PSA ET PATHOLOGIE PROSTATIQUE BENIGNE : ETUDE ANATOMO-CLINIQUE RETROSPECTIVE RESUME ABSTRACT

Transcription

PSA ET PATHOLOGIE PROSTATIQUE BENIGNE : ETUDE ANATOMO-CLINIQUE RETROSPECTIVE RESUME ABSTRACT
J Maroc Urol 2010 ; 18 : 33-37
ARTICLE
ORIGINAL
PSA ET PATHOLOGIE PROSTATIQUE BENIGNE :
ETUDE ANATOMO-CLINIQUE RETROSPECTIVE
A. HEDDAT, M. EL BAGHOULI, M. EL MOUZDAHIR, R. ABOUTAIB, M. DAKIR, R. RABII, F. MEZIANE
Service d’Urologie, CHU Ibn Rochd, Casablanca, Maroc
RESUME
ABSTRACT
L’antigène spécifique de la prostate, PSA, est considéré
comme le marqueur tumoral de référence de
l’adénocarcinome prostatique. Cependant pour des valeurs
limitant une zone grise entre 4 et 10 ng/ml du taux sérique
de la PSA, les pathologies malignes et bénignes se superposent,
d’où l’intérêt de notre travail pour essayer au mieux d’expliquer
cette variation de la PSA au cours de l’hyperplasie bénigne
de la prostate. En fait, si l’âge des patients et le poids de la
résection sont reconnus classiquement comme facteurs
explicatifs de cette variation, le rôle de l’inflammation
infraclinique est en cours d’évaluation.
PROSTATE SPECIFIC ANTIGEN AND BENIGN PROSTATIC
PATHOLOGY : RETROSPECTIVE HISTOLOGICAL AND
CLINICAL STUDY
The Prostate specific antigen, PSA, is considered like the
tumor marker of reference in prostatic adenocarcinoma.
However for values limiting a grey zone between 4-10 ng/ml
of serum PSA, benign and malignant diseases are
superimposed. From where the interest of our work to try to
better explain the variations in PSA during benign prostatic
hyperplasia. If the patient’s age and weight of resection are
recognized classically, the role of sub-clinical inflammation
is still being evaluated.
Mots clés : hypertrophie bénigne de la prostate ; corrélation ;
antigène spécifique de la prostate
Key words : benign prostatic hyperplasia ; correlation ; PSA
Correspondance : Dr. A. HEDDAT. Service d’Urologie, CHU
Ibn Rochd, Casablanca, Maroc. E-mail :
abdeljalilheddat@yahoo.fr
INTRODUCTION
Le but de ce travail est d’étudier, chez 100 patients
présentant une hyperplasie bénigne de la prostate (HBP)
traitée chirurgicalement, le taux de PSA sérique et de
chercher des corrélations possibles entre ce taux et
certains paramètres cliniques et anatomo-pathologiques.
Depuis une dizaine d’années, l’antigène spécifique de
la prostate (PSA) est considéré comme le marqueur
tumoral de référence de l’adénocarcinome prostatique
et pour certains comme le meilleur marqueur tumoral
en carcinologie humaine [1].
MATERIEL ET METHODES
Il s’agit cependant d’un marqueur spécifique d’organe
[2, 3] mais non spécifique du cancer, et son utilité dans
le dépistage précoce de l’adénocarcinome prostatique
est encore limitée par son manque de sensibilité et de
spécificité [4]. En effet, 20% des patients présentant
un cancer ont un taux de PSA sérique dans les limites
de la normale [5]. De plus, certaines conditions bénignes
comme l’hyperplasie prostatique [6] et les épisodes de
prostatites [7, 8, 9] peuvent entraîner une augmentation
du taux de PSA. Certains auteurs ont également mis
en évidence une association entre l’inflammation infraclinique de découverte histopathologique et le taux
de PSA sérique [10, 11].
Nous avons réalisé une étude rétrospective concernant
des patients ayant bénéficié d’un traitement chirurgical
d’exérèse de HBP dans le Service d’Urologie du CHU
Ibn Rochd de Casablanca, entre janvier 2005 et
décembre 2007. Les critères d’inclusion étaient :
- Dosage du PSA sérique total effectué dans les trois
mois précédant l’intervention chirurgicale, avant toute
manipulation (toucher rectal, sondage, endoscopie
transurétrale…).
- Dosage fait par immunométrie (chimioluminescence),
Elisa et immunoradiométrie.
-33-
A. HEDDAT et coll.
PSA et pathologie prostatique bénigne : étude anatomo-clinique rétrospective
- Absence de preuve ultérieure clinique ou histologique
d’adénocarcinome prostatique ou de néoplasie intraépithéliale de haut grade.
