Pour en savoir plus - Page Perso de Paul THUNISSEN

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Cahiers d' information politique de Monsieur Paul
Une Trilogie Politique
pour le XXIème siècle.
Paul THUNISSEN
1er mai 2015
POUR UN AUTRE MODELE DE
GOUVERNANCE
DEMOCRATIE PARTICIPATIVE
POUR UN AUTRE MODELE DE
CROISSANCE
DECROISSANCE
POUR UN AUTRE MODELE DE
RECONNAISSANCE
REVENU1GARANTI
« La peur est une abdication de notre
souveraineté, une bonne information est une
arme,
dénoncer
l'injustice
politique,
économique, fiscale et sociale est un droit, s'y
opposer est un devoir »
Paul THUNISSEN
2
Avant Propos
Il y a plus de quarante ans que je m’intéresse à la
politique de mon pays sans pour autant briguer
l’une ou l’autre fonction. Pendant tout ce temps,
j’ai observé le jeu politique et ses intrigues.
Les événements qui ont marqué la fin du XX e siècle furent
nombreux : l'éclatement de l'URSS, la chute du mur de Berlin,
la réunification de l'Allemagne1 ou encore le glissement des
démocraties populaires vers des démocraties plus libérales. La
Pologne devint le modèle suivi par les opposants aux
démocraties populaires. « L'automne des peuples » était en
marche.
Mais la chute du mur de Berlin fut surtout l'occasion pour le
Bloc de l'Est de s'essayer à la démocratie. Cette transition
démocratique s'accompagna dans de nombreux cas d'une
montée en puissance des nationalismes, vecteurs de nouveaux
conflits, en ce compris dans les Balkans où les serbes, les
croates et les slovènes s'affrontèrent. La Yougoslavie cessa
d'exister. Les accords de Dayton2 entérinèrent la création de
cinq états tandis que la Tchécoslovaquie se scinda en deux états
indépendants : la Tchéquie et la Slovaquie.
1
De grandes manifestations des Allemands de l'Est provoquèrent la chute
du mur de Berlin le 9 novembre 1989. La réunification de l'Allemagne
eut lieu officiellement le 3 octobre 1990.
2 Dayton est une ville américaine (Ohio). Les accords de Dayton mirent
fin aux conflits inter-ethniques des Balkans.
3
Suite à ces événements, le monde libre – les américains en tête
– commença à sommeiller songeant que l'économie de marché
naissante dans les anciennes contrées communistes le mettait à
l'abri des conflits. Chacun s'est occupé de ses petites affaires
sans se rendre compte que d'autres économies émergeaient et
que l'islamisme radical faisait son grand retour.
Dans le même temps, profitant que leurs populations avaient
les yeux rivés ailleurs, l'Europe et les États-Unis scellèrent un
préaccord entre l'industrie financière mondiale et l'OMC, et le
développement de l'économie mondialisée aboutit à des
« Accords transatlantiques ». Nous en reparlerons au cours de
cet essai car les conséquences, à très court terme, risquent
d'être tragiques pour les démocraties européennes.
Le présent manifeste tient compte des transformations qui
s’opèrent, scrute le passé et propose une solution d'avenir.
Toutefois, tant que nous nous accrocherons à nos habitudes et à
nos certitudes, que nous refusons de nous informer et de nous
engager et que nous attachons plus d'importance à nos sécurités
qu'à nos libertés, rien ne sera possible.
Les événements que nous avons connu ces quarante dernières
années et les difficultés que les jeunes en décrochage scolaire
ou fraîchement diplômés affrontent déjà ou s'apprêtent à
affronter ne sont rien – absolument rien – en comparaison aux
événements qui se préparent, aux événements qui nous
imposeront un quotidien bien différent et nettement moins
agréable d'ici une dizaine d'années maximum.
4
Les autorités nous mentent par omission. Si nous ne
recherchons pas l'information nous-même, nous n'aurons plus
que nos yeux pour pleurer.
INFORMEZ-VOUS
CAR
NOTRE SYSTEME MONETAIRE S'ECROULERA
NOS LIBERTES N'EXISTERONT PLUS DU TOUT
LA CLASSE MOYENNE DISPARAITRA
LES PAUVRES SERONT MAJORITAIRES
L'INDUSTRIE FINANCIERE DOMINERA
LA DEMOCRATIE
DANS LES DIX ANNEES QUI VIENNENT
L'accueil d'un concept différent de celui imprimé dans les
mémoires aux fil des siècles et l'abandon des modèles partisans
à partir de programmes construits sans consultation avec la
population est indispensable et nécessite une capacité
d'ouverture aux idées neuves, un esprit critique et l'acceptation
du risque que représente l'engagement. Ce concept se présente
sous forme d'une trilogie visant à
•
•
•
favoriser un modèle de gouvernance réellement
démocratique,
développer un modèle de croissance réellement socioéconomique.
offrir un modèle de reconnaissance réellement
humaniste.
Paul THUNISSEN
5
LE CONSTAT
I.
Le retour des radicalismes religieux
11
II.
La dépression des démocraties
17
III.
L’institutionnalisation de l'injustice
27
IV.
L’État Social Actif ou le sabordage de la démocratie33
V.
La mondialisation
38
VI.
L 'assassinat des libertés individuelles
53
VII. Le manque de concertation entre les Communautés et
les régions
56
PREMIERE LOGIQUE
Une participation à la vie politique
I.
II.
II.
IV.
IV.
V.
VI.
La démocratie ! C'est quoi ?
Les fondements de la démocratie
Pourquoi défier la démocratie représentative ?
Les priorités de la démocratie participative
Les dix atouts de la démocratie participative
La démocratie participative : un outil
Prérequis en démocratie participative
61
70
75
77
82
84
89
DEUXIEME LOGIQUE
Une économie différente
I.
II.
III.
La croissance, c'est quoi ?
La croissance mondialisée
Conséquences de la croissance indifférenciée
6
97
100
103
IV.
Vers un autre modèle de croissance
106
TROISIEME LOGIQUE
un Revenu Garanti
I.
II.
III.
IV.
V.
Un système social et fiscal dépassé
Les fondements philosophiques du Revenu Garanti
Le débat
Les principaux courants
Redéfinir le travail
7
113
118
124
130
132
8
LE CONSTAT
9
10
I.
LE RETOUR DES
RADICALISMES RELIGIEUX
«Le XXIè siècle sera religieux ou ne sera pas ». Si l'on en croit
cette citation, attribuée à André Malraux, on aurait pu prévoir
le réveil des fanatismes et des radicalismes.
1.
Al-Qaïda
Le 29 décembre1992 deux bombes explosèrent à Aden
(Yémen). L'attentat fut revendiqué par le groupe islamique AlQaïda. Ce nom s'imprimera dans les mémoires. Ces terroristes
déclarent la guerre aux américains et à leurs alliés, et les
attentats se multiplient contre les intérêts américains en Libye,
Éthiopie, Arabie Saoudite, Pakistan, Philippines, Kenya,
Tanzanie, États-Unis, Tunisie, Bali, Afghanistan, Jordanie,
Yémen, Maroc, Irak, Turquie, Espagne, Égypte, Mauritanie,
Angleterre, Suède, Inde.
2.
Les Talibans
De 1996 à 2001, ignorant les droits humains les plus
élémentaires, , les talibans maintinrent l'Afghanistan sous le
joug d'une dictature religieuse fanatique. Des hommes, femmes
et enfants furent exécutés, mutilés et torturés pour des
« crimes » aussi dérisoires que d'avoir fait voler un cerf-volant,
porté du maquillage ou regardé la télévision.
11
Le 11 septembre 2001 les américains et le monde libre se
réveillent brutalement lorsqu'un attentat revendiqué par AlQaïda touche New York en plein cœur et fauche environ 3000
âmes. Un attentat avait déjà visé le centre d'affaires le 26
février 1993 faisant plus d'un millier de blessés et six morts.
3.
Le printemps arabe
Parallèlement à cet islamisme radical, les peuples arabes
refusent désormais la dictature et chassent leurs dirigeants.
C'est le « le printemps arabe » qui commença par la révolution
tunisienne le 17 décembre 2010 suivie par la révolution
égyptienne et celle du Yémen. A Bahreïn, les résultats furent
mitigés, tandis qu'en Syrie la révolution tourna en guerre civile
et la résistance de Bachar el-Assad fit plusieurs milliers de
morts en Syrie.
4.
L’État Islamique
Profitant du chaos en Syrie et en Irak ainsi que des conflits
inter-ethniques, un groupe islamique très radical, très organisé
et extrêmement dangereux, s'imposa peu à peu. Il règne
aujourd'hui sur un territoire grand comme la Belgique. L'État
Islamique, issu d'une branche de Al-Qaïda, vient d'y instaurer
un califat pur et dur. Il revendique enlèvements et assassinats et
est responsable de l'attentat de Charlie Hebdo le 7 janvier 2015.
Ils torturent, ils mutilent, ils tuent pour des « crimes » comme
celui d'avoir regardé la retransmission d'un match de football
entre l'Irak et la Jordanie lors de la coupe d'Asie des Nations.
12
C'est ainsi que treize enfants irakiens furent assassinés le 12
janvier 2015 à Mossoul. Du déjà vu !
4.
Boko Haram
Un autre groupe djihadiste poursuit l'objectif d'instaurer un
califat sur un État à cheval sur le Nigeria et le Cameroun. Le 7
mars 2015, deux mois jour pour jour après l'attentat de Paris, ce
groupe a prêté « allégeance » à l’État Islamique, ce qui en fait
le plus puissant groupe terroriste au monde.
Depuis la chute du mur de Berlin de nombreuses mutations ont
lieu et les défis que rencontrent les jeunes générations n'ont
plus rien en commun avec ceux de leurs pères.
5.
Causes du terrorisme
Il y a 1400 ans déjà que le terrorisme islamique fit son
apparition suite à l'assassinat en 656 du Calife Othmane.
Depuis cette époque, les arabes radicaux exterminent les
musulmans modérés et aujourd'hui les sunnites – radicalisés
depuis l'intervention américaine en Irak – se sont alliés à l’État
Islamique pour exterminer les chiites modérés.
Trois causes favorisent l'enrôlement des jeunes dans des filières
islamiques :
13
La pauvreté et le chômage
– La marginalisation des individus provoquée par
l’institutionnalisation des injustices sociales et fiscales, le
manque d'écoute des autorités, des stratégies subversives du
pouvoir,
– Le chômage croissant des jeunes provoqué par les
politiques libérales de l'emploi,
– La paupérisation galopante : un belge sur sept vit dans la
misère, et bientôt se sera un sur cinq. Ceux qui sont les moins
(in)formés succombent facilement à la démagogie de
l’extrémisme et aux fausses promesses des groupes terroristes.
L'Indifférence du pouvoir
« Si vis pacem, para bellum 3» (« si tu veux la paix, prépare la
guerre », ne semble pas être assimilé par nos autorités qui se
préparent peu à une offensive djihadiste probable et en
particulier les autorités belges. C'est ainsi qu'elles ont refusé un
visa à Vian Dakhil4 et trois yézidies5 d'Erbil, invitées par
l'Europe le 26 mars 2015 à témoigner devant un parterre de
parlementaires des atrocités commises sur les femmes par
l’État Islamique.
3
4
5
Adage attribué à l'auteur romain Végèce (fin du IVè et début du Vè
siècle.)
Représentante yézidie au Parlement Irakien
Le yézidisme est une religion de l'Iran antique et pratiquée encore de
nos jours par les kurdes.
14
La faiblesse du pouvoir
La faiblesse du pouvoir est illustrée par des situations comme
l'oisiveté forcée des jeunes, le manque d'écoute de nos
dirigeants, l'abandon des leviers de décision économique aux
multinationales et aux banques. l' invulnérabilité de l'industrie
financière que les dettes engraissent, l'impuissance des
structures démocratiques à faire face à la gouvernance
économique privée….Toutes ces situations forment le terreau
idéal à la radicalisation.
Comme les autorités ne se préparent pas, elles ne peuvent faire
face à toute éventualité. Le terrorisme se développe alors,
frappe qui il veut, quand il veut, où il veut. C'est un ennemi
silencieux, incolore, inodore, qui, comme le gaz, se répand
partout jusqu'à ce qu'une étincelle fasse voler en éclat nos
certitudes.
C'est donc à nous d'entrer en lice : Les citoyens européens et
leurs alliés doivent imposer à leurs dirigeants de mettre en
œuvre sans délai des stratégies militaires fortes pour enrayer
l'avancée de tous les mouvements radicaux qui minent peu à
peu les fondements même de nos libertés. La participation
active des citoyens à la vie politique pourrait, sinon enrayer le
phénomène, du moins le ralentir.
Le combat aura lieu simultanément sur plusieurs fronts puisque
nous nous ressaisirons du gouvernail de la démocratie
(démocratie participative), nous développerons des stratégies
innovantes en matière de politique économique, fiscale et
15
sociale (décroissance et revenu garanti), nous prendrons
conscience
– des peurs qui nous habitent en prenant conscience des effets
bénéfiques de la dynamique des groupes,
– de individualisme qui nous aveugle
– du radicalisme qui menace de l'intérieur et de l'extérieur,
– de l'oisiveté plus que le chômage
– des ravages de l'industrie financière en mettant en place des
systèmes réellement démocratiques.
Nous nous rendons trop peu compte de la fragilité de nos
démocraties et nous ne prenons pas suffisamment conscience
que rien n'est jamais acquis définitivement.
16
II.
LA DEPRESSION DE NOS
DEMOCRATIES
1.
La perte de la confiance
Il faut bien dire ce qui est : les démocraties sont en dépression
et on craint le suicide. Le taux de chômage élevé qui frappe les
européens et les américains, le discrédit qui pèse sur les
dirigeants et les institutions, les valeurs démocratiques
assiégées par une gouvernance économique qui en prend peu à
peu le contrôle… sont les symptômes les plus visibles.
Si on en croit nos dirigeants : « tout çà va s'arranger ».
D'accord, on a connu pire comme le pic du chômage en 1933 6
ou l'arrivée d'Hitler au pouvoir. Toutefois, les citoyens
européens ne doivent pas ignorer les tendances politiques
inquiétantes qui les accablent, car, en refusant de s'informer par
eux-même, il ne comprennent pas en quoi la gravité des
derniers développements politiques devraient les intéresser.
La rage taxatoire qui impose aux citoyens européens toujours
plus d'austérité, sans que la croissance ne reprenne des couleurs
est dommageable pour deux raisons :
– Comme politique économique, elle a aggravé la situation de
6
On l'a appelée « la Grande Dépression » qui dura de 1929 (Krach
boursier aux États-Unis) jusqu'à 1940. Le chômage explosa (24,9 % de
chômeurs en 1933) provoqué notamment par la faillite de 773
établissements bancaires aux États-Unis.
17
l'emploi sans restaurer la confiance, ce qui provoquera très
bientôt une récession suivie de l'effondrement de notre
système monétaire.
– Comme politique sociale, elle déchaîne la colère des
citoyens, car ce qu'ils perçoivent est qu'une injustice sociale
sans précédent les assaille. Ce qui va arriver donne des frissons
dans le dos quand on voit ce qui se prépare en Hongrie
notamment7.
Si les causes sont différentes de celles de la Grande
Dépression des années '30, le résultat est le même :
– La consommation chute : les gens savent de moins en moins
dépenser du fait des politiques d'austérité :
– L'investissement chute : les gens préfèrent garder leur biens
sous forme de monnaie plutôt que d'actifs productifs.
1.
Les réformes accentuent les inégalités
Revenons un instant chez nous, en Belgique : En 1970 eut lieu
la première réforme de l’État depuis sa création en 1830. En
décembre 2011 un accord institutionnel intitulé « Un état
fédéral plus efficace et des entités plus autonomes » prévoyait
déjà la sixième réforme.
Après avoir institutionnalisé trois communautés culturelles
(1970), après avoir créé les Région Wallonne et Flamande
(1980), après avoir créé la Région Bruxelles-Capitale (19881989), après avoir constitué la Belgique en État Fédéral (1993),
après avoir élargi les compétences régionales à l'agriculture et
7
Voir mon Cahier d'information Politique : « L'Europe des populistes ».
18
au commerce extérieur (2000-2001), voilà qu'on nous promet
aujourd'hui un état fédéral plus efficace et des entités encore
plus autonomes.
Ces différentes réformes ont aggravé les inégalités entre les
citoyens. Par ailleurs, comme on le verra au cours de cet essai,
leurs libertés individuelles et collectives ne sont plus garanties.
Pourtant, rien n'arrête les gouvernements qui poursuivent leurs
mensonges en distillant dans les esprits les plus vulnérables
que cela ira mieux et qu'on leur fasse confiance. Comment
pourrait-il en être autrement ? : Les citoyens qui, en fonction de
leur quotidien détiennent une fraction de la solution, n'ont pas
les moyens techniques pour la concrétiser.
2.
Le déni de tout idéal moral ou religieux
En filigrane, je m'aperçois, au-delà de ce qui est visible à l’œil
nu, que depuis les années '70, la Belgique, comme le reste de
l'Europe, perd peu à peu le sens de l'idéal. Aujourd'hui, chaque
belge est seul face à lui-même et ne peut plus compter sur la
société qui, en pleine dépression, vit sans avenir.
Cette société dépressive, nous l'avons engendrée nous-même en
valorisant l'individualisme et le narcissisme, et en dévalorisant
des lieux communs de réflexion tels que la morale ou la
religion.
La morale est vecteur de réflexion, de choix, de prise de
décision portés par des références enracinées dans le passé.
19
Confronter notre expérience à des réalités morales – laïques ou
religieuses – favorise la découverte de notre intériorité, de
notre « fort intérieur » et développe en nous l'art de choisir le
comportement qui convient le mieux. Ce n'est pas une limite,
mais c'est ce qui rend la vie possible. Sans morale, aucun choix
n'est possible.
Quoi qu'on en pense, la morale et la religion ne sont pas des
lieux privés, mais au contraire des lieux d'intégration sociale.
