Rapport national ITC France
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Rapport national ITC France
« International Tobacco Control », projet d’évaluation des politiques publiques de lutte antitabac Rapport national ITC France Résultats de la deuxième vague Octobre 2011 Promouvoir des stratégies fondées sur des preuves pour contrer l’épidémie mondiale de tabagisme 2011 Résultats de la deuxième vague de l’enquête ITC France Rapport national français Pour citer ce rapport Projet ITC (Octobre 2011). Rapport national ITC France. Université de Waterloo, Waterloo, Ontario, Canada ; Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES), Institut national du cancer (INCa), Paris, France. Second rapport national ITC France Les résultats de la lutte anti-tabac passés au crible La France mène depuis trente ans une intense politique de lutte antitabac : loi Veil de 1976, loi Evin de 1991, interdiction de fumer dans les lieux à usage collectif en 2007 et 2008 (décret Bertrand). Premier pays européen à signer en 2004 la Convention Cadre de Lutte Antitabac (CCLAT) de l’Organisation Mondiale de la Santé, notre pays n’a jamais relâché ses efforts. Déclinant mesures législatives et réglementaires, nous avons fait le choix d’augmenter fortement les prix en 2003 et 2004, tout en soutenant l’aide au sevrage tabagique. Les personnes qui souhaiteraient s’arrêter de fumer bénéficient en effet du remboursement des substituts nicotiniques à hauteur de 50 euros par personne et par an et 150 euros pour les femmes enceintes. Le projet ITC – International Tobacco Control Policy Evaluation Project – est la première étude de cohorte menée au niveau international sur la consommation de tabac. Réalisée par une équipe internationale de chercheurs basée à l’Université canadienne de Waterloo, elle a été menée dans 23 pays qui représentent plus de la moitié de la population mondiale et 60 % des fumeurs de la planète. Les données recueillies permettent des comparaisons internationales. Elles constituent donc une aide précieuse pour orienter nos efforts dans la lutte contre la première cause de mortalité et de morbidité évitables au monde. Les premiers résultats de cette étude de cohorte ont été publiés en 2009 à l’occasion du premier anniversaire de l’entrée en vigueur de la seconde phase de l’interdiction de fumer dans les lieux publics. Aujourd’hui, cette deuxième livraison du rapport ITC France s’attache à détailler l’évolution des comportements et attitudes du public vis-à-vis des politiques publiques de lutte antitabac menées en France depuis 2007. On y constate ainsi le succès de l’interdiction de fumer sur le lieu de travail et dans les lieux publics, ainsi qu’un soutien croissant de la population à cette initiative de santé publique, qui a su inscrire dans la durée la volonté de dénormalisation du tabagisme. Cette interdiction s’est accompagnée d’un recul de la consommation de tabac au domicile : n’est-ce pas là la meilleure preuve de son efficacité? L’étude montre toutefois qu’il reste encore des efforts à faire : que ce soit sur les lieux de travail toujours exposés pour près d’un salarié sur cinq au tabagisme passif, ou sur les terrasses enfumées aux abords des cafés ou des restaurants. Le second enseignement saillant de cette étude est la perte d’efficacité des avertissements sanitaires textuels sur les paquets de cigarettes. L’obligation récente d’apposer des photos chocs va ainsi dans le bon sens et devrait contribuer à relancer l’efficacité de ces messages sanitaires. Ainsi, la prévention et l’information du public restent une priorité essentielle. Car notre volonté de poursuivre une politique efficace et cohérente de lutte antitabac est intacte. Xavier BERTRAND Ministre du travail, de l’emploi et de la santé Rapport national ITC France (2011) i « Le tabac est le vecteur de mort le plus implacable jamais mis au point et déployé à l’échelle de la planète. » John Seffrin, Directeur général de l’American Cancer Society et ancien Président de l’Union internationale contre le cancer (UICC) Sommaire i Message du ministre iii Sommaire iv Liste des tableaux et figures vii ITC, projet d’évaluation des politiques publiques de lutte antitabac 1 Contexte 2 Principaux résultats 7 Le tabagisme en France 9 Méthode 14 Résultats 14 Comportement tabagique et comportement relatif à l’arrêt 18 Étiquetage des produits 20 Protection contre l’exposition à la fumée du tabac 23 Publicité et promotion 24 Prix et taxation 25 Éducation, communication et sensibilisation du public 28 Implications des résultats 29 Contacts et sources de financement du projet ITC 31 Autres références Rapport national ITC France (2011) iii << Figures Liste des tableaux et figures iv Tableau 1Caractéristiques démographiques (effectifs, pourcentages pondérés et intervalles de confiance) des fumeurs de la première vague de l’enquête ITC France, des fumeurs perdus de vue à la deuxième vague et de l’échantillon de remplacement de la deuxième vague 11 Tableau 2Caractéristiques démographiques (effectifs, pourcentages pondérés et intervalles de confiance) des non-fumeurs de la première vague de l’enquête ITC France, des non-fumeurs perdus de vue à la deuxième vague et de l’échantillon de remplacement de la deuxième vague 11 