Comment la Suisse lutte contre le blanchiment d`argent
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Comment la Suisse lutte contre le blanchiment d`argent
Septembre 2001 Comment la Suisse lutte contre le blanchiment d’argent Table des matières Page Question 1 1 Des capitaux d’origine criminelle ? Non, merci ! Qu’est-ce que le blanchiment d’argent ? 2 Question 2 Quelle est la réglementation relative à la lutte contre le blanchiment d’argent ? 4 Question 3 Qui est le partenaire contractuel et comment vérifier son identité ? 5 Question 4 Qu’est-ce qu’un ayant droit économique et comment l’identifier ? 6 Question 5 En comparaison internationale, à quel degré la réglementation appliquée en Suisse est-elle efficace ? 7 Annexe 9 Lois et normes visant à la lutte contre le blanchiment d’argent Des capitaux d’origine criminelle ? Non, merci ! Parmi toutes ses priorités, la place financière suisse met un point d’honneur à soigner son image de marque. La Suisse a donc tout intérêt à tenir éloigné de sa place financière tous capitaux d’origine criminelle. En matière de blanchiment d’argent, elle a mis en place un dispositif préventif performant qu’elle adapte régulièrement en fonction des nouvelles évolutions. La place financière fait ainsi savoir qu’elle considère toute tentative de blanchiment d’argent comme une menace pour sa bonne réputation. Dans ses rapports, le « Groupe d’action financière sur le blanchiment de capitaux (GAFI) », un organisme indépendant, constate que la Suisse a mis en place des mesures extrêmement efficaces contre tout abus d’origine criminelle. D’autres pays et institutions se sont d’ailleurs inspirés de certains instruments du système suisse. Nous citerons notamment le «1988 Code of Conduct on the Prevention of Money Laundering » du Comité de Bâle, les 40 recommandations du GAFI et la directive de l’UE contre le blanchiment d’argent. Les réponses aux questions qui vont suivre démontrent bien qu’en termes de lutte anti-blanchiment la Suisse prend également très à cœur son rôle de première place financière mondiale. Bâle, septembre 2001 Association suisse des banquiers 1 1 Qu’est-ce que le blanchiment d’argent ? Qualifiés d’argent « sale », les capitaux d’origine criminelle sont entachés d’une réputation douteuse et d’un passé suspect que les criminels ont tout intérêt à « blanchir ». C’est en cela que consiste le blanchiment d’argent : dissimuler l’origine criminelle de ces fonds en les réinjectant discrètement dans le circuit économique légal. Le but de la manœuvre est d’empêcher que l’Etat ne retrouve la trace de cet argent et ne puisse le saisir. Souvent étroitement associé au trafic de stupéfiants, le blanchiment de capitaux peut également émaner de bien d’autres crimes, comme les détournements de fonds, la corruption, les kidnappings, le chantage ou le trafic d’êtres humains, pour n’en citer que quelques-uns. Les banques ont pris toute une série de dispositions pour éviter d’être abusées et entraînées malgré elles dans des activités de blanchiment. Ainsi la Commission fédérale des banques a-t-elle dressé un inventaire complet des indices permettant de soupçonner une éventuelle opération de blanchiment de capitaux. Les banques doivent prendre des mesures spéciales si la présence de ces indices l’exige. 2 Selon les directives de la Commission fédérale des banques du 26 mars 1998, des transactions présentent des risques particuliers de blanchiment – lorsque leur construction indique un but illicite, lorsque leur but économique n’est pas reconnaissable, voire lorsqu’elles apparaissent absurdes d’un point de vue économique ; – lorsque les valeurs patrimoniales sont retirées peu de temps après avoir été portées en compte ( compte de passage ), pour autant que l’activité du client ne rende pas plausible un tel retrait immédiat ; – lorsqu’elles sortent des activités usuelles ou du cercle de clients usuel d’une banque ou d’un comptoir déterminé d’une banque et que l’on ne parvient pas à comprendre les raisons pour lesquelles le client a choisi précisément cette banque ou ce comptoir pour réaliser son affaire ; – lorsqu’elles ont pour conséquence qu’un compte, resté jusque-là largement inactif, devient très actif sans que l’on puisse en percevoir une raison plausible ; – lorsqu’elles ne sont pas compatibles avec les informations et les expériences de l’intermédiaire financier concernant le client ou le but de la relation d’affaires. Enfin, doit être considéré comme suspect tout client qui donne à l’intermédiaire financier des renseignements faux ou fallacieux ou qui, sans raison plausible, refuse de lui fournir les informations et les documents nécessaires, admis par les usages de l’activité concernée. 