Tant que nous n'aurons pas compris cette vérité, nous serons
malades de solitude et incapables d'anticiper l'avenir.
La perte de la Foi, de la Confiance et de la Fidélité
.
Une société dépressive est une société qui n'a plus la Foi, qui
n'a plus Confiance en elle-même, et qui n'est plus Fidèle à ses
propres engagements. Foi, confiance et fidélité se traduisent en
latin par un même mot : fides.
Les gens doutent du sens de leur existence : pourquoi dois-je
vivre ? pourquoi devrais-je aimer, travailler ou mourir ? C'est
l'impasse.
Nous n'avons plus pour soucis que de veiller sur notre
épanouissement personnel. Notre société individualiste ne croit
plus en la dynamique de groupe, refuse la confrontation des
idées, et évite l'affrontement et l'engagement. Pourtant ne diton pas que du choc des idées jaillit la lumière.
A défaut de s'inscrire dans un réel choix de vie, en refusant de
20
choisir les contraintes de sa vie, nos centres d’intérêt se
réduisent, nos tissus sociaux s'appauvrissent et notre vie
devient tristesse.
3.
La fausse croyance des acquis sociaux
Comme je le disais précédemment, nous prenons trop peu
conscience que rien n'est jamais acquis définitivement.
Lorsqu’en 1973, j’ai décroché mon premier CDI, une déléguée
syndicale m'a très rapidement invité à m'inscrire dans un
syndicat et à payer ma cotisation, comme si cela coulait de
source. Nous avons abordé très rapidement le sujet des acquis
sociaux. En l'écoutant, je songeais que c'était une ineptie de
défendre des acquis sociaux car, sans très grande expérience,
j'avais la certitude que, dans un monde qui bouge, rien ne
saurait être acquis définitivement, que tout devait en tout temps
rester négociable. Je ne me suis donc jamais syndiqué.
Aujourd’hui, alors que je totalise soixante cinq printemps, je
me rends compte que je ne me suis pas trompé. Les syndicats
et le socialisme8, présents à tous les niveaux de pouvoir,
8 Le socialisme est un ensemble de courants d’idées, très divers, qui, en
principe — mais en principe seulement —devrait se concrétiser par une
organisation sociale et économique favorisant la justice et réduisant les
inégalités. En Wallonie le socialisme est défendu par trois partis
principaux :le Parti socialiste, le Cdh et les Écolos. D’autres partis plus
marginaux tels que le Parti Populaire (PP) et le Parti du Travail de Belgique
(PTB) défendent aussi le socialisme. On les place traditionnellement à
gauche de l’échiquier politique contrairement au libéralisme placé à droite.
Le parti Pirate ne se réclame ni de droite ni de gauche, car il défend des
21
constituent un frein à l’émergence de projets novateurs en
exerçant en permanence un bras de fer envers le patronat. Et çà,
c’est profondément injuste. La Belgique à besoin de
concertation et non de confrontation.
Qu’on ne me fasse pas dire ce que je n’ai pas dit: ce n’est pas
parce que le FMI et les agences de notation 9voudraient
l’abolition du système de l’indexation automatique des salaires
qu’il faut détruire, sans mure réflexion, ce que Joseph Wauters
et les générations suivantes ont construit. Je pense d'ailleurs
que la Belgique devrait se retirer du FMI, émanation de
l’économie ultra libérale que nous n’avons pas voulue mais que
nous n’avons pas combattue non plus, ainsi que des Agences de
Notation.
Ce n’est pas sous la pression d’organismes supranationaux que
nous devons modifier les mécanismes des acquis sociaux, mais
en fonction des différentes composantes de la Société Civile
Belge dans son ensemble, en prenant en compte les minorités
fragilisées par les écueils de la vie.
orientations transversales intéressant le plus grand nombre (droits
individuels, emploi, fiscalité, ...)
9 Ce nom désigne traditionnellement les institutions chargées par les États
de la notation financière des collectivités (États ou multinationales) désirant
être notées. La Belgique pourrait dès lors manifester son intention de ne
plus être notée. Ces agences sont partiellement à l’origine des dérèglements
du système économique mondial. Si en principe, ces institutions sont
indépendantes, certaines affaires retentissantes démontreraient le contraire.
(Affaire Enron, crise financière de 2007 à nos jours). Les agences de
notation les plus en vogue sont Fitch Ratings, Moody’s et Standard &
Poor’s.
22
3.
Le vide de pouvoir et la gouvernance privée
Dans une société individualiste qui fait le deuil de ses choix de
vie pour s'engoncer dans un confort matériel, les dirigeants sont
les premiers à montrer l'exemple.
En Belgique, comme dans la plupart des pays industrialisés, le
pouvoir écoute davantage la voix d'acteurs non élus (comme
les lobbies ou les multinationales) desquels ils se laissent
courtiser, que celui des aspirations populaires. Les décisions
politiques sont prises sans concertation avec les citoyens, et les
partenaires sociaux sont considérés à tort comme étant les seuls
représentants de la Société Civile dans son ensemble et des
citoyens dans leur diversité.
Les décisions économiques sont aux mains des multinationales,
des banques, des compagnies d'assurance, des sociétés de
télécommunication, ainsi que des puissantes institutions
supranationales telles que l'OTAN, l'ONU, les Banques
Mondiale, Européenne et des Règlements Internationaux, le
FMI, l' OMC et l’Europe. La monnaie est créée en grande
partie par les multinationales et les grandes banques 10 et la
masse monétaire est constituée à 93 % d'argent qui n'existe
pas11.
10 Autrefois, on « battait monnaie » uniquement à l’Hôtel de la Monnaie à
Bruxelles, sous la supervision de la Banque Nationale. La monnaie était
garantie par nos réserves en or qui aujourd'hui ont fondu par la volonté
de nos dirigeants.
11 Voir mon cahier d'informations politiques «Ces faux-monnayeurs qui
dirigent la Belgique et le monde».
23
Les élus ne tiennent compte que de la balance commerciale
sans se soucier un instant des charges trop lourdes qui pèsent
sur les épaules des PME ou des impôts répartis de manière
inéquitable.
Cette réalité trouve son origine dans
•
•
•
un vide de pouvoir,
une mauvaise gestion des finances publiques,
une gouvernance privée, donc des choix qui n’ont pas
été approuvés par les citoyens dont toutes les
sensibilités sont loin d’être représentées dans
l’hémicycle.
Année après année, les élus se sont rendus complices des
membres de l’exécutif, nommés par les présidents de partis et
non élus. Les uns et les autres ont voté et pris des décisions
contraires à l’intérêt des citoyens. La cupidité triomphe grâce à
l'inertie des pouvoirs publics et à la spéculation – qui ne
contribue en rien à l'assainissement des finances publiques –
qui supplante de plus en plus l'économie réelle.
Comme le pouvoir est peu à peu passé aux mains
d’organisations riches non élues, les différents gouvernements,
qui se succèdent en moyenne tout les an et demi 12, se sont
appauvris et n’ont d’autres choix pour boucler leur budget que
de faire payer les citoyens.
12 Depuis le 27 novembre 1948, la Belgique en est à son 41ème
gouvernement en soixante cinq ans. (Gouvernement Michel, formé suite
aux élections du 25 mai 2014)
24
Il y a sur les marchés financiers deux cent fois plus de
transactions purement financières que d'investissements
concrets. Le secteur financier représente désormais 6% du PIB
européen contre 4% à la création de l'euro13.
Aujourd'hui, lorsqu'on discute d'économie réelle, on se
surprend tout à coup à parler de finance spéculative.
13 Selon Robin Rivaton, chargé de mission d'un dirigeant de groupe, publié
le 27 décembre 2011 sur atlantico.fr (Comment a-t-on pu oublier l'économie
réelle à ce point).
25
III.
L'INSTITUTIONNALISATION
DE L'INJUSTICE14
1.
La sensation d'injustice
Quel que soit l’endroit du globe où nous nous situons, nous
ressentons toujours davantage l’injustice que la justice. Notre
jugement risque dès lors de s’altérer en occultant tout ce qui va
bien et en épinglant uniquement ce qui ne vas pas. Ceux qui
ont pris part à un procès d’assise le savent bien: pour rendre la
justice il est essentiel de faire taire ses sentiments, sensations
ou émotions qui fausseraient le jugement.
Alors que les sensations ou les émotions toujours
personnalisées se vivent dans le présent et peuvent monter en
puissance, la justice, toujours impersonnelle et contradictoire, a
besoin de temps… trop de temps.
Celui ou celle qui subit un événement qu’il considère comme
injuste ne peut prendre le temps (puisque les émotions ne
connaissent que l’instant présent), ce qui exacerbe encore plus
14 Dans l’esprit de nombreuses personnes l’injustice et l’iniquité veulent
dire la même chose. Hors il me semble qu'il existe une différence
fondamentale. Si l’équité se concrétise par le même traitement d’une
personne par rapport à une autre, la justice est de donner à chacun selon ses
besoins et d’exiger de chacun selon ses facultés. Il est intéressant de
différencier les deux notions puisque la manière de réduire les iniquités où
les injustices est différente. L’iniquité me semble plutôt objective tandis que
l’injustice est davantage subjective.
26
les tensions.
Il est donc essentiel de réduire au maximum les facteurs qui
favorisent ce que le peuple ressent comme injuste, car la
sensation populaire penche indiscutablement vers l’injustice et
l’iniquité.
L'injustice peut être politique, économique, sociale ou fiscale et
il serait hasardeux de les énumérer ici sans en oublier certaines
tant elles sont nombreuses.
Une question me taraude l'esprit : Comment est-ce possible que
les inégalités puissent se multiplier dans un contexte où
personne ne les accepte ? A mon sens, c'est parce que l'injustice
est un système organisé qui rend très difficile l'accession du
peuple au marches du pouvoir, et très lentes les prises de
décision en faveur de la population.
De ce fait, la société est inégalitaire et les inégalités
s'expliquent par « la nature des choses », c'est à dire que rien
n'y fait.. c'est comme çà. Elles ne se gomment que si un
impérieux intérêt économique le nécessite ou si une marée
humaine, inlassablement, tente de forcer les portes du
parlement.
Avouons que c'est assez rare puisque, dans une société
« démocratique » mais individualiste, chacun s'occupe de ses
petites affaires et que seule une poignée insignifiante de
citoyens sont déterminés à faire changer l'ordre des choses.
27
L'individualisme est un facteur qui favorise l'émergence de
nouvelles formes d'injustices.
2.
Nature des injustices
L'injustice politique
Comme on l'a déjà évoqué, aucune instance démocratique n'est
en mesure de lutter contre les décisions des multinationales et
de l'industrie financière. Et pourtant, les gouvernements
continuent à signer des accords15 en sciant la branche sur
laquelle les citoyens sont assis, sans leur accord.
L'injustice fiscale
Il n'y a pas plus inégalitaire dans son mode de calcul et son
application que le précompte immobilier qui, dans les faits, est
supporté aussi bien par le locataire que par le propriétaire. Et
comme les citoyens les plus injustement traités ne se
mobilisent pas, les autorités ne bougent pas non plus.
L'inégalité est également fortement marquée dans l'impôt sur le
revenu du travail ou du capital, l'impôt sur les successions,
l'impôt sur la spéculation, l'impôt des sociétés.
15 Je songe notamment aux Accords Transatlantiques en cours de
négociation.
28
L'injustice sociale
La paupérisation structurelle
Comme on le sait déjà, la paupérisation est un processus
d'appauvrissement de la population accepté par le
gouvernement comme une fatalité qui ne semble pas le heurter
outre mesure.
La paupérisation peut être de deux natures :
– la paupérisation absolue est la baisse des conditions de vie
généralement liée à la baisse des revenus. L'exclusion massive
des ayants droits au chômage, les licenciements massifs, les
fermetures d'entreprises et les difficultés administratives
énormes auxquelles sont confrontés les candidats à la création
de leur propre emploi fait croître la paupérisation de manière
exponentielle. Cela veut dire qu'aujourd'hui déjà la Belgique
devient une fabrique de pauvres.
– la paupérisation relative est l'accroissement de la pauvreté par
rapport aux autres couches sociales. Ce type de pauvreté est à
la base des inégalités sociales.
Le dernier rapport de l'OCDE16 indique que les 10 % des
personnes les plus riches des 34 pays de l'organisation gagnent
9,5 fois plus que les 10 % les plus pauvres17. Au début des
16 Le rapport 2012
17 L’Organisation de Coopération et de Développement Économique se
base sur le coefficient de Gini qui chiffre les inégalités de revenus de 0 à 1.
29
années '80, ce ratio était encore de 7 pour 1.
Si on en croit nos dirigeants, « c'est la faute à la crise » (on ne
sait pas au juste ce que c'est, la crise) , à la mondialisation, aux
avancées technologiques… c'est aussi en grande partie aux
mauvais choix des politiques publiques qui se concrétisent dans
une mauvaise redistribution des fruits de la croissance.
On voit déjà ici que les individus, la socio-politique, la
population et l'économie font partie d'un même système.
L'urgence d'une démocratie participative se fait sentir.
3.
Les bénéficiaires des injustices
Selon ce rapport "Dans beaucoup de pays, les revenus des plus
pauvres ont augmenté beaucoup plus lentement que celui des
riches durant les années prospères et ont même chuté lors des
périodes de récession". Le pourcent le plus riche des habitants
des pays développés est celui qui a le plus profité de ces années
de croissance économique. Cette inégalité se fait un peu moins
ressentie en Belgique du fait de sa petitesse, par rapport à ses
voisins l'Allemagne et la France. Toutefois, les mesures prises
Plus un pays se rapproche de 0 (scénario où tout le monde possède le
même revenu), plus il est égalitaire. Au contraire, plus son coefficient
est proche de 1 (une seule personne possède tous les revenus), plus
l’écart entre riches et pauvres est important. Notre pays est ainsi
passé d’un coefficient de 0,25 en 1985 à 0,26 en 2011, dernière année
étudiée pour la Belgique. La croissance belge des inégalités est donc
moindre que celle de la moyenne des pays de l’OCDE qui est passée
d’un coefficient de 0,29 à 0,32.
30
par le gouvernement Michel suite à la sixième réforme de
l’État sont de nature à faire de notre pays le pays le plus
inégalitaire de la zone euro.
Mais c'est l''industrie financière qui est de loin la plus grande
bénéficiaire des injustices fiscales. Non seulement, elle est
exempte de TVA, mais elle est aussi exempte d'impôt (ou elle
en paie si peu) sur ses transactions financières. Il faut savoir
que ces dernières ne contribuent pas au financement de
l'économie réelle. C'est pour cette raison qu'il avait été question
de prévoir une taxe Tobin18 plus ou moins compensatoire. Elle
aurait du être appliquée dans onze pays de l'Union au 1er
janvier 2016 mais il n'en sera rien. Les puissants lobbys
mettent tout en œuvre pour faire capoter les négociations.
Ce sont justement l'industrie financière et les multinationales
qui, de manière tout à fait légale, ne paient qu'une infime partie
du taux nominal officiel. Nos artisans et nos PME sont très
majoritairement défavorisés par rapport aux grandes enseignes.
Ces acteurs, soit font appel à des bureaux juridiques spécialisés
qui exploitent toutes les exonérations et exemptions possibles
pour éluder un maximum d'impôt, soit, par une écriture
comptable, déplacent artificiellement un maximum de profits
dégagés sur le territoire belge vers des états à la fiscalité plus
clémente.
18 Prix Nobel d’économie, l'américain James Tobin (1918-2002) suggéra
en 1972 de taxer les transactions monétaires internationales. Cette Taxe
est appelée aussi la Taxe Robin des Bois.
31
Certaines opérations pratiquées par des personnes physiques
échappent également à l'impôt, par exemple les plus-values
boursières. C'est tout à fait légal. Il n'est donc pas étonnant que
les personnes les plus actives dans les opérations boursières
s'enrichissent en payant moins d'impôt.
Par ailleurs lorsque les personnes physiques visées et les
sociétés doivent rendre des compte – souvent grâce à la
médiatisation de l'événement – elles « négocient » l'amende.
4. Conséquences des injustices
On sait depuis longtemps que les inégalités de revenus au sein
d'une population sont néfastes à la croissance économique. En
effet, ce sont les personnes structurellement à bas revenus qui
investissent le moins dans l'éducation et l'instruction de leurs
enfants, lesquels ne sortent que rarement de la spirale de la
pauvreté et de l'endettement et restent à vie à charge de la
collectivité.
La paupérisation de la classe moyenne – grande perdante de la
mondialisation – et l'accroissement de la fiscalité sont deux
facteurs clés supplémentaires du repli de l'indice de croissance.
Pourtant, des politiques bien conçues, même fiscales,
limiteraient ou renverseraient les inégalités et rendraient nos
communautés moins injustes et plus prospères".
32
IV.
L'ETAT SOCIAL ACTIF
OU LE SABORDAGE DE LA
DEMOCRATIE
1.
L’État Providence : plus de pouvoir d'achat
et moins de chômage
Au lendemain de la seconde guerre mondiale, nos
parlementaires instaurèrent l’État Providence, c'est à dire un
compromis qui visait à partager équitablement les fruits de la
croissance économique entre tous les belges. L'économie était
au service des individus et non l'inverse. Nos politiciens
veillaient à garantir la concertation et la sécurité sociale.
D'autre part, les politiques économiques étaient encadrées par
des accords divers plus ou moins équilibrés.
La concertation sociale, la sécurité sociale et les politiques
économiques de soutien de la demande ont contribué pendant
vingt-cinq ans à maintenir une excellente croissance et à
étendre les mécanismes de solidarité sociale.
Pendant les Trente Glorieuses, les Belges, mais aussi toute
l'Ancienne Europe, bénéficiaient d'un pouvoir d'achat élevé du
fait d'une croissance soutenue et d'un chômage marginal.
33
2.
L’État Social Actif : moins de pouvoir
d'achat et plus de chômage
En 1973, les accords de Bretton Woods19 furent rompus. Il ne
fallut attendre qu'une année avant la première crise
économique, cause de l'explosion des indemnités de chômage.
