, née Vidal,
son épouse,
Ses enfants,
Ses petits-enfants,
Ses arrière-petits-enfants,
Parents, alliés
Et amis,
me
ont le regret de faire part du décès de
M. Thierry CONSIGNY,
survenu à l’âge de quatre-vingt-quatre
ans.
Les obsèques religieuses auront lieu
le jeudi 10 juillet 2014, à 15 h 30,
en l’église de Rousson, suivies
de l’incinération dans l’intimité familiale.
La famille remercie par avance toutes
les personnes qui s’associeront à sa peine.
Yves Lévy,
président-directeur général,
Alain Tedgui,
président du conseil scientifique
Et l’ensemble des personnels
de l’Inserm,
Arlette
DARFEUILLE-MICHAUD.
Décès
M. David KERRIDGE,
Jean-Michel Lhote,
Sylvie et Alain Roué,
François et Maria Luisa Lhote,
Thierry et Dominique Lhote,
ses enfants, gendre et belles-filles
Camille Chantret et Yves Lugan,
sa sœur et son frère,
Ses petits-enfants
Et arrière-petits-enfants
Les familles Lhote, Lugan, Chantret,
ont la tristesse de vous faire part du décès
de
Geneviève LHOTE,
née LUGAN,
survenu le 7 juillet 2014,
à l’âge de quatre-vingt-six ans.
Ils rappellent le souvenir de son époux,
André LHOTE,
(1913-1993)
ont le chagrin d’annoncer le décès de
ont eu la tristesse d’apprendre la disparition
de
Ginevra
me
Personnalité marquante de la recherche
médicale française, Arlette DarfeuilleMichaud, professeure de bactériologie
et de biologie moléculaire, a dirigé l’unité
mixte Inserm 1071/université d’Auvergne/
Inra « Bactéries intestinales, inflammation
et susceptibilité de l’hôte » à la Faculté
de médecine et de pharmacie de ClermontFerrand. Elle a mené des travaux pionniers
sur la maladie de Crohn, une inflammation
chronique de l’intestin, caractérisée
par une hyper-activation du système
immunitaire en réponse à la flore intestinale
chez un hôte présentant une susceptibilité
génétique. Elle a notamment été à l’origine
de la découverte d’une bactérie qui pourrait
jouer un rôle dans cette affection.
Reconnue dans le monde entier pour
la remarquable qualité de ses travaux,
elle s’est entourée d’une équipe qui va
s’attacher à poursuivre avec le même
enthousiasme ses recherches.
Ils s’associent à la douleur de
ses proches, de ses collaborateurs et de
tous ceux qui l’ont connue.
Nadia Dorny,
son épouse,
Jean-Philippe Dorny,
son père
et Catherine Razavet,
Ouiza Bennad,
sa belle-mère,
Catherine Etancelin,
Anne Domenech-Moir,
Isabelle Dorny-Gottlieb,
ses sœurs
et leurs conjoints,
Karima Bennad,
Nassima Dris,
Farid Bennad,
ses belles-sœurs et son beau-frère
et leurs conjoints,
Ses neveux et nièces
Et toute la famille,
ont la douleur de faire part du décès de
Jérôme DORNY,
survenu le 7 juillet 2014, à l’Institut Curie,
entouré de tous les siens.
Nous nous réunirons le vendredi
11 juillet, à 10 h 30, en l’église Saint-Séverin,
à Paris 5e, pour une cérémonie d’adieu.
L’inhumation aura lieu au cimetière
parisien de Thiais, à 12 h 45.
Contact : nbennad@free.fr
Le 4 juillet 2014 ont été célébrées dans
la plus stricte intimité les obsèques de
M. Marcel FÉRON,
chevalier de la Légion d’honneur,
décédé à Paris, le 29 juin 2014,
à l’âge de quatre-vingt-six ans.
et de ses fils
Denis LHOTE,
(1959-1960)
ce samedi 5 juillet 2014.
Albert Knobel est allé rejoindre
son épouse,
Claudine, Marlène, Sarah,
née SFEZ,
épouse KNOBEL,
sa mère,
Bassia, Golda KEISSERMANN,
épouse KNOBEL,
son père,
Isaac, Meyer KNOBEL,
son frère,
Robert KNOBEL
et toute sa famille.
Juif d’origine polonaise et russe, il avait
connu les affres de la guerre et de
l’Occupation. Cela marquera durablement
sa vie. Marchand au Carreau du Temple
(tableau A, classe 5), autodidacte et poète
à ses heures, il aimait le jazz et la musique,
il adorait la vie. Ce fut un grand personnage
et un enfant du Yiddish land.
Avec son départ, un peu plus d’un monde
s’en va.
et
Jean-Pierre LHOTE,
(1958-1995).
L’incinération aura lieu le mardi
15 juillet, à 10 h 30, au crématorium
du cimetière du Père-Lachaise, Paris 20e.
Elle fut une femme remarquable
et courageuse, pleine de foi et de
convictions.
32, rue Fontaine,
75009 Paris.
Marie-France et Taoufik El Kaouri,
sa fille et son gendre,
Axel et Hanna,
Mehdi et Sarah,
ses petits-enfants,
Jean-Louis et Denise Rusterholtz,
Nicole Rusterholtz,
Joël Rusterholtz,
Gerard et Mick Rusterholtz,
Christiane Legrand,
ses frères, sœur et belles-sœurs
leurs enfants et petits-enfants,
ont la tristesse d’annoncer le décès de
Pierre Le Mau de Talancé,
son époux,
Frédéric, Marine, Claire et Vincent,
ses enfants,
Simone Sicot,
sa mère,
Olivier et Bertrand Sicot,
ses frères,
ont la grande tristesse de faire part
du décès de
Sophie
LE MAU de TALANCÉ,
née SICOT,
qui nous a quittés le vendredi 4 juillet
2014.
Une cérémonie sera donnée le jeudi
10 juillet, à 14 h 15, en l’église Saint Pierre
Saint Paul, place de l’Église,
à Rueil-Malmaison (Hauts-de-Seine).
L’inhumation suivra à 15 h 30,
au cimetière des Bulvis, 108, route
de l’Empereur, à Rueil-Malmaison.
L’administrateur
Et les professeurs
du Collège de France
ont la tristesse de faire part du décès,
survenu le 3 juillet 2014, de leur collègue
Georges LE RIDER,
professeur honoraire
au Collège de France,
titulaire de la chaire
Histoire économique et monétaire
de l’Orient hellénistique
de 1993 à 1998.
Collège de France,
11, place Marcelin Berthelot,
75231 Paris Cedex 05.
M. Raoul de Plinval-Salgues,
son époux,
Béatrice et Jean,
Pierre (†),
Paul et Sabine,
Anne et Marc,
Elisabeth et Yves,
ses enfants et leurs conjoints,
Ses neufs petits-enfants,
ont la tristesse de faire part du rappel
à Dieu de
Marinelle
de PLINVAL-SALGUES,
née de BAYNAST
de SEPTFONTAINES,
le 5 juillet 2014,
à l’âge de quatre-vingt-deux ans.
La cérémonie aura lieu le vendredi
11 juillet, à 14 h 15, en l’église SaintClodoald, place de l’Église à Saint-Cloud
(Hauts-de-Seine).
Ni fleurs ni couronnes.
François RUSTERHOLTZ,
survenu le 7 juillet 2014,
à l’âge de soixante-quatorze ans.
Une messe sera célébrée le 10 juillet,
à 10 heures, en l’église Sainte-Thérèse,
à Chatou (Yvelines).
Crozon (Finistère).
Étienne Schlumberger,
son mari,
Maurice, Dinan, Anne, Adeline
Schlumberger,
ses enfants
et leurs conjoints,
Gaëtan, Gwenaël Vourc’h,
Marc-Étienne, Morgane, Maeva,
Merlin, Moana Schlumberger,
ses petits-enfants et leurs conjoints,
Arsène, Aglaé Kuhlich,
Amir Vourc’h,
Naïline, Lilwen, Olwéane Serge,
Nikita Morvan-Schlumberger,
ses arrière-petits-enfants,
ont la tristesse de faire part de la disparition
de
Mme Nicole SCHLUMBERGER,
née NEUKIRCH,
« leur Nicoz chérie »,
survenue le matin du lundi 7 juillet 2014,
à l’âge de quatre-vingt-treize ans, après
avoir fêté ses soixante-huit ans de mariage,
la veille au soir.
Un culte d’actions de grâce autour de
la vie qu’elle a donnée et reçue, aura lieu
le samedi 12 juillet, à 10 heures, en
la chapelle de Saint-Hernot, en presqu’île
de Crozon.
La Vigie,
12, rue Ernest Renan,
29160 Crozon.
Gières. Grenoble. Echirolles. Paris.
Mme Maryse Scholl,
son épouse,
Gilles Scholl,
son fils,
Anne et Ivan Craighero,
sa fille et son gendre,
Mathias et Thomas,
ses petits-fils,
Jean-Marie et Sylvie Scholl,
son frère et sa belle-sœur,
leurs fils, Benjamin et Valentin,
Claire Scholl,
sa belle-sœur
et ses fils, Julien et Pierre-Grégoire,
Parents
Et amis,
ont la douleur de faire part du décès de
M. Pierre-Claude SCHOLL,
Cet avis tient lieu de faire-part.
dans sa soixante-neuvième année.
2, rue Victor Hugo,
78230 Le Pecq.
Les obsèques ont eu lieu le samedi
5 juillet 2014.
0123
météo & jeux
Jeudi 10 juillet 2014
-5 à 0°
-10 à -5°
0 à 5°
5 à 10°
10 à 15°
40 km/h
14 19
Châlonsen-champagne
15 19
Rennes
13 22
Strasbourg
Limoges
13 15
12 15
30 km/h
Chamonix
Clermont-Ferrand
H
Lyon
13 16
15 20
Montpellier
18 25
16 25
Aujourd’hui
Ajaccio
60 km/h
15 27
Lever 19h45
Coucher 04h00
Lever 05h56
Coucher 21h53
Saint Ulrich
Coeff. de marée 68/74
Vendredi
La grisaille et les pluies progresseront vers la
16 22
14 20
Normandie, la Beauce, le sud de la Bourgogne, la
Franche-Comté, la Suisse, le nord des Alpes ou
16 21
encore le Massif Central. A l'arrière, le ciel de
traîne occasionnera pas mal d'averses sur un petit
14 23
15 24
quart nord-est. Des averses se produiront par
12 22
ailleurs du Cotentin au Poitou jusqu'au Tarn et
aux Pyrénées. Temps plus sec et lumineux de la
15 24
Bretagne à la vallée de la Garonne, et surtout du
14 21
Roussillon au sud des Alpes jusqu'à la Côte d'Azur.
15 24
15 25
Jours suivants
Samedi
Nord-Ouest
Ile-de-France
Nord-Est
Sud-Ouest
Sud-Est
Dimanche Lundi
14
22
14
22
13
22
16
23
16
23
16
23
14
22
14
23
14
23
16
23
15
23
15
24
18
29
18
27
18
29
Amsterdam
Athènes
Barcelone
Belgrade
Berlin
Berne
Bruxelles
Bucarest
Budapest
Copenhague
Dublin
Edimbourg
Helsinki
Istanbul
Kiev
La Valette
Lisbonne
Ljubljana
Londres
Luxembourg
Madrid
Moscou
Nicosie
Oslo
Prague
Reykjavik
3
4
5
6
soleil,oragepossible17
beautemps
22
averseséparses 19
soleil,oragepossible16
variable,orageux 17
faiblepluie
11
nuageuxetorageux16
soleil,oragepossible17
bienensoleillé
14
beautemps
18
assezensoleillé 14
bienensoleillé
11
14
bienensoleillé
22
beautemps
16
pluiemodérée
24
bienensoleillé
19
beautemps
aversesmodérées 14
enpartieensoleillé 13
nuageuxetorageux 11
12
beautemps
assezensoleillé 15
27
bienensoleillé
16
bienensoleillé
8
assezensoleillé
11
pluiemodérée
24
31
24
30
27
15
24
31
29
24
19
20
20
26
22
24
31
16
19
18
28
20
34
25
22
14
Riga
Rome
Sofia
Stockholm
Tallin
Tirana
Varsovie
Vienne
Vilnius
Zagreb
bienensoleillé
soleil,oragepossible
beautemps
beautemps
beautemps
soleil,oragepossible
averseséparses
assezensoleillé
assezensoleillé
aversesmodérées
Dans le monde
Alger
beautemps
Amman
beautemps
Bangkok
couvertetorageux
Beyrouth
beautemps
Brasilia
bienensoleillé
Buenos Aires assezensoleillé
Dakar
bienensoleillé
Djakarta
assezensoleillé
Dubai
beautemps
Hongkong pluiesorageuses
Jérusalem beautemps
Kinshasa
beautemps
Le Caire
beautemps
Mexico
pluiesorageuses
Montréal
beautemps
Nairobi
nuageux
CHEZ VOTRE MARCHAND DE JOURNAUX
17
21
12
16
15
20
18
12
18
13
25
25
31
22
19
28
27
24
27
16
18
22
26
29
14
8
26
26
32
28
23
20
24
14
10
13
27
34
27
33
24
14
26
30
38
32
31
33
40
20
21
24
New Delhi
New York
Pékin
Pretoria
Rabat
Rio de Janeiro
Séoul
Singapour
Sydney
Téhéran
Tokyo
Tunis
Washington
Wellington
bienensoleillé
34 44
assezensoleillé
20 27
beautemps
23 38
beautemps
0 12
beautemps
20 31
averseséparses 19 24
bienensoleillé
23 33
soleil,oragepossible28 32
bienensoleillé
8 16
bienensoleillé
27 36
pluiesorageuses 25 29
beautemps
23 27
pluiesorageuses 20 29
enpartieensoleillé 13 15
Cayenne
Fort-de-Fr.