Tableau 3Caractéristiques démographiques des fumeurs de la première vague de l’enquête ITC France ayant réussi à arrêter de fumer à la deuxième vague, et des fumeurs de la première vague continuant à fumer lors de la deuxième vague 16 Figure R-1Pourcentage de non-fumeurs et de fumeurs déclarant que leur lieu de travail était totalement non-fumeur, avant et après l’interdiction de fumer 2 Figure R-2Pourcentage de fumeurs et de non-fumeurs ayant constaté la présence de fumeurs dans les lieux de convivialité lors de leur dernière visite, avant et après l’interdiction de fumer 2 Figure R-3Pourcentage de non-fumeurs et de fumeurs soutenant l’interdiction de fumer dans les lieux de convivialité, avant et après l’interdiction de fumer 2 Figure R-4Pourcentage de fumeurs qui ont fumé dans les lieux de convivialité lors de leur dernière visite, à l’intérieur ou à l’extérieur, avant et après l’interdiction de fumer 3 Figure R-5Pourcentage de non-fumeurs et de fumeurs qui n’autorisent pas la consommation de tabac à domicile, avant et après l’interdiction de fumer 3 Figure R-6 4 Pourcentage de fumeurs qui n’autorisent pas le tabagisme à domicile, par pays Figure R-7Pourcentage de fumeurs qui ont reçu des conseils pour arrêter de fumer parmi ceux qui ont consulté un médecin, par pays 4 Figure R-8Type d’aide à l’arrêt reçu par les fumeurs ayant consulté un médecin ou un professionnel de santé, deuxième vague 4 Figure R-9Type de support où les fumeurs et les ex-fumeurs ont vu des informations ou des messages sur les risques liés au tabagisme ou sur l’arrêt du tabac au cours des six derniers mois, deuxième vague 5 Figure R-10Pourcentage de fumeurs qui ont « souvent » ou « très souvent » remarqué et lu ou examiné attentivement les avertissements sanitaires sur les paquets de cigarettes ou de tabac à rouler au cours du mois écoulé, première et deuxième vagues 5 Figure R-11 Pourcentage de fumeurs qui pensent que le prix est une raison d’arrêter de fumer, par pays 6 Figure 1 Calendrier des mesures de lutte contre le tabac en France en regard des enquêtes ITC France 10 Figure 2 Nombre moyen de cigarettes fumées chaque jour par les fumeurs quotidiens, par pays 14 Figure 3Nombre moyen de cigarettes fumées chaque jour par les fumeurs quotidiens, par sexe et par âge, deuxième vague 14 Figure 4Nombre moyen de cigarettes fumées chaque jour par les fumeurs quotidiens, par sexe et niveau de formation, deuxième vague 14 Figure 5Pourcentage de fumeurs adultes qui fument des cigarettes manufacturées, des cigarettes de tabac à rouler, ou les deux types de cigarettes, par pays 15 Figure 6 15 Raisons importantes de fumer des cigarettes de tabac à rouler, deuxième vague Figure 7Opinion des fumeurs : « Quelles sont les raisons qui me font envisager d’arrêter de fumer ? » Pourcentage répondant « beaucoup » ou « un peu », première et deuxième vagues 15 Figure 8Pourcentage de fumeurs qui ont reçu des conseils pour arrêter de fumer parmi ceux qui ont consulté un médecin, par pays 16 Figure 9Type d’aide à l’arrêt reçu par les fumeurs ayant consulté un médecin ou un professionnel de santé au cours des six derniers mois, deuxième vague 16 Figure 10 17 Intentions d’arrêt du tabac parmi les fumeurs, première et deuxième vagues Rapport national ITC France (2011) Figures Liste des tableaux et figures Figure 11Opinion des fumeurs : pourcentage de fumeurs approuvant les affirmations sur le rôle du gouvernement dans l’aide à l’arrêt du tabac, première et deuxième vagues 17 Figure 12Type de support où les fumeurs et les ex-fumeurs ont remarqué des informations ou des messages sur les risques liés au tabagisme ou sur l’arrêt du tabac au cours des six derniers mois, deuxième vague 18 Figure 13Pourcentage de fumeurs qui ont « souvent » ou « très souvent » remarqué et lu ou examiné attentivement les avertissements sanitaires sur les paquets de cigarettes ou de tabac à rouler au cours du dernier mois, première et deuxième vagues 18 Figure 14Réactions des fumeurs français par rapport aux avertissements sanitaires, première et deuxième vagues 19 Figure 15Opinion des fumeurs sur la nécessité de faire figurer sur les paquets de cigarettes plus, moins ou autant d’informations sur la santé, par pays 19 Figure 16Pourcentage de non-fumeurs et de fumeurs déclarant que leur lieu de travail était totalement non-fumeur, avant et après l’interdiction de fumer 20 Figure 17Pourcentage de fumeurs et de non-fumeurs ayant constaté la présence de fumeurs dans les lieux de convivialité lors de leur dernière visite, avant et après l’interdiction de fumer 20 Figure 18Pourcentage de fumeurs ayant remarqué la présence de fumeurs dans les cafés, les pubs et les bars lors de leur dernière visite, avant et après l’interdiction de fumer dans les lieux de convivialité en Allemagne, aux Pays-Bas, en Irlande et en France 20 Figure 19Pourcentage de fumeurs et de non-fumeurs soutenant l’interdiction de fumer dans les lieux de convivialité en France, avant et après l’interdiction de fumer 21 Figure 20Pourcentage de non-fumeurs et de fumeurs qui n’autorisent pas le tabagisme à domicile, avant et après l’interdiction de fumer 21 Figure 21 21 Pourcentage de fumeurs qui n’autorisent pas le tabagisme à domicile, par pays Figure 22Pourcentage de fumeurs