Du coup le modèle « État Providence » est jugé par les
décideurs politiques peu efficace. Il est donc remis en cause.
Les revenus de remplacement sont qualifiées de « dépenses
passives » qui n'inciteraient pas suffisamment les gens à
travailler. Ils ne seraient pas suffisamment actifs et il convient
donc de les « activer ». Ce n'est pas nouveau ! A chaque crise
économique, les grands responsables sont les chômeurs et les
étrangers. Cette conclusion évite de chercher les causes
ailleurs.
C'est le début de la modification du système qui se poursuit
encore aujourd'hui. Les chômeurs étaient coupables d'être
inactifs. Je me souviens de ces années où les chômeurs étaient
montrés du doigt dans la rue. Ils longeait les murs des bureaux
de la CAPAC20, gênés de quémander une aide sociale.
Au temps de l’État Providence, on considérait que le chômage
relevait d'un problème structurel alors que dès le début de
l’État Social Actif les chômeurs sont culpabilisés et les
autorités estiment que le chômage est dû à des comportements
19 Voir mon syllabus : « Ces faux-monnayeurs qui dirigent la Belgique et
le monde », sur mon site http://paulthunissen.be
20 Caisse Auxiliaire de Paiement de Allocations de Chômage
34
individuels.
« Si tu es chômeur c'est que tu n'es pas assez disponible, trop
peu actif, que tu manques de compétence ou de formation ».
Bref, si on est chômeur, ce n'est pas dû à l'inertie des acteurs
socio-économiques, mais à l'individu seul sur les épaules
duquel repose la responsabilité de son état.
Dès lors qu'on accepte ce qui précède, si d'aventure on perd son
emploi, il ne suffit plus de déclarer qu'on est « demandeur
d'emploi », mais qu'on est actif dans la recherche d'un emploi.
3.
Conséquence des nouvelles politiques de
l'emploi
Dès les années '70, cette approche favorisa l’émergence de
sociétés d'intérim qui, aujourd'hui, sont des passages obligés
pour obtenir un emploi. Les chômeurs sont de plus en plus
souvent contraints d'accepter des emplois temporaires (même
d'un jour), sans rapport avec leurs expériences, leurs attentes ou
leurs intérêts.
Les étudiants intègrent les discours quasiment prophétiques
selon lesquels çà ne leur sert à rien d'acquérir un savoir qui sera
vite dépassé ou qu'ils n'utiliseront jamais, qu'ils ne doivent plus
espérer un travail à vie et que la formation continue sera leur
lot pendant toute leur carrière. Il s'en suite des décrochages
scolaires ou même dans l'enseignement supérieur.
35
Le demandeur d'emploi doit adapter ses connaissances en
permanence aux besoins de l'économie, et donc s'activer à se
former.
Les salariés doivent anticiper leur licenciement et actualiser en
tout temps leurs compétences.
Finalement, que l'on soit jeune, demandeur d'emploi ou salarié,
on doit intégrer ce nouveau mot qu'est l' « employabilité ».
Le rôle des pouvoirs publics n'est donc plus d'imaginer des
politiques économiques au service des gens mais de formater
les gens, par la contrainte s'il le faut, en fonction des besoins de
l'économie. La conséquence logique de cette approche est
l'instauration d'une compétition et un renforcement de
l'individualisme.
La fonction des gens : se former, s'adapter en permanence aux
exigences du marché, chercher un emploi ou s'accrocher à celui
qu'on a. Seuls les gens, jeunes ou moins jeunes, qui restent
dans la compétition auront des chances de s'en sortir. Soit ils
seront qualifiés et classés en ordre utile, soit ils accepteront des
salaires très bas.
La fonction des acteurs de la formation : ils seront mis en
concurrence et leur objectif sera le développeront des offres les
plus rentables en termes d'insertion et les mieux adaptées aux
évolutions technologiques des outils de production.
36
La fonction de l'état est d'accorder aux entreprises les moyens
d'engager des salariés. Par tout une série de mécanismes, il
tente de baisser le coût du travail pour une entreprise.
La fonction très subsidiaire des entreprises est le
recrutement. Autant dire qu'elles ne recrutent que si il y a des
subventions à la clé et que le recrutement n'est pas une entrave
à leur enrichissement.
A chaque réforme de l’État, les discours annoncent un
changement bénéfique d’orientation politique, mais ils sont peu
crédibles dans un paysage où les majorités sont toujours
partiellement reconduites.
L’État Social Actif pousse les individus à se vendre en partant
du postulat que l’État Social Passif, entendez l’État Providence,
les a rendus inactifs ou inemployables. Pourtant personne ne
nie que, sous ce régime, les fruits de la croissance étaient
partagés entre tous les belges, ce qui nous a permis de
peaufiner un système social que toute l'Europe nous enviait.
(Aujourd'hui, il faut bien en parler au passé)
37
V.
LA MONDIALISATION
L'Europe dépressive dirige la politique des États. Bientôt, si on
n'y prend garde, elle sera elle-même dirigée par un
gouvernement mondial à la solde des multinationales et des
parastataux.
Aujourd'hui déjà les communes, les provinces, les régions,
l’État Fédéral, et même l'Europe, sont impuissants
politiquement, fiscalement, économiquement et socialement
face aux multinationales et aux banques.
1.
Les supports de la mondialisation
OMC
Les règles de l’OMC trouvent leur origine dans les accords du
cycle d'Uruguay (1986-1994)21 et sont complétés suite aux
nouvelles négociations entamées lors de la Conférence
Ministérielle de Doha en 200122. Ces accords accouchent sous
la pression de multinationales qui n’ont pour objectif que
21 Lors de ces réunions , environ soixante accords et décisions furent prises,
sans concertation avec les citoyens. Ils furent entérinés lors de la Réunion
Ministérielle de Marrakech en avril 1994
22 Lors de la 4ème Conférence Ministérielle de l'OMC à Doha, en 2001, le
Cycle de Doha a été officiellement inauguré et vise, du moins
officiellement, à améliorer les perspectives commerciales des pays en voie
de développement. Les mandats portent essentiellement sur l'agriculture et
la propriété intellectuelle.
38
l’enrichissement croissant des investisseurs et des partenairesactionnaires.
A titre d’exemple, on se souviendra des accords sur le droit de
la propriété intellectuelle23. Les signataires poursuivaient le but
louable d’offrir un cadre légal de protection des biens dans tous
les domaines de la technologie, mais, sous la pression des
firmes pharmaceutiques, il en fut autrement.
Ils permirent aux firmes pharmaceutiques de breveter les
médicaments et d’en garder le monopole pour une période de
minimum vingt ans, de les vendre à des prix inabordables à un
nombre croissant de citoyens européens et pratiquement tous
les citoyens africains. Cela se concrétise par le fait
qu’aujourd’hui un tiers de l’humanité n’a pas accès aux
médicaments et qu' à peine 8% sont consommés pour
l’ensemble des pays pauvres.
Il y donc la demi vérité qu'on déclare et l'autre demi vérité
qu'on tait24.
23 Les négociations du cycle d'Uruguay (1986-1994) ont abouti à la
signature d' un accord sur les aspects des droits de propriété
intellectuelle(ASPIC). Les brevets pharmaceutiques figurent parmi les
droits de propriété intellectuelle.
24 Voir mon cahier d'information politique : « Ces sophistes qui influencent
les politiques de la Belgique et du monde »
39
La BM, la BE et le FMI
L'objectif du FMI, de la Banque Mondiale ou de la Banque
Européenne étaient à l'origine de favoriser la coopération
économique internationale. Aujourd'hui, ces institutions
poursuivent l’objectif, du moins officiellement, d’instaurer la
prospérité dans tous les pays membres et de lutter contre la
pauvreté.
Dans les faits, il en est autrement : Ni le FMI, ni la Banque
Mondiale, ni la Banque Européenne, ni les banques centrales,
ni même les gouvernements ne se sont opposés aux
développements de produits financiers complexes, risqués et
toxiques. La faillite de la Grèce, les difficultés croissantes de
l’Espagne, du Portugal ou l’Italie en sont une résultante.
L’OMC et le FMI furent créés sans concertation avec leur
population, et aucun gouvernement n’en est plus maître. Ces
institutions ont pour mission d’alléger la souffrance des pays
émergents en leur venant en aide au niveau financier, mais à
quel prix ?
C'est suite à ce constat que l’Argentine prit ses distances avec
le FMI et refusa toute offre du FMI. Elle dévalua sa monnaie ce
qui permit de relancer l’économie et de rembourser le fonds.
Cela ne se fit pas sans mal puisque suite à la crise des années
2000, de nombreuses PME firent faillite.
De nombreuses sociétés coopératives créées par les ouvriers
licenciés contribuèrent au relèvement du pays. Cela a pris 10
40
ans, mais l’Argentine jouit aujourd'hui d’une croissance élevée.
Le taux de pauvreté a même diminué de moitié sans avoir
recours au FMI. Toutefois, la crise économique mondiale de
2010 les contraint à de nouveaux efforts.
Autre exemple : En 1995, le Brésil annonça qu’il ne
demanderait pas la prorogation de son accord avec le FMI.
Cette décision marque une étape importante dans un itinéraire
économique remarquable.
La reprise économique du Brésil s'explique grâce à des
réformes soutenues par les citoyens (notamment du système
fiscal et du régime de sécurité sociale), à l’approbation d’une
nouvelle loi sur les faillites, à l'amélioration de la
réglementation du marché des capitaux et des services d’utilité
publique. Toutes ces mesures ont concourus à maîtriser
l'inflation.
Le système de protection sociale a amorti les effets des chocs
extérieurs et allégé le coût temporaire des réformes. Ces
dernières portent aujourd’hui leurs fruits: croissance
spectaculaire du PIB, création d’un million et demi d’emplois,
septième puissance mondiale pour l’instant… car la France
risque bel et bien de perdre sa 6ème place.
Le 3 octobre 2011, lors de sa visite en Belgique, Dilma
Rousseff fit un petit cours d'économie politique en expliquant
comment, grâce à des programmes divers, le Brésil était en
train de s'en sortir. Apparemment, cet exposé n'a pas percuté
puisque les autorités belges, sans le consentement des citoyens,
41
continue à soutenir le FMI. Les plus anciens d'entre nous se
rappellent que Camille Gutt — connu des belges grâce à la loi
d’après guerre qui porte son nom — fut le premier directeur du
FMI25. C'est peut-être un début d'explication.
En soutenant aveuglément le FMI, le gouvernement belge subit
la pression de ses recommandations26 et de la Commission
Européenne, ce qui se concrétise par toujours plus d'austérité.
Et pendant ce temps, Jacques De Groote, représentant de la
Belgique au FMI blanchissait cinq cent millions d’euros….
Ben voyons!
Les ONG
Sans vouloir les mettre toutes dans le même panier, il faut
quand même avouer qu'un certain nombre d'entre elles sont en
partie financées par le secteur privé et aussi par les pouvoirs
publics27 auxquels elles doivent évidemment rendre des
comptes28. Il y a les comptes qu'on publie (transparence) et puis
25 La Belgique dirige depuis 1946 une constituante dont les autres états
membres sont depuis 1993 l’Autriche, la Hongrie, la Turquie, la République
tchèque, la Biélorussie, le Kosovo, la Slovaquie, le Luxembourg et la
Slovénie.
26 Comme par exemple la suppression de l’indexation automatique des
salaires, des économies en matière de santé publique et j’en passe.
27 Il s’agit de l’Union Européenne, l’état Fédéral, son gouvernement
(Exécutif) et ses chambres (représentants et sénat), les Régions (Exécutif et
Parlement) et les Communautés, les Provinces et sa députation permanente,
ainsi que les communes.
28 C’est ce qu’on appelle la redevabilité qui doit, en principe permettre la
transparence, mais en principe seulement.
42
aussi les autres.
Comme les ONG sont concurrentes entre elles en terme de
dons, elles récoltent des fonds selon des stratégies diverses tels
que mailings, spots publicitaires, ventes de services et de biens.
Certaines d’entre elles ont même recours à des sociétés
spécialisées en marketing social. Bien qu’elles répondent à des
règles éthiques, elles sont nombreuses à fonctionner dans les
faits comme des multinationales.
C’est ainsi que certaines ONG envoient des médecins dans les
forêts africaines à la rencontre de médecins locaux pour obtenir
les secrets médicinaux des plantes et des écorces en échange
d’un peu d’argent et de cadeaux.
Heureusement que de réels humanistes passent leur existence à
former des communautés villageoises à profiter de leur héritage
ancestral.
2.
Les conséquences de la mondialisation
La dérégulation des marchés
La mondialisation devait être bénéfique pour tout le monde. Le
vaste monde s'offre à tous ceux qui, animés d'un esprit
aventureux, ambitionnent de le parcourir dans tous les sens, de
creuser leur trou loin de la terre qui les a vu naître, soit en
décrochant un emploi, soit en créant une activité en toute
indépendance.
43
Ce que retiennent la plupart des gens, c'est que la
mondialisation profite davantage aux entreprises qui se
regroupent, délocalisent ou deviennent expertes en dumping
social, ce qui provoque licenciements et drames humains.
Les champions du dumping social en Belgique sont les
entreprises publiques actives dans les secteurs de la
bancassurance (Belfius, Paribas-Fortis) et dans les
télécommunications (Proximus, VOO).
Interrogées à plusieurs reprises par des journalistes, les
entreprises cherchent à minimiser le phénomène. Toujours estil qu'en accordant aussi facilement des permis de travail (et de
séjour) à des étrangers, de nombreux belges perdent leur
emploi dans ces secteurs (puisque la main d’œuvre étrangère
est exemptée du paiement des lois sociales en Belgique).
D'autres multinationales, grâce à des lobbys très efficaces,
concluent des accords divers, gardés secrets, qui risquent bien à
très court terme de mettre la démocratie sous tutelle d'une
gouvernance économique privée. La conséquence pour les
peuples est la perte de l'essence même de l'être humain : la
liberté.
L'austérité
Comme je l'ai déjà dit, la mondialisation et les accords divers
ont pour conséquence l'accroissement de la dette publique. Les
autorités doivent donc trouver les moyens de boucler leur
budget. Comme toujours, il est plus facile de lever des taxes et
44
d'imposer l'austérité que de trouver des sources de financement
plus équitables mais aussi plus difficiles à mettre en œuvre.
L'inefficacité de l'austérité
Parallèlement à des drames qui se préparent, les ministres des
Finances du G2029 se mettent d'accord pour « doper l'emploi et
la croissance », mais on remarque que c'est tout le contraire qui
se passent et que les peuples doivent de plus en plus se serrer la
ceinture.
Pourtant l’austérité ne fonctionne pas. On remarque qu’en
appliquant cette méthode, la Grèce a aggravé sa situation.
Quand à la Grande-Bretagne, elle applique des mesures
budgétaires draconiennes qui ne l’empêche pas de s’enfoncer
dans la récession plus vite que le continent.
En Belgique on est prudent: on parle de rigueur et non
d’austérité, ce qui permet à l’état d’être d’accord avec le G20,
et de faire complètement le contraire . L’économiste Paul de
Grauwe30 a confirmé ce qu’on savait déjà, à savoir que « nous
29 Groupe de dix-neuf pays et de l’Union Européenne créé en 1999 en
réponse aux crises financières qui ont secoué les pays émergents au début
des années ‘90. Le but était d’élargir le dialogue des pays les plus riches de
la planète en matière économique. Il faut dire que le G20 représente 85% du
commerce mondial et plus de 90% du PIB mondial. Font partie du G20,
hormis l’Union Européenne: l’Afrique du Sud, Canada, Mexique, ÉtatsUnis, Argentine, Brésil, Chine, Japon, Corée du Sud, Inde, Indonésie,
Arabie Saoudite, Russie Turquie, France, Allemagne, Italie, Royaume- Uni,
Australie.
30 Licencié en sciences économiques, Paul de Grauwe fut sénateur
OpenVld et économiste au FMI.dans les années ‘70.
45
sommes dans une situation de dictature des créanciers ».
On a abandonné le pouvoir aux multinationales, tous les pays
sont débiteurs des banques, et donc on préfère les courtiser que
de s’opposer à elles.
L’austérité est un choix et non une fatalité, et dans le cas de
l’Europe, le choix est influencé par une étude « growth in a
time of debt »31 basée, selon des économistes américains, sur
des données erronées32.
Et comme je le disais, en Belgique on fait l’inverse de ce qu’on
devrait faire : on taxe. Et très prochainement, l’état fera main
basse sur notre argent, sur tout notre argent33. Car l’État a
31 Sans que les européens n’en aient conscience, "Growth in a time of
debt”, influence la vie de chacun d’entre nous. En effet, Carmen Reinhart et
Kenneth Rogoff (ancien économiste en chef du FMI) ont analysé, de 1946 à
2009, l’évolution des données économiques des 20 économies les plus
développées et arrivent à la conclusion qu’au-delà du seuil de 90% de dette
publique par rapport au PIB, la croissance devient statistiquement négative
et donc que notre dette est actuellement contre productive.
32 Alors que l’université du Massachussetts — à laquelle se joint Paul de
Grauwe— a démontré que Reinhart et Rogoff se sont basés sur des données
partielles, leurs conclusions continuent à être utilisées sciemment pour
justifier les politiques d’austérité menées au niveau européen, et même
mondial.
33 Si le fisc pouvait déjà enquêter dans les banques, sans trop de soucis
éthique, ils pourront consulter directement nos comptes à partir de mai
2014. On verra si cette donne va influencer l’électeur. Bien qu’on nous
garantit une procédure stricte, je suis plutôt d’avis que le fisc pourra en
toute opacité — peut être à terme, mais rien n’est moins sûr — suivre le
mouvement sur les 40 millions de comptes belges , en temps réel, et
pourquoi pas se servir directement si nous étions redevable au fisc.
46
besoin d'argent, beaucoup d'argent. Certaines causes sont à
rechercher bien loin34.
