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LE GUETTEUR WALLON ARCHIVES Société Royale «Sambre et Meuse» Association sans but lucratif Le Guetteur Wallon REVUE TRIMESTRIELLE 60me année Le n° - 150 frs 1984 - N° 2 LE GUETTEUR WALLON Organe de la Société Royale Sambre et Meuse (A. S. B. L.) IN MEMORIAM Fernand DANHAIVE Joseph CHOT Chanoine Evariste HAYOT Abbé René BLOUARD Emile DAVE Joseph ROLAND Félix ROUSSEAU HAUT PATRONAGE M. Emile LACROIX, Gouverneur de la Province de Namur. M. Robert GRUSLIN, Gouverneur honoraire de la Province de Namur. Monseigneur R. MATH EN, Evêque de Namur. COMITE D'HONNEUR Monseigneur Philippe DELHAYE, Protor.otaire apostolique, Professeur émérite à la Faculté de Théologie de Louvain-la-Neuve, Membre de l'Académie Royale de Belgique. MM. Ernest MONTELLIER et Georges TURC. CONSEIL D'ADMINISTRATION Président : M. Jean BAUDHUIN, Directeur de la revue « Le Guetteur wallon », 55, rue Melchior, 5002 Saint-Servais - Tél. 22.13.52. Vice-Présidents : Mmc Françoise JACQUET-LADRIER et M. François JACQUES. Secrétaire : MeUe Marie-Louise DAMOISEAU, 129, chaussée de Louvain, 5000 Namur Tél. 22.26.13. Secrétaire-adjoint : Mme Anne JONARD-TILMANT. Trésorier : M. François LEMPEREUR, 60, rue de la Pépinière, 5000 Namur - Tél. 22.31.20. Membres : M™ A. CANIVET, M»* M.-Cl. OFFERMANS, MM. J. BOVESSE, A. DULIERE, J. FICHEFET, L. LEONARD, R.P. Daniel MISONNE, E. TONET, J. WILLEMART. Cotisation ordinaire : 450 frs. Cotisation de soutien : 550 frs. Cotisation de membre protecteur : 1000 frs. C.C.P. 000-0505262-86 au nom de Sambre et Meuse - Le Guetteur Wallon, 5000 Namur. SOMMAIRE A. Monin UN ETRANGE PROCES CRIMINEL A ALLE-SUR-SEMOIS EN 1660 61 A. Dulière : RENDEZ-VOUS SECRET AVEC BLANCHE DE NAMUR 77 J. Willemart : CROIX D'OCCIS (suite) 80 J. Herbillon : NOTES DE TOPONYMIE NAMUROISE 82 J. Evariste : LISTE DES PHILIPPEVILLAINS AYANT SERVI SOUS L'EMPIRE (suite) 85 COMPTE RENDU 88 ASSEMBLEE GENERALE DU 11 FEVRIER 1984 89 UN ETRANGE PROCES CRIMINEL À ALLE-SUR-SEMOIS EN 1660 Dans son ouvrage paru en 1914 et devenu classique, L'Ardenne méri dionale belge, le Docteur Delogne publiait les pièces du procès intenté à Sugny, en 1657, à charge de femmes accusées de sorcellerie. Selon le rap port de Delogne, sept malheureuses furent étranglées et leurs corps brûlés. Il est vrai que Sugny était réputé pour les danses diaboliques et sabbats qui se tenaient dans ses environs, soit au Soffa, soit au Château de la Roche. Le procès qui se tint à Aile trois ans plus tard, en août 1660, n'a rien à voir avec la sorcellerie : ni sabbats, ni rapports avec le diable, même pas de sorts jetés contre tel ou tel, pas de tortures pendant l'instruction, les aveux sont spontanés. Il s'agit d'un procès de mœurs assez spécial mais qui se ter minera par une sentence aussi infamante et impitoyable qu'un procès de sorcellerie: la strangulation et le feu. Or de quoi s'agit-il? D'une affaire d'adultère doublé d'inceste dont sont coupables un père et sa fille : le père, Jean Gibou, âgé de 70 ans, quitte le lit conjugal où sa femme est malade et rejoint sa fille Marguerite âgée de 40 ans ! Le fait se répétera après la mort de la mère, un enfant naîtra. Au cours des interrogatoires, les juges ne s'en tiendront pas à l'affaire de mœurs mais se permettront une intrusion dans le domaine spirituel en demandant aux accusés s'ils ont confessé leur péché; le fait que les coupa bles aient communié sans confession leur permettra d'ajouter à l'adultère et à l'inceste un troisième crime: celui de sacrilège! Voilà quant au fond. Mais la procédure présente aussi un caractère spécial et, pour comprendre le déroulement du procès, il convient de rappe ler le statut particulier d'Aile. 1. Aile était affranchi à la Loi de Beaumont. En conséquence, les bourgeois élisaient chaque année, à la Pentecôte, les mayeur et échevins qui allaient, pendant un an, les administrer et constituer «la justice». 2. Par l'accord de 1235 entre Jean d'Eppes, évêque de Liège-Duc de Bouillon, et Baudouin, seigneur d'Orchimont, le village d'Aile était devenu indivis entre Bouillon et Orchimont et les décisions relatives à Aile devaient être prises de commun accord par les deux seigneurs. 3. En vertu de cet accord, la haute justice d'Aile relevait collective ment de Bouillon et d'Orchimont ; la procédure est ainsi exposée dans un record de la Justice d'Aile du let juillet 1576: « ...ceulx d'Aile en faict de recharge et appel ne sortent poin des limi tes de lad. Segnorie d'Aile et n'a la justice d'Aile aucune autorité de pou voir juger sur leurs noms mais, après que le recours et cause sont fournie et conclue, deux des hommes jugeant de la Souveraine Court de Bouillon ou plus se trouvent ou doibvent trouver en dit lieu d'Aile, et semblablement ceulx d'Orchimont, et jugent et vident ensemble tous les procès, y estant 61 - aussy les deux prévost tant de Bouillon que d'Orchimont...» Comme on va le voir, ce sont les procureurs Blois pour Bouillon et Saisselle pour Orchimont qui suivront et orienteront les poursuites. En conséquence, dans les interrogatoires, les questions à poser aux accusés seront rédigées par les représentants des seigneurs ; le rôle du sergent, pour la justice d'Aile, se limite à poser les questions et à enregistrer les réponses. Dans les originaux les questions occupent la partie gauche de la page, les réponses étant consignées sur la partie droite. Dans les documents qui sui vent, les réponses ont été reportées directement après chaque question. Disposant de toutes les pièces du dossier (1), suivons donc le déroule ment de ce procès en reprenant, sans commentaires inutiles, les documents authentiques. Quelques «blancs» indiquent quelques mots illisibles. 2 AOÛT 1660 Premier interrogatoire de Jean Gibou Du 2d d'aoust 1660, pardevant la Haulte Cour de Justice d'Aile Com parurent les procureurs des Srs Souverains dudict Aile à scavoir Blois pour le Sr procureur Général de Son Altais cérénissime, et le sieur Jean Saisselle commisse du Sr prevost d'Orchimont, lesquelles sur l'arest faict de la per sonne de Jean Gibou le jeusne a la freche coup du crime du péché d'inseste, accusé par sa fille a son accouchemenr donct, pour parvenir a la cognoissance de la véritté du cas, ont exhibé article pour est(tre) l'aresté interogé et examiné sur chasque article pertinement de la véritté du faict, le sermen au preallable par luy pretté de dire véritté. Le debvoir achevé les dicts procureurs requerent vision pour avan poursui vre selon que la mathier le requirerat. Exibé en Cour le 2d aoust 1660 Messieurs de la Haulte Court d'Aile Les procureurs des seigneurs Souverains d'Aile vous requerent au deb voir de justice de bien pertinement examiner Jean Gibou le jeusne arresté au corps sur les ar(tic)les subséquents, le serment au préalable par luy pretté de dire vérité, bien pertinement et exact(em)ent rédiger par escrit sur chasque ar(tic)les ses responses avecque touttes causes de science et circons tances d'icelles. 1. Premier serat examiné sur son eage, arte, résidence et de quoy il a vécu pendant sa ... iusque a son mariage et depuis icelluy iusques au p(rese)nt. R- Jean Gibou le jeusne âgé de 70 an ou environ, apprès le serment pretté de dire véritté sur les articles a luy désigné, sur le premier déclare qu'il est natiffe d'Aile et y réside, sur le mesme article dépose qu'il n'at aultre arte que de manouvrier et qu'il n'at tousiour esté jusque a son mariage, cy (1) Ce dossier se trouve au dépôt des archives communales de Alle-sur-Semois. - 62 - non qu'il at esté pattre espasse de quattre an audict Aile y gardant les chevalle. 2. S'il scait pourquoi il est arresté et le subject. R- Sur la seconde deposse qu'il estre aretté pour le subiet de sa fille pour luy avoir procréé une enfan de ses œuvres et qu'il ny a poin oeu d'aultre que luy corne il tient. 3. Quelle foy, quelle loy il tient. R- Sur la troiziesme dépose qu'il tient la fois de la Saincte église catholicque appostolique et romaine et y veult vivre et mourir. 4. Combien de temps il y at qu'il est vefve. R- Sur la quattriesme dépose qu'il at deux an ou environ qu'il est demeré vefve. 5. Quant fois il a esté a confesse et a la Ste communion depuis le trespas de sa feme. R- Sur la cinquiesme dépose qu'il at esté a la confesse depuis le trespas de sa femme touz le jours qu'il entend la pacque et le noel. 6. S'il nat heu copulation charnelle avecq jumens, vaches ou aultres bestes femelles. R- Sur la siesme dépose nihil. 7. S'il a heu copulation charnelle avecq sa fille soit devant la morte de sa feme et du depuis, et encor quelque peu de jours avant son acouchement. R- Sur la septiesme dépose qu'il oeu copulation charnelle avec sa fille auparavan le trépas de sa femme et du depuis la mort de sadict femme. 8. Par quelle usage et fasson il l'at induy et parvenu a la cognoistre char nellement. R- Sur la huictiesme dépose qu'il n'at induy sa fille ny forcé a aucune fason que se soit, cinon que estant couche par ensemble il at pris sous sa mains la partie de sa fille et ausitoz at oeu connoissance d'elle sans aucun refu, cy non que sa fille luy disoit qu'il ce tinis quoy. 9. S'il l'at tenu par longue espace de temps, couché ensemble corne home avecq sa feme l'aprochant charnellement a sa volonté. R- Sur la neuffiesme dépose que depuis le trespas de sa dict femme ils ont tousiour couché par ensemble corne l'homme et la femme la conoissant charnellement. 10. Si lors qu'il s'at confessé il at déclare son péché d'inceste, et s'il n'at conseillé sa fille et luy défendu de le confesser et obstant s'il n'at laisé de recevoir son créateur. R- Sur la dixiesme dépose qu'il n'atte poin confessé son péché estant a la confesse, et n'atte consellé sa fille de ne le confesser et neantmoin de n'avoir poin confessé son péché ne laissât de resevoir son créateur. 