Magazine n°1

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Magazine n°1

Valérie Pécresse : « Changer le regard des entreprises sur le doCtorat » interview P.06 // 7 idées reçues
à dépasser sur le doCtorat, dossier P.14 // laurence Parisot fait le point sur la situation des doCteurs,
interview P.20 // eads : le Bon profil pour l’international, enquête P.22 // le nct fête ses 10 ans P.34
intelligence(s)
D o c to r at, e n t r e p r i s e s e t s o c i é t é
www.intelliagence.fr • 4,50 eUros • numéro 01 • novembre 2010
magazine
Une
opportunité
pour les
docteurs
collectivités
territoriales
01
#
06
intelligence(s)
03_ édito
L’avenir se cultive en réseau
04_ Panorama
interview
valérie Pécresse
« Il est ImpératIf de
changer le regard que
les entreprIses portent
sur le doctorat. »
interview
laUrence Parisot
faIt le poInt sur la
sItuatIon des docteurs
20
DOSSieR
7
idées reçues
À déPAsser
DoCTEURS, ENTREPRISES ET SoCIÉTÉ 22
14
L’intelli’agence
06_ interview de valérie
Pécresse
« Il est impératif de changer
le regard que les entreprises portent
sur le doctorat. »
08_ tendances
Collectivités territoriales :
une opportunité pour les docteurs
13_ Enquête : 8,4 % des ingénieurs
préparent une thèse
14_ dossier
Docteurs, entreprises et société :
7 idées reçues à dépasser
20_ interview
Laurence Parisot fait le point sur
la situation des docteurs
22_ carrières
EADS : le bon profil pour
l’international
28_ 5 propositions pour mieux insérer
les docteurs
30_ Parcours singuliers :
docteurs séduits par le marketing
34_ Formation
Les 10 ans de NCT® : apprendre
à valoriser ses compétences
37_ toUr dU monde
ABG-UFA : l’antenne
franco-allemande
38_ Master et PhD : inquiétudes
américaines sur le taux élevé
d’abandons
Carrières
eads :
le bon profIl pour
l’InternatIonal
intelligence(s)
ABG
4,7 milliards d'euros pour
l'enseignement supérieur et
la recherche
39_ Séjours : Irlande
Financement : projets de recherche
aux États-Unis
Monde : les francophones planchent
sur leurs formations doctorales
Intelligence(s) magazine : 239 rue Saint-Martin, 75003 Paris, +33(0)1 42 74 27 40 www.intelliagence.fr Directrice de la publication : Dr Martine A. Pretceille Directeur de la rédaction : Jean-Léon
Vandoorne Rédactrice en chef : Dr Évelyne Jardin Rédaction : redaction@intelligencesmagazine.fr, 01 42 74 47 14 Conception et réalisation : BythewayCreacom Responsable éditoriale :
Hélène Weisskopf Crédits photo : Guillaume Atger, David Delaporte/Andia, EADS/Astrium, EADS/Innovation Works, Masterfile, Ludovic Marin/Réa, Tristan Paviot, Nicolas Tavernier/Réa, Catherine de
Torquat, Pierre Wetzel Impression : Les Ateliers réunis, PA Les portes de la Forêt BP 72, Collégien 77615 Marne-La-Vallée Cedex Tirage : 5 000 exemplaires Routage : RMF Régie publicitaire :
Michèle Ansola publicite@abg.intelliagence.fr, +33(0)1 34 14 70 29 ou +33(0)6 89 0715 52 ISSN en cours Commission paritaire en cours Dépôt légal : à parution Prix au numéro : 4.5 €
Abonnement annuel (3 numéros) : 12 € (France), 20 € (étranger) Service abonnements ABG, 239 rue Saint Martin, 75003 Paris, +33(0)1 42 74 27 18 abonnement@intelligencesmagazine.fr
L’
« L’économie de la
connaissance et de
l’innovation a besoin
de docteurs formés
à la recherche et au
questionnement. »
aBg œuvre depuis 30 ans à l’insertion professionnelle
des doctorants et jeunes docteurs. L’approche visionnaire
de Bernard gregory, soutenue dès l’origine par le ministère de l’enseignement supérieur et de la Recherche
ainsi que par le CnRS et le Cea, s’est imposée. avec la
loi sur l'autonomie, les établissements d’enseignement supérieur sont désormais responsables de la préparation et de
l’accompagnement des doctorants. L’économie de la connaissance et
de l’innovation a besoin de docteurs formés à la recherche et au questionnement. C’est un enjeu majeur pour nos
laboratoires, nos entreprises et notre société. Forte de son expérience associative,
l’aBg se devait aussi d’évoluer en renforçant sa culture entrepreneuriale. Cette
volonté se traduit par l’adoption d’un nouveau logo et d’une nouvelle signature,
« l’intelli’agence ».
Une des initiatives de l’« intelli’agence® » a
été de mettre en service en août la première
phase de notre plateforme collaborative
bilingue web 2.0. Celle-ci doit favoriser l’interactivité et la mutualisation des connaissances, en France mais aussi à l’étranger où nous
développons nos partenariats (en allemagne et en argentine aujourd’hui, d’autres demain).
La sortie du premier numéro de votre nouveau magazine
intelligence(s) magazine, qui remplace Docteurs&Co, est une deuxième innovation. Complément du site, intelligence(s) magazine veut
vous apporter des éléments de réflexion sur les enjeux de l’emploi des
docteurs et des réponses aux questions que se posent les entreprises
et les docteurs.
Comme son prédécesseur, ce magazine s’adresse à tous les docteurs et
doctorants, mais aussi aux entreprises, à tous les acteurs académiques
et socio-économiques qui s’intéressent à l’innovation et à la recherche.
nous attendons vos suggestions, critiques et commentaires, en
espérant que vous serez nombreux à vous abonner à cette publication et à nous rejoindre sur www.intelliagence.fr. dr martine
a. Pretceille, professeur des universités, directrice de l'intelli'agence®
INTELLIGENCE(S) NovEmbrE 2010 03
panorama
4,7 milliar
| Budget 2011 |
d'euros supplémentaires pour l'enseigne
Le ministère de l'Enseignement
supérieur et de la Recherche
a annoncé un budget 2011
en forte hausse par rapport à
2010, avec 4,7 milliards d'euros
supplémentaires.
Cette augmentation
spectaculaire du budget est à
imputer principalement aux
« investissements d'avenir »
(3,58 milliards d'euros en 2011),
financés grâce au « Grand
Emprunt » et dont l’objectif
est de « doter la France de
quelques campus à forte visibilité
internationale, à la gouvernance
rénovée et ouverts sur leur
écosystème d'innovation. »
Les crédits budgétaires dits
MIRES (Mission Interministérielle
Recherche et Enseignement
Supérieur) seront eux aussi en
forte hausse : + 468 millions
d'euros, à 25,2 milliards d'euros.
Le budget du plan Campus
de rénovation de l'immobilier
universitaire recevra 508 millions
supplémentaires. Enfin, près
de 5 milliards d'euros seront
affectés au Crédit d'Impôt
Recherche (CIR), qui permet aux
entreprises d'obtenir un crédit
d'impôt en fonction de leurs
dépenses de R&D.
Les priorités de ce budget
2011 seront :
• L'attractivité des carrières
dans l'enseignement supérieur
et la recherche : le salaire
d'embauche des jeunes maîtres
de conférences devrait être
revalorisé de 12 à 25 %, et
les modalités d'évaluation
évolueront afin de mieux
reconnaître toutes les missions
assurées par les enseignants
et chercheurs, au premier rang
desquelles l'enseignement.
Des mesures seront également
prises pour promouvoir
l'excellence scientifique (prime
| France |
42
Avec 42 milliards de dollars,
de dépense intérieure de
R&D (DIRD), la France se
classe au cinquième rang
mondial, derrière les ÉtatsUnis, le Japon, la Chine et
l'Allemagne.
14,3%
En 2007, l'industrie pharmaceutique s'est
hissée à la première place des secteurs
industriels investissant en R&D (14,3 % des
dépenses), détrônant l'industrie automobile
(13,9 %) et devançant la construction
aéronautique et spatiale (11 %) ainsi que
la fabrication d'équipement radio, télé et
communication (10 %).
Source : Repères et références statistiques sur les enseignements,
04 INTELLIGENCE(S) NumÉro 01
ards
ment supérieur et la recherche
d'excellence, intéressement aux
contrats de recherche, chaires
d'excellence...). Enfin, ce secteur
échappera jusqu'en 2013 à la
règle du non-remplacement d'un
départ à la retraite sur deux, qui
frappe l'ensemble de la fonction
publique.
• L'accompagnement de la
réforme des universités et
la réussite des étudiants :
augmentation du nombre
et du montant des bourses,
construction et réhabilitation
de logements étudiants,
accompagnement des universités
vers l'autonomie, etc.
• Les moyens de la recherche :
là encore, le chantier
« Carrières » est au centre des
préoccupations, mais le budget
des organismes de recherche, en
hausse de 86 millions d'euros,
couvre également une forte
progression des moyens du
CnES, le transfert à l'Inserm
des moyens relatifs au Plan
cancer 2 et autres ajustements
concernant notamment l'IFP
et le CEA. Fabrice Martin
Plus d'infos sur le site web du ministère :
www.enseignementsup-recherche.gouv.fr
Google investit
en France
Éric Schmidt, PDG de Google, a
annoncé, le 9 septembre, l'ouverture
d'un nouveau centre de R&D à Paris,
ainsi que la création d'un Institut culturel
européen. Google, qui prévoit de recruter
de nombreux diplômés des écoles et
universités françaises, a indiqué que
son plan d'investissement en France
incluait également le financement de
partenariats de recherche, le soutien
aux entrepreneurs et aux développeurs
(formations, networking, coaching...)
et un programme ciblant les PME.
La population
doctorale
en Île-de-France
Partant du constat que « les compétences humaines, notamment celles
des diplômés de haut niveau, sont un
des facteurs les plus recherchés par les
entreprises pour localiser leurs fonctions
stratégiques », l'Institut d'Aménagement
et d'Urbanisme d'Île-de-France dresse
un bilan statistique de la situation des
docteurs dans la région, s'interroge sur
la réalité et les effets d'un éventuel brain
drain et rappelle les principaux dispositifs
existant en matière d'insertion professionnelle des docteurs.
Source : La population doctorale en Île-de-France
sous l'angle de l'emploi et de l'insertion professionnelle, avril 2010, Institut de d'Aménagement et
d'Urbanisme d'Île-de-France.
375 000 30 %
Le personnel total en R&D est évalué à plus de
375 000 personnes, dont 58 % sont rémunérées par
les entreprises. Parmi ces 375 000 employés, près de
222 000 sont des chercheurs (60 % environ).
Depuis 2000, le nombre de
chercheurs employés dans
des entreprises a augmenté
de près de 30 %. Dans le
secteur public, l'effectif des
chercheurs n'a cru que de
6 % et a stagné entre 2006
et 2007.
la formation et la recherche, septembre 2010, Direction de l’évaluation, de la prospective et de la performance du ministère de l'Éducation nationale.
interview
Valérie Pécresse
« il est impératif de changer le
que les entreprises portent sur
La ministre de l’Enseignement
supérieur et de la Recherche
salue les efforts déployés par
les écoles doctorales pour
professionnaliser leurs formations
et les encourage à aller encore
plus loin pour accompagner
la mobilité professionnelle
de leurs doctorants.
Intelligence(s) _ dix-huit mois
après la création du contrat doctoral, quelles leçons tirez-vous
de cette innovation encore peu
connue d’un large public ?
Valérie Pécresse _ le contrat doctoral mis
en place à la rentrée 2009 est une avancée
sociale qu’il était indispensable de faire. près
de 5 500 doctorants inscrits en première année en ont déjà bénéficié. grâce à ce contrat,
le doctorat est désormais reconnu comme
une expérience professionnelle à part entière,
et le doctorant bénéficie de garanties de sécurité juridique et de protection sociale. ainsi
par exemple, les années de recherche dans le
cadre d’une thèse et le grade obtenu à l’issue
sont repris dans l’ancienneté des jeunes
chercheurs et enseignants-chercheurs. les
nouveaux titulaires sont classés à un échelon
plus élevé, leurs années de contrat doctoral
comptent comme des années de titulaire.
de plus, ce contrat est unique et identique
pour tous les établissements d’enseignement
supérieur ou de recherche et permet en tant
que contrat de travail d’accumuler des droits
à la retraite, ce que ne permettait pas, par
exemple, le système des libéralités auquel il a
été mis fin.
Intelligence(s) _ Les campus
d’excellence peuvent-ils jouer un
rôle pour que l’importance des
docteurs dans la dynamique économique et sociale soit, demain,
mieux valorisée ?
V.P. _ avec les 7,7 milliards d’euros qui
leur sont consacrés par les investissements
d’avenir, les initiatives d’excellence vont permettre d’attirer les meilleurs enseignants, les
meilleurs chercheurs et aussi les doctorants,
en leur offrant notamment des infrastructures de recherche de pointe, équipées des
dernières technologies. de plus, ces campus
vont ouvrir la voie à des partenariats toujours
plus étroits entre les universités, les grandes
écoles et les organismes de recherche, mais
également favoriser les rapprochements
avec les entreprises. en effet, l’expertise et le
savoir-faire de nos doctorants seront autant
d’atouts pour accélérer l’innovation et le
transfert technologique vers ces entreprises.
Intelligence(s) _ Les entreprises et
les universités ont appris à mieux
travailler ensemble. Faut-il aller
plus vite, plus loin, alors que l’économie de la connaissance repose
aussi sur une meilleure intégration des docteurs dans l’univers
concurrentiel ?
« gRâCe aU COntRat
DOCtORaL, Le DOCtORat eSt DéSORmaiS
ReCOnnU COmme Une
expéRienCe pROFeSSiOnneLLe à paRt
entièRe. »
« iL eSt eSSentieL
De mainteniR Le
DiSpOSitiF “jeUneS
DOCteURS” DU CRéDit
impôt ReCheRChe. »
regard
le doctorat. »
V.P. _ la france souffre encore d’un
déficit de reconnaissance du doctorat
par les entreprises. À titre de comparaison, dans la plupart des pays de l’ocde,
les titulaires d’un doctorat représentent
entre 50 % et 80 % de la population
des chercheurs en entreprise, alors qu’en
france, ils représentent moins de 15 %
de cette population, contre plus de 50 %
pour les ingénieurs. cette « exception
française » traduit une méconnaissance
de la valeur d’un docteur par les entreprises et leurs dirigeants. mais elle est
aussi le reflet du cloisonnement de notre
système de recherche, dans lequel les
découvertes scientifiques ne sont pas
suffisamment traduites en innovations
de rupture. II est impératif de changer le
regard que les entreprises portent sur le
doctorat. le nouveau contrat doctoral
qui reconnaît le doctorat comme une
vraie expérience professionnelle était un
préalable nécessaire. recruter un jeune
docteur, c’est recruter un diplômé de l’enseignement supérieur au fait des dernières
avancées scientifiques dans son domaine,
et à même d’apporter un point de vue
nouveau sur les problématiques de l’entreprise. recruter un jeune docteur, c’est
aussi recruter un profil disposant d’une
double culture privée et publique, capable
de développer des collaborations avec les
laboratoires publics. en allemagne, la majorité des chercheurs privés sont titulaires
d’un doctorat et jouent efficacement ce
rôle de pont entre la recherche amont et
la recherche appliquée.
et c’est tout l’intérêt du dispositif
« Jeunes docteurs» du crédit Impôt
recherche,
recherche, que d’encourager nos entreentre
prises à investir sur nos jeunes talents.
Intelligence(s) _ Le Crédit impôt
recherche est un vecteur d’intégration des docteurs très utilisé
par les entreprises, notamment
par les PMe. Le remettre en
cause n’est-il pas dangereux ?
V.P. _ Je pense, et les parlementaires
l’ont bien compris, qu’il est essentiel de
maintenir le dispositif « Jeunes docteurs»
du crédit Impôt recherche, qui permet aux
pme de déduire une partie des coûts liés au
recrutement de doctorants. d’autant plus
qu’il rencontre un succès croissant. en effet,
le dispositif est désormais connu des écoles
doctorales et des entreprises. entre 2006
et 2008, le nombre d’entreprises y ayant
recours a plus que doublé, pour atteindre
