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CAHIER LABISO PÉRIODIQUE N°153 L’ÉTOILE DES ENFANTS DES SOINS À DOMICILE POUR LES ENFANTS MALADES UNE INITIATIVE DE EN PARTENARIAT AVEC 2 SOMMAIRE – 4 INTRODUCTION 5 UNE VISION GLOBALE DE LA FAMILLE 5 UN SERVICE POUR QUI ? 6 UNE PRISE EN CHARGE GLOBALE 8 UN SUCCÈS CROISSANT 9 QUELS TYPES D’INTERVENTIONS ? 10 LE RESPECT DES CHAMPS ENVIRONNEMENTAUX 11 LE CAHIER DE LIAISON 12 SOINS ET DÉTENTE 14 POUR EN SAVOIR PLUS 14 LA LECTURE DE CE CAHIER VOUS DONNE ENVIE DE RÉAGIR? 3 L’Étoile des enfants — Des soins à domicile pour les enfants malades Cahier N° 153 qu’un tel service de soins fonctionne, et a fortiori quand la démarche est novatrice, la construction de liens de confiance est indispensable, tout comme la garantie du professionnalisme et de la qualité. Pour s’en assurer, l’équipe constituant la cellule mise en place par Anne-Marie Dehon tenait au soutien d’un comité consultatif pédiatrique, il a été mis sur pied avec le concours d’experts. « C’est une équipe multidisciplinaire, un lieu de discussion et construction permanente du projet », dit-elle. INTRODUCTION L’Étoile des enfants, c’est au départ l’idée d’une seule personne, Anne-Marie Dehon. Infirmière pédiatrique au CHU Ambroise Paré à Mons depuis 1999. Elle pressentait le besoin des familles d’une continuité des soins médicaux apportés à leur enfant une fois que celui-ci était en mesure de rentrer à la maison. « À ma connaissance, dit-elle, aucun service ne proposait ce genre d’intervention dans la région. Les parents qui avaient besoin d’un appareil aérosol ou de kiné respiratoire, par exemple, devaient se débrouiller par eux-mêmes. Ou on les renvoyait vers leur mutuelle, qui ne disposait pas nécessairement de l’information. » Quand, six ans plus tard, elle entame une formation complémentaire de cadre en soins de santé, les conditions sont idéales pour creuser la faisabilité de son projet de cellule pédiatrique à domicile. De rencontres en réunions, de réflexions en examens de chiffres, son analyse des besoins s’affine – ce sera d’ailleurs le sujet de son travail de fin d’études. Parmi toutes les portes auxquelles elle a frappé, celle du service pluraliste de coordination des soins à domicile (aujourd’hui VADSH – Vivre à domicile Sud-Hainaut – qui s’occupait déjà de patients adultes) s’est ouverte à son projet et l’a engagée en 2007 pour lancer l’Étoile des enfants. « Ma première tâche a été de rencontrer des médecins généralistes, des infirmières, des structures hospitalières, des pédiatres pour construire un réseau d’intervenants indépendants et d’en faire la promotion auprès des unités pédiatriques et des maternités notamment », se souvient-elle. Pour 4 L’Étoile des enfants — Des soins à domicile pour les enfants malades UNE VISION GLOBALE DE LA FAMILLE Cahier N° 153 UN SERVICE POUR QUI ? Dans des délais très courts, vingt-quatre ou quarante-huit heures, l’Étoile des enfants apporte une réponse aux situations les plus simples comme aux plus complexes, aux demandes temporaires comme aux accompagnements de longue durée. « Il arrive qu’une mère nous appelle parce qu’elle a un jour besoin d’une garde-malade. Nous n’en fournissons pas directement, mais nous lui donnons les coordonnées d’un service adéquat », illustre Anne-Marie Dehon. Tout comme il arrive aussi que l’Étoile des enfants mette en place un réseau de soins palliatifs pour encadrer un enfant en fin de vie… L’Étoile des enfants suit la nomenclature de la pédiatrie et s’adresse aux enfants de zéro à quinze ans. Au-delà, grâce à la synergie avec VADSH, le jeune patient bascule dans le secteur adulte et sa prise en charge se poursuit Au fil des années, en passant du concept à la réalité, son idée d’origine a évolué. « Au début, je voyais cela uniquement comme une approche médicale avec quatre ou cinq infirmières qui couvriraient la province, dit la directrice. Mais ça ne s’est pas du tout passé comme cela, faute de moyens. Et tant mieux ! » Car la formule n’aurait pas été rentable non plus pour les enfants malades. Avec eux, il n’y a pas que l’acte médical qui prime. « À la différence d’un adulte chez qui une piqûre par exemple ne prend que dix minutes, explique-t-elle, chez