pochoirs et pochoiristes à bruxelles

Transcription

pochoirs et pochoiristes à bruxelles
ETUDE CONTEXTUALISÉE DES GRAFFITIS URBAINS
DANS LA CAPITALE DE L’EUROPE
Brigadier
PLIPP
POCHOIRS ET POCHOIRISTES
À BRUXELLES
Serge Louis & Vanessa Sutour
Préface par Samantha Longhi
3
2
TABLE DES MATIÈRES
Pochoirs et pochoiristes à Bruxelles
© 2010 Brigadier PLIPP Production
www.brigadier-plipp.com
Maedia sprl, B-1380 Lasne
D/2010/12.247/1
info@brigadier-plipp.com
Première parution en format téléchargeable gratuit en
2010.
Première publication en format imprimé payant en 2010.
Distribution : A l’exception de la citation de brefs
passages dans un but de révision, référencement ou
critique, aucune partie de cette étude ne peut être
utilisée, reproduite ou transmise sous aucune forme
et par aucun moyen mécanique ou électronique
(notamment et pas seulement par photocopie,
numérisation ou enregistrement par tout système de
récupération ou d’entreposage d’information) sans
l’accord préalable et écrit de l’éditeur. Les copies aussi
bien digitales qu’imprimées de l’étude sont rendues
disponibles à la condition explicite qu’elle ne peut pas
être, de façon commerciale ou autre, louée, vendue ou
revendue, diffusée ou circulée sans l’accord préalable
et écrit de l’éditeur.
Désistement : Cette étude a été réalisée par ses auteurs
dans le but de mieux protéger et comprendre l’art
urbain. Il ne s’agit pas d’une publication officielle ayant
été soit supportée soit parrainée par une institution
publique ou privée. Tous les mots, toutes les images et
tous les autres éléments qui ont été soumis directement
aux auteurs sont reproduits avec la compréhension et
le consentement des détenteurs respectifs des droits
d’auteur. Des efforts raisonnables ont été faits pour
identifier les contributeurs ayant fourni indirectement
des éléments aux auteurs. Ainsi, aucune responsabilité
ne sera acceptée par les auteurs, producteurs, éditeurs
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Toute omission ou erreur causant une reconnaissance
inappropriée de droits sera excusée et corrigée, dans
les limites techniques, lors d’éditions ultérieures dès
lors qu’une notification aura été envoyée à l’éditeur en
termes convenables et en temps opportun.
Mise en page : www.synthese.be
Illustration de de première de couverture inspirée par
Manneken Pis et pochée rue des Ursulines par un artiste
non identifié. Illustration de quatrième de couverture trouvée
Rue Brialmont. Photos des couvertures par Serge Louis.
Préface
Introduction
Technicalités et Remerciements
Série Pirates
Interview Metalic Avau
Série Textes 1
Série Textes 2
Essai Nulle peine tu causeras
Interview Jef Aerosol
Série Faces 1
Série Faces 2
Essai Le pochoir fait le trottoir
Interview A---
Série Signes 1
Série Signes 2
Essai Felix comme standard !
Interview Monzon TAS
Essai Le point de vue d’une chaise
Interview Poch
Série Faces 3
Série Signes 3
Essai C’est la totale !
Interview Peripheral Media Projects
Série Faces 4
Série Signes 4
Essai A vue d’oiseau
Interview The Dude Company
Essai Au Vol !
Interview Damien-Paul Gal
Série Faces 5
Essai Hauts les mains !
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Interview Jean-Luc Tricot
Essai J’ai la banane !
Interview wHo ?
Série Faces 6
Série Faces 7 Essai Auto-nettoyant
Interview Muga
Essai Oblitération muricide !
Série Signes 5
Série Signes 6
Interview Spencer
Essai Tragique destin
Interview Doctor H
Essai Ceci n’est pas un Banksy
Interview R.U.R
Série Textes 3 Essai C’eeest la luuutte finaaale
Interview Shine
Série Faces 8
Série Silhouettes
Interview Denis Meyers
Série Animaux
Interview VGT
Essai Froidure et coulure
Interview Poumon Noir
Interview José Lodewick
Série Textes 4
Série Divers
Discussion
Bibliographie
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PRÉFACE
Samantha Longhi
Directrice artistique de la galerie Itinerrance (Paris 13ème),
auteur du livre Stencil History X aux éditions C215 et
tenancière du site stencilhistoryx.com © Brigadier PLIPP
Il est bien loin le temps des crinolines
et des caricoles dans la capitale du plat
pays. L’Europe lui a donné un fameux
coup d’accélérateur social et culturel,
pour un bien ou pour un mal. La vie
artistique - légale et illégale - en est
d’autant plus féconde !
Les auteurs désirent rappeler aux lecteurs que des
dispositions légales sanctionnent la pratique de l’art
urbain dans certaines circonstances.
Ainsi, le Règlement Général de Police en vigueur à
Bruxelles spécifie en son article 27 :
« Il est également interdit de tracer toute inscription,
graffiti ou dessin à tout endroit de l’espace public sans
avoir reçu l’autorisation de l’autorité compétente ou du
propriétaire des lieux ainsi que de l’endommager par
des gravures, incisions ou entailles ».
Si la créativité du graffiti et du pochoir
se niche surtout dans les recoins de
son cœur historique, c’est un véritable
jeu de piste géant qui se dessine à
partir des Marolles vers les rues Haute
et Blaes puis de plus en plus loin vers
les autres quartiers de la ville. Les
pochoirs marquent ainsi le territoire
bruxellois comme les signes et les
mots d’un intertexte infini. On passe
de l’un à l’autre, le regard bondit d’un
premier pochoir à un second jusqu’à
ce que l’on retrouve le premier un peu
plus loin. On apprend à reconnaître
progressivement les styles, les
signatures, les marques.
On rentre dans le jeu. On s’imprègne de
ses règles. Progressivement, pas à pas,
on comprend. Le langage souvent noir
et monochrome des pochoirs bruxellois
n’a pour unique but que l’expression
de la liberté urbaine. Le labyrinthe est
parsemé de pochoirs comme d’autres
ballades l’ont été de petits cailloux ou
de mies de pain. Au détour des ruelles,
soudain, un geste artistique, une figure
ciselée, un trait contrasté s’impose à nos
yeux. Passants, touristes ou habitants
de la ville, nous sommes. Artistes aussi.
Ceux qui viennent de toutes parts pour
admirer les quartiers pochés de Bruxelles
comme son petit pisseur. Ceux qui
viennent contribuer à l’oeuvre commune
et fraternelle, pochoir roulé sous le bras
et bombe fébrile. La liberté est au bout
de la piste.
Bruxelles, quoi qu’il en soit, n’est pas
prête de s’arrêter de bruxeller.
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INTRODUCTION
Au travers de dix-neuf entretiens, quinze
essais et de nombreuses illustrations,
cette étude tente de mieux comprendre
le pourquoi et le comment des graffitis
tracés sur les murs et les palissades de
Bruxelles.
Plus spécifiquement, cette analyse se
concentre sur les dessins et les textes
appliqués selon la technique du pochoir et
donc sur les artistes qui pratiquent cette
méthode picturale dans l’espace urbain.
La décision de privilégier les
pochoirs aux autres formes d’art
urbain - essentiellement les tags et les
graffs - résulte de deux constatations
préliminaires :
D’une part, les pochoirs nécessitent un
travail d’exécution en deux espacestemps successifs. En effet, le pochoiriste
conçoit d’abord sa composition et
découpe son gabarit dans son atelier
avant de sortir dans la rue pour
appliquer son pochoir à la bombe
et éventuellement le répéter sur les
supports urbains de son choix.
D’autre part, le pouvoir d’évocation de
souvenirs et d’association d’idées des
pochoirs est plus fort que celui des
tags et des graffs. En effet, les thèmes
représentés dans les pochoirs font
souvent référence à des images, des
signes ou des mots déjà bien répertoriés
et identifiés dans l’esprit collectif.
La publication d’une analyse d’ambition
et d’envergure sur les pochoirs et les
pochoiristes arrive au bon moment !
D’abord, peu d’ouvrages consacrés aux
pochoirs cherchent réellement à analyser
et à expliquer la démarche artistique
qu’ils documentent. Les pochoirs,
tellement riches en exprimant et en
signifiant, méritent bien plus que quelques
collections de photographies.
L’étude n’est ni exhaustive ni systématique.
Des choix ont été opérés parmi les
pochoiristes à interviewer, les essais à
éditer et les pochoirs à regrouper en séries
thématiques. Ainsi, le critère de sélection
initiale était que les pochoiristes rencontrés
travaillent principalement dans la rue et que
les pochoirs illustrés soient directement
appliqués sur leurs supports. Quelques
exceptions ont confirmé la règle première...
Ensuite, un nombre croissant de
pochoiristes tentent le passage de
l’application murale à la reproduction sur
toile. Certains s’exposent à présent dans
des galeries, voire dans des musées, avec
une perspective de cotation mercantile
significative. Il est donc urgent de mieux
connaître ces artistes.
L’analyse n’est ni militante ni partisane.
Elle ne cherche certainement pas à
encourager quiconque de marquer
illégalement l’espace public d’images ou
de textes.
En plus, les pochoiristes voyagent et les
pochoirs circulent. Dans cette mouvance
globale, le caractère éphémère de l’art
urbain accentue d’autant l’urgence
d’appréhender toute la beauté furtive et
la noblesse poétique des traces visuelles
offertes par les nouveaux itinérants.
Certainement à Bruxelles, capitale de
l’expression citadine chaotique par
destinée et par excellence.
Enfin, un mouvement de conscientisation
populaire et de sensibilisation politique
est en train d’ émerger afin d’obtenir la
dé-illégalisation des graffitis - et donc
des pochoirs - à Bruxelles. Pour que le
dialogue entre les parties interpellées
soit intelligent et constructif, des outils
référants et structurants comme cette
étude seront nécessaires.
Mais l’étude est passionnée parce que les
pochoiristes sont passionnants à écouter
et les pochoirs passionnants à regarder.
Elle se veut un appel, une ouverture, une
invitation vers tous ceux et toutes celles,
acteurs ou observateurs de la vie artistique
et culturelle urbaine, à Bruxelles ou ailleurs,
qui souhaiteront répondre ou réagir...
Et peut-être donner l’imparable raison
d’entreprendre la rédaction d’un second
tome...
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PIRATES
Technicalités
Remerciements
Interviews : Tous les interviews ont été réalisés
en face à face (sauf mention explicite) entre le 09
novembre 2008 et le 08 novembre 2009 selon un
questionnaire standardisé et enregistrés sur un
dictaphone Olympus Digital Voice Recorder
WS-100 ou Sony MP3 IC Recorder ICD-VX80.
Les auteurs voudraient exprimer leur immense
respect aux pochoiristes actifs à Bruxelles, aussi
bien ceux qui ont participé à cette étude que ceux
dont les pochoirs ont été repris de façon anonyme.
© Photographies : Toutes les photographies ont
été prises par Serge Louis (sauf mention explicite)
entre le 19 juillet 2008 et le 18 décembre 2009
à l’aide d’un appareil Sony Cyber-Shot 8.1 MPx
DSC-W100.
© Essais : Tous les essais ont été écrits entre le 02
septembre 2008 et le 27 décembre 2009 par
Serge Louis et affichés originellement sur le blog
serge-louis.blogspot.com. Les textes sélectionnés
ont été édités pour des besoins de mise en page.
1 Avenue de la Couronne
2 Chaussée de Vleurgat
3 Chaussée de Vleurgat
4 Rue des Ursulines
5 Rue des Ursulines
1
Les auteurs souhaitent remercier très sincèrement
les personnes listées ci-dessous (par ordre
alphabétique).
Jean-Michel André
Christophe Bertelli
François Bodarwé
Philippe Carly
Marc Isgour
Bertrand Jacques
Catherine Leboulle
Samantha Longhi
Julie Mottier
Dominique Speeckaert
Dominique Raquet
Gaëlle Sutour
Francis Van Maele
Valérie Wouters
Avec une mention spéciale pour
Cassandre, Eléonore, Laurent et Karine
pour leur précieuse vigilance.
Concours
Trois photographies dans cette étude n’ont pas été prises à Bruxelles et apparaissent donc expressément
sous une fausse localisation pour le concours. Retrouvez-les, identifiez la ville et envoyez-nous votre réponse !
Nous avons un petit cadeau pour les 20 premiers gagnants.
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METALIC AVAU
NOM ?
Metalic Avau
NAISSANCE ?
1945
1 à 4 : photos par Metalic Avau
ORIGINE ?
Belgique
«
Enlever les graffitis, ça abîme les briques.
1
DECLENCHEUR ?
J’avais une passion pour les graffitis depuis 1977. Je fréquentais des endroits qui
étaient encore très underground à l’époque. J’ai toujours été intéressé par les murs,
les traces. Un jour, j’ai commencé un reportage photographique sur les graffitis
dans les chiottes. Il y avait plein de choses au niveau graphique, un genre d’art
brut, qui étaient très intéressantes. Il y avait aussi des petites phrases absurdes ou
détournées. Progressivement, j’ai commencé à bomber la nuit des trucs, des petits
aphorismes, dans l’esprit soixante-huitard... Un peu absurde. J’ai donc commencé
par des textes. Le véritable passage au pochoir, c’est en 1985. Toujours textuel.
La seule image que j’ai réalisée, c’est un auto-portrait vitriolé. J’ai aussi fait des mains
en négatif, au début, en parallèle aux textes.
TECHNIQUE ?
J’avais une technique que j’appellais le style corbeau parce que je découpais des
lettres dans des journaux ou des magazines et je les utilisais pour composer des textes.
Vraiment comme des lettres anonymes que je découpais et que je bombais ensuite.
Ceci dit, c’était très douloureux de découper ces lettres dans du carton.
EVOLUTION ?
J’ai toujours regretté de ne pas avoir approfondi ma démarche. Je me suis assez vite
dit : « bon, laissons faire les autres ! ». Faire les deux, observer et créer soi-même,
c’est pas facile. Mais, quelque part, pour être un bon observateur, il faut avoir
expérimenté soi-même. Il faut avoir entendu le bruit de la bille dans la bombe de
peinture... C’est irremplaçable ! Vous n’entendrez ça nulle part ailleurs. Surtout en
pleine nuit. Mais non, je n’ai pas laissé mûrir ça et je le regrette un peu maintenant.
MESSAGE ?
Je suis très sensible, sensibilisé, par l’éphémère. Si les gens se rendaient
davantage compte que nous sommes éphémères, je pense qu’ils vivraient tout-à-fait
différemment. Ils s’imaginent qu’ils sont éternels. Il y a des messages en clin d’oeil
dans mes pochoirs, comme « Attention éphémère ! ». La plupart des graffitis
disparaissent si rapidement. Il n’y a pas plus éphémère que ça ! Donc je préfère
l’humour, l’absurde parce que je pense que l’absurde peut être beaucoup plus violent
que la violence.
RÉACTION ?
Je ne me suis jamais vraiment posé la question. Disons que si je pouvais faire sourire
au moins une personne, je serais content.
13
12
POCHOIR FAVORI ?
Dans mon travail, c’est « Attention
éphémère ! ». Il a eu de l’impact.
Au premier degré, il veut dire que le
mur est éphémère... C’est pour cela
qu’il y a un point d’exclamation. Mais,
entre les lettres, on peut lire que nous
sommes éphémères aussi. Je ne sais
pas si beaucoup de gens ont été jusque
là dans l’interprétation. Ailleurs, j’ai
été particulièrement émerveillé par la
démarche parisienne.
2
4
POCHOIRISTE FAVORI ?
D’abord Blek le Rat, ma première
découverte, et puis après Miss Tic.
Ses textes surtout. C’est fabuleux.
À Bruxelles, c’est Monzon. Il défend sa
cause, il dépasse ses limites, parfois un
peu jouette, un peu enfantin. Mais j’aime
vraiment bien.
GRAFFS & TAGS ?
A part les graffitis racistes, je reste très
ouvert. Même quand c’est énigmatique
ou codé, ça peut dégager une certaine
poésie. Ce sont les journalistes et les
politiciens qui disent que les graffitis
augmentent l’insécurité. C’est quelque
chose qui m’a toujours fait sauter en l’air.
POLICE ?
J’ai été arrêté deux fois. Ils ne
comprenaient pas quand je leur expliquais
que je faisais de la poésie urbaine.
La seconde fois, ils m’ont menacé de
me mettre au cachot mais, finalement, ils
m’ont relâché.
ENDROIT ?
Il y a assez d’emplacements à Bruxelles
pour faire des graffitis sans aller saboter
de belles façades ou de la pierre bleue.
Il faut un minimum de respect. Il y a
suffisamment de maisons bandonnées...
NETTOYAGE ?
C’est un commerce comme un autre. Dans l’annuaire téléphonique,
quand on regarde à anti-graffiti, la liste s’allonge de plus en plus. Pour
les privés, les communes interviennent financièrement dans l’enlèvement
des graffitis parce que c’est quand même coûteux. Ceci dit, enlever les
graffitis, ça abîme les briques.
3
BRUXELLES ?
Le pochoir n’est pas mal représenté à Bruxelles. Mais c’est une grande
ville provinciale. Il est évident que, comparativement aux autres villes, c’est
plus pauvre.
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14
TEXTES 1
1
2
4
1 Rue du Midi
2 Rue Jean-Baptiste Vannijpen
3 Rue du Conseil
4 Rue Maurice Wilmotte
5 Rue du Printemps
6 Rue du Mail
3
TEXTES 2
7 Rue Henri Wafelaerts
8 Chaussée de Vleurgat
9 Place du Châtelain
10 Chaussée de Waterloo
11 Chaussée de Waterloo
12 Rue des Fabriques
1
2
5
6
7
8
9
10
11
12
1 Avenue Albert
2 Rue Jourdan
3 Rue des Brigittines
4 Rue du Prince Royal
5 Rue du Serpentin
6 Rue Antoine Labarre
7 Rue de Stassart
8 Rue Jourdan
9 Drève de Lorraine
3
4
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6
7
8
9
17
16
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NULLE PEINE
TU CAUSERAS
Rue du Châtelain
L’attaque pochiste sur la petite place du Châtelain, il y a de cela quelques semaines,
fût particulièrement soudaine et sauvage. En une nuit, plusieurs façades de maisons
et de boutiques - aux couleurs calmes et discrètes - ont été placardées de trois
poche-textes différents, tous criards et provocants. Des phrases dont orthographe
et grammaire approximatives trahissent sans aucun doute l’impétueuse jeunesse de
leur auteur.
Le traumatisme porté à ce petit bout de quartier au bonheur d’ordinaire si villageois
est profond. Valérie, de la boutique de lingerie Des Hauts et Des Bas témoigne en
exclusivité pour ce blog : « On a trouvé ça comme ça, en arrivant un matin. C’est
la deuxième fois en quelques mois. La première fois, la commune a été tellement
lente à la détente que nous avons repeint la façade nous-mêmes. Cette fois-ci, ils
ont été plus rapides. On n’a rien dû demander » avant d’ajouter, comme pour se
mettre un peu de baume au coeur : « Le résultat est plutôt réussi, non ? ». En fait, le
résultat, c’est mouais tendance non. La comparaison avant / après photographiée
sur une maison située à l’angle de la rue du Châtelain et illustrée ci-contre nous
montre en effet que le recouvrement réalisé par les autorités communales n’est
malheureusement pas vraiment top (presque pire, finalement). Mais bon.
Nous avons également demandé à VGT, célèbre pochoiriste de la capitale, de nous
donner son avis sur cette attaque : « Les pochoiristes ont normalement plus de
respect que les taggeurs car il y a une démarche, une préméditation, derrière... Cela
m’attriste un peu de voir qu’il y en a qui n’ont pas ce respect-là. Ce sont des gens
qui ne font pas ça par passion des pochoirs ».
Alors... Cela veut-il dire qu’il y a des gentils pochoiristes et des méchants
pochoiristes, des beaux pochoirs et des laids pochoirs, que certains devraient être
admis, tolérés, légalisés et d’autres effacés et punis sans pitié ni pardon ?
Et que la clé de cette répartition se trouve dans le psyché démarchant de l’artiste ?
Probablement oui, en partie...
Dans le quartier du Châtelain, on peut d’ailleurs trouver quelques pochoirs très
sympas qui ne violent ni ne violentent les surfaces sur lesquelles ils ont été
appliqués... Et qui persistent ainsi depuis bien longtemps ! Mais pour les habitants
et les commerçants encore meurtris par l’acte récent d’un pochoiriste renégat, la
distinction est difficile, voire impossible. Valérie, entourée de ses chatoyants articles
de soie et de dentelle, conclut avec fatalisme et résignation : « On attend la prochaine
fois ». Vous savez quoi ? On n’est pas très heureux...
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NOM ?
Jef Aérosol
JEF AÉROSOL
NAISSANCE ?
1957
ORIGINE ?
France
1 Place de la Vieille Halle aux Blés
(« Sitting Kid » poché sur la façade d’un ancien relais de diligences situé à
l’intérieur d’un îlot inaccessible au public entre les rues du Lombard, du
Chêne et de l’Etuve)
2 Rue du Chêne
3 Rue Saint-Ghislain
4 Rue du Chêne
DECLENCHEUR ?
En 1977, j’ai vu le groupe Clash avec leurs blousons, les chemises bombées au
pochoir avec des lettres métalliques. Je me souviens d’une exposition, dans une
espèce de grande cité à côté de Nantes. Dans le sous-sol de ce lieu, il y avait un
portrait qui était visiblement fait à la bombe et au pochoir. J’ai tout de suite repéré que
c’était fait au pochoir parce que je m’intéressais à ce qu’on appelait alors « Op’ Art »,
un mélange d’art cinétique et de pop art qui jouait beaucoup sur le noir et blanc et les
figures géométriques. C’est ça qui m’a amené à des images très stylisées, où il n’y
avait plus que du noir et du blanc.
Le premier pochoir, c’est donc ma tronche.
J’ai fait ça en une nuit.
1
PREMIER ?
Un jour, en 1982, je vois un photomaton et je me dis que ça serait bien en grand.
Je vais à la photocopie-service, j’agrandis jusqu’à un format qui correspond à peu
près au A3, je photocopie, je photocopie pour qu’il n’y ait plus que du noir et du
blanc… Je rentre chez moi avec un cadre que je trace, je prends un carton de boîte de
chaussures, j’achète un cutter, deux bombes et voilà ! Le premier pochoir, c’est donc
ma tronche. J’ai fait ça en une nuit. Je ne m’appelais pas Jef Aérosol… J’avais juste
signé d’un petit « Jef ». Le deuxième pochoir, c’était la femme qui a servi de couverture
pour le livre « Vite fait, bien fait » en 1985.