près de 700 déclarants. Il est donc primordial de maintenir le dispositif inchangé,
pour en tirer tous les bénéfices, particulièrement au moment où les investissements
d’avenir vont multiplier les opportunités de
partenariat et donc les occasions pour les
entreprises de recruter un docteur.
Intelligence(s) _ Les universités
devraient-elles faire évoluer leur
offre de formation des docteurs
en fonction des débouchés
professionnels ?
V.P. _ aujourd’hui, l’enseignement supérieur et la recherche ne constituent plus
l’unique débouché des jeunes docteurs.
nombre d’entre eux s’orientent vers les
métiers de l’industrie ou du management.
les écoles doctorales, au sein desquelles
se retrouvent universités et grandes écoles,
ont fait évoluer leur offre de formations
afin de les rendre plus professionnalisantes.
pparallèlement,
arallèlement, dans le cadre du contrat
doctoral, l’employeur doit aider le
doctorant à préparer sa mobilité professionnelle. de plus, ce contrat permet au
doctorant d’exercer toutes les fonctions
liées aux métiers de la recherche : valorisation de la recherche, missions de conseil
ou d’expertise pour des entreprises ou des
collectivités, et, bien sûr, l’enseignement.
toutes les activités susceptibles d’être
confiées aux doctorants contractuels sont
nécessairement accompagnées d’une
offre de formation adéquate. des efforts
considérables ont donc été accomplis
depuis deux ans. les universités doivent
aujourd’hui poursuivre leur démarche
de professionnalisation de leurs formations
au niveau du doctorat.
Intelligence(s) _ L’insertion
des docteurs fait aujourd’hui
partie des missions des
universités. Qu’attendez-vous
de l’ABG qui travaille depuis
30 ans dans cette direction,
et plus particulièrement à
l’international ? sa mission
doit-elle évoluer vers, par
exemple, celle d’opérateur ?
V.P. _ l’abg doit continuer à faire profiter
les jeunes scientifiques de son expertise,
notamment en les accompagnant dans
leurs démarches d’insertion professionnelle, et à remplir son rôle d’interface entre
tous les acteurs (associations de jeunes
chercheurs, medef, apec…). ses missions
s’inscrivent naturellement dans le cadre
de l’internationalisation de la recherche
française et des actions en faveur de l’attractivité de nos établissements, en étroite
collaboration notamment avec le futur établissement public issu du rapprochement
entre campus
campus ffrance
rance et eegide.
gide. n
tendances
AMbRE nELEt //
Docteur en optique.
Chargée de mission
Optique et Enseignement
supérieur, au Conseil
régional d’Aquitaine.
ambre.nelet@aquitaine.fr
Une
opportunité
collectivités
territoriales
pour les docteurs
Les collectivités territoriales offrent aujourd’hui des postes intéressants
pour des docteurs prêts à ne plus exercer le métier de chercheur et que l’univers
des entreprises privées n’attireraient pas.
L
es effectifs de la fonction publique
territoriale se sont envolés ces dernières années : + 40 % entre 1998 et
2008, selon le journal Les Échos
(26/08/2010). et si les perspectives
d’emploi restent stables en 2011, les
postes laissés vacants par le départ des seniors devraient soutenir les besoins en recrutement d’ici 2018, date à
laquelle la moitié des personnels de catégorie a (niveau
bac +5) partiront à la retraite, souligne Jean-françois lemmet,
président de l’association nationale des directeurs des
ressources humaines des territoires
(andrhdt). « Les opportunités devraient
être particulièrement fortes dans les
moyennes et les grandes collectivités de
quatre régions : Île-de-France, RhôneAlpes, Bretagne et Nord-Pas-de-Calais,
ajoute Jean-françois lemmet. Beaucoup
de postes qui vont s’ouvrir peuvent
convenir à des docteurs en gestion et en
droit, ainsi que d’autres issus des filières scientifiques ou des
sciences humaines et sociales. Le Conseil général des Hautsde-Seine (92) a ainsi recruté des docteurs en droit pour gérer
l’immobilier du département. » À l’agence régionale de
développement (ard) de l’Île-de-france, trois docteurs spécialistes en économie de l’innovation et économie européenne travaillent à la direction de l’attractivité durable des
territoires (dadt), souligne son directeur Vincent gollain,
lui-même titulaire d’un doctorat en politique économique de
l’université paris I. auteur d’une thèse en arts du spectacle
consacrée aux cérémonies des Jo, sylvain bouchet a, lui, posé
ses valises à annecy, où il aide la ville à préparer sa candidature aux Jo d’hiver de 2018. « Je dois rallier des partenaires
sportifs et culturels autour des projets, en tenant compte des
contraintes budgétaires et techniques, et en intégrant les avis
des acteurs politiques, explique-t-il, aucune journée ne ressemble à une autre. »
ExPErtIsE rEchErchéE
les régions, départements et grandes villes qui soutiennent
la recherche sur leur territoire ont ouvert leurs portes à des
docteurs issus des filières scientifiques
dans leurs services chargés de cette
mission. c’est le cas d’ambre nelet,
chargée de mission optique et
enseignement supérieur, au conseil
régional d’aquitaine, d’aurélie baker,
docteur en biochimie et biophysique
au conseil général midi-pyrénées, ou
encore de Julie Keirsse-haquin, docteur en chimie, au conseil général de l’essonne. les élus
locaux s’appuient sur l’expertise de ces conseillers techniques de haut niveau pour prendre leurs décisions. « Nous
apportons notre expertise sur les projets scientifiques, notre
connaissance du terrain, du milieu de la recherche et de
l’innovation, aux élus qui sont libres de suivre ou non notre
avis », explique Julie Keirsse-haquin.
du traitement des appels d’offres au suivi des dossiers de
demande de financement, en comités de pilotage, les
connaissances scientifiques de ces docteurs jouent un
LeS éLUS LOCaUx
S’appUient SUR
L’expeRtiSe
DeS DOCteURS
pOUR pRenDRe
DeS DéCiSiOnS.
Nous apportons
notre expertise
sur les projets
aux élus,
qui sont libres
de suivre ou non
notre avis. Julie Keirsse-Haquin //
Docteur en chimie.
keirsse@yahoo.fr
Elle travaille au Conseil
général de l’Essonne
sur des politiques de
soutien à la recherche et à
l’innovation dans la filière
santé-biotechnologie.
Je suis payée par
mission, donc mes
rentrées d’argent
sont irrégulières.
il est nécessaire
de savoir bien
se gérer.
Jeanine Le bihan //
Docteur en histoire.
jeaninelebihan@hotmail.fr
Elle est auto-entrepreneur.
tendances
BeaUCOUp De pOSteS
qUi VOnt S’OUVRiR
peUVent COnVeniR
à DeS DOCteURS en
geStiOn et en DROit,
ainSi qUe D’aUtReS
iSSUS DeS FiLièReS
SCientiFiqUeS OU DeS
SCienCeS hUmaineS
et SOCiaLeS.
Je dois rallier
des partenaires
sportifs et
culturels autour
des projets…
Aucune journée
ne ressemble à
une autre.
| point de vue |
des qualités
qui peuvent faire peur
Vincent Gollain, directeur de la direction de l’attractivité
durable des territoires (dadt) et docteur en politique
économique, s’exprime sur les compétences professionnelles des docteurs, encore mal perçues par les recruteurs.
Les docteurs ont appris à analyser une masse
conséquente de données et à les structurer. Ils ont
tous développé des capacités rédactionnelles pendant leur
thèse, ce qui leur permet de rédiger des rapports consistants
rapidement. Ils savent prendre du recul et se mettent
aisément dans la posture de progression permanente.
Malheureusement, les docteurs continuent à effrayer
certains recruteurs pour trois raisons : ils ne sont
pas formatés car aucune thèse ne ressemble à une autre ;
ils sont devenus (trop ?) autonomes dans leur façon de
penser et ils ont (trop ?) aiguisé leur sens critique.
Le blog de Vincent Gollain : http://www.marketing-territorial.org/
Sylvain bouchet //
Docteur en arts
du spectacle.
sylvainbouchet@yahoo.fr
Il aide la ville d’Annecy à
préparer sa candidature aux
Jo d’hiver de 2018.
Aurélie baker // Docteur
en biochimie et
biophysique.
aurelie.baker@cg31.fr
Elle travaille au Conseil
général Midi-Pyrénées.
rôle clé. ambre nelet est sûre que sa spécialisation en
optique/laser, obtenue dans un laboratoire de l’université
de bordeaux, a été un atout capital lors de son recrutement
car elle devait évaluer les projets d’un programme de financement de grands instruments. même configuration pour
aurélie baker, diplômée de l’université de toulouse : « Mon
sujet de thèse à l’interface biologie et biophysique a constitué un point fort sachant que je suis en contact étroit avec
les trois pôles de compétitivité toulousains (CancerBio Santé, Agrimip Innovation, Aerospace Valley) ». « Ma
thèse a été un gage de sérieux, même si ce n’est pas tant
mon sujet de thèse que mon domaine scientifique qui a
compté », renchérit Julie Keirsse-haquin, diplômée de l’université de rennes, qui travaille aujourd’hui sur des politiques de soutien à la recherche et à l’innovation dans la
filière santé-biotechnologie, secteur clé en essonne.
si elles ont dû renoncer à faire de la recherche, ambre
nelet, aurélie baker et Julie Keirsse-haquin font partie de
l’écosystème local de la recherche et de l’innovation : leurs
contacts avec les cellules de valorisation des universités,
DanS
L’éCOSYStème
LOCaL
D’innOVatiOn.
entreprises, incubateurs, pôles de compétitivité… sont d’une
grande richesse, soulignent-elles. « Le travail
est très varié, beaucoup plus qu’au laboratoire, mais la
charge de travail est très forte », avertit ambre nelet.
« Au départ, il faut s’adapter, ajoute Julie Keirssehaquin. C’est un environnement qui peut paraître très
contraignant lorsque l’on vient du monde de la recherche, où l’on organise souvent ses journées au
rythme de nos expériences. » l’humilité est également
une qualité appréciée : « Dans mes déplacements, je
m’exprime au nom de ma région, et non pas en mon
nom propre. Pour un chercheur qui a été acculturé à
l’affirmation de soi, ce n’est pas évident au départ »,
explique ambre nelet.
ces profils scientifiques peuvent être également recherchés par les pôles de compétitivité. s’ils ne financent
pas directement la recherche, « ces pôles facilitent et
| en pratique |
COMMEnt ?
« Commission
permanente,
séance plénière,
délibération, crédit
de paiement,
autorisation de
programme,
maîtrise d’ouvrage,
maîtrise d’œuvre,
CPER (Contrat
de Projet État
Région), FEDER
(Fonds Européen
de Développement
Régional)... ce sont
les termes qui
rythment notre
travail de chargé de
mission », explique
Ambre Nelet.
LIrE
Philippe-Jean
Quillien,
La culture
territoriale
en 70 fiches,
Ellipses, 2009.
catalysent la mise en place des projets de recherche collaboratifs par de la mise en réseau ou de la gestion de
projet », explique tania rougier, ingénieur-docteur en
génie des procédés alimentaires et aujourd’hui animatrice de projets sur les thématiques « céréales, nutrition,
santé humaine » et « céréales, alimentation animale »
au pôle céréales Vallée (63), après avoir été conseillère
technologique et innovation à la chambre de commerce
et d’Industrie (ccI) du loir-et-cher (41). « Mon temps de
travail se répartit en quatre grands types de tâches :
40 % est consacré aux projets (génération et suivi des
projets, appui à la recherche de financement, animation
de groupes de réflexion), 25 % à la communication extérieure (promotion du pôle, de ses activités, des projets
et des compétences des adhérents ; participation à des
salons ; relation avec les financeurs, la presse et les partenaires), 20 % aux relations avec les adhérents et les
prospects, et 15 % au fonctionnement du pôle (labellisation, réunions internes, veille, formation individuelle... ). » tania rougier n’a pas vraiment le temps
comment pousser la porte si l’on est attiré par
une carrière dans une collectivité locale? ambre nelet,
Julie Keirsse-haquin et aurélie baker ont toutes démarré
en contrat à durée déterminée (cdd).
ÊtrE à L’écoutE dEs bruIts dE couLoIr
du laboratoire a permis à ambre nelet d’apprendre
l’ouverture d’un poste dont la description était
affichée sur le site de la société française de physique.
aurélie-marie baker a su que le poste était disponible
via son supérieur hiérarchique issu du même
laboratoire. avant la fin de son cdd, elle a passé
le concours d’ingénieur territorial, réussi sans
difficulté, avec de la chance : l’épreuve écrite de
5 heures portait sur les déchets à risque infectieux,
domaine qu’elle maîtrisait bien. et elle s’était
préparée à l’épreuve orale sur les aspects juridiques
des collectivités locales. prendre un poste en cdd
avant le concours permet de vérifier que « l’on peut
s’adapter à ce milieu très différent de celui de
la recherche », recommande Julie Keirsse-haquin.
AdrEssEr unE cAndIdAturE sPontAnéE
peut porter ses fruits selon Jean-françois lemmet,
président de l’andrhdt. « Si votre profil accroche,
on pourra vous proposer un CDD de trois ans
renouvelable une fois, puis transformable en CDI.
Même quand les docteurs ne sont pas recrutés sur
leur titre et diplôme, des opportunités sont à leur
portée s’ils savent présenter le plus apporté par leur
expérience doctorale, s’ils sont capables de répondre
à des besoins précis de la collectivité ciblée, le tout
d’une façon très opérationnelle. » ce qui implique
de bien se renseigner sur la structure dans laquelle
on pose sa candidature.
FrAnchIr LA PortE dEs AGEncEs
d’IntérIm est une solution à ne pas négliger, car
le recours est devenu légal dans le secteur public en
août 2009. « En dehors du milieu académique et de
la R&D, mieux vaut ne pas parler de son sujet de thèse
lors de l’entretien d’embauche, où il est nécessaire
de pouvoir répondre aux besoins du recruteur »,
conseille de son coté Vincent gollain à la tête de
la dadt d’Île-de-france, confirmant les expériences
de nombreux docteurs. sylvain bouchet est un peu
l’exception. son expertise accumulée pour sa thèse
sur les cérémonies des Jo est aujourd’hui fort utile
pour aider annecy à préparer sa candidature aux Jo
2018. « En avril 2009, j’avais écrit à la mairie d’Annecy
en appuyant ma candidature avec des références aux
missions réalisées en parallèle à ma thèse, comme par
exemple au théâtre de Genève, au musée d’art
contemporain de Lyon, au musée des Moulages,
à l’opéra de Lyon, etc. Je n’étais donc pas
estampillable "intello". »
tendances
| en pratique |
de s’ennuyer et ses conditions de travail sont
proches de celles qu’elle a connues pendant sa thèse
cifre, où elle était en interaction avec beaucoup d’interlocuteurs. en revanche, elle se sent « loin de la science,
et ceci pourrait être rédhibitoire si l’on y reste attaché »,
prévient-elle.
tania Rougier //
Ingénieur-docteur en
génie des procédés
alimentaires.
taniarougier@gmail.com
Elle est animatrice de projets
au pôle Céréales Vallée, dans
le Puy-de-Dôme.
Je suis venue
leur apporter
mon statut
de docteur,
mes qualités
d’adaptation,
mes compétences
en méthodologie
et mon réseau
universitaire.
Emmanuelle Pierre-Marie
// Docteur en sociologie.
pierre-marie@apur.org
Elle travaille à l’Atelier
Parisien d’Urbanisme (APUR).
urbAnIstEs, socIoLoGuEs, hIstorIEns…
l’importance croissante des problématiques d’aménagement du territoire et de développement durable crée par
ailleurs, au sein de structures travaillant avec les collectivités
territoriales, des opportunités nouvelles pour les diplômés
des sciences humaines. en 2003, emmanuelle pierre-marie,
docteur en sociologie rejoint l’agence d’urbanisme de la
région du havre et de l’estuaire de la seine (aurh), en tant
que chargée d’études. l’aurh, sous statut associatif avec
une délégation de service public, accompagne les acteurs