Nouméa
Papeete
Pte-à-Pitre
St-Denis
soleil,oragepossible 25
soleil,oragepossible28
17
assezensoleillé
25
bienensoleillé
pluiesorageuses 27
22
bienensoleillé
Outremer
30
28
24
26
28
24
Météorologue en direct
au 0899 700 703
1,34 € l’appel + 0,34 € la minute
7 jours/7 de 6h30-18h
N° 1235 du 3 au 9 juillet 2014
courrierinternational.com
France : 3,70 €
Mondial 2014 Les Bleus
vus par la presse étrangère
NUMÉRO SPÉCIAL
INDONÉSIE
Là où s’invente
l’Asie de demain
LE VOTE QUI PEUT TOUT CHANGER
LA RUÉE VERS SUMATRA
M 03183 - 1235 - F: 3,70 E
3’:HIKNLI=XUX\U^:?b@c@n@p@a";
Mots croisés n˚14-162
2
Jérusalem
Le Caire
Chaque jeudi,
l’essentiel
de la presse étrangère
Les jeux
1
Thalweg
Beyrouth
Tripoli
Tripoli
Dépression
Occlusion
Ankara
Athènes
Tunis
Tunis
Rabat
Front froid
En Europe
16 26
D
Istanbul
1010
Japon Le typhon Neoguri frappera la côte Sud et Est
Perpignan
Températures à l’aube 1 22 l’après-midi
Anticyclone
Kiev
Budapest
Odessa
Zagreb 1005
Belgrade
Bucarest
Sofia
Rome
Barcelone
Barcelone
Alger
Nice
Marseille
16 25
15 24
Copenhague
D
Berne
Lisbonne
Lisbonne
Front chaud
Moscou
Munich Vienne
Séville
A
Toulouse
1015
Madrid
10 15
14 23
Biarritz
1020
Grenoble
Bordeaux
Riga
Milan
25
10
St-Pétersbourg
Bruxelles
Paris
7 11
Helsinki
1020
Amsterdam Berlin
Varsovie
Prague
Londres
A
12 16
13 21
Paris jazzé
Minsk
Dublin
1030
11 15
Dijon
Poitiers
Edimbourg
1020
1025
Besançon
13 24
30 km/h
1015
12 18
15 18
Nantes
Oslo
Stockholm
1005
Orléans
13 23
par Renaud Machart
A
D
7
8
9
Solution du n˚14-161
10 1 1 12
II
III
VII
FRANCE 3
VIII
20.45 Des racines et des ailes.
Un balcon sur la France. Magazine.
22.40 Météo, Soir 3.
23.10 Le Grand Tour.
De Delhi à Paris, en passant par Amsterdam
et Jaipur (115 min).
IX
Euro Millions
X
I. Restent attachés à leurs
supports. II. Commente en marge.
Facilite l’évacuation. III. Une mise
en place qui peut avoir du charme.
Lettres de secours. IV. Font
monter la tension. Belle des
champs. Déteste. V. Touchés dans
leurs intérêts. Messieurs. Mesure
sur la Muraille. VI. Ceux d’avant.
Ont été lues et approuvées.
VII. Passé. L’Irlande des poètes.
Met la France à l’échelle.
VIII. Rend la marche difficile.
Dégagé. A la sortie du patelin.
IX. En tenue pour être croquées.
Dégagement à coups de serpe.
X. L’art de trouver les bons mots.
Solution du n° 14 - 161
Horizontalement
I. Fascinatrice. II. Aberration.
III. Bâtir. Htiduj (Judith). IV. USA.
Isle. ENO. V. Lorette. Exil. VI. Au
Tartare. VII. Trz. Nièce. PV.
VIII. Idiote. Cou. IX. Ointe. Barrir.
X. Nécessiteuse.
20.55 Hostages.
Téléfilm. Régis Musset. Avec Bernard Le Coq,
Bernard Yerlès, Patrice Juiff (France, 2011).
22.30 Etreintes brisées pp
Film Pedro Almodóvar. Avec Penélope Cruz,
Lluís Homar, Blanca Portillo (Esp., 2009) U.
0.35 Pierre Palmade.
« J’ai jamais été aussi vieux » (90 min).
VI
Verticalement
1. Avec intelligence et doigté.
2. Bloqué au moment de passer à
table. 3. Rapprochées. Peiner à la
tâche. 4. Cognes à quai. Mis
n’importe comment. 5. Patronne
du jour. Possessif. 6. A poussé
Clovis vers les fonts. Suivi chemin
faisant. Préposition. 7. Points
opposés. Un corse un peu piquant.
8. Donne de beaux fils. A soigner
pour ne pas lâcher. 9. Passage
étroit. Autre moi. 10. D’un
auxiliaire. Sur la portée. Grande
réunion. 11. Son coup peut être
fatal. Belle enfant de Colette.
12. Mise en morceaux.
Philippe Dupuis
Verticalement
1. Fabulation. 2. Abasourdie.
3. Setar. Zinc. 4. Cri. Et. Oté.
5. Irritantes. 6. Na. Strié. 7. Athlète.
Bi. 8. Tite. Achat. 9. Roi. Ere. Ré.
10. Index. Cru. 11. Uni. Pois.
12. Enjolivure.
Résultats du tirage du mardi 8 juillet.
CANAL +
8, 18, 22, 24, 27, 4 e et 11 e
Rapports : 5 numéros et e e : pas de gagnant ;
5 numéros et e : 155 893,90 ¤; 5 numéros : 33 068,40 ¤ ;
4 numéros et e e : 4 133,50 ¤ ; 4 numéros et e : 162,20 ¤ ;
4 numéros : 66,80 ¤ ;
3 numéros et e e : 70,20 ¤ ; 3 numéros et e : 12,40 ¤ ;
3 numéros : 8,60 ¤ ;
2 numéros et e e : 23,30 ¤ ; 2 numéros et e : 7,60 ¤ ;
2 numéros : 3,30 ¤ ; 1 numéro et e e : 13,20 ¤.
20.55 Week-end royal pp
Film Roger Michell. Avec Bill Murray, Laura
Linney, Olivia Williams, Blake Ritson (GB, 2012).
22.25 Strike Back.
Série. Russie [1-2/2] (saison 3, 7 et 8/10) V.
0.00 Abraham Lincoln :
chasseur de vampires pp
Film Timur Bekmambetov. Avec Benjamin
Walker, Dominic Cooper (EU, 2012, 100 min) V.
0123 est édité par la Société éditrice du « Monde » SA
20.35 La Maison France 5.
Durée de la société : 99 ans à compter du 15 décembre 2000. Capital social : 94.610.348,70¤. Actionnaire principal : Le Monde Libre (SCS).
Rédaction 80, boulevard Auguste-Blanqui, 75707Paris Cedex 13 Tél.: 01-57-28-20-00
Abonnements par téléphone : de France 32-89 (0,34 ¤ TTC/min) ; de l’étranger: (33) 1-76-26-32-89;
par courrier électronique: abojournalpapier@lemonde.fr. Tarif 1 an : France métropolitaine : 399 ¤
Courrier des lecteurs: blog : http://mediateur.blog.lemonde.fr/; Par courrier électronique: courrier-des-lecteurs@lemonde.fr
Médiateur: mediateur@lemonde.fr
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http://immo.lemonde.fr
Documentation: http ://archives.lemonde.fr
Collection: Le Monde sur CD-ROM : CEDROM-SNI 01-44-82-66-40
Le Monde sur microfilms : 03-88-04-28-60
La reproduction de tout article est interdite sans l’accord de l’administration. Commission paritaire
des publications et agences de presse n° 0717 C 81975 ISSN 0395-2037
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12, rue Maurice-Gunsbourg,
94852 Ivry cedex
Président : Louis Dreyfus
Directrice générale :
Corinne Mrejen
PRINTED IN FRANCE
80, bd Auguste-Blanqui,
75707 PARIS CEDEX 13
Tél : 01-57-28-39-00
Fax : 01-57-28-39-26
Toulouse
(Occitane Imprimerie)
Montpellier (« Midi Libre »)
Grâces soient rendues à Harlem
à Montmartre de ne pas propager
le lieu commun, copié et recopié
par la plupart des historiens,
selon lequel La Création du monde (1923) de Darius Milhaud serait
le premier exemple de « jazz symphonique ». Bien avant cela, John
Alden Carpenter (1876-1951), compositeur américain méconnu
mais essentiel, l’avait intégré à
son Concertino pour piano (1915)
et à son ballet Krazy Kat (1921).
C’est à ce genre de détail qu’on
reconnaît la qualité du propos
d’un documentaire historique. p
20.55 Mentalist.
20.45 Mes deux amours.
V
Histoire consacrait
sa soirée à deux
excellents films:
«Boris Vian, la vie
jazz» et «Harlem
à Montmartre»
Jeudi 10juillet
TF 1
FRANCE 2
IV
ainsi expliqué dans les détails
comment Paris découvrit le jazz,
grâce au 369e régiment d’infanterie, surnommé les Harlem
Hellfighters et expédié en France
à la fin de 1917, dont la manière
chaloupée et rythmée de jouer
stupéfia.
Beaucoup de musiciens et écrivains noirs vinrent après la guerre
s’installer à Paris, où ils pouvaient
librement exister sans ségrégation. Si le film s’intéresse inévitablement à Joséphine Baker, il s’attache aussi à Ada Bricktop Smith
et Eugene Bullard, qui furent à
Paris les animateurs essentiels de
ce mouvement transatlantique
grâce à leurs cabarets, où se donnait le meilleur jazz, qui fascina
les musiciens classiques.
Mercredi 9juillet
Série. Mon ancien moi (saison 4, 10/24) U.
21.45 Football.
Coupe du monde 2014 (2e demi-finale) :
Argentine - Pays-Bas. En direct de Sao Paulo.
23.55 Le Mag de la Coupe
du monde. Magazine (20 min).
I
Horizontalement
L
undi 7juillet, la chaîne Histoire, filiale de TF1, consacrait sa
soirée à deux excellents
films dévolus, tout ou partie, au
jazz à Paris : Boris Vian, la vie jazz
(60 minutes, 2009), de Philippe
Kohly, et Harlem à Montmartre
(80 minutes, 2010), d’Olivier Simonet. Ces deux documentaires
seront à nouveau à l’antenne mercredi 9 juillet, respectivement à
16 h 40 et 17 h 40.
Le jazz fut une part essentielle
de la vie de Boris Vian : il apprit la
trompette adolescent, joua de
l’instrument d’une manière « honnête », sans plus, rappelle le film,
et se produisit dans un petit
orchestre qu’il avait fondé avec
ses deux frères lors de surprisesparties à son domicile, puis dans
les cabarets encavés de la rive gauche, dont il fut un éminent représentant. Mais ce modeste faisait
mieux que de « jouer de la trompinette », comme il aimait à dire, et
fut surtout un passeur érudit et
passionné.
Vian écrivit beaucoup sur le
jazz, dans la revue Jazz Hot notamment, et défendit le bon vieux
jazz de La Nouvelle-Orléans, puis
le be-bop. Il fut responsable de collections de disques chez Philips,
où il dirigea le label Fontana, sous
l’égide de Jacques Canetti, qui
avait été le premier, en 1939, à faire venir Duke Ellington, le dieu de
Vian, à Paris.
Si le joli et mélancolique portrait de l’écrivain-musicien que
trace, avec le soutien d’une fine
couture de documents d’archives,
le film de Kohly ne fait pas intervenir de témoins, Harlem à Montmartre convoque de nombreux
spécialistes et universitaires, afroaméricains pour l’essentiel. Il est
Les soirées télé
Sudoku n˚14-162
19
C’EST À VOIR | CHRONIQUE
> 35°
1025
Metz
17 19
12 21
13 21
13 23
PARIS
Caen
Brest
www.meteonews.fr
Amiens
Rouen
30 à 35°
Reykjavik
15 24
14 19
25 à 30°
10.07.2014 12h TU
Lille
Cherbourg
20 à 25°
En Europe
Jeudi 10 juillet
Toujours humide et frais
40 km/h
15 à 20°
Afrique CFA 2 800FCFA Algérie 450DA
Allemagne 4,20€ Andorre 4,20€
Autriche 4,20€ Canada 6,50 $CAN
DOM 4,40 € Espagne 4,20€
E-U 6,95$US G-B 3,50£ Grèce 4,20€
Irlande 4,20€ Italie 4,20€
Japon 750¥ Maroc 32DH
Norvège 52NOK Pays-Bas 4,20€
Portugal cont. 4,20€ Suisse 6,20CHF
TOM 740CFP Tunisie 5DTU
< -10°
écrans
FRANCE 5
Magazine présenté par Stéphane Thebaut.
21.35 Silence, ça pousse ! Magazine.
22.30 C dans l’air. Magazine.
23.40 Superstructures XXL.
Un barrage au cœur des Andes (45 min).
ARTE
20.50 Opéra - La Flûte enchantée.
Opéra de Mozart. Par L’Orchestre baroque de
Fribourg et le Chœur English Voices, dir. Pablo
Heras. Mise en scène de Simon McBurney.
Avec Stanislas de Barbeyrac, Mari Eriksmoen.
23.50 My Joy pp
Film Sergei Loznitsa. Avec Victor Nemets, Olga
Shuvalova (Russie, 2010, v.o., 125 min).
M6
20.50 Maison à vendre.
P résenté par Stéphane Plaza (310 min).
TF 1
Série. La Grande Révélation. Un lourd fardeau.
Mission de sauvetage. Droit de vie ou de mort
(S1, 9 à 12/15, inédit). Avec Toni Collette U.
23.30 New York, section criminelle.
Série (saison 3, 10 et 11/21, 100 min) U.
FRANCE 2
20.45 Carnet de voyage
d’« Envoyé spécial ».
La Grande Braderie des résidences secondaires ;
Tourisme en Iran : la nouvelle Révolution...
22.50 Complément d’enquête.
Magazine. Luc Besson.
0.00 Private Practice.
Série (saison 5, 7 et 8/22, 80 min) U.
FRANCE 3
20.45 L’Armée des ombres ppp
Film Jean-Pierre Melville. Avec Lino Ventura,
Paul Meurisse, Simone Signoret (Fr. - It., 1969).
23.05 Météo, Soir 3.
23.35 Pétanque.
Mondial La Marseillaise (90 min).
CANAL +
20.55 Banshee.
Série. Le Nouveau Boss W. Les Frères Moody V
(saison 1, 3 et 4/10). Avec Antony Starr.
22.40 Girls.
Série (S2, 3 et 4/10). Avec Lena Dunham U.
23.35 Mon oncle Charlie.
Série (S10, 4 et 5/23). Avec Jon Cryer (40 min).
FRANCE 5
20.40 Cuisine sauvage.
[3/5] Guadeloupe avec Eric Guérin.
21.35 Planète insolite. La Suisse.
22.25 C dans l’air. Magazine.
23.35 Django Reinhardt... (50 min).
ARTE
20.50 The Killing.
Série (S3, 3-4/10, inédit). Avec Nikolaj Lie Kaas.
22.50 La Forêt.
Téléfilm. Arnaud Desplechin. Avec Martine
Chevallier, Adeline d’Hermy (France, 2014).
0.15 Disparue.
Téléfilm. Dominik Graf. Avec Elmar Wepper,
Ronald Zehrfeld (Allemagne, 2011, 105 min).