11. Si l'enfan dont sa fille s'at dernier(eme)nt acouché n'est de ses œuvres et s'il ne l'at confessé et cogneu a la sage feme, mesme a la justice lors qu'il a esté arresté. R- Sur la onzième, dépose que l'enfan que sa dict fille at oeu est engendré de ses œuvres, sur le mesme dépose qu'il l'atte confessé a la sage femme a revenan de Rocheaux et de mesme l'atte confessé a la justice estant misse en arest. - 63 - 12. S'il a conseillé a sa fille de prendre des bruvaiges ou potions pour nuire ou empêcher son fruict ou aultres choses pour le détruire. R- Sur la douziesme depouse qu'il at donné donseille a sa dict fille de pren dre des bruvages ne sachant neantmoins qu'il estoit enseintre d'enfan et n'atte donné aucun conseille de detruyre ny faire malle a l'enfan, ains au contraire luy a tousiour deffendu de s'efforcer crendre de faire tort a l'enfan. 13. Si luy mesme en a esté querire et qui sont qui en ont faict et donné et sou quelle prétexte. R- Sur la tresieme depouse qu'il at esté luy mesme au ... pour avoir des brevages mais qu'il n'en a poin oeus, sur le mesme article despouse que sa dict fille natte esté quérir elle mesme deux fois, mais la premier fois il lassa cassé les boutelle an desandant la montaigne, quy est tout son sens. Sa depousition a luy pertinamant releult at persisté et marqué ne sachant lire ny écrire et y veult vivre et morir. avec sa marque au pied d'icelle y apposé en présence de la hault Court et Justice dudict Aile. La marque /y du déposant. 3 AOUT Premier interrogatoire de Marguerite Gibou. Du 3e d'aoust 1660 pardevant la Haulte Court et Justice d'Aile Com parurent les procureurs des Srs Souverains dudict Aile a scavoir Blois pour le Sr procureur Gênerai de Son Altais Sme et le Sieur Jean Saiselle com misse du Sr prevost d'Orchimont, lesquelle sur l'arest faict de la personne de Margueritte Gibou pour cause du crime du péché d'insest confesse avoir commisse avec son père estant en malle d'enfant, donct pour parvenir a la cognoissance du cas ont exhibé article pour estre l'arestée interroger et exa miner sur chasque article pertinement de la veritté du faict, le serment au preallable prestée de dire veritté. Le debvoir achevée les dicts procureurs requerent vision pour avan pour suivre selon que la matière le requererat. Exhibé en Cour le 3e d'aoust 1660 Messieurs de la Haulte Court d'Aile. Les procureurs des Seigneurs Souverains d'Aile vous requerent en faveur de justice de bien pertinement et exactement examiner Margueritte Gibou fil de Jean Gibou le jeusne sur les articles suivants et de bien rédiger par escrit touttes les responses qu'elle ferat sur chasqunne article avecque touttes circonstances et causes de science de son faict, le serment de dire vérité au préalable opéré. 1. Dirat son eage, sa résidence et si elle scait pourquoy elle est arrestée. R- Margueritte Gibou âgée de quarante an ou environ, apprès le serment pretter de dire veritté, sur la première dépose que il estre aresté et gardé pour ce qu'il at oeu une enfan n'estant poin mariée. - 64 - 2. Qui luy a procréé l'enfan qu'elle at dernièrement accouché. R- Sur la deusieme depouse que l'enfan qu'il at oeu at esté procréé et engendré par les œuvre de Jean Gibou le jeusne son père. 3. Avecque qui elle a oeu copulation charnelle, coument et par quelle manière elle y a esté induitte. R- Sur la troiziesme depouse qu'il n'at oeu copulation charnelle avec per sonne qu'avec ledit Gibou son père, en outtre depouse sur le mesme article que son dict père l'atte esté trouvé sur son lict a la chambre dedevan et incontinant son arivée se getta comme un mourdreux (1) sur elle et at mis la main sur sa party honteus et a l'instance at oeu coupulation charnelle avec elle. 4. Depuis quelle temps elle a tombé en ce péché, si lors qu'elle y a tombé la premier fois sa mère estoit encor vivante. R- Sur la quattriesme depouse que la premier fois s'at esté après la mort de sa mère et poin auparavan. 5. Si elle a persévère dans ce péché depuis la morte de sa mère iusque au présent avecque aultant de liberté et familiarité que feme avecque son marit R- Sur la cinquiesme depouse que s'at esté la premier fois après la mort de sa mère, et du depuis qu'il at esté couché avec luy et at oeu connoissance charnellement par deux fois. 6. Quelle loix et quelle fois elle tient R- Sur la siesme depouse qu'il tient de la fois et religion de la Saincte messe et poin d'aultre. 7. Si elle a confessé se péché lors qu'elle a esté confesser. R- Sur la septiesme depouse qu'il at confessé son péché a Sedan a un prestre dedan la grande église, qu'il luy avoit enchergé de déclaré le père a son accouchement et depuis sa confession n'y at plus retonbée. 8. Qui luy a empaiché ou induy a ne le poinct confesser, et quant fois elle a receu son créateur avecque telle péché non confessé. R- Sur la huictiesme depouse nihil. 9. Si elle a prins des bruvages, potions ou aultre chose pour empaicher ou détruire son enfant dans ses flancs et si elle mesme en a esté quérir, a qui et sur quelle prétexte. R- Sur la neufieme depouse qu'il at prins un bruvage mais que s'etoit pour les fleurs et non poin pour son fruict ne sachant poin encore pour lors qu'il estoit ensainste et que s'atte esté elle mesme qu'il at esté quérir le brevage par deux fois dont le premier ne luy servitte de rien dautant quil fuct cassé a desendant la montaigne. 10. Qui luy en a servit et donné, par quelle conseil ou instruction. R- Sur la disieme depouse qu'il ne cognois la personne qui luy at vendu le bruvage et que personne ne l'atte induy a telle chose. 11. Si elle n'a faict des effors et tenté de tuer et faire morir son enfant dans son ventre, par quelle fasson ou manier. R- Sur l'onziesme depouse n'avoir tacher a faire tort a son fruict, qu'ille at (1) De l'ancien français mordrir, murtrir (tuer, assassiner); d'où mourdreux, moudreu... litt. : meur trier et le sens courant: violent. - 65 - encore déclaré que son dict père at encore oeu connoissance d'elle depuis qu'il estoit ensaincte, qui est tous ce qu'il at a dire. Après sa dépousition a elle releue at persisté et marqué estant en pré sence de la Court et y veult persisté vivre et mourir que le tous cy dessus est enthierement véritable. La marque <* /—' de la depousante Nouveaux interrogatoires Le 3e d'aoust pardevant ladict Court Les dicts procureurs par les prénomés qui ont vœu les responses dudict Gibou ont requis que la court aict de nouveaux a l'interoger sur le mesme article, luy relire ses repon, les bien recollé et scavoir s'il y persiste et s'il n'at chose quoy que se soit a y adjouter ou diminuer et luy serat inquis de super abondan quand fois il peult avoir cougneult sa fille charnellement auparavant de la mort de sa femme, et en quelle lieu s'atte esté, quand fois elle at esté couché auprè de luy et s'il l'atte cougneu depuis qu'il a soeu qu'il estoit ensaincte et conbien de fois. Le debvoir achevé elle est auscy requis vision pour passé plus oultre. Ce jourdhuy 3e d'Aoust nous la Haulte Cour et Justice d'Aile, nous aiant transporté auprès de Jean Gibou le jeusne aresté a l'instance des pro cureurs des Srs et luy faire de nouveau prester le serment, de luy donner lectur pertinement et clerement de chascune ses réponses pour voire s'il y avoit a adjouster ou diminuer, at dict y persister et d'abondan interogé sur le verballe des procureurs de ce jourd'huy at confessé avoir couneu charnelle ment sadict fille une fois qui estoit la premier au paravan la mort de sadict feme qui estoit a la chambre dedevan sur la couche de sadict fille, en oultre déclare l'avoir couneu par plusieurs et divairses fois depuis la mort de sadict femme ne sachant le nombre mais qu'ils ont tousiours couché par ensemble et confesse aussy avoir oeu affaire avec elle pendant qu'elle estoit gros mais qu'il n'at pas prins garde le nombre ne pensan poin a sella, décla rant que le tous ce que dessus déclaré est enthierement et exactement vérita ble et y veult persisté vivre et morir, an quoy il at marqué. La marque /^ du deposan Du 3e d'Aoust 1660 pardevant la Haulte Court et Justice d'Aile Comparurent les procureurs des Srs Souverains dudict Aile a scavoir Blois pour le Sr procureur Gênerai de Son Altais Sme et le Sieur Jean Saisselle commisse du Sr prevost d'Orchimont, lesquelle sur l'arest faict de la personne de Margueritte Gibou pour cause du crime du péché d'insest con fesse avoir commisse avec son père estant en malle d'enfant donct, pour parvenir a la cognoissance du cas, ont exhibé article pour estre l'arestée interoger et examiner sur chasque article pertinenment de la veritté du faict, le serment au préalable par elle prestée de dire veritté. Le debvoir achevé les dicts procureurs requèrent vision pour avan poursuivre selon que la matier le requererat. - 66 - Le mesme jour avan midy Les dicts procureurs par leurs envoies cy devan dy aiant vœu les response de ladict Margueritte et attendu qu'elle desimule la veritté et soy contraire aux confessions de son père, vous requerent qu'elle soit de nouveaux interogé par mesme serment sur les article seconde iscy exhibé, de la sera faict aultre debvoir celon que la mathier sera dispouse. Le 3e Aoust 1660 par devant la Haulte Cour d'Aile Comparut le Sr procureur gênerai en personne adsisté de Blois, lequelle aiant vœu les response de Margueritte Gibou prisonier qui ne sont touttefois conformes aux déposition de son père, at requis de l'examiner de rechef sur ces dict article pour voire s'il auroit quelque chose a diminuer ou adjouter. Venant a la premier y at persisté, a la seconde de mesme, a la troiziesme de mesme. A la quattriesme at adjousté et confessé que sa mère vivoit encor lors que son père at oeu coupulation charnelle avec elle. La premier fois son dict père aiant quitté sa feme au lict mallade et aller auprès de la depousante qui estoit couche dan son lict a la chambre dedevan. A la 5e adjoust et confesse que depuis la mort de sa mère ils ont tousiour couché par ensemble et touttefois qu'il avoit besoing d'elle il en jouissoit. Au 6e persiste. A la 7e adjoust et confesse qu'il n'y at que deux mois ou environ qu'il at esté a la confesse a Sedan a la Grande église ou elle at confessé son péché et depuis qu'elle n'at plus permy a son père de l'attoucher, aian esté auparavan plusieurs fois confesser iscy et alleieurs sans déclarer qu'elle avoit coupulation avec son père n'osant le dire et ne laissoit pas de resevoir son créateur. A la 8e, 9e, 10e, Ile persiste et après lecture a elle donné at persisté et . marqué. La marque Y de la depousant Conclusions des Procureurs Conclusion - Les procureurs des