locaux dans leurs réflexions sur l’aménagement de ce territoire. le sujet de thèse d’emmanuelle pierre-marie sur les
pratiques domestiques du téléphone était très éloigné des
préoccupations de l’agence. en revanche, « je suis venue
leur apporter mon statut de docteur, mes qualités d’adaptation, mes compétences en méthodologie (enquête qualitative) et mon réseau universitaire. » le travail en agence
d’urbanisme est plus varié mais plus contraint que dans un
laboratoire universitaire, estime emmanuelle pierre-marie.
« Il faut également apprécier de travailler en équipe interdisciplinaire, ainsi qu’avec des acteurs très divers − politique
et institutionnel −, animer des réunions, présenter les
conclusions d’études devant des élus, bref, suivre les projets de A à Z, de l’élaboration du cahier des charges au
rendu du rapport final, voire à la mise en place des actions
préconisées. Savoir gérer son temps est capital car nous
rendons des comptes à des commanditaires. »
« J’ai beaucoup appris à l’AURH, et forte de cette première
expérience, j’ai pu accéder à mon poste actuel, responsable
de deux observatoires,
dont l’un porte sur le
handicap et l’autre sur
l’exclusion. À l’Atelier
Parisien d’Urbanisme
(APUR), je suis la première sociologue.
Maintenant, dans les agences d’urbanisme, il est un peu
plus courant de rencontrer des docteurs en urbanisme,
mais aussi en démographie, etc. »
« L’agence d’urbanisme de Lyon compte depuis longtemps
des doctorants et des docteurs, explique son directeur
olivier frérot. L’agence, connue pour sa culture « recherche », investit 10 % de son chiffre d’affaires dans la
DeS empLOiS
pOUR
DOCtORantS
en CiFRe.
COMbIEn ?
En début dE cArrIèrE,
un ingénieur territorial gagne
1 603,12 € bruts mensuels. si vous
négociez votre formation par la
recherche comme une expérience
professionnelle de deux ans, vous
pourrez espérer aux alentours de
2 000 €.
l’expérience de Julie Keirsse-haquin :
« À l’embauche, ma thèse a été
considérée comme une vraie expérience
professionnelle, et cela a impacté mon
niveau de rémunération. Dans mon
salaire, une partie est liée à mon grade
et à mon ancienneté et elle est fixée
par une grille. Viennent s’y ajouter des
primes qui représentent une partie non
négligeable de mon salaire. Ces primes
varient d’une collectivité à l’autre et sont
plus ou moins négociables. »
en savoir plus
www.lagazettedescommunes.com/
fichescarrieres/pdf/ingenieur.pdf
Les grilles de salaire :
http://territorial.over blog.fr/ext/
http://www.123territorial.fr/ingenieur_
territorial_01_07_09_448.htm
R&D et trois doctorants en thèse Cifre sont parmi nous,
explique-t-il. Nos doctorants défrichent de nouveaux terrains, et sont des maillons forts pour nourrir nos liens durables avec les laboratoires académiques. De plus, nous
avons le temps de les observer pendant trois ans, et c’est
un excellent processus de pré-embauche. »
unE hIstorIEnnE Auto-EntrEPrEnEur
après une thèse en histoire sur l’ostréiculture et la société
ostréicole en bretagne sud, Jeanine le bihan a choisi en
2009 d’être une historienne libérale en optant pour le statut d’auto-entrepreneur. elle a ainsi réalisé des travaux de
recherche pour la commune de penestin (morbihan) en
2009, puis sur des marais en cours d’acquisition pour le
conseil général du morbihan en 2010 (titres de propriété
desdites parcelles, historique de la mise en valeur et de son
aménagement). « Je suis payée par mission, donc mes rentrées d’argent sont irrégulières. Il est nécessaire de savoir
bien se gérer, mais je suis mon propre patron et j’apprécie
beaucoup cette liberté », explique Jeanine le bihan qui a
trouvé ses premiers clients grâce à ses réseaux locaux.
pour la plupart des docteurs, travailler pour une collectivité
locale implique d’avoir fait le deuil de la recherche… et
certains s’en portent fort bien. Dr Évelyne Jardin
en bref
tendances
LeS ingénieURS
S’intéReSSent
aU DOCtORat
les anciens élèves des grandes écoles poursuivent de plus
en plus leurs études après l'obtention de leur diplôme.
est-ce un effet de la crise écono- la formation par la recherche et ce,
mique ? en 2009, 18,2 % des ingé- dans des proportions totalement inénieurs diplômés ont poursuivi des dites. en effet, en 2010, 45 % des
é t u d e s . I n t e r ro g é s
ingénieurs poursuivant
sur les raisons de leur
leurs études ont fait le
choix, ils expliquent
choix de se lancer dans
majoritairement qu’il
un doctorat, contre un
s’agit d’« acquérir une DeS ingépeu plus d’un tiers en
spécialisation, dans le nieURS qUi
2008 et 2007. le doccadre de mon projet pOURSUiVent
torat devient donc le
LeURS étUDeS
professionnel » ou en- Se LanCent
diplôme le plus couru
core d’« acquérir une DanS Un
des jeunes ingénieurs.
double compétence ». DOCtORat.
QuEL tyPE dE
les conditions difficiles
doctorAt ?
du marché du travail ne sont évoquées les thèses cifre représentent un quart
qu’à hauteur de 3,8 % des réponses. Il des inscriptions en doctorat, et elles
est vrai qu’un an après l’obtention de sont à 92 % des cas préparées dans
leur diplôme, 91 % des jeunes issus le cadre d’un contrat à durée déterdes grandes écoles sont en poste.
minée (cdd).
45%
QuEL dIPLômE En PLus ?
ce surcroît de compétences, les ingénieurs viennent le chercher dans
source : conférence des grandes écoles, résultats
de l’enquête Insertion des jeunes diplômés 2010,
gilles greneche, juin 2010.
nOUVeaUx DOCteURS :
LeS USa atteignent La paRité
hOmmeS/FemmeS
sur les 57 599 doctorats délivrés en 2008/2009, 28 962 (50,4 %)
l'ont été à des femmes et 28 469 (49,6 %) à des hommes. c'est la
première promo à compter plus de femmes que d'hommes. un fait
statistique qui cache tout de même de fortes disparités selon les
disciplines. les sciences de la santé sont les plus féminisées (70,2 %),
suivies des sciences de l'éducation (67,3 %). en revanche, la percée
reste à confirmer en sciences de l'ingénieur (21,6 %), ainsi qu'en
mathématiques et en informatique (26,8 %).
graduate enrollment and degrees: 1999 to 2009, nathan e. bell, council
of graduate schools, Washington, 2010.
65 000 doctorants
en France
en 2009/2010, 65 000 doctorants
étaient inscrits dans les universités
françaises, soit 5 % de l’ensemble
des étudiants. 67 % sont européens.
la répartition sur le territoire illustre
l'attractivité de la région parisienne
qui rassemble, à elle seule, un tiers
des inscrits. en lettres, cette tendance
est plus marquée encore avec 44,9 %
des inscrits en Île-de-france, et 31,5 %
dans la seule académie de paris.
source : http://issuu.com/
1/3 de la r&d
mondiale aux usa
avec plus du tiers des dépenses
mondiales de r&d, les états-unis, malgré
une relative érosion face aux pays
émergents, maintiennent leur leadership.
depuis l'accession au pouvoir de barak
obama, le budget du gouvernement
fédéral a augmenté de 0,3 % par an en
termes réels, en soutien à la recherche
fondamentale dans les laboratoires
fédéraux et les universités. Quant au
secteur privé, véritable moteur de la
r&d américaine, il a en 2008 investi
268 milliards de dollars, soit 67,5 %
des dépenses nationales (+ 20 mds par
rapport à 2007).
source : www.bulletins-electroniques.com
ingénierie :
stabilité des
recrutements
avec 16 200 recrutements prévus
en 2010, les besoins du secteur de
l’ingénierie seront stables par rapport à
2009, mais toujours en retrait par rapport
à 2008 (environ 25 000 emplois offerts),
selon les données de l’apec (association
pour l’emploi des cadres). la r&d
représente 58 % des besoins. Quelque
29 % des postes sont ouverts à des jeunes
diplômés de moins de 1 an d’expérience,
30 % à des jeunes cadres ayant 1 à 5 ans
d’expérience. l'Île-de-france est la région
qui offre le plus d’emplois, devant paca,
rhône-alpes et midi-pyrénées.
source : http://jd.apec.fr
dossier
[
[
uNe idée reçue est uNe oPiNioN Qui A LA PArtiCuLArité de
s'AdMettre AiséMeNt, Pour diverses rAisoNs : eLLe est très
réPANdue, CeLui Qui LA trANsMet LA CoNsidère souveNt
CoMMe évideMMeNt déMoNtrée ; eLLe est AGréABLe À
AdMettre PArCe Qu'eLLe réPoNd À uNe QuestioN redoNdANte,
GêNANte, ou CoMPLexe. Les idées reçues soNt souveNt
FAusses et CoMMe Les Lieux CoMMuNs, eLLes soNt teLLeMeNt
iNtéGrées dANs LA CuLture Qu'iL est diFFiCiLe de Les CoNtrer.
docteurs,
entreprises
& société
idées
reçues
à dé
déPasser
L’expertise et le savoir-faire des docteurs issus de la formation universitaire devraient
être autant d’atouts pour l’innovation et la recherche. Malheureusement, la France se
distingue par le peu d'intérêt et de reconnaissance dont font preuve nombre de ses
acteurs économiques pour la formation doctorale. Les difficultés d’insertion professionnelle des docteurs ne sont pas dues à une surabondance de diplômés en dehors
de quelques domaines particuliers mais plus à la persistance de trop d’idées reçues.
01
idée
reçue
L
es pouvoirs économique et géopolitique se rééquilibrent au profit
de l’asie. les hommes découvrent
que leur planète est mortelle. nos
modes de vie se modifient de plus
en plus vite. un ordre établi qui se
renverse, c’est une crise mais aussi une source d’opportunités, à condition « d’en comprendre la logique et de
savoir se servir de connaissances nouvelles accumulées »,
comme le rappelle Jacques attali.
la culture de la recherche n’a peut-être jamais été aussi
indispensable aux organisations, aux entreprises, à notre
société. et dans l’économie de la connaissance que l’europe veut promouvoir, la compétitivité d’un pays comme
la france dépendra de ses capacités de recherche et
d’innovation. le moment est venu d’accorder une plus
grande place aux hommes et femmes formés à la créativité, à l’autonomie et à la pensée critique, c’est-à-dire
aux docteurs.
car si les titulaires d’un doctorat ou d’un phd jouissent
dans le monde entier d’une reconnaissance professionnelle
et sociale, ce n’est pas tout à fait le cas en france. « Dans
le secteur privé, la culture de l’ingéniorat l’emporte sur la
formation scientifique et technique universitaire. Cette
dichotomie renvoie à l’opposition de deux stéréotypes :
celui de l’ingénieur polyvalent, gestionnaire de projets,
pragmatique et orienté résultats, contre celui du docteur,
chercheur enfermé dans son laboratoire, uniquement préoccupé de l’avancée de travaux théoriques et déconnectés
de la réalité concrète », fait remarquer grégoire pauze,
chasseur de tête chez hudson, spécialisé sur les postes de
r&d et ingénierie. pour bruno carrias, auteur de Recrutez
des docteurs pour booster votre entreprise, publié en association avec l’abg, « nos performances économiques
et notre capacité à innover gagneraient pourtant à une
présence beaucoup plus forte des docteurs dans les entreprises, dans les activités de R&D et plus globalement
dans le management. Encore faut-il en être convaincu et
briser certaines “parois de verre”. » et pour cela dépasser
notamment sept idées reçues sur le doctorat.
[on forme
trop de docteurs
en France]
zoom
Regard des
recruteurs
Ils AImeNt
chez les docteurs
le sens de l’analyse, la maîtrise
de méthodes
rigoureuses, la
résolution de problèmes complexes,
l’invention de
solutions innovantes, la maturité,
la ténacité, la capacité d’apprentissage, le potentiel.
Ils RegRetteNt
que les docteurs
ne sachent pas
valoriser leurs
compétences, un
éloignement des
préoccupations
du marché, une
spécialisation trop
poussée, des difficultés à communiquer avec des
non-spécialistes,
une méconnaissance de
l’entreprise.
Ils RedouteNt
un sens critique
acéré, une trop
grande autonomie,
le non-respect de
la hiérarchie.
E
n pourcentage d’une classe d’âge, la plupart des pays
de l’OCDE forment davantage de docteurs que la
France, rappelait en juillet 2010 le Centre d’analyse
stratégique (CAS). Les États-Unis forment 53 000 PhD par
an, l’Europe 100 000 docteurs, dont 12 000 en Allemagne
et un peu plus de 10 000 en France. « Dans un pays qui
revendique la société de la connaissance, c’est peu. Et
c’est encore moins si l’on songe que 40 % de ces jeunes
docteurs ne sont pas de nationalité française », faisait
remarquer Lionel Collet, président de la Conférence des
Présidents d’Université (CPU) au colloque sur le doctorat
organisé début avril 2010, à Nancy. La Chine a ainsi entrepris de rattraper son retard à grand pas : elle compte aujourd’hui 240 000 PhD, contre seulement 18 il y a trente
ans. Comparée aux autres pays de l’OCDE, la faible insertion en entreprises en France des titulaires de doctorat
est d’abord due « à un sous investissement du secteur
privé en recherche et développement », concluait l’étude
du CAS. Malgré ses organismes de recherche publics de
renom, la France, avec 8 chercheurs pour 1 000 actifs,
n’arrive qu’à la 7e place des pays de l’OCDE, derrière
l’Allemagne et loin derrière la Finlande (14,5 chercheurs
pour 1 000 actifs) et le Japon (10,7 chercheurs), deux pays
dont les succès économiques reposent sur l’innovation et
les technologies. Reste une bonne nouvelle : les effectifs
des chercheurs dans le privé (près de 125 000 en 2007)
progressent depuis dix ans et dépassent désormais ceux
du secteur public. « S’il y avait davantage de docteurs
chez les décideurs, l’approche du pays en matière
de recherche et d’innovation serait bien différente », soulignait Bernard Belloc, conseiller
enseignement supérieur et recherche à l’Élysée, au colloque 2010 de la CPU. n
ce qu’elle en pense : « La France
s’est positionnée sur son potentiel
d’innovation plus que de production,
elle doit donc jouer la carte de la formation de nombreux chercheurs. »
Clarisse Angelier, chef du service Cifre à l’Association
Nationale de la Recherche et de la Technologie (ANRT).
dossier
02
idée
reçue
[[docteurs
d
=
chercheurs]
l
es enquêtes les plus récentes du cereq
(centre d’études et de recherches sur les
qualifications) le confirment : les docteurs
sont plus nombreux à débuter leur carrière en
dehors de la recherche académique. ce n’est
pas ce qu’ils souhaitent. Invités à se projeter
sur l’avenir à l’occasion du soutien de leur
thèse, les docteurs déclarent encore, dans 7
cas sur 10, vouloir travailler pour la recherche
publique. Ils ne seront pourtant que 25 % à
prendre ce chemin, compte tenu du nombre
de postes à pourvoir chaque année. près d’un
docteur sur deux trouvera finalement un em-
04
idée
reçue
[rémunération :
émunération :
être docteur, ça
ne paie pas]
ploi dans le secteur privé, dont 21 % pour
continuer dans la recherche et 25 % sur des
postes hors recherche. cette tendance montre
que les docteurs peuvent aujourd’hui faire valoir des compétences recherchées sur des emplois hors recherche. « Ce phénomène est voué
à se développer. Des secteurs comme le conseil
en informatique et l’ingénierie vont beaucoup
augmenter leurs recrutements de docteurs car
ils vont avoir besoin d’une grande quantité
de personnels très qualifiés », explique
Julien calmand, ingénieur d’études au
deVa (département des entrées dans
la Vie active) du cereq. n
ce qu’il en pense : « en allemagne, le fait de
préparer une thèse ne signifie pas que l’on se
destine à une carrière dans la recherche ou
l’enseignement supérieur. » dr rené Krempkow,
responsable au centre d’information sur la recherche universitaire à bonn
(faire carrière en entreprise ou dans la recherche en allemagne, docteurs&co,
hors série 2009).
E
n france, le doctorat n’est, pour un jeune, malheureusement pas un antidote contre le chômage.
celui-ci touche un diplômé sur dix, trois ans après
avoir obtenu leur diplôme en 2007. derrière cette statistique alarmante, se cachent des situations variées. selon