qui ont fumé dans les lieux de convivialité lors de leur dernière visite, soit à l’intérieur soit à l’extérieur, avant et après l’interdiction de fumer 22 Figure 23Pourcentage de fumeurs, de non-fumeurs et d’ex-fumeurs souhaitant une interdiction complète, partielle ou ne souhaitant aucune interdiction de fumer dans les zones extérieures des restaurants 22 Figure 24Pourcentage de fumeurs qui ont « souvent » ou « très souvent » remarqué des éléments faisant la promotion du tabagisme, par pays 23 Figure 25Pourcentage de non-fumeurs et de fumeurs ayant « souvent » ou « très souvent » remarqué des éléments faisant la promotion du tabagisme au cours des six derniers mois, première et deuxième vagues 23 Figure 26Pourcentage de non-fumeurs et de fumeurs qui ont vu ou entendu parler d’événements sportifs ou artistiques sponsorisés par des marques de cigarettes ou des fabricants de tabac au cours des six derniers mois, première et deuxième vagues 23 Figure 27Lieu du dernier achat de cigarettes ou de tabac, deuxième vague 24 Figure 28 24 Pourcentage de fumeurs qui pensent que le prix est une raison d’arrêter de fumer, par pays Figure 29Pourcentage de fumeurs qui connaissent les effets sur la santé et les maladies liées au tabagisme, deuxième vague 25 Figure 30Pourcentage de fumeurs qui pensent que le tabagisme n’a « pas du tout » détérioré leur santé, par pays 26 Figure 31Type de support où les fumeurs et les ex-fumeurs ont remarqué des informations ou des messages sur les risques liés au tabagisme passif, deuxième vague 26 Figure 32Pourcentage de fumeurs ayant une opinion générale « négative » ou « très négative » sur le fait de fumer, par pays 27 Rapport national ITC France (2011) v « On constate ainsi le succès de l’interdiction de fumer sur le lieu de travail et dans les lieux publics, ainsi qu’un soutien croissant de la population à cette initiative de santé publique, qui a su inscrire dans la durée la volonté de dénormalisation du tabagisme. » Xavier BERTRAND Ministre du travail, de l’emploi et de la santé ITC, projet d’évaluation des politiques publiques de lutte antitabac Le projet d’évaluation des politiques publiques de lutte antitabac ou projet ITC (International Tobacco Control) est une étude de cohorte menée au niveau international visant à mesurer l’impact psychosocial et comportemental des politiques de la Convention cadre de l’OMS pour la lutte antitabac (Cclat). Il s’agit du deuxième rapport national de la série ITC France. Les résultats de la première vague et de la deuxième vague de l’enquête ITC France complètent ceux du précédent rapport, et il présente une évaluation de l’interdiction de fumer appliquée en deux phases en France : phase 1 en février 2007 pour les lieux de travail, les centres commerciaux, aéroports, gares, hôpitaux et écoles ; phase 2 en janvier 2008 dans les bars, restaurants, hôtels, casinos et discothèques. Équipe ITC France Équipe française Romain Guignard*, Pierre Arwidson, François Beck, Jean-Louis Wilquin – Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES) Antoine Deutsch – Institut national du cancer (INCa) Équipe internationale ITC Geoffrey T. Fong*, Mary E. Thompson, Christian Boudreau – Université de Waterloo * Investigateurs principaux Gestion de projet Lorraine Craig (Project Manager pour ITC Europe, Université de Waterloo) Sara Hitchman (Student Project Manager pour ITC France, Université de Waterloo) Financement du projet ITC France • INPES, Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (France) • INCa, Institut national du cancer (France) • Roswell Park Cancer Institute (PO1 CA138389), financé par le National Cancer Institute, National Institutes of Health (États-Unis) • Canadian Institutes of Health Research (Canada) • Institute of Population and Public Health (Canada) • Ontario Institute for Cancer Research (Canada) Rapport national ITC France ITC France 2011 La préparation de ce rapport a été coordonnée par Lorraine Craig (Université de Waterloo) et Romain Guignard (INPES) en collaboration avec Jean-Louis Wilquin, François Beck, Pierre Arwidson (INPES), Antoine Deutsch (INCa) et Mi Yan, Pete Driezen, Sara Hitchman et Katherine McEwen (Université de Waterloo). Rapport national ITC France (2011) vii CONTEXTE Enquêtes du projet ITC Le projet ITC est la première étude de cohorte1 réalisée au niveau international sur la consommation de tabac. Son objectif est d’évaluer au niveau national l’impact psychologique et comportemental des dispositions fondamentales de la Convention cadre de l’OMS pour la lutte antitabac (Cclat). Le projet ITC est une collaboration entre responsables nationaux des politiques de santé et organisations internationales de santé, actuellement déployée dans 23 pays représentant 50 % de la population mondiale, 60 % des fumeurs et 70 % des consommateurs de tabac dans le monde. Dans chaque pays, l’équipe du projet ITC mène des enquêtes longitudinales pour évaluer l’impact des politiques de lutte contre le tabagisme et identifier les déterminants de leur efficacité dans les domaines importants de la Cclat : • la législation antitabac, • l’arrêt du tabac, • les avertissements sanitaires et les descriptifs sur les emballages, • le prix et la taxation des produits du tabac, • la communication