un enfant, cela peut prendre une heure. Il faut l’apprivoiser, jouer avec lui, lui expliquer, on utilise des produits anesthésiants… et ce temps-là n’est pas payé par l’INAMI. » C’est aussi en sortant de l’hôpital qu’elle a découvert une autre facette de ces familles. Le côté social dont la médecine ne s’occupe pas. « À l’hôpital, on soigne, dit-elle, mais on ne tient pas compte de tout ce qu’il y a autour. Le parent est vite catalogué. S’il ne rend pas visite à son enfant, c’est un parent qui se désinvestit… alors que ce n’est pas ça. Il n’a peut-être pas de moyen de locomotion, il y a une fratrie derrière dont il doit continuer à s’occuper… ». Cette vision globale de la famille, c’est ce qui fait désormais la marque de l’Étoile des enfants. 5 L’Étoile des enfants — Des soins à domicile pour les enfants malades Cahier N° 153 UNE PRISE EN CHARGE GLOBALE sans rupture. Tout le monde peut faire appel à l’Étoile des enfants, quelle que soit la mutuelle à laquelle il est affilié. Le service en tant que tel est gratuit, il en est de même des prestations des infirmières à domicile qui agissent sur base d’une prescription médicale. Pour les autres interventions (kiné, logopède, etc.), la quotepart personnelle reste due comme lors de tout recours à ces spécialistes. Idem pour la location de matériel adapté. L’Étoile des enfants n’est pas encore très connue du grand public, ses bénéficiaires passent généralement par des services sociaux, par un pédiatre ou un hôpital qui les informent de cette possibilité de soutien. Cet hôpital partenaire, c’est souvent celui de Jolimont, le plus proche. « Avant, les enfants devaient se rendre à Bruxelles pour leur traitement et leur suivi, mais les choses commencent à changer, remarque Anne-Marie Dehon. Aujourd’hui, ils passent de plus en plus souvent par des hôpitaux de proximité. » Quand s’annonce la sortie de l’hôpital, l’assistante sociale contacte l’Étoile des enfants. S’il s’agit d’une demande simple, comme du prêt de matériel, tout peut se régler par téléphone. Autrement, un rendez-vous est pris pour une réunion multidisciplinaire avec l’assistante sociale, le médecin référent, les parents et l’enfant pour estimer ensemble ce qu’il y a lieu de mettre en œuvre. « Cette rencontre collégiale est une priorité, souligne Anne-Marie Dehon. Elle permet aux parents de voir qui va s’occuper de leur enfant. Notre action est aussi validée par l’hôpital. » Une première visite au domicile de l’enfant réunit ensuite tous les prestataires, et des rencontres de suivi sont organisées régulièrement en cours d’accompagnement. L’Étoile des enfants ne s’occupe pas uniquement de coordonner les soins médicaux à domicile, le service propose également un accompagnement social et financier. Sa responsable relate la situation d’un enfant porteur d’un handicap. « Nous allons voir d’un point de 6 L’Étoile des enfants — Des soins à domicile pour les enfants malades vue médical ce qu’il y a lieu de mettre en place bien entendu, mais nous allons aussi contacter l’assistante sociale de sa mutualité et nous nous rendrons ensemble au domicile de l’enfant pour voir si les parents ont déjà introduit un dossier à l’AWIHP, s’ils ont déjà demandé des allocations familiales majorées… » L’Étoile des enfants aide les parents dans leurs démarches administratives, qui sont souvent très lourdes, interpelle les CPAS ou les associations qui peuvent venir en aide aux familles qui rencontrent des difficultés financières – et il y en a beaucoup. Parfois, la demande des parents se résume à une aide sociale au sujet, par exemple, d’enfants qui présentent des problèmes de comportement, d’hyperactivité. « Nous les orientons vers un centre adapté, vers un centre de guidance si une consultation auprès d’un psychologue est nécessaire ou vers un logopède, nous prenons contact avec le PMS. Notre travail est très varié ! », ajoute-t-elle. Un travail qui repose sur une gigantesque base de données minutieusement constituée, et un travail en construction permanente tant certaines zones sont pauvres en prestataires spécialisés, notamment en logopédie de déglutition. « C’est le cas de BeaumontChimay-Couvin, poursuit la directrice. Nous avons d’ailleurs introduit