une enquête réalisée par l’abg auprès de 9 024 diplômés
recrutés entre janvier 2006 et mai 2009, les docteurs en
sciences pour l’ingénieur, en informatique et en mathématiques présentaient les durées d’insertion en cdI les
plus courtes. les biologistes, les docteurs en sciences de
la terre et en sciences humaines et sociales avaient le plus
de difficultés à trouver un cdI. selon l’anrt (association
sources
• Les chiffres du palmarès
2009, ministère
de la Recherche et de
l’Enseignement supérieur
et oséo, juin 2009 (PDF)
• Note de veille n° 189,
juillet 2010, Centre
d’analyse stratégique
• Chiffres clés, Bilan
des dispositions issues de
la loi de 1999 sur l’innovation
et la recherche, ministère
de la Recherche (PDF)
• Rapport annuel
sur l’évolution des PME 2009,
2e partie, oséo, décembre
2009 (PDF)
• Livre blanc du MEDEF, CIR,
décembre 2009 (PDF).
• Doctorat, doctorants et
Docteurs, Colloque de Nancy,
avril 2010, Confédération
des Présidents d’Université,
• Synthèse des résultats
sur l’insertion des docteurs
issus de la génération 2004,
juin 2009, Céreq, juin 2010 ,
Dr Julien Calmand et
Dr Jean-François Giret,
• Recrutez des docteurs pour
booster votre entreprise,
Éditions Eyrolles, 2009,
Bruno Carrias,
• Recruiting PhDs: What
Works?, Vitae, mars 2007
(PDF), Dr Charles Jackson,
• Faire carrière en entreprise
ou dans la recherche en
Allemagne, Docteurs&Co hors
série n°3, octobre 2009 (PDF),
Dr René Krempkow,
• Dépenses de R&D en France
en 2007, Note d’information
de l’enseignement supérieur &
recherche n°10.05, juin 2010
• L’état des lieux de l’emploi
scientifique en France,
ministère de l’Enseignement
supérieur et de la Recherche,
rapport 2009 (PDF),
observatoire de
l’emploi scientifique
03
idée
reçue
l
[les docteurs
ne sont pas
préparés à
l'entreprise]
a formation doctorale est-elle adaptée aux
compétences requises en dehors de l’université
et des organismes de recherche ? Création des
écoles doctorales, charte des thèses, contrat doctoral
créé l’année dernière… les choses ont bien changé
en dix ans. et de nombreuses écoles doctorales ont
mis en place des modules de formation pour renforcer les compétences transversales de leurs doctorants. désormais, ceux-ci sont sensibilisés à la gestion de projet, la propriété industrielle, l’intelligence
économique, la vulgarisation scientifique et la communication... Cependant, dans le privé, les préjugés
des employeurs envers la formation doctorale ont
encore la vie dure. « Nous l’avons clairement vu lors
nationale de la recherche et la technologie) qui pilote les
thèses cifre (convention Industrielle de formation par la
recherche), 90 % des docteurs ont obtenu un emploi six
mois après leur soutenance dans ce cadre, 96 % un an
après. selon des données collectées par l’abg en septembre 2010 auprès de 181 docteurs, leur rémunération
brute annuelle moyenne s’élevait à 37 140 euros pour
des postes en r&d et 32 618 euros pour les autres fonctions. un docteur est en moyenne mieux rémunéré qu’un
master, mais moins bien qu'un diplômé d'une grande
école prestigieuse. mais, des grandes entreprises comme
saint-gobain recherche recrutent leurs docteurs, sur des
de l’enquête réalisée en 2009 sur le recrutement dans
les secteurs du conseil en informatique et de l’ingénierie, hormis chez les employeurs et les recruteurs qui
ont eux mêmes réalisé un doctorat », explique Julien
Calmand. « les docteurs sont de mieux en mieux
préparés à leur insertion future par leurs écoles doctorales. Pour les docteurs qui connaissent mal l’entreprise, la fédération syntec vient à leur rencontre
sur les campus (Paris VI, Rennes). sur nos métiers de
prestation intellectuelle, la recherche de solutions
innovantes est essentielle pour apporter une
véritable plus-value aux clients de nos entreprises », explique François mabillot de
la fédération syntec ingénierie. n
ce qu’il en pense : « notre école doctorale compte environ 350 doctorants dont
certains sont déjà salariés (ils sont par
exemple enseignants dans le secondaire).
elle tisse des relations avec les entreprises
de La plaine-Commune, regroupement de
communes où s’insère notre université. »
dr Gilles Brougère, professeur de sciences de l’éducation,
directeur adjoint de l’école doctorale erasme, université paris Xiii.
postes de r&d, à des niveaux de rémunération supérieurs
de ceux offerts aux ingénieurs car elles reconnaissent le doctorat comme une première expérience
professionnelle. n
ce qu’ils en pensent : « en France, la
proportion de CDD parmi les docteurs est
moins importante que dans certains pays de
l’OCDe, même si elle est élevée et a augmenté de dix points entre 1999 et 2007. » mohamed
harfi et Laudeline auriol, centre d’analyse stratégie, juillet 2010.
dossier
05
idée
reçue
[Pme
et docteurs,
je t'aime moi
non plus]
l
es diplômés attirés par une carrière en entreprise ont
tendance à focaliser leurs recherches sur les multinationales. or, les groupes de plus de 2 000 salariés
emploient désormais moins de la moitié des chercheurs travaillant en entreprise, 46 % exactement, contre 20 % pour
les entreprises de 500 à 2 000 salariés et 34 % pour les pme
ne dépassant pas 500 salariés, selon l’enquête mesr-depp
« la r&d en france en 2007 ». les grands groupes offrent
toujours de meilleures rémunérations. la moyenne annuelle
brute pour les docteurs recrutés par des grands groupes
était de 36 795 euros contre 34 384 euros dans le cas de
pme de moins de 500 salariés, selon des données collectées en septembre 2010 par l’abg auprès de 180 docteurs
récemment recrutés. mais les docteurs ne regardent pas
que leur feuille de paie. dans une enquête menée en 2009
par l’abg auprès de 356 docteurs insérés en entreprise, ils
déclaraient avant tout être attentifs aux éléments suivants :
« l’absence de routine », « se sentir utile », « travailler dans
un bon climat ». des éléments souvent présents dans une
pme, où en r&d, on est très proche des applications et en
prise directe avec la stratégie de l’entreprise.
avec le crédit Impôt recherche (cIr) qui permet de déduire
des impôts le double du montant du salaire chargé d’un
docteur embauché en durée indéterminée (cdI), les pme
disposent d’un outil précieux afin d'associer les compétences souvent cruciales pour innover. pourtant, selon une
enquête d’oséo publiée en décembre 2009, 70,6 % des
pme n’avaient pas utilisé le cIr / embauche des docteurs. Il
est vrai qu'en amont, la démarche d'obtention d'accréditation cIr est assez ardue pour une petite structure. la chose
faite « en 2004, nous avons obtenu notre accréditation et
nous avons embauché trois docteurs. Ces profils ont été
préférés à des ingénieurs pour des raisons clairement
financières, mais nous avons du mal à trouver les
bons candidats », explique dr bruno sudret,
directeur de la recherche et de la stratégie,
phImeca engineering sa. n
ce qu’il en pense : « Le CiR permet à des
moyennes entreprises d’embaucher des
docteurs. C’est la deuxième étape d’un
processus d’intégration qui passe souvent au
préalable par une thèse Cifre. » sébastien Horemans,
président de la commission innovation et économie numérique de la cgpme.
07
idée
reçue
[docteurs
en sciences humaines :
point de salut hors
de l'université]
I
l n’y a pas d’emplois à la hauteur des compétences des docteurs des sciences humaines hors
de l’université, pensent une écrasante majorité
de doctorants à la fin de leur thèse ! en effet, selon le CeReQ, 88 % des doctorants en lettres et
sciences humaines (lsH) se projetaient dans le
secteur académique pendant leur formation doctorale, mais seulement 34 % avaient atteint cet
objectif trois ans après la soutenance. où vont
les autres ? une très petite proportion rejoint la
R&d en entreprise. une plus grosse ira travailler
pour des établissements d’enseignement privés,
maisons d’édition, collectivités locales (voir article
p. 8-11), musées, associations, etc. Certains créent
06
idée
reçue
[les docteurs
ne créent pas
d'entreprise]
e
n 2010, 49 % des lauréats du concours
national d’aide à la création d’entreprises de technologies innovantes
étaient titulaires d’un doctorat (contre
53,2 % en 2009). pour la sociologue
sandrine emin, trois raisons expliquent
cette appétence des jeunes à créer des
entreprises : tout d'abord, ils sont culturellement moins attachés à l’institution
scientifique ; également ils y sont incités
parfois par les directeurs de laboratoire,
cela valorise les recherches qui y sont menées ; et enfin sur des marchés de l’emploi
encombrés comme celui des sciences de
la vie, c’est une autre façon de se lancer.
« La proportion de docteurs qui concourent
est importante, mais il faut avouer qu’ils
sont des exceptions », tempère hugues
souparis, président du concours 2010, pdg
leur propre activité et deviennent auto-entrepreneurs en tirant profit de leurs fortes capacités
d’autonomie, prouvant que la création d’entreprise n’est pas l’apanage des docteurs en sciences
expérimentales. Car les entreprises font de plus
en plus appel aux compétences de chercheurs en
sciences humaines (sociologues, psychologues…)
pour des études ou recherches ponctuelles, ou
pour comprendre leur environnement. depuis
bientôt vingt ans, l’ANVIe (Association Nationale
de Valorisation Interdisciplinaire de la recherche
en sciences humaines et sociales auprès des
entreprises) tend ainsi des passerelles entre le
monde de la recherche et celui de l’entreprise,
d’hologram Industries. « En France, l’esprit
d’entreprise est davantage porté par les
diplômés d’écoles d’ingénieurs et de commerce, tout simplement parce qu’ils sont dès
le début de leur cursus immergés en entreprise et qu’ils reçoivent des cours de gestion.
Mais le monde universitaire bouge. » depuis
la loi de 1999, les chercheurs confirmés
peuvent participer à la création d’une entreprise ou collaborer à une entreprise privée,
pour valoriser leurs travaux de recherche
sans avoir à quitter leurs fonctions. selon les
statistiques du ministère de la recherche,
sur dix ans, 1 200 projets ont ainsi abouti à
une création d’entreprise en majorité
dans les domaines des stIc et des
sciences de la vie. n
ce qu’il en pense : « il faudrait que les jeunes
formés dans les universités viennent se frotter
au monde de l’entreprise très tôt dans leur
cursus. attendre d’être en thèse Cifre pour
découvrir notre univers, c’est déjà tard. »
Hugues souparis, pdg d’Hologram industries.
en organisant des rencontres où chercheurs et
dirigeants confrontent résultats de la science et
expériences de terrain. les dirigeants qui
viennent dans ces séminaires apprécient
les réflexions originales, les regards
disciplinaires différents, l’absence de
regard monolithique. n
ce qu’elle en pense : « Les chercheurs issus des
sciences humaines qui interviennent aux séminaires
de l’anVie sont des empêcheurs de tourner en rond,
des libres penseurs. ils ne sont pas là nécessairement
pour dire ce que les dirigeants désirent entendre. »
Alice Bertrand, directrice de l’anvie.
interview
laurence Parisot
« Le grand emprunt prévoit 20 milliards
d’investissements pour la recherche... avec
à la clé un grand nombre d’opportunités
pour les docteurs. »
Dans une interview à Intelligence(s), Laurence Parisot souligne les
avancées qui ont permis, ces dernières années, d’élargir les débouchés
professionnels des docteurs. Beaucoup reste à faire, notamment dans
le domaine des sciences humaines et sociales. Selon la présidente du
Medef, il serait utile de proposer aux doctorants des compléments de
formation en management de l’innovation.
Intelligence(s) _ Les entreprises
et les universités se sont approchées. Faut-il aller plus vite et
plus loin pour relever le défi de
l’économie de la connaissance et
pour mieux intégrer les docteurs
dans l’univers concurrentiel ?
Laurence Parisot _ la réponse est oui,
bien sûr… les réformes de ces dernières
années ont permis de construire des
passerelles entre les universités et les
entreprises : chaires, développement
des cifre, mise en place du dispositif des
doctorants conseils… Il s’agit désormais
de développer ces nouvelles possibilités
de coopérations et de les faire connaître
à toutes les entreprises, notamment aux
pme. c’est le sens par exemple de l’opération « pourquoi se priver des docteurs ? »
lancée par le medef et l’abg. cette initiative consiste à promouvoir les doctorants
et les docteurs auprès des chefs d’entreprises et à créer des liens entre les écoles
doctorales et le monde économique. nous
réfléchissons également à la manière dont
les doctorants pourraient bénéficier d’une
formation à l’entrepreneuriat.
par ailleurs, le grand emprunt prévoit
20 milliards d’investissements pour la recherche. ces investissements considérables
ouvrent une large voie à des partenariats
public-privé entre les universités et les
entreprises. avec à la clé un grand nombre
d’opportunités pour les docteurs.
humaines et sociales (shs) dans leur ensemble.
les diplômés en shs commencent à être
mieux identifiés et intégrés par les entreprises. les docteurs en sciences humaines
et sociales peuvent intéresser largement
les entreprises, par exemple en management, en marketing, en ergonomie... mais
promouvoir les profils sciences humaines et
sociales auprès des recruteurs est une action
de longue haleine. un premier pas a été fait
avec l’opération phénix ; j’ai bien l’intention
de mobiliser les entreprises pour obtenir des
résultats plus significatifs encore…
Intelligence(s) _ Les universités
Intelligence(s) _ La relation entre
devraient-elles penser plus la
formation des docteurs au regard des débouchés professionnels, comme elles l’ont fait pour
le master ?
les entreprises et les docteurs est
encore victime de nombreuses
idées reçues. Percevez-vous
des signes qui montrent que
les choses évoluent dans le bon
sens ?
L.P. _ elles le font déjà : l’insertion des
doctorants fait partie des missions des
écoles doctorales. un dispositif comme le
cifre, créé depuis 30 ans et qui concerne
30 % des doctorants scientifiques, s’inscrit
clairement dans un objectif de débouché
professionnel. toutefois, il serait utile de
proposer aux doctorants des compléments
de formation, notamment en management de l’innovation. le medef travaille
actuellement sur un projet de cette nature,
en collaboration avec l’abg.
accueillent peu de docteurs issus
des filières de sciences humaines
et sociales. Y a-t-il des solutions ?
des actions à lancer ?
L.P. _ cette question ne concerne pas
seulement les docteurs, mais renvoie aux
difficultés d’insertion des filières sciences
L.P. _ en quelques années, la perception
de l’utilité de la formation doctorale a
évolué de manière très positive. Il y a
10 ans on se posait la question de l’utilité
de la thèse. aujourd’hui, des publications
spécialistes des ressources humaines titrent
Recruter les docteurs pour booster votre
entreprise. progressivement, la situation
des docteurs s’améliore sensiblement en
termes de recrutement, de rémunération
et de perspective de carrière. ainsi, 90 %*
des cifre intègrent une entreprise en cdI.
de grands groupes industriels embauchent désormais les jeunes docteurs à un
niveau de salaire au moins équivalent à
celui des diplômés des plus prestigieuses
écoles d’ingénieur. de plus en plus de
docteurs ont, au cours de leur carrière,
des postes à responsabilité et intègrent les
comités exécutifs. c’est le cas par exemple
chez renault, alcatel-lucent ou encore
microsoft. autant de signes encourageants