TECHNIQUE ?
Pendant vingt ans, je ne me suis absolument pas posé la question du copyright des
photos. Je pillais allègrement revues, magazines, pochettes de disques, affiches…
En revendiquant même un peu le côté « pillage », qui est inhérent à la démarche des
pochoirs, au départ. Maintenant, je fais plus attention au choix des images, j’évite
celles qui sont déjà des œuvres d’art en elles-mêmes. La plupart du temps, je recadre
complètement, j’isole les fonds, je stylise quand je passe au pochoir. Je change les
textures, je travaille sur les couleurs… Avec un même pochoir, je me fixe entre cinq et dix
originaux. Je ne les numérote pas. Je ne fais pas de multiples. Ce n’est pas une édition
car le fond n’est jamais de la même couleur, la flèche n’est pas au même endroit. L’origine
de la flèche, c’est un hasard total. Vers la fin des années quatre-vingts, j’utilisais pas mal
de petites figures géométriques, des cercles, des pointillés, des triangles, des spirales
et des flèches. Une imagerie post-punk très synthétique. La flèche s’est retrouvée par
hasard à côté d’un de mes pochoirs en 1986 ou 1987, on va dire. Elle était mélangée
au reste, à ma signature. J’aimais bien ce petit pochoir facile à réaliser. Ensuite, j’ai
abandonné les pointillés, les autres trucs, au fur et à mesure mais la flèche, je ne pouvais
plus m’en passer. Cette flèche est peut-être un lien, une référence à la signalétique de
la ville. Dans les rues, j’ai toujours été très attiré par les panneaux, les feux rouges, les
sens uniques, des images très géométriques. C’est un bon résumé de la ville, un peu
dur et finalement très rectiligne. C’est la façon de diriger le flux humain dans une espèce
de labyrinthe urbain. Mais le corps de l’être humain n’est pas rectiligne… C’est donc le
mouvement par rapport au figé. Alors, le fait de m’arrêter avec mes pochoirs sur les murs,
c’est une façon de faire l’arrêt sur image du flux humain. La flèche rouge, en restant, est le
trait d’union entre la signalétique urbaine et la courbe humaine dans mes images.
21
20
EVOLUTION ?
L’évolution est liée aux outils. Quand j’ai
commencé, les photocopies, les calques, c’était
le seul truc. Et puis après, j’ai investi dans
un rétro-projecteur scolaire. Il fallait faire des
transparents, donc toujours à la photocopieservice. Ça m’a quand même permis de faire
du tout grand. Puis, la vraie révolution, ça a
été l’ordinateur. Moi, j’utilise les technologies
modernes, c’est plus pratique pour séparer les
noirs et les blancs, refaire des cadrages.
PLACE DANS TA VIE ?
Ce qui m’intéresse dans la création artistique,
c’est ce qui me fait pleurer. Ce qui me donne la
chair de poule. Je suis vachement nostalgique,
sensible, c’est sûr ! Mes souvenirs sont souvent
esthétiques.
MESSAGE ?
A partir du moment où tu décides d’aller dans
la rue, de montrer tes images aux gens malgré
eux, c’est évident que tu tiens un discours. C’est
de l’art gratuit mais tu t’imposes quand même.
Donc il y a quelque chose d’exhibitionniste.
De relativement violent. C’est forcément la
manifestation d’un ego. Et puis, les gens sont
tellement habitués à voir des affiches que, quand
tu vois une image qui s’apparente à une affiche,
c’est un acte de quasi-terrorisme graphique…
Il faut en avoir conscience et, en même temps,
garder la tête froide parce que, sans vouloir
minimiser notre travail, il y a encore une partie
d’artisanat très importante dans les pochoirs.
REACTION ?
Pour moi, tout ça n’a qu’un seul but, essayer
d’être heureux en rendant les gens autour
de soi le plus heureux possible. C’est un truc
que mon père m’a dit quand j’avais onze ou
douze ans, c’est un motto tellement facile à
comprendre pour un gamin. Mais quand je dis
ça aujourd’hui à mon père, il ne s’en souvient
absolument pas !
POCHOIR FAVORI ?
Le premier.
2
POCHOIRISTE FAVORI ?
Je vais dire Speedy Graphito, le pochoir
zoulou qu’il a fait dans les années
quatre-vingts qui était dans un magazine.
Un pochoir très découpé. J’ai gardé une
grande tendresse pour cette époque-là
de Speedy.
3
POLICE ?
J’évite les trucs compliqués. Si on a besoin
de faire dix pochoirs hyper-compliqués,
ça prend un temps fou… On peut se faire
choper par les flics. C’est pas l’objet !
ENDROIT ?
Il y a des endroits à Paris où je suis protégé
parce qu’on a participé à des trucs officiels.
Les services de nettoyage ont trop peur de
faire des conneries. Donc, non seulement ils
nous laissent, mais en plus ils repeignent sur
les tags autour de nos pochoirs.
NETTOYAGE ?
Les nettoyages, je n’ai absolument rien
contre. C’est tout-à-fait normal de nettoyer.
On peint sur des surfaces où, à priori, on
n’a pas le droit de peindre… Alors on ne
va quand même pas se plaindre qu’on
efface ! L’art de la rue, par définition, est
éphémère. Evidemment, c’est très frustrant
si le pochoir s’en va dès le lendemain mais
s’il est nettoyé au bout d’un moment, il n’y
a rien de plus normal. Il y a des endroits où
les pochoirs sont tellement abîmés que je
trouve qu’on ferait mieux de remettre un
coup de blanc. Et puis on y retourne !
BRUXELLES ?
Bruxelles est une ville que j’aime bien.
C’est une capitale à dimension humaine
mais, en même temps, pas ringarde. Il y a ce
côté hyper-cosmopolite, il y a des gens qui
viennent d’ailleurs. C’est toujours intéressant,
des gens qui amènent avec eux leur langue,
leur culture, leurs occupations.
4
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FACES 1
1
6
7
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FACES 2
1 Rue du Couvent
2 Boulevard Poincaré
3 Rue Steens
4 Rue des Grands Carmes
5 Rue Lincoln
6 Avenue Bel-Air
7 Rue Terre-Neuve
8 Rue Jacques de Lalaing
9 Avenue de la Couronne
10 Rue Elise
2
3
1
2
4
5
4
5
8
6
1 Rue des Fabriques
2 Avenue Legrand
3 Rue du Pène
4 Rue de l’Ermitage
5 Rue Charles Lemaire
6 Avenue Louise
7 Rue du Faucon
8 Rue Henri Maus
9 Square Georges Marlow
10 Avenue de la Couronne
3
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LE POCHOIR FAIT
LE TROTTOIR
Au pays des pochoirs petits et monochromes,
l’application au sol (directement par terre, quoi)
n’est pas fréquente. En regardant bien où
vous mettez les pieds (diminuant ainsi le risque
de marcher dans une crotte de chien), vous
trouverez peut-être quelques textes ou signes
pochés sur les trottoirs bruxellois... Mais ceux-ci
restent une exception numérique par rapport aux
murs et palissades.
1 Rue des Halles (Paris)
2 Spring Street (New York)
3 Rue Saint-Roch
1
2
3
Pourtant le sidewalk stenciling ne manque
pas d’avantages et de charmes. L’usage est
discret (je fais semblant de renouer le lacet de
ma chaussure et pschiiiiiit c’est dans la poche),
l’opération se pratique nettement sous la ligne
de balayage ophtalmique des agents de la
maréchaussée (derrière une bagnole, une vieille
dame tirant son caddy, une poubelle) et sur
une surface clairement identifiée comme voirie
publique (donc pas privée).
Enfin, son résultat est d’autant mieux mis en
valeur qu’il est isolé des nombreuses pollutions
verticales que sont les panneaux, enseignes,
affiches et autres communicants mercantiles
ou disciplinaires qui saturent continuellement
notre champ de perception visuelle. Bref, pour
un pochoir, il serait difficile d’être encore plus
« fondu » dans la routine urbaine quotidienne, tant
le trottoir est à la fois un des éléments collectifs
premiers de la ville (spatialement translationnel
entre rue et immeuble) et un lieu d’expérience
individuelle primale pour chaque piéton,
poussettiste et - parfois - cycliste.
Bref, un idéal de situationnisme !
Face à tous ces attraits, la faible fréquence
des pochoirs terrestres à Bruxelles est donc
difficile à expliquer. L’exemple que nous en
donnons ici est un portrait non signé (mais
très certainement attribuable à Siul) que nous
avons trouvé rue Saint-Roch, dans le bas de la
ville. Si nous pouvions contacter l’auteur, nous
lui demanderions certainement comment il gère
l’équilibre délicat entre la gracieuseté de l’action
pochoiresque au sol et la seule conséquence
fâcheuse de son choix, qui est de se faire marcher
sur la gueule dix, cent ou mille fois par jour ?
Mais nous n’avons pas réussi à identifier le
visiblement juvénile et souriant Siul.
En complément international à cette illustration
bruxelloise, nous avons sélectionné dans nos
gigantesques archives deux autres poch-traits
également plaqués au sol. Le premier est de Féfé
(aka Féniski, un rappeur français) photographié
rue des Halles à Paris et le second est de Spud
(aka Eric Campbell, un hip-hoppeur américain)
photographié sur Spring street à New York.
Dans ces deux cas, interestingly, la posture
situationniste du pochoir au sol est prise à
contre-pied (!) puisqu’il s’agit d’utiliser une
mise-en-rue artistique originellement
désaliénante (rappel : l’horizontalité du sol
l’éloigne des signaux consuméristes verticaux)
pour, justement, promouvoir la vente d’albums
de musique ! Donc, l’équation revient ici à : «
OK, tu me marches sur la gueule mais je te
fourgue mon CD en échange »...
L’ami Siul échappe-t-il, lui, au tupsy-torvy
insidieusement commis par Féfé et Stud ?
Inconnu au rayon des lyricistes mélodieux, on
pourrait se dire, à défaut, que - oui - son acte
est probablement innocent et désintéressé.
Mais c’est compter sans les pirouettes de la
destinée urbaine qui font que la rue Saint-Roch
soit dans un des très rares quartiers de notre
plutôt prude et puritaine capitale où la prostitution
libre (non-close) est, sinon officiellement tolérée,
du moins joyeusement pratiquée ! Femmes de
joie et travelos de soie y déballent en effet leur
marchandise vénale à même le trottoir à toute
heure du jour (un peu) et de la nuit (beaucoup).
Donc, pour Siul, l’équation revient peut-être à :
« OK, tu me tapines sur la gueule mais en
échange de... ». De quoi ? De zieuter sous la jupe
des péripatéticiennes ? Lui seul le sait.
Et peut-être est-il, malin, encore plus proche de
la démarche situationniste qu’on ne pourrait le
penser, puisque celle-ci cherche en effet à créer
des situations alternatives dans lesquelles les
désirs humains les plus primitifs se réalisent.
En attendant, un peu plus de sidewalk stenciling
à Bruxelles ne serait pas de refus.
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A--Localisation confidentielle (Photo par A---)
NOM ?
A---
NAISSANCE ?
1971
ORIGINE ?
Belgique
Il y a des choses que je trouve bien plus inciviques
que de faire des pochoirs.
DECLENCHEUR ?
Je trouve que le pochoir est la technique la plus facile en soi parce que ça te permet
d’exprimer pas mal de choses. C’est un mécanisme assez rapide pour travailler,
pour reproduire. Tu pars d’une photo, tu trouves le juste mix du noir et du blanc
pour chaque zone et puis tu découpes. C’est déjà plus difficile, je trouve, de faire tes
propres dessins et de les transformer ensuite en pochoirs.
PREMIER ?
Le premier pochoir que j’ai fait, c’était juste pour m’exercer. Le but n’était pas de
raconter quelque chose. Je ne me souviens plus du sujet.
TECHNIQUE ?
J’ai tendance à préférer les pochoirs monochromes. L’intérêt est dans le contraste,
dans l’hyper-construit. A mon avis, le pochoir à plusieurs couleurs, c’est plus dans la
représentation.
EVOLUTION ?
J’ai commencé un vaste projet, une sorte de bande dessinée dans la ville à partir
de pochoirs, auto-collants, fausses publicités, bref tout ce qui s’apparente à ce
que tu croises au quotidien dans la rue. Certains éléments sont narratifs, d’autres
uniquement décoratifs. L’histoire a été écrite. Il n’y a pas de cohésion graphique et
c’est voulu comme ça. Par contre, je ne peux pas me permettre de faire mille dessins
différents, de passer à côté de ce que je veux exprimer... C’est un challenge.
Et puis, il y a l’effet du temps, l’effet de la lumière qui s’ajoutent sur mes interventions.
C’est comme un jeu de piste et parfois, je suis moi-même surpris de retrouver
des choses que j’avais faites et presque oubliées. Le résultat final sera un ouvrage
cartonné, relié, avec des photos, comme un roman-photo.
PLACE DANS TA VIE ?
J’ai promis à ma femme d’un peu diminuer mes activités franchement illégales et
donc, maintenant, je sors moins avec mes bombes. Les interventions en rue,
ça prend du temps, ça prend de l’énergie. Alors mes interventions sont maintenant
très ciblées.
MESSAGE ?
Je n’ai aucune volonté politique. Moi, c’est vraiment la narration et le sentiment.
Tous les sentiments que j’exprime, c’est toujours très personnel. En plus, le pochoir,
selon moi, ne dégage pas beaucoup de naiveté. C’est un truc pensé, travaillé à
l’avance, répété... Ce n’est pas spontané. Donc si je veux exprimer quelque chose
d’un peu léger, le pochoir ne sera pas la technique que je choisirai.
29
28
Scène de rue
REACTION ?
Ma grosse déception, c’est qu’il y a relativement peu d’interactions, de collaborations involontaires sur les murs.
Il y a une forme de respect mutuel qui m’ennnuie un peu parce que je trouverais très amusant, si je fais une
intervention, que quelqu’un d’autre vienne faire une intervention sur la mienne et que ça évolue ainsi.
Je me dis : « Allez, venez... Pourquoi personne ne vient faire un autre élément dessus, au-dessus ? ».
POCHOIR FAVORI ?
De mes propres pochoirs, c’est difficile à dire, vraiment. Par un autre pochoiriste, j’ai un jour vu un pochoir d’un
masque à gaz surmonté d’un chapeau, peint dans un endroit complètement perdu en pleine campagne au
nord de Bruxelles. Il était vraiment beau, sur une porte un peu rouillée. C’était très inattendu, une combinaison
de beauté intrinsèque et de rencontre insolite.
POCHOIRISTE FAVORI ?
A Bruxelles, j’aime les pochoirs du collectif Cum in the Streets pour leurs sujets et leur évolution par rapport
à l’art urbain. A l’étranger, c’est Banksy ! Ses pochoirs sont techniquement superbes, les spots choisis sont
audacieux et les sujets sont toujours pleins d’humour et politiquement intéressants.
GRAFFS & TAGS ?
Les tags, ça m’excite beaucoup moins. Je ne juge pas et je peux comprendre la démarche qu’il y a
derrière. C’est quelque chose qui va assez vite... Je trouve que les tags pourraient être plus réfléchis,
plus personnels. Les fresques en graff, certaines sont vraiment belles mais, d’une manière générale, c’est
toujours un peu le même style. De nouveau, je trouve que ça manque de personnalité. J’aimerais que ces
graffeurs oublient un peu leurs références.
POLICE ?
C’est « amusant » de voir à quel point les autorités ont tendance à chasser ce genre d’activité. Ceci dit, j’ai
quand même l’impression qu’à partir d’un certain moment, ceux qui deviennent reconnus, réputés, ceux qui
sont catalogués comme artistes et qui font des grands trucs, ceux-là on les tolère. J’ai toujours du mal à
voir jusqu’où c’est interdit et à partir d’où c’est toléré. Maintenant, il y a des choses que je trouve bien plus
inciviques que de faire des pochoirs.
ENDROIT ?
La ville est un grand décor. Dans le cadre de mon travail, c’est chaque fois en fonction du contexte. Si je trouve
un super-endroit sur un mur, je le fais. Comme mes interventions sont plus motivées par le rendu narratif,
j’ai tendance à les faire à des endroits où je sais qu’il y a peu de passage. J’essaie de trouver de bons endroits
qui ne nuisent à personne et d’éviter ainsi toute dégradation. Beaucoup de mes interventions ont peu de
chance d’être repérées. Je préfère donc ne pas avoir une certaine notoriété... Même si parfois mon ego prend
un peu le dessus.
NETTOYAGE ?
Je suis assez mitigé. Quand tu es dans un quartier qui n’est pas très beau, un peu défavorisé, les graffitis,
ça ne l’embellit pas vraiment. Tagger, graffer sur les façades des gens, c’est manquer de respect.
Je comprends que tu puisses être irrespectueux vis-à-vis d’institutions que tu n’apprécies pas, mais sinon,
c’est OK de nettoyer. Ça fait de la place.
BRUXELLES ?
Je trouve qu’à Bruxelles, il y a beaucoup de styles réalistes. Je ne peux pas dire si c’est plus dense ou moins
dense qu’ailleurs.
Rue Kerckx
31
30
SIGNES 1
1
6
7
9
10
SIGNES 2
1 Rue aux Laines
2 Rue du Printemps
3 Rue du Nord
4 Avenue de la Couronne
5 Rue de Stassart
6 Rue du Nord
7 Rue Meyerbeer
8 Chaussée de Boondael
9 Rue Jacques de Lalaing
10 Avenue Hermann Debroux
2
3
4
5
8
1
6
7
9
10
1 Rue de la Croix
2 Rue du Bosquet
3 Rue du Midi
4 Rue de l’Eventail
5 Rue de l’Eventail
6 Rue de l’Athénée
7 Rue du Nid
8 Chaussée de Saint-Job
9 Rue Tenbosch
10 Avenue Ducpétiaux
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3
4
5
8
33
32
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1 Rue de la Rasière
2 Rue de la Rasière
3Boulevard de Waterloo
4 Boulevard de Waterloo
FÉLIX
COMME STANDARD !
1
2
En théorie, la technique du pochoir permet de reproduire à l’identique et à l’infini
un motif, une image ou un texte. En pratique, il en va tout autrement…
La nature et la texture du support, les inclinaisons accidentelles ou voulues,
les bavures et coulées dues à l’urgence ainsi que l’usure du temps et du vent
font que chaque « même » pochoir est différent.
La question est de savoir si l’aléatoire et la variation s’additionent - ou au contraire
s’opposent - à la volonté de l’artiste de reproduire son message et son passage ?
A cette question en fait aussitôt écho une autre : Tous les pochoiristes
utilisent-ils cette technique pour se multiplier vite-et-bien dans l’environnement urbain
(comme les taggeurs qui désirent laisser leur empreinte visible dans le plus grand
nombre d‘endroits possibles) ou est-ce que certains d’entre eux utilisent ce medium
simplement parce qu’il leur plait ou convient mieux (parce qu’il permet de préparer
l’œuvre à la maison, notamment) ?
Dans tous les cas, les variations pochoiresques ne peuvent être négligées
dans la contemplation et l’interprétation d’une oeuvre.
Comme exemple, nous prendrons Félix le Chat, dont on trouve aujourd’hui
de multiples reproductions dans les Marolles.
3
4
Ce n’est pas un choix livré au hasard…
Conçu par Pat Sullivan en 1919 et ensuite développé par Otto Messmer, notre ami
félin fut en effet la première image à être diffusée par la télévision - par la station
W2XBC pour être précis - en 1929 !
Sous la forme d’une figurine en papier-maché disposée sur le plateau d’un tournedisque, Félix servait alors de référence aux techniciens de RCA pour le calibrage et le
contrôle de la qualité de l’image retransmise. Ce rôle, crucial s’il en est, fut assuré par
notre brave Félix pendant une dizaine d’années !
Presque 80 ans plus tard, en ce merveilleux et ensoleillé dimanche d’octobre,
il nous sert maintenant de standard pour démontrer la fluctuation imageante
des pochoirs d’un emplacement à l’autre. A l’auteur de ce Félix le Chat sifflotant et
déambulant de nous dire si ces variations sont voulues ou non, importantes ou non,
ou s’il s’en tape complètement.
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MONZON TAS
NOM ?
Monzon TAS
NAISSANCE ?
1972
1 Rue de la Caserne
2 Rue du Berger
3 Rue des Paroissiens
«
Voir une façade blanche, pour moi, ça pue la mort.
ORIGINE ?
Belgique
»
1
DECLENCHEUR ?
Depuis tout petit, j’adore dessiner. Le seul moment où je n’étais pas un garçon
hyper-turbulent, c’était quand on me foutait une bande dessinée ou un bouquin dans
les pattes. Je voulais donc faire de la bande dessinée, à caractère philosophique
d’abord puis plutôt politique. Vers 17 ou 18 ans, j’habitais en banlieue parisienne.
Je faisais des graffitis et j’avais déjà une conscience politique un peu exacerbée.
J’ai rejoint un mouvement de lutte contre le racisme appelé Section Carrément
Anti-Le Pen, soit SCALP. Dans le groupe, il y en a qui faisaient des pochoirs et
je m’y suis intéressé. J’ai vu que c’était une manière de communiquer beaucoup
plus efficace que le simple tag. Ça rejoignait mon idée de faire des compositions
artistiques. On a formé un mouvement appelé Terrorist Act System, soit TAS, à ce
moment-là en mélangeant des graffiteurs hip-hop et des punks qui faisaient des
pochoirs. J’étais le trait d’union entre les deux groupes.
PREMIER ?
Le premier, c’était le M de la Marque Jaune... Facile ! Tellement facile que je ne l’ai
jamais vraiment compté comme un vrai pochoir. Le second pochoir m’a pris une
semaine. C’était la liste des tous les membres du posse TAS de l’époque avec
les logos de chacun. Franchement, les lettres, c’est beaucoup plus chiant que les
images. Il y avait plein de bouts de papier-collant pour que ça tienne parce que
j’avais fait plein de ratés.
TECHNIQUE ?
Au début, c’était sur des cartons de devanture de libraire, des publicités en carton
qu’on remplaçait chaque semaine donc ça ne dérangeait pas le libraire que j’aille me
servir. Mais la source s’est tarie... Alors, comme je fais des pochoirs de plus en plus
grands, maintenant, c’est plutôt des grands cartons, ceux qui séparent les bouteilles
d’eau sur les palettes, que j’utilise.