3 2 Quelle est la réglementation relative à la lutte contre le blanchiment d’argent ? La Suisse s’est dotée d’un certain nombre de règles en matière de lutte contre le blanchiment de capitaux. C’est ainsi que deux dispositions du code pénal punissent aussi bien le blanchiment d’argent que le défaut de vigilance lors de l’acceptation de valeurs patrimoniales, dont l’effet est de favoriser le blanchiment. Par ailleurs, la Suisse a adopté le 1er avril 1998 une loi fédérale sur le blanchiment d’argent aux termes de laquelle non seulement les banques mais aussi tous les intermédiaires financiers ont l’obligation de vérifier l’identité de leurs clients et d’identifier les ayants droit économiques des valeurs patrimoniales qui leur ont été confiées. En cas de soupçon fondé portant sur l’existence d’une opération de blanchiment d’argent, ils doivent immédiatement aviser les autorités compétentes et bloquer les avoirs suspects. De leur côté, les directives de la Commission fédérale des banques relatives à la prévention et à la lutte contre le blanchiment de capitaux définissent les mesures et le comportement que doivent adopter les banques en présence de transactions inhabituelles ou de soupçon de blanchiment. Enfin, les établissements bancaires s’appuient depuis plus de vingt ans sur la Convention relative à l’obligation de diligence des banques (CDB) et sur ses dispositions pour le moins détaillées en matière de vérification de l’identité des clients et d’identification des ayants droit économiques – une convention qui a ouvert la voie à la Loi sur le blanchiment d’argent. 4 3 Qui est le partenaire contractuel et comment vérifier son identité ? Les banques ont le devoir de procéder à la vérification de l’identité de leurs partenaires contractuels – autrement dit de leurs clients – avant d’ouvrir avec eux une relation d’affaires. Cette disposition vaut en particulier pour les personnes qui souhaitent ouvrir un compte ou un dépôt auprès de la banque. Aux fins d’identification, le client doit produire une pièce d’identité (passeport, carte d’identité ou permis de conduire) dont la banque conservera une copie. Lorsque les partenaires contractuels ne se présentent pas en personne à la banque, la relation d’affaires est nouée par correspondance. Pour ce faire, la banque contrôle tout d’abord l’adresse du domicile du client par envoi postal. Si ce dernier habite à l’étranger, elle exigera en outre une authentification ou une attestation d’authenticité de sa signature. Enfin, si le partenaire contractuel est une personne morale, la banque vérifiera son identité en demandant un extrait récent du registre du commerce ou, pour les sociétés étrangères, un document équivalent. 5 4 Qu’est-ce qu’un ayant droit économique et comment l’identifier ? La banque ne saurait se contenter de vérifier l’identité de son seul partenaire contractuel. Elle doit également savoir si les valeurs patrimoniales apportées par le client lui appartiennent en propre ou si elles appartiennent à un tiers. Autrement dit, elle doit être en mesure d’identifier leur ayant droit économique réel. Certes, la banque peut présumer que le partenaire contractuel et l’ayant droit économique ne font qu’un. Cette présomption est toutefois détruite si la banque a des doutes ou dispose d’indices indiquant que le cocontractant n’est pas identique à l’ayant droit économique. Dans ces conditions, la banque doit demander à son partenaire contractuel qui est l’ayant droit économique. En règle générale, elle utilise pour ce faire un formulaire appelé formulaire A, qu’elle fera signer par le client. Lorsque la relation d’affaires est nouée par correspondance ou lorsque le partenaire contractuel est une société de domicile, la banque a l’obligation de demander systématiquement qui est l’ayant droit économique des valeurs patrimoniales. 6 5 En comparaison internationale, à quel degré la réglementation appliquée en Suisse est-elle efficace ? La Convention de diligence des banques et les directives relatives au blanchiment de capitaux de la Commission fédérale des banques (CFB) ont encouragé d’autres pays à se pencher à leur tour sur la question et à adopter certaines dispositions. Dans le cadre de son autoréglementation partielle, la Suisse ajuste régulièrement ses directives en fonction des diverses évolutions. Elle dispose ainsi aujourd’hui d’un cadre réglementaire moderne avec une mise en œuvre efficace. La directive de l’Union Européenne contre le blanchiment d’argent n’est actuellement applicable qu’aux établissements financiers et de crédit et ne concerne que les fonds liés au trafic de drogue. Quant aux législations instaurées par les différents pays, elles prennent le plus souvent modèle sur la réglementation