Les causes de l'Austérité
Comme je l'ai dit plus haut, l’austérité est inefficace et
provoque la paupérisation. Elle trouve sont origine dans
– L'endettement non garanti: Tous les citoyens savent que
l’endettement doit être géré. L’endettement pour une maison
est un bon investissement dans la mesure où il est garanti par le
bien que l’on acquiert.L’endettement pour une voiture est déjà
plus risqué puisque la garantie s’ effrite rapidement, mais le
risque est mesuré puisqu’il donne l’opportunité, grâce à cet
investissement, d’obtenir un emploi. L’endettement pour des
biens de consommation courant (machine à laver,
électroménagers, technologies de la communication…) est
nettement plus hasardeux et devrait faire l'objet d’une réflexion
avant l’achat. Alors, lorsque les grandes surfaces proposent des
cartes de crédit pour faire ses courses, c'est pratiquement
projeter les citoyens les plus influençables dans les spirales de
34 Dans les années '70, à la fin des « Trente Glorieuses » la Belgique a
continué à faire comme si le contexte restait le même, a inventé les
prépensions qui coûtent cher à la collectivité mais constituent un ballon
d’oxygène pour les entreprises, a entamé des réformes institutionnelles très
coûteuses.
Le refus de nos dirigeants socialistes et sociaux chrétiens de l'époque de
voir que le monde changeait est illustré par cette sortie de Guy Mathot, alors
ministre du Budget :«La dette publique, on ne sait pas comment elle est
arrivée, mais elle disparaîtra d'elle-même». Je ne sais si on peut appeler
cela grand art politique, mais c'est en tout cas un manque d’honnêteté et de
respect du citoyen.
47
l'endettement.
– La mauvaise gestion des finances publiques : Quant à
l'endettement de l’État, il croît sans cesse, ce qui le contrait à
prendre des mesures drastiques et impopulaires qui plombent
l'emploi et la créativité et réduisent les services publics à une
peau de chagrin .
Les conséquences de l'austérité
– La réduction des services publics : La réduction des
services publics est la conséquence de la réduction des
dépenses publiques. Comme on est dans une logique droitegauche, on a difficile de choisir ses priorités. L’enjeu principal
est la baisse du taux de chômage et la hausse du taux d’emploi,
sans oublier le soutien aux plus démunis. Dans le même temps
il est essentiel que l’écart entre les salaires et les indemnités de
chômage ou de CPAS soit suffisant pour que les citoyens ne
puissent choisir la facilité en optant pour le chômage.
– La recherche des sources imposables : On sait tous qu’en
terme d’imposition, la fiscalité favorise les hauts revenus. Les
intérêts notionnels favorisent les multinationales au détriment
des PME dont le nombre de faillites explose en Belgique. Les
belges sont plus raisonnables que leurs dirigeants puisque
chaque belge ajuste régulièrement ses dépenses, quels qu’en
soient les sacrifices, pour ne pas faillir. Le drame, c’est que nos
dirigeants n’ont ni le courage, ni la capacité de maintenir le
bateau, dans lequel nous nous trouvons tous, au dessus de la
ligne de flottaison.
48
– La croissance pratiquement nulle : Sans croissance, le
chômage s’étend de même que la paupérisation35. Deux
facteurs explique cela :
1. La baisse de la consommation : S’il y a consommation,
il y a échange de biens et de services et pour satisfaire la
demande, des emplois sont créés. Toute forme de taxation est
un frein à la consommation, ce qui signifie que la taxation doit
être mesurée en fonction des secteurs d’activité. La croissance
telle que nous la connaissons est forcément limitée. S'orienter
vers une autre forme de croissance me paraît essentiel.
2. La peur de l'investissement : S’il y a consommation, il
y a création d’entreprises et les gens reprennent goût au risque
mesuré. Dans la situation que nous connaissons en Belgique,
les gens ne se hasardent plus à investir ce qui se concrétise par
une épargne des belges qui totalise pratiquement 250 milliards
d’Euros. Pas étonnant dès lors que le fisc s’intéresse à cette
manne providentielle et crée une banque de données permettant
de tracer les quarante millions de comptes ouverts en Belgique.
Dans un avenir proche, il sera possible au fisc de suivre
l’évolution de chacun des comptes en banque en temps réel
sans plus aucune protection de la vie privée.
3. fin des mécanismes de réduction des inégalités : Si les
mesures d’austérité se poursuivent en Europe, 15 à 25 millions
de personnes supplémentaires pourraient se retrouver en
situation de pauvreté d’ici 202536.
35 Un Belge sur sept, soit 14,7 % de la population, vit sous le seuil de
pauvreté, c’est-à-dire qu’il ne dispose pas d’un revenu de 899 € par mois
pour un isolé ou de 1 888 € pour un ménage composé de deux adultes et
deux enfants. … et l’endettement des belges continue à s’accroître.
36 Source : Oxfam
49
Les traités transatlantiques
Il ne faut pas se leurrer. Les traités transatlantiques visent à
installer un gouvernement mondial dirigé par les plus grosses
entreprises qui représentent ensemble la moitié du commerce
mondial.
1. Entre le Canada et l'Union - AÉCG37
Accord Économique et Commercial Global.
Signé le 26 octobre 2014 après cinq ans de négociations,
certains observateurs le considèrent comme le tremplin vers le
PTCI.
Pratiquement toutes les aspects de l'échange de biens et de
services, l'investissement et les achats gouvernementaux entre
le Canada et l'U.E sont réglés par cet accord discuté dans le
plus grand secret.
Comme c'était déjà le cas pour ACTA 38, CETA39 menace notre
liberté d’expression en ligne et chacun d'entre nous pourrait
être facilement poursuivi par des acteurs privés qui feront et
déferont les lois en fonction de leurs intérêts.
37 CETA en anglais : « Comprehensive Economic and Trade Agreement
38 Anti-Counterfeiting Trade Agreement(ACAC : Accord commercial Anticontrefaçon) : Cet accord, négocié sans aucune transparence, n'est pas
commercial du tout mais vise à créer son propre cadre juridique et
organisme de gouvernance.
39 Voir le fascicule sur mon site internet : « Marchander la démocratie »
50
Les effets néfastes de ces accords se font déjà sentir.40
2. Entre les USA et l'UE – PTCI 41 mieux connu sous le nom
de traité de libre-échange transatlantique42.
En 2013, l’UE. et les États-Unis ont entamé des négociations
en vue de conclure un accord de partenariat transatlantique sur
le commerce et l’investissement qui, selon ses défenseurs,
devrait conduire à une croissance économique sans précédent.
Si personne ne parle de l'impact en termes d'emploi et de
pouvoir d'achat sur les populations (car c'est ce qui intéresse les
gens au premier chef), on est certain, en revanche, que cet
accord confirma la primauté de la gouvernance économique
privée sur les États lesquels ne conserveront plus aucune marge
de manœuvre pour réguler les marchés.
Le plus grand danger provient d'un mécanisme de règlement
des différends mis en place (ISDS). Ce mécanisme permet aux
compagnies étrangères d’intenter directement des poursuites
contre des États auprès de tribunaux internationaux de droit
privé pour réclamer des dommages et intérêts si elles jugent
que des mesures de protection en matière de santé,
d’environnement, des mesures prudentielles dans le domaine
40 Voir le cahier d'information politique: « Marchander la démocratie »
sur mon site internet : http://paulthunissen.be »
41 Partenariat Transatlantique de Commerce et d'investissement
42 TAFTA en anglais (Trans-Atlantic Free Trade Agreement),
L'explication de ce traité fait l'objet d'un syllabus édité pat ATTAC
France, téléchargeable gratuitement sur mon site. Il s'intitule : « Guide
de navigation pour affronter le grand marché transatlantique »
51
de la finance ou d’autres législations nationales portent atteinte
à leurs droits. Ces poursuites intentées par des investisseurs
contre un État sont instruites par des arbitres commerciaux
privés qui sont rémunérés au dossier et tendent manifestement
à interpréter la loi en faveur des investisseurs.
En clair, cet accord, qui aura des conséquences importantes
dans tous les domaines de notre quotidien (agriculture, énergie,
internet, services, …)., vise la suppression de toutes les
contraintes sociales, environnementales ou sanitaires, qui
limitent le profit des multinationales. Dans les faits le droit des
multinationales serait placé au-dessus du droit des États.
D'autres traités sont en cours actuellement qui mettront les
démocraties entre parenthèse.
52
VI
L'ASSASSINAT
DES LIBERTES INDIVIDUELLES
« Un peuple prêt à sacrifier un peu de liberté pour un peu de
sécurité ne mérite ni l'une ni l'autre, et finit par perdre les
deux 43»
La sécurité se substitue peu à peu à la liberté, et la sécurité
engendre la peur qui engendre encore plus de sécurité et par
voie de conséquence moins de liberté.
Aujourd'hui, les gens ont peur. Il faut dire que les politiques et
les médias maintiennent ce climat en relayant quotidiennement
les attentats terroristes à l'intérieur ou à l'extérieur de nos
frontières, les viols collectifs dans l'est du Congo, les percées
de l’État Islamique en Irak et en Syrie ou de Boko Haram au
Nigeria ou dans le nord du Cameroun, la recrudescence des
vols ou des car-jacking, les piratages informatiques, ...
Nous avons tellement peur que, inconsciemment, nous
légitimons la présence de plus en plus intrusive de caméras 44,
nous acceptons le flicage de nos comptes en banque, de nos
mails, de nos conversations sur les réseaux sociaux, nous
43 Citation attribuée à Benjamin Franklin.
44 En France, Michèle Alliot-Marie, ministre de l'intérieur annonça dés
2007, le déploiement d'un million de caméras dans l'hexagone.
53
trouvons normal d'être contrôlés de plus en plus fréquemment
sur les axes routiers et si nous n'y prenons garde les
perquisitions systématiques seront effectuées sans que
personne ne puisse s'y opposer.
Les autorités françaises et allemandes s'inquiètent de ne
pouvoir déchiffrer facilement les conversations tenues sur
Skype. Une loi pourrait bientôt imposer aux fournisseurs
d'accès de mettre en place un système pour permettre aux
autorités une écoute de ces conversations comme on le fait déjà
lors d'écoutes téléphoniques.
En France existe déjà le rapport Olivennes45. Il propose la
surveillance des réseaux pour contrôler les téléchargements
illégaux. Des méthodes existent pourtant pour empêcher un
téléchargement, mais dans ce cas, on ne pourrait pas surveiller
les internautes.
Toutes ces intrusions modifient notre comportement sans qu'on
en aie réellement conscience. Notre liberté fondamentale de
gérer notre vie comme il nous semble s'effrite peu à peu et
l'ingérence des autorités ou d'acteurs non élus dans notre vie
privée s'installe doucement, sans faire trop de bruit.
Le prétexte est de garantir la sécurité des citoyens, mais dans
les faits, l'objectif est d'amoindrir la liberté de chaque individu
en le culpabilisant s'il le faut.
45 Denis Olivennes fut chef d'entreprises successives et auteur du rapport
qui porte son nom. Ce rapport fut remis en 2007 à Christine Albanel,
ministre de la culture.
54
L'utilisation de cartes de crédit, de cartes de fidélité, le recours
à des moyens de paiement électronique, de GSM ou
smartphone, … permettent aux multinationales d'obtenir des
informations de plus en plus nombreuses sur nos
comportements en matière d'achat, mais aussi sur notre
identité. Cela permet aux autorités de suivre chaque individu à
la trace.
Depuis le début du siècle sont développées des techniques
d'identification par radio-fréquence46.Dans moins d'une
décennie, nous serons tous pistés grâce à des mini-récepteurs
placés sur chaque personne, avec ou sans son accord.
Il est grand temps de réagir si nous ne voulons pas être dirigés
par des objets, car une technologie, appelée Internet des Objets,
se développe à une vitesse que nous peinons à imaginer.
46 RFID en anglais(Radio Frequency Identifaction)
55
VII
LE MANQUE DE CONCERTATION
ENTRE LES REGIONS ET
COMMUNAUTES
1.
Le monde est un 'système'
Les musiciens savent ce qu'est un système. C'est une notation
musicale reprenant l'ensemble des voix chorales et des
instruments parfaitement accordés qui forment la partition. Une
parfaite synchronisation des choristes et des instruments
respectant le tempo et les nuances permet une interprétation
musicale parfaite.
Si le monde pouvait s'accorder comme le sont les instruments
d'une œuvre majeure, l'avenir se montrerait plus clément, et
l'interprétation agréable à vivre.
Si seulement les communes, les provinces, les régions et
communautés et l’État Fédéral Belges pouvaient s'accorder et
s'harmoniser, notre pays serait montré en exemple pour les
autres nations de la planète.
Car, dans la majeure partie du monde, c'est le manque
d'harmonisation entre les régions, les hommes, les femmes et
les enfants, qui est à l'origine du mal-être. Le manque d'écoute
de nos élus n'y est pas étranger.
56
Mais en Belgique, comme dans les autres parties du monde, les
démocraties ne s'accordent pas entre elles et ne s'accordent pas
non plus avec les composantes de chacune de leurs régions
respectives.
2.
Manque de concertation entre le Fédéral et
les Régions
Chaque instrument joue sa propre partition sans s'inquiéter de
celle des autres et, forcément, c'est la cacophonie. A titre
d'exemple, lors des réunions du 'comité de concertation', il est à
se demander sur quoi porte la concertation budgétaire puisque
les revendications des Régions ne sont pas entendues par l’État
Fédéral qui prend des mesures unilatérales.
3.
Manque de concertation entre les acteurs
d'une même région
Dans une même régions, les différents acteurs ne s'entendent
même pas entre eux. C'est ainsi que Jean-Claude Marcourt,
ministre de l’Enseignement Supérieur dans le Gouvernement
Wallon a décidé d'organiser un concours après la première
année de médecine – en guise de filtre destiné à s'inscrire dans
les quotas déterminés par l’État Fédéral – .sans même attendre
la fin des auditions organisées au Parlement de la Fédération
Wallonie-Bruxelles et avant d'avoir écouté tous les acteurs
mobilisés par ce dossier y compris les étudiants qui sont quand
même les premiers concernés.
57
58
Première logique
une participation
à la vie politique
59
60
I.
LA DEMOCRATIE ! C'EST QUOI ?
1,
Vit-on réellement en démocratie ?
Bien que nous ayons le sentiment de vivre en démocratie, nous
sommes de plus en plus nombreux à penser que notre bulletin
de vote ne changera rien du tout. Il apparaît d’ailleurs que de
nombreux citoyens votent par habitude plutôt que par
conviction et qu’ils se rendent aux urnes pour satisfaire à une
obligation légale.
Au fond, vit-on en démocratie? Pour répondre à cette question,
il faudrait s’entendre sur une définition de la démocratie qui
nous convienne.
Selon notre conception, la République Démocratique du Congo
est une dictature; avant la chute du mur de Berlin les pays du
bloc de l'Est se disaient démocraties populaires; la Chine se dit
démocratique.
Les pays européens ne se considéraient-ils pas tous comme des
modèles de démocratie à l’époque coloniale? Les américains ne
pratiquaient-ils pas l'esclavage et l'Afrique du Sud
l'apartheid ?... et tous se disaient des pays démocratiques.
Alors, quels sont les critères à retenir pour dire qu'un pays ou
l'autre est démocratique?
A mon sens, la démocratie est plus un idéal politique à
atteindre qu'un statut aux règles rigides et bien définies. Dans
61
les faits, on ne peut jamais dire qu’un pays est totalement
démocratique. Chaque pays doit inventer sa propre démocratie
en fonction des différentes composantes de sa population.
En Belgique, seule la démocratie représentative est autorisée.
Elle fut inscrite dans la constitution dès les premières heures de
la Belgique indépendante par quelques citoyens seulement, car
tout le monde n’avait pas le droit de vote. Certains électeurs
avaient plus de droits que d’autres. On ne parlait pas encore du
suffrage universel.
Il est dès lors temps d’imaginer un autre modèle de démocratie,
plus en phase avec les citoyens qui vivent en 2015 et du mode
de vie qui est le leur aujourd’hui.
Une « démocratie représentative» dans laquelle une infime
partie des citoyens a le droit de débattre au nom de tous n'est
pas une démocratie.
Une démocratie dans laquelle une poignée de gens qui font
carrière, forment des listes et nomment les ministres parmi
leurs membres est une oligarchie qui n'écoute pas les
revendications populaires.
Alexis de Tocqueville47, la figure de proue du libéralisme du
XIXème siècle déclarait par ailleurs : "je ne crains pas le
suffrage universel, les gens voteront comme on leur dira".
47 Le vicomte Alexis de Tocqueville est un homme politique français
rendu célèbre par ses analyses de la Révolution française et de la
démocratie américaine.
62
Cette réflexion doit nous inciter à imaginer une démocratie
dans laquelle les élus seront en permanence contrôlés et auront
une obligation de résultat grâce à la possibilité donnée à chaque
citoyen de participer activement à la vie politique.
Pierre Mendes-France48 reconnaissait que « La démocratie ne
consiste pas à mettre un bulletin dans une urne, à déléguer les
pouvoirs à un ou plusieurs élus puis à se désintéresser,
s'abstenir, se taire pendant cinq ans. Elle est action continuelle
du citoyen non seulement sur les affaires de l’État, mais sur
celles de la région, de la commune, de la coopérative, de
l'association, de la profession.
Si cette présence vigilante ne se fait pas sentir, les
gouvernements (quels que soient les principes dont ils se
recommandent), les corps organisés, les fonctionnaires, les
élus, en butte aux pressions de toute sorte de groupes, sont
abandonnés à leur propre faiblesse et cèdent bientôt, soit aux
tentations de l'arbitraire, soit à la routine et aux droits
acquis…
La démocratie n'est efficace que si elle existe partout et en tout
temps ».
48 Pierre Mendes France (1907-1982) est un homme politique français
qui, aujourd'hui encore reste le symbole d'une conception exigeante de
la politique.
63
2.
Les lacunes de la démocratie représentative
La démocratie représentative a cessé d’exister au moment ou
nos élus se sont désintéressés de leurs électeurs et ont accepté
d’être courtisés par des intérêts souvent occultes et dont les
citoyens ne sont pas informés.