et l’éducation, • l’interdiction de la publicité et de la promotion en faveur du tabac. Toutes les enquêtes ITC sont élaborées selon les mêmes principes et méthodes. Les questions sont rédigées de manière identique ou équivalente afin de permettre des comparaisons pertinentes entre pays. L’objectif du projet ITC est de fournir des arguments fondés sur des preuves permettant de guider les politiques mises en œuvre dans le cadre de la Cclat, et de mener une évaluation systématique de l’efficacité des législations. L’enquête ITC France En 2006, des chercheurs de l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES) et de l’Institut national du cancer (INCa) ont collaboré avec l’équipe du projet ITC pour la mise en place du projet ITC France. L’objectif était la mise sur pied d’une enquête ITC en France pour exercer un suivi et une évaluation exhaustive des mesures nationales de lutte contre le tabagisme (parmi lesquelles les dispositions de la Cclat). Le projet ITC France a débuté pendant l’élaboration de la législation sur l’interdiction totale de fumer dans les lieux ouverts au public en France (décret Bertrand). Cette interdiction a été introduite en deux temps. En février 2007, il est devenu interdit de fumer sur les lieux de travail, dans les centres commerciaux, aéroports, gares, hôpitaux et écoles. En janvier 2008, l’interdiction a été étendue aux lieux de convivialité (cafés, bars, restaurants, hôtels, casinos et discothèques). La première vague de l’enquête ITC France s’est déroulée de décembre 2006 à février 2007, avant l’entrée en vigueur de la première étape de l’interdiction de fumer. Par une procédure de composition aléatoire des numéros de téléphone, 1 735 fumeurs et 525 non-fumeurs adultes ont été contactés et interrogés. Les répondants ont ensuite été recontactés après l’application de la deuxième phase de l’interdiction de fumer, entre septembre et novembre 2008, pour déterminer et évaluer, entre autres, l’impact des deux étapes de l’interdiction de fumer. Les répondants de la première vague « perdus de vue » ont été remplacés par de nouveaux participants sélectionnés de manière aléatoire afin de conserver la taille de chacun des échantillons de fumeurs et de non-fumeurs (échantillon de remplacement de la deuxième vague : 473 fumeurs et 101 non-fumeurs). Pour la deuxième vague, l’échantillon comportait 1 540 fumeurs, 515 non-fumeurs et 164 ex-fumeurs (répondants se déclarant fumeurs lors de la première vague, puis devenus non-fumeurs lors de la deuxième). Entre les deux vagues de l’enquête, plusieurs autres mesures de lutte contre le tabagisme ont été mises en place en France. En février 2007, a été introduit le remboursement des médicaments d’aide à l’arrêt (substituts nicotiniques et varénicline) à hauteur de 50 euros par an par fumeur. En août 2007, le prix du paquet de 20 cigarettes le plus vendu a augmenté de 0,30 euro par paquet (passant de 5 euros à 5,30 euros), et le prix du paquet de tabac à rouler le plus vendu a augmenté de 0,50 euro (passant de 5,50 euros à 6 euros). Le premier rapport national ITC France2 ainsi que les principaux résultats3 ont été publiés en février 2009. Ces rapports décrivent : 1) les attitudes et comportements des fumeurs et des non-fumeurs avant l’entrée en vigueur du décret Bertrand ; 2) l’impact de l’interdiction de fumer sur les attitudes et opinions des fumeurs et des non-fumeurs ; 3) les changements en termes de comportement tabagique après l’interdiction. Le présent rapport fournit une évaluation plus complète des dernières politiques de lutte contre le tabagisme en France 18 mois environ après l’interdiction de fumer à l’intérieur des lieux publics, dans les transports publics et sur les lieux de travail, et 8 mois après l’interdiction de fumer dans les lieux de convivialité. 1. Les études de cohorte sont aussi appelées études de panel en épidémiologie. 2. Projet ITC (Février 2009). Rapport National ITC France. Université de Waterloo, Waterloo, Ontario, Canada ; Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES), Institut national du cancer (INCa) et Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT), Paris, France. 3. Projet ITC (Février 2009). Résumé de l’enquête ITC France. Université de Waterloo, Waterloo, Ontario, Canada ; Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES), Institut national du cancer (INCa) et Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT), Paris, France. 1 Rapport national ITC France (2011) PRINCIPAUX RÉSULTATS 1. Les lois françaises pour un environnement sans tabac ont considérablement réduit le tabagisme sur les lieux de travail, dans les cafés, les bars et les restaurants. Le soutien en faveur de l’interdiction de fumer dans ces lieux s’est amplifié chez les fumeurs et chez les non-fumeurs. a) Le pourcentage de lieux de travail où l’interdiction de fumer est totale a sensiblement augmenté depuis la mise en œuvre de l’interdiction. Avant cette interdiction, 48 % des fumeurs et 55 % des non-fumeurs employés hors de leur domicile4 déclaraient travailler dans un lieu totalement non-fumeur. Lors de la deuxième vague d’ITC, 17 à 19 mois après la mise en œuvre de l’interdiction, 80 % des fumeurs et 84 % des non-fumeurs déclarent que leur lieu de