M6
20.50 Lara Croft Tomb Raider :
le berceau de la vie
Film Jan De Bont. Avec Angelina Jolie (2003) U.
23.00 Millénium : les hommes
qui n’aimaient pas les femmes p
Film Niels Arden Oplev (2009, 160 min) V.
20
décryptages
Pour retrouver
le meurtrier
de Yara Gambirasio,
les policiers
ne disposaient
que de deux gouttes
de sang. Est alors
lancée la plus
grande traque
d’ADN menée
en Italie.
Elle a permis
d’identifier
un assassin,
et de révéler
une vieille histoire
d’adultère
Philippe Ridet
Rome
Correspondant
F
inalement, il leur ressemble. Si
Massimo Bossetti est bien l’assassin de Yara Gambirasio,
13 ans, dont le corps poignardé
a été retrouvé le 26 février 2011,
trois mois après sa disparition,
cela signifie que le « monstre » était parmi
eux.
Comme de nombreux habitants de la
Val Brembana, entre Bergame et le lac de
Côme, il travaillait dur sur des petits chantiers de maçonnerie. Levé tôt, rentré tard,
été comme hiver. Peu de visites sinon à
son conseiller fiscal et à l’un de ses frères
dansune commune voisine de son domicile. Une camionnette pour transporter la
bétonneuse, les sacs de plâtre et de ciment
et une Volvo V 40 dans le garage pour
conduire, le dimanche, sa femme et leurs
jeunes enfants à la messe. De rares autres
distractions : des sorties à Bergame pour
faire du lèche-vitrines devant les boutiques de luxe dans la ville basse ou celles
du grand centre commercial d’Orio al
Serio, tout proche de l’aéroport. Les vacances ? Quelques jours en pension complète
à Charm El-Cheikh, cette station balnéaire
de la mer Rouge si prisée des Italiens du
Nord.
Pour le reste, une vie réglée dans un
mouchoir de poche constitué de quelques
villages distants les uns des autres d’une
dizaine de kilomètres au plus : Palazzago
où il travaille, Brembate di Sopra où habitait l’adolescente, Chignola d’Isola où son
corps a été retrouvé, Mapello où Massimo
Bossetti, 44 ans, vivait avant son arrestation, le 16 juin. Inutile de chercher plus de
détails sur Wikipédia. Histoire, géographie, culture? « Cette section est vide,insuffisamment détaillée ou incomplète »,
signale l’encyclopédie en ligne. Soucieux
de son apparence, mince, blond, le menton orné d’une petite barbiche, Massimo
Bossetti fréquentait également un solarium dans un centre de soins esthétiques,
l’Oltreoceano, à Brembate di Sopra. Une
coquetterie incongrue pour un maçon,
mais après tout, pensait-on devant son
bronzage permanent, il a travaillé assez
dur pour faire ce qu’il veut de son argent.
« Si c’est vrai qu’il s’agit de cet homme,
pensez à sa famille, a déclaré, dimanche
22 juin, le prêtre de la paroisse de Brembate dans son homélie. Ils disent qu’ils ont
trouvé l’assassin… mais nous ne pouvons
pas nous ériger en juges. Quand nous pensons à un meurtre, nous viennent à l’esprit
les images d’un homme féroce. Or nous
sommes en présence d’une personne normalissima [plus que normale], père de
trois enfants. J’espère qu’il n’est pas l’assassin… »
Don Corinno Scotti a dit tout haut ce
que beaucoup pensent tout bas dans la val-
0123
Jeudi 10 juillet 2014
Massimo Bossetti
après son arrestation,
à la mi-juin, à Bergame.
Il est soupçonné d’avoir tué
Yara Gambirasio.
CAPTURE D’ÉCRAN-TGCOM24, MALOSIO/FOTOGRAMMA/ROPI-REA
Lecoupable
improbable
Combien de femmes un chauffeur
d’autocar peut-il rencontrer dans sa vie ?
Combien d’entre elles sont susceptibles
d’avoir eu une relation sexuelle avec lui ?
Une liste de près de 500 femmes est dressée, même celles qui ont quitté la région
depuis longtemps. Un appel est lancé
dans la presse afin qu’elles se fassent
connaître. Pas une ne répondra.
Mais parfois la chance récompense la
patience, comme celle qui échoit au maréchal des carabiniers Giovanni Mocerini,
un flic à l’ancienne qui croit encore aux
vieilles méthodes et aux confidences glanées sur le zinc autour d’un verre de grappa. Un jour de froid. Un bar d’un village de
montagne. Une conversation apparemment anodine avec Antonio Negroni, une
de ses connaissances. « Aide-moi. Juste un
nom, sans procès-verbal », insiste le carabinier. Antonio Negroni lâche le morceau.
Oui, il a bien connu Guiseppe Guerinoni,
lorsqu’ils habitaient l’un et l’autre à Ponte
Selva. Non le chauffeur d’autocar n’était
pas un tombeur, mais « un homme avec
un H majuscule ». Oui, il a eu une relation
avec Ester Arzuffi en 1969. Ensuite la jeune
fille est partie vivre ailleurs, à Clusone, où
elle a accouché de jumeaux, un garçon et
une fille. Son mari, Giovanni Bossetti, a eu
d’autant moins de mal à les reconnaître
qu’il croyait qu’ils étaient les siens.
Ester Arzuffi n’avouera jamais son
secret, et la mort de Guiseppe Guerinoni
semblait l’avoir enfoui sous une pierre
tombale. Le prélèvement d’ADN effectué
sur elle ne laisse aucun doute. Les policiers
connaissent la mère et le père de l’assassin
présumé. Ne reste qu’à le piéger. Dimanche 15 juin, sous prétexte d’un contrôle
d’alcoolémie, Massimo Bossetti, le fils
naturel d’Ester Arzuffi, est prié de « souffler dans le ballon ». L’Alcootest est immédiatement analysé par la police scientifique. La probabilité qu’il soit l’assassin est
de 99,999987 %, indiquent les ordinateurs.
Toute la famille
Guerinoni doit donner
une goutte de salive,
un cheveu: tous ont
un lien génétique
avec l’«inconnu n˚1»
lée. Fallait-il vraiment remuer toute cette
poussière, tout ce petit tas de misérables
secrets si bien gardés depuis des décennies, pour faire la lumière sur un crime
qui, lui aussi, un jour serait oublié ? Tout
aurait été tellement plus simple si Mohamed Fikri, un Marocain de 26 ans arrêté
sur un bateau en route pour Tanger quelques jours après la disparition de Yara
Gambirasio le 26 novembre 2010, avait
été le meurtrier. Presque logique dans une
région où le parti autonomiste et antiimmigrés, la Ligue du Nord, dépasse les
30 % à chaque élection. Mais l’ombre du
doute auquel s’accrochent certains des
habitants des vallées ne pèse que
0,000013 %.
Lorsque les enquêteurs retrouvent, le
26 février 2011, le cadavre décomposé de
Yara Gambirasio dans un terrain vague, ils
ne disposent que d’une piste : deux gouttes de sang sur les sous-vêtements de la
victime et son collant de sport. Lors de sa
disparition, la jeune fille sortait de son
entraînement de gymnastique rythmique et sportive de Brembate di Sopra. Sur
certaines des rares photos, on la voit faisant le grand écart au milieu des compagnes de son âge. Elle porte un appareil den-
taire, ses cheveux sont retenus en arrière
par un bandeau. En plus de révéler qu’elle
serait morte de froid et d’épuisement à la
suite de ses blessures, l’autopsie permet
également de déceler la présence de microparticules de plâtre dans ses poumons. Ce
sang qui n’est pas celui de l’adolescente
doit permettre au plus vite d’identifier
celui que les policiers désignent comme
l’« inconnu n˚1 ». Quatre laboratoires sont
requis pour conduire les analyses.
C
ommence alors la plus grande collecte d’ADN jamais lancée en Italie.
Au total, 18 000 prélèvements sont
ordonnés. Convaincus que l’assassin est
un familier de la région, les policiers passent au crible de l’analyse génétique toutes les personnes susceptibles de s’être rendues ou de s’être trouvées dans les parages des lieux fréquentés par la jeune fille
(gymnase, lycée, domicile et trajet de l’un
à l’autre). Concentrant leur enquête sur les
clients d’une boîte de nuit proche de la scène du crime, ils mettent d’abord la main
sur un certain Damiano Guerinoni, dont
l’ADNest proche du suspect sans nom. Proche au point de laisser entrevoir une piste,
mais pas assez identique pour tenir un
coupable. Toute la famille Guerinoni doit
donner une goutte de sang, de salive, un
cheveu : tous ont un lien génétique avec
l’« inconnu n˚ 1 ». Et si c’était le père ? Problème : Giuseppe Guerinoni, chauffeur de
car de son état, est mort en 1999.
Par bonheur, sa veuve a gardé quelques
effets dont un vieux permis de conduire
au dos duquel se trouve un timbre fiscal
collé avec de la salive. De ce timbre est
extrait un ADN. Sa dépouille est exhumée.
Pas de doute, il est le père de l’« inconnu
n˚ 1 ». Mais alors, si la culpabilité de ses
enfants est rapidement écartée, comment
est-il possible que l’assassin présumé de
Yara Gambirasio soit de son sang ? Commence une autre enquête. Laissant les
ordinateurs mouliner des milliers de
structures de molécules d’ADN, les policiers partent à la recherche du passé de
Giuseppe Guerinoni, s’enfoncent dans les
vallées taiseuses, noyées l’hiver d’un
brouillard aussi épais que les secrets qu’il
protège. Se heurtent au mur du silence.
Déjà qu’on parle peu des vivants, ce n’est
pas pour révéler les mystères des morts !
«L’omerta n’est pas seulement une spécialité du sud de l’Italie », avouera, déçu, un
enquêteur originaire du Mezzogiorno.
Dans sa prison de Bergame, Massimo
Bossetti se dit innocent. S’il admet que son
ADN a été retrouvé sur le corps de la petite
Yara, c’est parce que, avance-t-il, on lui
aurait volé des outils sur lesquels pourraient se trouver ses traces génétiques. La
police épluche ses faits et gestes au cours
des quatre dernières années, analyse les
données des portables, tablettes et ordinateurs de toute la famille. Il a d’abord nié
qu’il fréquentait un centre de soins esthétiques à proximité du gymnase de Yara
Gambirasio, avant de l’admettre.
D’ailleurs, les policiers ont également
découvert qu’il faisait de fréquents passages à Brembate di Sopra avec sa camionnette pour revenir de son chantier à son
domicile, alors que ce trajet ajoute 5 kilomètres au parcours le plus direct. « J’allais
voir mon comptable et mon frère. Jem’arrêtais pour acheter des figurines Panini pour
mes enfants », plaide-t-il. Pourtant, ni le
vendeur de journaux, ni le comptable, ni
son frère ne se souviennent l’avoir vu si
souvent. Sa fourgonnette a été filmée par
des caméras de surveillance dans le quartier de l’adolescente. Le procureur pense
disposer d’assez d’éléments à charge, en
plus de son ADN, pour demander le renvoi
immédiat de Massimo Bossetti devant le
tribunal.
Deux semaines après l’arrestation de
l’assassin présumé de la jeune gymnaste,
l’affaire continue de remplir les colonnes
des journaux, mais ne fait plus la « une ».
Ester Arzuffi et son mari ont quitté leur village. Les volets de leur maison sont clos.
Elle continue de nier contre toute évidence avoir eu une relation extraconjugale
avec le chauffeur de car. Quarante-cinq
ans de secret sont lourds à avouer. Massimo Bossetti, lui, n’a découvert la vérité de
sa naissance que le lendemain de son
arrestation. p
0123
analyses
Jeudi 10 juillet 2014
21
Un « pacte de responsabilité » à contre-emploi ?
ANALYSE
compétitivité des entreprises françaises. Ce fut
le choix du crédit d’impôt pour la compétitivité
etl’emploi(CICE), suivi,consolidé etamplifié par
le pacte de responsabilité qui va se déployer jusqu’en2017. Au total, 41 milliards d’euros d’allégements en faveur des entreprises, dont le gouvernement espère qu’ils vont leur permettre de
regagner des parts de marché, dans un premier
temps, puis d’embaucher et d’investir.
Leseffets tardentà se faire sentir. D’abord parce que la France n’est pas la seule, au sein de l’ensemble européen, à avoir opté pour cette baisse
des coûts salariaux. On assiste au contraire à une
sorte de course au moins-disant social qui neutralise largement les effets de la baisse en France.
Sans compter la destruction du capital humain
qui s’ensuit, à l’échelle européenne.
Ensuite, parce que l’absence de « ciblage » des
aides a profité majoritairement à des secteurs
non exposés à la concurrence internationale. On
pense notamment aux grands groupes de la distribution, tels que Carrefour ou Auchan, qui ont
pu empocher, respectivement, des chèques de
70 millions ou de 45 millions d’euros grâce au
CICE sans que cela ait eu de grands effets sur l’investissement et l’emploi.
Enfin, ce « coup de pouce » aux entreprises
leur aura d’abord et avant tout servi à reconstituerleursmarges. Letauxdemarge desentreprises devrait retrouver en 2015 son niveau d’avant
la crise, sans pour autant que l’investissement
soit revenu à un niveau équivalent.
par Patrick Roger
Service France
O
n aurait tort de résumer le débat
qui traverse les rangs de la gauche parlementaire et qui s’est
manifesté lors de l’examen des
collectifs budgétaire et social à
une simple question de posture
tactique. Deux ans après l’élection de François
Hollande et d’une majorité de gauche à l’Assemblée nationale, il est légitime de s’interroger sur
la pertinence de la politique économique et budgétaire mise en œuvre.
Ces questionnements, malgré la détermination affichée et affirmée de « ne pas changer de
cap»,n’épargnentpaslasphèregouvernementale. « Où est passée la croissance ?», s’interrogeait
récemment le ministre de l’économie, Arnaud
Montebourg, à l’occasion de l’installation du
Conseil indépendant pour la croissance et le
plein-emploi. « Les politiques d’austérité, dans
tous les pays, ont donné un désastre, notait-il. Un
double désastre, tant sur les résultats politiques
que sur les résultats économiques. »
Depuis le rapport Gallois de novembre 2012,
le gouvernement a fait le pari – hasardeux – de la
Il n’est pas interdit de penser, au regard du faible impact sur l’emploi, que cette politique de
diminution des charges ne produit au final
qu’uneffet dynamique réduit sur l’activité, pour
un coût social et budgétaire élevé. En réalité, la
baisse du coût salarial ne répond pas au déficit
de compétitivité de l’économie française car elle
nerésout passonproblèmestructureldecompétitivité hors prix. Ses faiblesses ne peuvent se
résumer au seul coût du travail.