Comme je viens de le dire, nous sommes dirigés — et notre vie
privée est de plus en plus contrôlée — par une oligarchie. Nous
sommes contraints de nous soumettre à la constitution belge
qui, sous certains aspects, est celle d’un autre âge.
Comme son nom l’indique, la démocratie représentative
s’exerce uniquement par des représentants auxquels les
citoyens abandonnent leur souveraineté, et comme les élus sont
censés incarner la volonté générale, les citoyens espèrent que
leurs élus exerceront leur mandat dans l’intérêt de leurs
électeurs et resteront à leur écoute. Dans tous les cas, les
citoyens sont contraints d’attendre les élections suivantes pour
exprimer, à travers un nouveau vote leur mécontentement ou,
dans le meilleur des cas, leur approbation.
Mais le meilleur est bien loin. C’est le pire que nous subissons
au quotidien, et comme la liste des candidats (choisis en amont
par les partis) reste quasiment inchangée, le peuple se soumet
une fois de plus au dictât d’élus qui ne les représentent plus.
Si la démocratie représentative a bien fonctionné jusqu’à
présent c'est que jadis d'autres valeurs morales que celles qu'on
connaît aujourd'hui étaient largement répandues jusque dans les
64
rouages de l’État et les hommes politiques étaient passionnés
par la chose et le bien publics49. On observe aujourd’hui que ce
modèle est en crise. Le changement de mentalité explique cet
état de fait. Nos élus ne sont plus de fidèles délégués des
opinions de leurs électeurs et ne les représentent plus. L’écart
ne cesse de se creuser entre la société politique (les
représentants) et la société civile (les citoyens).
Dans les faits, Un petit nombre d'oligarques forment la classe
dominante qui asservit le peuple au lieu de l’affranchir.
Certains « élus » sont nommés et non élus tandis que les
bénéficiaires des suffrages sont d’avantage intéressés par une
carrière que par la chose et le bien publics, sans compter que
les carriéristes transmettent de plus en plus couramment leur
fonction à leur progéniture.
Le constat est simple: Les élus ne sont plus les bonnes
personnes en mesure de prendre les bonnes décisions au bon
moment. C’est donc à nous qu’il revient de nous concerter et
de prendre en main notre destinée.
3.
Leçons à tirer de la crise gouvernementale de
2010
La crise gouvernementale que nous avons connue en Belgique
en 2010 est d’avantage une crise de la démocratie qu’une crise
gouvernementale.
49 Rappelons simplement pour illustrer ce fait que, lors de l'exposition
universelle de 1905, la Belgique était la seconde puissance mondiale
après le Royaume-Uni. On ne parlait pas encore des États-Unis.
65
Les 541 jours de crise que la Belgique a connu n’est pas à
mettre à son passif mais tout au contraire, la Belgique est un
des premier pays à mettre en lumière la crise de la démocratie
qui sévit dans les pays industrialisés.
►
► La
crise illustre que la démocratie représentative a ses limites
et que les élections, à elles seules, ne permettent plus la
constitution d’un gouvernement mais au contraire font obstacle
à une gestion politique seine.
► La
crise illustre que les acteurs de la société civile (syndicats,
mutuelles, coopératives…) n’incarnent plus à eux seuls la
volonté populaire. Il est vrai que ces organes furent durant des
décennies le trait d’union entre la population et le pouvoir.
Leurs suggestions politiques étaient prises en compte.
Aujourd’hui, les militants sont plus considérés comme des
«clients », et ces organes ne pèsent plus bien lourds dans le
dossier communautaire. On ne peut d’ailleurs pas dire que ces
acteurs représentent l’ensemble de la société civile dans leur
diversité.
La « crise économique» que connaît toute l’Europe est
essentiellement provoquée par les spéculateurs et des
institutions bancaires puissantes qui parient sur la dette des
états ou encore des actionnaires dont la gourmandise atteint des
sommets.
►
66
4.
Vers une démocratie participative
La « démocratie participative » est un pléonasme. En effet, la
démocratie ne s'exerce que grâce à une assemblée de citoyens,
grâce aux débats qui s'y tiennent et qui permettent aux idées de
s'affiner et de se concrétiser. Elle est donc forcément
participative.
En démocratie, la souveraineté de tous et de chacun ne s'exerce
que dans des assemblées de citoyens, qu'elles soient physiques
ou virtuelles. N'est souverain que le citoyen qui prend le risque
de l'engagement.
Ainsi que le disait Jean-Jacques Rousseau : « La souveraineté
ne peut être représentée, par la même raison qu'elle ne peut
être aliénée ; elle consiste essentiellement dans la volonté
générale et la volonté ne se représente point ; elle est la même
ou elle est autre ; il n'y a point de milieu. Les députés du
peuple ne sont donc ni ne peuvent être ses représentants, ils ne
sont que des commissaires ; ils ne peuvent rien conclure
définitivement. Toute loi que le Peuple en personne n'a pas
ratifiée est nulle ; ce n'est point une loi. »
Alors qu'en Belgique le gouvernement Michel ne représente
que 23 % des wallons, tous libéraux.peut-on parler de
gouvernement légitime.
67
5.
A quoi faut-il s'attendre à défaut d'une
stratégie politique différente ?
La répétition des erreurs du passé
En 1931 déjà, Ludwig Von Mises 50 expliqua lors d'un discours
en Tchécoslovaquie comment les crises surviennent, pourquoi
les événements se passent comme ils le font et à quoi il faut
s'attendre dans un avenir proche.
Ce discours est intéressant dans la mesure où on pourrait le
transposer presque mot pour mot à la situation actuelle. Depuis
lors, les autorités politiques n'ont rien retenu et ont répété les
erreurs du passé, et nos gouvernements continuent à s'égarer
dans des politiques qui ne sont pas avalisées par la population.
Il n'est pas étonnant que toute action politique soit rejetée
violemment par le peuple quelles que soient les orientations
envisagées; Il n’est pas étonnant non plus que les belges soient
de plus en plus nombreux à se désolidariser de toute action
politique.
Le peuple a besoin de théories qui dénoncent les mensonges,
rendent compréhensibles ce que la majorité des gens ignore et
empêchent les exploiteurs d'abuser de cette ignorance.
50
Économiste autrichien, naturalisé américain, décédé en 1973. Il est
l’auteur de l’école autrichienne d’économie qui défend le capitalisme et
le libéralisme classique et critique le socialisme qui, selon lui, est voué
à l’échec tant que les prix ne seront pas fixés par le marché.
68
La suppression de nos libertés
Ainsi que le disait Benjamin Franklin « Un peuple prêt à
sacrifier un peu de liberté pour un peu de sécurité ne mérite ni
l'une ni l'autre, et finit par perdre les deux. »
Le grand danger du néocapitalisme est qu’il privilégie la santé
boursière à la santé (économique) des entreprises.
En acceptant le néocapitalisme51 et le néolibéralisme , nous
faisons un pacte avec le diable et nous troquons peu à peu notre
liberté pour plus de confort. Cela se traduit par une inversion
progressive du rapport de force entre démocratie et
gouvernance économique.
L’inversion du rapport de force entre démocratie et
gouvernance économique.
La libéralisation progressive des échanges inverse peu à peu le
rapport de forces entre démocratie et gouvernance économique,
bien qu'elles restent complémentaires.
51 Le néo-capitalisme est une phase d’expansion du capitalisme qui se
caractérise par la concentration internationale des capitaux et le
développement de firmes multinationale. Cette expansion a débuté toute en
douceur au lendemain de la seconde guerre mondiale en trompant la
vigilance des élus nationaux de pratiquement toutes les nations. Ce type de
capitalisme utilise toutes les techniques modernes — notamment celles liées
aux lobbies — pour accroître leurs profits tirés du capital et mettent, s’il le
faut, les états à genoux (comme ce fut le cas pour la Grèce que la banque
Goldman Sachs a contribué à mettre en faillite.
69
II.
LES FONDEMENTS
DE LA DEMOCRATIE
1.
principes démocratiques
La démocratie se fonde sur trois principes
•
•
•
L’affirmation des droits individuels
La séparation des pouvoirs
La représentation contrôlée par les citoyens
L'essence de la démocratie
La double essence des principes démocratiques
La liberté
C'est-à-dire un état contraire à celui d’esclave. Selon Aristote,
c’est la faculté de disposer à son gré de la part de son existence
qui ne ressort pas de l’espace public.
Dans cette perspective, le principe d’un système participatif à
la vie politique de la collectivité est de nature à faire prendre
conscience à tous les citoyens de trois préceptes essentiels :
70
– Chacun ne peut douter de l’intégrité de l’autre,
– Le respect de la loi est essentiel
– On ne peut retirer aucun bénéfice personnel immédiat du
principe démocratique.
La justice sociale
Si la liberté et l’égalité — ce qu’on appelle la justice sociale —
sont étroitement liées dans la pensée démocratique, un tel lien
entraîne deux implications :
– la faculté d’être tour à tour gouvernant et gouverné,
ce qui exclut le carriérisme.
– le respect du précepte de non oppression des
minorités.
2.
Principe de gouvernance économique
La gouvernance économique se fonde sur quatre principes :
•
•
•
•
La fonction gouvernante n’est pas issue des urnes,
mais attribuée à l’issue de tractations parfois tendues
entre les acteurs les plus influents,
Le principe de participation n’est permis qu’à des
acteurs organisés et reconnus comme concernés par
l’enjeu,
La liberté telle qu'exprimée plus haut n’est prise en
compte que dans la mesure où elle n’entrave pas le
principe d’efficience,
Les minorités sont ignorées ou opprimées si elles ne
71
s’intègrent pas dans la logique économique.
L'essence de la gouvernance économique
La double essence de la gouvernance économique
•
•
La satisfaction des consommateurs
Le bénéfice croissant des investisseurs
La logique financière l’emporte sur la logique de
développement. Dans cette optique l’égalité n’est pas
essentielle puisque la gouvernance poursuit un objectif
d’efficacité. Il apparaît que les enjeux économiques reçoivent
plus d’attention que les autres enjeux.
DEMOCRATIE
PRINCIPES droits individuels
GOUVERNANCE
ECONOMIQUE
fonction gouvernante
séparation des Pouvoirs participation limitée
représentation
liberté limitée
minorités ignorées
DOUBLE
ESSENCE
liberté
satisfaction des consommateurs
justice sociale
bénéfice croissant des
investisseurs
72
3.
Conclusion
Les observateurs reconnaissent que la gouvernance tend à
élargir, par n’importe quel moyen, la participation d’acteurs
non élus aux mécanismes de prises de décision52.
Au temps de l’État Providence, la démocratie était un élément
de contexte dans laquelle la gouvernance pouvait se
développer. Aujourd'hui, on observe que la démocratie est un
des éléments de la gouvernance, ce qui tend à illustrer que
La démocratie n’est pas une condition exclusive
pour la gouvernance: l’OMC fonctionne avec des
États non démocratiques (comme la Chine). Jusqu’où la
démocratie a-t-elle besoin de la gouvernance pour
fonctionner? et si cette question vient à être posée, c’est
que vraiment, la démocratie est un des éléments de la
gouvernance.
La
gouvernance
et
la
démocratie
sont
complémentaires et ne peuvent exister l’un sans
l’autre. Toutefois existe une divergence profonde sur les
fondements du processus de légitimation :
- L’efficience pour la gouvernance
- La participation pour la démocratie
52 Remarque de James Rosenau « Governance, in other words, is a more
encompassing phenomenon that government. It embraces governmental
institutions, but it also subsumes informal non-governmental
mechanisms whereby those persons and organizations within its
purview move ahead, satisfy needs, and fulfil their wants ».
73
Si la démocratie admet la complémentarité de l’efficience et de
la participation, les faits illustrent hélas que l’efficience exclut
la participation et contraint les citoyens, travailleurs ou non, à
un état de survie
74
III.
POURQUOI DEFIER LA DEMOCRATIE
REPRESENTATIVE ?
1.
Observance de deux phénomènes
Nous pouvons observer deux phénomènes:
•
La mondialisation qui se caractérise d’une part par
l’interconnexion des marchés de biens et des services
ainsi que des marchés financiers au plan mondial, et
d'autre part par des acteurs et des entreprises au plan
mondial également.
Grâce à divers accords qui ne sont pas portés à la
connaissance du public, l'industrie financière tente par
tous les moyens de faire vaciller les démocraties.
•
La crise de la démocratie représentative en Europe
est illustrée par la méfiance croissante des citoyens
envers les élus.
Plus qu’un rééquilibrage, le citoyen quémande un autre
type de gouvernance dans laquelle il pourra exprimer
ses attentes directement.
75
2.
Sept raisons de défier
représentative
•
•
•
•
•
•
•
la démocratie
Le parlement n’est pas représentatif de la société toute
entière dans sa diversité,53
Les élus ne représentent plus leurs électeurs et ne vivent
pas le même quotidien, ne fusse que par les revenus que
leur fonction génère,
Les citoyens ont le sentiment très vif que les élus
restent sourds à leurs revendications,
Les citoyens se méfient des politiciens,
Nos élus ont abandonné les leviers de décision
économique aux banques, multinationales et institutions
supranationales,
L’état est devenu au fil des années une vaste gestion de
fortunes,
Les gens attendent depuis trop longtemps un
changement radical des orientations politiques, et
nombreux sont-ils à vouloir s’impliquer davantage dans
la vie politique et à revendiquer un rôle accru dans les
prises de décision.
53 Par ailleurs, en Belgique où le vote est obligatoire, les parlementaires ne
s'obligent pas à être présents au parlement au moment des votes.
Chacun a en mémoire des hémicycles au trois quart vides.
76
IV.
LES PRIORITES DE LA
DEMOCRATIE PARTICIPATIVE
Les quatre priorités de la démocratie participative sont
1.
La citoyenneté
La citoyenneté est la reconnaissance par la communauté de
notre appartenance à cette communauté. Chaque citoyen
détient une part de la souveraineté politique.
On parle souvent des droits et des devoirs des citoyens, mais
faire partie d ''une communauté n'accorde pas de droits mais
des privilèges. Et lorsqu'on se sent investi de privilèges on
intervient naturellement dans les besoins de la communauté en
fonction de ses facultés.
Les privilèges principaux de chaque citoyen sont
La liberté d'expression
La liberté d'expression est essentielle pour que, lors de débats,
on puisse s'exprimer en toute indépendance.
77
La liberté de participer
Le citoyen participe librement aux débats publics et y exprime
l'intérêt général et non son intérêt personnel, car il sait que
l'intérêt général est supérieur à la somme des intérêts
personnels.
L'égalité devant la justice
Dans la plupart des états du globe les justiciables ne naissent
pas égaux en droits et subissent pendant toute leur existence
l'humiliation de la discrimination. L’égalité devant la justice, en
Démocratie est un réel privilège.
Le droit de propriété
A.
Tout citoyen peut acquérir des biens en seconformant
aux lois en vigueur. Il peut les utiliser, en disposer et les léguer.
Personne ne peut priver un citoyen de sa propriété si ce n’est
pour cause d’utilité publique. Dans ce cas, la loi prévoit les
conditions et une juste indemnité.
L’usage des biens est réglementé par la loi en fonction de
l'intérêt général. La grande difficulté, dont les citoyens doivent
débattre, est de savoir où commence l’utilité publique et à
partir de quand on peut priver quelqu’un de sa propriété pour
l’intérêt commun .
78
B.
Toute citoyen a le droit de jouir du fruit de ses
créations immatérielles (droits d'auteur, droits industriels….)
sans que quelqu'un d'autre puisse l'utiliser pour en faire le
commerce. Le débat est de savoir pendant combien de temps le
créateur peut-il conserver le monopole de ses créations, car la
citoyenneté est aussi de faire profiter les autres, gratuitement,
de ses découvertes.
2.
La représentativité
En Europe en général et en Belgique en particulier, la
démocratie est une démocratie représentative, c'est à dire que
les électeurs votent tous les cinq ans pour élire les députés
fédéraux ou régionaux qui sont sensés représenter l'intérêt
général de leurs électeurs , lesquels leur confient la
responsabilité du pouvoir.
Mais la représentation est remise en cause pour deux raisons :
La sous-estimation du droit de vote
Dans les pays ou le vote n'est pas obligatoire, les gens oublient
qu'ils sont citoyens et qu'il ont un privilège non négligeable :
celui de se rendre aux urnes et d'y faire le choix librement
parmi les candidats présentés. Or , la défection est importante
puisqu'il n'est pas rare que plus de la moitié des citoyens ne se
déplacent plus. Cette négligence des citoyens permet à une
« minorité agissante » de prendre les rênes du pouvoir, ce qui
n'est pas représentatif de l'intérêt général.
79
Dans les pays où le vote est obligatoire, les votes nuls
représentent moins de 10 %.
Dans les deux cas, des campagnes de sensibilisation doivent
être menées.
La revendication d'un autre modèle de démocratie
Les revendications d’une démocratie participative des citoyens
à la vie politique, sont finalement l'essence même de la
démocratie.
La représentativité et la citoyenneté sont intimement liées
puisque, grâce au privilège de pouvoir voter, le citoyen est
reconnu comme membre effectif de la communauté.
3.
Les débats Publics
Tout système participatif se fonde sur
La concertation dynamique
Les débats libres et ouverts président aux décisions à l’échelon
local (y compris les comités de quartier), régional, provincial,
fédéral, européen.
La mise en place d'un système organisé
Ce système garantit que toutes les idées constructives et
nouvelles des citoyens seront examinées de manière efficace.
80
C’est ainsi que dans un tel système toutes les mesures décidées
sont acceptables par la grande majorité des citoyens concernés.
Ce sont des "mesures transversales". Elles n’ont de sens que si
chacun recherche le bien commun54. Les avis exprimés se
baseront sur des considérations objectives et non sur la défense
d’intérêts personnels.
4.
L'engagement
L'engagement politique est un privilège accordé à chaque
citoyen qui consiste en démocratie (forcément participative) à
intervenir personnellement dans la vie de la société.