qui font sortir définitivement les docteurs
en sciences de l’anonymat social.
sont très attachées au Crédit
impôt recherche (Cir), notamment les PMe. Pourquoi serait-il
dangereux de le supprimer ?
L.P._ une remise en cause serait effectivement très dangereuse. Instables, les aides
à la recherche sont inefficaces. le nouveau
cIr, appliqué depuis 2008, a permis de
doubler le nombre de bénéficiaires qui
sont à 80 % des pme. toutes les enquêtes
réalisées en 2010 par les pouvoirs publics
ont démontré l’impact économique de
ce dispositif sur le développement de la
recherche et de l’innovation dans les entreprises. l’Inspection générale des finances
a évalué à 150 % l’augmentation des
embauches de docteurs dans le secteur
privé entre 2007 et 2009. cette dynamique
se poursuivra à condition que le dispositif
soit pérenne. c’est pourquoi le medef agit
avec détermination pour le maintien
en l’état du cIr. n
*enquête cifre -anrt juin 2010
« nOUS RéFLéChiSSOnS
à La manièRe DOnt
LeS DOCtORantS pOURRaient BénéFiCieR
D’Une FORmatiOn à
L’entRepReneURiat. »
carrières
le bon profil pour
l’international
Le groupe européen EADS, leader
mondial de l’aéronautique,
de l’espace, de la défense et
des services associés, mise sur
l’innovation et la recherche pour
garder un temps d’avance. Le
constructeur des Airbus, qui a
délogé Boeing de la première
place de l’aéronautique civile,
a la cote auprès des étudiants.
EADS était, à nouveau en 2010,
l’entreprise préférée des diplômés
des grandes écoles d’ingénieurs
françaises, devant Google,
selon le classement Universum.
À l’affût de tous les talents, le
groupe ouvre aussi largement ses
portes aux doctorants ayant suivi
des filières scientifiques et leur
propose de réelles opportunités
de carrière, tant en France
qu’à l’international.
Recherches
acoustiques :
insonorisation
des cabines
d’avion.
O
ui, les doctorants
peuvent faire de
belles carrières professionnelles chez
EADS. » barbara
cochard, en charge
de la stratégie rh et du développement des
compétences du groupe, sait de quoi elle
parle. cette universitaire, docteur diplômée
de l’université paris VI en mathématiques
appliquées, a commencé sa carrière au
centre de recherche de l’aérospatiale,
devenu depuis eads. elle y restera onze
ans, jusqu’au jour où elle décide d’évoluer
vers une autre activité au sein du groupe.
aujourd’hui, elle se consacre au développement des experts du groupe eads.
« Nous avons mis en place un développement de carrière dans l’excellence technique sur le même mode de fonctionnement qu’une évolution managériale,
explique-t-elle. Un expert connaîtra une
aussi belle progression qu’un manager,
tout en restant dans l’excellence de son
domaine de prédilection. Et on compte
beaucoup de docteurs, parmi ces experts. »
european aeronautic
Defence and Space Co (eaDS)
est né en juillet 2000 de la
fusion du groupe français
aerospatiale matra avec le
groupe allemand Daimler
Chrysler aerospace ag
(DaSa) et l’espagnol CaSa.
eaDS est un leader mondial
de l’aéronautique, de
l’espace, de la défense et des
services associés. en 2009, le
groupe a dégagé un chiffre
d’affaires de 42,8 milliards
d’euros. il emploie environ
119 000 personnes, dont
44 760 en France et 43 814
en allemagne.
eaDS, c’est :
airbus : coleader mondial
de la construction d’avions
de ligne et de transport
militaire.
astrium : premier groupe
spatial européen, numéro
3 mondial, des satellites,
lanceurs et services
spatiaux ; rôle central dans
les programmes galileo,
ariane 5 et Columbus.
Cassidian (ex- Défense et
Sécurité) : systèmes de
missiles, communication,
électronique de défense et
services associés.
eurocopter : premier
constructeur mondial
d’hélicoptères.
sa méthode. » au sein des équipes,
diplômés de grandes écoles et docteurs
se voient proposer les mêmes opportunités au départ. chacun évoluera
ensuite en fonction de ses aspirations
et de ses compétences. éric duceau,
chef adjoint de département au centre
de recherche et professeur à l’école
des ponts paristech, a démarré sa vie
professionnelle avec un seul diplôme :
son master II à paris VI, ce qui ne l’a
pas empêché de mener une très belle
carrière d’expert et de manager (voir
témoignage p. 25).
eaDS doit exécuter et
si eads est peut-être moins focalisé
sécuriser les programmes
que les grandes entreprises françaises
a380, a350, a400m
militaire, hélicoptère nh90
sur les diplômés des grandes écoles, il le
naval, et préparer les
doit sans aucun doute à sa dimension
programmes de demain,
internationale. « Les équipes en France
notamment les avions
commerciaux de prochaine
ne sont pas uniquement composées de
génération, les hélicoptères
Français, mais également d’étrangers
x4 et de transport lourd,
ariane 6 et le drone talarion. pour qui le concept de grande école
pour des informations
n’existe pas. Cela change les lignes et
complémentaires :
contribue à modifier notre vision du
www.eads.net recrutement, explique barbara cochard.
Et cette démarche perdure tout au long
de la vie professionnelle. Nous incitons
mIxIté dEs ProFILs : sourcE d’InnoVAtIon
nos collaborateurs à démarrer leur carrière à l’international
une approche égalitaire qui prévaut dès l’embauche.
car c’est un véritable plus pour leur évolution. En outre,
« Notre politique de recrutement est ouverte sur tous
ils montrent qu’ils sont capables de faire preuve d’ouverles diplômes, affirme barbara cochard. Parce que nous
ture d’esprit en acceptant de travailler dans une ambiance
pensons fondamentalement qu’une représentation
multiculturelle. Dès leur première prise de poste, les docdiversifiée et mixte des formations est source de richesse
teurs hommes ou femmes peuvent se voir proposer un
et d’innovation. Nos collaborateurs ne sont pas “formaposte à l’étranger, en particulier dans une division comme
>>
tés“ de la même manière et chacun apporte sa vision,
Cassidian (ex-Défense et Sécurité). »
Dans l'avenir,
carrières
>>
dEs thèsEs QuI débouchEnt
sur dEs EmbAuchEs
les champs d’intervention d’eads sont si vastes que
barbara cochard développe des liens et des passerelles
avec un très grand nombre d’universités, soit pour l’accueil de doctorants, soit pour l’embauche de docteurs. en
ce qui concerne les thèses, plusieurs options sont possibles.
pour des sujets très en amont de l’activité du groupe, eads
finance des thèses au sein de laboratoires universitaires.
pour des sujets « moyen terme », le doctorant peut réaliser
son travail à eads, au sein des équipes. « Dans les deux
cas, cette première collaboration peut déboucher sur une
embauche, affirme barbara cochard. Si l’on mise sur la
formation et les recherches d’un jeune pendant trois ans,
le but est de capitaliser sur le travail accompli. » un contrat
qui peut prendre la forme d’un cdI, d’un postdoc, ou d’un
VIe (Volontariat International en entreprise), qui permet
aux entreprises françaises de confier à un jeune de moins
de 28 ans une mission professionnelle à l’étranger durant
une période modulable de 6 à 24 mois, renouvelable une
fois. « Nous proposons beaucoup de contrats en VIE pour
l’Allemagne, pays où nous comptons autant de salariés
qu’en France. » un volant d’embauches non négligeable
dans un groupe qui n’a pas cessé de recruter malgré la
crise : en 2009, eads a accueilli 5 663 nouveaux collaborateurs, dont 2 259 en france. et parmi ces nouveaux
arrivants, une proportion considérable de femmes, dans
un secteur qui peine à se diversifier sur les carrières
| portrait |
Ariane lorton : les maths au cœur
ARIAnE LORtOn
travaille sur les
probabilités et
statistiques
appliquées.
Avec un prénom à s’envoler
dans l’espace grâce à père
passionné d’aéronautique,
rien d’étonnant à ce qu'Ariane
lorton ait été attirée très tôt
par « ce qui vole ». sciences,
maths et physiques passionnent
cette jeune fille qui envisage de
préparer supaéro mais intègre
Centrale Paris. en dernière
année, elle choisit une spécialité
de mathématiques appliquées.
mais cela ne lui suffit pas.
« J’ai voulu faire en parallèle
un master à Paris VII pour
aller plus loin dans la théorie
des maths. » Pour le stage de
fin d’études, comme nombre
de camarades de Centrale,
Ariane choisit la finance, avec
un stage de six mois consacré
aux finances quantitatives au
sein de la salle des marchés
de la banque Calyon. « Cette
expérience m’a confirmé que
j’aimais beaucoup les probabilités et les statistiques, mais pas
dans ce contexte. » Pourquoi
ne pas revenir à ses premières
amours, l’aéronautique ? « Des
entreprises comme EDF, Total,
prennent de plus en plus en
compte l’apport des probabilités et des statistiques dans les
métiers de l’ingénierie. Pourquoi
ne pas l’appliquer à un domaine
qui me faisait rêver ? » Coup de
chance : un sujet de thèse sur les
probabilités et statistiques appliquées s’offre chez eAds. en avril
2009, Ariane intègre l’équipe de
mathématiques appliquées à
suresnes, qui comprend quinze
personnes réparties en deux
pôles de compétences, dont
l’un est consacré aux probabilités et statistiques. Parmi les
cinq personnes de ce pôle, un
doctorant et un permanent ont
un cursus 100 % universitaire. et
demain ? la thèse d’Ariane doit
s’achever en septembre 2012,
mais elle réfléchit déjà à la suite.
« EADS propose des opportunités de carrière multiples. Et je
suis sûre d’une chose : je veux
continuer dans la recherche en
entreprise. »
innovation
Works :
le centre
névralgique de
la recherche
| interview |
ÉRIC DUCEAU
directeur scientifique
du département
d’Innovation Works
du centre
de Suresnes (92).
« La formation par la recherche
est nécessaire dans l’innovation»
trois questions à éric duceau, directeur
scientifique du département d’Innovation Works consacré à la modélisation
et aux simulations, président du département Ingénierie, mathématiques et
Informatique à l’école des ponts paristech.
Quelle est votre approche vis-à-vis des profils d’universitaires quand vous recrutez ?
Je ne recherche pas les mêmes qualités chez un
universitaire ou un ingénieur. pour l’innovation,
la formation par la recherche est un vecteur
exceptionnel. Je regarde la formation et l’expérience d’un universitaire. autre argument :
l’international. À l’étranger, être polytechnicien
ne signifie rien. un doctorat est beaucoup plus
visible et reconnu qu’un diplôme d’ingénieur.
J’essaie de déterminer comment un universitaire évoluera en entreprise. certains docteurs qui ont fait une thèse en laboratoire et
imaginent pouvoir réaliser le même travail au
sein d’eads seraient déçus. le taux d’embauche de docteurs est tout à fait correct chez
eads, surtout pour ceux issus d’universités
reconnues. leur rémunération pendant la thèse
dépasse 2 500 euros par mois et leur salaire
d’embauche est voisin de celui des ingénieurs
du groupe a, parce que nous reconnaissons
une « ancienneté valorisable » dans les années
de thèse (en milieu industriel). lorsqu’il y a un
poste à pourvoir, sur 10 profils, je sélectionne
2 à 3 universitaires, 2 à 3 ingénieurs du groupe
a, les autres cV concernant d’autres profils
généralistes.
Quel a été votre parcours ?
J’ai intégré l’université paris VII, puis paris VI où
j’ai fait ma thèse sur les mathématiques appliquées. J’y ai rencontré des gens extraordinaires.
mais ce monde est aussi parfois déconnecté
de la réalité. J’ai commencé par travailler dans
des petits bureaux d’études et j’ai trouvé cette
expérience très enrichissante. les ingénieurs
rêvent tous de grands groupes alors que l’esprit
d’entreprise développé au sein de petites structures est très formateur.
Quelle a été votre évolution
au sein d’eAds ?
J’ai d’abord opté pour l’expertise, et suis
devenu chef du service de mathématiques
appliquées. mais j’ai aussi pu chez eads mener
une carrière mixte et j'ai pris des fonctions
de management en marge de mon titre de
senior expert, encouragé dans cette voie par
ma hiérarchie. le fait de manager en direct des
équipes tout en gardant ma légitimité d’expertise me permet d’influer sur des décisions
concernant les axes scientifiques. J’ai toujours
une passion pour la connaissance scientifique,
et cette vision, c’est en tant que manager que
je peux la défendre et la faire financer.
un réseau mondial de centres
de compétences techniques
(technical Capabilities Centres),
connu au sein d’eAds sous le
nom d’Innovation Works, dirige
les laboratoires de recherche
et technologie (R&t), avec une
priorité au long terme. Il couvre
les qualifications et domaines
technologiques d’importance
critique pour eAds.
les équipes sont réparties dans
sept centres de compétences
techniques transnationaux :
• Technologies composites,
• Technologies métalliques &
Ingénierie des surfaces,
• Ingénierie des structures,
Production & Aéromécanique,
• Ingénierie, Physique, IT, Services
de sécurité et de simulation,
• Capteurs, Intégration systèmes
& Électroniques,
• Énergie & Propulsion,
• Concepts & Scénarios innovants.
eAds Innovation Works promeut
le partage des compétences et
moyens au sein du groupe, et
développe des partenariats avec
des écoles, universités et centres
de recherche de renommée
mondiale.
eAds Innovation Works dispose
de deux sites principaux, à Paris/
suresnes et à munich/ottobrunn.
Il emploie environ 700 personnes.
Cinq centres de proximité à
toulouse, Nantes, Hambourg,
Brême et stade facilitent la
transmission des connaissances
vers les business units implantées
dans ces villes. eAds Innovation
Works gère aussi des centres à
singapour, Newport et Filton
en grande-Bretagne, et a lancé
un centre à getafe/madrid, en
espagne et plus récemment à
Bangalore, en Inde. un bureau de
liaison installé à moscou facilite,
quant à lui, les relations avec les
instituts scientifiques russes.
innovationworks@eads.net
carrières
féminines : 24 % des recrutements, alors que l’on
compte toujours moins de 15 % de jeunes filles dans les
écoles d’ingénieurs.
dEs ProFILs PrEsQuE
ExcLusIVEmEnt scIEntIFIQuEs
si, au service ressources humaines, un doctorant travaille
sur le sujet « diversité et performance », ce cas relève de
l’exception. en raison des activités d’eads, les doctorants
se consacrent à 95 % aux sciences de l’ingénieur. le centre
névralgique de la recherche du groupe, baptisé Innovation
Works (voir encadré p. 25), centralise la recherche sur plusieurs pays, mais chaque business unit d’eads comprend
une cellule de recherche qui travaille de façon transversale
avec Innovation Works (IW). ce qui multiplie les possibilités d’accueil des doctorants, ces derniers pouvant travailler
au sein d’IW comme dans les différentes divisions. « Il est
très important de permettre d’accompagner des sujets
de thèse car l’innovation, c’est notre avenir, affirme Yann
barbaux, directeur exécutif d’eads Innovation Works. Et
nous avons une vraie volonté en interne pour valoriser les
travaux des doctorants. Nous réfléchissons à l’heure actuelle sur l’organisation de séminaires afin qu’ils présentent leurs projets en cours et se rendent visibles auprès
des chefs de service, ce qui facilitera leur embauche. C’est
le premier pas vers un réseau interne, et vers une belle
carrière à venir. » n Pascale Colisson
| portrait |
FLOREnt MOLIèRE,
travaille sur la fiabilité
des composants
électroniques dans les
avions, satellites et
missiles.
Florian molière :
l’appel de l’international
Il voulait devenir pilote ; il
travaille aujourd’hui sur des
composants qui permettent
aux pilotes de voler en toute
sécurité. Rayé de l’école de
l’Air car il « n’a pas les yeux »
pour voler, Florian molière