EVOLUTION ?
Oui, avant je faisais beaucoup de lettrage, comme les noms des gens qui étaient
dans mon groupe. Puis j’ai fait tous mes dessins et après j’ai fait plutôt les dessins
des autres. Mais ce qui se reflète beaucoup dans mes pochoirs, c’est la présence
d’un message. C’est un peu une marque de fabrique de TAS aussi. On a lancé des
choses qui n’existaient pas. Par exemple le premier pochoir freestyle. Très vite, j’ai
fait des pochoirs assez grands.
37
36
PLACE DANS TA VIE ?
Une place beaucoup plus
politique qu’avant mais aussi
de moins en moins, plus du
matin au soir... Ça dépend
aussi si je suis avec d’autres
pochoiristes. Maintenant, j’ai
d’autres terrains d’action.
Mais j’adore toujours les
pochoirs.
MESSAGE ?
Il y en a qui font du graffiti
pour le plaisir et ceux qui
ont une idée de révolution
derrière. Je suis dans la
culture hip-hop mais dans
l’optique d’un militantisme
politique. Le message de
TAS, c’est l’art à tout prix et
sans concession. C’est la
ré-appropriation de l’espace
urbain. L’intérieur d’un
domicile, OK, c’est privé...
Mais l’extérieur est mitoyen !
Ça nous appartient à tous.
La propriété privée est une
notion que je ne partage pas.
Voir une façade blanche, pour
moi, ça pue la mort. Mettre un
signifiant dessus, c’est créer
la vie. Donc chaque graffiti est
un acte de remise en question
des limites du système.
C’est un acte de révolte et
d’insoumission. A partir du
moment où on remet de la
vie, c’est une oeuvre d’utilité
publique.
2
REACTION ?
Je vois un mur, j’ai envie de m’exprimer, je le fais. Pour moi, l’illégalité n’entre pas
en ligne de compte. Ce sont les autres qui le rendent illégal, pas moi. C’est la loi qui
criminalise, pas moi. A partir du moment où le système est tellement mal organisé
que j’ai besoin de pocher partout et de me montrer partout, le système doit assumer
ses conneries... Légitime défense !
POCHOIR FAVORI ?
Chez moi, celui où tu vois une grosse souris qui encule un flic... Le message est
« Monzon déteste la police mais il lui fait plaisir ». J’ai toujours un peu peur quand je
le poche parce que, là, si on m’attrape... Chez les autres, j’aime particulièrement un
pochoir fait par un autre membre de TAS où tu vois un jeune homme qui court en ville
et, derrière son dos, il y a un sac rempli de bombes de peinture. Superbe travail de
découpe.
POCHOIRISTE FAVORI ?
Miss Tic parce qu’elle fait des pochoirs qui veulent dire quelque chose.
GRAFFS & TAGS ?
Je suis ouvert à tout. Je respecte les pochoiristes et les taggeurs.
Plus les pochoiristes, peut-être, parce que les taggeurs n’ont pas conscience de la
portée politique de leurs actes. J’ai toujours vu une énorme différence. L’emblème
traditionnel chez les punks, c’est le rat alors que dans le milieu hip-hop, c’est
l’aérosol. Le hip-hop a une revendication de l’ego très forte tandis que les punks sont
étonnés d’être encore vivants.
POLICE ?
Le graffiti est un terrain de combat. Tu pars la nuit, tu pars en guerre sans tuer
personne !
ENDROIT ?
Tout le monde a un lieu de vie. C’est utilitaire. Mais le mur extérieur, la façade, ce
n’est pas utilitaire... C’est mitoyen. De quel droit peut-on nous imposer une façade
blanche ou jaune ? Moi, je ré-approprie l’extérieur qui appartient au commun.
3
NETTOYAGE ?
La dégradation des murs par les autorités, moi je trouve ça inadmissible !
Ils détruisent les murs comme ça. Pour moi, la détaggeuse est un outil de
normalisation des pensées. C’est un tue-la-vie.
BRUXELLES ?
Maintenant le pochoir est accepté dans le milieu du graffiti à Bruxelles.
On a fait école !
Estampe 51 asbl, rue de Veeweyde 108, 1070 Bruxelles
MONZON TAS
2
3
1 Rue de la Clinique
2 Boulevard Jamar
3 Rue Van Helmont
4 Rue des Champs
5 Rue de Stassart
6Rue Joseph Stallaert
7 Place Saint-Géry
8 Rue Van Artevelde
9 Rue Van Artevelde
10 Quai aux Briques
11 Avenue Georges Brugmann
12 Rue Joseph Stallaert
4
39
1
41
40
MONZON TAS
5
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6
8
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LE POINT DE VUE
D’UNE CHAISE
Rue Saint-Géry
Le pochoir érotique est un ustensile, généralement en plastique ou en carton,
que les artisans de l’épilation et du rasage utilisent pour donner une forme particulière
(en cœur ou en ticket de métro, en flèche, etc) à une coquine toison pubienne.
Ce n’est probablement pas ce type de pochoir érotique que Monzon avait en tête
(ou ailleurs) en se la jouant « Manara » sur une façade de la rue Saint-Gery…
La belle du pochoir, jambes tendues jusqu’aux orteils, figée dans un arc de plaisir
absolu, semble en tout cas – et en toute impudeur – apprécier les moultes joies de
la vie. Heureuse chaise, dès lors, que celle qui a l’honneur mobilier d’être complice
d’un tel abandon exhibitionniste… D’autant plus que, pour manifester à sa façon son
soutien à la cause pochoiriste, ce n’est pas un simple gode que notre demoiselle
accueille dans son joli cul… mais une bombe de peinture ! Comme quoi, la bombe
sexuelle n’est pas toujours celle que l’on croit…
Monzon s’en explique : « J’ai quasiment toutes les bandes dessinées de Manara.
Je trouve qu’il a un coup de crayon extraordinaire. Je trouvais qu’il méritait d’être mis
à l’honneur. Cette image me parlait plus que d’autres mais je ne sais pas pourquoi.
Peut-être le côté immobile, la pose. Comme je suis pochoiriste, je travaille avec des
bombes aérosols... Et donc il fallait bien que j’en mette une en scène quelque part !
Ça a choqué des gens, apparemment mais c’était juste un clin d’oeil ! ».
Qu’en est-il au niveau des contraintes anatomiques, me demanderez-vous ?
Renseignements pris, la dilatation naturelle d’un anus relaxé et entraîné à la sodomie
oscille entre 6 et 8 cm. Le diamètre d’une bombe aérosol étant de 6,5 cm (gamme
MTN), c’est de toute évidence vers la délicate limite entre jouissance et souffrance
que cette intrusion bombastique emmène la donzelle.
Plus sérieusement, le pochoir de Monzon engage deux observations.
D’une part, l’illustration contraste avec la moyenne des thèmes graphiques que
l’on peut voir sur les murs bruxellois (ici, l’image est plus forte et radicale que le
message… elle est le message). Ecoutons Monzon à ce propos : « A l’époque,
j’étais légèrement frustré par ma relation avec ma copine. On s’entendait un peu
moins bien. Elle ne voulait pas que je mette ce pochoir... Mais je l’ai quand même
fait ! ». D’autre part l’illustration renvoie directement à une case de bande dessinée
extrêmement bien ancrée dans la mémoire collective (la série « Le Déclic » de Milo
Manara, relatant les aventures de la ravissante mais coincée Claudia Cristiani).
L’efficacité interpellante de l’image sur le passant est donc assurée. Coup double et
de maître pour Monzon… avec l’aide d’une humble et muette chaise qui n’en pense
certainement pas moins.
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NOM ?
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NAISSANCE ?
1972
1 Rue du Houblon
2 Rue Vandenbranden
«
ORIGINE ?
France
DECLENCHEUR ?
J’ai découvert l’art du pochoir en écoutant du punk-rock, sur les perfectos et,
surtout, dans la rue. Et puis, fin des années 80s, j’ai découvert le livre « Pochoir à la
Une » dans une librairie parisienne. Je cherchais le moyen de reproduire un dessin et
le fait de faire quelque chose dans la rue me motivait pas mal aussi. Donc c’est parti
comme ça.
PREMIER ?
C’était le « Lucien » de Frank Margerin. Je l’ai fait sur une feuille Canson pour
l’appliquer sur un T-shirt... Et puis je suis allé le faire dans la rue !
A chacun de trouver sa parade.
1
2
EVOLUTION ?
Je suis très vite passé du pochoir au graffiti que je pratique toujours. Fin des années
90s, je suis revenu au pochoir mais en même temps que d’autres techniques comme
la peinture à l’acrylique et les affiches. J’essaie de ne pas m’enfermer dans une seule
pratique.
MESSAGE ?
Je n’ai pas de message en particulier... Mon travail tourne autour de la musique.
POCHOIRISTE FAVORI ?
J’aime bien le travail de Marie Rouffet. Puis Banksy, Blek le Rat et Jef Aérosol.
NETTOYAGE ?
Cela fait partie du jeu, en quelque sorte. A chacun de trouver sa parade !
BRUXELLES ?
Je n’ai pas de préférence pour une ville. J’interviens là où je peux, en fonction des
groupes avec lesquels je travaille. Il se peut d’ailleurs que je refasse prochainement des
choses à Bruxelles.
Note : Cet interviex a été réalisé par courriel.
49
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FACES 3
1
6
7
9
10
SIGNES 3
1 Rue Jean-Baptiste Vannijpen
2 Chaussée de Waterloo
3 Rue du Berger
4 Esplanade de l’Europe
5 Rue Africaine
6 Rue des Ursulines
7 Rue de Flandres
8 Rue des Halles
9 Rue Van Aa
10 Rue Saint-Ghislain
2
3
1
2
4
5
4
5
8
6
1 Chaussée de Boondael
2 Rue des Cygnes
3 Rue des Ursulines
4 Rue Keyenveld
5 Place des Palais
6 Rue des Brigittines
7 Rue de la Serrure
8 Rue de l’Eclipse
9 Chaussée de Vleurgat
10 Rue des Brigittines
3
7
8
9
10
51
50
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C’EST LA TOTALE !
Rue de Stassart
À Bruxelles, capitale européenne de la démocratie, photographier des pochoirs
est un motif apparemment suffisant pour être interpellé, questionné et fouillé par la
police.
Trèèèèès énervés, les trois gardiens de la paix suants et suintants sous la canicule
de ce bel été, la semaine passée dans la commune d’Ixelles, lorsqu’ils m’ont
assommé de questions à la « Pourquoi est-ce que vous photographiez des graffitis ?
Qu’est ce que vous transportez dans votre sac ? Est-ce que vous connaissez celui
qui a fait ce graffiti ? »... Sans oublier l’aimable et inoubliable injonction « Répondez
à mon collègue ! ». Et bien, non, il n’y avait ni bombe aérosol ni marqueur dans
ma besace... Et bien, oui, cette fouille était parfaitement abusive et inutile. Mais je
comprends, allez.
C’est vrai que les rues du quartier ont été récemment pochées d’un abondant
« Total 10 » qui n’a épargné ni palissade de maison naguère incendiée (comme ici
rue de Stassart), ni fraîche devanture de magasin (comme dans la rue du Berger)
ni jolie façade de maisonnette (comme dans la rue Keyenveld). Agressivité un peu
inhabituelle d’un pochoir fort vandale par rapport à la pratique moyenne nettement
plus polie et respectueuse.
Mais alors ? « Total 10 » avec un gros point noir par-dessus...
Mmmmh, voyons, voyons, mais ne serait-ce point (sic) une publicité pour la dernière
compilation du label Kompakt basé à Cologne et dont la sortie en dur est annoncée
pour... Aujourd’hui (24 août 2009) ? Ouiiiiii, alors, c’est fête !
Parce que Kompakt a toujours été un de mes labels fav’ et que sur cette compilation
figure un de mes remixes tout aussi fav’, le très éthéré Wighnomy Likkalize Love
Rekksmi de « No Turning Back » de Gui Boratto (07:13). Aussi recommandé,
l’angoissant « Berg und Tal » de Wassermann aka Wolfgang Voigt (06 :43).
Follow-up plutôt comique du traumatisant incident policier d’Ixelles, je me suis
retrouvé quelques jours plus tard chez l’épicier du coin à faire la file juste derrière
l’ancienne ministre fédérale de la justice qui fut responsable, en son temps, de la
pénalisation des graffitis dans notre patelin pays... Tunique orange sur pantalon blanc
pour elle, T-shirt brun sur jeans troués pour moi... Nos regards se croisèrent l’espace
fugace d’un instant gracieux mais sans plus. Ni échange verbal ni contact corporel.
Je n’avais finalement rien à lui dire, ni à lui faire.
Art urbain et musique électronique... Que voulez-vous que cette noble et notable
dame y comprenne ? Je ne sais pas quel était son total à la caisse mais le mien était,
heureux hasard, de 10 euros pile (pour du gruyère rapé, de la sauce bolo et quelques
pâtes). Total 10 ! C’est tout bon.
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PERIPHERAL
MEDIA PROJECTS
NOM ?
Peripheral Media Projects est un collectif constitué de Garrison, Allison et Ray.
NAISSANCE ?
1972 (Garrison)
ORIGINE ?
Etats-Unis d’Amérique
1 Rue des Ursulines
2 Rue des Brigittines
3 Rue Saint-Ghislain
«
Ces ponts sont une métaphore incroyablement forte.
DECLENCHEUR ?
J’étais réellement fasciné par la façon dont certaines personnes peuvent prendre
quelque chose de très utilitaire, comme des pochoirs, et l’utiliser pour exprimer des
émotions. D’autre part, j’étais fort désenchanté par le monde de l’art et par le fait que
notre espace public est saturé de publicités. J’avais envie de faire des interventions
dans cet espace et je me suis dit que les pochoirs étaient le meilleur moyen d’y
arriver. J’apprécie les pochoirs parce qu’ils sont faciles à reproduire, parce qu’ils
permettent d’obtenir une même image plusieurs fois. Les pochoirs sont très efficaces
pour ça et ils ont une bonne longévité. Ils durent plus longtemps sur les murs que les
affiches.
»
1
PREMIER ?
Mes premiers pochoirs étaient juste des essais, question de bomber de la peinture,
faire des trucs sur les murs, essayer de découper et créer des formes. Je me
rappelle qu’un de mes premiers pochoirs quand je suis arrivé à New York était une
sorte d’amibe. L’idée de départ était juste de découper une forme et de bomber de
la peinture au travers de celle-ci. Je voulais seulement comprendre le concept selon
lequel on peut découper une forme et la peindre. Un truc très expérimental.
En tant que collectif PMP, notre premier pochoir était un visage arborigène tatoué.
Au premier regard, on voit un visage mais, ensuite, on commence à distinguer
beaucoup d’autres choses. On a fait plusieurs versions de ce pochoir ! On voulait voir
comment il était possible d’altérer une image pour la rendre plus efficace.
TECHNIQUE ?
Mes premiers pochoirs étaient découpés dans du papier et du carton. Avec le temps,
j’ai d’ailleurs vite compris que certains types de matériaux peuvent être excellents
dans l’atelier mais un véritable cauchemar à l’extérieur ! Maintenant, j’apprécie aussi
le plastic parce qu’il a une bonne rigidité et qu’il peut être réutilisé de nombreuses
fois. Et puis, chez PMP, on aime aussi recycler des matériaux et tester de nouvelles
technologies comme la découpe au laser. Quand je fais des pochoirs multi-couches,
je considère chaque couche comme un élément individuel... Chacun de ces éléments
doit être fort en lui-même, de façon autonome. De fait, quand on fait quelque chose
d’illégal, il est primordial de trouver le moyen de créer un impact visuel maximal avec
un nombre minimal de couches, d’images et de couleurs.
55
54
MESSAGE ?
Quand on découpe les parties
d’un pochoir, il faut laisser des ponts
entre les différentes sections...
Le pochoir ne peut pas exister
sans ces ponts. On a besoin de
ces connections pour former
quelque chose ! Ces ponts sont une
métaphore incroyablement forte !
Relier les distances entre différents
endroits par des ponts de façon à
les connecter et à les faire interagir...
C’est bien de cela dont il s’agit
avec les pochoirs. D’ailleurs, ce
qui est intéressant, c’est que si on
donne une même image à plusieurs
personnes pour en faire un pochoir,
on voit une multitude de façons
différentes de répondre au problème
des ponts et d’arriver à un pochoir
qui fonctionne. On se retrouve avec
des centaines de pochoirs différents
à partir d’une même image.
REACTION ?
Je laisse aux autres le soin de
décider de ce avec quoi ils sont le
plus heureux. Je ne pointe pas les
gens vers une interprétation précise.
Nous ne disons pas aux gens ce
qu’ils doivent penser. On se contente
de les faire réfléchir. On leur présente
juste des choses. On met des
pochoirs sur les murs et on laisse les
gens décider.
POCHOIR FAVORI ?
J’aime les formes schématiques
et géométriques. J’aime avoir des
éléments modulables et extensibles,
comme des cubes. Notre travail est
surtout fait de compositions. Nous
avons toutes ces séries d’images,
tous ces éléments visuels individuels,
qui peuvent devenir beaucoup plus
intéressantes dès lors qu’on les
arrange en compositions. Donc, je
n’ai pas vraiment de pochoir favori.
2
3
POLICE ?
Juste le fait que l’on peut aller en prison
pour s’être exprimé dans un endroit
public est pour moi très problématique.
Franchement, il y a d’autres problèmes plus
urgents que de s’acharner sur quelqu’un
qui bombe des pochoirs sur un mur.
ENDROIT ?
Je pense qu’il est vraiment très important
de sortir dans la rue et de passer du
temps à faire des reconnaissances dans la
ville pour trouver de bons emplacements.
NETTOYAGE ?
Je suis parfaitement à l’aise avec l’idée
que tout finisse par disparaître ! Ceci dit,
si je peux appliquer un pochoir quelque
part et faire quelque chose de plus pour
le rendre plus durable, quelque chose
qui va ajouter à sa longévité, je pense
que c’est une bonne chose. Pour moi, le
nettoyage n’est qu’une affaire de politique
et d’argent. On parle de sociétés qui se
font énormément d’argent en effaçant des
graffitis. On parle de sociétés qui se font
plein d’argent en vendant en même temps
des peintures et des produits nettoyants !
POCHOIRISTE FAVORI ?
C215 est vraiment extraordinaire !
Ses pochoirs sont superbes. Sa façon de
découper les ponts est impressionnante...
Et puis la manière dont il place ses
pochoirs est très particulière, souvent
dans des endroits très inhabituels.
La plupart des artistes ont tendance à
mettre leurs dessins en hauteur mais
C215 préfère des positions basses.
C’est une bonne idée parce que ses
pochoirs ne seront pas effacés aussi
vite. Découpage, position, tout cela le
différencie fort des autres. J’aime aussi
Logan Hicks. La façon dont il utilise les
nouvelles technologies est étonnante...
Il n’hésite pas à s’embarquer dans des
projets très ambitieux.
GRAFFS & TAGS ?
Tout ce qui motive les gens à faire des
applications dans l’espace public devrait
être encouragé. Donc, je ne peux pas
vraiment dire si ces formes d’art urbain
sont une bonne ou une mauvaise
chose ! Par contre, je pense que si,
c’est vrai, il faut pas mal de talent pour
peindre un flop, pour moi, il s’agit plutôt
de démarquer un territoire, comme
les tags, que de faire quelque chose
d’artistique.
BRUXELLES ?
C’est Ray qui est venu faire nos pochoirs à
Bruxelles. C’est important pour nous d’aller
dans le plus d’endroits possibles et d’y
appliquer nos pochoirs.
Note : cet interview a été réalisée en anglais et traduite par Serge louis.
57
56
FACES 4
1
4
7
SIGNES 4
1 Rue du Nid
2 Rue Saint-Jean Népomucène
3 Avenue Alfred Solvay
4 Rue du Printemps
5 Rue du Houblon
6 Rue des Ursulines
7 Rue Victor Greyson
8 Drève Saint-Hubert
9 Drève Saint-Hubert
2
1
3
4
1 Rue de la Croix
2 Rue Jean-Baptiste Vannijpen
3 Rue du Concours
4 Chaussée de Vleurgat
5 Rue Kindermans
6 Rue du Printemps
2
5
5
8
3
6
6
7
8
9
9
10
11
12
7 Rue Saint-Ghislain
8 Rue Africaine
9 Rue du Concours
10 Rue Keyenveld
11 Rue du Boulet
12 Rue Steens
59
58
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À VUE D’OISEAU
1 Rue Saint-Ghislain
2 Rue du Miroir
1
Vous voyez l’espèce de rosace centrée sur l’œil de l’oiseau poché par le collectif
Peripheral Media Projects sur cette palissade de la rue Saint-Ghislain ?
Mais si, regardez bien… On dirait un enjoliveur de bagnole ou le motif d’un vitrail
circulaire. Allleeeez, vous l’avez sur le bout de la langue… C’est… Hé ben oui, mais
c’est bien sûr… C’est un panopticon ! Oncle Wiki vous en rappelle la définition, au
cas douteux et malheureux où vous l’auriez oubliée : Le panopticon est un modèle
architectural de prison conçu en 1785 par le philosophe anglais Jeremy Bentham
(comme quoi, la philosophie mène à tout). Le principe du panopticon est simple :
Permettre au moins possible de « uns » de surveiller le plus possible de « tous les
autres ». Copain Jeremy a en fait piqué l’idée à son frère Samuel qui a établi les plans
d’une école militaire à Paris selon le même schéma.
Dans un entretien exclusif réalisé dans leur atelier de Brooklyn, un des membres
du collectif PMP, nous parle de l’œil poché (!) : « The observed is always under the
impression of being observed but doesn’t see the observer… The system enables
you to watch more than thousand prisoners at once but they don’t even know if you
are in your post ! It’s all about how to create a maximally efficient prison and guard
system, how to optimize the system ».
Parce que le système auquel notre pochoiriste fait allusion n’est évidemment pas
restreint au monde scolaire (élèves / pion) ou pénitentiaire (prisonniers / gardien).