Effort brutal
Et si le gouvernement faisait fausse route ?
Nul ne contestera que les dépenses publiques,
qui représentent en France de l’ordre de 57 % du
produitintérieur brut, se situent à un niveau élevéparrapportàlamoyennedespaysdel’Organisation de coopération et de développement économiques (OCDE). Un « coût» trop élevé pour la
société ?Rien n’est moinssûr.Ledéveloppement
des infrastructures, la prise en compte des
besoins d’éducation, de formation, de santé, de
protection sociale, d’accompagnement de la
dépendance sont autant de facteurs favorables à
l’investissement et à l’activité privés. Et, contrairement à une idée répandue, les dépenses publiques n’ont pas explosé en France au cours des
quinze dernières années. Avec une progression
de l’ordre de 17 % par habitant depuis 2000, la
France se situe dans la moyenne européenne, un
niveau équivalent à celui de l’Allemagne.
Leprogrammedestabilitéétabliparlegouver-
nement prévoit, jusqu’en 2017, une réduction de
50milliards d’euros des dépenses publiques par
rapport à la norme d’augmentation spontanée.
L’effort est considérable: il aboutit, sur la période, à une quasi-stabilisation de la dépense publique en volume (hors inflation), lorsque celle-ci a
connu une hausse moyenne de 2,1 % dans la dernière décennie. Compte tenu de l’augmentation
de la population, cela correspond à une baisse
nette par habitant.Un effort d’autant plus brutal
que l’essentiel de cette compression de la dépensevaporter en2015,à hauteurde21 milliards,faisant peser un risque récessif non négligeable sur
l’économie. Les recettes ne suivront pas à hauteur espérée, ce qui ne permettra pas d’atteindre
les objectifs de réduction du déficit public.
C’est là que le scénario du gouvernement
échoue. Les conditions d’une nouvelle phase
expansive ne sont pas réunies, pas plus à court
qu’à moyen terme, et il est illusoire d’escompter
le retour d’une croissance soutenue et durable.
Le gouvernement, lui, parie sur une croissance
retrouvée pour limiter l’impact négatif de la
réduction des dépenses publiques, qui doit
financerlabaisse desprélèvementssurlesentreprises censée stimuler l’activité, et donc la croissance. Un raisonnement circulaire qui, pour
l’heure, ne produit pas les résultats attendus, ni
pour la croissance ni pour l’emploi. Les faits sont
têtus. En débattre n’est pas un sacrilège. p
IL N’EST PAS
INTERDIT DE
PENSER QUE
CETTE
POLITIQUE
NE PRODUIT
QU’UN EFFET
RÉDUIT SUR
L’ACTIVITÉ
roger@lemonde.fr
CORRESPONDANCE
Une lettre de l’ambassade d’Egypte
A la suite de la parution de l’éditorial «En Egypte, l’arbitraire et l’injustice» (Le Monde daté 27 juin),
nous avons reçu le communiqué
suivant de l’ambassade d’Egypte.
« Non, l’Egypte n’est pas devenue le pays de l’arbitraire et de l’injustice. C’est un Etat de droit qui
repose sur une nouvelle Constitution garantissant les droits et les
libertés fondamentaux.
C’est un Etat qui respecte pleinement les principes démocratiques de l’indépendance et l’impartialité de la justice, de la liberté de
conscience et d’expression, et ce
dans le cadre de la loi.
Comme tout autre Etat souverain et démocratique, l’Egypte
réclame aux journalistes étrangers opérant sur son territoire de
se conformer aux lois en vigueur
et de respecter les consignes de
sécurité nationale.
Les journalistes d’Al-Jazira
n’ont pas respecté ces règles universelles et ont donc fait l’objet
d’une procédure légale jouissant
d’une parfaite transparence et en
toute régularité. Ce qui ne constitue en aucun cas une volonté
“d’intimider la presse”.
Il convient de rappeler que plus
de 1 200 journalistes accrédités,
représentant plus de 290 institutions de presse étrangères, opèrent actuellement sur le sol égyptien en toute liberté. Ils couvrent
tous les événements en Egypte,
sans aucune restriction, et dans le
cadre de la loi égyptienne.
Non, l’Egypte n’est pas “en état
de guerre civile”. Au contraire,
l’Egypte a évité le glissement vers
la guerre civile recherché par les
forces de l’obscurantisme et souhaité par certains acteurs qui ont
œuvré pour semer la discorde et
perturber la paix civile.
Grâce à la détermination du
peuple égyptien et à l’intégrité de
ses forces armées, garantes de son
indépendance et de sa souveraineté, l’Egypte a réussi à traverser cette voie périlleuse et a engagé la
marche vers un avenir stable et
prospère.
Non, le président de la République n’a pas été élu “à l’occasion
d’un scrutin douteux”. En effet,
aucune des délégations d’observation des élections dépêchées en
Egypte – y compris celles de
l’Union européenne et de l’Organisation de la francophonie – n’a
donné un avis négatif ; toutes ont
confirmé que le scrutin s’est
déroulé en pleine transparence et
en respect entier de la loi.
L’Egypte a toujours été et restera toujours un Etat indépendant
qui rejette toute forme d’ingérence dans ses affaires intérieures. Le
peuple égyptien est profondément attaché au respect de cette
valeur universelle qui constitue la
pierre angulaire du système international contemporain. » p
RECTIFICATIF
a Economie. A la suite de l’article intitulé « Des Français se portent
au chevet d’une économie vénézuélienne mal-en-point » paru dans
Le Monde du vendredi 4 juillet, la Fondation Jean-Jaurès précise n’être
jamais intervenue auprès du gouvernement vénézuélien dans le cadre
de l’élection présidentielle de 2013. Son directeur général, Gilles Finchelstein, a cependant participé, à titre professionnel, à une mission de
conseil en communication menée par l’agence Havas pendant la campagne du futur vainqueur de cette élection, Nicolas Maduro.
0123
Les Unes du Monde
RETROUVEZL’INTÉGRALITÉ
DES « UNES » DU MONDE
- N˚19904
- 1,30 ¤ France métropolitaine
L’investiture
de Barack
Nouvelle édition
Tome 2-Histoire
---
Jeudi 22 janvier
Uniquement
2009
Fondateur
Premières mesures
Le nouveau président
américain a demandé
la suspension
: Hubert Beuve-Méry
En plus du «
en France
- Directeur
Monde »
métropolitaine
: Eric Fottorino
Obama
des audiences
à Guantanam
o
Barack et
Michelle Obama,
à pied sur
Pennsylvania
WASHINGTON
Avenue, mardi
20 janvier,
CORRESPONDANTE
se dirigent
montré. Une
vers la Maison
nouvelle génération
evant la foule
Blanche. DOUG
tallée à la tête
s’est insqui ait jamais la plus considérable
MILLS/POOL/REUTERS
a Les carnets
transformationde l’Amérique. Une ère
d’une chanteuse.
national de été réunie sur le Mall
de Angélique
a
Washington,
Des rives du commencé.
Kidjo, née au
Obama a prononcé,
a Le grand
Barack lantique,
Pacifique à
jour. Les cérémonies
celles de l’At- aux Etats-Unis pendant Bénin, a chanté
discours d’investituremardi 20 janvier,
toute l’Amérique
la liesse ; les
la campagne
un sur le
;
ambitions
s’est arrêtée de Barack Obama en 2008,
a Feuille
force d’invoquer presque modeste.
moment qu’elle
de route. «
pendant
A vivre :
et de nouveau la première décision d’un rassembleur ; n’est
était en train
Abraham
La grandeur
Martin Luther
l’accession
de la nouvelle
jamais un
administration:
de du 18 les festivités de l’investiture,
Lincoln,
au poste
au
dant en chef
Avec espoir et dû. Elle doit se mériter.
avait lui même King ou John Kennedy,
pendant cent la suspension
des armées, de comman- raconte 20 janvier. Pour Le Monde,
(…)
vertu,
il
placé la barre
responsable
vingt
: les cérémonies,
elle
de plus les courants bravons une fois
discours ne
très haut. Le l’arme nucléaire, d’un
de Guantanamo. jours des audiences
passera probablement
les rencontres
jeune sénateur de – elle a croisé l’actrice
glacials et endurons
cain-américain
Pages 6-7
les tempêtes à
postérité, mais
afri- le chanteur
page 2
et l’éditorial
de 47 ans.
Lauren
venir. » Traduction
il fera date pour pas à la
Harry Belafonte… Bacall,
du discours
ce qu’il a
inaugural du e intégrale
miste Alan Greenspan.
Lire la suite
et l’écono- a It’s the economy...
des Etats-Unis.
44 président
page 6 la
Il faudra à la
velle équipe
taraude : qu’est-ce Une question
nou- a Bourbier Page 18
beaucoup d’imagination
Corine Lesnes
pour sortir de
que cet événement
va changer pour
irakien. Barack
a promis de
l’Afrique ? Page
Obama
et économiquela tourmente financière
retirer toutes
3
qui secoue la
de combat américaines
les troupes
Breakingviews
planète.
page 13
d’Irak d’ici
à mai 2010.
Trop rapide,
estiment les
hauts gradés
de l’armée.
le DVD
«Il s’en faut parfois
de peu pour passer
du simple fait divers
à l’affaire d’état.»
Dès le 9 juillet, le DVD no 4
DEUX HOMMES
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Le Monde vous présente la première anthologie des
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14
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il tient une Entre ses mort en 1980,
le 10 janvier.
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Le cratère de de souffler.
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Allemagne 2,00
Lire la suite
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22
0123
débats
Jeudi 10 juillet 2014
En Irak, la route du pouvoir passe par la ville chiite de Nadjaf
Hosham Dawod
Anthropologue au CNRS, basé en Irak
C
e qui était hypothétique est
devenu possible : pour que
l’Irak se ressaisisse, il faut
écarter Nouri Al-Maliki. Ce
n’est sans doute pas le processus politique ni le jeu électoral qui viendront seuls à bout du premier
ministre au pouvoir à Bagdad depuis huit
ans, mais l’attaque foudroyante des djihadistes de l’Etat islamique en Irak et au
Levant (Daesh, devenu depuis peu l’Etat
islamique avec à sa tête un « calife », Abou
Bakr Al-Baghdadi) et des autres groupes
de sunnites, d’ex-baasistes, ou de certaines tribus, alliés naturels ou de circonstance. L’effondrement d’une bonne partie des
régions peuplées par des Arabes sunnites
a créé un fait sans précédent depuis dix
ans, l’effacement de l’armée et de l’Etat irakiens, y compris dans les zones disputées
entre Arabes et Kurdes.
Un mois après l’attaque de Daesh et ses
alliés, il semble que l’offensive ait été tant
bien que mal stoppée par ce qui reste des
forces fédérales, sans qu’elles aient eu
pour autant la capacité de contre-attaquer. Les Iraniens, dès la première semaine, se sont fortement impliqués. Washington pendant ce temps est arrivé à la conclusion qu’il fallait œuvrer à un rapproche-
ment politique inter-irakien, et dissuader
les Kurdes de franchir le pas vers une indépendance totale. Plusieurs organisations
sunnites envoient déjà des signaux pour
signifier leur disposition à négocier, voire
à se retourner contre l’Etat islamique, à
condition que Maliki soit destitué.
Il est vrai que celui-ci n’a guère brillé
pour le rapprochement mutuel des Irakiens. Son goût prononcé pour le centralisme autoritaire a effrayé les Kurdes, marginalisé les sunnites, et même éloigné de
nombreux partis parmi ses alliés chiites.
Les autorités religieuses de Nadjaf, ville
du sud de l’Irak où résident les plus hauts
dignitaires chiites, ont senti qu’elles
étaient flouées. Une hostilité s’est installée avec presque tous les pays arabes alentour, et même avec la Turquie. Maliki ressemble à l’idéal type décrit par le philosophe et juriste allemand Carl Schmitt
(1888-1985),pour qui le jeu politique impose de savoir distinguer ses amis de ses
ennemis, sa propre communauté de ses
adversaires, etc. Cela a conduit à multiplier les champs de bataille à l’intérieur
comme à l’extérieur de l’Irak.
Las de jouer les pompiers ou de se dérober avec une indifférence sournoise,
Barack Obama a enfin décidé d’intervenir,
en dépêchant quelques centaines d’hommes des forces spéciales et en fournissant
une couverture aérienne pour protéger
Bagdad et son aéroport, permettant, s’il le
faut, d’évacuer les milliers d’employés de
sa plus grande ambassade au monde.
Pendant ce temps, le grand ayatollah
Ali Al-Sistani a senti que l’heure de son
retour avait sonné. Le risque d’une guerre
civile effroyable s’installant, Sistani s’est
trouvé poussé à jouer un des rôles historiques qu’il a déjà eu à incarner entre 2003
et 2005, en proclamant, le 13 juin, une
fatwa pour soutenir l’Etat chancelant et
ses forces armées, et s’opposer à ceux qu’il
a qualifiés de « takfiristes» [surnom des djihadistes sunnites], prompts à l’excommunication, menaçant l’unité et l’avenir de
l’Irak. Cela a conduit à une immense mobilisation, essentiellement chiite.
L’impact de la fatwa
émise par Al-Sistani
à la mi-juin a été ressenti
non seulement
dans l’univers chiite,
mais jusqu’à Washington
Le retour de Sistani lui permettra certainement de peser de manière directe ou
indirecte dans le choix d’un premier
ministre parmi les nombreux candidats
pressentis. Certains sont issus de la coalition de l’Etat de droit de Maliki, tels Tarek
Najm, 68 ans, directeur de cabinet de Nouri Al-Maliki entre 2006 et 2010 ; Ibrahim
Al-Jaafari, 67 ans, ancien dirigeant du parti
Al-Daawa(au pouvoir depuis dix ans à Bagdad), premier ministre de 2005 à 2006 ;
Révoltons-nous contre le fromage aseptisé
Il faut revenir à une alimentation artisanale
Marie-Claire Frédéric
C
Spécialiste culinaire
’est comme un feuilleton, qui a commencé au début de l’année aux EtatsUnis. Des fromagers de l’Etat de
New York se sont vu reprocher par la
Food and Drug Administration (FDA,
l’agence américaine de l’alimentation)
le fait d’affiner leurs fromages sur des planches de
bois, pour des raisons d’hygiène. Mais personne, ou
presque, n’en a entendu parler. Le deuxième épisode eut lieu début juin avec cette consternante nouvelle : la FDA allait interdire purement et simplement l’affinage des fromages sur des planches en
bois. Une pareille loi n’étonne qu’à moitié dans un
payshygiéniste qui pousse la logiquejusqu’à pasteuriser le miel, pourtant lui-même antiseptique, et qui
interdit les fromages au lait cru s’ils sont affinés
moins de soixante jours.