fait l’IseN de toulon, école
d’ingénieurs spécialisée dans
l’électronique et l’informatique. Il veut travailler aux
États-unis et surfe sur
les sites d’offres d’emploi
de Boeing, Honeywell,
lockheed martin, Northrop
grumman... mais la mention
US citizen only balaye ses
espoirs. Conscient du fait
qu’il est plus facile de trouver
un travail à l’étranger avec
un doctorat, il prépare,
parallèlement à sa dernière
année de l’IseN, un master II
en micro-électronique à
l’université de marseille.
en fin de master, il repère
sur le site internet d’eAds
une proposition de stage
de six mois et de thèse sur
la fiabilité des composants
électroniques dans les
avions, satellites et missiles.
le voilà revenu à l’aéronautique. en mars 2007, Florian
molière intègre un des sept
centres de compétences
techniques d’Innovation
Works à suresnes, le ttC 4
(technical Capabilities
Center) dédié à l’électronique
et l’intégration des capteurs.
son équipe, composée de
sept personnes, plus trois
doctorants, sous la houlette
d’une chef d’équipe docteur,
travaille sur la fiabilité des
composants. « Il faut
s’assurer que les composants
peuvent tenir dans la durée :
30 ans pour un avion,
10 à 15 ans pour un satellite,
quelques minutes pour
un missile. » Il travaille pour
Airbus, Astrium (missiles et
lanceurs) ou mBdA, la
branche missile. « Lorsqu’on
planche sur un sujet, on le
fait sans distinction entre
docteurs et ingénieurs. »
et demain ? Florian termine
sa thèse et a d’ores et
déjà signé une promesse
d’embauche dans le même
service.
La vocation de transmettre un savoir
La volonté de développer le potentiel de chacun
Titulaires d’un doctorat de 3ème cycle, rejoignez une entreprise spécialisée
dans la formation des métiers de la santé :
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en bref
carrières
5
pROpOSitiOnS
pOUR mieUx inSéReR LeS DOCteURS
le centre d’analyse stratégique (cas) a tenté de comprendre les causes du chômage
élevé des docteurs en france et de proposer quelques solutions.
sous le titre « les difficultés d’insertion professionnelle des docteurs, les
raisons d’une exception française »,
le centre d’analyse stratégique
(cas), organisme rattaché au premier
ministre, s’est penché sur le taux de
chômage des docteurs trois fois plus
élevé en france que dans les autres
pays développés. « Les difficultés
d’insertion professionnelle des docteurs ne sont pas dues à une surproduction de diplômés, mais surtout au
sous-investissement en R&D du secteur privé et, dans une moindre mesure, à la préférence donnée aux
ingénieurs », conclut la note de veille
du cas publiée en juillet 2010. ses
auteurs* font, par ailleurs, cinq recommandations pour mieux réguler l’offre
de formation doctorale et renforcer
l'accompagnement des docteurs.
1
améliorer l’information des
établissements et des étudiants,
en associant davantage les acteurs
privés à la production de données
régulières, par disciplines, sur les besoins de recrutements et sur l’insertion professionnelle des docteurs.
réaffirmer le rôle central des
pres dans la coordination et
la régulation de l’offre de formation
doctorale, notamment en favorisant
le transfert aux pres de la compétence de délivrance des diplômes
et des moyens de financement des
contrats doctoraux.
associer davantage les grandes
écoles aux formations doctorales, pour permettre à plus d’ingénieurs de préparer un doctorat.
2
3
4
5
améliorer la proportion de
thèses financées, notamment
par les entreprises.
reconnaître le doctorat dans
les conventions collectives, notamment les grilles salariales.
5 ProPosItIons
QuI nE Font PAs L’unAnImIté
Jean-françois minster, directeur
scientifique chez total, conteste la
première partie de ce diagnostic :
« À structure industrielle comparable, l’effort de R&D privé en France
est similaire, voire supérieur, à celui
d’autres pays avancés. » la disparité
apparente entre l’effort de r&d du
tissu industriel français et de l’étranger est due au fait que peu d’entreprises travaillent dans les secteurs à
forte intensité de recherche (pharmacie, électronique…) et au tissu
relativement faible de grosses pme
faisant de la recherche.
doctEur
ou InGénIEur ?
la préférence donnée aux ingénieurs
dans les entreprises n’est, elle, pas
contestable. comment la dépasser ?
« On est devant une méconnaissance du mécanisme de production
de connaissances nouvelles, estime
claire Kerboul, professeur associé
à l’ensc paristech. L'ingénieur répond à des questions de recherche
incrémentale, pas à des questions
en rupture. Si les entreprises savaient qu'elles ont besoin d'innover,
elles se précipiteraient pour avoir au
moins un docteur. On aurait pénurie
de docteurs. » un avis partagé par
danièle quantin, drh r&d chez
arcelormittal : « On a besoin de
chercheurs et d’ingénieurs de recherche, ce sont des fonctions différentes, les premiers sont là pour
creuser, développer ou adapter de
nouveaux savoirs, les seconds pour
les concrétiser avec les usines, les
clients ».
dEs ProPosItIons
réALIstEs ?
des cinq propositions émises, la troisième (associer davantage les grandes
écoles aux formations doctorales)
apparaît comme l’une des plus judicieuses à claire Kerboul et danièle
quantin. la cinquième (reconnaître le
doctorat dans les conventions collectives), mise en avant également par la
confédération des jeunes chercheurs,
est plus contestée.
« Un doctorat n’est pas un diplôme,
mais une formation par et à la recherche, souligne Jean-françois
minster, la thèse est une formation
par la recherche, et il est très bénéfique d’irriguer l’entreprise de cadres
ayant cette formation. Dans notre
groupe, nombre de cadres dirigeants
ont commencé par une activité de
recherche : ils en font souvent état
comme d’une expérience dont ils sont
fiers, et c’est bénéfique à la prise en
compte de la R&D dans la stratégie
du groupe ».
* centre d’analyse stratégique, note de Veille189,
par mohamed harfi et laudeline auriol.
www.strategie.gouv.fr
Les actions des associations
LeS CaFéS De L’apRèS-thèSe
• Membre du Rédoc, le réseau Doctoral Paris Est, les « cafés de l'après-thèse s'adressent
à tous les doctorants en recherche d'idées pour inventer leur avenir. Les thématiques
touchent plus souvent le secteur professionnel de l'aménagement du territoire
(sous tous ses aspects : géographiques, politiques, sociologiques, etc.), mais l'ambition
est d'aborder les questions que tout doctorant en sciences sociales se pose. »
Tous les mois, des réunions thématiques sont programmées : « publier sa thèse »
en novembre, « les différents profils de chercheur dans la recherche
publique » en décembre… Sur le site, ne manquez pas la rubrique « petites
annonces » où des offres d’emploi sont publiées.
• http://sites.google.com/site/lescafesdelapresthese/
• Eurodoc, l'association européenne des jeunes chercheurs est partenaire du « Forum
européen de l'emploi des chercheurs » qui se tiendra à Paris (après Berlin en 2009),
le 19 novembre. 40 exposants seront présents (entreprises, universités, organismes
de recherche) et plus de mille jeunes chercheurs sont attendus. »
• http://www.eurodoc.net/
• http://www.researchcareerfair.com/jsp/core/PlageHome.jsp
13 Et 14 sEPtEmbrE 2010
« AccomPAGnEmEnt
dEs doctEurs »
Les 13 et 14 septembre derniers, l’ABG a
organisé un séminaire sur l’accompagnement des
docteurs, au CIEP (Centre International d’Études
Pédagogiques) de Sèvres, à l’intention des conseillers
membres de son réseau. Le programme incluait
des ateliers d’analyse de CV, animés par deux
spécialistes du recrutement (Areva et Cabinet
Hudson International), la présentation de la
nouvelle plateforme web 2.0 de l’ABG, ainsi que
des présentations d’éléments d’information et de
réflexion sur l’évolution du marché de l’emploi des
cadres scientifiques, la méthodologie d’élaboration
des projets professionnels individuels, ou encore
le décryptage des offres d’emploi (ML Drakakides,
Enakin Conseil). La seconde journée s’est terminée
par la présentation du kit « Techniques de Recherche
d’emploi docteurs » élaboré par le service emploi de
l’ABG. Ce séminaire devrait être prolongé dans les
prochains mois par de nouvelles rencontres, à Paris
ou en régions.
catherine.gayda@abg.
intelliagence.fr
| c'était hier |
juIn 2010
Forum Aquidoc
(bordeaux)
pour sa 4e édition, le
forum aquidoc a rassemblé
400 jeunes chercheurs, en
hausse par rapport à 2009.
est-ce parce que, pour la
1re fois cette année, des
rendez-vous préprogrammés
étaient possibles avec des
entreprises ? les jeunes chercheurs en sciences humaines
et sociales s’étaient aussi
déplacés en nombre, une
satisfaction pour les organisateurs, soutenus depuis plusieurs années par le conseil
régional d’aquitaine.
« Les entreprises doivent se
pencher sur la recherche.
Une démarche culturelle
est à développer en
accompagnant l’insertion
professionnelle… »
séminaire
alain rousset, président
du conseil régional
d’aquitaine.
www.aquidoc.fr
18 juIn 2010
Forum docteurs &
Entreprises (rennes)
sur radio campus rennes,
écoutez en podcast des
interviews de doctorants et
de docteurs qui ont participé au forum. catherine
gayda, du service emploi
de l’abg, vous donne des
conseils sur vos démarches
de recherche d’emploi.
www.radiocampusrennes.fr
25 juIn 2010
Forum jeunes
chercheurs
(strasbourg)
« J’ai fait 300 km pour venir,
au début j’hésitais, mais
finalement ça en valait la
peine », déclarait un jeune
chercheur. Il est vrai que des
entreprises s’étaient aussi
déplacées : bruker biospin,
cIne, dow chemical,
lanxess, novalIX, pôle
chimie alsace, prestwick
chemicals, semia, soprema
et l’union des Industries
chimiques de l’est étaient
là. prochain forum en 2012,
et en attendant, en 2011,
ce sera au tour des biologistes d’organiser le forum
biotechno.
si vous souhaitez que
l’on parle de vos actions
en faveur de l’insertion
des doctorants/docteurs
dans ce magazine,
contactez la rédaction.
redaction@intelligencesmagazine.fr
agenda
2 Et 3 FéVrIEr 2011
Forum horIzon chImIE 2011
Conçu pour faciliter le contact entre les étudiants
des grandes écoles d'ingénieurs en chimie,
les doctorants et les entreprises, le 25e forum
Horizon Chimie se déroulera les 2 et 3 février
2011, à la Maison de la Chimie, à Paris. L'entrée
est libre et ne nécessite aucune invitation. L'an
dernier, 61 entreprises étaient venues rencontrer
2 500 visiteurs, pour la plupart élèves-ingénieurs
dans l'une des quatre écoles organisatrices
(ESPCI, ECPM, ENSCP et ENSIC) ou des écoles
nationales supérieures de chimie de ClermontFerrand (ENSCCF), Lille (ENSCL), Mulhouse
(ENSCMu) et Rennes (ENSCR). Doctorants et
post-doctorants fréquentent également le forum
Horizon Chimie. En dehors des traditionnels
stands et conférences, le forum propose de
nombreuses activités : simulations d'entretiens
d'embauche avec des professionnels (attention,
inscription obligatoire) ; relectures de CV sur
le stand de la Société française de Chimie,
et bien sûr des tables rondes et ateliers collectifs
sur le CV, l'entretien et toutes les techniques
de recherche d'emploi.
www.horizon-chimie.fr
carrières
MARIE DE LUMLEy
Responsable Marketing
et commercial
d’Estenity.
mariedelumley
@hotmail.com
Les docteurs en sciences de la matière et du vivant ont depuis longtemps migré
de la R&D vers les départements commercial et marketing. Les docteurs
en sciences humaines et sociales peuvent se créer des opportunités et profiter
du développement fulgurant des réseaux sociaux.
parcours
singuliers
Séduits par
O
n peut être docteur et avoir envie de
se frotter au commerce et au marketing. ceux qui ont, durant leur
thèse, appris à gérer leur budget,
à contrôler des coûts et à échanger
régulièrement avec un partenaire
industriel sur l’avancée de leurs travaux ont développé un
bon bagage pour réussir dans ce métier. dans une enquête
réalisée en 2009, les recruteurs britanniques qui embauchent
des docteurs leur reconnaissent de réelles capacités commerciales. les expériences d’habib horry, marie de lumley et
guillaume plougoulm, trois docteurs issus des sciences de la
vie et des sciences humaines, montrent comment on peut se
faire une place et s’épanouir dans le marketing.
Habib Horry
dE LA r&d Au mArkEtInG
quand habib horry soutient sa thèse cifre en microbiologie à l’université de nantes en 2004, il a déjà acquis une
première expérience chez biolumine, une start-up spécialisée
dans les technologies de l’environnement. après quatre
années de thèse, il sait qu’il a besoin de voir rapidement les
résultats de son travail pour être motivé. la relation entre
r&d et marketing l’intéresse. renonçant à un post-doctorat
au commissariat à l’énergie atomique à saclay, il opte pour
un poste d’ingénieur r&d au sein de biokar diagnostics
(groupe solabia), fournisseur en produits et réactifs auprès
des laboratoires de microbiologie industrielle qui vient de racheter biolumine. six ans après, il ne regrette rien. À 34 ans,
habib horry est, depuis 2008, responsable du marketing,
après un cursus somme toute classique dans son secteur :
« On démarre sa carrière dans la R&D. C’est nécessaire pour
connaître à fond les spécificités des produits, puis on peut
évoluer vers des postes commerciaux marketing de type
chef de produit ou chef de groupe. Dans mon secteur d’activité, les kits de diagnostic, les compétences techniques
sont capitales. » avant de décrocher son poste actuel, habib
horry a montré qu’il était « capable de faire travailler ensemble les équipes de R&D, de vente et de marketing ».
À ce niveau de responsabilité, il faut savoir animer, encadrer,
HAbIb HORRy
chez Solabia-biokar.
habib.horry@free.fr
les docteurs peuvent devenir de
bons managers en marketing dans
des Pme. c’est aussi possible dans les
multinationales, mais en commençant
un « cran plus bas ». donc, il faut avoir
suffisamment d’humilité pour admettre
ses limites et accepter un départ moins
haut pour mieux rebondir par la suite.
négocier. pilote du marketing de biokar diagnostics, il s’occupe, entre autres de la veille réglementaire (avec les services
juridiques), technologique (avec la r&d) et concurrentielle,
des éléments stratégiques pour l’entreprise. un tel exercice
ne présente aucune difficulté pour un docteur qui a appris
à être toujours en alerte.
mais le quotidien d’habib horry, c’est avant tout l’élaboration
des cahiers des charges des nouveaux produits et le suivi des
tableaux de bord des ventes, avec un impératif :
en savoir
la rentabilité. « Si la R&D veut lancer un superwww.biokar-diagnostics.fr
www.solabia.fr
kit de diagnostic dont le coût de production
s’élèvera à 8 €, alors que les kits concurrents sont vendus à
4 ou 5 €, il sera plus difficile de convaincre les clients, même
si le produit est très bon. » bref, c’est le marché qui décide.
mieux vaut le savoir quand on sort du milieu académique.
le marketing
carrières
marie de lumley
démArrEr dAns unE stArt-uP
c’est à l’université de cambridge, en grande-bretagne,
que marie de lumley a doublement élargi son horizon.
son directeur de thèse l’encourage à suivre des cours de
management. le soir, marie s’initie aux business plans et
aux levées de fonds… À son retour en france, début 2003,
son « goût pour la nouveauté, la diversité et le travail en
équipe » la pousse à rejoindre une start-up de biotechnologie hébergée sur le site du génopôle d’évry. comme
business development manager, elle est chargée de proposer des projets de recherche basés sur une technologie
brevetée. sa formation scientifique, son don pour la communication et sa maîtrise de l’anglais sont autant d’atouts