On le retrouve aussi dans certaines réflexions de dispositions hospitalières (patients
/ soignant), dans des plans de construction d’usines (ouvriers / contre-maître) et,
ultimement, dans l’ensemble de notre environnement sociétal. Il revient au philosophe
(décidément !) français Michel Foucault (1926 - 1984) d’avoir été le premier à
analyser - dans son célèbre livre « Surveiller et Punir » publié en 1975 - cette
fâcheuse tendance panoptique de notre société moderne obsédée par la surveillance
et la normalisation. Ecoutes téléphoniques, caméras en circuit fermé et autres
monitorages internautiques n’ont fait qu’amplifier la pertinence de la métaphore
panopticiste au cours des dernières années. D’ailleurs, même cette palissade en
planches de bois a des yeux (qui ne sont pas de PMP) qui nous regardent...
Bref, nous sommes tous des prisonniers !
Le collectif PMP enfonce d’ailleurs le clou avec un second pochoir peint rue du
Miroir : « For all prisoners… Everywhere ». Mais dans une pirouette intellectuelle que
seuls les artistes de grand talent sont capables d’exécuter, le collectif nous précise
lors de notre rencontre que, à la prison (du corps), il est toujours possible d’opposer
la liberté (de l’esprit) : « Our stencils are strong enough as stand-alone that other
people who may not know it’s a pantopticon can see other contents and be happy
with it… They are not missing-out on anything, it’s not to their disadvantage…
The idea is to get people to think but not what exactly they should think. Telling
people what to think is not respectful ! ». Alors, ami lecteur, amie lectrice, vois et
imagines ce que tu veux, envoles - toi libre comme l’oiseau.
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THE DUDE COMPANY
NOM ?
The Dude Company
NAISSANCE ?
1973
1 Rue des Chasseurs
2 Rue du Boulet
3 Rue des Pierres
ORIGINE ?
France
DECLENCHEUR ?
Dans la rue, ça a commencé en 2006. En 2004, Lille était capitale européenne de la
culture et ils ont décidé à partir de ce moment-là de faire ce qu’ils appellent Lille3000.
Tous les deux ans, Lille représente un pays et en 2006, c’était sur l’Inde. Donc, Lille
a revêtu les couleurs de l’Inde. A cette époque-là, il y avait un gars qui commençait
à coller ici sur Lille. Il était photographe et se faisait appeler Don Quichotte de la
Mancha. Il agrandissait ses photos et les collait sur les murs de la ville. Moi, je trouvais
ça génial, ça m’avait frappé et, avec des amis, on s’est rendu compte qu’il n’y avait
rien sur Gandhi, aucune image de Gandhi, aucune référence à Gandhi. Donc on
s’est dit, tiens le collage c’est une bonne idée. On a commencé comme ça. On a fait
deux affiches de Gandhi. Après, moi j’ai continué tout seul. C’est là que j’ai testé la
technique du pochoir.
Quand tu découpes, tu n’as qu’une envie,
c’est de bomber pour voir le résultat final.
1
2
Pour le nom, The Dude Company, ça vient du film « The Big Lebowsky » des frères
Coen. Dedans, l’acteur principal se fait appeler « the Dude ». The Dude, c’est le mec qui
ne travaille pas, qui ne pense qu’à fumer des pétards. Donc c’est un peu ironique.
Ça serait marrant, une société où il n’y a que des mecs comme ça.
PREMIER ?
Le premier dans la rue, c’était en mars 2008. C’était Takeshi Kitano parce que je
suis un fan de cinéma et de musique. Donc voilà c’était parti… J’avais trouvé un
moyen d’expression. Mais ce n’était pas évident… Je me suis beaucoup inspiré des
autres au départ. Il faut comprendre ce côté différentes couches en négatif. Il faut se
prendre un peu la tête !
TECHNIQUE ?
Au départ, je choppe la photo. Je travaille les contrastes. Je joue avec mon noir, mon
blanc et je garde toujours ma couleur de fond dans l’esprit. Et puis après, j’agrandis
ma photo et je découpe. Je ne sais pas dessiner… Donc c’est ça le gros avantage du
pochoir. On ne sait pas dessiner mais on arrive quand même à faire des choses.
Après, c’est la découpe. J’utilise du carton d’épaisseur 0.8 mm. C’est assez rigide
et cela se découpe bien au scalpel. C’est le support que je préfère. Les pochoirs
en grandeur nature, ça représente une vingtaine d’heures de découpe. Quand tu
découpes, tu n’as qu’une envie, c’est de bomber pour voir le résultat final. La plupart
de mes pochoirs sont des trois couches. Quand je peins, j’utilise toujours la couleur de
fond du mur qui reste partout. L’image est vraiment bien intégrée dans le mur.
En général, ça prend 10 minutes, ça va très vite. Le tout, c’est de bien positionner les
couches les unes au-dessus des autres.
63
62
EVOLUTION ?
La qualité de la photo que tu agrandis, c’est
ça qui fait la qualité du truc. Puis, après,
c’est la découpe. Plus la découpe est fine,
plus il y a de détails, plus le pochoir… Il y a
quelque chose. Je pense que je m’améliore
au niveau des découpes. Je les trouve de
plus en plus beaux. Quand je regarde un
peu tout ce que j’ai fait depuis le début, je
pense qu’il y a quelque chose qui s’améliore.
Et puis je commence à avoir une pléiade
de pochoirs qui me permettent de faire des
choses. Mais c’est vrai que la photo de base
est très importante, comme pour l’expression
du regard. Je ne sais pas… On se pose des
questions. Il faut évoluer et il manque un peu
une histoire dans tout ça. Je pense que ça va
venir avec le temps. Je suis un débutant, un
novice. Mais je suis déjà très content de tout
ce qui m’arrive.
POCHOIR FAVORI ?
Mon pochoir que je préfère le plus, c’est Talib Kweli, parce que c’est le plus beau.
Chez les autres, il y en a un que j’adore, c’est Orticanoodles. Le mur qu’il a fait avec
toutes ces bouches. C’est en Italie.
3
POCHOIRISTE FAVORI ?
Je vais dire C215… C’est bluffant quoi ! J’aime bien son état d’esprit. Il fait toujours
sur des murs, les endroits sont toujours super bien choisis. Puis il a une vision, c’est
beau ce qu’il fait, superbe, bien intégré aux murs, à la rue, c’est du beau boulot.
GRAFFS & TAGS ?
Les tags qui ne ressemblent à rien, je trouve ça nul. Après, il y a des graffeurs qui
font de superbes choses. Je respecte, je trouve ça super. Que ce soit fait n’importe
où, c’est excellent. Je suis pour. Mais en même temps, je pense que ce qui est
dommage pour le pochoir, c’est l’amalgame avec le tag et le graff qui sont perçus de
manière plus agressive, plus provocante.
POLICE ?
Moi, je fais cela le jour parce que la nuit, d’abord on ne voit rien et puis la police, la
nuit, c’est pas les mêmes personnes. Elles sont moins compréhensives. Je pense
que la journée, même si je me fais arrêter, on peut négocier. La journée, ils ont la
circulation, ils ont moins de temps. Ça fait moins : « Je me cache, je fais un truc
illégal ». On peut s’expliquer. Maintenant, si le mec ne veut rien savoir, ben, c’est
tout... Tu finis au commissariat et tu as une amende. C’est le jeu aussi, il y a une loi.
PLACE DANS TA VIE ?
Une partie de mes temps libres, une place de
plus en plus importante. Je n’ai pas beaucoup
de temps car ce n’est pas mon métier mais
j’ai envie de continuer, d’évoluer. Donc une
place de plus en plus importante même si
c’est un peu difficile. J’aimerais bien avoir plus
de temps pour en faire, ça c’est vrai.
MESSAGE ?
Je ne sais pas s’il y a un message. Oui, un
message de gens engagés, un engagement.
Je suis pour le fait de défendre des idées,
défendre certaines choses. De vivre, de ne
pas rester là les bras croisés. C’est beaucoup
de gens comme ça que j’ai mis en pochoir.
Ce sont des gens qui ne renient pas
leurs origines ethniques. Des gens de ma
génération aussi. C’est un peu pour leur
témoigner que j’aime bien ce qu’ils sont.
Je trouve qu’il faut s’engager dans la vie.
Ça peut être très basique. Alors, quand
je fais des pochoirs, je fais quelque chose
aussi. Donc finalement, oui, il y a un fond
certainement politique. Le but c’est de
rencontrer des gens, aussi. Donc faut y aller,
il faut bouger. Je pense que c’est très
important de bouger.
REACTION ?
J’espère un sourire. Simplement si je fais
sourire les gens... Qu’ils commentent :
« Génial sur ma route pour aller au boulot
tôt ce matin... ». Voilà c’est un peu de
bonheur, c’est déjà pas mal. Et aussi un peu
de complicité, ce que les gens ne vivent
pas avec les autres types de graffitis. Les
pochoirs, c’est de l’image . Ça touche plus
facilement les gens. Il y a des graffitis qui
sont beaux, mais c’est vrai qu’on va être
moins réceptif. Ici, c’est quasi de la photo.
Ce sont des photos posées sur les murs.
Le fait que ça tienne plus et que ça embellit
les murs, c’est important aussi. On me le dit
souvent : « Merci pour ça ». Moi ça me fait
plaisir. Que ça plaise, oui, c’est le but.
Les gens, ils s’arrêtent, ils regardent.
ENDROIT ?
C’est toujours un peu à l’aventure mais j’essaie de respecter les propriétés.
De ne pas faire ça n’importe où. J’essaie de ne pas dégrader. C’est rare que je le
fasse sur un mur privé mais je le fais souvent sur les maisons abandonnées.
Oui, ça m’est déjà arrivé de faire ça sur des maisons à l’abandon. Les gens
s’arrêtent, ils disent : « On habite le quartier, au moins ça change ».
NETTOYAGE ?
Je ne vois pas l’intérêt d’aller repeindre un mur, une maison à l’abandon, ça dérange
personne. C’est la politique de la ville, je ne suis pas d’accord avec eux. Mais bon,
qu’ils repeignent ! Comme ça, je fais des nouveaux derrière. Ça tourne. C’est le but
aussi. C’est mieux que ça tourne !
BRUXELLES ?
Bruxelles, je ne connaissais absolument pas. Je me suis baladé dans le centre
et puis, après, j’ai regardé un peu les endroits qui me plaisaient. Donc c’est
complétement au hasard. Je pensais voir plus de pochoirs. Mais bon, il y a
certainement des endroits où il y en a beaucoup mais que je ne connais pas du tout.
Je ne peux donc pas vraiment dire. Il me semble qu’il y a beaucoup des collages
mais pas beaucoup de pochoirs. Et puis je trouve qu’il y a fort peu de pochoirs qui
soient en couleur. Il y a beaucoup de monochromes. 2
THE DUDE COMPANY
1
3
4
1 Rue du Boulet
2 Rue du Chien Marin
3 Rue des Sables
4 Rue des Pierres
5 Rue de l’Ecuyer
6 Rue Fossé-aux-Loups
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THE DUDE COMPANY
5
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Scène de rue
Rue de la Croix
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AU VOL !
Rue du Boulet
Il y a quelques semaines, The Dude Company nous faisait l’honneur d’une nouvelle
visite à Bruxelles. Parmi les pochoirs réalisés par le collectif figurait un impressionnant
soubassophoniste (probablement Damon Bryson) du groupe The Legendary Roots
Crew, tout en force et en souffle.
Le pochoir a été appliqué sur un grand panneau en tôle rouillée au coin de la rue des
Chartreux et de la rue du Boulet. Si vous l’avez raté, c’est râpé…
Quelqu’un de plutôt costaud et gonflé a démonté le panneau (pourtant riveté balaise
à un support grillagé) il y a quelques jours et l’a emporté.
Nous avons demandé au boss de la Dude Company ce qu’il pensait de ce rapt :
« L’art de rue doit rester dans la rue. En même temps, on ne peut empêcher ce
genre de démarche qui, il faut le dire, est plutôt culottée ! Je trouve cette réaction
décevante et serais plus heureux d’être contacté pour réaliser une oeuvre chez
quelqu’un plutôt qu’on déshabille la ville. J’espère aussi que cela ne sera pas vendu
à mon insu, ce qui serait encore plus navrant ».
Evidence : plus les pochoiristes deviennent reconnus et estimés pour leur œuvre
publique, plus celle-ci prend de la valeur mercantile et est donc convoitée par des
collectionneurs privés. Que certains de ces pochoirs se distinguent par leur beauté
et / ou leur technicité exceptionnelle n’ajoute rien de bon à notre affaire.
Fondamentalement, la question est donc de savoir si l’art de la rue, donné librement,
peut être pris tout aussi librement ? L’appartenance d’un pochoir au pluriel
(nous tous, préférable à personne) peut-elle être accaparée au profit d’un singulier
(lui seul) ? Les avis restent partagés, au lu des forums, mais une certaine morale
- nourrie du respect de la générosité et du talent - devrait normalement prévaloir
contre l’envie de recel. Et que le pochoir volé, celui du musicien de The Roots ou un
autre, soit ensuite vendu ou non n’est que l’ajout secondaire et malheureusement
habituel de l’injure à l’insulte… Une fois la morale sociale bafouée, tout est en effet
permis.
Ironiquement, le texte jaillissant du sousaphone (Resist Much, Obey Little) était peutêtre une invitation à l’acte illégal au carré ! A la rébellion du je-ne-peux-pas-pocher
s’en est ensuit - en toute logique tordue - la rébellion du je-ne-peux-pas-piquer.
Seule solution, alors, pour en finir avec ce vandalisme du vandalisme : que The Dude
Company arrête d’avoir tant de talent et que les supports urbains immobiles cessent
d’être mobiles. Et tout rentrera enfin dans l’ordre.
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DAMIEN-PAUL GAL
Rue de la Gouttière
NOM ?
Damien-Paul Gal
NAISSANCE ?
1976
ORIGINE ?
France
J’essaie de ne pas déborder et de rester
dans une certaine cohérence
DECLENCHEUR ?
J’ai beaucoup dessiné étant petit. J’ai été attiré par le pochoir par rapport à des
formes que je voulais dupliquer. En même temps, le côté embrigadement, révolté
sans être négatif à la base du pochoir, pouvoir montrer des formes, des signatures,
pouvoir émettre des messages sur des supports amovibles grâce aux pochoirs,
ça me motivait très fort. Pouvoir ainsi peindre sur des supports qui ne sont pas
forcément négatifs pour les bâtiments, comme des carrelages ou des céramiques,
m’intéressait.
PREMIER ?
Mon premier pochoir, c’est mon visage. Je l’utilisais pour signer des sortes de
peintures en dripping avec des dates et des chiffres au pochoir. Je voulais trouver
une signature intéressante pour mes tableaux et mes affiches. J’ai commencé en rue
en 2000 quand j’étais à Rennes. Placarder mon image dans les rues, c’était un peu
égocentrique de ma part !
TECHNIQUE ?
Du simple papier au format A4. C’était très simple pour moi, avec les moyens du
bord. Je travaillais sur logiciel, je tirais à l’imprimante et puis je découpais au cutter.
C’était vraiment très grossier au début. J’aime combiner mes pochoirs avec le
carrelage comme support. J’aime sa forme carrée, anguleuse et en même temps son
côté intrusif sur les façades, comme une pièce de puzzle.
EVOLUTION ?
J’ai évolué dans les outils que j’utilise, comme les cutters. Je découpe maintenant de
façon beaucoup plus fine mais je garde toujours le format A4 en papier avec parfois
du gabarit A3. Je cherche à vraiment retravailler l’image à travers un procédé précis.
La technologie nous permet de montrer différents axes, différentes perspectives, et
d’arriver plus vite au bon résultat. Ceci dit, après, il y a aussi la sensibilité, le fait de
découper, de ressentir la matière... Et puis, je reste sur des pochoirs très simples,
pas avec une multitude de couches.
PLACE DANS TA VIE ?
Je continue mon travail de pochoiriste. Dernièrement, j’ai fait le pochoir de Jimmy
Hendricks. Je reprends beaucoup d’icônes comme Staline ou Mao. Cependant,
à partir d’un certain niveau de maturité, on arrive à travailler de façon segmentée.
J’aime avoir une certaine hiérarchie par rapport à mes autres formes d’expression et
consacrer du temps à bien ranger mes pochoirs.
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MESSAGE ?
Mon idée en mettant mon visage en rue,
c’était d’induire un effet un peu inconscient
dans la tête des gens. Qu’ils se disent :
« Je vous connais ». Le travail des pochoiristes,
c’est de reprendre une image, provoquer une
sur-consommation, une sur-impression, et
de saturer l’environnement en images et en
informations. Tout ça m’intéresse parce que j’ai
fait des études sur la psychologie. Me montrer
sur les murs était pour moi une façon d’essayer
de voir comment tout ça fonctionne en vrai.
REACTION ?
Les graffitis, et donc les pochoirs, ont un
effet positif car ils permettent aux gens de
s’intéresser à une autre forme d’art, une
autre forme graphique, qu’ils ne connaissent
pas. Ils peuvent ainsi, petit à petit, s’ouvrir
à un autre univers avec d’autres artistes.
Par rapport à mon travail, les réactions sont
parfois très surprenantes. Les gens qui ne
sont pas habitués peuvent carrément ne pas
comprendre mon message, même à travers
un simple pochoir.
POCHOIR FAVORI ?
Mon pochoir préféré, c’est ma signature.
Je mets ma fragmentation de visage comme
une marque, une griffe, comme un regard
avec un petit côté intrusif mais en étant
discret. Je la pose quand je signe un élément
photographique ou une performance.
Nous sommes dans la publicité, dans le logo.
Mon pochoir favori, c’est Astroboy. Chez les
autres, j’aime le smiley policier de Banksy
et le « Je suis une femme et j’assume » de
Miss Tic. Ou encore l’auto-portrait aux oreilles
de Mickey de Jef Aérosol.
POCHOIRISTE FAVORI ?
J’aime bien Banksy, notamment parce qu’il
parvient à placer ses pochoirs dans des
endroits difficiles d’accès. Miss Tic que j’ai
rencontrée avec son frère. Et puis Jef Aérosol
qui est très sympathique et parle avec tout le
monde. Chacun a sa technique, chacun a ses
méthodes, ses messages.
GRAFFS & TAGS ?
Tagger sur un mur, non merci, ça jamais !
Le tag n’est qu’une signature, c’est une action
vandale et gratuit. Pour moi, le vrai graffeur a
vraiment une idée. Il a une image et il organise
son travail par rapport à la caligraphie, par
rapport au côté graphique et donc il ne le
fait pas n’importe où. Moi-même, parfois,
quand j’applique une céramique, je me dis
que je viole le propriétaire... Donc, quand je le
fais, j’essaie d’obtenir quelque chose de très
graphique, d’harmonieux. Et même si je me
l’approprie, j’essaie de ne pas déborder et de
rester dans une certaine cohérence. Il y a un
respect, pour moi, qui est primordial.
FACES 5
1
POLICE ?
Aucun souci parce que je m’y connais
en sécurité. Je connais les horaires et les
habitudes de la brigade anti-tags... Ce
sont souvent d’anciens graffeurs qui sont
recrutés par la police pour pouvoir analyser
les signatures. Et puis j’ai un bon réseau de
contacts, y compris dans le monde politique,
que j’invite à mes expositions.
ENDROIT ?
Je me balade beaucoup dans les rues. Je vais
repérer des lignes, l’architecture... Je vais me
faire une sorte de plan dans ma tête, avec une
stratégie.
1 Rue du Jardin des Olives
2 Rue Lincoln
3 Rue des Ursulines
4 Quai du Chantier
5 Rue d’Argent
6 Rue du Beau Site
2
3
4
5
NETTOYAGE ?
C’est à la fois une perte pour certaines choses
et un renouveau pour d’autres choses.
Le nettoyage fait partie intégrante du jeu.
BRUXELLES ?
J’aime bien Bruxelles mais l’activité graffiti et
pochoir y est moyenne par rapport à des villes
comme Rennes, Toulouse, Prague, Londres
ou encore Berlin. C’est probablement dû à un
manque d’émulation et d’interaction entre les
gens. Donc je sens que Bruxelles n’est pas
la ville où je vais encore beaucoup évoluer.
J’aimerais plus voyager et aller voir des villesphares dans le domaine du graffiti.
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HAUTS LES MAINS !
Avenue Albert
Les scientifiques adorent prendre des mesures et faire des corrélations.
A force de comparer n’importe quoi avec n’importe quoi, ils arrivent toujours à
trouver quelque chose. C’est ainsi qu’est née l’anthropométrie criminelle que l’on doit
à des éminents savants comme Johann Kaspar Lavater, William Sheldon et Cesare
Lombroso.
Comment ça marche ? Simple… On prend des gentils et des méchants, on mesure
plein de paramètres comme la longueur de l’oreille droite et celle du pied gauche
(vrai !)… Puis on compare les deux groupes… Et, bing, forcément, ça ne rate pas,
on trouve que les gentils et les méchants ont au moins un rapport ou un coefficient
différent (genre longueur du nez multipliée par la surface du front divisée par la
racine carrée du nombre de poils au menton) et donc discriminant. C’est amusant.
Déjà un peu moins rigolo lorsqu’on inverse le sens de la déduction et, passant de la
population à l’individu, on suspecte quelqu’un d’être un criminel simplement sur base
d’un indice anatomique parfaitement crétin. C’est le fameux délit de sale gueule cher
à Eugène Vidocq…
Ceci étant dit, il y a un petit indice anthropométrique sympa que j’aime bien, le
« digit ratio », c’est-à-dire le rapport entre la longueur de l’index (D2) et celle de
l’annuaire (D4). Pour des raisons dont je vous épargne l’explication (ça tourne autour
de l’exposition intra-utérine du fœtus aux hormones testostérone et œstrogène), le
rapport D2:D4 est plus petit chez l’homme que chez la femme. Certains savants
(encore eux !) pensent y voir un signe de divergence darwinienne, le fait d’avoir un
long annuaire par rapport à l’index ayant peut-être permis aux hommes (surtout les
hommes-mâles) d’être plus habiles à lancer des cailloux contre les mammouths que
les femmes.
Nous avons donc fait le calcul D2:D4 de la main pochée « à l’ancienne » sur la façade
d’une maison située à l’angle de la rue Meyerbeer et de l’avenue Albert. La moyenne
du « digit ratio » calculé sur les deux pochoirs identifiés sur ces murs est de 0.961,
c’est-à-dire pile-poil le résultat attendu pour un homme !
Mais la prudence est de mise dans notre conclusion… Car force est de reconnaître
que nous ne savons rien de la physionomie des filles pochoiristes. Il se pourrait
bien que celles-ci soient prédisposées aux activités pochoiresques illégales (et, en
protocolaire, à mieux tenir une bombe aérosol dans leurs mains) suite à une hypermasculinisation fœtale. Les filles pochoiristes pourraient donc présenter un ratio
D2:D4 peu élevé, comme les mecs ! Seule solution pour y voir plus clair : Que les
filles pochoiristes s’avancent et lèvent la main…
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NOM ?