travail est totalement non-fumeur. Le nombre de répondants dont le lieu de travail n’impose pas de restrictions aux fumeurs ou ne leur impose que des restrictions partielles a diminué après l’interdiction. Lors de la première vague, parmi les personnes travaillant hors de leur domicile, 37 % des fumeurs et 31 % des non-fumeurs disposaient d’un espace pour fumeurs sur leur lieu de travail. Lors de la deuxième vague, ce pourcentage a diminué ; il est de 13 % pour les fumeurs et de 11 % pour les non-fumeurs. De même, la proportion de fumeurs dont le lieu de travail n’impose pas de restrictions aux fumeurs est passée de 11 % dans la première vague à 4 % dans la deuxième. b) Les fumeurs et les non-fumeurs déclarent que l’interdiction de fumer dans les cafés, pubs, bars et restaurants est respectée. Avant l’interdiction, il y avait des fumeurs dans pratiquement tous les cafés, pubs et bars ; 97 % des fumeurs et 93 % des non-fumeurs avaient constaté la présence de fumeurs à l’intérieur de ces établissements lors de leur dernière visite. Lors de la deuxième vague, 8 à 11 mois après l’interdiction, la présence de fumeurs à l’intérieur de ces établissements est rarement rapportée : seulement 4 % des fumeurs et 5 % des non-fumeurs signalent avoir vu des fumeurs lors de leur dernière visite. Des résultats similaires ont été obtenus pour les restaurants, avec 71 % des fumeurs et 57 % des non-fumeurs qui déclaraient avant l’interdiction y avoir vu des fumeurs lors de leur dernière visite, alors que ces chiffres sont respectivement passés à 2 % et 3 % après l’interdiction. La majorité des répondants déclarent que les politiques antitabac interdisant de fumer dans ces lieux sont bien appliquées : 95 % des fumeurs et 85 % des non-fumeurs déclarent que l’interdiction de fumer est « totalement » appliquée dans les cafés et les bars qu’ils fréquentent ; 98 % des fumeurs et 92 % des non-fumeurs déclarent qu’elle est « totalement » appliquée dans les restaurants qu’ils fréquentent.5 c) Le soutien en faveur de l’interdiction de fumer dans les lieux de convivialité s’est amplifié parmi les fumeurs et parmi les non-fumeurs depuis son entrée en vigueur. En même temps que l’interdiction de fumer a conduit à une diminution spectaculaire du tabagisme dans les lieux publics, le soutien des fumeurs et des non-fumeurs en faveur de l’interdiction s’est accru. Le soutien des fumeurs en faveur de l’interdiction de fumer dans les cafés, les bars et les pubs s’est ainsi amplifié, passant de 28 % avant l’interdiction à 60 % après. Ils sont également davantage en faveur de l’interdiction de fumer dans les restaurants, puisque leur soutien est passé de 51 % à 79 %. 4. 77 % de l’échantillon de fumeurs et 50 % de l’échantillon de non-fumeurs étaient employés à l’extérieur de chez eux. 5. Un récent rapport de DNF (Droits des Non-Fumeurs) intitulé « Le tabac en France entre 2006 et 2009 » attire l’attention sur la prolifération du tabagisme sur les terrasses des cafés. Une application stricte de l’interdiction de fumer à l’intérieur pourrait expliquer l’augmentation du nombre de terrasses entre 2007 et 2009 (selon ce rapport il est passé de 30 000 à 45 000). Rapport national ITC France (2011) 2 2. Lors de la deuxième vague, 13 % des fumeurs de la cohorte déclarent avoir arrêté de fumer. Les lois antitabac interdisant de fumer sur les lieux de travail, dans les lieux publics et dans les lieux de convivialité ont aidé certains fumeurs à arrêter de fumer ou à fumer moins. La deuxième vague de l’enquête montre que 13 % (n = 164) des fumeurs de la première vague qui ont été recontactés (n = 1 231) ont arrêté de fumer. Plus des deux tiers d’entre eux (70 %) ont arrêté de fumer plus de six mois avant la deuxième vague de l’enquête. Parmi les fumeurs qui ont arrêté, 64 % sont des hommes, 21 % sont âgés de 55 ans ou plus, et 85 % étaient des fumeurs quotidiens. Parmi les personnes qui continuent de fumer lors de la deuxième vague, 54 % sont des hommes, 14 % sont âgés de 55 ans ou plus, et 92 % étaient des fumeurs quotidiens. Les ex-fumeurs sont donc plus souvent des hommes, plus souvent des fumeurs occasionnels et sont plus âgés que ceux qui n’ont pas arrêté de fumer entre les deux vagues. Selon les déclarations des répondants, les lois antitabac ont eu une certaine influence puisqu’ils déclarent qu’elles les ont aidés à arrêter de fumer, ou à diminuer leur consommation, et à ne pas reprendre. Parmi les 164 personnes qui ont arrêté de fumer entre les deux vagues 6: • 16 % de celles employées à l’extérieur de chez elles (n = 19) déclarent que l’interdiction de fumer sur les lieux de travail et dans les lieux publics, entrée en vigueur en 2007, est l’une des raisons pour lesquelles elles ont arrêté de fumer ; •4 6 % de celles employées à l’extérieur de chez elles (n = 55) déclarent que l’interdiction de fumer sur les lieux de travail et dans les lieux publics les a aidées à ne pas reprendre ; • 1 5 % (n = 24) déclarent que l’interdiction de fumer dans les cafés, dans les bars et dans les restaurants, entrée en vigueur en 2008, est l’une des raisons pour lesquelles elles ont arrêté de fumer ; •4 3 % (n = 71) déclarent que l’interdiction de fumer dans les lieux de convivialité les a aidées à ne pas reprendre. Parmi