de l’UE actuellement en vigueur sans toutefois être aussi rigoureuses qu’en Suisse. En France notamment, elles ne régissent pas l’activité des avocats. Le projet en faveur d’une directive de l’UE plus efficace prévoit l’instauration de conditions-cadre en matière de lutte contre le blanchiment d’argent. Celles-ci devraient s’apparenter à la jurisprudence suisse. Mais, la question de savoir si les avocats et les notaires doivent être soumis ou non à ces directives n’est pas encore tranchée. Comparée aux Etats-Unis, la législation suisse remporte encore la palme. Aux Etats-Unis, ce n’est que depuis peu que les maisons de titres sont assujetties aux règles du « know your customer ». Quant à l’adoption du principe « Politically exposed persons », la réglementation suisse a encore fait office de référence. De même, l’expérience suisse est à l’origine de la dernière tendance qui consiste à remplacer l’obligation systématique de renseigner, applicable aux transactions en 7 espèces, par une obligation limitée aux activités suspectes. Aujourd’hui encore, le système de prévention suisse reste le plus performant en particulier en termes d’identification de l’ayant droit économique dans le cas des sociétés de domicile (entreprises, établissements, fondations, trusts/entreprises fiduciaires, etc.) n’exerçant pas dans le pays où se trouve leur siège une activité de commerce ou de fabrication ou toute autre activité exploitée sous la forme commerciale. Il s’agit notamment des fondations liechtensteinoises, des trusts de droit commun, des entreprises de Panama, des Iles Vierges et d’autres sociétés extraterritoriales. Les banques suisses ont réussi à obtenir qu’une structure offshore de ce type doive désormais fournir à l’établissement bancaire des informations fiables sur l’ayant droit économique du patrimoine pour pouvoir prétendre à l’ouverture d’un compte ou d’un dépôt. Par contre, une société de domicile ne peut pas se présenter elle-même comme ayant droit économique. Si d’autres marchés financiers, tels les Etats-Unis et la Grande-Bretagne, exigent l’identification des ayants droit économiques lorsqu’il s’agit de représentants notoires, elles en font néanmoins abstraction dans le cas des sociétés de domicile. 8 Lois et normes visant à la lutte contre le blanchiment d’argent 9 101 Lois et normes applicables en Suisse En Suisse, la lutte contre la criminalité dans le secteur financier est régie par la Loi fédérale concernant la lutte contre le blanchiment d’argent dans le secteur financier, la Convention de diligence des banques, les Directives relatives à la prévention et à la lutte contre le blanchiment de capitaux de la Commission fédérale des banques et le Code pénal. Ces textes s’articulent autour de différents axes : obligation d’identification, d’organisation et de communication, de même que blocage des avoirs. Législation sur la lutte contre le blanchiment d’argent La Loi fédérale concernant la lutte contre le blanchiment d’argent dans le secteur financier (Loi sur le blanchiment d’argent, LBA, en vigueur depuis le 1er avril 1998) s’applique à tous les intermédiaires financiers qui, à titre professionnel, acceptent des valeurs patrimoniales appartenant à des tiers, c’est-à-dire les banques, les directions de fonds, les négociants en valeurs mobilières, les institutions d’assurance, les avocats, les gestionnaires de fonds indépendants, les fiduciaires, les conseillers en placement, les bureaux de change. La loi sur le blanchiment d’argent prévoit des obligations de diligence tirées de la Convention de diligence des banques et des directives sur le blanchiment de capitaux de la Commission fédérale des banques. La Convention relative à l’obligation de diligence des banques (CDB) est en vigueur depuis 1977 et est soumise à révision tous les cinq ans. La version actuelle est datée du 1er juillet 1998. La CDB contient des normes en vue de la vérification de l’identité du cocontractant et, par10 tant, de l’identification de l’ayant droit économique. En cas de violation de la convention, l’amende conventionnelle peut atteindre jusqu’à 10 millions de CHF. Les Directives relatives à la prévention et à la lutte contre le blanchiment de capitaux de la Commission fédérale des banques (Circ.CFB, en vigueur depuis 1992, version révisée du 26 mars 1998 en vigueur depuis le 1er juillet 1998) définissent, notamment, les critères présidant à une organisation interne adéquate des banques et des négociants en valeurs mobilières. Ces dispositions fixent, en tant qu’aide interprétative du droit pénal, la norme que les banques et les négociants en valeurs mobilières doivent observer afin de présenter les « garanties d’une activité irréprochable » au sens de la