Un rebondissement survient dans le troisième
épisode du feuilleton. Lorsque Nora Weiser, directrice de l’American Cheese Society, organisation de promotion du fromage, demande des explications à la
FDA : au nom de quoi cette soudaine interdiction
d’une pratique existant depuis la nuit des temps ?
Monica Metz, responsable de la branche lait de la
FDA, évoque alors une ancienne réglementation exigeant que le fromage soit affiné sur des « surfaces
que l’on peut nettoyer correctement », excluant, ditelle, le bois, qui est poreux et « pourrait » héberger
des micro-organismes pathogènes. Et pire encore, la
FDA réaffirme qu’elle n’a pas l’intention de modifier
cette nouvelle ancienne politique.
Il s’agit donc en réalité d’une interprétation zélée
d’une règle existante. Nora Weiser ironise sur une
« clarification qui n’a fait qu’ajouter à la confusion »
puisque le texte ancien ne mentionnait pas le bois.
Une interdiction de ce type d’affinage est « une
menace contre les méthodes traditionnelles ». Elle
touche « non seulement les fromages fabriqués aux
Etats-Unis mais aussi ceux qui sont importés », comme le parmesan, le beaufort, le comté, le reblochon
et les cheddars. Le Wisconsin, grand Etat américain
du fromage, en fabrique 15 000 tonnes par an, tous
affinés sur bois. Un tel règlement mettrait fin à l’essor de la fromagerie artisanale américaine (dont la
production est supérieure à la fromagerie française
en tonnage de fromages au lait cru).
A qui profite le crime ? A l’industrie, bien évidemment. La guerre contre les fromages artisanaux est
déclarée. Mais le coup de théâtre commence au quatrième épisode, qu’on pourrait intituler « les temps
changent ». L’annonce a soulevé un tollé,et pas seulement chez les critiques gastronomiques. Des analystes économiques, des scientifiques, des universitaires et des personnalités politiques ont aussi protesté. Une pétition ouverte sur le site public de la Maison Blanche a récolté 5 800 signatures les premiers
jours. Une campagne lancée sur les réseaux sociaux
a suscité des milliers de réactions. Le 10 juin, l’Ameri-
can Cheese Society a demandé à la FDA de revoir son
interprétation de l’ancienne circulaire. L’affaire est
montée d’un cran le 11 juin, lorsqu’une dizaine d’élus
du Congrès ont appelé leurs collègues « amoureux
du fromage » à soutenir un amendement pour empêcher la FDA « d’aller à l’encontre d’un procédé utilisé
depuis des siècles ».
Devant cette avalanche de protestations, l’agence
fédérale se crut obligée de publier un communiqué
disant qu’on l’avait mal comprise, c’était une question de vocabulaire. Il ne s’agissait que « d’un élément d’information sur l’usage des planches de bois,
(…) les mots utilisés étaient plus définitifs que ce qu’ils
auraient dû être ». Autre marche arrière de la FDA en
mai, 1,5 tonne de mimolette française qui était bloquée depuis un an en raison de la présence d’acariens cultivés sur la croûte pour affiner le fromage
est de nouveau autorisée sur le sol américain.
On constate actuellement un regain d’intérêt
pour les aliments traditionnels fermentés, qui forment l’identité des humains. La part fermentée de
l’alimentation est tellement ancrée dans nos habitudes qu’il est impossible de l’éradiquer, elle revient se
nicher dans des petits détails, comme ces tranches
de pseudo-beaufort ou de pseudo-reblochon que
McDonald’s ajoute en France dans ses sandwichs
censés être universellement identiques.
Maire (UMP) de Limoges
Nicolas Méary
Maire (UDI) de Brétigny-sur-Orge
V
¶
Marie-Claire
Frédéric
est l’auteure
de Ni cru ni cuit.
Histoire
et civilisation
de l’aliment
fermenté,
Alma Editeur,
360 p., 29 ¤
ni accorde une importance certaine à l’unité de la maison chiite. En cas de remplacement de Nouri Al-Maliki, il ne souhaitera
pas que l’on lance contre lui de chasse aux
sorcières, et moins encore que l’on criminalise les dirigeants politiques de la coalition de l’Etat de droit du premier ministre
sortant.
Sistani, quiétiste mais fin stratège, s’il
ne partage pas la ligne politique du Guide
iranien Khamenei, ne cherche pas non
plus à l’affronter en favorisant un candidat hostile à l’Iran. Du moment que la maison chiite se maintient, Sistani n’émettra
pas d’objections à un autre candidat issu
de l’Etat de droit plutôt que d’un mouvement chiite concurrent.
Comme la fois précédente, la relève irakienne peut se passer totalement des candidats pressentis. Quoi qu’il en soit, un
nouveau premier ministre de l’Irak devra
être un meilleur coordinateur que Nouri
Al-Maliki, préservant l’unité de la maison
chiite mais capable de parler aux Kurdes,
de ne pas effrayer les sunnites, de rassurer
l’Iran et la Turquie, d’être ouvert sur le
monde arabe (en particulier le Golfe), et de
maintenir de bonnes relations avec Washington.
Si les Irakiens dans leur diversité sont
capables de trouver un tel candidat en
quelques jours ou quelques semaines, il
sera non seulement l’homme providentiel qui sauvera probablement son pays,
mais il pourrait mériter haut la main le
prix Nobel de la paix. p
La SNCF doit entendre
Limoges et Brétigny
Emile-Roger
Lombertie
En mai, la mimolette française, qui était
bloquée depuis un an en raison de la présence
d’acarienscultivés sur la croûte pour l’affiner,
est de nouveau autorisée sur le sol américain
L’industrie est peut-être allée trop loin. Aujourd’hui, des économies parallèles se développent,
basées sur les circuits courts. Le bon sens reprend du
poil de la bête face à l’hygiénisme à outrance. Et la
science a changé de camp. La science qui, tout au
long du XXe siècle, a soutenu l’industrie, axe désormais ses recherches sur l’innocuité des fromages au
lait cru et sur la biodiversité alimentaire, sur les terroirs et le respect des techniques ancestrales.
L’Union européenne reconnaît d’ailleurs l’importance des traditions et de l’aspect culturel de l’alimentation. Elle interprète bien différemment les règles
d’hygiène puisqu’elle autorise l’affinage des fromages sur du bois.
Les revirements de la FDA ne sont pas anodins.
Pour une fois, c’est l’Europe qui a montré l’exemple
pour un règlement d’hygiène, et non pas l’inverse.
Au moment des négociations de partenariat transatlantique de commerce et d’investissement, c’est
important. Cela montre qu’un courant est en marche, bien que les lobbys industriels œuvrent toujours. Partout les consommateurs se révoltent face à
la nourriture industrielle aseptisée et bas de gamme,
délivrée en masse par les grandes surfaces, toujours
trop chère pour sa qualité réelle.
La part fermentée de notre alimentation implantée au plus profond des mentalités réapparaît là où
on ne l’attend pas. Comme la petite pousse d’herbe
sous la chape de béton industrielle. p
Qusay Al-Suhail, 46 ans, universitaire, qui
fut proche du jeune clerc Moqtada
Al-Sadr, avant de s’en éloigner, ancien viceprésident de l’Assemblée nationale. Les
autres sont plus proches du Conseil suprême islamique en Irak, Adel Abdul-Mahdi,
72 ans, ancien vice-président de l’Irak de
2006 à 2010 ; Ahmed Chalabi, 70 ans, politicien irakien de l’opposition qui convainquit les néo-conservateurs de l’entourage
de George W. Bush d’envahir l’Irak, avant
de se rapprocher de l’Iran.
Quelle est la portée d’une telle fatwa ?
Le statut de Sistani réside d’abord dans
son autorité religieuse et morale, qui peut
provoquer une adhésion sans commune
mesure, capable de se transformer en
mouvement de dimension historique.
Au début des années 1920, le grand ayatollah Ashrafi Esfahani avait appelé
depuis Nadjaf à se révolter contre le colonialisme anglais, qui s’était imposé en
dominateur plutôt qu’en libérateur du
joug ottoman. A la suite de sa fatwa, la
grande révolution de 1920 fut proclamée,
et le mandat britannique dut être repensé,
ouvrant la voie à l’établissement d’une
monarchie et à la formation d’un gouvernement national. Depuis cette date, aucune autre fatwa de djihad venue de Nadjaf
n’avait été émise, jusqu’à celle de Sistani à
la mi-juin. L’impact de cet appel a été ressenti non seulement dans l’univers chiite,
mais jusqu’à Washington.
En plus de son attachement à l’unité de
l’Iraket au processus politique, Ali Al-Sista-
oilà un an, le 12 juillet 2013 à
17 h 11, les voitures de queue
du Paris-Limoges quittaient
leur voie, glissaient longuement et venaient s’immobiliser en gare de Brétigny-surOrge. Ce déraillement causa la mort de
7 personnes et 61 autres furent blessées.
Un an après, Brétignolais et Limougeauds
seretrouveront le 12 juillet en gare de Brétigny pour un instant de recueillement en
mémoire des victimes, de gratitude à
l’égard des secours, des cheminots et des
forces de l’ordre, mais aussi pour rappeler
la solidarité dont firent preuve les voyageurs et la population locale.
Un an après, les familles des victimes,
les témoins, les usagers de cette ligne, les
collectivités concernées, ainsi que la SNCF
s’accordent pour penser que cet accident
doit servir à en éviter d’autres. Il doit permettre de réorienter les investissements
et les travaux de sécurité, de réformer les
procédures de fonctionnement et de
maintenance ; au-delà, les populations
doivent être persuadées que les enseignements du drame sont tirés.
L’entretien et l’investissement dans le
réseau existant doivent être privilégiés. La
vétusté des équipements conduit à des risques accrus lorsqu’elle se combine à un
défaut de maintenance et elle nécessite
des précautions d’exploitation, comme le
ralentissement des circulations ou des
écarts augmentés entre les trains. Les travaux programmés en garede Brétigny doivent privilégier l’amélioration de la sécurité. En souvenir des 7 disparus, faisons de
cette ligne et de la gare de Brétigny des
lieux voués à recevoir toutes les expérimentations de sécurité. Poursuivons le
programme Vigirail qui semble une réussite par la création d’une VigiLigne et
d’une VigiGare.
De même, si la défaillance des opérations de surveillance et de maintenance
était avérée, si la séparation complexe des
tâches entre Réseau ferré de France (RFF)
et la SNCF a pu, même à la marge, être un
des facteurs qui conduisit à l’accident,
nous espérons un vote rapide de la loi dite
de « réforme ferroviaire » qui organisera
le rapprochement des deux sociétés. Nous
espérons que ce sera l’occasion d’une clarification des responsabilités et d’une amélioration des opérations de maintenance.
Mais c’est d’abord au rétablissement du
lien de confiance qu’il faut travailler.
Nos parents, nos amis vont au travail
en empruntant le RER, ou le train Intercités, nos enfants vont au lycée, dans les
facs, par le train. Dans ces deux villes, on a
confiance dans le chemin de fer depuis
bien longtemps, depuis le milieu du
XIXe siècle. Brétigny comme Limoges ont
connu de grands triages, ce sont des villes
cheminotes qui sont restées attachées au
chemin de fer. Dans bien des foyers, l’on
vous montre des piles du journal La Vie du
rail qui souvent remontent au grand-père.
Ici, on porte la fierté du chemin de fer. Il
faut donc comprendre que, pour nous
tous, avec l’accident, un monde s’effondre. Pour nous, la perte de confiance est un
traumatisme qui vient s’ajouter au traumatisme de l’accident.
Un étrange climat
Récemment encore, le rapport Hazan,
du nom d’un expert indépendant mandaté dans le cadre de l’enquête judiciaire, ou
le rapport judiciaire signé Michel Dubernard et Pierre Henquenet se présentaient
sous la forme d’un réquisitoire auquel la
SNCF et RFF n’ont pas voulu, ou, pour des
raisons juridiques, n’ont pas pu répondre
sur le fond. Malgré les propos des présidents Pepy et Rapoport, les silences, le
flou, les accusations restées sans réponse
créent un étrange climat et nous demandons, au nom des populations que nous
représentons, des deuils qu’elles traversent, nous réclamons de la SNCF la plus
grande transparence.
Y a-t-il eu un abaissement du niveau de
la maintenance ? Doit-on pointer des
défaillances ? A l’issue de l’enquête judiciaire, nous en saurons davantage, nous
espérons alors qu’une commission d’enquête parlementaire permettra un débat
contradictoire et sous serment qui aboutira à une transparence certaine. Mais cette
transparence ne peut attendre. Il faut trouver les voies et moyens pour que la SNCF
réponde aux inquiétudes, lève les doutes,
purge les méfiances.
En ce sens, nous demandons à la SNCF
de permettre à nos collectivités d’être associées aux groupes de travail interne liés à
cet accident, notamment celui qui réunit
des experts sur la question du boulonnage.
Nous demandons à la SNCF de tenir ses
propres engagements sur l’information
du public – l’open data – et d’y inclure les
questions de sécurité. Nous demandons à
la SNCF plus de clarté en la matière. p
23
0123
Jeudi 10 juillet 2014
Le Brésil à genoux
Humiliée par l’Allemagne (7-1),
la Seleçao quitte son Mondial
Le capitaine du Brésil, David Luiz, et Luiz Gustavo, sur la pelouse du stade Mineirao, à Belo Horizonte, mardi 8 juillet. AP/HASSAN AMMAR
Récit
Belo Horizonte,
Rio de Janeiro, Sao Paulo
Envoyés spéciaux
I
l y a eu des larmes, de l’incrédulité,
de la colère. Dans tout le pays, il y a
eu ces sentiments convenus des
soirs de défaite, mardi 8 juillet, après
la déroute (7-1) du Brésil face à l’Allemagne. Ces rues qui se vident d’un
coup, comme aspirées par une bonde
géante, ce silence des villes frappées
de désolation. Mais il y eut pire que ça.
Il y eut aussi des rires. Des rires comme l’état suprême du désespoir, comme le seul moyen de cacher sa douleur, sa honte, après l’humiliation historique subie par la Seleçao à domicile, dans ce qui devait être la Coupe du
monde de son triomphe.