les 1 067 fumeurs recontactés lors de la deuxième vague : •4 0 % de ceux employés à l’extérieur de chez eux (n = 318) déclarent que l’interdiction de fumer sur les lieux de travail et dans les lieux publics leur a fait réduire leur consommation de cigarettes ; •2 4 % (n = 253) déclarent que l’interdiction de fumer dans les cafés, dans les bars et dans les restaurants leur a fait réduire leur consommation de cigarettes ;7 • 13 % (n = 131) déclarent qu’ils sont davantage susceptibles d’arrêter de fumer maintenant en raison de l’interdiction de fumer dans les lieux de convivialité. Depuis l’interdiction de fumer dans les lieux de convivialité, une plus faible proportion de fumeurs déclarent avoir fumé lors de leur dernière visite dans ces établissements, que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur. Parmi les fumeurs recontactés lors de la deuxième vague et qui s’étaient rendus dans un bar au cours des six derniers mois à chacune des deux vagues, 87 % déclaraient avoir fumé au cours de leur dernière visite (à l’extérieur ou à l’intérieur) avant l’interdiction. Après l’interdiction, ce pourcentage de personnes ayant fumé lors de leur dernière visite est passé à 76 %, et pratiquement toutes les personnes n’ont fumé qu’à l’extérieur. De même, la consommation de tabac lors d’un repas au restaurant a diminué, passant de 69 % des fumeurs avant l’interdiction à 59 % des fumeurs après l’interdiction, la majorité d’entre eux ayant fumé uniquement à l’extérieur. 3. Le tabagisme à domicile a diminué chez les fumeurs et chez les non-fumeurs depuis la mise en œuvre de la loi antitabac. L’enquête ITC France montre que le pourcentage de fumeurs et de non-fumeurs qui interdisent de fumer chez eux a augmenté après la mise en œuvre de la loi antitabac. Lors de la première vague, 39 % des non-fumeurs et 23 % des fumeurs interdisaient de fumer à l’intérieur de leur domicile. Lors de la deuxième vague, 50 % des non-fumeurs et 26 % des fumeurs déclarent ne pas accepter qu’on fume chez eux8. Parmi les fumeurs qui acceptaient qu’on fume chez eux lors de la première vague, 15 % déclarent l’avoir totalement interdit lors de la deuxième vague. Parmi les non-fumeurs, 26 % de ceux qui acceptaient qu’on fume chez eux lors de la première vague, déclarent l’avoir totalement interdit lors de la deuxième. Ceci montre qu’il peut être plus difficile pour les fumeurs que pour les non-fumeurs d’avoir un domicile entièrement non-fumeur. Les enquêtes ITC menées aux Pays-Bas, en Allemagne et en Irlande ont également révélé des augmentations dans le pourcentage de fumeurs et de non-fumeurs qui déclarent ne pas autoriser le tabagisme à domicile suite à la mise en place des lois antitabac. 3 Rapport national ITC France (2011) Parmi les fumeurs qui continuent à fumer au domicile lors de la deuxième vague, 24 % déclarent qu’ils fument moins de cigarettes à l’intérieur de leur habitation, 68 % en fument autant et 8 % en fument davantage. La loi antitabac a donc été associée non seulement à des réductions spectaculaires du tabagisme dans les lieux publics, mais aussi à une légère réduction du tabagisme à domicile. Ces résultats sont en phase avec les enquêtes ITC menées en Irlande et en Écosse, qui ont révélé soit une diminution soit une absence de modification du tabagisme à domicile à l’issue des interdictions9, 10, 11. Cependant, cela ne signifie pas pour autant une relation de cause à effet, car cette évolution fait partie du processus à long terme de dénormalisation du tabac. 4. La majorité des fumeurs ayant consulté un médecin ou un professionnel de santé n’ont pas reçu d’aide pour arrêter de fumer. Le rôle important du conseil du médecin pour aider les fumeurs à arrêter de fumer est bien reconnu12, 13. Cependant, la France se classe parmi les derniers des 19 pays participant à l’étude ITC en ce qui concerne la proportion de fumeurs ayant reçu, au cours d’une consultation de routine, des conseils de leur médecin pour arrêter de fumer. Lors de la deuxième vague, environ trois fumeurs sur dix (28 %) ayant consulté un médecin ou un professionnel de santé au cours des six derniers mois (pratique qui concerne 58 % de tous les fumeurs) ont reçu des conseils pour arrêter de fumer. Les trois quarts (75 %) des fumeurs ayant reçu de tels conseils déclarent que cet avis les a fait penser à arrêter de fumer. Ceci suggère que ce rapide conseil a eu un certain impact sur la majorité des fumeurs qui l’ont reçu. Les formes les plus courantes d’aide à l’arrêt du tabac fournies aux fumeurs par un médecin ou un professionnel de santé sont les conseils les incitant à arrêter de fumer et la fourniture de brochures : ces types d’aide ont été proposés à respectivement 28 % et 15 % des fumeurs ayant consulté un médecin au cours des six mois précédant la deuxième vague. Les médicaments d’aide à l’arrêt du tabac et les orientations vers des programmes d’arrêt du tabac ont été proposés moins fréquemment : respectivement 7 % et 3 % des fumeurs ayant consulté un médecin au cours des six mois précédant la deuxième vague ont reçu ce type d’aide. Ces résultats sont comparables à ceux observés en Allemagne et aux Pays-Bas (où moins de 10 % des fumeurs se sont vu prescrire des médicaments d’aide à l’arrêt du tabac ou ont été orientés vers d’autres services), mais ils sont plus faibles qu’au Royaume-Uni où environ 20 % des fumeurs ayant consulté un médecin ou un professionnel de santé ont reçu une ordonnance pour des médicaments d’aide à l’arrêt du tabac ou ont été orientés vers des services d’aide à l’arrêt du tabac.14 Parmi les 164 ex-fumeurs de la deuxième vague, 68 % ont consulté un médecin ou un professionnel de santé au cours des 6 mois précédant l’enquête. Environ la moitié (47 %) de ces ex-fumeurs ont reçu des encouragements ou une aide pour arrêter de fumer. Lors de la deuxième vague, la majorité des fumeurs (60 %) pensent que le gouvernement devrait faire davantage pour aider les fumeurs à arrêter de fumer. 