C. Etude anatomopathologique
- Résection endoscopique transurétrale (RTU) à
caractère complet.
Le poids moyen était de 54,6 g pour une médiane de
45 g avec un minimum de 4 g et un maximum de
205 g. L’écart type était de 45.
1. Poids de la pièce d’adénomyomectomie ou ensemble
des copeaux de RTU
100 observations dont 75 cas d’adénomectomie par
voie haute (AVH) et 25 cas de RTU ont été sélectionnées.
Les caractéristiques du poids de la résection en fonction
du type d’intervention chirurgicale sont détaillées dans
le tableau II :
RESULTATS
Tableau II. Poids de la résection en fonction du type d’intervention
A. Age des patients
La moyenne d’âge était de 70 ans au moment de
l’intervention chirurgicale avec un minimum de 48 ans
et un maximum de 87 ans.
B. Taux de PSA sérique pré-opératoire
Le taux moyen de PSA sérique pré-opératoire était de
9,7 ng/ml pour une médiane de 8 ng/ml avec un
minimum de 0,5 ng/ml et un maximum de 46 ng/ml.
L’écart type était de 8,8.
Moyenne
10,9
7
Médiane
8,8
4,6
Ecart type
9,3
6,9
Moyenne
71,9
18,2
Médiane
62
10
Ecart type
44,5
15,8
Sur un ensemble de 100 pièces d’adénomectomie ou
de RTU, nous avons trouvé 15 pièces avec signe
inflammatoire, soit 15% de la population étudiée.
D. Analyse des résultats
Tableau I. Répartition du taux moyen de PSA
sérique en fonction du type d’intervention chirurgicale
Taux de PSA sérique moyen
des patients ayant bénéficié
d’une RTU (ng/ml)
Poids des RTU (g)
2. Etude de l’inflammation
La répartition du taux moyen de PSA sérique en fonction
du type d’intervention chirurgicale est détaillée dans
le tableau I.
Taux de PSA sérique moyen
des patients ayant bénéficié
d’une AVH (ng/ml)
Poids des AVH (g)
1. Etude statistique entre le taux de PSA sérique préopératoire et les différents paramètres étudiés
1.1. Taux de PSA et âge des patients
Nous avons observé une corrélation significative entre
le taux de PSA sérique et l’âge des patients (p = 0,0014)
(fig. 2).
La valeur normale du taux de PSA que nous avons
admise selon la technique de référence étant de 4
ng/ml, le pourcentage de patients présentant un taux
de PSA sérique pré-opératoire augmenté était de 74%.
Pour 33% des patients, ce taux était supérieur à
10 ng/ml.
PSA 60
(ng/m)
50
40
30
20
10
< 4 ng/ml
0
4-10 ng/ml
Age (ans)
> 10 ng/ml
26%
33%
Fig. 2. Répartition du taux de PSA sérique en fonction de l’âge
1.2. Taux de PSA et poids de la résection
Nous avons observé une corrélation significative entre
le taux de PSA sérique et le poids de la résection
(p = 0,0008) (fig. 3).
41%
Nous n’avons pas pu comparer l’évolution du taux PSA
après l’acte opératoire sur notre série d’étude.
Fig. 1. Répartition du taux de PSA sérique pré-opératoire
-34-
J Maroc Urol 2010 ; 18 : 33-37
DISCUSSION
PSA
(ng/m) 60
A. Données épidémiologiques
50
40
Peu de données épidémiologiques fiables sont à notre
disposition à l’heure actuelle [12]. L’estimation actuelle
de l’incidence de I’HBP dans les pays occidentaux est
de 10 pour 1000 patients par année au cours de la
5ème décennie et augmente à 60 pour 1000 patients
par année au cours de la 8ème décennie. De même,
on estime que la prévalence de l’HBP est de 14% au
cours de la 5ème décennie et atteint 40% au cours de
la 8ème décennie [13].
30
20
10
0
Poids (g)
Fig. 3. Répartition du taux de PSA sérique pré-opératoire
et le poids de résection
Le facteur épidémiologique prédominant est l’âge
comme cela a été démontré sur de larges séries
autopsiques. Le statut hormonal semble jouer un rôle
important. En effet, une période de stimulation
androgénique est nécessaire au développement de
l’HBP [14, 15].
1.3. Taux de PSA et inflammation (adénomite)
Pour les 15 cas d’adénomite retrouvés, nous avons
analysé le taux de PSA en fonction de l’âge puis on a
comparé avec les mêmes tranches d’âges pour les cas
sans signes histologiques d’inflammation (fig. 4). Nous
n’avons pas observé de corrélation significative entre
le taux de PSA sérique et l’existence d’inflammation
(p = 0,345).