pour démarcher des clients du monde entier, négocier et
il ne faut jamais oublier qu’un
projet doit être rentable
pour être lancé. Une réalité très
éloignée de celle qui commande
la recherche fondamentale.
rédiger les contrats, puis clôturer les affaires. fin 2004,
marie de lumley quitte la région parisienne, un nouveau
défi l’attend à bordeaux. la voici responsable d’une ligne
de produits dans une entreprise spécialisée dans l’œnologie (laffort). elle continue à défier les fuseaux horaires pour
suivre les grands comptes répartis dans 55 pays, anime le
réseau des filiales et distributeurs, établit les budgets et
prévisions de ventes, et coordonne le développement des
nouveaux produits avec la r&d. l’année 2008 marque le
début d’une troisième aventure à lyon, où marie de lumley
est, depuis deux ans,
en savoir
responsable d’estenity,
www.estenity-europe.com
www.laffort.com
la filiale européenne
www.biomethodes.com
de Kokyu alcoholde
qui fabrique des bases cosmétiques de très bonne qualité.
sa mission ? adapter les ingrédients japonais au marché
européen, ce qui nécessite le respect de la réglementation
européenne reach et la suppression des tests sur les animaux. Il lui faut aussi bien réfléchir au positionnement des
produits vis-à-vis de la concurrence car « les produits de
Kokyu Alcoholde sont d’une très grande qualité, avec des
bases cosmétiques exceptionnelles, mais logiquement, ils
sont assez chers ». c’est tout l’art du marketing.
| zoom |
Docteur en marketing, un oiseau rare
Il y a pénurie de docteurs en
marketing, une spécialité des
sciences de gestion, déplore
pierre-louis dubois, professeur
à l’université paris II. beaucoup
de diplômés de master ne
s’engagent pas en thèse car
ils trouvent assez aisément
des emplois à la sortie de leurs
études. ceux qui briguent un
doctorat font donc le choix,
dès le début, de la carrière
académique, pourtant moins
rémunératrice. « En marketing,
nos thèses sont très théoriques
et les recruteurs ont tendance
à considérer que cette expérience n’apporte rien. Avec
30 K€ par an pour un poste
de MCF, le salaire est inférieur
à celui perçu par un Bac +5
sortant d’une école de commerce prestigieuse », constate
michael Korchia, qui a rejoint
la bem de bordeaux après son
doctorat obtenu en 2001.
gérard hermet, directeur général de gfK sofema france(1),
entreprise spécialisée dans la
prestation de conseil en marketing, nuance ces propos.
docteur en économie de l’université de grenoble en 1978,
à l’époque, il refuse un poste
à l’université pour rejoindre
procter & gamble. Jour après
jour, il mesure la plus-value
d’un docteur : « Un diplômé
de master même après trois
années d’expérience en entreprise, ne rattrapera jamais
le niveau de connaissance et
la maîtrise d’outils de pointe
d’un docteur. C’est tout
simplement impossible. »
gérard hermet est un fervent défenseur de la formation par la recherche. « Les
entreprises ont besoin de ces
experts capables de manier
des modèles théoriques et
des quantités d’information,
pour élaborer des analyses
pertinentes et novatrices. Si
on veut être un leader dans
la course internationale, c’est
une nécessité. Aux États-Unis
et en Allemagne, les postes
à haute responsabilité sont
occupés par des docteurs. »
(1) gfK, edf, Vinci, la macIf figurent parmi les entreprises qui
accueillent des doctorants cifre en
sciences de gestion.
Contacts :
__michael Korchia
michael.Korchia@bem.edu
www.bem.edu
www.mk-is-watoo.blogspot.com
__marie-france riggi
marie-france.riggi@gfk.com
www.gfk.com
le marché de l’emploi
académique
les statistiques de
la campagne 2010
du recrutement
des maîtres de
conférences (mCF)
en sciences de
gestion (section 06
du Conseil national
des universités)
confirment que la
situation de l’emploi
académique dans
le public n’est guère
tendue. en 2010, 139
postes étaient ouverts
dans les universités,
pour 180 docteurs
qualifiés la même
année, sans compter
les postes proposés
par les écoles de
commerce et les
écoles d’ingénieurs
(ne relevant pas
de la tutelle
du ministère de
la Recherche).
Pour la spécialité
« marketing »,
sur 62 candidats
ayant présenté
leur qualification
au CNu, 50 l’ont
obtenue, soit un
taux de qualification
très fort de 80 %,
contre 51 % en
moyenne pour
l’ensemble des
sciences de gestion.
Sources
- la section sciences de
gestion (06) du conseil
national des universités
www.cpcnu.fr
- le site de la fnege
www.fnege.net
GUILLAUME PLOUGOULM
de Hunting Signature.
| en pratique |
Des salaires...
guillaumeplougoulm@
gmail.com
Entre 25 et 38 k€, c’est le salaire proposé
dans les offres d’emploi destinées aux jeunes
diplômés (niveau master), avec un salaire médian
de 30 K€.comptez entre 29 et 55 K€ pour
les offres destinées aux cadres confirmés,
avec un salaire médian de 39 K€.
source : www.apec.fr
habib horry : « J’ai débuté en tant
qu’ingénieur de recherche à 36 K€ bruts annuels.
Les docteurs peuvent être recrutés en tant
que confirmés et non pas jeunes diplômés,
la thèse comptant comme une première
expérience professionnelle ; ce qui se traduit
automatiquement au niveau salarial par un
écart substantiel, quelle que soit la convention
collective. Mais attention ! Le niveau de salaire
ne dépend pas seulement du niveau de diplôme,
car toutes les thèses et tous les docteurs
ne se valent pas pour une entreprise. »
... et un marché
la grande différence entre la
recherche et le marketing, c’est
la vitesse à laquelle on voit les
retombées de son travail. elles sont
presque immédiates dans le marketing.
on en prend vite l’habitude.
Guillaume Plougoulm
unE ExPérIEncE PrécocE
du mArkEtInG
« Citoyenneté et espace : développement, urbanisme et
culture politique dans la métropole de Durban » en afrique
du sud… où le sujet de thèse soutenu en 2003 par guillaume
plougoulm à l’université paris IV allait-il le mener ? pendant
son doctorat, il est consultant marketing à durban pour
moreland, un conglomérat sud-africain spécialisé dans l’immobilier présent dans la métropole de durban. l’entreprise,
qui a un positionnement haut de gamme, propose un mode
de vie qui va au-delà d’un simple bâti. quand guillaume
plougoulm rencontre ses dirigeants sur son terrain de thèse,
ils s’interrogent sur les moyens d’investir une niche apparue
avec les politiques de discrimination positive. parallèlement à
ses travaux de recherche, guillaume plougoulm commence
à plancher sur l’environnement marketing de l’offre de
moreland. « J’ai contribué à des travaux sur le positionnement
Les recruteurs recherchent des chefs
de produit, chefs de groupe, responsables
de marque, pour pouvoir occuper ces postes,
les compétences scientifiques et techniques ne
suffisent pas. les recruteurs regarderont de près
les activités menées parallèlement à la thèse
démontrant un sens aigu de la communication,
du relationnel... de plus en plus, les doubles
formations (sciences + marketing) sont
recherchées, et mieux vaut souvent
un mba qu’un post-doctorat.
produits et à la conception d’un programme englobant l’ensemble du mix marketing », explique-t-il. de retour en france,
il fait un passage, toujours dans le marketing, dans une entreprise commercialisant des formations d’anglais par téléphone.
le marketing est bel et bien devenu son métier. aujourd’hui, il
travaille dans une start-up, hunting signature, dont l’activité
consiste à organiser des
en savoir
www.moreland.uk.com/
événements liés aux loiwww.hunting-signature.com/
sirs autour du thème de
www.marketingpouringenieurs.com/
sur les médias sociaux et la révolution
la nature (chasse, mise
qu’ils imposent dans le marketing.
à disposition de propriété, etc.). organisation, autonomie, pragmatisme… les
compétences acquises pendant sa recherche l’aident énormément. et puis, « sans grand moyen financier pendant ma
thèse, j’ai dû développer des trésors d’ingéniosité : c’est une
qualité essentielle dans le marketing. » Dr Evelyne Jardin
Sources
- Vitae, recruiting researchers: survey of employer practice 2009, 2010 (pdf).
- Vitae, researchers’ skills and competencies, 2009 (pdf).
Pour votre
entretien
d’embauche,
maîtrisez au moins
le vocabulaire
des marketeurs.
Plan marketing
(Pm),
benchmarking,
business unit,
mix marketing,
positionnement,
segmentation, taux
de pénétration,
cycle de vie, études
qualité et quantité,
e-marketing…
LIrE
Hubert Kratiroff,
Fonction :
chef de produit
marketing,
Dunod, 2008.
formation
apprendre à
valoriser
les 10 ans du nct®
ses compétences
Proposé par le tiers des écoles doctorales, le NCT® est, depuis
maintenant 10 ans, un véritable outil de valorisation des compétences.
Quelque 2 500 docteurs ont à ce jour bénéficié de cette formation qui,
certes, demande de lui consacrer du temps, mais qui fait souvent
la différence au début de leur carrière.
i
ntarissables sur leur thème
de recherche, beaucoup de
docteurs ont pendant trois
années acquis de nombreuses
compétences dont ils n’ont
pas conscience et ne savent
pas parler : conduite de projet, montage
de partenariats, gestion d’un budget… or,
avoir un bilan clair de ses qualités et compétences est aujourd’hui un atout irremplaçable, quelle que soit la carrière envisagée.
Imaginées par le ministère de la défense
et l’abg, les doctoriales® proposent des
séminaires de découverte à la fois d’entreprise et de soi-même. le programme nct®nouveau chapitre de la thèse, lancé il y a
10 ans et soutenu aujourd’hui par le tiers
des écoles doctorales, va beaucoup plus
loin puisqu’il propose un véritable outil de
valorisation des compétences. q
quelque
uelque
2 500 docteurs ont bénéficié de cette formation
depuis son origine. « Notre point de départ
était simple : les docteurs ne savent pas se
présenter face à des recruteurs comme des
professionnels polyvalents (à la différence
des ingénieurs). Il fallait
donc les extraire de leur
expertise en montrant
qu’ils avaient géré leur
®
thèse comme un projet,
explique pierre léna,
membre de l’académie
des sciences, administrateur de l’abg et l’un
des fondateurs du nct® aux côtés de gérard
megie et guy Vedrenne. L’autre idée forte
était que cette transformation nécessitait l’intervention d’un professionnel œuvrant hors
du milieu académique. Enfin, nous voulions
que les docteurs aient une approche financière de la recherche. Nous avons inclus le
calcul du coût de leur thèse dans le NCT®. »
ACComPAgNÉs PAR des meNtoRs
avec le nct®, les doctorants en fin de thèse
font une analyse critique de la manière dont ils
ont conduit et géré leur projet de recherche. Ils
en tirent alors des résultats
sur les qualités et le savoirfaire qu’ils ont développés durant leur thèse et
qui pourront leur servir
tout au long de leur vie
professionnelle. pour les
aider dans ce parcours,
des mentors – experts
et consultants en ressources humaines – les
accompagnent. l’analyse débouche sur un
document de 5 à 10 pages aisément compréhensible par des non-spécialistes du domaine
de la recherche. soutenu financièrement par
le ministère, le cnrs, le cea et de nombreuses
d’anticirégions, le programme nct® permet d’antici
per l’après-thèse, selon les conclusions
Dix anS
pLUS taRD,
Le nCt S’aVèRe
tOUjOURS
peRtinent.
| témoins... |
le nct® ne figure pas
dans la grille d’évaluation
des écoles doctorales, les doctoriales® oui. néanmoins, nous
en tenons compte dans nos
rapports d’évaluation et nous
pensons l’intégrer lors de la
prochaine vague d’évaluation. »
alain menand, directeur de la section des
formations et des diplômes, aeReS.
« c’est très exceptionnel de voir
figurer dans le cv d’un docteur la
mention nct®. connaissant ce dispositif, il m’arrive de poser la question lors
d’un entretien, mais généralement, les
docteurs que je reçois ne connaissent pas
l’outil. c’est dommage, car cette formation
permet de se projeter dans un projet
professionnel crédible. » danièle Quantin,
DRh R&D, arcelormittal europe.
| pilote |
Orange Labs y croit
Le 27 août dernier, le nct® était à
l’honneur pour la journée des doctorants d’orange réunis dans les locaux
d’orange Labs, à Issy-les-moulineaux.
Quatre doctorants, mathieu camus,
Florie bugeaud, Aléna stoica et juan F.
navas présentaient cet outil d’accompagnement pour convaincre leurs plus
jeunes collègues de suivre leurs traces.
Qu’avaient-il retenu de cet exercice ?
« Se poser des questions, évaluer
le coût de la thèse, prendre du recul,
faire le point, valoriser ce que l’on a par
rapport aux autres, définir ses qualités
personnelles, savoir ce que l’on veut/ne
veut pas, mettre des mots… »
Les quatre doctorants, dont deux en
sciences sociales, n’ont pas caché qu’ils
étaient, eux aussi au départ, assez réticents à s’engager dans une démarche
nct®. mais, ils étaient ensuite d’autant
plus ravis qu’ils avaient tous des pistes
professionnelles pour l’après-thèse.
orange Labs tient en effet à aider les
doctorants qui ne seront pas recrutés
dans ses laboratoires à se préparer à la
recherche d'emploi. Guillaume dauron,
aujourd’hui chargé de mission à l’EsA
(European space Agency), était en 2006
un de ceux-là : « mes recherches étaient
très fondamentales, j’étais très isolé et je
ne parlais que le langage des télécoms.
je ne souhaitais pas embrasser une carrière académique. sans le nct®, je n’aurais très certainement pas pu travailler
sur mon parcours professionnel, et j’aurais été bien moins crédible lors de l’entretien à l’EsA, tout simplement parce
que pour valoriser mes compétences
acquises pendant la thèse et adapter
mon discours à la culture de l’entreprise,
il me fallait du temps et quelqu’un pour
m’aider à me décentrer. »
régine
égine Angoujard
regine.angoujard@orange-ftgroup.com
formation
| zoom |
L’université
de Strasbourg montre
la voie
Cette
FORmatiOn
n’eSt paS
UniqUement UtiLe
pOUR LeS
DOCtORantS
d’une enquête menée
auprès de docteurs qui l’ont
expérimenté entre 2002 et
2007. partenaire du nct® depuis 2006, orange se soucie
de l’insertion de ses doctorants
et leur propose donc de réaliser un nct® à la fin de leur
thèse. malheureusement, les
doctorants ne se précipitent pas : « Nous regrettons que si peu d'entrre eux profitent de
la chance qui leur est donnée de penser à leur
carrière à travers ce dispositif unique, déplore
paul friedel, l’ancien directeur de la recherche
d’orange. Les doctorants se plaignent du
manque de temps. Alors qu’ils doivent terminer leur thèse en trois ans, une formation non
scientifique ne leur apparaît pas prioritaire »,
explique danièle haug, qui coordonne cette
formation à l’université de strasbourg depuis
son lancement en 2003.
les docteurs qui ont opté pour le nct® ne le
regrettent pourtant pas. « Je viens de relire
mon NCT®, et huit ans plus tard, je trouve le
document toujours très bien. Cet exercice m’a
permis de sortir de l’expérience doctorale par le
haut alors que l’on a perdu toute confiance en
soi et que l’on ne sait plus où l’on en est. Grâce
au NCT®, j’ai construit ma carrière, tendu des
fils entre multiples activités que j’avais menées
de front pendant mon doctorat car je n’avais
pas de financement », confie Isabelle benoit,
docteur en sciences politiques de l’université
de grenoble, chargée de mission au musée de
l’europe à bruxelles.
cette formation n’est, contrairement à cer-
taines idées reçues, pas uniquement utile pour les
doctorants qui n’iront pas
dans le monde académ i q u e . p o u r ra p h a ë l
marvie, docteur en informatique, maître de conférence à l’université de lille
depuis 2003, et aujourd’hui en création d’entreprise, « le temps