un dossier à la fondation Chimay Wartoise en vue d’engager une assistante sociale à mi-temps pendant deux ans pour développer le réseau pédiatrique sur cette zone-là. » L’équipe de l’Étoile des enfants, c’est aujourd’hui trois personnes pour 1 ETP. AnneMarie, Dehon infirmière pédiatrique qui en est responsable depuis le premier jour et qui est entre-temps devenue la directrice de VADSH, Julie Pierrard, assistante sociale et Vanessa Fais, psychologue. Elles se répartissent le travail en fonction de leurs champs de compétences Cahier N° 153 respectives. Anne-Marie assure les premières rencontres avec la famille et les intervenants ainsi que la mise en place de l’accompagnement ; ses deux collègues en gèrent le suivi. Toutes trois sont sur le payroll du VADSH. L’Étoile des enfants est subventionnée par le Service public de Wallonie et par des fonds propres des Mutualités libres, mais c’est de la création d’une ASBL autonome dont rêve Anne-Marie Dehon. « Même si c’est positif de travailler sous la coupole du VADSH, ce serait une belle reconnaissance ! » dit-elle, comptant également sur une extension de son service à l’ensemble de la province. L’équipe de l’Étoile des enfants au complet. Julie Pierrard, Vanessa Fais, Anne-Marie Dehon et… l’ourson fétiche. 7 L’Étoile des enfants — Des soins à domicile pour les enfants malades UN SUCCÈS CROISSANT Cahier N° 153 qui doivent adhérer à la charte de l’Étoile des enfants pour bénéficier de son aide. C’est à de telles occasions que le comité consultatif joue pleinement son rôle : décider de ce qu’il y a lieu de faire face à des situations critiques. « Nos décisions ne se prennent pas à la légère, insiste Anne-Marie Dehon, mais quand nous avons fait tout ce qui était de notre ressort, quand nous avons atteint nos limites. » La charte est également signée par tous les intervenants et ils sont liés par convention. Les médecins ne se délestent pas d’une responsabilité lors de l’organisation des soins à domicile et l’Étoile des enfants n’accepte pas non plus toutes les demandes qui lui sont faites. « Nous n’intervenons pas s’il n’y a pas de collaboration de la part des parents, ni si un pédiatre nous demande quelque chose de trop spécifique, précise la directrice. S’il y a des risques à domicile, nous refusons aussi. » Des risques qui sont évalués au cas par cas. Si l’évolution du nombre de dossiers n’est pas spectaculaire, elle est régulière. Certains mois, ce sont deux nouvelles demandes qui arrivent, d’autres six… Cette année, l’Étoile des enfants a suivi cinquante-quatre situations, dont trente nouvelles. Leur profil est particulièrement varié et dépend de facteurs extérieurs. Il y a peu d’enfants souffrant d’un cancer par exemple, car la région ne dispose que depuis peu d’un service d’oncologie pédiatrique. Les cas d’alimentation entérale par sonde nasogastrique ou de gastrostomie sont en revanche plus fréquents. « Nous nous sommes forgés cette spécialisation grâce à un travail étroit avec une diététicienne indépendante qui dispose du matériel nécessaire pour ce mode d’alimentation », explique la directrice. Une situation peut en cacher une autre. La demande de soins peut déboucher sur une aide sociale et, à l’inverse, un coup de pouce administratif peut mettre en lumière un état de santé problématique. « Il arrive en effet que nous fassions des découvertes… », reconnaît Anne-Marie Dehon. Situation de précarité, maison insalubre et sale, jeunes enfants qui n’ont pas de quoi manger… Cela conduit parfois l’équipe à introduire un signalement auprès du SAJ ou du SPJ. « Je ne croisais pas ce genre de situations au début de notre activité, poursuitelle. Aujourd’hui, les difficultés financières sont telles que les parents ont de plus en plus de mal à suivre. » En cas de signalement, les parents en sont toujours informés, le service fonctionne en toute transparence, avec l’accord des parents 8 L’Étoile des enfants — Des soins à domicile pour les enfants malades Cahier N° 153 QUELS TYPES D’INTERVENTIONS ? EXTRAITS DE LA CHARTE PARENTS – PROFESSIONNELS Art. 1 : Aucune participation financière n’est demandée Emma (prénom d’emprunt) a cinq ans et souffre du syndrome de West. Elle est suivie par l’Étoile