Contrairement à ce qu'on tente de nous faire croire,
l'engagement politique et l'action politique ne font qu'un.
L'action et l'engagement, consiste en une prise de position
franche – ce qui exclut l'abstention – soit par un engagement
sur le terrain, soit par des publications engagées, soit par toute
autre méthode.
L'engagement ne nécessite pas nécessairement l'appartenance
à l'idéologie d'un parti politique.
54 La solidarité ne sera jamais égale à la somme des intérêts personnels.
Lorsqu'on est solidaire, on perd toujours un peu d'autonomie et de liberté
pour permettre à tous de s'épanouir. Les syndicats défendent les intérêts de
leurs membres. Dans ce cas , on ne peut parler de solidarité. Parler de
solidarité, c'est parler d'ouverture, de négociation, de compromis, et trop
souvent on se rend chez le patron en confrontation et non en concertation. Je
fais la même analyse pour les corporations patronales.
81
IV.
LES DIX ATOUTS
DE LA DEMOCRATIE PARTICIPATIVE
Que l’on appelle la participation démocratie directe,
démocratie participative, démocratie liquide…, cela importe
peu. Il est essentiel que ce soit un système muni de mécanismes
qui permettent à l’électeur d’interagir et de donner un avis
duquel on tienne compte à tout moment.
En tout cas, on peut développer dix arguments en faveur de la
participation de tout citoyen à la vie politique. Un tel système
1.
2.
3.
4.
5.
6.
7.
Rend sa souveraineté au citoyen là où la démocratie
représentative lui impose de l’abandonner au profit de
quelques individus choisis par les partis.
Permet à n’importe quel citoyen d’initier un projet de
loi, ou bien ressortir des projets que le gouvernement a
gelé pour des raisons diverses.
Permet de voter pour un projet et non pour un
programme.
Permet de voter pour QUOI le peuple décide et non
pour QUI les partis décident.
Permet de voter aussi souvent que nécessaire (ce qui
permet de faire avancer des dossiers à pas de géant).
Garantit aux citoyens que les décisions prises
représentent la majorité du plus grand nombre.
Permet d’opposer son veto à une loi impopulaire
concoctée par le gouvernement.
82
Impose au gouvernement plus de transparence dans les
décisions qu’il prend,
9. Impose au gouvernement de se justifier auprès des
citoyens et limite le pouvoir de l’élite.
10. Suscite chez les citoyens une plus grande implication
dans la chose publique.
8.
83
V.
LA DEMOCRATIE PARTICIPATIVE :
UN OUTIL
1.
la démocratie ne produit rien.
La démocratie, à elle seule, ne produit rien. C'est un outil qui
permet aux citoyens de s'exprimer, à des réflexions d'être
approfondies, à des débats et des conférences d'être planifiés, à
des recherches d'être soutenues… Une méthode devra être
ratifiée pour qu'émergent des solutions adaptées. Les citoyens
devront donc se «bouger», car nous avons besoin dans notre
société de citoyens « actifs ».
Plus rapidement nous nous doterons de cet outil et moins
longtemps nos enfants et petits enfants subiront les difficultés
actuelles qui s’amplifieront au fil du temps. Ce n’est que
lorsqu’un système participatif sera inscrit dans la constitution
que le gouvernement sera contraint de tenir compte de la
volonté du peuple belge.
2.
voter pour un mouvement politique, ni de
droite, ni de gauche
Pour l'heure, nos suggestions pourront quand même faire
mouche...si nous sommes assez nombreux à les proposer. La
meilleure manière d'atteindre rapidement notre objectif est de
ne voter que pour une seule formation politique qui incarne le
84
changement (comme les écolos l'ont incarné il y a trente ans).
Cette formation politique, ni de droite, ni de gauche – car cette
notion divise au lieu de fédérer – aura comme objectif unique
de rendre la parole au citoyen.
Bien qu’il existe un grand nombre de citoyens favorables à la
démocratie participative, aucun parti, actuellement présent sur
l'échiquier politique, n’a introduit dans son programme la
révision de la constitution en ce sens. C’est une preuve
irréfutable que les partis n’écoutent pas l’électeur.
Les belges d'aujourd'hui sont nettement plus émancipés et
éveillés à la chose publique que lors des premières heures de la
Belgique indépendante. Par ailleurs, les avancées
spectaculaires des technologies de l'information permettent
aujourd’hui au citoyen de se tenir de plus en plus efficacement
au faîte de l‘actualité et de diffuser son opinion, notamment sur
les réseaux sociaux, moyen moderne fédérer.
La Démocratie participative nous affranchira de la
dictature des partis politiques
Les partis politiques ne veulent pas entendre parler de
démocratie participative puisque cela leur enlèverait une partie
de leurs prérogatives et de leur pouvoir.
La démocratie participative permettra à nos enfants et nos
petits-enfants d’être les acteurs de leur destinée, et non de subir
le dictât d’une poignée d’’« élus » qui ne nous représentent
85
plus. La démocratie s’est corrompue en une dictature des
élections.
La démocratie participative produira des solutions
rapides
Contrairement à la démocratie représentative, la participation
des citoyens pourrait aboutir à de solutions durable sans
s’embourber dans des « compromis à la belge » et sans être
contraints de suivre les programmes établis par les partis.
3.
Le référendum d'initiative populaire
L’issue de la réflexion sur un projet donné est le vote par
l’ensemble des citoyens et non plus seulement par l’assemblée
des parlementaires: c’est ce qu’on appelle le «référendum
d’initiative populaire». Seul le référendum d’initiative
populaire rend le pouvoir au citoyen en imposant au
gouvernement de tenir compte du scrutin.
Il existe d'autres types de référendum ou de consultation
populaire, mais, dans ces cas là, le gouvernement conserve le
monopole de l’initiation et des décisions.
86
4.
La Démocratie
concurrence
Participative
crée
une
Les citoyens peuvent faire des choix plus efficacement et plus
rapidement que le pouvoir exécutif et législatif car ils sont
entièrement « libres » et non enchaînes par des considérations
diverses telles que
– Mes décisions seront-elles sanctionnées ou récompensées ?
– Mon adversaire en tirera-t-il avantage ou au contraire sera-t-il
désavantagé?
– Mes décisions auront quel impact en termes de voix de
préférence lors des prochaines élections ?
– Quel sera l’impact médiatique de mes décisions ?
– A quelle place me positionnerais-je dans les sondages?
Le peuple est « libre » de toute contrainte puisqu’il n’a pas à
être élu ou réélu. Le choix qu’il fait est donc nettement moins
partisan. Cela compense très largement son manque d’expertise
qui s’acquiert au fil du temps.
La démocratie est un organisme vivant qui doit s’adapter à
notre époque, à notre ère d'interactivité permanente. On ne peut
admettre qu'elle reste sclérosée par les règles et les formes
rigides du siècle passé. Elle a besoin d’un lifting en profondeur,
comme c’est le cas dans le domaine éducatif, économique,
scientifique, social, culturel,.... Ce n’est donc pas seulement un
droit, mais un devoir de chercher de nouvelles possibilités
démocratiques. Les citoyens "chercheurs" lèguent le fruit de
leurs découvertes à l’humanité dans toute sa diversité.
87
Dans cet essai, il n'est pas question de supprimer le parlement,
mais de créer une concurrence de laquelle découle un contrôle
accru de l'action de nos politiciens. Dans une économie de
marché, la concurrence joue un rôle de premier plan car elle
offre un large choix et donc d'avantage de qualité pour le
consommateur tandis que les monopoles ou quasi-monopoles,
assez contraignants, offrent trop souvent des services
médiocres.
88
VI.
PREREQUIS
EN DEMOCRATIE PARTICIPATIVE
La participation à la vie politique peut prendre diverses formes
et c'est à chaque communauté qu'il appartient d'en déterminer
les règles.
Dans tous les états où une participation à la vie politique est
autorisée et organisée il apparaît que la participation reste
faible, ce qui donne un argument aux autorités pour ne pas en
débattre.
C'est vrai que si 60 % de la population en âge de participer
s'abstient, cela veut dire que 40 % seulement ont participé à la
votation et qu'une majorité de 25 % (peut être) s'est exprimée
en faveur de la mesure à prendre. La mesure pourrait donc être
adoptée par 25 % des votants. Le but poursuivi n'est pas atteint
puisque 60 % des gens n'ont pas participé et leur avis n'est
donc pas pris en compte.
La meilleure méthode pour se faire reconnaître en tant que
citoyen est de participer activement à des débats.
89
Pour que la votation représente la voix de la population tout
entière, il est indispensable que trois conditions soient réunies.
Prendre conscience de l'enjeu et s'informer
Si nous ne voulons pas que nos enfants et petits-enfants vivent
à genoux,
Il est essentiel que nous nous informions. Nous ne pouvons
pas toujours compter sur les médias où les porte-parole
officiels pour recevoir la bonne information ou l'information
complète. Souvent il s'agit d'une demi-vérité, l'autre moitié
restant volontairement dans l'ombre55.
Comprendre et débattre
L'information que l'on reçoit, ou que l'on recherche n'est pas
toujours compréhensible dès la première lecture. Par ailleurs,
elle n'est souvent que partielle.
Il est essentiel que nous participions à des débats pour la
comprendre, ou pour la compléter. Les technologies actuelles
permettent de prendre part à des débats via Internet. Cela
n'empêche qu'il est parfois utile de participer à des
conférences-débats.
Pour comprendre, il faut abandonner ses certitudes et accepter
l'autre dans tout ce qu'il a de différent dans sa manière d'être,
55 Voir mon cahier d'information politique : « Ces sophistes qui
influencent la politique des États »
90
dans son mode de pensée, dans son expression.
S'engager et décider
En général, plus grand est notre confort, plus modeste est notre
engagement. L'engagement fait appel à l'indépendance
d'esprit.
Il est essentiel que nous décidions, après nous être informé et
après avoir débattu. Décider s'est s'engager et prendre des
risques. Prendre des risques c'est accepter volontairement
d'abandonner notre confort et de reconquérir notre liberté.
91
92
Deuxième logique
Une économie
différente
93
94
Les prévisions du Club de Rome
L'idée de réformer la croissance n'est pas neuve.. En 1968 –
alors que les Trente Glorieuses sont à leur apogée – se
réunirent des scientifiques, des économistes, des fonctionnaires
et des industriels de cinquante deux pays dans le but de former
un groupe de réflexion à propos des problèmes de société
engendrés par la croissance56. Après quatre ans, le Club de
Rome arriva à la conclusion que le futur de l'humanité était
préoccupant et que l'effondrement du système économique
mondial était inéluctable d'ici soixante ans. (donc à partir de
2030)..
Le Smithsonian Institution, un des organes en charge du
rapport a rédigé une version actualisée en 2012, et les
prévisions sont alarmantes57. Elles confirment qu'à partir de
2030, on doit s'attendre à un désastre. Il ne serait d'ailleurs pas
étonnant d'après ce rapport, que le système économique
s'effondre dès 2020, engendrant une baisse massive de la
population mondiale dans la décennie qui suit.
Il est aujourd'hui certain que, si les citoyens ne reprennent pas
eux-même leur destinée en main (démocratie participative
partout dans le monde – y compris chez nous – ils risquent de
mourir de faim ou de froid dans la prochaine décennie car les
systèmes politiques et économiques actuels font croire aux
56 Voir le rapport « the limits to growth - Halte à la croissance ?) » publié
en 1972 par le Club de Rome. Un deuxième rapport « Stratégie pour
demain » (1974) qui approfondissait et ciblait mieux les
problématiques.
57 Source : RTBF.be Info
95
gens que les ressources dont nous gratifie la nature – et qui
permettent la croissance que nous connaissons – sont
inépuisables. Or, rien n'est plus faux.
96
I.
LA CROISSANCE, C'EST QUOI ?
1. Définition
« Est-on pour où contre la croissance ? ». Est-ce la bonne
question, car finalement de quelle croissance parle-t-on ? Pour
répondre à cette question il faut d'abord la définir .
Tout le monde est d'accord sur le fait que la croissance
démographique s'arrêtera un jour, et d'un autre côté nul ne
conteste les bienfaits de la médecine qui permet de prolonger la
vie.
Par ailleurs, dans nos régions, la croissance a dépassé le seuil
du gaspillage tandis qu'ailleurs la croissance de biens essentiels
comme l'accès à l'eau potable est insuffisante. Chez nous, il
faudrait limiter drastiquement l'utilisation de matières fossiles
ou de matières renouvelables lentement (comme l'eau), alors
qu'ailleurs la survie des populations dépend de la croissance.
Avant de dire qu'on est pour ou contre la croissance, il est
essentiel de se poser trois questions :
– En quel lieu ?
– Dans quel sens ?
– De quel processus de croissance s'agit-il ?
Dans la nature, il y a deux types de croissance : La croissance
indifférenciée, et la croissance organique.
97
2. Croissance indifférenciée
C'est le type de la division cellulaire : Elle se divise en deux et
chacune d'entre elles encore en deux et ainsi de suite pour
former des milliards de cellules. La croissance est purement
quantitative. Elle est exponentielle puisque qu'elle est
puissance de deux.
Un croissance économique doit impérativement s'arrêter car
elle serait insoutenable et les matières premières ne suffiraient
plus.
3. Croissance organique
La croissance organique fait la différence entre les structures
des cellules et leur fonction. Les cellules deviennent
spécifiques pour chaque organe en fonction du développement
de l'organisme. Le nombre de cellules poursuit son
accroissement, mais de par sa structure et sa fonction, certaines
pourraient s’accroître tandis que d'autres diminuent.
L'équilibre est dynamique parce que dans chaque organisme
vivant parvenu à maturité, les cellules se renouvellent sans
cesse.
La croissance économique doit davantage se focaliser sur la
qualité que sur la quantité. La croissance pour la croissance ne
peut pas continuer indéfiniment.C'est le mode de croissance
déséquilibrée et indifférenciée qui est au cœur des problèmes
98
les plus graves qui menacent l'humanité. L'humanité se trouve
à un tournant décisif de son histoire : continuer sur la voie de la
croissance indifférenciée, ou choisir celle de la croissance
organique. Nous devons choisir vite sinon la solution nous sera
imposée.
99
II.
LA CROISSANCE MONDIALISEE
1.
Impératif : l'inversion nécessaire de la
croissance
Comme on vient de leur voir, la mondialisation de l'économie a
engendré la mondialisation d'une croissance indifférenciée,
c'est à dire une croissance mondiale de surabondance,
croissance mondiale qui gaspille dan l'hémisphère nord alors
que l'hémisphère sud manque du nécessaire. On privilégie
toujours la quantité de biens à la qualité des biens. En créant un
équilibre chez nous, on crée un déséquilibre dans une autre
contrée du monde.
Comme la croissance est aujourd'hui mondialisée, l'inversion
de cette croissance devra aussi être mondiale grâce à une
solidarité planétaire. Bon ben ! c'est pas gagné. Ce sont donc
les peuples qui doivent imposer à leurs dirigeants un
changement d'attitude.
Les citoyens du début du XXème siècle ont connu comme
aujourd'hui des situations de crise. Toutefois elles se
présentaient autrement. On parlait peu de mondialisation et
chacun se préoccupait de ses petites affaires sans s'inquiéter de
la cohérence avec ses partenaires. Le règlement des problèmes
au niveau provincial ou national était possible.
Si d'aventure une difficulté majeure pointait le bout de son nez,
100
on avait 10, 20, ou même 30 ans pour les résoudre car le
monde tournait relativement lentement. Et la donne n'avait pas
fondamentalement changé de nature.
Aujourd'hui, les horloges tournent trop vite et s'affolent. Les
étudiants savent bien que leur apprentissage devra être
permanent car leur bagage universitaire sera dépassé en
quelques mois seulement.
Notre croissance indifférenciée, et par voie de conséquence
exponentielle, suscite des changements à une vitesse jamais
égalée.
2. Se poser les bonnes questions
Les signes d'un danger proche sont là, sous nos yeux, et nos
dirigeants continuent à répéter : « tout çà, çà s'arrangera »,
alors qu'une analyse, menée avec rigueur, bien référencée, a
clairement établi que rester passif comme on le fait
actuellement est un manque du plus élémentaire bon sens et ne
pourrait que conduire au désastre.
Il est donc urgent d'acter l'état des lieux et de relever
courageusement les défis qu'il suggère et d’imaginer des
orientations nouvelles.
Mais pour cela il faut se poser les bonnes questions afin
d'établir pour les générations future s un rapport équilibré entre
l'homme et la nature.
101
1. Les crises telles que celle de l'énergie, de la faim dans le
monde, les matières premières, … sont-elles permanentes,
ou bien sont-elles des erreurs de parcours où encore notre
insouciance notre négligence en sont-elles pour une part
responsables.
2. Les crises peuvent-elles être résolues par chaque région,
chaque, nation, ou bien n'existe-t-il de solutions vraiment
durables que dans le cadre d'une solidarité mondiale ?
3. Les crises peuvent-elles être surmontées par les mesures
traditionnelles qui ont toujours été limitées à un aspect isolé
du développement social, comme la technologie, l'économie, la
politique, etc., ou faut-il adopter une stratégie de plus grande
portée, englobant tous les aspects de la vie sociale?
4. Quel est le degré d'urgence de la résolution des crises? Un
délai permettrait-il de gagner du temps et de rendre moins
douloureuse la mise en œuvre des mesures nécessaires? Ou
bien accroîtra-t-il les difficultés?
5. Peut-on résoudre les crises totales par la coopération,
sans sacrifices injustifiés pour l'un ou l'autre des partenaires du
système mondial? Ou y a-t-il un danger que certains puissent
s'assurer un avantage durable en recherchant l'affrontement
avec leurs partenaires dans le contexte global?
102
III.
CONSEQUENCES DE
LA CROISSANCE INDIFFERENCIEE
Nous l'avons évoqué dans la première partie de cet essai :
L’Europe en général et la Belgique en particulier connaissent
un vide de pouvoir . Le pouvoir est aux mains des
multinationales et des banques qui privilégient la gouvernance
économique à la démocratie. La résultante en est que les élus
sont liés par des accords économiques et qu'ils ont peu de
marge de manœuvre. Cela se concrétise par une augmentation
des impôts pour rembourser ses emprunts sans aucune solution
à long terme pour relancer l’économie et son corollaire:
l’emploi.