PSA
(ng/m)
25
B. Relation entre le taux de PSA sérique et l’âge des
patients
Dans notre étude, la valeur sérique de PSA préopératoire augmentait avec l’âge des patients de façon
statistiquement significative (p < 0,05). Il s’agit d’une
notion classique largement étudiée dans la littérature
sur de grandes séries [16, 17, 18, 19, 20, 21].
PSA sans adenomite
PSA avec adénomite
20
15
Ces études ont permis de mettre en évidence une
augmentation du PSA sérique moyen pour chaque
décennie ainsi qu’une corrélation significative entre le
taux de PSA sérique et l’âge des patients.
10
5
Selon Oesterling [20, 22], le facteur le plus
probablement responsable de l’augmentation du taux
de PSA sérique avec l’âge est l’augmentation parallèle
du volume de la prostate avec l’âge. Selon cet auteur
[20, 22], il est donc important d’étudier la relation
entre le volume de la prostate et le taux de PSA sérique.
Dans son étude, ces deux variables étaient
significativement corrélées et il a pu calculer que le
taux de PSA sérique augmentait de 4% pour chaque
gramme de tissu prostatique supplémentaire. Mais,
toujours selon cet auteur, bien qu’il existe une corrélation
entre le taux de PSA sérique et le volume prostatique,
l’augmentation du taux de PSA sérique avec l’âge ne
peut être expliquée uniquement par l’augmentation du
volume de la prostate.
0
Age
61
62
63
64
65
66
67
68
73
74
Age (ans)
Fig. 4. Répartition du PSA en fonction de l’âge
avec et sans signes inflammatoires (adénomite)
2. Recherche de corrélation statistique entre les autres
variables
Nous avons observé une corrélation significative entre
le poids de la résection et l’âge des patients (p = 0,0227)
(fig. 5). Par contre, nous n’avons pas observé de
corrélation entre le poids de résection et l’inflammation
(p = 0,27) et entre l’âge et l’inflammation (p = 0,98).
Poids (g) 250
C. Relation entre le taux de PSA sérique et le poids de
la résection
Nous avons observé une corrélation statistiquement
significative entre le taux de PSA sérique et le poids de
la résection (p < 0,05).
Stamey [6] a constaté une élévation du taux de PSA
sérique de 0,31 ng dans les RTU et de 0,29 ng dans
les AVH pour un gramme de tissu d’HBP. Pour notre
série, nous ne disposions pas de taux de PSA
postopératoire, ce qui ne nous permet pas de vérifier
ce constat.
200
150
100
50
0
Age (ans)
Fig. 5. Répartition du poids de la résection
en fonction de l’âge des patients
-36-
PSA et pathologie prostatique bénigne : étude anatomo-clinique rétrospective
D. Etude de l’inflammation et de sa relation avec le
taux de PSA sérique
Dans notre série, nous n’avons pas observé de
corrélation significative entre le taux de PSA sérique
pré-opératoire et l’existence de signe inflammatoire
histologique.
Ce résultat a également été rapport en partie par la
littérature [23, 24].
Selon l’étude d’Irani et coll. [23, 24], il n’a pas été
observé de corrélation significative entre le taux de
PSA sérique et l’intensité de l’inflammation. Pour l’étude
de l’agressivité, Irani et coll. n’ont pas observé de
corrélation significative entre le taux de PSA sérique
et l’agressivité.
A. HEDDAT et coll.
10. Brawer MK, Rennels MA, Nagle RB, Schifman R, Gaines
JA. Serum prostate specific antigen and prostate pathology
in men having simple prostatectomy. Am J Clin Pathol
1989 ; 92 : 760-4.
11. Bangma CH, Kranse R, Blijenberg BG, Schröder FH. The
value of screening tests in the detection of prostate cancer.
Part I : results of a retrospective evaluation of 1726 men.
Urology 1995 ; 46 : 773-8.
12. Fourcade RO, Lanson Y, Teillac P. Les résultats du traitement
chirurgical de l’hypertrophie bénigne de la prostate.
Rapport du 87ème Congrès de l’Association Française
d’Urologie. Prog Urol 1993 ; 3 : 823-915.
13. Glynn RJ, Campion EW, Bouchard GR, Silbert JE. The
development of benign prostatic hyperplasia among
volunteers in the Normative Aging study. Am J Epidemiol
1985 ; 121 : 78-90.
14. Isaacs JT. Etiology of benign prostatic hyperplasia. Euro
Urol 1994 ; 25 : 6-9.