Jean-Luc Tricot
NAISSANCE ?
1976
1 à 4 Rue Claessens
(Ecole de la Batellerie, festival O[n]ZE du Bulex)
«
ORIGINE ?
Belgique
DECLENCHEUR ?
J’ai toujours aimé décomposer la couleur, décomposer dans les trois couleurs
primaires. C’est parti comme ça. Alors quand je me suis dit que je voulais peindre
avec des couches de couleurs, j’ai essayé différentes méthodes et, peu à peu, je me
suis intéressé à la technique du pochoir. J’aime l’idée que l’on puisse reproduire une
image à l’infini, un peu comme un tirage photographique mais avec un côté aléatoire
qui détourne le résultat. J’aime que, quand on crée un pochoir, on ne sache pas
encore ce que sera le résultat final. Jusqu’ici, j’ai essentiellement travaillé sur des
portraits et des thèmes religieux. La religion m’attire comme thème.
Faire un pochoir de Jésus, c’est déjà une prise de risque.
1
2
PREMIER ?
J’ai tellement expérimenté que j’ai du mal à m’en souvenir. Je crois que le premier,
c’était deux symboles, le ciel et l’enfer... J’ai pris des bouts de carton et j’ai bêtement
dessiné et découpé pour voir ce que cela pouvait donner.
TECHNIQUE ?
Au début, c’était vraiment laborieux parce que je prenais du carton super-dur.
Je me suis dit que je n’allais pas m’amuser à découper du carton. J’ai essayé plein
de trucs.
EVOLUTION ?
Je voulais des couleurs les plus vives possible ... C’est comme ça que je suis arrivé
au plastique. Alors maintenant, je travaille avec des plastiques de couleurs, pour les
gabarits et comme support.
PLACE DANS TA VIE ?
C’est vraiment très fluctuant. Pendant plusieurs semaines, je ne vais rien faire.
Mais, par contre, une fois que je me lance, je n’arrête pas ! C’est plutôt la nuit que je
travaille, quand tout le monde dort.
POCHOIR FAVORI ?
Le premier Christ que j’ai fait et qui est dans ma chambre. J’aime aussi une
composition de douze portraits fait en deux exemplaires en 2006. Des portraits
de gens qui n’ont absolument rien à voir ensemble sinon d’être dans un même
magazine. En plus, quand on regarde de loin, on a l’impression de voir une grande
silhouette avec les bras levés.
79
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Scène de rue
POCHOIRISTE FAVORI ?
J’aime beaucoup Shepard Fairey, Obey. C’est un des
rares que je connaisse qui a une réelle technique, qui est
connu et qui a une certaine production. C’est vrai que les
pochoiristes, c’est habituellement plutôt assez caché.
3
GRAFFS & TAGS ?
J’aime nettement moins les autres formes de graffitis. Je
suis très « pochoir » et les graffs m’attirent beaucoup moins.
C’est trop similaire, uniforme. C’est considéré comme
une marque de liberté mais, en fait, c’est exactement le
contraire ! C’est tellement pris dans des standards précis
qu’en fait ce n’est plus une expression de quoi que se soit.
Dans le pochoir, il y a beaucoup plus de diversité.
POLICE ?
Ça ne me concerne vraiment pas puisque je ne suis
jamais à l’extérieur.
ENDROIT ?
Je n’ai jamais eu la démarche d’aller pocher dehors, sur
des murs. Ce n’est pas du tout dans mon tempérament
d’aller à l’extérieur. Je suis plutôt dans une idée de
fresque. D’ailleurs, pour moi, peindre un pochoir qui
représente Jésus sur un mur, comme ça, dehors, me
parait plutôt contradictoire. Je préfère que ma réputation
soit basée sur la qualité artistique de mes travaux plutôt
que sur des actes sulfureux. Par contre, c’est important
pour moi de peindre directement sur le support, sans
« tampon » comme un poster ou un sticker.
NETTOYAGE ?
Ça ne me touche pas du tout, en fait. C’est vrai que pour
les beaux graffitis, c’est quand même dommage mais,
finalement, je m’en fous un peu. En fait, une fois que le
pochoir a été découpé et préparé, le travail de rue ne
prend pas tellement de temps. On prend des risques,
évidemment, mais on peut le refaire. En fait, ça me ferait
plus de mal de voir qu’on déchire un gabarit que le fait
d’effacer un pochoir sur un mur. Sauf, peut-être, s’il y a un
gros travail de composition, bien sûr.
BRUXELLES ?
Il n’y a pas beaucoup de pochoirs à Bruxelles. J’attribue
cela au coté belge, bourgeois et bien pensant. Je ne vois
pas beaucoup d’artistes qui se disent qu’ils sont artistes
et donc qu’ils vont se lancer dans quelque chose de
plus risqué, de plus dangereux. Ils sont trop frileux, il me
semble. Pour moi, l’artiste belge, c’est très sécurisé, en fait.
4
Boulevard Général Jacques
81
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J’AI LA BANANE !
Localisation confidentielle
Depuis 1986, l’artiste allemand Thomas Baumgärtel pochoirise sa célèbre banane
aux quatre coins du monde… Marquant ainsi plus de 4.000 façades de musées, de
galeries et d’autres endroits qu’il estime être artistiquement intéressants.
Pour beaucoup d’allemands au lendemain de la seconde guerre mondiale (surtout
à l’Est) la banane était reconnue comme un symbole de liberté et d’indépendance.
Baumgärtel (né en 1960) en fit le logo non-officiel de la scène d’un nouvel art tout
aussi libre et indépendant. L’œuvre du banana sprayer, initiée très curieusement dans
le quartier belge de Cologne il y a 22 ans, se retrouve maintenant à Paris, Londres,
New York ou encore Moscou… Et bien sûr à Bruxelles !
C’est sur la porte d’une modeste maison située dans le bas de la ville que l’on peut
voir un magnifique exemplaire de la banane. Stencilée en 1994, elle ornait à l’époque
l’entrée d’une petite galerie privée, appelée APP.BXL et créée par Moritz Küng, un
curateur d’origine suisse actuellement responsable du programme d’expositions du
campus d’art deSingel à Anvers.
Comme nous le raconte Moritz lui-même : « I never got to meet the author of this
« brand mark » but I knew the sign from galleries and institutions in Germany and
Switzerland ». C’est en reconnaissance de la qualité du travail artistique de Küng que
Baumgärtel appliqua son « sceau » bananier… Qui persiste encore aujourd’hui dans
un état remarquable grâce à l’attention bienveillante du propriétaire et des locataires
de la maison. En atteste Joke Buts, actuel occupant : « Le propriétaire aime bien la
banane et donc il la soigne bien, (mieux que le bâtiment, même), et va probablement
la laisser ».
Mais ce que les aléas du temps et du vent n’ont pas réussi à détruire, l’artiste
pourrait bien le faire lui-même… Baumgärtel a en effet décidé depuis quelques
années de revisiter le lieu de ses exploits et de « confisquer » certaines bananes
et les faisant EXPLOSER ! Le suspense est à son comble… En réponse à nos
nombreuses questions, le pochoiriste s’est en effet limité à un sympathique mais un
peu inquiétant : « Greetings from Cologne ! Do you know the street of the house ? ».
Alors, Bruxelles gardera-t-elle encore longtemps sa banane ?
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NOM ?
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NAISSANCE ?
1977
1 (photo par wHo ?)
2 Rue Claessens
3 Rue Jean Van Volsem
4 Atelier (photo par wHo ?)
«
ORIGINE ?
Belgique
DECLENCHEUR ?
Je ne sais plus exactement. Je crois que ce sont des graffitis que j’ai dû voir dans
la rue, des peintures le long des voies ferrées. Je ne comprenais pas comment ils
avaient réussi à faire ça, dans quel intérêt... Alors j’ai rencontré des gens qui étaient
dans ce mouvement et puis, voilà, je me suis mis moi-même au pochoir. J’avais
déjà fait un peu de peinture à la bombe avant, quelques lettrages vite faits, mais je
me suis vite rendu compte que le pochoir était le meilleur moyen de faire des trucs
« clean » rapidement. J’aime bien ce côté vite fait bien fait tout en amenant quand
même quelque chose dans la rue !
Pour moi, tout ce qui se fait sur les murs est intéressant.
1
PREMIER ?
Au départ, j’avais l’idée de réutiliser de vieux disques en pochant juste un visage
dessus. Ensuite j’ai eu l’occasion de faire une pochette de disque au pochoir et c’est
ça qui m’a mis dans le bain. J’aimais bien le lien entre le vinyl et le pochoir parce que
le vinyl fait vraiment partie de mon univers. Donc mon premier pochoir à Bruxelles,
c’est la tête du musicien Vinnie Johnson comme logo du label Laid-Back. Ceci dit,
en fait, je faisais surtout des pochoirs sur des disques que j’accrochais ensuite en
hauteur sur des murs.
TECHNIQUE ?
Au début, j’ai testé différents matières. J’avais d’abord récupéré des dos de fardes
de classeurs mais ce n’était vraiment pas très solide, pas rigide du tout. J’ai essayé
le carton mais je ne trouvais pas ça le meilleur truc non plus... Alors, finalement, je
suis passé aux grandes feuilles de plexi. Quand on fait une série de pochoirs avec
un plexi, il suffit de laisser sécher et puis de venir avec un cutter et d’enlever la
peinture pour pouvoir recommencer. Vu le temps passé à faire les découpes, c’est
un investissement, alors c’est bien de pouvoir donner une durée de vie un peu plus
longue aux pochoirs. Franchement, la découpe, ce n’est pas toujours ce qui est le
plus drôle à faire ! Sinon, je suis plutôt scalpel parce qu’on peut arriver à faire des
découpes vraiment hyper-pointues. Le cutter n’est pas très maniable.
PLACE DANS TA VIE ?
Je n’ai jamais vraiment eu la fibre de sortir la nuit pour aller faire des pochoirs.
Je n’ai pas le feu sacré... Mais c’est l’occasion pour moi de tester des trucs et ça
m’a justement redonné l’envie de trouver des endroits où il y a déjà des pochoirs et
d’aller m’y incruster.
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84
MESSAGE ?
Le but, c’est d’essayer d’amener
quelque chose de différent et
d’esthétique aux gens, leur proposer
quelque chose qui soit accessible
et positif, pour les faire juste sourire
ou les étonner. J’essaie d’agir à
ma manière sur le système et le
contexte dans lequel on vit. Peut-être
que ça pourra aider d’autres gens
à réfléchir sur les conditions de vie
dans lesquelles ils sont. C’est une
contribution un peu utopique.
GRAFFS & TAGS ?
Il y a énormement de choses possibles, des fresques peintes à la bombe, des flops
et des throwups qui sont des trucs très spontanés et très expressifs. Il y a des gens
qui peignent des murs, des trains, des maisons .. Des gens qui décident de prendre
la parole et de partager quelque chose. Pour moi, tout ce qui se fait sur les murs
est intéressant. Mais c’est clair qu’il y a des choses qui sont plus destructrices ou
aggressives que d’autres. Le mur d’une banque ou le mur d’un particulier, ce sont
deux choses complètement différentes. Dans le second cas, on crée un sentiment
d’insécurité chez les gens, une sorte de dégoût. En même temps, ce n’est pas parce
qu’il y a un tag sur un mur que le mur va s’effondrer !
2
POLICE ?
J’ai eu des problèmes avec la brigade anti-graffitis mais je crois qu’ils se sont vite
rendu compte qu’il n’y avait rien à tirer de moi et que je n’étais pas le number one
sur la liste des gens à arrêter. J’ai reçu une amende et j’ai introduit une demande de
médiation pénale. Une partie de l’amende a finalement été changée en heures de
service d’intérêt général. J’avais un sac poubelle et je devais ramasser les canettes et
les papiers qui traînaient dans le métro.
REACTION ?
Le pochoir, c’est quelque chose qu’on
amène au mouvement graffiti dans
le sens où ça permet de donner aux
gens une vision un peu différente, de
sortir de cette image de dégradation
qui colle aux tags. Ceci dit, il y a plein
de gens qui ne savent même pas
qu’un tag, c’est une signature et qu’il
y a donc quelque chose à y lire.
POCHOIR FAVORI ?
Parmi mes pochoirs, mes favoris sont
principalement les portraits d’artistes...
Alors si je devais n’en garder qu’un,
ça serait Bob Marley parce que
le reggae occupe une place très
importante dans ma vie. Le reggae
peut être très festif, très dansant
mais aussi parler de souffrance.
Cest un message hyper-conscient,
révolutionnaire. Bob Marley était
vraiment quelqu’un d’assez
exceptionnel, un peu mystique.
POCHOIRISTE FAVORI ?
Je n’aime pas trop émettre de jugement
parce que je n’ai pas vraiment le temps
de comparer et de me renseigner
mais j’aime bien Doctor H pour son
ambiance de portraits d’artistes reggae
et funk.
NETTOYAGE ?
Je trouve ça normal, d’une certaine manière, parce que certaines personnes ne
veulent pas garder ces stigmates sur leurs murs. Le mouvement graffiti n’est
malheureusement pas reconnu alors que c’est tout un patrimoine pictural !
Le nettoyage, c’est la mort du graffiti, fatalement.
BRUXELLES ?
Comparé à d’autres villes, je n’ai pas l’impression de voir des pochoirs partout.
Et puis le pochoir à Bruxelles reste quand même fort marginal par rapport aux autres
formes de street art. Je crois qu’il y a des gens qui testent la technique du pochoir
mais qui ne vont pas beaucoup plus loin.
3
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87
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FACES 6
1
2
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5
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FACES 7
1 Rue des Ursulines
2 Rue du Printemps
3 Chaussée de Boondael
4 Rue des Ursulines
5 Rue des Halles
6 Rue des Brigittines
7 Rue des Ursulines
8 Rue du Printemps
9 Chaussée de Wavre
10 Rue Renier Chalon
3
1
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7
9
10
9
10
1 Rue Ropsy-Chaudron
2 Rue des Drapiers
3 Chaussée de la Hulpe
4 Rue d’Alsace-Lorraine
5 Rue Jean-Baptiste Vannijpen
6 Rue des Tanneurs
7 Rue du Printemps
8 Rue des Brigittines
9 Rue Kerckx
10 Rue du Pays de Liège
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Rue de la Vanne
L’art du graffiti est gratuit mais le contre-art de son buffage est payant.
Les obsédés de l’hygiène urbaine nous le rappelle volontiers, en oubliant de nous
demander d’abord notre avis sur l’utilité et la légitimité de l’opération sanitaire.
Mais, « payant » ça veut dire quoi et combien, au juste ? Grâce à nos algorithmes
ultra-sophistiqués et hyper-secrets, nous avons estimé que le nettoyage des
graffitis à Bruxelles coûte environ 4,6 euros par habitant par an lorsqu’on considère
l’ensemble des commanditaires, soit les autorités publiques, les sociétés de
transports en commun et quelques propriétaires privés…
Cher ? Pas cher ? La dépense bruxelloise apparaît en tout cas un peu supérieure
à celle de Los Angeles (3,4 euros), Chicago (2,7), Las Vegas (2,2), Houston (2,0)
et New York (0,7) pris ici à titre d’exemples. Le coût salarial de nos contre-artistes
explique certainement - mais peut-être seulement en partie - la différence entre
Bruxelles et nos références américaines puisque le poste « personnel » justifie environ
80 % de la note de frais.
Entre les villes américaines, par ailleurs, la fréquence des actes muraux ainsi
que l’assiduité de leur réplique savonneuse et décapante contribuent clairement
aux fluctuations budgétaires. Enfin, la démographie de New York est tellement
extravagante (en densité numérique et en rangement vertical) que le prix du
nettoyage par citadin en devient insignifiant.
Alors, de retour chez nous, comment amoindrir cette douloureuse et intolérable
imputation financière de 4,6 euros par an ? Une solution nous est suggérée par
l’étonnant superposage photographié rue de la Vanne et illustré ci-contre. On y voit
trois préposés à la propreté urbaine, magnifiquement tracés au pochoir multi-couche,
s’attaquer gaillardement à l’effaçage d’un beau flop de Color. Le street art nettoyant
le street art, voilà une perspective en boucle très prometteuse (on reste entre amis)
qui sent bon et peut rapporter gros.
En effet, si la plupart des sociétés bruxelloises spécialisées dans l’anti-graffiti ne
déposent pas leurs comptes annuels à la banque nationale des bilans (il en est
ainsi pour Anti-Graffiti-P+, Graffiti Service, Doctorskin, Sepagraff et Clear Pression),
l’examen des résultats de SOS Graffiti révèle un chiffre d’affaire de 134.000 euros en
2008 avec un bénéfice final de 20.000 euros… Soit un joli petit budget à réinvestir
presto dans des cutters, des cartons et des bombes ! Aurions-nous enfin trouvé le
modèle économique durable du pochoir ?
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MUGA
NOM ?
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NAISSANCE ?
1978
1 Chaussée de Boondael
2 Avenue Legrand
3 Rue des Pierres
«
ORIGINE ?
Belgique
DECLENCHEUR ?
Difficile de répondre à cette question. J’ai probablement dû voir ça dans un
magazine. Je dessine depuis très longtemps et j’utilisais l’aérosol. Le pochoir est
donc arrivé assez naturellement comme technique vers 1995. Il y a un pote à nous
qui est mort à cette époque-là et on voulait lui rendre hommage en mettant un
pochoir. Avec un ami, on cherchait le moyen le plus rapide pour mettre partout son
portrait et ses dates de naissance et de décès... C’est comme ça que c’est arrivé. Et
puis, ça correspondait bien à mon côté rebelle.
J’ai envie de trouver une idée qui va marquer les esprits.
1
PREMIER ?
C’est un poulet sur une broche qui en train de rôtir avec le feu en dessous.
Il avait une tête et le képi d’un flic et il y avait une phrase qui disait : « Le poulet est
bientôt cuit ».
TECHNIQUE ?
Au début, très simple, carton et cutter. La lame du cutter peut être facilement ajustée
et changée en cassant un petit morceau.
EVOLUTION ?
Maintenant, je travaille aussi plus sur PVC qui est plus facile à transporter mais
je ne suis pas convaincu. Plusieurs PVCs se sont fendus et je ne suis pas encore
tout-à-fait habitué à le découper... Si on dérape !
PLACE DANS TA VIE ?
Là, pour l’instant, c’est plutôt le collage qui me prend du temps mais j’aimerais bien
revenir au pochoir. C’est le fait de sortir seul qui me stoppe un peu. C’est toujours
plus motivant de sortir en groupe.
MESSAGE ?
J’aime utiliser des phrases mais, des fois, il n’y a pas besoin de mots car le dessin
suffit. Au début, mes pochoirs avaient des messages plus politiques que maintenant.
Je suis plus tourné vers l’esthétique, quelque chose de marrant et coloré. C’est pour
faire sourire. Un peu ironique. Mais c’est vrai, en fait, que j’ai envie de trouver une
idée qui va marquer les esprits.
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REACTION ?
Je fais des pochoirs pour qu’ils soient
vus. J’ai peu de témoignages ou de
commentaires. J’aimerais plus engager
le dialogue avec d’autres artistes.
2
POCHOIR FAVORI ?
Ce n’est pas facile... Il y a les
autruches, les pots de fleurs, tout ce
qui tombe comme une enclume ou
une tuile. Pour le moment, j’aime bien
mon manneken-pis sur son nuage et
qui dit : « Je pisse sur le tourisme de
masse ».
POCHOIRISTE FAVORI ?
Dernièrement, je suis tombé sur les
pochoirs de Dude. On va dire que je
suis d’ordinaire assez critique et, là,
je les ai trouvés vraiment bien faits.
J’aime son thème, ses personnages,
surtout celui qui joue du trombone.
J’aime bien Orticanoodles aussi.
GRAFFS & TAGS ?
Moi-même, je signe et je fais des
graffitis de temps en temps. Quand
c’est recherché, tout est intéressant.
Je n’ai pas de préférence. Mais je
suis contre le fait de faire des graffitis
abusivement.
POLICE ?
Je reviens justement vers l’application directe du pochoir sur le mur parce que ces
dernières années, je prenais déjà pas mal de risque pour coller. Coller du papier,
c’est vraiment très éphémère. Quand il pleut, quand il y a du vent, ça disparait vite.
Et puis les gens peuvent l’arracher. Si c’est pour prendre des risques, autant le faire
directement sur le mur car il y a des chances pour que cela reste beaucoup plus
longtemps. Ceci dit, je me suis déjà fait pincer par les flics pour un pochoir il y a très
longtemps. Je suis actif souvent le matin, quand il y a du monde, au milieu de la
foule. Ça passe encore plus inaperçu.
2
ENDROIT ?
Je marche beaucoup dans la ville.
J’ai pas mal d’endroits en tête qui
pourraient accueillir un pochoir ou un
collage. Ce que j’adore, en fait, c’est
utiliser le mobilier urbain ou entrer
en interaction avec une oeuvre déjà
existante.
NETTOYAGE ?
Ça permet de faire de la place pour
les suivants. Evidemment, j’ai toujours
envie que ça dure un maximum de
temps... Si le lendemain, c’est déjà
enlevé et que je n’ai pas eu le temps
de prendre une photo, alors là, oui, je
suis un peu faché. Mais c’est comme
ça dans une ville. Il y a beaucoup de
choses qui bougent. Ça crée des
ouvertures pour les autres.
BRUXELLES ?
Je fais fort attention à tout ce qui se
passe et c’est vrai qu’il y a plus d’activité
ces dernières années, au niveau du
pochoir et du collage. Le pochoir revient
à la mode, en tout cas à Bruxelles.
J’ai l’impression que ça explose...
C’est positif parce que, aujourd’hui,
c’est encore peu développé. Je mettrais
ça sur le manque d’échanges entre
artistes. Chacun semble cantonné
dans sa méthode. Et puis c’est trop
aléatoire... Certains font un pochoir puis
repartent, peut-être désillusionnés ?
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OBLITÉRATION
MURICIDE !
Rue de l’Eclipse
Le Gray Ghost, vous connaissez ? Oui… Non ? Mouais…
Bon, je résume : Au doux et radieux pays d’oncle Obama sévissent des hurluberlus
excités qu’on appelle « activistes anti-graffiti ». L’hurluberlu le plus excité parmi ces
hurluberlus excités est sans conteste le Gray Ghost, aka Fred Radtke. Sa noble
(et néanmoins fallacieuse) mission sur terre est de pourfendre les pirates des murs.