loi sur les banques et de la loi sur les bourses. En cas de transactions d’un montant anormalement élevé ou lorsque l’intermédiaire financier constate l’existence d’indices de blanchiment de capitaux, les intermédiaires financiers doivent procéder à des clarifications supplémentaires. Par ailleurs, les banques et les négociants en valeurs mobilières sont tenus d’édicter des instructions internes, de veiller à la formation du personnel et de mettre sur pied un service interne de lutte contre le blanchiment de capitaux. Il importe de faire preuve d’une attention particulière lorsque l’intermédiaire financier sait ou présume que les fonds proviennent de la corruption ou de détournements de fonds publics, surtout lorsqu’il s’agit d’avoirs appartenant à des personnes exerçant des fonctions publiques importantes pour un Etat étranger ou à des sociétés qui leur sont proches. L’entrée en relations d’affaires avec de telles personnes présuppose la décision préalable de la direction. Droit pénal Depuis 1990, en vertu du droit pénal, est puni celui qui aura commis un acte propre à entraver l’identification de l’origine, la découverte ou la confiscation de valeurs patrimoniales dont il savait ou devait présumer qu’elles provenaient d’un crime (blanchiment d’argent, art. 305bis CP). Les intermédiaires financiers professionnels doivent connaître leurs clients selon le principe « know your customer ». Celui qui omet d’identifier l’ayant droit économique est punissable (art. 305ter, al. 1 CP). En présence d’indices fondant le soupçon que les valeurs patrimoniales proviennent d’un crime, les instituts financiers ont le droit d’en informer les autorités sans pour autant violer le secret bancaire (art. 305ter, al. 2 CP). Les nouvelles dispositions pénales sur la corruption (art. 322ter – 322octies CP) sont en vigueur depuis le 1er mai 2000. Sont désormais punissables les corruptions active et passive d’agents publics suisses, l’octroi et l’acceptation d’avantages, de même que la corruption active d’agents publics étrangers. 11 2 Lois et normes applicables au niveau international Législation Au niveau international, les autorités judiciaires engagent une coopération en matière pénale. C’est ainsi que, en vertu de la Loi fédérale sur l’entraide internationale en matière pénale de 1983, la Suisse accorde une entraide pénale aux autorités des Etats étrangers. Les procédures permettent de bloquer des avoirs et, le cas échéant, de les transmettre aux instances étrangères concernées. L’entraide en matière pénale se fonde essentiellement sur les principes de la double incrimination, de la spécialité et de la proportionnalité. En vertu du principe de la double incrimination, les tribunaux suisses n’appliquent des mesures de contraintes – comme la levée du secret bancaire – que lorsque l’acte poursuivi est punissable aussi bien aux termes du droit de l’Etat requérant que du droit suisse. Le principe de la spécialité prévoit que les informations obtenues par voie d’entraide ne peuvent être utilisées que dans le cadre de la procédure pénale pour laquelle l’entraide est fournie. 12 Autorégulation Les deux grandes banques suisses, de concert avec neuf instituts financiers internationaux, Transparency International et le professeur Mark Pieth, ont élaboré des normes en matière d’obligation de diligence liant les cosignataires au niveau international. Concrètement, ces normes constituent le fondement des principes connus sous le nom de Wolfsberg Anti Money Laundering Principles. Au contraire des réglementations applicables au niveau suisse, les principes de Wolfsberg ne prévoient ni sanction ni amende. Chaque institut financier décide d’adhérer ou non à ces normes d’autorégulation et, le cas échéant, s’engage à les appliquer dans le monde entier, permettant ainsi de combler une lacune du dispositif défensif international. « La Suisse est représentée dans les milieux internationaux s’occupant de la lutte contre le blanchiment d’argent où elle obtient d’excellentes notes » Kaspar Villiger, Conseiller fédéral, dans « Cash », 2. 3. 01 « Les banques ont un intérêt évident à éviter les criminels et à ne pas accepter de l’argent de provenance criminelle. Le renom est le bien le plus appréciable pour une banque. » Impression vontobel ag Composition typolitho ag Design Gottschalk+Ash Int’l Texte 1–5 en collaboration avec AIG Private Bank SA Conception Steiner Kommunikationsberatung et Gottschalk+Ash Int’l Urs Ph. Roth, Président du Comité exécutif, Association suisse des banquiers, lors de la conférence de presse du 7. 2. 01 Association suisse des banquiers Aeschenplatz 7 Case postale 4182 CH-4002 Bâle T+ 41 61 295 93 93 F + 41 61 272 53 82 office@sba.ch www.swissbanking.org