1.
Observations
Notre système économique s’affaiblit de plus en plus
Les charges qui pèsent sur notre économie et plus
particulièrement le remboursement de notre dette publique
colossale ne nous laissent aucune marge de manœuvre pour la
relancer.
Par les accords de la Jamaïque en 1976 58, par l'abandon de
l’État Providence au Profit d'un État Social Actif, les États ont
laissé le champs libre aux lobbies de l'industrie financière
58 Voir mon cahier d'information politique : « Ces faux monnayeurs qui
dirigent la Belgique et le monde »
103
d'étendre son influence à tous les niveaux de pouvoir, et par
voie de conséquence à minimiser les besoins de citoyens et à
sacraliser ses besoins propres.
Notre système financier n’est plus en phase avec
l’économie réelle.
Nos dirigeants constatent depuis longtemps que notre système
privilégie la bonne santé de la bourse plutôt que celle des
entreprises. Elles ne font rien parce qu'elles ne peuvent rien
faire. Des accords pris à la légère favorisent le commerce
mondial, l'industrie financière mondiale et dérégule les autres
formes d'économie.
Nos investisseurs se font rares
Le risque pour nos investisseurs est tel qu’ils préfèrent
s’abstenir et, du fait d'une trop importante masse monétaire
virtuelle entre autres, les banques n’accordent plus facilement
de prêts.
La paupérisation gagne du terrain
Aujourd'hui, l'emploi n'est plus une valeur sûre et ne permet
plus qu'à quelques privilégiés de se projeter sur le long terme.
Les multinationales, l'industrie financière, les accords
transatlantiques, les organes parastataux…. concurrent à
minimiser les coûts salariaux et à maximaliser les profits
financiers.
104
2.
Qui soutient encore la croissance ?
La croissance est soutenue par ceux qui recherchent le profit, et
pour les autres qui croient que la croissance a quelques mérites,
ils doivent être mal informés, car elle permet juste aux
travailleurs de maintenir leur emploi momentanément, à
quelques chômeurs d'obtenir un boulot le plus souvent précaire,
et quelques aménagements sociaux et environnementaux, mais
n'apporte à la majorité des citoyens que peu de prospérité.
105
IV.
VERS UN AUTRE MODELE DE
CROISSANCE
1.
La croissance : un système mondial
Même si la croissance est globalisée, nos élus ne peuvent rester
inactifs au niveau local tout en étant conscient que pour muer
la croissance indifférenciée
actuelle en une croissance
organique, il est indispensable qu'un accord mondial voit le
jour. Ainsi que le disait l'écologue américain Garett Hardin59
« On ne peut rien faire sans mettre en branle tout le reste ».
La déforestation de l'Amazonie60 permet aux Américains et
aux européens d'agrémenter leur confort de bois exotique, aux
autochtones de dégager des terres cultivables dans l'immédiat
sans aucune gestion seine de la forêt.. Le 'trafic' du bois gonfle
le PIB chez nous, mais crée un déséquilibre écologique
inquiétant au niveau mondial.
Les grandes enseignes
proposent souvent des produits
fabriqués à l'autre bout du monde, fabriqués par des hommes et
des femmes – parfois par des enfants – qui sont largement sous
59 Garett James Hardin (1915-2003) est surtout connu grâce à l'article
qu'il écrivit en 1968 : « The Tragedy of the Commons » (la tragédie des
biens communs)).
60 L'Amazonie s'étend sur 9 pays et principalement sur le Brésil. Elle fait
une superficie de 5.500.000 km² soit 40 fois la taille de la
Belgique .L'exploitation illégale du bois représente plus de 30 % du
chiffre d'affaire
106
payés.
L'importation de ces produits intervient dans notre PIB mais
crée une injustice sociale dans un autre continent où ces
enseignes maintiennent un climat de misère.
Les exemples ne manquent pas. Le monde est donc un système.
Toutes les actions des hommes doivent être analysées
globalement61 et leurs conséquences doivent être projetées à
long terme.
1.
Les méfaits d'une croissance qui pollue
Peut-on vraiment louer les bienfaits de la croissance alors que
la classe moyenne se paupérise de plus en plus, que la
mondialisation provoque des déséquilibres sociobiologique,
que l'écart se creuse entre ceux qui peuvent tout s'offrir et ceux
qui doivent sans cesse se contenter de peu ?
Peut-on vraiment continuer à croître de cette manière lorsqu’on
multiplie les pièges à l’emploi et que, sans aucun état d’âme, le
fisc condamne de plus en plus de citoyens à se perdre dans la
spirale de l’endettement fiscal ?
Faut-il attendre que, paupérisé par la haute finance, le peuple se
révolte? Alors, la bonne volonté dont quelques dirigeants font
preuve ne suffira plus.
61 Voir mon article sur mon site internet « paulthunissen.be 'Stratégie
pour aujourd'hui : une approche systémique' qui est un extrait du
second rapport du club de Rome.
107
Malgré des crises graves qui ont égrené l'Europe depuis la
révolution industrielle, nos dirigeants s'informent mal et ont la
conviction que la croissance est synonyme de relance alors
qu'elle permet à trois quart de l'humanité de mourir de faim et à
un quart de mourir d'avoir trop mangé.
2.
Les bienfaits d'une croissance qui aère
Il est grand temps de penser à d'autres politiques
diamétralement opposées à celles qui gouvernent l'Europe en
général et la Belgique en particulier en mettant en œuvre des
politiques désirables et réalisables, des politiques qui se
penchent sur les besoins et souhaits réels des citoyens, des
politiques qui portent en elles le germe du partage, de la justice
et de la tempérance. ?
Nous appellerons "décroissance" ce nouveau modèle
économique qui apporte un peu d'air frais. Ce n'est pas une
croissance négative, mais plutôt l'abandon de l'objectif d'une
croissance qui pollue notre environnement et qui creuse des
abysses entre les citoyens, au profit d'une politique poursuivant
une autre logique que celle du culte de la croissance pour la
croissance, favorisant le totalitarisme économique.
Dominique Bourg62 qui fut l’icône incontestée du
développement durable déclarait il y a peu: « Pourquoi ai-je
cru au développement durable ? J’ai fini, et bien d’autres avec
moi, par changer d’avis ».
62 Philosophe français qui fut professeur à l’Université de Lausanne.
108
Si l’on croit que le développement peut durablement exister, si
l’on croit encore que la croissance n’aura aucune fin, si l’on
croit qu’on peut produire éternellement… c’est se mentir à soimême car la croissance à tout va épuise les ressources
planétaires et finira par détruire notre planète bleue.
Ne serait-il pas souhaitable de travailler moins et de vivre
mieux? de consommer moins et de réfléchir plus? Ce type de
décroissance, utopique et rêve de boy-scouts pour de nombreux
observateurs, aurait au moins le mérite de protéger notre
écosystème, car, quand nous aurons fait tomber le dernier
arbre, contaminé le dernier ruisseau et le dernier arpent de
terre, pêché le dernier poisson, nous nous rendrons compte,
mais un peu tard, que l’argent n’est pas comestible. Et même
s'il l'était, nous ne saurions nous en nourrir, car la masse
monétaire est constituée à 93 % d'argent qui n'a jamais existé63.
Aucune solution clé sur porte ne pourra être apportée avant
d'avoir construit le creuset — un modèle de démocratie
participative — au sein duquel des alternatives pourront être
pensées et expérimentées.
Toutefois, en démocratie, l' engagement personnel est essentiel.
C'est un privilège de la citoyenneté que de pouvoir s'engager.
A défaut, nos familles et ceux qui recevront notre terre en
héritage pourraient être contraints de vivre à genoux.
63 Voir le cahier d'information politique : « Ces faux monnayeurs qui
dirigent la Belgique et le monde ».
109
3.
Revenir à une production marchande
Aujourd'hui, le PIB reflète plus la bonne santé de l'industrie
financière que celle du commerce des biens et des services,
c'est à dire l'échange indispensable de biens entre
Les multinationales s’étendent et étouffent le tissu économique
de proximité comme l’ivraie étouffe le bon grain de blé. La
création d’entités commerciales autogérées (coopératives) est
un bon moyen d’atteindre quelques objectifs :
· Préserver l’environnement de la pollution provoquée
par les multinationales,
· Freiner les techniques visant à réduire la durée de vie
ou d’utilisation d’un produit pour en augmenter le taux
de remplacement,
· Créer des expériences de production en marge du
système économique actuel basé uniquement sur le
profit. Elles ne provoqueront pas son effondrement mais
favoriseront son affaiblissement.
Pour mettre en œuvre ces beaux principes il conviendrait de
confronter le point de vue de tous les intervenants
(l'économiste, l'ingénieur agronome, l'ingénieur analyste,
l'écologue, le citoyen) afin
• d'avoir une vision holoptique
• de définir une attitude commune.
Par ailleurs, la production marchande crée des liens sociaux
alors que les multinationales ne crée que des enchaînements
financiers.
110
Troisième logique
un revenu garanti
Pour comprendre ce qui va suivre,
il faut accepter d'abandonner ses certitudes
et être prêt à modifier
son rapport au travail ...
... et à l'argent
111
112
I.
un système social et fiscal dépassé
1.
Introduction
Il ne faut pas être un exégète de la politique pour observer que,
dans les faits, les députés européens sont plus nombreux à
représenter les conservateurs que les démocrates, que la
logique économique l'emporte sur la logique démocratique.
A titre d'exemple, l'Europe a récemment élaboré en toute
discrétion une directive « sur le redressement et la résolution
des défaillances bancaires ».
Si c'est du chinois pour la plupart des européens, cela veut dire
concrètement qu'en cas de crise bancaire, comme ce fut le cas
en 2010, les banques en difficulté sont autorisées à se
refinancer, à concurrence de 7 %, en prélevant directement les
sommes nécessaires sur les comptes de leurs épargnants.
D'autres exemples d'accords secrets sont les traités
transatlantiques entre l'Europe et d'une part le Canada et d'autre
part les États-Unis qui sacralisent la primauté de la
gouvernance économique sur tous les modèles démocratiques.
Comment s'y opposer puisque le choix des candidats est opéré
en amont par les présidents de parti, et échappe donc à
l'électeur, raison pour laquelle les mêmes têtes siègent
régulièrement à Strasbourg quel que soit le résultat du scrutin,
113
et que les mêmes politiques libérales sont poursuivies au
mépris de l'intérêt des citoyens.
Chez nous, en Belgique, chacun peut observer que le système
social et fiscal ne répondent plus du tout à ce qu'attendent les
belges. Chacun peut également observer que l'écoute de nos
élus n'est pas du tout attentive. Pourtant, comme leur discours
est en parfaite conformité avec ce que nous désirons entendre,
nous voulons croire que nous avons élu les bonnes personnes et
qu'elles sont forcément bonnes puisque c'est nous qui les avons
élues.
Les citoyens les moins (in)formés n'ont pas conscience de la
manipulation dont ils sont victimes et pour les autres, ils en ont
conscience mais bon... »qu'est-ce qu'on peut y faire ».
On vient d'en parler : la mise en place d'un outil de démocratie
participative, ce qui n'aurait aucun sens si, dans le même temps
aucun cours d'éducation citoyenne n'était dispensé dans nos
écoles. En effet, l'un sans l'autre n'aurait aucun sens.
Ce système, à lui seul, ne produira aucun effet si on ne lui
donne aucune matière à débat et si nous n'intégrons pas deux
vérités contredites par ceux qui recherchent le profit.
•
l'information est une arme redoutable
•
l'intérêt général sera toujours supérieur à la somme des
intérêts personnels.
114
Une matière essentielle à débattre est l'objet de la présente
section : le Revenu Garanti.
Des expériences multiples ont été menées et des observations
réalisées à travers le monde, outre-atlantique, en Afrique, en
Asie, et même chez nous en Europe.
En expérimentant le Revenu Garanti, quel que soit le nom
qu'on lui donne64, des économistes – notamment des
économistes comportementaux – des sociologues, des politistes
(donc, des gens de terrain) ont observé les comportements et en
ont fait l'analyse65.
Tant mieux, car les peuples sont pragmatiques et souhaitent
surtout savoir si çà marche. Et si çà marche chez le voisin
pourquoi cela ne marcherait-il pas chez nous ?
64« revenu de base », « basic income » pour le politiste allemand Claus
Offe ;« revenu social garanti », « revenu d’existence » pour les économistes
français Henri Guitton et Yoland Bresson ; « revenu inconditionnel
suffisant » pour le philosophe français André Gorz, cofondateur du Nouvel
Observateur., « revenu de citoyenneté pour Jean-Marc Ferry « allocation
universelle » pour le philosophe belge Philippe Van Parijs ; « citizen’s
income » pour le britannique Keith Roberts ; dividende universel
65 Lire mon cahier d'information politique : « le Revenu d'existence
observé ».
115
2.
Abandonnons nos certitudes pour bien
comprendre
Notre éducation judéo-chrétienne , marquée par les valeurs
bibliques, a du mal à se faire à l'idée qu'on puisse donner de
l'argent à quelqu'un qui ne travaille pas, car de tout temps
l'homme est reconnu dans la société grâce au travail qu'il
fournit.
Dans le troisième chapitre de la Genèse, le ton est donné. Pour
avoir croqué le fruit défendu, l'homme devra désormais
« gagner son pain à la sueur de son front 66», et l'être humain
sera marqué par le péché, et donc par la culpabilité. Saint Paul
de Tarse, plusieurs millénaires plus tard rappelle que « celui qui
ne travaille pas, ne mange pas non plus67 ».
Il n'y a pas très longtemps, les mamans veillaient en général à
l'éducation des enfants et à entretenir leur maison, mais les
« maîtresses de maison » étaient peu considérées car le travail
rémunéré était la seule référence. Pour illustrer mon propos, il
suffit d'observer que le PIB ne tient compte que de la richesse
produite par ceux qui ont un travail rémunéré. Aucun autre
indicateur ne compte vraiment.
Imaginons un instant, un Revenu Garanti, alloué à chacun de la
naissance à la mort, simplement parce qu'il existe. Un revenu
d'existence calculé à partir de la richesse produite par une
région, par un pays, par une communauté. Cerise sur le gâteau,
66 Genèse( 3, 19)
67 Seconde lettre de Saint-Paul aux Thessaloniciens (3, 10)
116
ce revenu est cumulable avec les revenus d'une activité.
Bien sûr il se substituerait totalement ou en partie (selon les
courants de pensée) aux nombreuses allocations dont
bénéficient les citoyens. Ce qui est normal. Il ne faut quand
même pas vouloir le beurre et l'argent du beurre.
Ne fusse que pour accepter l'idée que le Revenu Garanti
pourrait être la bonne idée du XXIème siècle, nous devons
abandonner nos certitudes et nous (in)former. Nous devons
faire l'effort d'évacuer ce cliché enraciné dans notre
subconscient que cette révolution rendra les gens paresseux et
favorisera le déclin de nos sociétés, car rien n'est moins sûr.
Imaginons
toujours...
que
chacun
d'entre
nous,
indépendamment de son statut, de son âge ou de son activité,
dispose de ce revenu garanti. Quel serait notre comportement ?
Quel sens donnerions-nous à notre existence ?
117
II.
Les fondements philosophiques
du Revenu Garanti
L'idée d'un revenu garanti est déjà évoquée par l'ouvrage
« Utopia » de Thomas More paru en 1516. Depuis, l'idée n'a
pas cessé de se développer dans l'esprit d'économistes de tous
bords.
Aujourd'hui, plus que jamais la question fait débat. Il porte sur
le fait de savoir si l'homme moderne peut concevoir qu'on
puisse « gagner sa vie » autrement qu'à la « sueur de son
front », qu'un homme, une femme ou un enfant puisse recevoir
un revenu par le seul fait qu'il existe.
1.
Définition
Le Revenu Garanti est un revenu alloué à tout être humain de
sa naissance à sa mort, qu'il aie ou non une autre source de
revenu et quelle qu'elle soit.
Il s'agit d'un revenu réel et non une allocation ; En effet une
allocation est une assistance à des conditions et justifications
diverses alors qu'un revenu est la contrepartie d'une production
de richesses.
Le Revenu Garanti modifierait en profondeur la vie des
individus ainsi que leurs choix de vie . Et comme ce revenu
d'existence est attribué à l'enfant dès sa naissance, ce dernier
118
pourrait bénéficier à l'âge adulte d'un capital non négligeable si
toutefois l’État met en place des mécanismes qui permettent de
protéger au moins une partie de ce patrimoine.
En fonction de la production de richesses à laquelle il prendra
part du fait de son existence, il appréciera de recevoir toute sa
vie un Revenu Garanti croissant. Ce filet de sécurité l'incitera à
construire sa vie en toute sérénité en fonction de ses choix et
de ses talents, mais certainement plus en fonction d'un
impératif économique.
Le Revenu Garanti sera le fruit d'une profonde modification de
la redistribution des richesses et, par voie de conséquence du
système social actuel.
2.
Un revenu garanti pour réorganiser notre vie
Les gens n'ont pas conscience que l'emploi est devenu une
marchandise. Selon Karl Marx « chacun vend sa force de
travail », mais ne vend-t-on pas plus que çà ? Ne vend-t-on pas
son temps de vie ? une forme d'esclavage moderne.
Nul ne devrait être contraint de vendre sa vie, car la vie est un
don, et à notre tour on peut l'offrir. Nul ne devrait être contraint
de vendre son temps car il ne nous appartient pas. Il nous est
prêté et nous devrions pouvoir, à notre tour, au gré de notre
fantaisie, en prêter une partie.
Grâce au Revenu Garanti, la société se réorganisera : les
119
contrats d'emploi subiront un lifting complet, les gens ne
rechercheront plus à tout prix un CDI68 mais au contraire un
CDD69 qui leur permettra d'être maîtres de leur temps et de leur
vie et d'adapter leur activité en fonction de paramètres qui leur
sont propres afin d'évoluer sereinement dans ce monde qui
bouge sans cesse.