6. Les pourcentages doivent être interprétés avec prudence car le nombre de fumeurs ayant arrêté est très faible. 7. Il convient de noter que les ventes globales de tabac ont légèrement diminué entre 2007 et 2008. 8. Les statistiques pour les fumeurs concernent les personnes continuant à fumer lors de la deuxième vague. 9. Fong, G.T., Hyland, A., Borland, R., Hammond, D. et al. (2006). Reductions in tobacco smoke pollution and increases in support for smoke-free public places following the implementation of comprehensive smoke-free workplace legislation in the Republic of Ireland: findings from the ITC Ireland/UK Survey. Tob Control, 15, iii51-iii58. 10. Hyland, A., Higbee, C., Hassan, L., Fong, G.T. et al. (2007). Does smoke-free Ireland have more smoking inside the home and less in pubs than in the United Kingdom? Findings from the international tobacco control policy evaluation project. Euro J Public Health, 18, 1, 63-65. Rapport national ITC France (2011) 4 5. Le paquet de cigarettes est le support d’information sur les risques liés au tabagisme le plus fréquemment mentionné par les fumeurs ; cependant, les fumeurs font généralement moins attention au texte d’avertissement relatif au tabac. Le ministère français de la santé a reconnu que les avertissements sanitaires graphiques jouaient un rôle efficace dans l’approche globale de lutte contre le tabagisme, et il a rejoint la Belgique, le Royaume-Uni, la Roumanie, la Lettonie et au moins 30 autres pays dans le monde qui utilisent des avertissements sanitaires graphiques. Les nouveaux avertissements sont obligatoires à compter du 20 avril 2011 sur les paquets de cigarettes, et à compter d’avril 2012 sur les autres produits du tabac. Les résultats des enquêtes ITC dans les autres pays montrent que les avertissements graphiques, ayant plus de poids sur le plan émotionnel, provoquent des réactions plus intenses, qu’ils stimulent davantage l’arrêt du tabac et que leur effet persiste plus longtemps que celui des avertissements exclusivement textuels15. Lors de la deuxième vague, 85 % des fumeurs ont au cours des six derniers mois remarqué des informations ou des messages traitant des risques liés au tabagisme ou encourageant l’arrêt du tabac. Parmi ces fumeurs, 86 % indiquent avoir remarqué des messages sur les paquets de cigarettes, le support le plus fréquemment cité parmi ceux qui étaient suggérés. Cependant, les résultats de la deuxième vague de l’enquête suggèrent que, en France, l’impact des avertissements exclusivement textuels a diminué chez les fumeurs. Lors de la première vague, plus des deux tiers (69 %) des fumeurs déclaraient avoir souvent remarqué les avertissements. Ils ne sont plus que 55 % dans la deuxième vague. Parmi les fumeurs qui avaient souvent remarqué les avertissements lors de la première vague, plus d’un tiers (37 %) les ont remarqués moins souvent. Ces résultats soulignent la nécessité de renforcer ces avertissements textuels, initiative qui pourrait jouir d’un soutien important du public, car près de la moitié (46 %) des fumeurs français et près des deux tiers (63 %) des non-fumeurs pensent que les paquets de cigarettes devraient comporter davantage d’informations sur la santé. Les résultats des enquêtes ITC dans d’autres pays montrent que les avertissements graphiques, ayant plus de poids sur le plan émotionnel, provoquent des réactions plus intenses, qu’ils stimulent davantage l’arrêt du tabac et que leur effet persiste plus longtemps que celui des avertissements exclusivement textuels. 11. Hyland, A., Hassan, L.M., Higbee, C., Boudreau, C. et al. (2009). The impact of smokefree legislation in Scotland: results from the Scottish ITC Scotland/UK longitudinal surveys. Euro J Public Health, 19, 2, 198-205. 12. WHO Framework Convention on Tobacco Control (2010). Guidelines for implementation of Article 14 of the WHO Framework Convention on Tobacco Control (Demand reduction measures concerning tobacco dependence and cessation). http://www.who.int/fctc/guidelines/article_14/en/index.html 13. Stead, L.F., Bergson, G., and Lancaster T. (2008). Physician advice for smoking cessation. Cochrane Database of Systematic Reviews 2008, Issue 2. Art. No.: CD000165. DOI: 10.1002/14651858.CD000165.pub3. 14. L’intervalle de temps était plus long (depuis la date de la dernière enquête) dans la question posée au Royaume-Uni. 15. Borland, R., Wilson, N., Fong, G. T. et al. (2009). Impact of graphic and text warnings on cigarette packs: findings from four countries over five years. Tob Control, 18, 358-364. 