Parce que, voyez-vous, braves et bonnes gens, si nous laissons se commettre
un acte de street art aujourd’hui, c’est la promesse d’un trafic de came demain et
l’assurance d’un meurtre le jour d’après ! Alors, armé de son rouleau et de son pot
de peinture grise (forcément) et fort de sa légitimité auto-octroyée, le vigile sillonne et
neutralise les rues des villes américaines de son implacable tolérance zéro.
Question : Avons-nous des disciples du Gray Ghost à Bruxelles ?
Réponse : Le récent recouvrement de plusieurs murs jadis riches en pochoirs
dans notre capitale laisse à penser que, oui, nous avons du souci à nous faire.
Voyez par exemple la rue de l’Eclipse dont un bout est illustré ci-contre…
Ce charmant passage du quartier Saint-Géry était naguère orné de superbes
pochoirs, dont un fier majeur rouge marqué TDC et un gracieux logo du Glitz Club.
La vie murale y est à présent éteinte, anéantie, éradiquée, napalmisée, génocidée
sur plusieurs mètres carrés… Un véritable muricide. Disparues, les traces vitales et
les marques géniales. En lieu et place : le rien tout vide et froid d’alcôves désertes.
Femmes, enfants et vieillards peuvent (certes et peut-être) à nouveau se promener en
toute sécurité sur ce tronçon de trottoir débarrassé de vilaine agression pochiste...
Au prix exorbitant d’un mur propre, net, sinistre, stérile et parfaitement mort.
Mais courage, amis et amies ! Malgré notre désarroi et notre doute, l’espoir de la
vitalité urbaine, enfoui sous les couches de peinture, demeure heureusement intact…
Regardez... Chez les ricains, le fantomatique GG s’est fait récemment pincer par les
flics pour avoir recouvert un graffiti… commissionné ! Pseudo-justicier et vrai vandale
au cachot... Il y a donc bien un juste ordre des choses outre-atlantique, que nous
souhaitons de tout cœur voir appliqué chez nous aussi. Et vite. Pour que cessent
enfin et pour toujours les crimes contre la muralité vivante.
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SIGNES 5
SIGNES 6
1 Rue du Printemps
2 Rue d’Angleterre
3 Quai du Chantier
4 Rue des Chandeliers
5 Avenue Emile de Béco
6 Rue de la Longue Vie
7 Rue de l’Eclipse
8 Rue du Poinçon
9 Rue De Praetere
1
2
1 Chaussée de la Hulpe
2 Avenue Georges Brugmann
3 Avenue Franklin Roosevelt
4 Chaussée de Saint-Job
5 Rue du Printemps
6 Rue du Faucon
7 Rue Jules Bouillon
8 Rue de la Chauffrette
9 Rue des Brigittines
1
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5
3
4
5
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7
8
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NOM ?
Spencer
NAISSANCE ?
1980
1 Rue du Faucon
2 Rue des Chandeliers
3 Place Maurice Van Meenen
4 Rue Jourdan
«
ORIGINE ?
Belgique
C’est clair que tous les soirs, je me dis que j’irais
bien peindre un ou deux pochoirs.
1
DECLENCHEUR ?
En 2003, j’ai fait un travail sur des street artists bruxellois. Je connaissais le graffiti,
je m’intéressais déjà à la peinture urbaine mais je n’avais jamais vu des gens
fabriquer des pochoirs. Ils allaient les peindre dans la rue, la nuit. J’ai eu envie de faire
moi-même des pochoirs. Au départ, je m’appelais VHS parce que j’étais un grand
défenseur de la cassette VHS. C’est un vieux moyen de véhiculer des images, une
cause perdue… Je savais bien que VHS était en train de mourir. Et puis, pendant un
temps, je n’ai plus signé mes pochoirs car je trouvais que je n’avais pas besoin de
nom. Mettre un nom à tout prix n’était pas le but. Ensuite, comme le pochoir que je
faisais le plus était Eraserhead de David Lynch et que le personnage central s’appelle
Henry Spencer, je me suis dit : « Voilà, Spencer ». Je m’identifiais aussi un peu à lui.
Mais je ne signe pas tout le temps. Je ne veux pas que cela soit obsessionnel.
PREMIER ?
Pour mon premier pochoir, j’ai fait un screen shot d’un jeu vidéo qui s’appelle
Phantasy Zone. On a un petit vaisseau spatial et on doit tirer sur des ennemis.
J’ai pris un des ennemis, une espèce d’OVNI avec des petites ailes et des dents.
TECHNIQUE ?
Le fait de découper le pochoir, c’est facile et tout le monde peut le faire. Ce que je
trouve important dans le pochoir, c’est les idées ou alors la façon de découper qui
peut être bien particulière. Au début, ça fait vraiment mal aux doigts. Il faut réfléchir
à ce qu’on peut couper et ne pas couper. Avec les ponts, on a un peu de mal…
Moi, je passais les endroits où je devais laisser des ponts au fluo pour être sûr que
mon cutter ne franchisse pas la ligne.
EVOLUTION ?
J’ai commencé à me sentir à l’aise avec la technique du pochoir quand j’ai troqué
le carton pour le plexiglas début 2006 et quand je ne découpais plus avec un cutter
mais avec un scalpel. Je viens d’acheter une planche à découper et c’est encore
mieux pour les détails. Maintenant, je peux vraiment faire des détails minuscules.
Pour moi, l’évolution, c’est donc essentiellement des meilleures lames et un meilleur
support pour découper. Pour les sujets, je reste fan de films d’horreur intelligents, où
il y a quelque chose de plus profond derrière. Je suis aussi de plus en plus en train
de faire des animaux. J’aime bien le principe de peupler la ville d’animaux.
0
10
10
1
PLACE DANS TA VIE ?
Je suis toujours dans une période où
je ne sais pas encore vers quoi je vais
me diriger mais c’est sûr que je veux
continuer à faire des pochoirs ! Ça ne
m’a jamais lassé, ni d’en découper,
ni de sortir dans le froid pour aller en
peindre. J’aimerais bien arriver à lisser
tout ça, les idées… Mais tant que je
sais que je suis moi-même en faisant
mes pochoirs, il y a un lien. Ça vient de
moi et je sais pourquoi je l’ai fait. C’est
beau ce que je dis ! Donc tous les
jours, je pense à des idées possibles
et je découpe au moins toutes les
semaines. Chez moi, il y a des cutters
et des bombes de peinture partout.
Et c’est clair que tous les soirs, je me
dis que j’irais bien peindre un ou deux
pochoirs !
MESSAGE ?
Il y a des pochoirs qui sont simplement
contemplatifs et puis effectivement,
de temps en temps, d’autres qui
véhiculent une idée ou un message.
D’un pochoir à l’autre, le but peut
être complètement différent. Mais je
ne sais pas si je veux faire passer des
messages à tout prix. Je n’ai pas de
message d’emblée… Avant tout, ce
sont des choses qui me plaisent à
moi. La liberté, le conditionnement
humain, des choses qu’on nous fait
croire et que je veux dénoncer. Je
préfère dénoncer au sens large et je
ne veux pas dire aux gens : « Moi, j’ai
raison ». Je n’ai pas envie de dire aux
gens ce que, moi, je pense et que c’est
la meilleure idée absolue. Je ne veux
pas faire de l’engagement politique
proprement dit. Mais il ne faut pas être
hypocrite non plus… Si tu mets un
pochoir dans la rue, c’est parce que tu
sais qu’il va être vu. Il faut donc chaque
fois réussir à apporter quelque chose
de nouveau et de pertinent.
REACTION ?
J’ai découpé le premier pochoir d’Adrienne Shelly le jour où j’ai appris qu’elle était
morte, environ deux semaines après son meurtre. Je ne voulais pas que ce soit
juste un hommage parce qu’en fait, j’adore cette actrice-là et, à mon avis, j’aurais
quand même fini par faire un pochoir d’elle à un moment ou un autre. Et puis, une
copine avait vu qu’Adrienne Shelly avait une page Myspace créé par sa meilleure
amie. Elle a montré les photos de mes pochoirs et de mes affiches aux amis et à la
famille d’Adrienne Shelly et ils étaient enchantés. Ils ont trouvé génial que quelqu’un,
quelque part dans le monde, colle son visage. Donc, du coup, ils m’ont demandé de
leur envoyer quelques affiches. C’est clair que je suis content quand je vois qu’un de
mes pochoirs a touché quelqu’un mais je ne le fais pas dans le but de plaire à tout
prix. Je pense que la majorité des gens passent à côté sans regarder.
2
POCHOIR FAVORI ?
Je n’ai pas de préféré, en fait. Techniquement, celui que je préfère, c’est les
squelettes en raison de la découpe. Chez les autres, j’aime bien Sten & Lex
que j’ai rencontrés à Barcelone.
POCHOIRISTE FAVORI ?
J’aime bien Sten & Lex que j’ai rencontrés à Barcelone.
GRAFFS & TAGS ?
Je pense que tous les moyens d’expression alternatifs sont bons. Le tag et le graff,
je trouve donc ça bien. Il n’y a pas d’autorisation, c’est une forme d’art très sauvage.
J’aime bien car on vit dans un monde où on a suffisamment de choses à reprocher
au système établi que pour pouvoir justifier le fait de s’exprimer d’une façon sauvage.
Ceci dit, le tag et le graff, je n’en fais pas. Ce n’est pas la façon que je préfère pour
s’exprimer dans la rue mais je respecte tout à fait.
ENDROIT ?
Plutôt dans le centre de Bruxelles.
3
4
NETTOYAGE ?
Les nettoyages, c’est une nouvelle aube pour de nouveaux pochoirs…
Un beau fond blanc bien lisse, bien uniforme que les autorités mettent à notre
disposition. D’autre part, c’est dommage pour ce qu’il y avait avant. Il y a un
roulement dans la rue.
BRUXELLES ?
Bruxelles, c’est assez mort, quand même ! Mais, j’ai l’impression que ça va de mieux
en mieux. Les gens voyagent de plus en plus avec leurs pochoirs.
SPENCER
3
4
1 Rue des Brigittines
2 Place Fontainas
3 Rue Jourdan
4 Rue des Moineaux
5 Rue du Temple
6 Rue des Minimes
7 Rue des Chandeliers
8 Rue du Chien Marin
3
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SPENCER
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7
TRAGIQUE
DESTIN...
Rue du Faucon
La première fois que j’ai vu ce portrait, c’était sur un poster en papier collé assez haut
sur un mur de l’étroit passage de la rue du Nom de Jésus entre le quai aux Briques
et la rue de Flandres. Nous étions le 1er août 2008. J’ai été immédiatement charmé
par l’émouvante beauté de ce visage, d’une grande douceur un peu triste. J’ignorais
alors que ce portrait appartenait à une morte…
Adrienne (Levine) Shelly fut en effet retrouvée assassinée le 1er novembre 2006
dans son appartement de Manhattan, alors qu’elle venait d’avoir 40 ans.
Actrice, scénariste et réalisatrice, Adrienne comptait quelques beaux mérites
cinématographiques à son actif (The Unbelievable Truth en 1989, Trust en 1990,
Searching for Debra Winger en 2002, et enfin Factotum en 2005).
Son meutrier, Diego Pillco, agé de 19 ans au moment des faits, avoua laconiquement
à la police qu’il était de mauvaise humeur en ce jour de Toussaint. Il déclara avoir
étranglé Adrienne au cours d’une dispute à propos du fait qu’il faisait trop de bruit
en travaillant dans l’appartement situé en-dessous de celui de l’actrice… Puis se
ravisa et reconnu l’avoir tuée alors qu’elle l’avait surpris en flagrant délit de vol dans
son propre appartement. Dans les deux versions, il tenta misérablement de maquiller
le meurtre en suicide par pendaison mais laissa trop d’indices sur la scène du crime
pour berner les enquêteurs.
Adrienne était mariée à Andrew Ostroy et avait une petite fille, Sophie, alors agée de
deux ans. Diego fut condamné à 25 ans de prison ferme. En hommage à Adrienne,
un épisode de la série télévisée Law & Order (« Melting Pot » diffusé le 16 février 2007
sur NBC) s’inspira largement de cette tragédie.
Le pochoir représenté ici se trouve sur un mur bordant un petit terrain-vague de
la rue du Faucon dans les Marolles. L’image est identique à celle du poster déjà
fort endommagé du quartier Sainte-Catherine et est l’œuvre de Spencer, un des
pochoiristes les plus doués de Bruxelles. Merci à toi, Spencer, pour avoir utilisé
ton talent afin de rendre la douce Adrienne immortelle sur nos murs… et dans nos
coeurs !
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9
DOCTOR H
NOM ?
Doctor H
NAISSANCE ?
1980
1 Rue des Brigittines
2 Rue du Faucon
3 Rue Haute
4 Rue Jourdan
5 Rue Watteeu
ORIGINE ?
France
DECLENCHEUR ?
J’ai découvert le pochoir par un ami qui avait lui-même rencontré des gens qui en
faisaient en Espagne. Il m’a montré des photos... Et on a commencé ensemble.
J’ai testé juste comme ça, pour m’amuser, puis j’y ai pris goût. Ça me plaisait de
pouvoir intervenir graphiquement sans savoir bien dessiner moi-même, de trouver un
visuel qui me plaisait et de pouvoir le reproduire. Poser son truc à la bombe dans la
rue, repasser devant ensuite et avoir une trace de cet acte-là, ça m’a vraiment plu.
Pour moi, c’est important de pouvoir répondre
graphiquement, de pouvoir communiquer.
1
PREMIER ?
C’est une photo que j’ai prise d’un magazine, celle d’un petit garçon contre une
grille. A l’époque, j’étais à fond dans la musique afro-américaine et reggae, dans la
culture antillaise, et l’esthétique des photos me plaisait bien. J’avais découpé plein de
petits carreaux pour faire la grille. Le pochoir était en une couche.
TECHNIQUE ?
Au début, je découpais sur du carton. Je n’avais pas d’imprimante, pas de scanner...
Je n’avais même pas de vrai cutter. Quand je faisais des pochoirs en plusieurs
couches, il fallait que les différentes parties soient bien jointes... En rue, c’était
souvent un peu acrobatique !
EVOLUTION ?
Maintenant, je découpe d’une autre façon. Une couche avec les tons clairs, une
couche avec mes tons foncés. Je suis passé progressivement des cartons au
PVC et j’ai une planche à découpe. Quand je fais mes pochoirs, je fais de petites
interventions à la bombe à main levée. C’est une technique différente mais qui
correspond un peu à ma frustration du manque de spontanéité du pochoir par
rapport au graffiti. Tu sors avec un pochoir que tu as préparé à l’avance mais, parfois,
ça ne colle pas du tout avec l’endroit ou la composition. Tu es coincé avec ton
pochoir ! J’aimerais continuer à essayer d’autres façons de pratiquer.
PLACE DANS TA VIE ?
Avant, je passais mes après-midis avec de la musique à découper mes pochoirs
mais, maintenant, je n’ai plus autant de temps. Je n’ai plus trop envie de faire des
reggae men non plus. Je voudrais faire des pochoirs qui collent plus à l’espace dans
lesquels ils sont peints dans la rue. J’aimerais faire des pochoirs qui ont un sens par
rapport à ces endroits. Donc, de toute façon, je veux garder une action dans la rue.
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11
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1
2
MESSAGE ?
La plupart du temps, je n’ai pas
de message. Parfois, je veux
juste évoquer quelque chose
sans être trop explicite, comme
par exemple les mouvements
de lutte sociale, comme quand
je fais le portrait de Bobby Seale
des Black Panthers. Mais je n’ai
pas envie de faire du pochoir
politique.
REACTION ?
Ça me plait de voir que les gens
ont apprécié, que le voisinage
est content. J’aime bien quand
je me suis approprié un bout
d’espace public et que c’est
reconnu.
GRAFFS & TAGS ?
Je n’ai pas de jugement. J’aime bien l’action, la démarche en général, les réactions
que cela provoque... Il y a autant de raisons de faire des tags, des graffs ou des
pochoirs qu’il y a de genres. Pour moi, c’est important de pouvoir répondre
graphiquement, de pouvoir communiquer. On ne peut jamais répondre à la publicité
ou l’architecture dans la ville.
POLICE ?
Je pense qu’il y a moins de chance d’avoir des problèmes avec la police en faisant
des pochoirs ou des collages d’affiches en plein jour, de façon décontractée. J’ai eu
un contact, une fois... On a raconté qu’on croyait que c’était autorisé ! D’ailleurs le
pochoir en « fish eye » de la rue des Brigittines, on l’a fait en plein jour et les flics sont
passés à côté, sans nous interpeller.
3
POCHOIR FAVORI ?
Ce sont les pochoirs tirés de
mes propres photos que je
préfère. Comme les portraits
en « fish eye ». Ils sont plus
personnels, surtout quand les
gens que j’ai rencontrés et
photographiés étaient sympas.
POCHOIRISTE FAVORI ?
A Bruxelles, j’aime bien Spencer.
C’est un mec hyperactif et
j’aime bien l’univers qu’il
transporte. Ailleurs, je suis un
fan de M-City qui peint des villes
avec des découpes vraiment
basiques qu’il combine à l’infini.
J’aime aussi Banksy qui fait des
pochoirs hyper-basiques. Il n’a
pas besoin de faire des pochoirs
en quinze couches parce que
c’est ce qu’il représente - et là
où il peint - qui fait l’intérêt de
ses pochoirs.
ENDROIT ?
C’est intéressant de trouver des lieux comme dans les Marolles en allant voir les gens
et expliquer ce qu’on veut faire. Les gamins qui viennent voir, les gens qui apprécient.
Je fais aussi attention à choisir des murs de gares ou de bâtiments publics... Je n’ai
pas envie d’aller mettre un pochoir sur une belle pierre bleue, ça ne m’intéresse pas.
NETTOYAGE ?
Ce sont de belles opérations financières ! Un peu comme le business de la
surveillance vidéo... Les nettoyages de graffitis, ça permet à des entreprises de
nettoyage de répondre à des appels d’offres, ça permet les pots de vin... C’est triste,
aussi, mais de toute façon, les graffitis sont des oeuvres éphémères. Et puis, en
même temps, c’est parfois rigolo quand ils n’arrivent par à refaire la même teinte du
mur. C’est constructiviste à chaque fois.
4
BRUXELLES ?
Bruxelles n’a pas encore cette espèce de récupération « fashion » comme à Paris ou
Londres. Je ne connais pas beaucoup d’autres pochoiristes mais ce qu’on retrouve
dans la ville est très diversifié. Il y a des petits pochoirs, des textes, des pochoirs
à plusieurs couches, plein de trucs. Il y a beaucoup de petits pochoirs et c’est
normal... Facile à transporter, vité collé sur le mur, vite peint et le pochoir est quand
même là. D’ailleurs les pochoirs monochromes me plaisent de plus en plus. C’est
très esthétique. Et puis, pour en revenir à la ville, il y a un esprit bruxellois que j’aime
beaucoup !
5
DOCTOR H
3
1 Rue des Brigittines
2 Rue des Brigittines
3 Mont des Arts
4 Rue du Faucon
5 Rue du Faucon
6 Rue des Minimes
7 Rue du Temple
8 Rue du Faucon
9 Rue des Minimes
10 Rue Van Helmont
11 Rue des Chandeliers
12 Rue des Chandeliers
4
3
2
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9
CECI N’EST PAS
UN BANKSY
Comme le disait si justement notre défunt ami Charles Caleb Colton (1780 - 1832) :
« L’imitation est la plus sincère forme de flatterie ». L’homme, grand collectionneur
d’art (l’histoire ne dit pas s’il possédait des pochoirs) un peu margoulin sur les bords
y aurait certainement été de sa petite citation s’il s’était promené dans Bruxelles
en notre époque et avait noté la présence sur les murs de la ville de pochoirs fort
inspirés de Banksy. Les rats pochés rue de la Cigale et rue du Concours sont en
effet des copies - un peu approximatives mais quand même - d’oeuvres du Maître
bristolien (1974 ou 1975 - heureusement pas encore mort).
1 Rue du Concours
2 Rue de la Cigale
Belle reconnaissance d’un pochoiriste par un autre pochoiriste... Mais qui pose au
passage l’intéressante question du droit d’auteur quand il s’agit d’art urbain illégal et
anonyme... Banksy, qui cultive l’invisibilité comme d’autres les salades et les patates,
pourrait-il en effet revendiquer des dommages et intérêts à son flatteur ?
1
2
Comme le rappelle un ami avocat spécialisé dans ce genre de situations : « En vertu
de la loi du 30 juin 1994, seul l’auteur d’une oeuvre littéraire ou artistique a le droit
de la reproduire ou d’en autoriser la reproduction ». Et de compléter son avis avec la
mise en garde suivante : « Dans l’hypothèse où le pochoiriste reproduit une oeuvre
sur laquelle il ne détient pas les droits, la reproduction illicite pourrait constituer une
atteinte au droit patrimonial de l’auteur initial mais également une atteinte à son droit
moral dans la mesure où la reproduction constituera certainement une déformation
de l’oeuvre originale ».
Dans le cas de Banksy, nous savons que le propos picturesque est - délivré dans
un emballage souvent humoristique borderline poétique - franchement politique et
polémique (anti-capitaliste, anti-militariste). Comme nous ne savons pas si le flatteur
est animé du même sens moraloïde, il y a bien danger de déformation. Ceci étant
dit, contrairement à de vils marchands qui commercialisent sans vergogne des
reproductions non autorisées de pochoirs de Banksy, la confraternité et surtout
l’absence de lucre apparent dans le chef de notre flatteur devraient d’autant adoucir
la pénalité si sentence devait être appliquée.
Et tant que nous y sommes à flirter avec la justice, pourquoi ne pas auto-dénoncer
le titre de ce billet qui rappelle sans ambiguité aucune la célèbre phrase peinte par
un autre Maître, belge cette fois, René Magritte (1898 - 1967), dans le tableau
« La Trahison des Images », en l’occurrence : « Ceci n’est pas une pipe » ?