des enfants depuis sa naissance. Si elle s’alimentait d’elle-même au début, au fil de l’évolution de sa pathologie, elle n’a plus voulu se nourrir seule. « Nous avons mis en place une infirmière, une logopède et une diététicienne pour le bilan nutritionnel. Nous avons fourni la pompe pour l’alimenter par sonde nasogastrique et nous avons travaillé en parallèle avec le service social de la mutualité pour que les parents puissent obtenir le remboursement de cette alimentation. Nous avons aussi organisé deux séances par semaine de kiné Bobath (de stimulation), car Emma présente des problèmes d’infirmité motrice cérébrale. » Avec les parents, l’équipe de l’Étoile des enfants a tenté d’inscrire la fillette dans une crèche neurologique adaptée, mais cela ne s’est pas bien passé. « Cela ne correspondait pas vraiment au désir des parents pour qui c’est difficile, a fortiori quand leur enfant est malade, de le confier à quelqu’un d’autre », analyse Anne-Marie Dehon. Aujourd’hui, Emma est en âge d’aller à l’école. « J’ai visité deux établissements spécialisés avec sa maman et celle-ci a fait son choix, poursuit-elle. Nous avons organisé une réunion à l’école pour expliquer son cas et une infirmière indépendante la rejoint tous les midis pour mettre en route son alimentation. » La fillette profite aussi maintenant du transport scolaire. Grâce à ce travail de réseau, Emma peut intégrer la société, elle n’est pas seule chez elle, tout ce suivi contribue à son bien-être. « Médicalement, elle est stable, confie la direc- Art. 2 : L’engagement des parents et celui des professionnels sont indispensables pour assurer un maintien à domicile dans des conditions de confort et de qualité de soins. Il est primordial de travailler en accord avec la famille et l’équipe pluridisciplinaire. L’engagement des parents : -collaborer ; - respecter le plan d’intervention ; - donner son accord sur l’échange en équipe pluridisciplinaire autour de la prise en charge de l’enfant ; - participer aux différentes réunions (coordination et réévaluation) ; - remplir le carnet de liaison adapté en fonction du plan d’intervention ; - respecter les rendez-vous planifiés par les différents membres de l’équipe pluridisciplinaire. L’engagement au niveau professionnel : - respecter le secret professionnel ; - communiquer à la cellule les informations indispensables pour le suivi des enfants afin d’assurer son maintien à domicile ; - participer aux différentes réunions (coordination et réévaluation) ; - utiliser le carnet de liaison adapté en fonction du plan d’intervention ; - s’engager à respecter le principe du libre choix de tous les prestataires de soins et services. 9 L’Étoile des enfants — Des soins à domicile pour les enfants malades Cahier N° 153 LE RESPECT DES CHAMPS ENVIRONNEMENTAUX trice, mais on aimerait qu’elle recommence à se nourrir seule par la bouche, comme elle l’a déjà fait. Un travail est en cours avec l’école, le médecin référent et les parents. » D’autres accompagnements sont plus légers, ponctuels. Dans le cas d’une fracture, il dure six semaines et puis la vie reprend. Quand un enfant s’est cassé la jambe, il est quelquefois difficile pour lui de fréquenter l’école. « Nous nous occupons de trouver une infirmière s’il nécessite des soins particuliers, injections ou autres, de trouver le matériel adapté comme un lit médical au rez-de-chaussée par exemple ». L’équipe se charge aussi de contacter l’école à domicile. Pour cela, elle a recours à une association qui permet d’assister aux leçons en direct grâce à une caméra dans la classe ou à des bénévoles qui, en lien avec les enseignants, viennent à domicile donner cours à l’enfant. « Mais pas durant de trop longues périodes, car ce sont des enfants malades et souvent très fatigués », rappelle-t-elle. Les situations rencontrées évoluent. L’équipe vient notamment en aide à des sans-papiers. Certains bénéficient d’un logement, d’autres pas. « Nous suivons actuellement un enfant de huit ans hébergé dans un centre FEDASIL, dit Anne-Marie Dehon. Il souffre d’une pathologie très grave qui nécessite une structure autour de lui. Le médecin et l’infirmière du centre assurent le relais, l’infirmière a participé à la réunion