Pour la première fois sans doute, le
Brésil s’est mis à rire de sa sélection
nationale. Pas à plaisanter seulement,
à la tourner en dérision, comme le
pays le fait parfois aux jours mauvais.
Aen rire vraiment, d’un rire de mépris,
comme un conjoint peut le faire de
quelqu’unqu’il atantaiméetqu’ilcouvre ensuite de son dégoût. Le peuple
s’est vengé de la vexation collective
par un humour noir comme cette soirée dans le stade de Belo Horizonte.
Cela a commencé dans l’enceinte
même de l’Estadio Mineirao qui, à peine construite, devra peut-être être
détruite pour conjurer le maléfice et
effacer toute trace de la forfaiture. Le
public, du moins celui qui était resté
jusqu’au bout, s’est mis à applaudir
les buts allemands qui tombaient
tant et plus. Il s’est mis à ridiculiser
cette équipe qui humiliait tout un
pays, à se gausser de ses ratés avec
une joie chargée de bile, à saluer par
des « olé ! » chaque passe allemande.
Bref, il a joué au sale mioche, au
gamin vexé, même si, ce mardi, il n’y
avaitpasplustête àclaques que lefootball lui-même. Ce sport n’a rien trouvé
de plushilarant que de tourner en ridicule chez elle une nation quintuple
championne du monde, un pays qui
croyaitavec un peu de suffisance détenir les clés de ce jeu. La voilà ravalée au
rang d’Haïti, la dernière sélection à
avoir, en 1974, encaissé cinq buts en
une mi-temps en Coupe du monde.
Cruelle leçon de modestie. Trop
dure à avaler. Alors, dans le quartier
de Vila Madalena, l’un des lieux de
rendez-vous nocturnes de Sao Paulo,
il n’y avait plus qu’à pleurer de rire
devant le désastre. Il n’était pas
17 h 30, le match n’avait commencé
que depuis une demi-heure et la foule
savait déjà que cette nuit qu’on espérait infinie serait courte et, en même
temps, qu’elle resterait à jamais gravée dans les mémoires.
Cesportn’a rientrouvé
deplus hilarant que
detourner enridicule,
chezelle,une nation
quicroyaitdétenir
les clésdu jeu. Cruelle
leçonde modestie
Dans la rue Tournesol, artère en
montagnes russes où les bars s’alignent les uns à côté des autres, la foule
débordait sur le pavé. Mais très vite,
ces jeunes gens, étudiants pour beaucoup,ont feint dese désintéresser, tandis que le commentateur égrenait les
buts allemands d’un ton mortuaire.
Avant le match, on scandait « Brasil !
Brasil ! » Chaque fois que le score s’aggravait, on continuait de dire « Brasil !
Brasil ! », mais un ton en dessous,
d’une voix désenchantée et traînante,
comme une complainte qui disait en
substance : « Brésil, pourquoi m’as-tu
fait ça ? » ou « Méritait-on cela ? »
Cette détresse collective était étrangement partagée par une supportrice
allemande qui arborait un maillot de
son équipe. Elle semblait gênée, mal à
l’aise dans le rôle du bourreau. On en
était à 5-0 à la mi-temps, mais d’une
certaine manière, ce score ne voulait
rien dire. Il restait abstrait dans les
esprits médusés, comme un bilan lancé après une catastrophe. Ce ne serait
qu’après, demain et les jours suivants, qu’on mesurerait l’ampleur du
désastre national.
A la mi-temps, la rue Tournesol a
commencé à se vider en même temps
que le stade de Belo Horizonte. Les
dizaines de marchands à la sauvette de
bière et de cachaça bradaient déjà
leurs alcools à moitié prix. Ils avaient
aussi compris que ce ne serait pas ce
soir qu’ils feraient fortune. Quelques
jeunes buvaient tout de même plus
que de raison. Ils espéraient sans doute se réveiller demain en ayant oublié.
Et tant qu’à avoir la gueule de bois…
Comme la nuit était tombée et qu’on
avait soudain un peu froid, on a enfilé
une veste ou un petit pull. Les maillots
brésiliens ont disparu sous ce camouflage. L’Allemande fit de même, par
politesse plus que par frilosité.
La télévision proposa une série de
gros plans sur les joueurs, puis sur
celui d’un jeune supporteur en larmes
dans les tribunes. C’était une charge
terrible contre la Seleçao : ils étaient
ceux qui faisaient pleurer les enfants.
On sentait déjà venir les règlements
de comptes, la chasse aux coupables,
les responsables cloués au pilori.
Mais pour l’heure, on en était encore aux ricanements. Quand le Brésil a
enfin marqué, ce furent des cris de joie
etilyeutmêmedes pétardsetdes feux
de Bengale. Mais c’était là le comble de
la moquerie contre les joueurs. Dans
les conversations revenait régulièrement le nom de Neymar. Ce n’était pas
qu’on crût qu’il aurait pu changer les
choses. Non, simplement l’idole avait
échappé au naufrage. On avait encore
quelqu’unen qui croire.C’était laseule
consolation de cette soirée.
Le match fini, il y eut une seconde
de silence, comme une suprême protestation devant cette débandade. Les
policiers étaient en nombre, craignant des débordements. Mais pour
cela, il eût fallu qu’il y ait révolte et
non ce rire acerbe qui avait saisi la rue
Tournesol. Dans une dernière ironie,
des petits groupes faisaient des selfies faussement joyeux pour immortaliser ce moment pénible.
A Rio de Janeiro aussi, on n’a trouvé
que ce remède, le rire à gorge déployé,
tant cela était grotesque. Sur la plage
de Copacabana, la journée avait commencé sous un léger crachin et s’est
achevée sous un déluge. Au fur et à
mesure que les buts allemands tombaient comme une autre pluie, acide,
le public est passé de la frustration à la
fureur. Des jeunes se sont mis à insulter les joueurs à l’écran. Joao, 69 ans,
avait le front bas : « Je n’ai jamais vu
ça. J’avais 5 ans au moment de la défaite du Brésil en 1950 au Maracana, mais
la déroute de ce soir est bien pire, c’est
une humiliation, une honte infligée
au pays dont on ne se relèvera pas. »
Entre deux averses, Robertson Carvalho faisait le mime devant les derniers badauds encore présents sur la
plage, en costume de Charlot. « Cela
va nous ouvrir les yeux, expliquait cet
artiste de rue. Nous n’avions pas l’équipe pour gagner la Coupe du monde,
nous n’avions pas le niveau et nous
avons été bercés par des victoires trop
faciles. » Et d’ajouter : « J’espère que les
Pays-Bas vont battre les Argentins parce qu’en cas de victoire de la bande à
Messi, ici, au Maracana, sur nos terres,
nos ennemis intimes, je ne sais pas
comment cela va finir… »
Ici aussi, les plus dépités ont très
vite quitté la plage et se sont engouffrés en silence dans les stations de
métro. Sous une petite rangée de cocotiers, un groupe de jeunes en est
même venu aux mains. Une bière à la
main, Denilson, lui, s’est mis à parodier l’hymne national : « Je suis brési-
lienavecbeaucoup dehonteet peud’orgueil… » Assis au milieu de la plage,
Osmarportait sur son maillot jaune de
l’équipenationaleunécussonauxcouleursdeFlamengo,leclubleplus populaire de la ville : « Ce soir, le football brésilien a connu une explosion nucléaire,
plaisantait-il. Si cela continue comme
cela, dès la reprise du championnat, je
vais soutenir Vasco de Gama !» Quand
l’Allemagne a marqué encore, Osmar a
ri de plus belle.
«C’est une honte
infligée au pays dont
on ne se relèvera pas»
Joao, 69 ans
Plus loin, au fond d’un bar anonyme de Copacabana, un vieil Allemand,
maillot blanc et cheveux gris, jouait
delatrompette etpoussait lachansonnette de son pays. La salle s’amusait,
conquise par son entrain. Il était déjà
tard. La pluie n’en finissait plus et le
bistrotier accusait visiblement le
coup. Il demanda gentiment à tout le
monde de sortir.
Sur la plage de Copacabana, des
petitsgroupes s’étaient déjàmisà danser sur le sable détrempé. Plus loin, au
milieu des rues, une bande de jeunes
Cariocas courrait sous la pluie diluvienne. Ils criaient fort, chantaient,
tendaient leurs bras vers le ciel,
embrassaient les masses d’eau qui
s’offraient à eux, comme pour se laver
de l’affront qu’ils venaient de subir.
Rue Tournesol, à Sao Paulo, un
orchestre de samba osa jouer. Il fallait
être culotté ou très professionnel. On
vit pourtant les corps tétanisés commencer à se balancer de manière irrépressible. Après avoir ri, on dansa
donc un peu. On se dit alors que le Brésil survivrait peut-être à cette soirée
de déroute. p
Yann Bouchez, Nicolas Bourcier,
Rémi Dupré et Benoît Hopquin
24
0123
Jeudi 10 juillet 2014
«Une grosse claque pour le Brésil
et pour la présidente Dilma»
Après la déroute de sa sélection, le peuple brésilien prédit une revanche dans les urnes
Des supporteurs brésiliens dans les rues de Rio après la déroute de la Seleçao face à l’Allemagne, mardi 8 juillet. JORGE SILVA/REUTERS
Belo Horizonte,
Rio de Janeiro, Sao Paulo
Envoyés spéciaux
I
l n’aura fallu que six minutes.
Le temps mis par l’Allemagne
pour transformer la cage du
gardien brésilien Julio Cesar en
passoire et marquer quatre buts
face aux quintuples champions
du monde. Privé de sa star Neymar, blessé, et de son capitaine
Thiago Silva, suspendu, le Brésil a
sombré (7-1) au stade Mineirao de
Belo Horizonte, mardi 8 juillet.
Douze ans après son dernier
sacre (2-0) contre l’Allemagne lors
du Mondial 2002, la Seleçao a subi
en demi-finales de sa Coupe du
monde la plus grande humiliation
de son histoire. Les Auriverde
rêvaient pourtant de se qualifier
pourla finale,programméedimanche 13 juillet au mythique Maracana de Rio de Janeiro. Les hommes
de Felipe Scolari n’auront donc pas
la possibilité de venger leurs illustres aînés, humiliés, eux, par l’Uruguay (2-1) au Maracana en 1950,
lors de la seule Coupe du monde
organisée au pays du futebol. Pire,
après le « Maracanaço », le Brésil
devra désormais vivre avec le souvenir du « Mineiraço ». Et la
Seleçao doit encore disputer la
« petite finale » pour la troisième
place, samedi 12 juillet, à Brasilia.
« On n’en a rien à faire de la troisième place, s’insurge Rafael après
la déroute, maillot jaune et vert
sur le dos. On voulait gagner notre
Mondial. Il y a un mélange de colère dans le pays et la sensation que
tout est fini. » « C’est un moment
historique, ironise Sidney, venu de
Sao Paulo. On n’avait plus eu ce sentiment depuis la défaite contre la
France en 1998. A 3-0, ce n’était plus
de la tristesse qu’on ressentait mais
de la honte… »
Dès la 26e minute de jeu et le
quatrième but de la Nationalmannschaft,les supporteurs brésiliens ont commencé à quitter le
stade. Sous les lazzi, la Seleçao a
affiché de meilleures intentions
en seconde période, mais ses salves ont été repoussées par Manuel
Neuer, le portier allemand aux
réflexes robotiques. A la 79e minute, les quolibets du public ont laissé place à des applaudissements
narquois quand André Schürrle a
inscrit le septième but allemand.
Loin d’apaiser le chagrin des
200 millions de Brésiliens, la réalisation tardive d’Oscar (90e) a juste
eu le mérite d’atténuer la débâcle.
Le crash de Belo Horizonte
constitue pourtant le pire revers de
l’histoire des Auriverde depuis leur
défaite (6-0) contre l’Uruguay, en
1920. Aucune demi-finale d’un
Mondial ne s’était auparavant
conclue sur un score aussi large.
Allongésur lapelouse du Mineirao,
le capitaine brésilien David Luiz
semblait implorer le pardon au
coup de sifflet final. En larmes, le
défenseur à la folle tignasse a prié
durant quelques minutes avant de
recevoir l’accolade de Thiago Silva,
l’habituel détenteur du brassard.
Le responsable autodésigné de
ce drame national est le sélectionneur Luiz Felipe Scolari, pourtant
perçu comme le sauveur de la
nation depuis le sacre de 2002. Les
traits tirés, le patron de la Seleçao a
tenu à s’excuser auprès du « peu-
ple brésilien » pour cette « erreur ».
Son homologue allemand, Joachim Löw, a fait preuve de compassion : « On a perdu au Mondial
2006 contre l’Italie, chez nous, au
même stade de la compétition et on
sait ce que le peuple brésilien ressent. Je comprends que ce soit très
difficile à digérer, très douloureux.»
Le « peuple brésilien », justement, n’a pas attendu le coup de
sifflet final pour fondre en larmes.
A Sao Paulo, l’avenue Paulista, la
grande artère de la ville avec ses
buildings et ses centres commerciaux ultrachics, symbole à la fois
de la nouvelle prospérité du pays,
mais aussi de ses inégalités avec
son arméede clochards, était déserte après la rencontre. Il y a un an,
«La véritable face
du Brésil apparaît
désormais. C’est
le pays du mensonge.
Les problèmes
vont refaire surface»
Luis Villamarin, 51 ans
des dizaines, peut-être des centainesde milliers de personnes, y défilaient. Les manifestants critiquaient la corruption et le coût
exorbitant de la Coupe du monde
alors que le pays souffre d’un manque d’infrastructures.
Ces revendications avaient été
étouffées depuis un mois par l’enthousiasme irrationnel qui entourait l’équipe nationale. Dans ce
pays où la politique n’est jamais
loin du football, la colère sociale a
resurgi au coup de sifflet final. Et la
lourde défaite a, d’une certaine
manière, ouvert la campagne électorale sous de sombres auspices.
Candidate à un second mandat
à l’élection présidentielle du 5 octobre, Dilma Rousseff avait grappillé
des points dans les sondages. « Les
élections vont être très difficiles
pour elle, prédit Pedro Sala, 22 ans.
Jusqu’à maintenant, les Brésiliens
ne pensaient qu’au foot. On va se
rendre compte qu’il y a de beaux
stades, mais pas d’écoles, pas
d’hôpitaux… Ce match peut être un
bon moment pour changer beaucoup de choses. » Luis Villamarin,
51 ans, se montre moins tendre :
« La véritable face du Brésil apparaît désormais clairement. C’est le
pays de M. Lula, de Dilma. C’est le
pays du mensonge. Le pays ne va
pas bien. Les problèmes vont refaire surface. »
A Rio, Ancelmo, militaire de
22 ans, semblait comme « dessaoulé » au moment de rentrer chez lui
en bus, dans sa banlieue de Jacarepagua. « Je savais que l’on n’avait
ni éducation, ni santé et transports,
explique-t-il. Mais on avait au
moins le football. Je viens de comprendre que ce n’était qu’illusion. »
Eliza, une fonctionnaire d’une
trentaine d’années, laisse éclater
son amertume : « Je suis contente !