Il nous est d’avis que si Magritte et Banksy s’étaient rencontrés, ils se seraient bien
plus, tant leurs rapports respectifs avec la réalité et ses représentations offrent des
similitudes pour le moins surréalistes. Au fait, savez-vous d’ailleurs que Magritte
s’est essayé au pochoir ? D’après le génial pionnier du pochoir bruxellois qu’est
Metalic Avau (1945 - toujours alive and kicking), on en distingue l’évidence dans
un tableau intitulé « Le Barbare » datant de 1927 ou 1928. Le tableau représentait
Fantomas poché à l’encre de chine sur un mur de briques. L’oeuvre de Magritte
a malheureusement été détruite lors d’un bombardement sur Londres pendant la
guerre de 40... Comme quoi, les ponts entre Belgique et Angleterre sont redondants
dans l’histoire fascinante des pochoirs.
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R.U.R
NOM ?
R.U.R
NAISSANCE ?
1980
1 Rue Africaine
2 Rue des Cygnes
3 Rue du Faucon
4 Rue de l’Eventail
ORIGINE ?
Belgique
DECLENCHEUR ?
C’est par mon ami Spencer. J’ai directement apprécié l’idée de pouvoir reproduire
un même motif quasiment à volonté. Cela correspondait parfaitement à un esprit
industriel. Ça m’a parlé directement.
«
PREMIER ?
Une tête de robot dessinée à la main, un peu approximativement. Ce premier résultat
n’était pas très concluant et il n’y a pas eu beaucoup d’exemplaires !
L’indifférence serait le pire !
1
TECHNIQUE ?
Au début, les détails n’étaient pas très fins et les premières découpes furent difficiles.
EVOLUTION ?
Je suis passé progressivement à des pochoirs aux détails plus fins et, ensuite,
à des pochoirs multi-couches. Jusqu’à quatre couleurs.
PLACE DANS TA VIE ?
J’y pense très souvent. Je pense à de nouvelles idées et à comment les faire.
Le pochoir et le street art sont définitivement dans mon mode de vie et mes
habitudes. Je pense que je ferai des pochoirs toute ma vie !
MESSAGE ?
Mon thème principal est celui du robot. Le nom R.U.R vient d’ailleurs de « Rossum’s
Universal Robots », une pièce de théâtre écrite en 1920 par l’auteur tchèque Karel
Capek. C’est lui qui créa avec son frère Josef le mot « Robot » à partir de « Robota »
qui signifie corvée ou servage. L’histoire raconte des robots qui sont exploités sur une
île. Ils se rebellent et exterminent les humains. Il s’agit d’une métaphore de la classe
ouvrière exploitée par le capitalisme dans la société industrielle. Donc le message de
mes pochoirs est celui de l’humain déshumanisé et réduit à un élément mécanique
dans un système de production – consommation. J’ai aussi développé des
thèmes satellites comme celui du totalitarisme, du psychédélisme et de la musique
électronique. Tous sont chers au mouvement industriel.
2
3
RÉACTION ?
En ré-appropriant l’espace urbain et
en offrant une autre imagerie que celle
communément affichée par la publicité,
j’espère déclencher une réaction de
sympathie ou de rejet. L’indifférence serait
le pire ! Si mes pochoirs permettent de
stimuler les informations visuelles de celui
qui les voit, alors c’est super... Et tant
mieux si celui-ci s’interroge sur le sens
plus profond de mes dessins.
12
2
12
TEXTES 3
1
2
POCHOIR FAVORI ?
Chez moi, je ne pourrais vraiment pas
décider : Gagarine, Burroughs, le robot
au disque... Chez les autres, je dirais le
dernier « Adrienne Shelley » de Spencer.
POCHOIRISTE FAVORI ?
Banksy, notamment pour la femme de
ménage qui balaie la poussière sous le
tapis.
3
3
GRAFFS & TAGS ?
J’admire la performance et la prise de
risque. Je reconnais la qualité artistique,
surtout quand il y a une patte, un style
bien visible. Plus pour les tags, j’apprécie
la recherche d’une certaine calligraphie.
4
5
NETTOYAGE ?
C’est de la destruction d’art ! C’est
regrettable que certains n’accordent
pas le statut d’art aux graffitis et qu’ils
ne parviennent pas à les intégrer dans
leur esthétisme bourgeois... Mais, en
même temps, cela fait partie du caractère
éphémère des graffitis.
BRUXELLES ?
Cette ville me semble équivalente, au point
de vue des pochoirs, à d’autres capitales
européennes.
Note : cet interview a été réalisée par courriel
1 Rue Africaine
2 Rue des Brigittines
3 Avenue du Général de Gaule
4 Chaussée de Waterloo
5 Avenue Legrand
6 Rue Saint-Jean Népomucène
7 Rue Tenbosch
8 Rue Kerckx
9 Rue des Brigittines
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4
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5
LUUUTTE FINAAALE
Chaussée de Vleurgat
C’eeest la luuutte finaale (sur un air connu)
Les poubelles et les pochoirs de Bruxelles ont en commun d’être visés par le même
Plan de Lutte contre les Incivilités en matière de Propreté Publique (PLIPP en court).
Objectif du plan : Combattre les actes inciviques de salissure et de nuisance afin de
rendre la ville plus belle pour ses habitants.
Ainsi, une poubelle sortie sur le trottoir en dehors des heures réglementaires est
punissable d’une taxe d’incivilité de 50 € par sac et d’une amende administrative de
75 à 150 € tandis qu’un graffiti apposé sans permission est susceptible d’une taxe
de 150 € par dessin et d’une amende de 250 €.
Curieusement, le fait d’exproprier ces mêmes habitants et de laisser pourrir leurs
maisons à des fins de spéculation immobilière n’entre pas dans le champ (de bataille)
de cette action courageuse, citadine et citoyenne. Curieusement aussi, le fait que
« certains » habitants, occupants ou passants puissent trouver que « certains » tags,
graffitis ou pochoirs embellissent la ville n’a pas été pris en compte par nos édiles
radicalo-hygiénistes.
Mais revenons à nos poubelles... La ville en produit environ 463.000 tonnes par an
dont 75% en ordures ménagères et 12% en papiers-cartons. La probabilité de trouver
un pochoir parmi ces poubelles est faible mais pas nul... Il y a quelques temps, en
effet, en me promenant Chaussée de Vleurgat, j’ai eu l’étrange émoi d’apercevoir
deux pochoirs perchés au-dessus d’un amas de sacs d’ordures ! Une analyse
scientifique approfondie révéla que ces deux pochoirs avaient été dessinés sur des
feuilles blanches au format 27 x 36 cm et ensuite collés et plastifiés sur une grande
farde de 51 x 33 cm, elle-même assemblée à partir d’un carton de récupération.
Les deux personnages représentés ainsi en un couplage plutôt inattendu étaient un
chérubin vu de face (à gauche) et un individu vu de dos (à droite).
Ma tentative d’identifier l’auteur des pochoirs en glissant un message dans les boîtes
aux lettres des maisons adjacentes fut vaine. Ma tentative de comprendre ensuite
l’association signifiante de ces deux pochoirs en recherchant des banques d’images fut
tout aussi vaine. Mais une chose est sûre, cependant : La chasse aux pochoirs dans
les rues de Bruxelles, qu’elle soit sportive ou répressive, exige l’oeil vif et la réaction
prompte ! Puissent les agents du PLIPP - en planque pendant de longues heures sous
d’habiles camouflages dans l’effort d’une prise en flagrant délit de poubelle ou de
graffiti - apprendre à préférer la performance athlétique au réflexe punitif !
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NOM ?
Shine
SHINE
NAISSANCE ?
1982
ORIGINE ?
Belgique
1 Avenue du Port
2 Rue Haute
3 Rue de Belgrade [exposition]
4 Rue des Pierres
«
J’aime bien voir un truc désaffecté avec des graffitis dessus.
»
1
DECLENCHEUR ?
Tout a vraiment commencé avec le film « La manufacture du consentement » de
Noam Chomsky. J’avais une telle rage après avoir vu ce reportage que je me suis
véritablement lancé. J’ai commencé à découper, à faire des stickers aussi, et puis
- graduellement - je me suis mis à faire des choses plus abouties. Je suis très
exigeant et j’avais peur de me décevoir moi-même. En fait, j’avais découvert les
pochoirs et les tags en Espagne, il y a cinq ou six ans, et cela m’avait vraiment
marqué. La culture du skate m’a aussi influencé. Donc j’ai fait des tags, puis des
pochoirs, et j’ai gardé le même blaze. Le nom « Shine » vient du fait que j’avais besoin
de quelque chose de positif, qui fasse plaisir à tout le monde.
PREMIER ?
Frustrant ! J’ai fait mes premiers pochoirs avec quasiment tout du matériel de
récupération. Carton épais et cutter. Le premier était le vélo d’E.T. qui vole,
juste un ombrage sans détail. Il est toujours rue des Pierres.
TECHNIQUE ?
Maintenant, je suis plus abouti dans mes dessins. J’ai trouvé des cartons plus lourds
et je découpe à l’exacto. J’achète la plupart de mes cartons en fin de série, au
rabais. Le stylet a vraiment changé ma conception.C’est beaucoup plus précis et
j’ai testé plusieurs types de carton. Je change de carton selon l’utilisation que je fais
des pochoirs. Pour la rue, je prends un carton épais mais je fais moins de détails.
EVOLUTION ?
Je me suis longtemps cherché un style et, après avoir peaufiné mon truc, je crois que
j’ai enfin trouvé quelque chose qui me corresponde entièrement. Je me suis donné
le temps et les moyens de m’améliorer. Mon trait est influencé par tout ce qui touche
au sentiment de culpabilité typiquement judéo-chrétien mais comme je n’aime pas
trop utiliser des choses que je ne connais pas bien, c’est en travaillant là-dessus
que j’approfondis mes connaissances de ces thèmes. Les iconographies religieuses
m’intéressent énormément. Donc, là, j’ai plein de trucs au niveau pochoir que je n’ai
pas encore eu l’occasion de mettre en rue.
PLACE DANS TA VIE ?
Il y a eu une époque où je me suis fait un peu trop remarquer. J’avais vingt ans, je
mélangeais l’alcool et les sorties... Ce n’était pas très discret. Maintenant j’essaie de
tirer les leçons de mes erreurs et de ne plus trop me mêler à cette scène-là. Je fais
tout ça avant tout pour moi, pour que, quand je rentre après avoir fait une virée,
j’ai l’impression d’avoir accompli quelque chose. J’ai la satisfaction d’avoir posé un
acte. Comme je suis actuellement sans emploi, j’ai beaucoup de temps pour mes
pochoirs mais, du coup, je n’ai pas les moyens pour acheter le matériel. Mon travail
passe par des périodes, aussi. Parfois, je ne touche plus un scalpel pendant des
mois et puis ça peut repartir et j’y passe des jours entiers, en ne me consacrant qu’à
ça. C’est une forme d’exutoire qui passe par des cycles.
8
12
12
9
MESSAGE ?
Je n’ai pas envie de prendre les gens
pour des cons et leur dire : « Tenez, voilà,
pensez ça ! ». Alors si mes pochoirs
leur évoque quelque chose, c’est tant
mieux pour eux. Mais il n’y a rien de
révolutionnaire.
2
ENDROIT ?
Avec l’expérience, j’ai appris qu’il
ne faut pas mettre un truc sur un
bien privé. Tu te mets ces gens-là
à dos et c’est pas le but. J’essaie
d’avoir un respect des citoyens.
NETTOYAGE ?
Ça fait partie du jeu. Tous ces
gens qui peignent sur des murs
savent à quoi s’en tenir.
Le caractère éphémère renforce
même la beauté du geste...
A partir du moment où on ne
peut pas se l’approprier, c’est un
beau souvenir. Il faut s’accorder
quelques secondes parce qu’on
sait que ce graffiti, on ne le reverra
peut-être jamais. Et puis ça fait
le bonheur des entreprises de
nettoyage !
REACTION ?
J’aime que les gens remarquent mes
pochoirs et, si possible, que ça porte
à réflexion. J’ai envie que ce que je
fais soit reconnu. Pour l’esthétique
d’abord. A partir du moment où l’on
fait une démarche publique, on espère
une certaine « utilité ». J’ai quelques
feedbacks, de différentes manières, mais
ils sont rares. Par contre, j’ai eu des
prises de bec avec des gens pour des
raisons que parfois, j’ignore encore.
POCHOIR FAVORI ?
Je crois que c’est toujours le suivant qui
me plaît le plus. Le dernier est toujours le
plus abouti... C’est donc forcément un de
ceux qui ne sont pas encore dans la rue.
POCHOIRISTE FAVORI ?
J’avoue que je ne regarde pas tellement
ce qui se passe autour de moi car je n’ai
pas envie d’être influencé. Je suis chaque
fois scié par la patience de Doctor H
quand il fait ses trucs en couleurs.
Sa technique est assez incroyable.
Sinon, Banksy reste la référence
ultime en pochoir. Non seulement il a
quelque chose à dire, mais il le fait bien
et ses pochoirs sont excellents. Il a réussi
à mélanger le fond et la forme. J’ai un
immense respect pour Banksy.
GRAFFS & TAGS ?
Clairement un immense respect, une
immense fascination, pour tout ce qui
est à la bombe. J’aime bien voir un truc
désaffecté avec des graffitis dessus.
POLICE ?
Il y a effectivement un peu d’angoisse par rapport
à la police. Mais j’ai de la chance car ils n’ont pas
encore remarqué qui j’étais. J’ai bien été arrêté une
fois mais les circonstances ont fait qu’il n’y a pas
eu de suite. Si je me tiens encore un peu à l’écart,
je pourrai à nouveau faire ce que je fais maintenant
sans cette angoisse. J’aurai plus tendance à faire
les choses à mon aise plutôt que rapidement.
3
4
BRUXELLES ?
Je trouve que Bruxelles est une
ville grise. Il y a une culture assez
bizarre parce que Bruxelles est
considérée comme une capitale
du point de vue ésotérique.
C’est quelque chose qui
m’influence parce que la ville est
chargée de symboles. Maintenant,
je trouve que les gens ne sont pas
assez impliqués... Ils s’essaient
au pochoir sans trop savoir ce
qu’ils veulent exprimer. C’est trop
éclectique. Du coup, le pochoir
reste méconnu, marginalisé et
assez impopulaire alors qu’il y a
encore de la place sur les murs !
Ça me surprend qu’il n’y en ait
pas plus. Mais j’ai l’impression
qu’une nouvelle vague s’amène.
C’est très stimulant !
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1
FACES 8
1
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9
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SILHOUETTES
1 Avenue Louise
2 Rue des Minimes
3 Avenue de la Sapinière
4 Rue des Grands Carmes
5 Rue des Minimes
6 Quai du Chantier
7 Rue Moris
8 Chaussée de Waterloo
9 Rue des Brigittines
10 Rue Saint-Ghislain
2
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1 Rue des Cygnes
2 Rue de Laeken
3 Rue de l’Eclipse
4 Drève Saint-Hubert
5 Drève Saint-Hubert
6 Rue des Cygnes
7 Rue de la Longue Haie
8 Rue Auguste Orts
9 Rue des Minimes
10 Rue du Belvédère
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3
DENIS MEYERS
NOM ?
Denis Meyers
NAISSANCE ?
1979
1 Rue Reine Marie-Henriette (Photo par Vanessa Sutour)
2 Rue Reine Marie-Henriette (Photo par Vanessa Sutour)
3 Rue Royale (Eglise du Gesù, exposition Plastic)
4 Rue Royale (Eglise du Gesù, exposition Plastic)
ORIGINE ?
Belgique
DECLENCHEUR ?
J’ai toujours aimé le dessin. Mon grand-père m’a toujours dit : « Un dessin par jour »
et je regrette de ne pas avoir commencé le jour où il me l’a dit pour la première fois !
D’ailleurs ma formation professionnelle, c’est la typographie. Les lettres en
elles-mêmes, en l’absence du sens, me plaisent déjà beaucoup. J’ai mis les pieds
dans le milieu du graffiti de par ma passion pour le skate. A la base, j’ai une culture
de la décoration des planches de skate. Ce sont mes influences principales.
Il y a des courbes que je ne saurais pas faire avec un bic
alors qu’avec un cutter, c’est vraiment un jeu d’enfant.
1
2
PREMIER ?
J’ai fait mon premier pochoir quand j’avais 8 ou 9 ans. Un pochoir sur mon skate.
C’était le logo de Air Walk, une marque de skates. J’avais vu un pochoir dans une
revue alors j’ai pris un carton qui devait faire quatre centimètres d’épaisseur, j’ai
copié le logo et j’ai coupé avec un vieux cutter qui ne coupait plus. C’était plus pour
reproduire quelque chose, un effet, qui me plaisait mais cette première expérience fut
assez douloureuse pour mes doigts. Le deuxième pochoir que j’ai fait, c’était le texte
« Fait chier » avec une faute d’orthographe que j’ai mis partout, sur mes planches de
skate, sur mes T-shirts... Je ne pense pas que j’avais une très bonne orthographe à
cet âge-là.
TECHNIQUE ?
J’aime bien les gros cutters. On les a bien en main. Tu peux rapidement casser les
lames quand elles sont usées. Je travaille dans du carton mais, de temps en temps,
aussi sur des radiographies et du papier. Ça dépend. Quand mon père travaillait
chez un éditeur, il nous autorisait à récupérer des couvertures dans les poubelles.
Un des côtés est plastifié, ce qui fait des pochoirs assez résistants. Je suis très
« récupération ». Quand je fais des pochoirs, je les dessine directement sur le support
avant de les découper. Je dessine puis je marque les ponts. Il y a des courbes que
je ne saurais pas faire avec un bic alors qu’avec un cutter, c’est vraiment un jeu
d’enfant. Il y a une résistance donc tu peux mettre de la force.
EVOLUTION ?
A force d’en faire, j’ai attrapé une certaine agilité, une certaine aisance.
Il y a toujours une recherche, une évolution. Au départ, les « nobody » n’étaient
faits qu’avec des lettres, des chiffres et des signes. Maintenant, il y a l’influence de
tout ce que je lis, de ce que je regarde. Je suis aussi très souvent influencé par les
techniques. C’est vraiment le travail en soi qui me fait avancer, pas la réflexion que
j’ai sur mon travail. Je progresse par le travail, par l’action. Le pochoir est difficile à
découper mais, à partir du moment où tu as le pochoir et la bombe, faire le pochoir
en rue n’a vraiment rien de compliqué. Sauf peut-être quand on s’attaque à des
grands formats.
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5
PLACE DANS TA VIE ?
Par manque de temps, cela fait
bien deux ans que je n’ai plus fait
de pochoir en rue. Je continue
à en faire beaucoup mais plutôt
pour le plaisir ou pour des
dessins commisionnés.
3
GRAFFS & TAGS ?
Dans le domaine du graffiti, il y a ceux qui se posent la question de savoir si c’est
intéressant de faire un énorme graff - qui ne veut rien dire et qui est très moche sur le volet d’une pauvre mamie. Je connais des graffeurs qui ne peignent que dans
des endroits désaffectés. Souvent, ils sont d’abord passés par le taggage acharné,
vandale, et il leur a fallu un certain temps et de l’expérience avant de se remettre
en question et de commencer à respecter les biens des autres. Ceci dit, quand je
me réveille le matin et que je vois d’horribles tags sur mon mur, je ne peux pas leur
cracher dessus parce que, finalement, on fait partie du même monde.
MESSAGE ?
Contrairement à beaucoup de
gens qui sont dans le domaine,
je n’ai pas de conceptualisation.
Il n’y a pas véritablement de
concept dans ce que je fais.
Je ne veux pas passer de
message. Le sourire des gens
me comble largement. Le sourire
et puis l’intérêt suscité pour ce
qui se fait dans la rue. Ceci dit,
si les artistes peuvent d’une
manière ou d’une autre faire
avancer le monde, le faire évoluer
dans un sens positif, je pense
qu’on doit le faire.
POLICE ?
Quand on travaille sur des grands pochoirs, techniquement, c’est compliqué de se
trimballer avec tout ça et de ne pas se faire choper. Alors toutes les interventions
en grand format que je fais en ville, c’est toujours en pleine journée avec plein de
gens autour de moi. Ça devient presque une performance. Les messieurs de la
maréchaussée ne s’arrêtent même pas quand ils voient autant de gens, des caméras
et des appareils photos. Ils ne pensent même pas à s’arrêter.
ENDROIT ?
C’est toujours sur des endroits interdits mais quand même avec un minimum
de réflexion. Il y a un travail de repérage. Il y a déjà tant de choses abandonnées
à Bruxelles. Alors j’essaie d’avoir une ligne de conduite. Donc j’ai tendance à
choisir des façades abandonnées ou, dans le pire des cas, des immeubles qui
appartiennent à l’Etat ou à la commune. Je ne conseille à personne d’aller tagger
sur une maison Horta !
REACTION ?
J’aime bien que les gens
apprécient mais j’ai, à la base,
toujours essayé de faire des
trucs pour moi de façon un peu
égoiste. Mes dessins sont plus
esthétiques que revendicatifs.
D’ailleurs je ne les signe pas.
POCHOIR FAVORI ?
Un ami, SchiZophoniC, qui avait
fait la tête d’Elvis Presley sur le
corps d’Arnold Schwarzenegger.
On a fait des pochoirs ensemble
pendant de longues années et
j’adore vraiment ce qu’il fait.
POCHOIRISTE FAVORI ?
Banksy parce qu’il a un sens éthique. Peut-être pas le même que le mien mais j’ai
vraiment l’impression qu’il réfléchit beaucoup où il va mettre ses pochoirs. Banksy
me fait réfléchir.
4
NETTOYAGE ?
Quand tu mets un pochoir, c’est vraiment éphémère. Tu as vraiment de la chance si
ça reste plusieurs années. C’est nettoyé par la commune, les sociétés de transport
en commun, les particuliers, l’érosion, les intempéries... Tout ça, c’est naturel.
Ça fait partie du jeu. Art urbain sous-entend « éphémère ». Cette forme d’art est
peut-être celle qui a le plus besoin d’être archivée. Donc je suis généralement assez
content quand un mur est nettoyé car je sais que, deux jours après, il y aura à
nouveau des graffitis. Ça se renouvelle sans cesse.
BRUXELLES ?
Bruxelles est relativement pauvre par rapport aux autres villes. Très confiné, pas très
déluré, fort peu revendicateur. C’est comme si les gens s’étaient essayé au pochoir
à Bruxelles et puis étaient partis ailleurs après avoir atteint un certain niveau. Et puis
c’est dur de rencontrer des pochoiristes... Moi qui suis beaucoup dehors la nuit, en
vélo, je n’en ai jamais croisé aucun en dix ans. Mais bon, je trouve que depuis un an
ou deux, on a quand même une espèce de renaissance de ce qui se fait dans la rue.