Ce sera la fin du salariat, et le début d'un art de vivre.
3.
Caractéristiques du Revenu Garanti
Les quatre caractéristiques essentielles sans lesquelles le
Revenu Garanti perd toute sa saveur sont :
•
•
•
•
L'inconditionnalité,
l'universalité,
l'individualité
le cumul possible avec d'autres sources de revenus
Mais il en a bien d'autres :
•
•
•
•
•
•
tout à fait transparent,
simple à appliquer et à contrôler
assure une égalité parfaite entre tous les citoyens
scelle l'appartenance à la collectivité, facteur
d'intégration et de paix sociale
exprime la reconnaissance de la dignité humaine
du fait de la possibilité du cumul possible avec une
68 Contrat à durée indéterminée
69 Contrat à durée déterminée
120
•
•
•
4.
activité rémunérée
1. supprime le seuil de pauvreté
2. n'incite plus à l'oisiveté (comme c'est le cas avec
le chômage ou le minimex)
Reconnaissance par la communauté de la valeur
économique et sociale du travail nécessaire mais gratuit
(comme le travail domestique ou le volontariat)
avantage les plus démunis
relance l'économie sans risque d'inflation
Les atouts du Revenu garanti
•
•
•
•
•
•
Ce n'est pas une prestation sociale, puisque tout le
monde la reçoit,
Il remplace les prestations sociales actuelles jusqu'à leur
montant,
Il s'impose dans une économie qui ne garantit plus le
plein emploi,
Il permet à l'homme de valoriser son potentiel créatif,
Il est discuté dans le monde entier et soutenu par
différents réseaux et personnalités,
Il peut être financé.
Le revenu garanti est
•
•
•
•
versé aux citoyens et non aux ménages,
cumulable avec les autres revenus,
versé sans qu'il y aie une exigence d'effectuer ou
d'accepter un travail,
d'un montant suffisant pour couvrir les besoins de base
121
et permettre la participation à la vie sociale.
5.
Corrélation entre le Revenu Garanti et le
P.I.B.
Actuellement, l'indice de référence est le PIB. Il ne mesure que
la production économique située à l'intérieur du pays, soit le
Produit Intérieur Brut. Bien qu'il existe un indicateur alternatif
visant à compléter le PIB70, ce n'est pas encore pour tout de
suite sauf si une majorité des citoyens votait pour une
formation politique qui préconise la présente trilogie politique.
Les différents courants de pensée s'opposent. C'est ainsi que
pour Y. Bresson, on ne devrait pas consacrer plus de 15 % du
PIB au revenu d'existence même si cela paraît peu, car il y a
plusieurs paramètres à prendre en considération, tandis que
pour Ph. Van Parijs, il faut doter d'emblée les citoyens d'un
revenu suffisant pour pouvoir vivre afin d'éviter la contrainte
de « devoir » travailler pour vivre.
6.
Le choix des mots
Les économistes et les observateurs ont attribué au revenu
garanti une pléthore d'épithètes en fonction du sens qu 'ils
veulent lui donner. En effet, le choix des mots n'est pas anodin,
et personnellement je suis séduis par la définition que donne
70 Il s'agit de l'IBED (l'Indice de Bien-Être Durable) qui prend en compte
d'autres paramètres que la consommation marchande des ménages et
qui, par son mode de calcul est très proche de l'IPV (Indice du Progrès
Véritable).
122
Yoland Bresson au Revenu Garanti : le « revenu d'existence ».
Le Revenu
Il s'agit bien d'un « Revenu » et non d'une « Allocation ». En
effet, comme je l'ai dit plus haut, pour les économistes un
revenu est la contrepartie d'une participation à la création de
richesses, tandis que l'allocation est une attribution d'assistance.
D'Existence
Selon Yoland Bresson, ce revenu « est obtenu parce qu'on
existe et non pour exister.....dès qu'on existe on participe à des
échanges de temps, et tout échange de temps est créateur de
richesses que le support monétaire rend visible ».
L'objectif est clair: Instaurer le Revenu d'Existence, en
transformant concrètement notre modèle social. C'est ainsi que
Philippe Van Parijs, mon concitoyen, parcourt le monde pour
propager l'idée, l'exposer de la manière la plus claire possible
de telle manière que chacun puisse comprendre de quoi il
s'agit.
123
III.
Le débat
1.
Pourquoi le Revenu Garanti n'a-t-il pas été
débattu plus souvent ?
Il y a deux raisons à cela:
Notre mode de pensée
Le temps a façonné notre manière de penser. C'est ainsi que
l’idée que nous puissions donner de l’argent à quelqu’un sans
qu’il ne participe à la production des ressources n'est pas dans
notre schéma.
L'illusion d'après guerre et les Golden Sixties
Au lendemain de la seconde guerre mondiale l'Europe a connu
ce qu'il est convenu d'appeler « le plein emploi ». Il a permis de
•
•
concevoir et d'affiner une protection sociale de qualité.
éviter les problèmes d'intégration puisque tout le monde
avait un emploi.
L'Europe toute entière se trouvait dans un grand jardin d’Éden.
On jouissait des retours financiers des colonies et de nos
propres entreprises florissantes comme le charbon et l'acier, et
des fleurons locaux garantissaient les emplois régionaux (le Val
Saint Lambert, les dentelles de Bruxelles ou de Bruges, les
124
porcelaines de Tournai, les étains hutois...). Les banques étaient
encore Belges (Banque de Bruxelles, Banque Lambert, Banque
Nagelmackers , Société Générale...) de même que les
compagnies d'assurance (Assurance Liégeoise, Provinces
Unies, Assurances Générales, Royale Belge,…) et la
SABENA71 était une des compagnies aériennes les plus sûres,
les plus confortables du monde, et les plus rentable du monde.
La Belgique était considérée comme un pays de cocagne où il
faisait bon vivre.
Une fois cette période terminée le monde politique affirmait en
boucle qu'on allait retrouver le plein emploi. Alors, le peuple a
poursuivi sa course folle et on a commencé à vivre au dessus
de nos moyens. Les mensonges à répétition faisaient chuter les
gouvernements72. Et les mêmes ministres, nommés et non élus,
se retrouvaient à la barre, et cela recommençait .
Inlassablement nos dirigeants disaient que çà irait mieux, les
mêmes mensonges encore et toujours.
2.
Pourquoi en reparler aujourd'hui ?
Le mensonge des têtes d'affiche
Les politiciens font miroiter que tout ira mieux. C'est pas
nouveau. Il y a quarante ans que j'entends cette sérénade, mais
il faut se rendre à l'évidence que le plein emploi connu lors des
71 Société Anonyme BElge de Navigation Aérienne.
72 Si l'on considère la période allant de 1948 à 2010, les gouvernements
ont tenu en moyenne un an et demi.
125
Golden Sixties est un miracle de l'histoire et ne se répétera pas,
car
• La croissance et les ressources du sol sont forcément
limitées.73
• Les PME disparaissent et ne se renouvellent pas74
• Les impôts augmentent mais sans aucune
compensation,
• La pauvreté gagne chaque jour du terrain75.
•
Et parallèlement, grâce aux subsides (en d'autres temps on
appelait cela des « pots de vin ») et à la faible imposition
• les multinationales accroissent constamment leurs
bénéfices et réduisent leur personnel
• les spéculateurs engrangent des bénéfices plantureux
L'un explique en partie l'autre.
Le système social actuel n'est plus en phase avec ce
que vivent les peuples
Convaincre les politiques que le Revenu d'Existence pourrait
compléter ou remplacer avantageusement le système social
actuel, serait une avancée significative. En effet, si tout le
monde s'accorde sur la nécessité d'éradiquer la pauvreté
73 Chez nous en Belgique, nous avons assisté aux fermetures successives
des charbonnages et à la fermeture progressive des Hauts Fourneaux.
74 Si l'on en croit la Libre du 31 décembre 2013, les PME ont été au
nombre de 12306 à fermer en 2013 entraînant avec elles la perte de
27.912 emplois. C'est 11% de plus qu'en 2012.
75 Le 16 octobre 2010, la Libre nous informait qu'un belge sur 7 vivait en
dessous du seuil de pauvreté (899 €/mois pour un isolé et 1888 €/mois
pour un ménage de 4 personnes) , soit 14,7% e la population.
126
galopante qui s'installe, personne n'ose toucher au système
social actuel conçu comme une cathédrale. En supprimant la
pierre de voûte, tout s'écroule. Les différentes mesures
proposées sont autant de vérins qui empêchent l'édifice de
s'écrouler. Combien de temps tiendra-t-il ainsi ?
La course à la croissance entraîne une productivité toujours
plus soutenue et par voie de conséquence une baisse du travail
rémunéré. Cet état de fait pourrait être compensé par un
Revenu Garanti pour l'accroissement d'une population qui,
dans une large mesure, ne parviendra plus jamais à trouver un
emploi.
Par ailleurs, le confort des générations vieillissantes repose en
grande partie sur les épaules des générations les plus jeunes, et
ce poids handicape déjà fortement les générations à naître.
L’État social Actif fragilise davantage les plus
vulnérables
Être Social aujourd'hui, c'est être actif. De toute façon, même
au temps de l’État Providence, cette notion était comprise par
tous. Il n'est pas bon à l'homme d'être oisif, et le Revenu
Garanti ne compte pas rendre les gens oisifs non plus.
Ce qui est interpellant c'est que le concept d'État Social Actif,
sacralisé lors du Sommet de Lisbonne76, privilégie la logique
contractuelle pour gérer les revenus de remplacements quels
76 En mars 2000 l'Union Européenne prit en compte la mondialisation de
l'économie et enterra définitivement l’État Providence.
127
qu'ils soient alors que l’État Providence privilégiait une logique
de solidarité encadrée par des règles de droit. Comme partout
les concepts libéraux remplacent les concepts démocrates.
Par ailleurs, l’État Social Actif favorise l'individualisme et
permet aux plus dominants, créateurs et entrepreneurs,
d'écraser ceux dont les aléas de la vie ont rendus vulnérables.
Le pouvoir économique prend le contrôle du pouvoir
démocratique, ce qui a pour conséquence que les communes,
les provinces, les régions, l’État Fédéral, et même l'Europe sont
impuissants politiquement face aux multinationales, aux
banques, aux sociétés publiques,.…
L’État social estime que les gens sont responsables de leur état.
« Ils n'ont qu'a trouver un emploi », et c'est reparti pour la
course à la compétence, à la croissance... C'est ainsi que depuis
2004, les pouvoirs publics font la chasse aux chômeurs. Ils sont
de plus en plus nombreux à demander de l'aide aux CPAS et de
plus en plus nombreux à se faire exclure.
La libéralisation des marchés
Grâce au mécanisme de libre concurrence, la libéralisation des
marchés et la fin des monopoles devait en principe être
favorable aux consommateurs car, pensait-on, les prix allaient
chuter. En tout cas, c'est ce que nous ont fait croire les élus de
l'époque.
L'eau : Bien que le secteur de l'eau soit toujours sous
128
monopole, l'eau à augmenté de 70% en Wallonie77 ces sept
dernières années. Une des raisons est que les pouvoirs publics
ne subsidient plus l'eau. On fait donc comme si le secteur était
libéralisé à la différence que le consommateur ne peut pas
changer de fournisseur. Bref, l'ensemble des coûts est donc
récupéré via la facture...et la TVA. Et comme les ménages ne
désirent pas payer plus que ce qu'il faut, ils font attention à
l'eau, consomment moins, ce qui entraîne une augmentation du
prix du m³. Et le chat se mort la queue !
L’électricité : Toujours en Wallonie, les consommateurs paient
pour le transport de l'énergie verte sans pour autant en
bénéficier et pourraient voir leurs factures augmenter de 20%
voire d'avantage en 2014.
Une des raison de ces deux exemples est que les gros
consommateurs paient proportionnellement moins que ceux qui
sont économes.
Les télécommunications : Les tarifs télécom augmentent sans
cesse au point que la Belgique est un des pays les plus chers
d'Europe en la matière. Par ailleurs, la régulation se fait très
mal puisque le gouvernement laisse toute liberté à l'IBPT de
réguler le marcher à sa guise. En ce qui concerne les frais pour
retard de paiement, ils sont usuraires, constituent un réel
bénéfice pour l'entreprise de télécom, et sont supportés par
ceux que les aléas de la vie rendent les plus vulnérables.
77 RTBF.be du 23 janvier 2013.
129
IV.
Les principaux courants
Le concept du Revenu Garanti est partagé autant par les
conservateurs (libéraux) que les démocrates (socialistes ou
sociaux démocrates) mais les raisons que l'un ou l'autre
invoque pour leur mise en application est différente. A titre
d'exemple :
Les conservateurs
Les conservateurs souhaiteraient que le revenu garanti
remplace le système actuel qui favorise le clientélisme et qui,
au fil des décennies est devenu inefficace. En dotant tous les
citoyens d'un Revenu Garanti Faible, les libéraux voient la
possibilité d'alléger l'état de nombreuses dépenses liées à la
sécurité sociale en privatisant l'enseignement, les soins de santé
et les services publics. Selon eux, cette démarche permettrait le
développement de l'initiative citoyenne.
Les démocrates
Les démocrates souhaiteraient que le Revenu Garanti complète
le système actuel afin de permettre aux citoyens de vivre
décemment de ce seul revenu, en ayant comme objectif la
sortie du capitalisme. Karl Marx avait déjà imaginé qu'un jour
les machines à elles seules produiraient les richesses qui
seraient redistribuées sous forme d'un Revenu Garanti. Le
montant varierait en fonction de l'âge, autour du système
130
social actuel. Ils sont plutôt favorables à un Revenu Garanti
Fort qui permette de vivre décemment sans avoir recours à un
travail, ce qui, pour les détracteurs, n'est pas finançable.
Je pense qu'une alternative à définir, en fonction de la région
où elle serait mise en œuvre, se trouve au croisement de ces
courants de pensée, celui des libéraux, traditionnellement
conservateurs, et celui des socialistes plutôt démocrates
radicaux78. La notion de gauche-droite deviendrait alors
superflue et appartiendrait au passé.
Le revenu garanti est à lui seul une grande réforme du
capitalisme et de notre mode de pensée face à l'argent, au
travail, à l'emploi. Il est débattu par deux professeurs
d'université dont les convictions divergent assez fort :
78 Les conservateurs souhaitent conserver leurs privilèges et avantages
pour engranger toujours plus de profit, alors que les démocrates
souhaitent se réapproprier le pouvoir, et essentiellement celui que nos
élus ont abandonné aux mains d'acteurs non élus, comme les
multinationales, les banques... Cette opposition entre le pouvoir
politique et économique devrait faire l'objet d'un profond débat.
131
V.
Redéfinir le travail
1.
suppression de la garantie de moyens
d'existence
Ni l’emploi salarié, ni les revenus du capital, ni les prestations
sociales actuelles ne peuvent prétendre désormais garantir le
droit à l’existence de chacun tel que défini à l’article 25 de la
Déclaration Universelle des Droits de l’Homme.
La flexibilité de l’organisation des entreprises modernes
entraîne actuellement une instabilité croissante de l’emploi
rémunéré.
En Suisse, en raison de la très forte compétitivité du pays, le
taux de chômage reste relativement bas et l’importance des
emplois précaires pour l’instant limitée. Néanmoins, il serait
illusoire de considérer la Suisse comme une île coupée du reste
du monde. L'idée d'un revenu de base est prise au sérieux par
de nombreux citoyens suisses, autrichiens et allemands... et
pourtant ces pays sont parmi ceux qui ont le meilleur train de
vie d'Europe.
132
2.
Découpler l'emploi, le travail et le revenu
Travail et revenu
On associe à tort le travail au revenu qu'il génère, car il est
normal, selon notre conception, qu'un travail génère un revenu.
Hors, si cela nous parait normal, ce n'est pas naturel. En
confondant la norme et la nature, on arrive aux dérèglements
qu'on connaît aujourd'hui. Il faudra longtemps pour changer les
mentalités.
Ce découplage partiel entre emploi et revenu est nécessaire en
raison de la disparition des emplois stables traditionnels. Le
chômage et la précarité sont en majeure partie la conséquence
d’une dynamique de rationalisation et d’automatisation qui
rend l’objectif du retour au plein emploi caduc, du moins sous
les conditions que nous avons connues durant 50 ans après la
seconde guerre mondiale.
Il s'attache à séparer l'emploi du revenu qu'il génère pour
permettre une approche différente et ainsi permettre à chacun,
qu'il travail ou non, un revenu de base suffisant pour vivre
sans un recours nécessaire à l'emploi.
Emploi et travail
L'emploi et le travail sont bien différents. Si le travail est
naturel, l'emploi est la conséquence de normes et de contrats, et
donc soumis à l'économie de marché. Réfléchissons
133
différemment et évitons d'assimiler ce qui est naturel à ce qui
est normal.
Le travail est normal, en ce sens qu'il est attaché à toute
activité, qu'elle soit végétale, animale ou humaine, et n'est pas
nécessairement attaché à un revenu, au sens où on l'entend
généralement.
Une mère de famille travaille, de même que celui ou celle qui
abandonne toute activité professionnelle pour s'engager dans
une activité de volontaire, pour s'occuper de ses parents ou de
ses enfants, et comme le disait Baden Powell, 'pour rendre la
vie plus agréable autour de nous'.
Grâce à son inconditionnalité, le revenu de base brise la chaîne
qui fait dépendre la couverture des besoins vitaux de
l’accomplissement d’un travail rémunéré.
134
A nous de sensibiliser nos proches,
nos concitoyens, nos décideurs,
nos élites
sur les fondements du monde
d'aujourd'hui
et de faire la promotion d'alternatives
économiques, financières et politiques
au monde de demain.
Vous pouvez m'écrire à l'adresse
paul.thunissen@gmail.com
inscrire en objet :
Une Trilogie Politique pour le XXIème siècle
http://paulthunissen.be
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