C’est une grosse claque pour le pays
et pour la présidente Dilma. Je n’en
pouvais plus de l’entendre fanfaronner depuis le début du Mondial. J’aimerais que cette humiliation lui fasse perdre des points. » p
« JULES RIMET, MEU AMOR »
NOVELA-CHAPITRE 21
Par Sérgio Rodrigues
U
ne contre-attaque avait lieu. Feijão venait de dépasser le
dernier défenseur et il fonçait en direction du gardien. Le
gardien était un type robuste, blanc comme un verre de
lait, célèbre dans les matchs de rue du quartier Marechal Hermes. On le surnommait « l’Allemand ». Depuis un peu plus de
six mois il avait conquis le respect de ses camarades comme de
ses adversaires, autant pour ses qualités techniques que pour sa
témérité. Aumoment de former des équipes,quand on avait tiré
à pile ou face, il était un des premiers à être choisi – ce qui arrive
rarement quand il s’agit de désigner un joueur qui, au lieu de
mettre le ballon dans les filets, va l’empêcher d’y entrer. Il avait
commencé à croire qu’il était peut-être possible pour lui de se
reconstruire une existence dans ce pays du bout du monde.
En voyant l’attaquant qui courait sans obstacle dans sa direction, János a fait quelques pas en avant pour réduire devant les
buts le champ de vision de son adversaire : jusqu’ici, tout allait
bien. Le problème est que Feijão, un Noir à la peau luisante qui
se précipitait en chaloupant comme s’il était en caoutchouc,
avait la réputation d’être le plus grand crack du quartier. Le premier à être choisi, lui, dans les matchs sur terrain vague. Fidèle à
sa notoriété, le crack local a fait quelque chose que personne
n’auraitpu prévoir : unefois entré dansla surface de réparation,
à un mètre du gardien, il s’est brusquement figé. Après avoir
poséle pied gauche surle ballon,car ilétait gaucher, il l’a fait glisser vers l’arrière. Vers l’arrière ! Le mec se dirigeait vers l’arrière !
Rien de comparable n’avait jamais été observé en Hongrie, et le
goal connu sous le nom d’Allemand, ce gardien de but plein
d’expérience, s’est soudain retrouvé dans la peau d’un néophyteridicule : malgré lui,voilà qu’il était en train de sedéplacer lentement vers l’avant, jambes arquées et bras tendus en direction
de la balle comme s’il essayait d’attraper une poule.
« Vas-y, Feijão, défonce-le ! »
– Rabats le caquet de ce gringo ! »
Il entendait les rires des supporteurs et, en même temps,
sans quitter le ballon des yeux, il devinait sur la face de Feijão
un ricanement méprisant. Une vague rouge lui a troublé la
vision – ces maudits Brésiliens, a-t-il eu le temps de penser,
pourquoi sont-ils toujours en train de rigoler ? – et cette seconde d’aveuglement a suffi pour que le pitre déguisé en joueur lui
mette le ballon entre les jambes et, après un saut où il semblait
monté sur ressorts, finisse seul en face de la cage.
Bien entendu, János a tenté de faire demi-tour pour le suivre.
Il voulait agripper les jambes de Feijão, atteindre sa poitrine
maigre et lui arracher le cœur à mains nues, ou du moins se faire siffler un penalty – n’importe quoi plutôt que ce but humiliant. Et là, au cours de cette rotation à cent quatre-vingts
degrés, son pied est resté coincé dans un trou du sol en terre battue et, à l’intérieur de son corps, il a entendu le bruit de quelque
chose qui se cassait : craaac. Avec un hurlement de douleur il
s’est effondré en se tenant le genou. Il n’avait jamais ressenti
une souffrance pareille.
L’hôpital a diagnostiqué une rupture totale des ligaments
croisés. Aujourd’hui, avec les ressources dont dispose la médecine, il serait peut-être possible de le faire revenir sur un terrain
de football. Mais à l’époque il était soigné dans un établissement public misérable, à la périphérie de Rio. Il en est sorti
estropié, condamné à boiter jusqu’à sa mort.
Ici s’interrompait l’histoire que Julia avait commencé à me
confier ce jour-là, d’abord sur la plage, ensuite dans la voiture
qui nous emmenait chez elle. Vers la fin, des larmes ruisselaient sur son visage – ah, ce visage, quelle beauté ! Aux malheurs de János a succédé un silence que je n’ai pas osé briser.
Une fois que nous sommes arrivés au château Gabor, elle a donné congé aux domestiques et elle m’a servi le déjeuner tout simple qu’ils avaient préparé, un ragoût accompagné de riz, de
pommes de terre et de salade. Puis nous sommes allés au lit et
soudain la nuit est tombée, suivie de l’aube, de la matinée, de la
nuit à nouveau. J’étais anxieux de connaître la fin de l’histoire
de son grand-père, mais je savais que rien ne pressait. Le temps
était notre esclave. p
Traduit du portugais (Brésil) par
Ana Isabel Sardinha et Antoine Volodine
Pour « Le Monde », l’auteur brésilien Sérgio Rodrigues part à la
recherche du trophée de la Coupe du monde volé à Rio de Janeiro
en 1983 et livre une nouvelle inédite pendant le Mondial. Il a reçu
le Premio Cultura pour l’ensemble de son œuvre en 2011. Son roman
« O drible » paraîtra en France aux Editions du Seuil en 2015,
avant le Salon du livre de Paris, où le Brésil sera l’invité d’honneur.
Chapitre 22 dans « Le Monde » daté vendredi 11 juillet.
Yann Bouchez,
Nicolas Bourcier, Rémi Dupré
et Benoît Hopquin
Les Allemands, partagés entre euphorie et stupéfaction
Les supporteurs de la Nationalmannschaft ont le sentiment d’avoir «écrit une page de l’histoire du football»
Berlin
Correspondance
A
mbiance des grands jours
sur le Kudamm, l’avenue
qui traverse l’ancien BerlinOuest, mardi 8 juillet : dès le coup
de sifflet final, des cortèges de voitures bardées de drapeaux débarquent de nulle part pour envahir
le boulevard à grands coups de
klaxon.
Le rituel est bien rodé. Depuis
que l’Allemagne a organisé la Coupe du monde en 2006, il est systématique à chaque victoire de la
Mannschaft. On chante : « Deutschland ! Deutschland ! » On allume
des pétards. On danse. Une sono
installée sur un trottoir déverse
des airs de samba. En ce premier
jour de vacances scolaires à Berlin,
tout le monde, bière à la main, a le
cœur à la fête. On n’en revient pas
de ce match incroyable. A la
mi-temps, le commentateur sportif de la ZDF prévient les téléspectateurs qui auraient pris la rencontre en route : « Non, il n’y a pas d’erreur sur le marqueur, plaisante-t-il.
L’Allemagne mène bien 5-0 sur le
Brésil en première période. » Même
le milieu Toni Kroos confie qu’au
retour dans les vestiaires, à la pause, les joueurs de la Mannschaft
ont du mal à y croire.
« Football hourra »
« Personne n’aurait pu imaginer
que ce match allait se dérouler ainsi, s’enthousiasme Kerstin en
tirant sur sa cigarette. 7-1 contre le
Brésil ? Chez eux ? Je ne vois pas qui
pourrait nous arrêter maintenant.
Ce titre, nous allons le décrocher
dimanche. » « Les joueurs se
lâchent et montrent qu’ils sont vraiment bons, renchérit Deny, foot-
balleur amateur. Nous avons une
Mannschaft confiante. Désolé pour
les Brésiliens, qui perdent dans leur
pays parce qu’ils avaient sans doute trop de pression sur les épaules,
mais cette fois, nous, on est partis ! » Pour Stefan, venu sur le
Kudamm avec deux amis, tous
trois vêtus d’un maillot allemand,
leur équipe « a écrit ce soir une
page de l’histoire du football. Ce
match, on va en parler encore longtemps!» Accessoirement aussi parce qu’il a permis à l’attaquant
Miroslav Klose de battre le record
de buts en Coupe du monde (16),
détenu auparavant par Ronaldo.
Un Klose très applaudi, dans les
cafés berlinois, lorsqu’il est sorti
du terrain en deuxième période.
Le quotidien populaire Bild n’a
pas de mot pour fêter la victoire.
Dans son édition papier, il titre
«Sans mot » et fait défiler, en pages
intérieures, des photos des buts
sans autre commentaire que le
nom de leur auteur. Quelques
minutes après la fin de la rencontre, le site Bild.de parlait en lettres
d’or d’une « victoire pour l’éternité ». « Quel jeu ! commente Der
Spiegel dans son édition en ligne. Il
est deretour le football, hourra! » Le
« miracle de Bello Horizonte » titre
le quotidien Berlinois Tagesspiegel, en référence au miracle de
Bern, qui marqua la première victoire de l’Allemagne en Coupe du
monde, en 1954. « L’Allemagne a
gagné sur le Brésil avec une prestation à peine compréhensible avec
des paramètres historiques »,
s’étonne pour sa part Die Welt. Bref,
personne n’y a rien compris mais
tout le monde est content. Et les
Allemands ont cinq jours devant
eux pour revenir sur terre. p
Blandine Milcent
25
0123
Jeudi 10 juillet 2014
Arjen Robben, après la séance de tirs au but victorieuse face au Costa-Rica en quart de finale, le 5 juillet, à Salvador. SERGIO MORAES/REUTERS
Oranje mécanique
Belo Horizonte
Envoyé spécial
P
armilesstars du Mondialbrésilien,ArjenRobben passeincontestablement pour l’affreux,
l’individualiste colérique, le
dribbleur forcené, le soliste à
la morgue légendaire. Pour faire court, il est l’odieux génie du ballon
rond que le public aime détester. Cette étiquette de méchant de service, de mauvais
coéquipier ou d’exécrable prodige est collée à la glu sur le large front de l’ailier hollandais, qui affronte l’Argentine du gentil
et sympathique Lionel Messi, mercredi
9 juillet, à Sao Paulo, lors de la deuxième
demi-finale du tournoi planétaire.
Moins avenant que la star des Albiceleste, le buteur des Oranje (80 sélections) partage toutefois avec elle certaines caractéristiques sur les pelouses. Crochets déroutants, slaloms ravageurs dans les défenses
adverses, vitesse d’exécution inouïe et
une patte gauche prête à décocher un missile à tout moment : l’attaquant des PaysBas a montré l’étendue de sa palette technique depuis l’ouverture de la compétition.
A 30 ans, le dribbleur fou incarne les
ambitions d’une équipe de Hollande avide d’oublier sa défaite (1-0 après prolongations) contre l’Espagne en finale du Mondial 2010, en Afrique du Sud. L’ailier au crâne glabre ressasse encore ce duel qu’il perdit, ce jour-là, face à Iker Casillas, le gardien et capitaine de la Roja. Au Soccer City
Stadium de Johannesburg, le score était
alors de 0-0 et Robben, diminué par une
blessure à la cuisse, avait manqué de lucidité devant le portier madrilène. « La douleur sera toujours là, a-t-il déclaré avec gravité, le 11 juin. Cette phase de jeu est gravée
à jamais dans ma mémoire. J’ai revu l’action de nombreuses fois… Mais à quoi bon ?
Ce qui s’est passé est passé et on ne peut
plus rien y changer. Je regarde vers l’avenir
et ce premier match face à l’Espagne a
l’odeur de la revanche. »
Eliminé avec la Hollande au premier
tour de l’Euro 2012, le natif de Bedum (province de Groningue) est arrivé gonflé à bloc
au Brésil, comme guidé par son instinct
vengeur. Le 13 juin, à l’Arena Fonte Nova de
SalvadordeBahia,ilestlepiedgauchejusticier d’Oranje en furie, humiliant (5-1) d’entréel’Espagne, doublechampionned’Europe et championne du monde en titre. Survolté, le trentenaire inscrit deux buts
exquis, provoquant la chute de la Roja, sortie du tournoi dès la phase de poules. Sur sa
deuxième réalisation, l’attaquant traverse
tel un éclair la moitié de terrain adverse et
laisse sur place le défenseur Sergio Ramos,
pourtant pas le plus lent à son poste.
Sur cette action qui confine à l’exploit,
la pointe de vitesse de Robben est mesurée
à 37 km/h. Par cette accélération foudroyante, le Batave est devenu le footballeur le plus rapide de l’histoire, balle au
«Quand je vois le Robben
d’aujourd’hui, j’avoue
que je suis un peu jaloux.
Quelle différence avec
2010! Il y a quatre ans,
il n’avait jamais évolué
à 100%. Cette année,
il est inarrêtable»
Bert van Marwijk
ancien sélectionneur des Oranje
pied, depuis la mise en place, par la Fédération internationale, de radars dans les stades. De quoi faire passer le précédent
recordman, l’Anglais Theo Walcott, flashé
en septembre 2013 à 35,7 km/h, pour un
tracteur. De quoi aussi impressionner
l’homme le plus rapide de la planète, Usain
Bolt,avec qui ilpartageunautrepoint commun: Hans-Wilhelm Müller-Wohlfahrt, le
« docteur miracle » du Bayern Munich et
de la Nationalmannschaft.
L’explosif gaucher s’est montré décisif
à chaque sortie de sa sélection au Brésil. Le
18 juin, il ouvre le score pour sa formation
lors de sa victoire (3-2) contre l’Australie.
L’attaquant au regard de tueur est ensuite
à l’origine du succès miraculeux (2-1) des
Pays-Bas face au Mexique, le 29 juin, à For-
A 30 ans, Arjen Robben réussit sa meilleure Coupe
du monde. Le dribbleur-sprinteur du Bayern Munich
a fait oublier son mauvais caractère pour se muer en
leader des vice-champions du monde qui affrontent
l’Argentine, mercredi 9juillet, à SaoPaulo
taleza, en huitièmes de finale. Dans la fournaise du Nordeste, le divin chauve s’écroule en fin de match dans la surface d’« El
Tri », taclé tardivement par le défenseur
Rafael Marquez sur l’une de ses innombrables percées. Sifflé dans les arrêts de jeu, ce
penalty litigieux est transformé par le
remplaçant Klaas-Jan Huntelaar, qui qualifie les Pays-Bas pour la suite de la compétition.Après la rencontre, Robbens’est excusé de s’être allègrement laissé tomber en
première période.