Ça évolue.
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ANIMAUX
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1 Rue des Minimes
2 Rue Saint-Christophe
3 Avenue Georges Brugmann
4 Rue de l’Athénée
5 Chaussée de Boondael
2
3
6 Rue de l’Arbre Bénit
7 Rue des Pierres
8 Rue François Roffian
9 Borgval
10 Rue d’Argent
11 Avenue Louise
12 Rue du Pays de Liège
13 Rue Saint-Ghislain
14 Rue des Grands Carmes
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9
VGT
NOM ?
VGT
NAISSANCE ?
1985
1 Rue des Pierres
2 Place Fontainas
3 Chaussée de Wavre
4 Rue des Chasseurs
5 Rue Saint-Ghislain
6 Rue Saint-Ghislain
«
ORIGINE ?
France
DECLENCHEUR ?
Un de mes professeurs nous a un jour montré une photo de pochoir en nous
demandant de lui signaler si on en voyait dans les rues. Il fallait lui donner leur
localisation ou même les prendre en photo. Donc pour moi, ça a été photo, photo,
photo... Et puis initiative ! Je me suis dit : « Je peux y aller, j’y vais, c’est accessible ».
Un homme, face à une pin-up, il dit oui à tout ce qu’elle veut.
1
PREMIER ?
Mon premier pochoir est le Jack Nicholson du film « The Shining ». Je venais de voir
le film et cette image m’avait vraiment interpellée. Je l’ai fait en une heure. C’était
surtout pour tester, pour voir comment on faisait pour découper quelque chose.
Alors j’ai vraiment pris la première image qui m’est venue à l’esprit.
Jack Nicholson, sa tête derrière la porte.
TECHNIQUE ?
J’ai tout de suite trouvé le matériel qui me convenait. PVC et scalpel.
C’est ce que j’utilise encore aujourd’hui.
EVOLUTION ?
Techniquement, non. Mais j’ai envie de mettre de la couleur ! Quand je découpe
quelque chose de beau, pouvoir accompagner cela de couleur, ça le rend encore
plus beau. Et puis, je signe mes pochoirs depuis peu. Surtout ceux dont je suis
fière. Ça me permet de plus me sentir comme un acteur du monde des pochoiristes
bruxellois. Mais je ne cherche pas vraiment à rencontrer d’autres pochoiristes.
PLACE DANS TA VIE ?
Une petite place parce que je travaille à plein-temps. Je ne m’y consacre que
quand j’ai du temps libre. Et ça dépend des périodes, aussi. Il y a des semaines
où je découpe tous les jours mais en moyenne, c’est plutôt une fois par semaine.
Je suis très impulsive, impatiente. Quand j’ai l’idée, il faut que je le fasse tout de suite,
sans attendre. C’est donc un regret de ne pas en faire plus souvent. Et puis, je sors
environ une fois par mois, quand j’ai un nouveau pochoir.
0
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1
MESSAGE ?
Mes thèmes sont très personnalisés.
Souvent une réaction à un sentiment
d’une certaine période. Pour l’instant, je
suis beaucoup dans le thème des pin-ups.
Une pin-up a un pouvoir sur les hommes.
Un homme, face à une pin-up, il dit oui à
tout ce qu’elle veut. Mes pochoirs de
pin-ups ne sont que des Betty Page.
C’est la plus sexuelle et la plus érotique
des pin-ups. Les autres sont un peu
niaises, elles ne m’intéressent pas.
3
2
POLICE ?
Pas de problème. Je fais mes pochoirs
au milieu de la nuit. C’est quasi obligé
si on ne veut pas prendre trop de
risques. Bien sûr, la nuit, quand je suis
dans le noir, dehors, et que je vois un
appartement illuminé, je ne rêve que de
rentrer chez moi... Mais le pochoir me plait
suffisamment pour que je sorte la nuit !
RÉACTION ?
Le fait que je sois une fille m’aide à faire
des pochoirs de pin-ups, de Betty Page.
On ne peut pas me reprocher de faire des
pin-ups, de dire « Il fait des belles filles,
quel obsédé, c’est salace ». Venant d’un
garçon, on penserait plutôt à l’infériorité
de la femme mais, venant d’une fille, il
s’agit de la supériorité de la femme ! En
même temps, personne n’est censé savoir
que je suis une fille. C’est anonyme. Je ne
fais pas mes pochoirs en me disant que
les autres vont penser que je suis une fille.
Je fais cette image d’abord parce qu’elle
me plait. Je ne cherche pas à mettre les
gens sur une piste. J’aimerais bien que ça
les fasse réfléchir, mais réfléchir à ce qu’ils
veulent. Il n’y a pas de manipulation de
pensée.
POCHOIR FAVORI ?
Chez moi, aucun pochoir en particulier.
Chacun a sa petite importance. Mais
s’il devait n’en rester qu’un, ça serait
mon raton. C’est un animal que j’aime
beaucoup, il représente une partie de mon
enfance. Chez les autres pochoiristes,
j’aime beaucoup le lama de Broken Crow
qui est mon petit chéri... Le petit lama que
j’aimerais bien avoir dans mon salon.
POCHOIRISTE FAVORI ?
J’aime vraiment beaucoup le travail du
collectif Faille.
GRAFFS & TAGS ?
Je respecte tout-à-fait les graffitis. Mais
les tags, non. Surtout ceux qui signent
leur nom sur des biens privés sans aucun
respect, sans faire gaffe. Ceci dit, on ne
peut pas interdire l’un et autoriser l’autre...
C’est juste que cela ne me plait pas.
Les pochoiristes, je trouve, ont plus de
respect que les taggeurs parce qu’il y a
une autre démarche, une préméditation,
derrière.
NETTOYAGE ?
Je trouve ça tout à fait normal même
si c’est toujours dommage de voir des
pochoirs partir. Ça fait un petit pincement
au coeur mais ce sont les règles du jeu...
On fait un pochoir et on sait déjà qu’il va
partir. Il faut être raisonnable. On ne fait
jamais un pochoir en pensant qu’il va
rester. Ou, en tout cas, il ne faudrait jamais
le faire dans ce but-là.
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BRUXELLES ?
Le pochoir évolue à Bruxelles. Mais les
pochoirs restent en général assez petits
et monochromes. Ce sont souvent des
étrangers, de passage, qui font des
oeuvres plus imposantes. On peut mieux
faire ! Ceci dit, ça m’étonnerait qu’il y ait
une grosse évolution dans les années à
venir. Moi, de toute façon, j’aime bien les
petits formats. Je ne suis pas sûr que la
solution soit dans le gigantisme.
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3
FROIDURE ET
COULURE
Rue de la Gouttière
Avec l’automne, les pochoiristes retrouvent progressivement la perspective de belles
nuits sombres et longues, celles qui sont propices aux plus productives virées streetartistiques. Bonne nouvelle mais aussi mauvaise nouvelle : Ça caille.
En route vers l’hiver, déjà, les supports se refroidissent, l’air se glace et les
nébuleuses de spray décident de se figer, suspendues quelque part entre bombe et
gabarit... Les visages se crispent sous les bonnets, les doigts se crampent dans leurs
mitaines. La peinture bave, rate, boulette ou coule. Patatras. Le coup - dur et direct peut arriver à chacun... Mais il faut sans doute l’aplomb de l’expérience et la témérité
de l’engagement pour sur-le-champ retomber sur ses, hum, caps.
VGT, célèbre pochoiriste de Bruxelles, accepte de nous parler d’un bien fâcheux
incident survenu lors d’un pochage « Cramps » dans la rue de la Gouttière.
Nous dit l’artiste : « Il faisait très froid cette nuit-là et j’utilisais une bombe fluo.
Je voulais faire un fluo comme ça, pour voir ce que ça donnait... Parce que le fluo,
ça va bien avec le groupe. Mais la peinture a lamentablement coulé ! Le fluo ne s’est
pas solidifié à cause du froid. Alors, j’ai rapidement repassé au noir, vite parce qu’il
y avait des regards suspects. Je ne pouvais pas laisser un pochoir aussi raté là !
C’était une mesure d’urgence. Puis j’ai remis de l’orange dessus parce que c’était
la seule couleur que j’avais. En même temps, j’ai pensé que l’orange et le noir ça
pouvait être assez bien pour l’ambiance du pochoir ». Beau rétablissement, bravo !
Seule une inspection très méticuleuse du site permet de suspecter qu’une catastrophe
picturale a bien failli survenir ici... L’indice est dans le coin supérieur droit où un peu de
fluo du premier bombage a échappé au noircissement hâtif. Le danger d’une bavure
est toujours présent, surtout dans les conditions extrêmes et nocturnes dans lesquelles
opèrent généralement les pochoiristes. Même si une partie significative du travail
- le dessin et le découpage du gabarit - est préparée avant de prendre la rue, tant de
choses peuvent encore se passer entre bombe et mur... VGT ajoute d’ailleurs :
« Parfois j’ai peur que ça coule, mais ça ne m’est arrivé que deux fois ».
Au moment d’enfiler leurs épais anoraks, les pochoiristes savent que l’épreuve
les guette à chaque instant, à chaque mouvement. Et pourtant, nuit après nuit,
génération après génération, ils s’enfuient avec bombes et gabarits dans la
pénombre brumeuse pour donner vie à nos murs austères... et froids.
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POUMON NOIR
NOM ?
Poumon Noir est un collectif dont trois membres du crew (Simon aka Mochélan, Nico
et Seb) ont participé à l’interview.
ORIGINE ?
Belgique
1 Rue Victor Greyson
2 Place Eugène Flagey
«
Ça nous plait trop de les poser partout.
1
DECLENCHEUR ?
Il y a quelques années, j’ai vécu en Espagne. J’avais un copain italien et avec lui,
on a fait plein de T-shirts au pochoir pour les vendre dans la rue. On a fait des logos,
des visages. Une chouette expérience. Alors, en revenant ici, j’en ai parlé à mes
potes. A partir de 2006, on a refait des pochoirs, surtout sur des T-shirts. Mais la
vérité, c’est que ça nous plait trop de les poser partout !
PREMIER ?
C’était un pingouin. Genre comme si c’était une poupée vaudou avec des trous.
On en a fait toute une série pendant une semaine ... On n’a pas arrêté !
C’était quelque chose que j’ai vraiment aimé parce que c’était très actif.
»
2
TECHNIQUE ?
Je travaille avec un plastic moins dur que du plexi mais assez rigide et que j’achète
en papeterie. Je découpe au scalpel. J’aime bien qu’on sente un travail manuel
derrière. Ça me touche beaucoup plus quand on sent que c’est dessiné à la main.
EVOLUTION ?
On aime bien les trucs monochromes. J’ai envie de rester dans cet esprit-là.
On fait des T-shirts mais aussi des gros pulls à capuche. J’aimerais bien que les
pochoirs deviennent une partie de plus en plus importante de notre communication,
en terme d’image.
MESSAGE ?
J’adore cette phrase qui dit : « Le système, on ne peut pas le détruire mais, par
contre, si on joue avec ses règles, on peut le foutre en l’air ». C’est vraiment ça
qui m’intéresse. Des gens comme nous, on va assimiler ces règles, s’adapter à
ces règles, on va rester intègre et on va le faire évoluer. C’est à chacun de nous,
maintenant, de prendre les choses en main, de façon positive. Par exemple, dans
un prochain projet de Poumon Noir, on va prendre différentes personnalités, comme
Lagardère, Pinault, Dassault et Bouygues, on va faire des affiches avec leurs portraits
au pochoir, puis on va les faire télécharger gratuitement en format facile à imprimer
en A3 et en faire coller un maximum partout. J’ai envie de citer une phrase que j’ai
vue un jour : « Mur vide, peuple muet ».
BRUXELLES ?
Regardes cette place Flagey... Ils ont mis combien de temps à la construire ? Elle est
grise. On vit dans un pays qui est gris, c’est gris partout... Et ils viennent nous faire
une place grise. Pourquoi ils n’ont pas fait un truc avec des couleurs ?
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JOSÉ LODEWICK
NOM ?
José Lodewick
OCCUPATION ?
Collectionneur de photographies de pochoirs.
1 Un des nombreux classeurs de José Lodewick
2 Portrait d’Audrey Hepburn (née en 1929 à Bruxelles) dans
« Breakfast at Tiffany’s » poché par l’artiste VGT
dans le bureau de José Lodewick
MOTIVATION ?
A vrai dire, à part les pochoirs, je n’ai jamais rien collectionné ni répertorié.
En matière de pochoirs, il n’y a d’ailleurs rien de pré-défini.
Ce n’est pas comme la philatélie où on connaît le nombre d’éléments à trouver.
J’ai trouvé la technique du pochoir intéressante et j’avais du temps à consacrer à la
chasse aux pochoirs… Ça a commencé comme ça : « Tiens, j’en ai vu un, il y en a
peut-être d’autres ». C’est une autre façon de découvrir les endroits, les villes. On se
retrouve dans des quartiers qui ne sont pas du tout touristiques.
Je photographie tout parce qu’on ne sait jamais
si c’est la seule expression que l’on va trouver.
1
DEFINITION ?
Pour moi, le pochoir, c’est sur un support, sur le mur, sur une palissade.
Le pochoir, c’est gabarit, bombe et support. Il y a un contact direct entre la peinture
et son support. Ce n’est pas un travail de laboratoire que l’on va exposer par la suite,
un peu comme dans une exposition. Je pense que le pochoiriste ressent une montée
d’adrénaline quand il va poser son pochoir… Il y a un côté d’interdit qui doit jouer.
On retrouve beaucoup moins ce sens d’interdit quand il s’agit de coller un petit
papier sur un mur. Je trouve ça gênant, le papier, par rapport au mur. Le travail de
rue est plus instantané. Mais, bon, nous ne sommes qu’observateurs, quelque part…
On se permet un peu le luxe d’imposer des exigences alors qu’on n’a pas le risque.
PREMIER ?
En 1993 à Lyon. Ce n’est d’ailleurs pas le pochoir que je photographiais. C’était un
mur couvert de graffitis. Je crois que je ne savais même pas ce qu’était un pochoir
à ce moment-là. Ce n’est qu’en regardant la photo par la suite et en l’analysant que
j’ai vu qu’il y avait des choses qui n’étaient pas des machins dans tous les sens.
Ce n’était pas des signatures ou des tags. Ce n’était pas la même texture, le même
travail. Ça m’a intrigué et j’ai fait des agrandissements.
SELECTION ?
Je crois que j’ai eu de la chance, au début, de tomber sur de très beaux pochoirs,
des choses qui ont fait que je me dise que cela valait la peine. J’ai donc traversé une
première phase où je n’ai retenu que ce que je trouvais beau. C’était donc fort ciblé.
Mais maintenant, dès qu’il y a pochoir, je photographie. Peu importe que ce soit bien,
pas bien, lisible, pas lisible, peu lisible, je prends. Je photographie tout parce qu’on
ne sait jamais si c’est la seule expression que l’on va trouver. Il y a des pochoirs qui
sont moches, avec des bavures, des larmes… Des pochoirs usés par le temps, par
la pluie, par les tags. Des pochoirs que je ne parviens pas à identifier… Je les prends
quand même.
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Scène de rue
PASSAGE A L’ACTE ?
Je n’ai jamais eu envie de pocher moi-même. Je crois tout
simplement que je connais mes limites et que je sais très
bien que je ne pourrais jamais faire ça. Si j’ai quelque chose à
apporter, ce n’est pas au travers de ce média-là. Alors, je me
contente d’observer, je regarde, je photographie, c’est tout.
Je prends et je redonne. Mais je n’en connais que ce que je
peux en voir. C’est tout.
SUITE ?
Aujourd’hui, j’ai environ 2400 à 2500 photos répertoriées sur
Flickr. Je continue à faire ça parce que cela m’intéresse mais je
n’ai ni le sens de la propriété, ni le sens de la pérennité. Je fais
les choses dans le moment parce que ça me plait de le faire.
Ceci dit, je trouverais dommage que tout cela parte à vaux l’eau
le jour où je ne serai plus là. Mais, bon, en espérant que ce ne
soit pas demain. Peut-être est-ce que je léguerai… Si ça tombe
dans de bonnes mains !
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Place de la Chapelle
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TEXTES 4
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DIVERS
1 Rue des Fabriques
2 Rue Simonis
3 Rue Léon Vanderkindere
4 Rue du Printemps
5 Rue Jules Bouillon
6 Rue de la Cité
7 Rue Van Elewyck
8 Rue Albert Meunier
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1 Rue du Conseil
2 Rue Pieremans
3 Rue Sans-Souci
4 Rue Sans-Souci
5 Rue de la Cigale
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6 Rue de l’Eventail
7 Rue des Ursulines
8 Rue du Jardin des Olives
9 Rue Notre-Seigneur
10 Rue Dillens
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3
DISCUSSION
Cette étude a été initiée par les auteurs
afin de mieux comprendre la démarche
des pochoiristes qui s’expriment à
Bruxelles et d’évaluer l’impact des
pochoirs dans l’environnement urbain
considéré.
A partir d’une collection de photographies
prises pendant la durée de l’étude et
portant sur 433 pochoirs différents,
l’analyse montre une distribution des
pochoirs sur différents supports qui est
logiquement associée aux caractéristiques
urbanistiques bruxelloises.
Ainsi, 37% des pochoirs sont appliqués
sur des murs aveugles bordant des
jardins, des cours, des garages ou des
terrains vagues ;
24% sont peints sur des façades
d’immeubles livrés à l’abandon ou à la
spéculation ;
16% sont peints sur des éléments de
mobilier urbain, essentiellement sur des
boîtiers techniques ;
Seulement 11 % des pochoirs sont
appliqués sur des façades d’immeubles
privés (habitations, commerces),
parfois avec le consentement ou la
compréhension des propriétaires...
Cette première répartition démontre que
les pochoiristes sont, dans l’ensemble,
respectueux de la propriété privée et
qu’ils choisissent l’emplacement de
leurs pochoirs avec soin et intelligence,
sans intention de dégradation ou de
vandalisme. Cette observation est
d’ailleurs étayée par les commentaires
de plusieurs pochoiristes au cours des
interviews. Ceux-ci n’hésitent pas à
prendre leurs distances - sans jugement,
cependant - par rapport à d’autres
formes d’art urbain connues pour être
parfois plus agressives ou intrusives.
Cette même collection de photographies
de 433 pochoirs différents a également
été analysée pour la distribution des
thèmes abordés.
49% des pochoirs représentent des
personnes, essentiellement des portraits
(connus ou non) ainsi que des silhouettes
et des personnages ;
24% dessinent des signes, des symboles
ou des objets généralement simples et
facilement identifiables ;
16% consistent en des textes qui, en
opposition avec les pochoirs figuratifs,
ont tendance à véhiculer un message
plus politique ;
Seulement 11% des pochoirs
représentent des animaux...
Cette deuxième répartition démontre
que, à part pour les pochoirs textuels,
les intentions graphiques des artistes
cherchent à déclancher des réactions
référentielles et familières, voire complices,
avec les habitants et les autres occupants
de la ville. Portraits de célébrités culturelles
et politiques, indications signalétiques
et objets usuels constituent ainsi une
gamme d’interactions proximales dans un
environnement urbain saturé de messages
consuméristes ou disciplinaires. Dans
les interviews, les pochoiristes rappellent
souvent leur volonté de vouloir faire
réfléchir, voire seulement faire sourire, les
gens dans la ville. Et plusieurs des essais
repris dans l’étude confirment l’efficacité
très forte des pochoirs à induire des
associations d’idées ou de pensées dans
l’esprit des gens.
un contre-art) en soi et qu’il alimente,
en tout cas, un profitable commerce. La
beauté esthétique de certains pochoirs
et l’appréciation grandissante de certains
pochoiristes sur le marché de l’art
contemporain pourraient cependant
donner matière à réfléchir à la nécessité
d’une stratégie sélective de conservation
ou de protection des pochoirs. C’est
déjà le cas dans certaines villes mais pas
encore à Bruxelles.
Il est également important de
rappeler que la démarche artistique
d’un pochoiriste suit un processus
relativement long et compliqué par
rapport à d’autres genres graphiques.
Celui-ci doit en effet choisir un motif
ou un thème (souvent en réaction à
ses propres émotions ou expériences),
exécuter les dessins et découpes de
gabarits (parfois en plusieurs couches
superposées) en atelier et ensuite aller
peindre le pochoir dans la rue...
Le dessin ou le texte que le pochoiriste
offre ainsi en partage avec la population
est bien une véritable oeuvre artistique
qui requiert métier et talent, et non le
résultat d’un jet impulsif et hasardeux.
En conclusion, cette étude montre que,
dans l’ensemble, les pochoiristes sont
attentifs au choix de leurs emplacements
et que leurs pochoirs ont pour vocation
prioritaire de divertir, mais aussi de faire
réfléchir, les gens qui les regardent. Il
s’agit donc d’une démarche graphique
d’interpellation et d’interaction résolument
positive auprès de la population.
Cette spécificité devrait être prises en
considération par les autorités politiques
et culturelles bruxelloises dans une
définition éclairée et clairvoyante de son
patrimoine populaire. Bruxelles étant la
capitale de l’Europe, sa responsabilité
comme modèle d’appréhension et
comme référence de compréhension de
l’art urbain est exposée au regard de tous.
Si véritable oeuvre artistique il y a, son
caractère éphémère en renforce la fragilité
et l’urgence. Dans leurs interviews, la
plupart des pochoiristes reconnaissent
que la nature de leurs interventions va de
pair avec la probabilité d’une disparition
rapide et radicale. Au passage, plusieurs
commentaires et essais font aussi allusion
au fait que le nettoyage des pochoirs
peut être considéré comme un art (ou
Et puis, s’il reste ici une dernière chose
à mentionner... C’est que, une fois
l’habitude prise de repérer les pochoirs
dans les rues de Bruxelles, de les
observer et de les apprécier, l’expérience
de se déplacer dans la ville ne se vit plus
jamais comme avant !
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15
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5
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Serge Louis désire dédicacer cette étude à Eléonore et Cassandre,
deux jeunes filles fantastiques.
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Wohlbergs, Benjamin. Urban Illustration
Berlin. Gingko Press, Corte Madera, 2007.
Les auteurs mentionnent également
Red Fox Press en Irlande qui publie
des éditions limitées et artisanales de
livres sur les pochoirs. Parmi les titres
consultés : London Stencils, Dublin
and Galway Stencils, Istanbul Stencils,
Stencils in South Korea et Stencils on
Paper.