de coordination qui s’est tenue à l’hôpital et c’est FEDASIL qui prend tout en charge financièrement. » Dans cette situation, l’équipe de l’Étoile des enfants a aussi mis en place une infirmière indépendante, la diététicienne et le prêt de matériel pour assurer l’encadrement au centre. Elle suit aussi une famille de Kosovars pour qui le CPAS fait office de mutualité. « Cela nous demande une administration particulière, un peu différente, ajoute-t-elle. Nous nous adaptons. » L’Étoile des enfants n’est généralement pas le premier ni le seul service à intervenir dans certaines familles. « Quand nous arrivons dans une situation où il y a déjà des prestataires, nous travaillons de préférence avec eux, dit la directrice. S’il faut une infirmière, nous demandons aussi d’abord aux parents s’ils en connaissent une. Si c’est le cas et qu’elle n’est pas spécialisée en pédiatrie, je lui apprends les techniques particulières à appliquer. » L’Étoile des enfants s’attache également à respecter les autres champs environnementaux des familles, qu’ils soient en lien avec l’éducation ou la propreté. « Nous devons faire attention à ne pas imposer nos propres valeurs aux autres, souligne-t-elle. Si les gens ont l’habitude de vivre comme cela depuis trente ans, nous n’allons pas tout changer, mais nous allons essayer par exemple d’améliorer l’hygiène en recourant à une aide familiale qui les aidera à s’occuper du ménage. Comme ces parents s’essoufflent, ils lui accorderont petit à petit de la place pour s’occuper de l’enfant malade… C’est sur du long terme que cela se travaille. » 38 % des dossiers concernent des enfants porteurs de handicaps ou de maladies congénitales. La plupart des demandes d’interventions arrivent à la naissance de l’enfant, quand le problème est diagnostiqué. Mais des parents contactent l’Étoile des enfants bien plus tard, quand l’enfant devient de plus en plus lourd à manipuler, quand ils sont épuisés. « Ils se sont 10 L’Étoile des enfants — Des soins à domicile pour les enfants malades Cahier N° 153 LE CAHIER DE LIAISON débrouillés seuls pendant cinq ou six ans par manque de connaissance du service, mais aussi parce qu’ils ne s’autorisaient pas à demander de l’aide et à lâcher prise, constate Anne-Marie Dehon. Souvent, un des parents a dû arrêter de travailler… ce qui engendre évidemment des problèmes financiers. » Il arrive que l’Étoile des enfants se coiffe d’une casquette de médiateur. « C’est un constat malheureux que nous faisons, dit Anne-Marie Dehon. Dans les trois quarts des situations que nous suivons, si le couple n’est pas solide, il casse… » En conséquence, l’aide à domicile de l’enfant est dédoublée, une semaine chez son papa, l’autre chez sa maman ou chez un grandparent qui en a la garde. Ces interventions se font parfois hors du secteur géographique de l’Étoile des enfants. « Nous y répondons malgré tout ou alors nous prenons contact avec un centre de coordination plus proche qui dispose aussi d’une infirmière en lui apportant notre expertise dans les prises en charge, une sorte de coaching. » Parfois, les parents ne communiquent plus du tout entre eux, « mais nous insistons néanmoins pour qu’ils soient tous deux présents lors de nos réunions, pour nous c’est indispensable ». Les assistantes sociales des hôpitaux et les pédiatres reçoivent les rapports de suivi de l’Étoile des enfants, ils apprécient ce regard sur l’environnement de l’enfant qui leur fait défaut depuis leur cabinet de consultation. L’Étoile des enfants a aussi imaginé un cahier de liaison qui transite dès le premier jour de l’accompagnement entre le domicile du patient, l’hôpital et les différents prestataires. Il contient différentes fiches, dont l’une, essentielle, reprend les coordonnées de chacun. Selon la pathologie ou le handicap, des documents spécifiques y sont ajoutés. Une page reprend par exemple toutes les étapes techniques des soins nasogastriques, photos à l’appui pour que le parent – parfois illettré – puisse s’y référer. L’Étoile des enfants est attentive à maintenir les soins dans les mains de l’infirmière pour que les parents conservent eux aussi leur rôle, mais ceux-ci doivent toutefois être à même de comprendre et d’accomplir