Seigneurs souverains d'Aile poursuivant contre Jean Gibou le jeusne, prisonier, Exhibé en Court le 3e Aoust avan midy 1660. Les procureurs des Seigneurs poursuivans contre Jean Gibou prisonier qui ont vœu les confessions des crimes perpétrés par icelluy, la persistance en ses confessions d'avoir comis le péché et crime d'inceste avecq sa fille tant pendant la vie de sa feme que du depuis avecq touttes libertés, idem celluy de sacrilège par plusieurs fois. Qui faict que les Srs procureurs con cluent que ledit prisonier deverat estre condané a la morte telle et de telle gendre que les Nobles Juges jugeront les cas mériter et aux despens, en oultre a la confiscation de tous ses biens au profict desds Seigneurs a cause du crime de lèse Majesté divine qu'il a comis ... selon que mieux le Noble Juge treuverat équitable que l'on implore. - 67 - Ledict jour après midy Les procureurs des Sr Souverains aiants vœu la persistance du prisonier dans ses déclaration et confession ont exhibé leurs conclusions et ont requis que le Sergeant aict a le faire audict prisonier, s'il avoit des allige (2) affaire qu'il l'auroit a prendre telle advoca ou procureur qu'il trouvera appropoz, cy non qu'il en serat donné; sur quoy at esté envoie Jean le Fort eschevain a l'apsence du sergeant, lequelle a relatté d'avoir parler audict prisonier et luy dy ce que dessus. Lequelle at repondu de persister a ce quil avoit déclaré de volloire vivre et morir la dessus ne desiran de faire aucune allige ne d'avoir aucun procureur ny advoca, au contraire qu'il désire bien de mourir et d'avoir un bon confesseur. Ce qu'aiants les dicts procureurs requis que le procès soit mis en ordre et les courts convoqué pour en juger dès demain cy faire ce peult. Signé par ordonnance de la Cour Thyry Moraux greffier Conclusion - Les procureurs des Seigneurs Souverains d'Aile poursuivant contre Margueritte Gibou, fille de Jean Gibou le jeusne prisonier, Exhibé en Court le 3e Aoust 1660 aprè midy Les procureurs des Seigneurs tiennent pour reproduit les acts ... a leurs diligences contre Margueritte Gibou et signament ses confessions réitéra tions et persistances en icelles par lesquelles elle se treuve attinte et convencue des crimes et péchés tant d'inceste que sacrilèges crime de leze Majesté Divine pour lesquelles crimes et cas mesmes celluy d'inceste pandant la vie de sa mère, lesdts procureurs concluent qu'elle debverat estre condemnee a la morte de telle gendre que les Nobles Juges treuveront les crimes mériter et aux despens, en oultre ses biens confisqués et adiugés aux Srs ou le tout selon que mieux les Nobles Juges treuveront équitable que l'on implore. Le mesme jour après midy Les procureurs des Srs qui ont oeu communication des persistance de Margueritte Gibou et des addition qu'elle a faict ce jourdhuy sur le midy, exhibe conclusion et requier le sergeant pour l'aller signifier a ladict Gibouz et luy dire et demander cy elle veult faire quelque décharge ou allige et prendre pour ce quelque procureur ou qu'il luy y serat donné. Sur quoy at esté envoie Jean le Fort eschevin a l'apsance du sergeant qui a relatté d'avoir dy ce que dessus a ladict Gibouz, laquelle a respondu persister a ses déposition et dy qu'elle ne volloit avoir aucun procè ny procureur et que s'il debvoit morir c'on luy donne un confesseur. De quoy ledicts procureurs aiants vœu vision de ladict relation ont requy que le procè soit misse en ordre et les Courts convoqués pour donner santance dès demain cy faire ce peult, demandant accélération de justice enscy que le cas le requier. Signé par ordonnance de la Cour Thyry Moraux greffier (2) Selon Grandgagnage, l'ancien wallon alligier = alléguer.D'où ici: allégation, objection. - 68 - * * * Contrairement au vœu des procureurs, la convocation des Cours n'eut pas lieu le lendemain 4 août. Aucun document ne précise la raison du retard. Y eut-il objections ou scrupules? Certains souhaitèrent-ils un com plément d'information? Toujours est-il que c'est seulement trois semaines plus tard, le 25 août, qu'il fut procédé à l'interrogatoire de témoins ayant assisté à l'accouchement et qui — selon les rigueurs de l'époque — durent exploiter les douleurs de la parturiente, ne pouvant lui venir en aide avant qu'elle n'eût déclaré qui était le père. Ensuite le dénouement fut rapide : les accusés furent exécutés le lende main 26 août ! 26 AOUT 1660 Témoignages Nous, la Cour Souverainne des deux princes par indivis iugeante a Aile, aiant veu le procès criminel intentés a l'instance des procureurs des Sgrs dud.lieu acteurs d'une parte, contre Marg(ueri)te Gibou prisoniere d'autre parte, le tout meurement considéré et examiné et avant de faire droict définitivement sur les conclusions desdits procureurs, ordonne a iceux de faire ouyr pardevant la iustice dud.Alle les femmes qui ont estes p(résen)tes a l'accouchement de ladite Margte affin, leures dépositions rédigés pa escrit, estre icelles iointes aux acts par après en ordonner ce qui serat de raison, despens réservés en définitive. Ainsy resould a Aile le 25me Aoust prononcé led.iour, p(résen)ts les procureurs desdits Sgrs qui en ont requis copie. L. de Sandron par ord.ce Messieurs de la Haulte Justice d'Aile Les procureurs des Seigneurs Souverains d'Aile vous requerent en faveur de justice et ensuitte du recet donné cejourd'huy en les Cour Souverainnes desdits Seigneurs qu'ayez a examiné par serment les femes sy enbas denomées qui ont esté a l'acouchement de Margueritte Gibou prisonier sur les articles suivantes, le serment au préalable preste de dire vérité suivant stil. Premier si elles sont esté apellées a telle acouchement et par qui Par quelle voye et manier elle a confessé que l'enfant dont elle se delivroit estoit le père et diront touttes les causes circonstances et sciences de ce faict La Sage Dame en son particulier dirat au delà des articles sy desus qui l'at esté apeller pour venir a telle enfantement et si le père de ladite fille qui s'acouchoit luy a dit qu'il en estoit le père et ... le subject pourquoy il luy at ce confessé et en quelle place - 69 - Generallement diront touttes telles femes ce qu'elles en serment ont veu et entendu tant de ladite fille prisoniere que de son père Diront aussi s'ils leur a esté faict deffence de mettre la main a icelle si elle ne declaroit qui estoit le père, et sy en ses plus grande doleur d'enfante ment elle y a persisté, et sy elle at vassillé ou dénoncé aultre que son père. Noms et prénoms des femes suivent La feme Gérard le Fort, de Rochehaut, Sage Dame Jehenne Henri Marie Delvaux Marguerite Pieret Perette Grandfils Jehenne Henry, feme au cordogné. Du 25e d'Aoust 1660 Pardevant la Haulte Cour de Justice d'Aile Les procureurs des Srs Souverains dudit Aile poursuivant contre Margueritte Gibou prisonnier Les dits procureurs en personnes, pour satisfaire au recès des Courts Souveraine dudict Aile, ont exhibé interroga et prouduy les femmes desnomées au pied c'icelluy requérant le debvoir de justice a l'examaine suivant stil de cest Court. L'audition achevée et après pour tousiour plus grande elusidation que le maieur de cest Court et eschevins qu'il avoit assumés auront recordé du debvoir qu'il ont faict a la deffence de n'assister la dict prisonier en son enfantement qui estoit le père et ce qu'elle en at respondu, ce que l'on requer d'icelluy et de ses adjuinct que le toutte soit remis ens mains des Courts Souveraine pour en juger difinitivement requérant accélé ration de justice cellon que la mathier le requier. En suict de quoy nous la Justice susdict, aiant faict passé le sermain suivan stil a les deux femes Henry, Marie Delvaux, Margueritte Pierroz et Perette Grand fils, ont conjunctement et une animement dict et déposé sur le contenu dudict interrogaz le suivan : A la premier article Margueritte Piroz, Janne Henry et Perette Grand fils ont dict sur le sermains par elles prettées qu'elles ont esté a l'achouchemain de Margueritte Gibou cy qui estant convoqué par le maieur, et Marie Delvaux y avoir été appelle par ladict Margueritte Piroz, et Janne Henry femme du cordonier par l'advoeu de son mari. Ont dict de plus en nombre de trois qui sont les dicts deux Janne Hanry et Marie Delvaux qu'ettant présente au coumessement des dolleurs de la dict prisonier luy fuct remonstré qu'elle oeust a déclarer qui estoit le père bounement et fidellement et qu'elle seroit adsistée et aussitoz déclara que s'estoit son père, sur quoy luy fuct remonstré qu'elle ne vient a des charger personne soit jeusne fils ou aultre pour en charger son dict père, elle dict qu'elle avoit esté a confesse et que son père confesseur l'avoit chargé de dire la veritté; qu'elle s'en deschargeoit n'estant d'aultre que son dict père ce qu'elle confirmoit par deux fois. Ont aussy dict et déposé scavoir la dict Margueritte Piroz, Janne Henry et Marie Delvaux avoir esté présente lors que le maieur et quelque homme avec luy qu'elles n'ont prins égard fict commendement a la sage - 70 - femme de ne mettre la main a ladict Gibou pour assistance a l'enfantement avan que aict confessé qui estoit le père et aussy toz at déclaré que s'estoit son dict père et poin d'aultre, en quoy elle at tousiour persévéré pendan ses plus grande dolleur sans avoir recouneu aucune vassillation ny change ment. Qui est touz ce qu'elle en peult déposé de la veritté, et après lecteurs a oeus donné ont persisté et marqué leur déposition. La marque ÇC^ Janne Henry femme d'Ademe Martin La marque yO Janne Henry femme du cordonnier La marque X Peret La marque La marque )( Margueritte Piroz - y Marie Delvaux Marie Gérard femme demerant a Rocheaux sermentée, aigé de soisante an ou environ, at dict sur le contenu des article de l'interroga qu'elle at esté appelle pour l'asistance de l'acouchement de Margueritte Gibou, par Jean Gibou le jeusne son père et que dessendan le terme de Rocheaux pour venir a Aile ledict Gibou luy confessoy qu'il estoit le père de l'enfan de sa fille et luy demandan s'il savoit bien qu'il n'y auroit poin d'aultre qui oeust esté que luy, dict que non, sur quoy la depousante luy dict que tan pirre. Depouse en oultre qu'il luy at esté faict comendement de ne mettre la main a ladict Gibou avan qu'elle oeust