CONCLUSION
15. Weidinger S, Mayerhofer A, Raemsch R, Ring J, Köhn
FM. Prostate-specific antigen as allergen in human seminal
plasma allergy. J Allergy Clin Immunol 2006 ; 117 : 2135.
La pathologie bénigne de la prostate suit l’évolution
de la société en espérance de vie, d’où l’intérêt de
notre étude qui a montré que le taux de PSA sérique
était significativement lié à l’âge des patients et au
poids de la résection d’HBP, et qu’il n’y a pas de
corrélation significative entre l’inflammation de l’HBP
et le taux de PSA ; notions bien établies dans la
littérature.
16. Babaian RJ, Miyashita H. Evans RB. Ramirez EI. The
distribution of prostate specific antigen in men without
clinical or pathological evidence of prostate cancer:
relationship to gland volume and age. J Urol 1992 ; 147:
837-40.
17. Collins GN, Lee RJ, McKelvie GB, Rogers AC, Hehir M.
Relationship between prostate specific antigen, prostate
volume and age in the benign prostate. Br J Urol 1993;
71 : 445-50.
REFERENCES
1.
Vassella RL, Lange PH. Issues in the assessment of
prostate specific antigen immunoassays : An update.
Urol Clin North Am 1997 ; 24 : 261-8.
18. DaIkin BL, Ahmann FR, Kopp JB. Prostate specific antigen
levels in men older than 50 years without clinical evidence
of prostatic carcinoma. J Urol 1993 ; 150 : 1837-9.
2.
Allhoff EP, Proppe KH, Chapman CM, Lin CW, Pront
GR Jr. Evaluation of prostate specific acid phosphatase
and prostate specific antigen in identification of prostatic
cancer. J Urol 1983 ; 129 : 315-8.
3.
Allsbrook WC, Simms WW. Histochemistry of the
prostate. Hum Pathol 1992 ; 23 : 297-305.
19. De Antoni EP, Crawford ED, Oesterling JE, Ross CA,
Berger ER, Mc Leod DG, Staggers F, Stone NN. Age and
race-specific reference ranges for prostate specific antigen
from a large community-based study. Urology 1996 ; 48:
234-9.
4.
Brawer MK. The diagnosis of prostaric carcinoma. Cancer
1993 ; 71 : 899-905.
5.
Coley CM, Barry MJ, Fleming C, Wasson JH, Fahs MC,
Oesterling JE. Should medicare provide reimbursement
for prostate specific antigen testing for carly detection
of prostate cancer ? Part II : early detection strategies.
Urology 1995 ; 46 : 125-41.
6.
20. Oesterling JE, Jacobsen SJ, Chute CG, Guess HA. Girman
CJ, Panser LA, Lieber MM. Serum prostate specific antigen
in a community-based population of healthy men :
establishment of age-specific reference ranges. JAMA
1993 ; 270 : 860-4.
21. Oesterling JE, Jacobsen SI, KIee GG, Pettersson K, Piironen
T, Abrahamsson PA, Stenman UH, Dowell B, Lövgren T,
Lilja H. Free, compelexed and total serum prostate specific
antigen : the establishment of appropriate reference
ranges for their concentrations and ratios. J Urol 1995;
154 : 1090-5.
Stamey TA, Yang N, Hay AR, McNeal JE, Freiha FS,
Redwine E. Prostate specific antigen as a serum marker
for adencarcinoma of the prostate. N Engl J Med 1987;
317 : 909-16.
7.
Dalton DL. Elevated serum prostate specific antigen due
to acute bacterial prostatitis. Urology 1989 ; 33 : 465.
8.
Neal DE Jr, Clejan S, Sarma D, Moon TD. Prostate
specific antigen and prostatitis. Effect of prostatitis on
serum PSA in the human and nonhuman primate. Prostate
1992 ; 20 : 105-11.
9.
Papsidero LD, Wang MC, Valenzuela LA, Murphy GP,
Chu TM. A prostate antigen in sera of prostatic cancer
patients. Cancer Res 1980 ; 40 : 2428-32.
22. Oesterling JE, Cooner WH, Jacobsen SJ, Guess HA, Lieber
MM. Influence of patient age on the serum PSA
concentration : an important clinical observation. Urol
Clin North Am 1993 ; 20 : 671-80.
23. Irani J, Levillain P, Goujon JM, Bon D, Doré B, Aubert J.
lnflammation in benign prostatic hyperplasia : correlation
with prostate specific antigen value. J Urol 1997 ; 157 :
1301-3.
24. Irani J, Levillain P, Goujon JM, Gremmo E, Doré B, Aubert
J. Inflammation agressivity in benign prostatic hyperplasia:
correlation with prostate specific antigen density. J Urol
1996 ; 155 : 460A.
-37-