certains gestes, car évidemment, en cas d’urgence, l’infirmière n’arrive pas dans les cinq minutes… « Quand nous évoquons nos limites, c’est aussi de cela qu’il s’agit, explique Anne-Marie Dehon. Nous devons être certains que le parent est capable d’enclencher et d’arrêter la pompe. Sans cela l’enfant ne quitte pas l’hôpital. » Cette question est nommément à l’ordre du jour de la réunion multidisciplinaire : si le parent n’est pas apte à se servir de la machine, l’enfant restera à l’hôpital le temps de l’écolage. À la demande des pédiatres, une note du cahier de liaison décrit aussi la pathologie, les allergies, l’alimentation de l’enfant. Cette 11 L’Étoile des enfants — Des soins à domicile pour les enfants malades Cahier N° 153 SOINS ET DÉTENTE note-ci sera très utile lorsque, le cas échéant, l’enfant doit être emmené aux urgences… Le cahier permet également de faire le point sur les démarches administratives déjà entamées et évite les répétitions. Une fiche reprend les médicaments administrés chaque jour, ce que l’enfant a bu ou mangé (surtout les plus petits), les différents intervenants y consignent les paramètres particuliers. Enfin, un espace est réservé à la communication proprement dite. « Quand le kiné arrive, il apprend par ce cahier tout ce qui s’est passé entre deux visites. » Depuis trois ans, l’Étoile des enfants invite ses petits patients à l’occasion de la SaintNicolas. La fête se déroule dans les locaux de VADSH, dans une salle qui permet de prendre en nombre un goûter, d’organiser un atelier théâtral comme l’an dernier ou de musique comme aujourd’hui où du grimage est aussi au programme. « Cela se passe en dehors de l’hôpital et en dehors de la maison. C’est important, insiste la directrice, et les parents apprécient de ne pas devoir faire la file dans un centre commercial pour voir Saint-Nicolas, affronter le regard des autres sur le handicap et sur les appareillages divers de leur enfant. » Cette rencontre annuelle crée également du lien entre les parents. « Quand on leur annonce le diagnostic, le ciel leur tombe sur la tête. Ici, ils se disent qu’il n’y a pas qu’eux. C’est important de leur rappeler qu’ils ne sont pas les seuls. » 12 L’Étoile des enfants — Des soins à domicile pour les enfants malades Cahier N° 153 Chaque année, parents et enfant sont invités à l’occasion du passage de Saint-Nicolas. D’autres services à domicile pourraient encore compléter la liste proposée : mamies conteuses, cliniclowns… Mais est-ce une bonne idée ? Pour les parents, l’intrusion de tant d’acteurs dans leur intimité peut être une difficulté et certains ont le souci de se protéger en ne demandant qu’une intervention minimale. « Nous respectons ce choix », dit la directrice, consciente que sa proposition d’aide peut être interrompue du jour au lendemain par les parents. « Mais en règle générale, les parents se sentent sécurisés en sortant de la réunion de mise en place, ils sont rassurés par rapport à la gestion de la maladie. Et pour les démarches administratives, c’est un volet auquel ils ne doivent plus penser. » Cet enthousiasme est partagé par les parents, qui trouvent dans l’Étoile des enfants un soutien très important dans la situation qu’ils vivent. « C’est rassurant, car pour nous c’est l’inconnu. » La présence et l’encadrement les soulagent, les intervenants leur permettent aussi de « parler à des professionnels » et de « voir du monde », car ils se sentent « isolés » à la maison. Les parents déplorent toutefois un manque d’information autour de ce service trop méconnu. ils ont dû chercher par eux-mêmes, parfois ils en prennent connaissance trop tard… 13 L’Étoile des enfants — Des soins à domicile pour les enfants malades POUR EN SAVOIR PLUS Cahier N° 153 LA LECTURE DE CE CAHIER VOUS DONNE ENVIE DE RÉAGIR? Contacts L’ÉTOILE DES ENFANTS, Labiso.be est un espace interactif. Sur le site Internet www.labiso.be, vous trouverez un forum qui vous permettra de déposer vos impressions de lecture. Réactions à chaud ? Avis divergeant sur une idée défendue par cette expérience ? Projets semblables à mettre également en évidence ? Liens à faire avec l’actualité ? Témoignage ? N’hésitez pas. Le micro vous est ouvert… CELLULE PÉDIATRIQUE