« J’ai plongé et je n’aurais pas dû faire
ça, a-t-il concédé. C’était stupide, je veux
m’excuser. Parfois, vous vous attendez à
être taclé et les défenseurs retirent leur
jambe à la dernière minute. Mais je suis
quelqu’un d’honnête. » « Robben est l’un
des meilleurs joueurs du monde, ça ne fait
aucun doute. Mais, d’un autre côté, on sait
que les arbitres peuvent se tromper quand
il plonge et cela me fait peur, s’était inquiété Jorge Luis Pinto, le sélectionneur du Costa Rica, avant le quart de finale (0-0) perdu
aux tirs au but, le 5 juillet, par sa formation
face à la Hollande. J’espère que les arbitres
seront très prudents et qu’ils ne commettront pas d’erreur. »
Régulièrement fauché par les rugueux
Costaricains, le Batave a notamment provoqué, par ses chevauchées fantastiques,
quatre avertissements parmi les Ticos.
Electron libre des Oranje, l’ex-joueur du
PSV Eindhoven (2002-2004), de Chelsea
(2004-2007) et du Real Madrid
(2007-2009) brille dans un système de jeu
résolument offensif (3-5-2). Délesté de la
moindre tâche défensivepar sonsélectionneur, le taiseux Louis van Gaal, il est char-
gé de dynamiter les arrière-gardes adverses en compagnie du capitaine Robin van
Persie et du milieu offensif Wesley Sneijder. « Quand je vois le Robben d’aujourd’hui, j’avoue que je suis un peu jaloux.
Quelle différence avec 2010 ! Il y a quatre
ans, il avait traîné une blessure durant le
Mondial et n’avait jamais évolué à 100 %.
Cette année, il est inarrêtable », a récemment loué, sur la chaîne publique hollandaise NOS, l’ex-sélectionneur (2008-2012)
Bert van Marwijk.
Au Brésil, l’attaquant caractériel a pris
du galon au sein du vestiaire néerlandais.
Vice-capitaine des Oranje, il a notamment
harangué ses coéquipiers lors du huitième de finale anxiogène contre le Mexique. «Durant la pause boisson de ladeuxième période du match, c’est lui qui a pris la
parole pour remonter le moral des autres
joueurs », assure Louis van Gaal. Marqué
par l’élimination de sa formation par la
Russie (3-1 après prolongations) en quarts
de finale de l’Euro 2008, Robben a connu
des moments sombres avec sa sélection.
International hollandais depuis 2003, il
puise dans ces expériences malheureuses
pour insuffler à ses jeunes partenaires un
esprit conquérant. « Arjen est un leader qui
nous tient en éveil, considère le milieu hollandais Georginio Wijnaldum, 23 ans. Il
nous empêche de planer. »
Cinq jours avant le triomphe inaugural
des Pays-Bas contre l’Espagne, le taulier
des Oranje était néanmoins retombé dans
ses travers en se disputant avec l’arrière
Bruno Martins Indi, 22 ans, lors d’une séance d’entraînement. Arrivé au Bayern en
2009 contre 25 millions d’euros, le talen-
tueux gaucher traîne également en club
cette réputation de joueur querelleur, de
diva égoïste et susceptible. En avril 2012, le
Français Franck Ribéry lui avait asséné un
coup de poing dans les vestiaires, à la
mi-temps de la demi-finale aller de Ligue
des champions contre le Real Madrid.
Un mois plus tard, Robben avait raté,
face à Chelsea, un penalty dans les arrêts
de jeu lors de la finale de l’épreuve organisée à l’Allianz Arena de Munich. Devant
son public, le club bavarois s’était ensuite
incliné (1-1) aux tirs au but contre les « Blues ». Revanchard, l’ailier hollandais avait
permis, en mai 2013, à sa formation de
remporter la plus prestigieuse des compétitions européennes. Auteur d’une passe
décisive et d’un but à Wembley (Londres),
il avait assommé (2-1), à lui tout seul, le
Borussia Dortmund et raflé la « coupe aux
grandes oreilles ».
Aux Pays-Bas, les éloges pleuvent sur le
trentenaire aux jambes de feu avant la
demi-finale face à l’Albiceleste. « Il est dans
la forme de sa vie. Avec lui, on ne doit pas
craindrel’Argentine», aestimél’ex-international hollandais (1996-2006) Philip Cocu
dans les colonnes du magazine Voetbal
International. « L’Argentine a Messi. Nous
avons Robben. Et franchement, le meilleur,
c’estArjen », arenchéri Bert vanMarwijk.Le
duel entre le prodige du FC Barcelone et le
sprinteur du Bayern Munich s’annonce
âpre. Car celui des deux qui affrontera l’Allemagne en finale, dimanche 13 juillet, au
stade Maracana de Rio, pourrait bien être
désigné par la FIFA comme le meilleur
joueur du Mondial. p
Rémi Dupré
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0123
0123
Jeudi 10 juillet 2014
EUROPE | CHRONIQUE
par Philippe Ricard
La vraie victoire des eurosceptiques
L
LES FORCES
PRO-EUROPÉENNES
VEULENT
METTRE
EN ŒUVRE
UN « CORDON
SANITAIRE »
e chef du parti anti-euro allemand s’attendait sans doute à un accueil glacial au Parlement européen. Il n’aura pas été déçu :
lundi 7 juillet, le patron de l’Alternative für
Deutschland (AfD), Bernd Lucke, s’est vu privé
de la vice-présidence de la commission des
affaires économiques et monétaires, chargée
de scruter l’activité de la Banque centrale européenne. « Il ne peut représenter la commission
car il se positionne contre l’euro », a expliqué
l’eurodéputé vert allemand Sven Giegold.
Dans le cadre de la répartition des postes parlementaires, Bernd Lucke avait pourtant été soutenu par les conservateurs avant de prétendre
à cette fonction surtout honorifique. Mais
socialistes, libéraux et Verts se sont organisés
pour lui bloquer la voie.
Bernd Lucke n’est pas un cas isolé. Les déboires de ce pourfendeur de la monnaie unique
illustrent les difficultés qu’ont les élus eurosceptiques et/ou europhobes à prendre pied à
Strasbourg et à Bruxelles, en dépit de leur succès dans les urnes lors des élections européennes du 25mai. Si leurs effectifs ont subi des pertes, les forces pro-européennes ont prouvé ces
derniers jours qu’elles continuent de dominer
l’hémicycle. Elles se sont réparties la totalité
des présidences de commissions parlementaires et la plupart des postes influents. Parti populaire européen à droite, socialistes à gauche et
libéraux-démocrates au centre se sont organisés avec d’autant plus d’entrain qu’il s’agit pour
eux de consolider l’alliance à trois conclue afin
d’élire Jean-Claude Juncker à la tête de la Commission européenne, mardi 15 juillet. En dépit
de la vague europhobe, les trois formations
sont déterminées à mettre en œuvre une sorte
de « cordon sanitaire » dans l’espoir d’empêcher les plus radicaux d’entraver le travail parlementaire quand le nouvel exécutif européen
sera en place, d’ici à la fin de l’année.
Avant Bernd Lucke, Marine Le Pen a été la première à constater qu’un succès électoral ne se
traduit pas nécessairement au Parlement européen par un surcroît de pouvoir : la dirigeante
du Front national n’a pas été en mesure de
constituer un groupe d’extrême droite avec ses
amis néerlandais, autrichiens ou italiens, faute
d’alliés dans sept pays différents. Les vingt-quatre élus de son parti seront, sauf rebondissement, condamnés à siéger parmi les non-inscrits, et privés des avantages liés à la création
d’un groupe. En dépit de ses annonces – prématurées–, Marine Le Pen a pour l’instant perdu le
combat engagé à la droite de la droite pour tenter de sortir de son isolement.
Ses adversaires font à peine mieux. Les tories
de David Cameron ont non seulement recruté
les élus de l’AfD, dont Bernd Lucke, mais aussi
les partis d’extrême droite finlandais et danois,
considérés avant la campagne comme de possibles associés du FN. Grâce à ces renforts, le groupe des « Conservateurs et réformistes européens » est certes devenu la troisième formation du Parlement européen, derrière le PPE et
les socialistes, détrônant sur le podium les libéraux-démocrates de Guy Verhofstadt. Cependant, au nombre des postes en vue, ces derniers
resteront mieux dotés que les alliés de David
Cameron.
« Guérilla parlementaire »
Quant à Nigel Farage, le chef du parti antieuropéen UKIP, il a maintenu son groupe grâce
à son alliance avec le Mouvement 5 étoiles du
populiste italien Beppe Grillo, et au ralliement
d’une dissidente FN. Lui aussi a pourtant eu le
plus grand mal à confirmer son influence dans
la course aux postes. Lundi, les grands partis se
sont organisés pour ne pas confier la présidence de la commission des pétitions à un représentant de sa famille politique. La place a été prise par un libéral.
Est-ce à dire que les eurosceptiques n’auront
aucune influence dans la prochaine législature? Il est trop tôt pour l’affirmer. « Tout va
dépendre de leur assiduité et du zèle qu’ils vont
mettre à défendre leurs positions », observe l’eurodéputée du MoDem Sylvie Goulard : «On
n’est pas à l’abri d’une forme de guérilla parlementaire.» Pour elle, il faut distinguer entre les
eurosceptiques type britanniques, qui ont déjà
prouvé qu’ils savaient s’engager dans les
débats parlementaires, et les europhobes purs
et durs, qui risquent surtout de se servir des sessions plénières pour multiplier les provocations sans vraiment s’impliquer sur les dossiers. Mardi 1er juillet, Nigel Farage et ses troupes
ont, dans le genre, utilisé la session inaugurale
de Strasbourg pour tourner le dos à l’orchestre
qui jouait l’hymne européen en bas des travées.
Plus grave, la percée des anti-européens risque surtout de se faire sentir dans… les capitales, au point de limiter les marges de manœuvres des gouvernements en place. C’est déjà le
cas au Royaume-Uni, où David Cameron court
en vain après les positions de Nigel Farage sans
reprendre le contrôle du débat européen. Pour
le calmer, tout en adoubant Jean-Claude Juncker fin juin, chefs d’Etat et de gouvernement
des Vingt-Huit ont tenté de donner des gages
au premier ministre britannique : ils ont convenu qu’une « Union toujours plus étroite » n’obligeait pas chacun de ses membres à avancer au
même rythme. Une façon de prendre acte de
l’Europe à deux vitesses qui émerge de ces
années de crise.
Jean-Claude Juncker et son entourage sont
d’ailleurs les premiers à considérer qu’une
réforme des traités destinée à fédéraliser davantage l’union monétaire est sans doute impossible dans le climat politique du moment. Car
elle n’aurait aucune chance d’être ratifiée dans
les pays comme la France, les Pays-Bas ou l’Irlande. Là réside sans doute la vraie victoire des
eurosceptiques. p
ricard@lemonde.fr
La Chine lance une offensive
mémorielle contre le Japon
Prétexte
Malgré de possibles erreurs ou
confusions, elles sont jugées relativement crédibles par les historiens: au Japon, une poignée de
ces anciens prisonniers ont mené
pendant des décennies après leur
retour un combat pour se faire
entendre, bravant les menaces
des milieux nationalistes nippons, qui les accusaient d’être
endoctrinés. Et, en 2001, le réalisateur japonais Minoru Matsui
avait rassemblé les témoignages
filmés de quatorze d’entre eux
dans Japanese Devils, un documentaire qui fit grand bruit à sa
sortie.
L’initiative des Archives participe d’une spectaculaire offensive
chinoise sur le terrain de la
mémoire, en réponse à la réinterprétation par le Japon de sa
Constitution pacifiste entérinée
le 1er juillet. Ainsi, le numéro un
chinois Xi Jinping s’est rendu, lundi 7 juillet, au « Musée de la
guerre de résistance du peuple
chinois contre l’agression japonaise » pour l’anniversaire des 77 ans
de l’incident du pont de Marco
Polo, à une quinzaine de kilomètres de Pékin. Une escarmouche
entre un régiment japonais et des
sentinelles chinoises avait alors
servi de prétexte à une offensive
de l’armée impériale japonaise,
qui occupait la Mandchourie
depuis 1931, contre le reste de la
Chine, prélude à une guerre de
huit ans qui fera près de 20 millions de victimes chinoises.
M.Xi a fustigé ces « forces minoritaires qui tentent d’ignorer les
faits historiques», une pique à l’attention du gouvernement de
Shinzo Abe, tandis que le Quotidien du peuple accusait « l’inclination dangereuse de la part du
Japon de ressusciter son militarisme passé ».
Cette nouvelle campagne antijaponaise intervient alors que les
relations entre les deux pays sont
au plus bas, pourries par ce que la
chercheuse Yinan He, de l’université américaine de Seton Hall,
nomme une « politisation du passé » en Chine et au Japon, dans
son analyse pour le numéro de la
revue de sinologie Perspectives
chinoises de fin 2013 consacré aux
« visions chinoises du Japon ». Elle
y avertit des risques d’une « spirale descendante ». p
Brice Pedroletti
(Pékin, correspondant)
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pTirage du Monde daté mercredi 9 juillet 2014 : 288 683 exemplaires.
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E
ntre décembre 1944 et
mai 1945, en pleine guerre
sino-japonaise, l’officier
japonais Nosuke Sasaki se souvient avoir arrêté 90 espions
chinois supposés et d’en avoir fait
tuer trente au cours d’interrogatoires et de tortures dans les campagnes du Hubei. Un peu plus tard,
des habitants de la localité de Dangyang se soulevèrent, et vingt
d’entre eux furent tués. Cinq captifs chinois servirent à l’entraînement des soldats à la baïonnette
et périrent de façon brutale. Ensuite, en janvier 1945, à Dangyang,
dans la province du Hubei, l’exchef de bataillon entraîna ses
hommes à tester une chambre à
gaz avec deux captifs, puis quatre,
qui tous succombèrent.
Cette sinistre comptabilité est
issue des confessions de 1109 prisonniers de guerre japonais livrés
à la toute jeune République populaire chinoise en 1949-1950 par
son allié soviétique et « rééduqués » jusqu’en 1956. La plupart
regagnèrent le Japon en 1956, sauf
quarante-cinq d’entre eux, les
plus gradés, qui furent condamnés à la prison, puis relâchés en
1963. Leurs quarante-cinq confessions sont publiées au rythme
d’une par jour, depuis le 3juillet,
par le site Internet de l’administration des Archives nationales
chinoises.
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