confessé qui estoit le père n'aiant cougneu les homme qui avoient faict le comendement et auscytoz elle confessoit que s'estoit son père, n'aiant depuis recounu en elle aucun changemain ny vassillation qui est son seu. Apres lectur a elle donné at persisté et marqué. K La marque Y de la déposant Le mesme Jean Collignon maieur d'Aile avec Jean Ledinan le jeusne et Jean le Fort ont recordé et attesté en suict de la réquisitions leurs faict au verballe cy dessus que c'est veritté qu'en suict de leurs charge estant adverty que Margueritte Gibou estoit prette de son accouchement at esté faire comandemen a la sage famme de ne mettre la main a icelle pour assistance sy elle ne confessoit auparavan qui estoit le père et aussy toz ladict Margue ritte Gibou confessoit a leurs présence que s'estoit son père, ce qu'elle réité rât par deux fois. Et en témoins de verittés avont la présente soub signé et marqué ce 25e aoust 1660. La marque ^\ 7 de ^ean Collignon maieur Jean le Diant La marque /T\. Jean Du 25e Aoust 1660 pardevant la Haulte Cour de Justice d'Aile Comparurent les procureurs des Srs lesquelles ont requis laffermeture des acts et qu'elle soit produit aux deux Courts assemblé a ce jourdhuy - 71 - pour resouldre persistan a leur conclusion et prian d'avoir esgarde a l'inormitté des troy crime commisse par le prisonier scavoir qui sont l'inscest l'adultaire et le cacrilège dont il n'y at pas un qui ne meritte seul la mort, mettant en considération que par sa response au 12e article il confesse d'avoir consellée a sa fille a prendre des brevages et corne se sont crime qui ne se sont jamais commisse en ce pais cy il est nécessaire pour exemple que le chatiman soit extra ordinaire par la corde et après le foeu ou telle aultre que vous jugerés a proposer. Du 25e d'Aoust 1660 par devant la Haulte Cour de Justice d'Aile Comparurent les procureurs des Srs lesquelles ont requi que le procè soit fermé et produit aux courts a ce jourdhuy assemblée pour résoudre persistan dan leur conclusion et supplian d'avoir esgard a l'innormitté des troy crime comis par la prisoniere qui sont l'insest l'adultaire et le cacrilège, l'homissid y trouvan encore quelque plasse accause de la mort de l'enfan et des brevage qui ont esté pris, dont il ny at pas un seulle quy ne meritte la mort, et corne il sont toutte extra ordinaire et inoy en ce pays iscy il est nécessaire que la punission soit extra ordinaire qui sera la corde et puy le foeu ensy que son d'avis plusieurs jurisperitte consulté la dessus, laissan neantmoins le vostre a juger le gendre de mort. 26 AOUT Sentence rendue au lieu d'Aile et prononcé le 26me d'Aoust 1660 Nous la Cour Souveraine des deux princes par indivis iugeante a Aile, Veu le procès criminel intentez a l'instance des procureurs des Sgrs dud.lieu acteurs d'une parte, contre Margte Gibou prisoniere d'autre parte, de suitte les charges luy posées, ensemble ses responses de sa propre bouche et organne, tesmoignages et conclusions desdits procureurs, le tout meurement considéré et examiné faisant droict hors des acts, avons dict et iugé, disons et iugeons ladite Margte suffisanment attainte et convaincue d'avoir commis diverses fois le crime d'inceste avec Jean Gibou son père tant pendant le vivant de sa mère que continuez après la morte d'icelle dont de ses œuvres elle auroit produit un enfant et d'autres faicts aggravants Et partant pour repara(ti)on de tels énormes crimes l'avons condamné a comparestre pardevant nous et en genoux fléchis prier Dieu, les Sgrs, Jus tice et parties offensés mercy, pour ce faict estre mise entre les mains du Mre des haultes œuvres pour, avec la corde au col, estre mennée au lieu ordinair du signe patibulaire et illecq estre son corps attaché a un poteau pour y estre estranglé et iceluy réduit en cendres, a quoy la condamnons ensembles ses biens confisqués les frais de justice au preallable pris dehors d'iceux. Ainsy resould a Aile le 25me d'Aoust 1660. - Prononcé le 26me dudit mois p(rése)nts les officiers adsistés de leurs procureurs qui ont requis l'ex(écu)tion, ce qui at esté faict. par ordonn L. de Sandron Roy Gille par ord.ce - 72 - f - 73 - / - l - 74 - Nous la Cour Souveraine des deux princes par indivis iugeante a Aile, Veu le procès criminel intenté a l'instance des procureurs des Sgrs dudit lieu acteurs d'une parte, contre Jean Gibou le jeusne prisonier d'autre parte, de suitte les charges luy posées ensemble ses responses de sa propre bouche et organne, conclusions desdits procureurs, le tout meurement considéré et examiné, avons dict et iugé, disons et iugeons ledit Gibou suffisanment attaint et convaincu d'avoir commis plusieurs fois le crime d'inceste avec Margte Gibou sa fille tant pendant le vivant de sa femme, mère a ladite sa fille, que continué après la morte d'icelle, dont de ses œuvres il luy auroit procréé un enfant et autres faicts aggravants, et partant pour repara(ti)on de tels énormes crimes l'avons condamné a estre et comparestre pardevant nous a teste nue et en genoux fléchis prier Dieu, les Sgrs, iustice et parties offensées mercy, pour ce faict estre mis et délivré entre les mains du Maistre des haultes œuvres pour avec la corde au col estre menné au lieu ordinaire du signe patibulaire et illecq estre son corps attaché a un poteau pour estre estranglé et iceluy réduit en cendre, a quoy le condamnons ensemble ses biens confisqués, les fraix de iustice au preallable pris dehors d'iceux. Ainsy resould a Aile le 25me d'Aoust 1660 Prononcé le 26me dudit mois p(rese)nts les officiers adsistés de leurs procureurs qui ont requis l'exécution, ce qui at esté faict. par ordonn Roy Gille L. de Sandron par ord.ce * * Semblable affaire ne demande pas de conclusion, mais du moins peuton émettre quelques réflexions. Bien sûr les faits se passent en 1660: la croyance à la sorcellerie, la superstition sous toutes ses formes imprègnent tous les esprits — en haut comme en bas ! Comment la conscience de gens du peuple, ignorants et conditionnés, pourrait-elle se révolter? Il faut dire aussi que la procédure elle-même est pratiquement respon sable de tels jugements. Les élus locaux savent rarement écrire puisque, dans le cas présent, ils sont même incapables de signer. Sans doute, cela n'empêche pas un jugement sain mais comment ces gens pourraient-ils s'opposer aux instances seigneuriales ? Ils en sont réduits à transcrire fidèle ment les conclusions proposées. De plus les crimes ici condamnés sont à la fois civils et religieux. L'infanticide est loin d'être démontré mais, même s'il n'est pas retenu, une allusion fait quand même planer le doute. On peut s'étonner de la rigueur de la peine, mais les sentences insistent sur le fait qu'il s'agit de crimes extraordinaires qui ne se sont jamais commis dans ce pays et que, pour l'exemple, le châtiment doit aussi être extraordinaire. N'est-ce pas le meil leur argument pour des esprits faibles ? Pour l'exemple? En 1660, la France de Louis XIV brille de tout son éclat dans tous les arts : littérature, architecture, peinture, philosophie vont faire de ce règne un des grands moments de l'histoire. Mais la Cour elle- - 75 - même est en même temps le modèle de tous les vices : les Montespan sont légion ; les bâtards royaux, loin de mener au poteau, sont un titre de gloire ; poison, intrigue, abus de pouvoir sont monnaie courante. Mais il s'agit là de jeux réservés aux gens «bien nés» et que le menu peuple ne peut se permettre ! Outre sa sujétion, sa misère, ses privations, il est encore condamné à leur donner... le bon exemple! Il est vrai qu'à la même époque, La Fontaine terminait sa fable des Animaux malades de la peste par cette amère constatation : Selon que vous serez puissant ou misérable, Les jugements de Cour vous feront blanc - ou noir ! Albert MONIN Si vous êtes amateur de livres anciens, visitez la librairie « AU VIEUX QUARTIER » NAMUR 11, rue des Fripiers - 76 - A l'Ateneum de Helsinki RENDEZ-VOUS SECRET AVEC BLANCHE DE NAMUR (i) L'Ateneum de Helsinki n'est pas un vaste musée et il n'a guère de pré tention internationale, puisqu'il abrite principalement des œuvres finlan daises. Ayant vu naguère les reproductions des meilleures toiles conservées ici, j'ai un peu l'impression d'entrer dans une maison connue, alors que j'y mets les pieds pour la toute première fois. Les rares tableaux de YAteneum qui sont célèbres en France ne le sont, en général, que parce que les sujets sont... français. C'est le cas de Pasteur dans son laboratoire et du Jardin du Luxembourg d'Albert Edelfelt. Pour une raison un peu analogue, un autre tableau de ce même peintre est très connu en Wallonie et spécialement à Namur. Il s'agit de la Reine Blanche, fille du comte Jean Ier de Namur. Blanche devint, au XIVe siècle, l'épouse de Magnus Eriksson, roi de Suède et, par le fait même, de Fin lande. L'oubli recouvrit plus ou moins cette reine durant un demimillénaire, jusqu'au jour où, pour des raisons que nous avons tenté d'éluci der ailleurs (2), elle inspira, tour à tour, le conteur Topelius (1871), le pein tre Edelfelt (1877), le poète Hallback (± 1880) et le compositeur Ekenberg (1893). En ce dimanche de juin 1983, j'avais donc un rendez-vous clandestin avec Blanche de Namur. Elle était bien là, fidèle au poste depuis plus d'un siècle et continuant de faire danser sur ses genoux le futur roi Haakon Magnusson âgé de quelque deux ans. Si cette toile (haute d'environ un mètre et large de 80 centimètres) a souvent été reproduite dans les revues et les journaux de ma ville natale, la photo fut malheureusement toujours imprimée en noir et blanc. Aujourd'hui, je découvre enfin les coloris. Si la longue robe de la reine est blanche comme son prénom, les bras sont entou rés d'une étoffe grenat. On songe au vers de Villon dans la Ballade des dames du temps jadis : La Reine Blanche comme lys. (1) Ces pages sont extraites du livre Adorable Finlande dans lequel notre collaborateur André DULIÈRE contera l'histoire politique, militaire, littéraire et artistique de ce pays septentrional si mal connu en Occident, alors que selon l'expression du président KEKKONEN, la Finlande est une rêfe de pont entre l'Est et l'Ouest. Ce même livre contiendra le récit de deux voyages