À DOMICILE 81, boulevard Sainctelette 7000 Mons Tél. : 0800 11 285 (24h/24) Courriel : letoiledesenfants@gmail.com Le laboratoire des innovations sociales et de santé c’est : ➝ ÉCRIRE POUR DÉCRIRE SON PROJET DANS L’ACTION SOCIALE ET LA SANTÉ Présenter son action au-delà d’un rapport d’activités, d’un dossier de subvention ou d’une prise de parole publique, c’est une manière de se positionner autrement par rapport à l’extérieur, de décrire ses pratiques professionnelles sous un autre jour. C’est aussi s’extirper du quotidien et prendre le temps de la réflexion : qui est-on, que fait-on, quel sens a l’action ? L’équipe de journalistes de Labiso propose cette démarche d’écriture voire même de coécriture. Concrètement, en fonction des attentes et de la disponibilité des équipes, plusieurs scénarios peuvent naître de la rencontre avec un journaliste spécialisé. Rédaction par nos soins sur base d’entretiens et de documents, accompagnement dans l’écriture d’un membre de l’équipe 14 L’Étoile des enfants — Des soins à domicile pour les enfants malades tenté par le travail, écriture à quatre, huit ou douze mains, mise en valeur de productions internes… Tout est possible. Cahier N° 153 ➝ LABISO CELA PEUT AUSSI ÊTRE : Certains services, certaines associations ont fait le pari de l’Internet comme outil de visibilité, de travail en réseau, d’échanges sur les pratiques. Ils sont conscients des énormes possibilités que leur offre la Toile : devenir émetteur/producteur et non plus seulement consommateur/ récepteur. ➝ ÉDITER DANS UNE COLLECTION DE LIVRES NUMÉRIQUES Avec Labiso, la démarche d’écriture se prolonge et se matérialise en une publication d’un livre numérique, partie d’une collection de « cahiers ». Ces petits bouquins, téléchargeables gratuitement sur Internet, peuvent être imprimés, lus à l’écran, compulsés à l’envi. La Toile offre l’avantage d’occuper un espace d’expression et de visibilité aux possibilités infinies. Les cahiers numériques sont recyclables sur n’importe quel site web et d’une formule plus souple que les éditions papier. Même si l’accès aux nouvelles technologies et à Internet n’est pas encore égal pour tous, investir cet espace d’expression c’est aussi être au plus près des nouvelles réalités sociales, des nouveaux besoins, des nouvelles formes de pauvreté Le recours aux nouvelles technologies de la communication est conçu ici comme un outil au service du travail social et de ses travailleurs. Si la démarche de Labiso montre des effets très positifs, elle est aussi de celles qui nécessitent une adaptation continue, un questionnement permanent, notamment du fait du support qui la sous-tend. Un support, l’Internet, dans lequel il est intéressant que les professionnels de terrain des secteurs de l’aide aux personnes investissent pour l’alimenter de contenus pertinents et mobilisateurs. ➝ ÉCHANGER POUR S’INSPIRER, DÉCLOISONNER, INNOVER CONTACTS LABISO : L’ambition est là : favoriser l’échange sur les pratiques et le décloisonnement entre professionnels, stimuler les démarches innovantes. Une fois sur la Toile, les effets des « cahiers » sont entre les mains des équipes et des lecteurs. Si les équipes ont trouvé intérêt à faire le point, ont modifié leurs pratiques ou déterminé un nouveau projet…, les lecteurs eux, peuvent faire des liens entre différents types d’interventions, s’interroger sur les modèles et, nous le souhaitons, s’interpeller les uns les autres. C’est en tout cas loin des codes de « bonnes pratiques », des grandes » messes institutionnelles, que Labiso propose le premier terme de l’échange. labiso@texto.be Tél. : 02 541 85 36 La collection est une initiative de l’ASBL Texto en collaboration avec l’agence Alter où les tâches rédactionnelles sont coordonnées par Marinette Mormont. Ce cahier a été rédigé par Pascale Meunier. Il a été achevé en décembre 2013. Crédits illustrations : L’Étoile des enfants 15 CAHIER LABISO PÉRIODIQUE N° 153 L’ÉTOILE DES ENFANTS Des soins à domicile pour les enfants malades UNE INITIATIVE DE EN PARTENARIAT AVEC Dans le sud du Hainaut, L’Étoile des enfants met tout en œuvre pour faciliter les soins à domicile d’enfants malades, quittant l’hôpital ou atteints de pathologie lourde.