consacré (quelques jours, à comparer aux
trois années de la thèse) en vaut largement la
peine. Avoir un bilan clair de ses qualités et
compétences est un atout irremplaçable,
quelle que soit la carrière que l’on envisage ».
un avis partagé par florent deleflie, docteur
en astrophysique, astronome adjoint à l'institut de mécanique céleste et de calcul des
ephémérides/observatoire de paris : « J’ai
inséré mon NCT® dans le document de thèse,
et ceci avait été relevé positivement dans le
rapport de soutenance. Cela n’a aucunement
nui à mon insertion dans le milieu académique. Je dirai qu’en plus le NCT® a révélé
mon intérêt pour la recherche appliquée. »
reste que « chaque année, le NCT® touche
environ 400 doctorants, c’est peu au regard
des 10 000 diplômés », regrette Yves fau,
chef de projet, missions contrat doctoral et
ens-efe, ministère de l'enseignement supérieur et de la recherche. « Grâce à la mutualisation des ressources au sein des PRES, on
peut espérer que le NCT® sera plus largement
diffusé, car, l’insertion des docteurs est une
préoccupation majeure, qu’elle s’effectue
dans le public ou le privé ». Dr Évelyne Jardin
L’Alsace est, après l’Île-de-France,
la région où les doctorants sont
depuis trois ans les plus nombreux
à opter pour un nct®. danielle
haug coordonne cette formation à
l’université de strasbourg depuis
son lancement en 2003, année
où elle avait démarré avec deux
doctorants. Ils sont désormais
entre 35 et 45 à s’engager chaque
année. une fois séduits par les
doctoriales®, les doctorants
viennent d’autant plus volontiers
au nct®. « Le bouche-à-oreille
joue beaucoup. La qualité des
mentors est capitale : le courant
doit passer entre le doctorant et
son accompagnateur », ajoute
danielle haug. bernard chapus,
ancien drh du laboratoire
pharmaceutique Lilly, implanté à
Fegersheim près de strasbourg,
est aujourd’hui consultant et un
mentor nct® depuis 2007. « Les
doctorants sont des personnes
passionnées et passionnantes
avec un potentiel énorme, mais
un handicap : ils doutent de
leurs qualités. Je suis face à deux
typologies de doctorants : ceux
qui sont déjà très avancés dans
leur réflexion sur l’après thèse
et qui viennent confirmer leur
choix en suivant un NCT® ; et ceux
qui sont totalement perdus et,
il faut le dire, très déconnectés
du milieu économique. » solveig
Lerat, doctorante en musicologie
accompagnée l’année dernière
à l’université de strasbourg,
témoigne : « J’ai appris à présenter
mes compétences avec des mots
simples et surtout adaptés au public
ciblé. J’ai aussi pris conscience
de l’importance du réseau ».
bruno michon a, lui, au contraire
abandonné son nct® alsacien : trop
de travail, une situation familiale
très prenante et une difficulté à
adhérer à la présentation faite par
le mentor. « Pendant la première
réunion, tous les termes utilisés par
notre mentor tournaient autour de
l’entrepreneuriat et de l’argent. Je
n’ai pas choisi la recherche dans un
but lucratif. »
danielle haug, coordinatrice AbG
d
danielle.haug@unista.fr
tour du monde
abg-ufa
l’antenne franco-allemande
L’antenne ABG-UFA est, depuis sa création en mars 2008 par l’ABG et l’Université
franco-allemande, le point de contact des doctorants et docteurs franco-allemands.
conseil et information. Je souhaite partir faire
mon doctorat en allemagne ou en france : quelles sont
les informations à connaître ? comment le financer ?
l’antenne aide les doctorants franco-allemands dans
leurs démarches d’orientation et d’insertion.
L’université franco-allemande
l’université franco-allemande (ufa) est constituée par
un réseau d’établissements d’enseignement supérieur
français et allemands. elle entend notamment susciter, coordonner et financer des formations pluridisciplinaires franco-allemandes, structurées aux niveaux
licence, master, doctorat (lmd). le développement
des collèges doctoraux franco-allemands, le financement des cotutelles de thèses franco-allemandes, la
mise en réseau de chercheurs sont ses principaux outils
de soutien à la recherche.
Formations
Atelier CV&Co : cet atelier de quatre jours doit
permettre aux doctorants franco-allemands de
communiquer sur eux-mêmes et sur leur travail de
recherche en dehors de leur cercle habituel et dans un
langage compréhensible par les non-spécialistes.
Doctoriales® franco-allemandes : un séminaire
résidentiel et pluridisciplinaire d’une semaine, au cours
duquel les axes thématiques « communication sur le
projet de recherche », « entreprise et innovation »,
« gestion de projets innovants (business game) » et
« insertion professionnelle » sont abordés.
NCT® franco-allemand : il s’agit d’un programme
de mentoring semi-individuel avec un accompagnement franco-allemand.
Apéro doc : réseau
et échange d’expérience
l’apéro doc est un « outil » de l’abg qui a été adapté
au contexte franco-allemand. Il offre aux doctorants
et jeunes docteurs franco-allemands la possibilité de
rencontrer des docteurs expérimentés et des représentants du secteur non académique. un apéro doc inclut
une première partie informative avec des présentations
thématiques en lien avec la recherche et l’insertion
(perspectives professionnelles, coopération industrie/
université, interculturalité, création d’entreprise…) suivie d’échanges informels. Bérénice Kimpe
| zoom |
La recherche privée en allemagne
70 % des dépenses de r&d en allemagne sont
engagées par le secteur privé, un des ratios les plus hauts à
l’international. malgré la crise, les entreprises en allemagne
ont, en 2009, investi presque autant qu’en 2008.
les entreprises financent à la fois la recherche privée (à
hauteur de 92 %) et la recherche publique : 13 % de la
r&d publique sont financés par le secteur privé, soit deux
fois plus que la moyenne européenne.
Le personnel R&D
En 2008, l’Allemagne comptait 333 000 personnes
travaillant dans le secteur r&d privé (équivalents temps
plein), dont 30 % dans le secteur automobile. les
chercheurs représentent 54 % du personnel r&d. les
femmes ne représentent que 12 % de l’ensemble des
chercheurs, ce qui explique
54 %
que beaucoup d’universités
chercheurs
allemandes proposent des
programmes spécifiques pour
26 %
techniciens
soutenir les jeunes chercheuses.
20 % contrairement aux grandes
entreprises (78 % du personnel
autres
r&d) qui ont vu leur effectif
r&d stagner entre 2001 et
2007, les pme connaissent une
très forte croissance de leurs
effectifs : + 30 %.
sources : www.stifterverband.de
ländercheck forschung, pascal hetze/andrea frank
fue-datenreport 2009 et 2010, andreas Kladroba/christoph
grenzmannn/bernd Kreuels
ProChAiNS
reNDez-VouS
25 nov. 2010
apéro doc francoallemand à strasbourg
26, 27 nov. 2010
forum franco-allemand
à strasbourg
14 déc. 2010
apéro doc spécial
informatique, Insa lyon
19 janv. 2011
apéro doc francoallemand à hambourg
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actualités abg-ufa,
vous pouvez vous
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bilingue :
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coordonnées :
deutsch-französische
servicestelle abg-dfh
contact : bérénice
Kimpe, Villa europa,
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saarbrücken
(+49) (0) 681 93812 - 114
www.dfh-ufa.org/
forschung/abg
tour du monde
master et phd
inquiétudes américaines
sur le taux élevé d’abandons
Le rapport « The Path Forward: the Future of Graduate Education in the United
States » s’interroge sur les problèmes du 3e cycle universitaire aux États-Unis.
les meilleures universités américaines ont longtemps
exercé un formidable pouvoir d’attraction sur les étudiants internationaux de haut niveau. l’avenir n’est
pourtant pas aussi radieux, selon un rapport qui a clos
une commission rassemblant des représentants éminents du monde universitaire et des entreprises.
sous le titre « aller de l’avant : l’avenir de la formation
universitaire de 3e cycle aux états-unis », la commission
on the future of graduate education appelle « les pouvoirs publics, universités et entreprises à unir leurs efforts pour aider les universités américaines à conserver
leur prééminence dans le monde et pour encourager
les jeunes Américains à poursuivre des formations de
haut niveau, condition indispensable pour préserver les
chances des États-Unis de relever le défi de l’innovation
et de la concurrence internationale ».
Promouvoir les carrières dans le privé
pour trudy steinfeld, directrice exécutive du
Wasserman center for career development, new
York university, « parmi les recommandations dont la
mise en œuvre aurait un impact important sur la formation supérieure aux États-Unis, la plus importante
est probablement celle qu’il faut encourager l’insertion
professionnelle des PhD en dehors du monde académique. Historiquement cela était parfois perçu comme
quelque chose de négatif, aux États-Unis comme dans
d’autres pays », rappelle-t-elle.
les entreprises seront, en effet, beaucoup plus que
le milieu académique, demandeuses de masters et
de phds, souligne le rapport, qui avance le chiffre de
2,5 millions de postes ouverts à ces diplômés d’ici 2018
aux états-unis. Il en conclut : « La formation doctorale
doit faire face à cette réalité et aider ses étudiants à se
projeter vers une carrière dans le secteur privé. »
doctorants face aux problèmes financiers
le rapport insiste sur les soucis financiers rencontrés
par les étudiants qui se lancent dans des études longues,
problème jugé comme l’une des principales raisons
du taux d’abandon élevé des candidats à un phd :
35 à 50 % selon les domaines (voir graphique). les
états-unis devraient adopter une stratégie nationale
pour réduire ce pourcentage.
pour le leader syndicaliste du university council,
bob samuels, les universités feraient un grand pas si
elles réduisaient déjà le nombre de cours assurés en
premier cycle par des doctorants. « Cette charge de
cours n’est qu’un élément parmi d’autres, rétorque
madame steinfeld, le travail de recherche prend
souvent beaucoup plus de temps que ces derniers
n’imaginaient au départ. Enfin, un certain nombre
de facteurs externes les empêchent de consacrer
tout leur temps à leur travail de recherche : nécessité
d’avoir un travail alimentaire à temps partiel, charges
de famille… »
une prééminence menacée ?
le rapport s’inquiète enfin de l’intensification de la
concurrence internationale pour attirer les étudiants
les plus prometteurs. la « part de marché » des universités américaines baisse depuis 2000. les universités américaines ont longtemps constitué le premier
choix dans ce domaine, mais cela pourrait ne pas
durer. la chine et l’Inde investissent des sommes de
plus en plus élevées dans leurs universités les plus
prestigieuses et offrent d’excellentes perspectives de
carrières qui favorisent le retour de leurs étudiants
formés à l’étranger.
« the path forward: the future of graduate education in the
united states » - www.fgereport.org
taux de réussite au fil du temps pourcentage de doctorants obtenant leur phd au bout de 5, 7 ou 10 ans
SCIENCES HUMAINES
MATHÉMATIQUES
ET SCIENCES PHySIQUES
SCIENCES SoCIALES
SCIENCES DE LA VIE
SCIENCES DE L’INGÉNIEUR
60 %
45 %
30 %
5 ans
7 ans
10 ans
15 %
0%
12 % 29 % 49 %
23 % 48 % 55 %
21 % 41 % 56 %
22 % 54 % 63 %
35 % 57 % 64 %
Source : Council of Graduate Schools (2008), PhD.
séJours
irlande
Un séjour ou un poste en Irlande vous
tente ? Voici des informations utiles
sélectionnées avec l’aide de l’ambassade
de France à Dublin.
Le programme d’échange ulysses
l’appel à candidatures pour ce programme est
ouvert aux laboratoires de recherche rattachés à
des établissements d’enseignement supérieur, à
des organismes de recherche ou à des entreprises.
notez que la participation active et la mobilité
de jeunes chercheurs, en particulier doctorants ou
post-doctorants, est un des tous premiers critères
de sélection. Le secteur des stIc
les sciences et technologies de l’Information et
de la communication représentent, en termes de
chiffre d’affaires, 24 % des revenus des services
et de l’industrie irlandaise, avec la présence de hp,
dell, microsoft, Intel, google, amazon ou encore
Yahoo.
des programmes importants ont été aussi mis
en œuvre pour favoriser la coopération entre
les laboratoires universitaires et les entreprises,
d’une part, et d’autre part, pour constituer des
pôles technologiques autour des universités, notamment dans les domaines de l’informatique,
des télécommunications, de l’électronique et des
nanotechnologies.
Postgrad.ie
dans la rubrique « careers », vous trouverez des
articles d'information sur tous les aspects de la
gestion et du développement de carrière (préparation d'entretien, cV et lettre de motivation,
planification de carrière, trouver la formation qui
répond à vos objectifs de carrière, les carrières
par secteur d'activité...). Dr. Clarisse Faria-Fortecoëf
www.egide.asso.fr/jahia/Jahia/site/egide/
lang/fr/ulysses
www.ambafrance.ie/article.
php3?id_article=1110
www.postgrad.ie
en savoir plus
Retrouvez des interviews de docteurs
avec une expérience irlandaise
sur le site Intelliagence.fr, rubrique
publications > guide International.
fInancement
Projets de
recherche aux
états-Unis
La commission Fulbright lance un
appel à candidatures destiné aux
Français intéressés par un séjour
aux États-Unis.
si vous effectuez une thèse de doctorat en
france (en cotutelle ou non), que vous avez
la nationalité française et souhaitez poursuivre
vos recherches dans une université américaine,
alors vous pouvez postuler pour obtenir ce
type de bourse. environ 20 bourses doctorales
sont disponibles pour la période 2011/2012.
en fonction de votre projet de recherche, la
durée de financement est de 3 à 12 mois ou
de 2 à 9 mois. le montant mensuel, sur une
base de 9 mois, s’élève pour les doctorants
salariés, à 1 200 $ et, pour les non-salariés, à
2 000 $.toutes les disciplines sont concernées
par ce programme, mais une attention particulière sera accordée aux projets liés à l’environnement et à la sécurité alimentaire.
la date limite de dépôt des dossiers de candidature est fixée au 1er février 2011.
www.fulbright-france@org
monde
les francophones
planchent sur
leurs formations
doctorales
les éditions l'harmattan ont publié, en juillet
dernier, la synthèse du colloque « le doctorat scientifique dans le monde francophone :
enjeux et compétences », organisé à dakar,
du 24 au 27 novembre 2009, par la cIruIsef
(conférence Internationale des responsables
des universités et Institutions à dominante
scientifique et technique d’expression
française). ce colloque, auquel l'abg a participé, a rassemblé plus de 200 participants
issus de 26 pays.
Le doctorat scientifique dans le monde francophone, sous la direction de evelyne garnierZarli, collection géopolitique mondiale, 2010.
i
Provoquer la rencontre entre docteurs et recruteurs,
depuis 30 ans, l’Intelli’agence® s’y emploie.
BythewayCreacom
www.intelliagence. fr

Magazine n°1

Transcription

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BIBLIOGRAPHIE

Qu`est-ce que l`intelligence - Gilles LAFARGUE

Brochure 2 - Ecole de Guerre Economique

De la Dématérialisation à l`intelligence économique

Page personnelle Prof. Jean-Michel ADAM

faculte de medecine de tours - Université François Rabelais

RESPIRE n°28 - CCAS de la RATP

LES BIOTECHNOLOGIES: Parcours

ISDM n°26 - Université de Toulon

الإعـــــــــلان

Mr Tchimou Kowa Christian Cyrille TITRE

Thèse Anne Mazzanti

Les nominations à l`Ordre national du Québec 2008