en Fin lande (1977 et 1983). La page que nous donnons ici en primeur est extraite de la relation du second voyage. (2) Blanche de Namur, reine de Suède et de Norvège, in les Nouveaux Fantômes des rues de Namur, Namur, Les Presses de l'Avenir, 1983, pp. 95-104. Rappelons que c'est par un article de Félix ROUSSEAU paru dans Le Guetteur wallon du 25 février 1925 (pp. 8-9) que Blanche de Namur commença d'être mieux connue dans sa ville natale. - 77 - - 78 - Sur le tableau d'Edelfelt, les cheveux de la reine sont blond foncé. Les traits du visage sont d'une élégante pureté et semblent imprégnés d'une cer taine mélancolie à peine tempérée par l'esquisse d'un sourire (on serait presque tenté de dire: l'amorce d'une esquisse) que va sans doute déclen cher le petit prince qui tend, vers sa mère, des bras confiants. Cette discrète langueur qu'Edelfelt a projetée sur le visage royal, s'explique peut-être pour deux raisons : 1) le peintre, qui avait alors 22 ans, était tout imbibé de romantisme et — à son insu, peut-être — prêtait son âme à son modèle qui incarnait son idéal de beauté féminine ; 2) Edelfelt présumait sans doute que Blanche n'était pas très heureuse avec son volage mari surnommé le Smek — adjectif que Marguerite Yourcenar traduit par baiseur; Carlo Bronne, par câlin, efféminé; et le dictionnaire de poche sué dois par caressant. Au mur de YAteneum, la reine Blanche est placée à droite de Pasteur dans son laboratoire, dont le regard donne l'impression d'une extrême con centration. Mais, alors que les couleurs sont très lisses sur le portrait de la Reine Blanche, les coups de pinceau sont nettement plus marqués sur le portrait du célèbre savant (3). D'autres tableaux, également peints par Edelfelt dans la capitale fran çaise, sont moins connus, tel ce Paris sous la neige: la ville est toute blan che, mais quelques tristes cheminées d'usine donnent au décor une note un peu cafardeuse. J'admire en Edelfelt, ce mélange — ou plutôt cette alternance — de tendresse et de rudesse. La tendresse apparaît dans le visage de la Reine Blanche; la rudesse dans les traits des pêcheurs du lac (qu'on pourrait pren dre pour les apôtres). La remarque vaut également pour Cawèn qui peint, tour à tour, une délicieuse Jeune fille à la fenêtre et les costauds Flotteurs de bois qui devaient illustrer le plus âpre chapitre du Chant de la fleur rouge de Johannes Linnankoski. Mais ce mélange n'est-il pas, en fin de compte, bien représentatif du peuple finlandais à la fois si tendre et si viril ? André DULIÈRE (3) II semble qu'Edelfelt ait réalisé au moins trois portraits (qui se ressemblent) de Pasteur dans son laboratoire, puisqu'on en signale un second à l'Institut Pasteur de Paris (dans l'ancienne salle à manger du chimiste) et un troisième au musée de Versailles. L'artiste était un grand ami du fils du savant. - 79 CROIX D'OCCIS (suite) Voici déjà quatre ans que fut interrompue notre modeste recension des croix d'occis du pays de Namur (1). Nous espérons que les lecteurs du G.W. voudront bien excuser cette longue absence justifiée, il est vrai, par certains problèmes de reprographie. En effet, l'évocation simplement abs traite de la forme même de ces modestes monuments pouvait paraître gênante et incomplète. Puisque la reproduction de dessins et de photogra phies est devenue plus aisée grâce aux techniques utilisées par le nouvel imprimeur de notre revue, il nous a semblé intéressant de renouer avec cette chronique des «in memoriam » de pierre taillée jalonnant les vieux chemins de nos régions. Profitant de ce nouveau départ, nous tenons à remercier M. André Oudovitsky, géomètre aux services communaux, pour l'aide pré cieuse qu'il accepte de nous apporter. Ses talents de dessinateur nous ont déjà beaucoup aidé lors du dossier consacré aux anciennes briqueteries namuroises (2). Enfin, dans la numérotation et la succession des notices, le lecteur ne pourra déceler aucun ordre logique si ce n'est celui dû au hasard de nos pérégrinations. J. WILLEM ART Lesve (Les Fosses) cf. G.W., 1979, n° 2, p. 75. Bois-de-Villers (rue Ferme de la Vallée) idem pp. (1) G.W. 1978, n° 1, pp. 34-35 et n° 3, p. 107 1979, n° 2, pp. 74-75. (2) G.W. 1981, n° 2, pp. 37-55. - 80 - 74-75. Vedrin (route des Comognes) cf. G.W. 1978, n° 1, pp. 34-35. Jambes (Montagne Ste-Barbe) cf. G.W. 1979, n° 2, p. 74. - 81 - NOTES DE TOPONYMIE NAMUROISE CLXXXVI. — Emines Emines [Na 47], w. émène (avec, à l'initiale, é fermé long) a pour for mes anciennes : peu après 1064 (cop. 15e s.) «Esmines»: MGH, Script., XV, pars 2, p. 963 (Fundatio ecclesiae S. Albani Namucensis). 1209 «Hesminnes», 1211 «Esminis»: M. GYSSELING, Topon. Woordenboek, p. 316. 1230 «Emines»: Abb. Val-St-Georges, charte n° 16. 1235 «Emmines»: Cartul. commune Namur, I, p. 26. 1265 «Emmines», 1294 «En Emines»: Dd. BROUWERS, Cens Rentes Namur, I, p. 43, 228. Le H- de 1209 paraît parasite et est considéré comme tel par les glossateurs. Pour Aug. Vincent, Les noms de lieux de la Belg., p. 85 : dérivé en ma de l'anthropon. Emmo [sur ce nom germ. très fréquent, cfr. Foerstemann, I, col. 949]. Pour Alb. Carnoy, Origines, p. 188: *imn-Tna «lieu aux prairies», cfr. dans Emblem, p. 187: *imna- > néerl. even, ail. eben «uni, égal». Pour E. Gamillscheg, Germanische Siedlung, p. 99: correspond à Emmen (prov. de Drenthe), 1313 «Emne» < *Amina [cette glose corres pond à celle d'Alb. Carnoy, cfr. H.J. Moerman, Nederlandse Plaatsna- men, p. 63, pour Emmen, 1139 «de curte nostra Emne», de *emn - «uni, égal», anc. sax. eban]. Pour M. Bologne, Petit guide étymologique, 2e éd., p. 48: *eximinas «les terres d'Eximius». Le elong initial écarte l'anthropon. Emmo ; dans un dérivé d'Eximius, la première syllabe serait es- (où -s- se maintiendrait en wallon). CLXXXVII. — Gazelle, à Mettet Gazelle, à Mettet [Na 131], w. àgazèle, a pour formes anciennes: 1265 «Goinzeles», 1289 «Goingniselles», 1294 « Goingsieles » : Dd. BROUWERS, Cens Rentes Namur, I, p. 144; II, p. 373; I, p. 273. «à la gazelle» cadastre. 1832 «Gazelle» : Van der Maelen, Dictionn. prov. Namur, p. 110. Ce toponyme est un dimin. en lat. -ella de Gougnies [Ch 71] ; donc: «Goingniselles» (1289), avec nasalisation > «Goinzeles» (1265), avec 82 - chute de la syllabe médiane > *Goizeles avec dénasalisation ; enfin, attrac tion de fr. gazelle, cfr. AUG. Vincent, dans Mélanges C. de Borman, 1919, p. 558. Gougnies [Ch 71], w. gougnèye, a pour formes anciennes: 1265 «Guignies», 1289 «Goingnies», 1294 «Gougnies, Goingnies, Goignies»: Dd. Brouwers, Cens Rentes Namur, I, p. 154; II, p. 373; I, p. 273 et 275. Pour l'étymologie, on suivra M. Gysseling, Topon. Woordenboek, p. 411, pour Goegnies, à Gommegnies (départ. Nord): germ. rom. Gaujiniacas «appartenant à Gaujo». CLXXXVIII. — Moignelée et la Molignée Moignelée [Na 86], w. mougn'léye, a pour formes anciennes : 1192 «Molenies», 1213 «Moligneis», 1215 «Molignies » : M. Gysse ling, Topon. Woordenboek, p. 702; avant 1204 «Moligniez» : Actes H. de Pierrepont, p. p. Ed. Poncelet, p. 31 ; 1265 «Molingnees», 1294 «En Molignees»: Dd. BROUWERS, Cens et Rentes Namur, I, p. 20, 201. Comme le glose Alb. Carnoy, Origines, p. 469, Moignelée représente lat. *moliniacae <terrae> «terres de moulin», avec métathèse consonantique. La Molignée est une rivière qui se jette dans la Meuse à Moulins, dépend, de Warnant [D 19] ; nous n'avons pas relevé de formes anciennes ; E. FOERSTEMANN, Altdeutsches Namenbuch, II, 2e p., col. 340, cite bien (d'après MiRAEUS, IV, 23): 1157 «Mulingia», mais il s'agit de Moelingen (fr. Mouland): M. Gysseling, op. cit., p. 701. Molignée représente lat. moliniaca, adjectif dérivé de lat. molinum «moulin» et c'est normalement un nom de lieu. Ce moulin peut être celui qui a donné son nom à Moulins, dépend, de Warnant, mais on ignore quand le nom a été créé et pourquoi on a fait un hydronyme de ce qui était normalement un nom d'établissement en -iaca. P. Marchot dans Leuvensche Bijdragen, 25, 1933, p. 42 (suivi par Alb. Carnoy, Origines, p. 626) écrit que l'ancien nom de la Molignée était Sara; en fait, ce nom n'est pas attesté comme tel, mais induit du détermi nant de Serville, situé sur le Flavion, affluent de la Molignée. CLXXXIX. — Serville Serville [Ph 27], w. sèrvèye, a pour formes anciennes: 920 « Villa » : Roland, Pagi. 965 (cop. 12e s.) «Serevilla»: Ann. Soc. arch. Namur, t. 33. 1138 «curtem de Serevilla»: Miraeus-Foppens, t. IV. - 83 - Pour Aug. Vincent, Les noms de lieu de la Belg., p. 99 : déterminant Serius, Serus, noms romains. Pour P. Marchot, dans Leuvensche Bijdragen, 25, 1933, p. 42, le déterminant est Sara, anc. nom de la Molignée; il est suivi par Alb. CARnoy, Origines, p. 626: Serville est situé sur le Flavion, affluent de la Moli gnée; Sara est issu de la racine indo-européenne ser «couler», d'où la Sarre, en Lorraine, etc. Pour M. Bologne, Petit guide étymol., 2e éd., p. 101 : *Serenevilla «le domaine de Seron», comme Serville (départ. Eure-et-Loir), 1151 «Servilla». La glose par un hydronyme est plausible, mais ne s'impose pas; en effet : 1°) Serville n'est pas sur la Molignée (cfr. plus haut, la Note sur la Molignée) mais sur un affluent de celle-ci ; 2°) ser- peut être un thème anthroponymique, cfr. le cognomen Serus, attesté dans une inscription de Gaule Transalpine: CIL, XIII, n° 7582, et l'anthrop. germ. Sarus (et Sario): E. Foerstemann, Altdeutsches Namenbuch, I, col. 1299. CLXL. — Velaine a) Velaine-sur-Sambre [Na 67], w. vélainne, a pour formes anciennes : peu après 1064 (cop. 15e s.) «in Veslomiis [lire: Veslaniis (avec Roland), plutôt que: Vellaniis (avec Marchot)]: MGH, Sciptores, 15/11, p. 963 (Fundation Ecclesiae S. Albani Namurcensis). 1265 «Velaynes», 1294 «Vellaines»: Dd. Brouwers, Cens et Rentes Namur, I, p. 21, 220. b) Velaine, dépend, de Jambes [Na 76], w. vélainne; 1265 « Velaines» Dd. Brouwers, op. cit., p. 87. Le toponyme est fréquent, tant en Wallonie (ainsi Velaine, à Landenne [H 35], w. à vélainne et Velaines (-lez-Tournai) [To 35], w. à vlainne) qu'en France, une quinzaine de Velaine(s), Velennes, Velosnes, Viélaine, Vieulaine, Villaine(s), Vilennes, Violaine(s), Vulaines: Aug. Vincent, Topon. de la France, p. 294, et Alb. Dauzat, Dictionn. des noms de lieux de la France, p. 703. Velaine représente le bas-latin villana «petite exploita tion rurale; tenure de paysan», dérivé de lat. villa. Pour P. Marchot, dans Revue belge Philol. Histoire, 8, 1929, p. 14, Vellana était chez lesfGaulois un nom de petit cours d'eau ou plutôt de source, dont la signification devait être: «qui est de nature meilleure», de vellos (aussi vélos) «meilleur» avec un suffixe. Cette glose est douteuse, comme celle de J. Devleeschouwer par un dérivé de lat. vitulus «veau», ce qui étonne déjà au point de vue sémanti que. Comme il arrive souvent, des graphies (analogiques ou inverses) sont inattendues, ainsi -io- (dans Violaine), ainsi -t (dans «Vitlena» en 837 et 868). Dans «Veslanus» du 11e siècle, -s- peut noter la longueur de la voyelle précédente; en wallon, Hong est l'aboutissement de la diphtongue germ. eo, ainsi dans l'anthroponyme germ. leod-behrt, fr. Libert, w. Lîbiè. Jules HERBILLON - 84 - LISTE DES PHILIPPEVILLAINS AYANT SERVI SOUS L'EMPIRE (suite) LEJEUNE Pierre, né le 2-8-1782, frère de LEJEUNE François-Joseph (1). Entré au 17e Rég. de ligne le 17 floréal an XI, passé à la lre Cie de la Garde Impériale comme chasseur le 27-12-1809, matricule 1855, reporté sur le matricule 433 en 1813, taille lm70, visage ovale, front étroit, yeux bleus, cheveux et sourcils châtains, marqué de la petite vérole. Campagnes des années XI, XII, XIII et XIV, 1806, 1807, 1808 et 1809, blessé d'un coup de boulet à la figure le 11 frimaire an XIV à la bataille d'Austerlitz, blessé au bras droit au passage du Bug le 24-12-1806, blessé au côté droit le 8-2-1807. LEVEL Mathieu-Félix, canonnier à la 5e Cie en garnison à Nieuport lors de la vente d'une partie de ses biens à Philippeville devant le notaire Decouvez le 31-2-1812. LINOIR Jacques, habitant Philippeville mais n'y étant pas né, fils de Jac ques et de Marie MINET. Capitaine aux armées absent le 30 prairial an XII, au 106e Rég. de ligne le 13-4-1808. LOIGEROT Antoine, officier retiré, résidant à Philippeville le 29 thermi dor an IX; son frère, Jean-Antoine, cité comme commandant d'armée à la même époque. MAGDELUNG Jean-Joseph, né le 23-7-1780, fils de François et de MarieAntoinette BREDAN; fusilier à la lre Cie 2e Bon du 14e Rég. d'infanterie de ligne, matricule 1121. Décédé le 24-12-1811 à Lérida, Catalogne, des sui tes de fièvre. MAGARA Jean-Baptiste, né le 11-10-1779, fils de Lambert et de Marie-Fr. CLAUSIN; remplaçant de Joseph BAYOT de Jamagne, fils de Louis, tombé au sort le 14 mai, pour la somme de 600 F monnaie de France, par acte du notaire Damade à Philippeville le 23 floréal an VII. Décédé à Phi lippeville le 13-7-1822, époux de Marie-Jh. STEVEN, née à Neuville le 18-11-1778, fille de François et d'Albine GOBILLON. MAILLOT Nicolas, né à Langres le 24-12-1782, fils de Claude-Jh. et de Louise FEVRIER, sous-lieutenant au 33e Rég. d'infanterie de ligne, placé en demi-solde et habitant Philippeville lors de son mariage le 25-11-1815 avec Marie-Jh. THIRIAUX, née le 2-3-1785, fille d'Antoine et de Marie-Jh. JAMBON. Décédé à Philippeville le 2-6-1821, cabaretier. MALPET Jean-Jh. né le 21-7-1793, fils de Germain et Marie-Jh. PATRON. Conscrit de 1813 ayant tiré le n° 15, arrivé au 9e Rég. d'infante rie légère le 22-11-1812, 3e Bon 6e Cie, matricule 9437, passé au nouveau Rég. sous le n° 877. (1) Voir Le Guetteur wallon, 59e année, 1983, p. 139. - 85 MARCHAND Jean-Baptiste, habitant Philippeville mais n'y étant pas né, fils de François-Jh. et de Marguerite DASSET. Hussard au 10e Rég. de Hussards le 2 thermidor an V et y étant toujours le 11 nivôse an VI. MARCHAND Pierre-Joseph, né le 11-11-1779, frère du précédent, caporal à la lre Cie de la lre Division d'artillerie à pied de la Garde Impériale; cité comme se trouvant à Witebsk, Pologne russienne, le 10-8-1812, dans un acte du notaire Decouvez à Philippeville daté du 5-5-1814. MASSON Louis, né le 19-2-1776, fils de Louis et de Marguerite MARGUISE. Sergent-major au 1er Bon de la Charente Inférieure lors de son mariage à Versailles le 27 fructidor an IV avec Marie-Louise BOUR GEOIS, 17 ans, de Versailles. MATAIGNE Alexis, né en 1763, fils de Léonard et d'Antoinette CHATEL, membre de la Légion d'Honneur, capitaine de grenadiers au 82e Rég. d'infanterie de ligne. En garnison à Corno lors de son mariage à Gratz, le 3-10-1810 avec Anne de MOSMILLER, 28 ans, fille de feu Joseph, conseil ler du gouvernement de Gratz et d'Anne de CATHARIN. MATHIEU Jean-Baptiste, né en 1783, fils de Jean-Baptiste et de Marie-Jh. LEDAIN, taille Im652, cheveux et sourcils châtains, yeux bleus, nez petit, bouche petite, menton droit, visage rond, une cicatrice au coin de l'œil droit. S'engage à servir de suppléant à Ernest DASSET, fusilier à la 8e DB de ligne ; ce remplacement sera refusé par le commandant de Dasset ; JeanBaptiste servira dans une autre arme. MATHIEUX Jean-François, habitant Philippeville mais n'y étant pas né, fils de Pierre-Marie et de Marie-Jeanne GERARD. Chasseur au 1 Ie Rég. de chasseurs à cheval, le 27 ventôse an X. MINET Jacques-Augustin, né le 1-11-1792, fils de Jacques-Jh. et de MarieBarbe MOREAU. Remplaçant de Jean-Bte GRADE, conscrit de 1813, arrivé au 9e Rég. d'infanterie de ligne le 22-11-1812, 3e Bon 6e Cie, blessé sur l'Elbe, prisonnier de guerre le 20-2-1813, rayé des contrôles ; cité par le capitaine Cardron dans ses lettres. OUDART René, de Philippeville. Cité comme militaire décédé en Espagne, lors du partage de ses biens à Philippeville entre ses neveux, le 16-11-1806, devant le notaire Decouvez. PARISET Jean-Pierre, né à Matougue, Marne, le 17-2-1753, fils de Phi lippe et de Marie-Anne CHARLIER. Officier retiré demeurant à Philippeville, veuf de Catherine ATTOUT lors de son mariage à Philippeville, le 27-!-1806, avec Marie-Antoinette NICAISE, née à Anseremme le 16-9-1771, fille de Jean-Louis et de Marie-Jh. MARTIN. Leur fils, JeanLouis, né à Philippeville en 1813, fourrier à la Cie d'artillerie à Philippeville, se distingua en 1830. Décoré de la Croix de Fer 1830, nommé souslieutenant dans la nouvelle armée belge, puis capitaine au 2e Bon d'artille rie, il fut tué en duel par le capitaine Eenens en 1834. PASCHALE, fils de Benoît et de Jeanne DETAILLE. Fait partie de la Division Infernale (grenadiers et voltigeurs réunis) du 9e Rég. d'infanterie sous le commandement du général Lasalle lors de la campagne d'Allema gne. Cité par le capitaine Cardron dans ses lettres. - 86 - PESTIAUX Armand-Augustin, né le 2-6-1773, fils de Jean-Fr., avocat au Parlement et de Marie-Catherine JACQUES-DUTRAIGNEAUX. Servit dans l'administration des hôpitaux du 15-6-1793 au 25-9-1798. Passe au 1 Ie Rég. de chasseurs à cheval le 15 novembre, campagnes de 1799, 1800 et 1801 à l'armée du Rhin. Entre dans la 112 DB le 12-3-1804 comme souslieutenant. Guerre contre les Anglais à Cherbourg, puis à Bordeaux ; lieute nant en 1807; puis à Turin et Florence, rattaché à l'armée d'Italie au 7e Corps de Catalogne, campagne de 1808; blessé grièvement le 2-12-1808 à l'affaire d'Espina-Vesa d'une balle dans le ventre. Retraité pour blessures le 24-3-1809. Décédé à Philippeville le 24-6-1833. Son frère Joachim, ancien officier du régiment de Ligne au service impérial d'Autriche, cheva lier de l'ordre de Marie-Thérèse pour sa belle conduite au fort de Vabarde (Tyrol) en 1799 contre les Français, fut commandant de la place de Charleroi de 1814 à 1828, puis de celle de Liège. Il meurt à Marchienne-au-Pont en 1853, lieutenant-colonel pensionné. PETIT François, fils de Jean et de Françoise CATHARINAUX. Cité comme militaire pensionné le 15 pluviôse an X, officier retiré en l'an XI et capitaine retraité. Décédé à Philippeville le 1-6-1813, en sa maison, rue de France. PETIT Narcisse, conscrit. Rentré dans ses foyers à Philippeville le 8-6-1814. Cité par le capitaine Cardron dans ses lettres. (à suivre) Jean EVARISTE - 87 - Compte rendu Arnold NIEDERER, Le folklore manipulé, dans Archives suisses des traditions populaires, t. 79, pp. 175-186, Basel 1983. Voici un article nécessaire mais dont l'extrême densité autorise une relecture approfon die. L'auteur y étudie de façon exhaustive et concrète les multiples interventions dont le folk lore a été l'objet tant hier qu'aujourd'hui. Tout en voulant adopter un système rigoureux d'analyse, A. Niederer paraît conscient de la fragilité de son point de départ, à savoir la défini tion même du folklore et les différents domaines que cette appellation peut recouvrir. En rap pelant le contenu du «folk-lore» primitif anglais, il s'attache à montrer en quoi cette ancienne conception du savoir populaire lié à un groupe précis dans un endroit déterminé a inévitable ment évolué pour finir par englober la totalité de la culture populaire qu'elle soit d'essence spi rituelle ou d'ordre matériel. Le niveau cognitif prenant peu à peu le pas sur le niveau stricte ment émotionnel, l'écart se creusera entre l'ancien et le «nouveau» folklore pour aboutir à cette culture de masse dont les interéactions avec la culture populaire sont multiples, domaine nouveau où les mass médias joueront en quelque sorte un rôle catalyseur. Une parenthèse malheureusement trop brève souligne le nouveau folklore des minorités. Les chants occitans de protestation et le mouvement autonomiste du Sud-Tyrol apportent la preuve que la culture populaire peut également s'actualiser et cesser d'être «passéiste». La manipulation ne date certes pas d'hier puisque déjà, au début de notre ère, le christia nisme avait maintenu dans de nombreux cas les coutumes païennes mais en y modifiant subti lement le sens initial. Les sommets de l'exploitation furent sans doute atteints sous le régime nazi quand les politiciens hitlériens exigèrent de l'ethnologie nationale des données concrètes permettant une rééducation efficace du peuple germanique. Bon nombre de symboles de la vie populaire furent dès lors réinterprétés de façon à exalter sans ambiguité possible la race aryenne, glorieuse, héritière des vieux mythes germains. L'utilisation politique du folklore par le pouvoir soviétique représente également un exemple majeur du 20e siècle. Aujourd'hui les créateurs de chants et de légendes populaires sont chaudement encouragés par le régime dans la mesure où ils exaltent la vie dans les kolkhozes et les exploits des cosmonautes. Quant aux groupes de danses populaires dont les meilleurs représentants sont soigneusement sélection nés, ils contribuent directement à la propagande culturelle du régime en U.R.S.S. et à l'étran ger. Après les politiciens, l'industrie du tourisme et des loisirs tire à son tour un large profit des manipulations folkloriques. Considéré aujourd'hui de manière consciente comme des tra ditions, les manifestations folkloriques ne représentent plus de nos jours aux yeux de la criti que germanophone qu'une culture populaire de seconde main, une espèce de matière première servant à élaborer des spectacles suivant des préoccupations esthétiques plus ou moins vala bles et suivant les nécessités du «faire-voir» inhérentes à tout «show» commercial. Enfin l'auteur se montre surpris de ne pas trouver dans les pays latins cette réaction criti que vis-à-vis du folklore organisé et stylisé qui se manifeste depuis plusieurs décennies dans les pays de langue allemande. Quand il affirme que les méridionaux privilégient les grandes fêtes spectaculaires telles la course du Palio à Sienne ou les processions andalouses de la semaine sainte au détriment d'un folklore rural et naïf qui serait volontairement laissé pour compte, nous pensons qu'il néglige à tort les enquêtes scientifiques et systématiques menées depuis le début du siècle par de dynamiques associations ethnographiques (comme l'équipe du Musée Pitre en Sicile ou le Musée du peuple espagnol à Madrid sans parler des études de notre propre Musée de la Vie Wallonne). Et d'autre part, ne serait-il pas compréhensible que les classes éduquées allemandes, conscientes du poids de leur passé, aient voulu radicaliser leur attitude en faveur d'un folklore intact de toute manipulation? En conclusion, A. Niederer nous livre ici avec érudition et compétence des réflexions uti les qui posent de façon dynamique le problème de l'évolution des traditions populaires. Jacques WILLEMART Assemblée générale statutaire Le samedi 11 février 1984, l'A.S.B.L. Société royale «Sambre et Meuse - Le Guetteur wallon» a tenu son assemblée générale statutaire annuelle dans un auditoire des Facultés Notre-Dame de la Paix à Namur sous la présidence de Monsieur Jean Baudhuin. Personnalités excusées : M. le Gouverneur Lacroix, Mgr Mathen, M. le Bourgmestre Close, M. L'Echevin Laloux. Membres présents : Mmes Baudhuin, Beckman, Blanpain, Canivet, Hermand, Houziaux, Jacquet (viceprésidente), Laurent, Liesse, Maréchal, Offermans, Roland. MM. Baudhuin (président), Beckman, Billat, André, Bodson, Barbason, Colignon, Culot, Detiège L., Dulière, Dury, Enckels, Houziaux, Jacques (vice-président), Jacquet, Larosse, Lempereur (trésorier), Léonard, Lessire, Magotte, Maniet, Mathot, Moret, Noël, Oger, Petit, Prouveur, Reumont, Ringlet, Tombal, Van Pethegem, Winant et Zweffer. Membres excusés : Mlle Damoiseau (secrétaire) R.P. Misonne, M. Willemart. Membres ayant donné procuration : Mmes Poncelet, Goffin, Liébaux, Witry MM. Balthazart, de Barsy, Delporte, Detiège Ed., R.P. Misonne, Noël, Pinon, Vande Roy. La secrétaire, Mademoiselle Damoiseau, absente pour des raisons indépendantes de sa volonté, a communiqué son rapport au trésorier, Monsieur Lempereur qui en donne lecture à l'assemblée: «Le rapport 1983 marque la 59e année de la fondation de notre société. Ceux et celles qui ont pris connaissance de la revue et du Bulletin de liaison savent, à peu de chose près, ce que furent les activités de Sambre et Meuse. Cependant, pour les nouveaux membres et les sympa thisants que nous saluons très chaleureusement, nous allons brièvement passer en revue le déroulement de l'année écoulée. Notre société se maintient dans un juste équilibre, tant par sa situation financière que par le nombre de ses membres, ses publications, la diversité des sujets traités et des activités réali sées. «Le Guetteur wallon» a publié 160 pages dont un numéro spécial (1/83) consacré à l'étude réalisée par F. Danhaive sur les «Coteliers de la banlieue de Namur-Nord». Ce numéro a connu un très vif succès. Nous avons, d'autre part, parcouru l'histoire, du Ier Empire à la guerre de 1940, grâce aux articles de Jean Bovesse, André Dulière, Jean Evariste et Martine George. Histoire, humour, curiosité, précisions scientifiques, rien n'a manqué. L'année Vauban fut marquée, dès 1982, par la visite de la remarquable exposition sur l'Arsenal de Namur, due à M. Philippe Jacquet, assisté de son épouse, notre vice-présidente. Le portrait de l'humaniste que fut Vauban, souvent présenté uniquement comme militaire, a trouvé un complément d'informations dans un article de M. Jacquet paru dans le troisième numéro du «Guetteur». Au cours de ces pages, notons l'évocation de trois figures namuroises: un militaire, un poète et un peintre. Un militaire «pas comme les autres»: Léopold Bernard, par André Dulière qui nous en trace un vivant portrait, aussi habile que sensible. Un poète «sans clivage et à l'inspiration multidimensionnelle» : Louise-Marie Danhaive, dont Josée Spinoza brosse un portrait nuancé et admiratif. Un peintre dinantais: Antoine Wiertz dont la figure et l'œuvre furent présentées - 89 - magistralement par Madame Pacco à l'issue de notre dernière assemblée statutaire et que les recherches de Louis Larosse viennent enrichir par un article paru dans le numéro 4 de 83. Enfin, les notes de toponymie de M. Herbillon, une série de comptes rendus de livres et de revues et la « Bibliographie historique de la province de Namur pour 1982» de Jean Bovesse. Au cours de l'année, nous avons réalisé cinq activités culturelles. Le 7 mai, à Gembloux, nous avons parcouru les bâtiments de l'ancienne abbaye, occupés actuellement par les Facul tés agronomiques de l'Etat. Reçus par nos amis du «Cercle Art et Histoire de Gembloux et environs», nous avons, de plus, visité la splendide Maison du Bailli. Le 4 juin, nous étions en Hainaut, parcourant les vestiges de l'ancien château de Herchies, restauré et conservé avec de nombreuses pièces artistiques. Ces témoins d'un riche passé nous furent présentés par une octogénaire aussi merveilleuse qu'étonnante qui réalise dans ce site une animation de haute qualité. Le mois de septembre nous vit au Musée diocésain de Namur : Monsieur le chanoine Lanotte, en guide attentif et érudit, nous a montré un aperçu des richesses insoupçonnées qui donnent à ce musée une dimension dépassant largement le domaine de la province et même du pays. Au cours de ce même mois de septembre, le «Guetteur» fut présent à une Foire aux livres et revues régionales organisées par M. Schoofs, à l'Athénée Royal François Bovesse, dans le cadre des Fêtes de Wallonie. Pour terminer l'année, nous avons enfin suivi Françoise Lempereur à travers trois régions de l'ancienne Russie, grâce à ses dias et à ses commentaires aussi clairs qu'enthousiastes. En terminant ce rapport, nous tenons à souligner l'importance prise par le Bulletin de liaison qui, s'il n'existait pas, devrait être inventé. Il a créé entre les membres un véritable cou rant, un échange de services et une source précieuse d'informations. Merci encore à notre tré sorier pour cette excellente réalisation. Nous adressons également tous nos remerciements à celles et ceux qui, d'une manière ou d'une autre, nous ont aidés au cours de cette année, ainsi qu'à la presse qui nous a ouvert ses colonnes et aux institutions qui ont bien voulu nous apporter leur soutien. Plusieurs parmi nos membres ont bien mérité durant cette année. Parmi eux, notre prési dent que je voudrais congratuler au nom de tous. Une vie professionnelle riche et active s'achève pour faire place à la retraite. Nous la lui souhaitons heureuse et enrichissante, toute donnée aux choses qu'il aime. Un peu au «Guetteur wallon», ce dont nous ne doutons pas, mais nous lui conseillons de préserver une bonne part de son temps contre les sollicitations extérieures souvent nombreuses et qui risquent de restreindre ce précieux loisir. » Le trésorier, Monsieur François Lempereur présente ensuite à l'assemblée le rapport financier pour l'année écoulée et souligne, ajuste titre, le caractère très satisfaisant de la situa tion dans ce domaine et ce, malgré la suppression de la plupart des crédits dont nous pouvions bénéficier auparavant, l'accroissement des frais d'impression de la revue — ils sont passés de 150.000 F en 1982 à 183.000 Fen 1983 —, l'édition de 5 numéros du «Guetteur-Information» et le maintien du montant de la cotisation au niveau de 1981. Monsieur Lempereur évoque ensuite le redressement spectaculaire qui a été opéré depuis 1971, date à laquelle il a accepté les fonctions de trésorier : à ce moment, la société accusait un déficit de 11.313 F et ne comptait que 161 membres. Depuis lors, la situation financière a été complètement inversée et nous dépassons actuellement largement les 300 membres. «Cette heureuse situation, rappelle Monsieur Lempereur, nous la devons, Mesdames et Messieurs, à votre assiduité, à l'intérêt que vous portez à nos activités : déjà, à ce jour, les deux tiers des membres ont renouvelé leur cotisation pour 1984 et parmi ceux-ci, une cinquantaine ont payé la cotisation de membre de soutien et 5, la cotisation de membre protecteur, soit 1.000 F. Pour sa part, l'impact du « Guetteur-Information » a été remarquable, puisque plus de 30 nouveaux membres sont venus nous rejoindre en 1983 et il y a déjà 5 nouveaux inscrits pour 1984. Tout ceci constitue un sérieux encouragement pour les responsables de la société et, en leur nom, je vous en remercie.» Le rapport rédigé par les deux commissaires aux comptes, Mademoiselle Offermans et Monsieur Tombal, est alors présenté et approuvé. - 90 - Vient ensuite l'allocution du président: « Parmi les membres de notre société malheureusement décédés au cours de l'année 1983, nous devons spécialement déplorer la disparition de Josy Muller. Docteur en Philosophie et Lettres, il était devenu, après avoir commencé sa carrière au Musée de Mariemont, chargé du cours d'histoire diplomatique aux Facultés de Mons et chef de département aux Musées Royaux d'Art et d'Histoire à Bruxelles. Historien de formation et de profession, il était sou cieux d'assurer une large diffusion de la connaissance du pays wallon et c'est dans ce but qu'il avait fondé la collection «Wallonie. Art et Histoire» dont les petits volumes, accessibles aux détenteurs de revenus modestes, ont révélé au grand public bien des aspects d'une histoire trop souvent ignorée ou méconnue. Chercheur infatigable et pourfendeur impitoyable des clichés éculés et des théories simplistes, Josy Muller a pris une part active à la vie de notre société dont il était membre depuis de nombreuses années. Il fut, en effet, membre du conseil d'adminis tration de la revue et publia dans «Le Guetteur wallon», de 1952 à 1959, divers articles parti culièrement intéressants. Tout récemment encore, il avait offert ses services pour l'organisa tion d'une excursion dans la région de Mirwart qui lui tenait particulièrement à cœur. Son décès, survenu inopinément le 9 mars dernier, ne lui a pas permis de mettre ce projet à exécu tion. Tous ceux qui ont eu le privilège de le connaître et d'apprécier sa rigueur intellectuelle, sa franchise directe et son culte de la vérité ne peuvent que regretter la perte de cet historien parti culièrement érudit. Au souvenir de Josy Muller, nous nous devons d'associer celui des autres membres qui nous ont, eux aussi, malheureusement quittés: Mademoiselle Honincks, Monsieur l'abbé Léon Burniaux ainsi que Messieurs Léopold Poncelet, Edmond Gaillard et Joseph Delrot. Je vous invite à bien vouloir observer quelques instants de recueillement en hommage à la mémoire de ces amis trop tôt disparus. Dans son rapport, notre secrétaire, Mademoiselle Damoiseau, a eu l'extrême gentillesse de me congratuler pour mon entrée dans la grande confrérie des retraités. Je l'en remercie très vivement et je vous avouerai très simplement que, la réalité de l'âge dit «certain » mise à part, ce nouvel état n'est nullement désagréable, bien au contraire ! C'est la raison pour laquelle je m'empresse d'étendre les félicitations qui m'ont été adressées aux deux membres du Conseil d'administration qui m'ont précédé dans cette voie nouvelle : à Monsieur François Lempereur tout d'abord, notre dévoué trésorier, conseiller à la Régie des postes qui, à l'occasion de sa mise à la retraite, a eu l'honneur d'être promu à la dignité de Commandeur de l'Ordre de Léo pold II ; à Monsieur Jean Bovesse ensuite qui, déjà retraité des Archives de l'Etat, a également quitté sa fonction d'expert en écritures auprès des tribunaux. A tous les deux, en votre nom à tous, je leur adresse nos meilleurs vœux de longue, heureuse et féconde retraite. D'autres événements heureux ont également marqué l'existence de certains des nôtres. Deux couples, Monsieur et Madame Léonard d'une part, le Docteur et Madame Ringlet d'autre part, ont célébré leurs noces d'or cependant que trois prêtres, Messieurs les abbés Ger main Hauchart, de Sosoye, Eugène Herbecq, de Dinant, et Jacques Woitrin, de Marche-lesDames, fêtaient leurs cinquante années de prêtrise. Cet ensemble de noces d'or et de jubilés sacerdotaux témoigne, dans chaque cas, de beaucoup d'amour et de fidélité et n'en est, dès lors, que plus émouvant. Toutes nos félicitations et nos vœux les plus chaleureux à ces heu reux jubilaires. Enfin, et croyez-moi, ce n'est pas le moins important, il nous plaît de saluer, dans le cadre de cette assemblée générale, l'un des membres du Comité d'Honneur de notre revue, à savoir Monsieur Ernest Montellier qui, dans quelques jours, va célébrer son nonantième anniver saire. Samedi prochain, une séance d'hommage lui sera officiellement dédiée en présence des autorités de la Province et de la Ville, mais dès aujourd'hui, en quelque sorte en avantpremière, nous tenons à congratuler celui que le bon peuple de Namur appelle familièrement, mais surtout amicalement le «Nesse». Dirigeant de Moncrabeau et Rèli de longue date, il est aussi l'un de ceux qui, voici soixante ans, ont fondé «Le Guetteur wallon». Et c'est dans les pages de cette revue qu'il a publié la musique destinée à accompagner des textes poétiques wal lons de Joseph Calozet, de Victor Binot, de Léon Evrard, d'Emile Robin, du Père Guillaume, de Joseph Laubain et d'Edouard Thirionet. Cette triple appartenance fait sans doute d'Ernest Montellier le Namurois le plus complet et le plus typique et pour s'en convaincre, il suffit de le voir faire chanter le « Bia Bouquet » par la foule rassemblée autour du célèbre char des Qua rante Molons lors des Fêtes de Wallonie. Merci à toi, Ernest, pour tout ce que tu as apporté à ta ville et puisses-tu nous faire encore chanter le «chant national» namurois pendant de nom breuses années. Le rapport de notre trésorier et les vérifications effectuées par les deux commissaires aux comptes ont, une fois de plus, souligné la situation financière saine qui, jusqu'à présent, - 91 - caractérise notre société et nous permet, cette année encore, de ne pas majorer le montant des cotisations. La chose est d'autant plus heureuse que nous sommes contraints, au même titre que toutes les autres associations semblables à la nôtre, de vivre quasi uniquement par nos propres moyens. En effet, l'actuelle politique d'austérité budgétaire pratiquée par les pouvoirs publics aboutit à une très forte diminution des subsides qui, dans les époques antérieures, n'étaient déjà pas très élevés. Faut-il dès lors s'étonner des difficultés rencontrées par certaines revues semblables à la nôtre ? Le cas de « La Vie wallonne » de Liège est à cet égard exemplatif. André Dulière s'est fait récemment l'écho du danger qui menace l'existence de cette revue de renommée pourtant internationale ! On peut dès lors se demander si les restrictions impo sées au secteur culturel ne sont pas quelque peu exagérées. Pourquoi le frapper de plein fouet comme s'il était un luxe inutile ! Nos revues sont, depuis longtemps, gérées avec soin et contri buent à nous faire découvrir ces racines sans lesquelles nous ne sommes rien. Elles méritent donc de trouver auprès des pouvoirs publics un soutien réel et efficace. L'année 1984 va être marquée, spécialement dans la province de Namur, par la célébra tion du cinquantième anniversaire de la mort accidentelle du roi Albert survenue le 17 février 1934 à Marche-les-Dames. Comme je l'ai déjà signalé dans «Le Guetteur. Informations» de septembre/octobre 1983, il nous appartient, en tant que Société Royale de participer à cette commémoration. C'est dans cette perspective que «Le Guetteur wallon» a pris la décision d'engager trois C.S.T. en vue de faciliter l'organisation d'une exposition qui se tiendra, sous l'égide du Crédit Communal de Belgique, durant les mois de septembre-octobre à la Maison de la Culture de Namur et qui évoquera la vie quotidienne dans l'agglomération namuroise sous le règne d'Albert Ier. D'autre part, il serait intéressant que notre revue puisse consacrer un de ses numéros — le troisième, par exemple — à la publication de documents, de témoigna ges et d'études concernant l'histoire et la vie populaire de la province au cours de cette période «albertine» qui s'est étalée de 1909 à 1934. Certains membres ont déjà promis d'apporter leur contribution à ce projet mais il serait souhaitable de pouvoir trouver d'autres collaborateurs. Quant au premier numéro de 1984, il sera consacré essentiellement à la publication de l'histoire de Bouge qui a été réalisée avec énormément de soin et de compétence par Monsieur Louis Larosse. Comme nous l'avons fait avec le travail de Fernand Danhaive sur les coteliers de la banlieue de Namur-Nord, nous comptons tirer 400 exemplaires de ce numéro 1 et 200 tirés à part destinés à être mis en vente. En ce qui concerne nos activités culturelles, je peux dès maintenant vous annoncer une conférence et une excursion pour les prochaines semaines. Au début du mois d'avril, André Dulière nous parlera d'un pays qui lui tient particulièrement à cœur puisqu'il l'appelle ['«ado rable Finlande». Il est possible que cette conférence puisse d'ailleurs être suivie de la projec tion d'un film sur le même sujet. Au début du mois de mai, d'autre part, le dimanche 6 mai après-midi pour être précis, je vous propose de nous rendre dans la région de Gembloux pour y découvrir ou y redécouvrir, ce que fut la bataille qui opposa en mai 1940 les armées françai ses et allemandes dans cette zone. Il s'agira au cours d'un circuit réalisé à pied ou en voiture d'assister, sur le terrain, à des exposés étayés par des cartes et des documents photographi ques. Comme d'habitude, la presse locale et «Le Guetteur. Informations» vous donneront toutes les précisions utiles. Il me reste, chers amis, à vous remercier pour votre présence sympathique et à souhaiter que cette année 1984 soit féconde pour «Le Guetteur wallon». Comment pourrait-il d'ailleurs en être autrement puisqu'il entre dans sa soixantième année et que celle-ci est toujours le signe d'une nouvelle jeunesse ! » A l'issue de la séance, Monsieur René Mathot a présenté à l'assemblée une étude extrême ment fouillée sur la présence de Hitler en Belgique, et spécialement dans la région de Brûly de Pesche au cours de l'été 1940. Cet exposé minutieux illustré par de nombreuses diapositives inédites fut un témoignage éloquent, non seulement sur cette période tragique de notre histoire mais aussi sur la patience de l'historien attaché à la tâche ardue de la recherche. La soirée s'est terminée par un souper amical dans le cadre prestigieux de l'ancien Arsenal de Namur. - 92 - Bons d'épargne, CGERH ça rapporte t CAISSE GENERALE D'EPARGNE ET DE RETRAITE AGENCES A VOTRE SERVICE : Tel: 081/22.16.92 NAMUR-CENTRE : 2, rue de l'Ange JAMBES : 5, rue Tillieux 30.49.75 SAINT-SERVAIS : 67, chaussée de Waterloo 22.43.23 NAMUR-GARE : 5-7, rue des Croisiers 22.00.40 SALZINNES : 74, rue Patenier 41.31.38 22.45.45 PROFONDEVILLE : 34, chaussée de Dinant JAMBES-AMEE : 385, rue de Dave 30.49.40 FLOREFFE : 5, rue C. Hastir 44.08.73 BOUGE : 247, chaussée de Louvain 21.26.34 EGHEZEE : 14, rue de la Gare SPY : 10, rue Haute 81.19.71 071/78.83.94 l'épargne pension Offrez-vous le plus beau complément de pension Crédit Communal 15 agences à NAMUR 63 agences dans la Province Editeur responsable : M. Jean BAUDHUIN, 55, rue Melchior, 5002 Saint-Servais.