5 Rapport national ITC France (2011) 6. L’augmentation de 6 % du prix des cigarettes (environ 0,30 euro pour le paquet de 20) qui a eu lieu en août 2007 semble avoir eu un impact minime sur les attitudes des fumeurs concernant l’achat de leurs cigarettes. Lors de la première vague, plus de la moitié (58 %) des fumeurs déclaraient avoir souvent pensé à l’argent dépensé en cigarettes au cours du dernier mois. Ce pourcentage reste relativement inchangé (54 %) dans la deuxième vague, 13 mois après l’augmentation des prix en août 2007. Environ un tiers des fumeurs, tant de la première vague (33 %) que de la deuxième (31 %), signalent avoir dépensé en cigarettes au cours des six derniers mois des sommes qui auraient été mieux dépensées pour des choses essentielles à leur foyer, en nourriture par exemple. Le prix est une raison d’arrêter de fumer pour près des deux tiers (63 %) des fumeurs français. Le pourcentage est toutefois plus élevé dans plus de la moitié des 19 pays ITC où l’enquête a été menée. Ces résultats suggèrent que la légère augmentation (6 %) du prix des cigarettes qui a eu lieu après la première vague de l’enquête (août 2007) a eu un impact minime sur l’attitude des fumeurs, sur leur motivation à arrêter de fumer et sur leur perception du coût du tabagisme. L’augmentation du prix des cigarettes en France entre 2003 et 2004 suggère que, pour entraîner une réduction significative des ventes de cigarettes, il faut que l’augmentation soit d’au moins 10 %. Les implications pour la lutte antitabac en France La première et la deuxième vagues de l’enquête ITC France indiquent que les politiques antitabac en France ont considérablement réduit le tabagisme sur les lieux de travail, dans les lieux publics et dans les lieux de convivialité. Le soutien accru des fumeurs et des non-fumeurs aux politiques antitabac après leur entrée en vigueur et le grand respect de ces politiques indiquent que les restrictions sur le tabagisme dans les lieux clos en France ont été un succès. Les résultats de la deuxième vague soulignent aussi les possibilités d’améliorer encore la lutte contre le tabagisme en France : 1. Continuer de surveiller le respect des lois antitabac sur les lieux de travail et dans les lieux de convivialité. 2. Surveiller étroitement la mise en place des avertissements sanitaires graphiques. 3. R enforcer le rôle des médecins généralistes vis-à-vis de l’arrêt du tabac chez leurs patients, en leur proposant une formation en conseil sur l’arrêt du tabac. 4. M ener des analyses économiques supplémentaires au moyen des données de la première et de la deuxième vagues de l’enquête ITC pour évaluer l’impact du prix du tabac et des augmentations des taxes sur la consommation de tabac dans toutes les tranches d’âge et parmi tous les groupes de revenus. Rapport national ITC France (2011) 6 LE TABAGISME EN FRANCE Le rapport national ITC France de février 200918 donne une vue d’ensemble de la consommation de tabac et des politiques de lutte antitabac en France au moment de la première vague de l’enquête ITC France. Cette section est mise à jour pour actualiser les données sur la consommation de tabac et le contexte des politiques jusqu’en 2010. Les principales initiatives des politiques de lutte contre le tabagisme entrées en vigueur en France après la première vague de l’enquête sont résumées ci-dessous. Prévalence du tabagisme La prévalence des fumeurs en France a augmenté dans la population âgée de 15 à 75 ans, passant de 32 % en 2005 à 34 % (37 % chez les hommes et 30 % chez les femmes) en 201019. Cette augmentation est survenue après quarante ans de diminution de la prévalence chez les hommes et seulement vingt ans de diminution de la prévalence chez les femmes20. La prévalence des fumeurs est la plus élevée chez les jeunes, puis diminue avec l’âge : 39 % des 18-44 ans déclarent fumer tous les jours contre 31 % des 45-54 ans, 18 % des 55-64 ans et 7 % des 65-75 ans. Les études portant sur la prévalence des fumeurs menées en 2010 ont identifié une différence de prévalence entre hommes et femmes aux alentours de l’âge de 30 ans. La prévalence plus faible chez les femmes de cette tranche d’âge s’explique par les grossesses (et projets de grossesse) ou par la présence de nourrissons ou d’enfants en bas âge au foyer. Ces périodes de la vie sont propices à l’arrêt du tabac chez les femmes, au moins temporairement ; c’est moins le cas chez les hommes. Politiques antitabac La France a une histoire en de nombreux points remarquable en matière de lutte contre le tabagisme dans l’Union européenne (UE). Dès 1976, la Loi Veil imposait des limites à la publicité sur le tabac et établissait les avertissements sanitaires. En 1991, la loi Evin a renforcé l’interdiction de publicité pour les produits du tabac, a augmenté le prix du tabac et établi le principe de protection des non-fumeurs. Plusieurs augmentations du prix des cigarettes ont eu lieu en 2003 et 2004, entraînant une forte diminution de la prévalence des fumeurs. La France a été la première nation européenne à ratifier la Convention cadre de l’OMS pour la lutte antitabac (Cclat) en octobre 2004. La Cclat lutte contre l’épidémie mondiale de tabagisme au travers d’une batterie de mesures destinées à réduire aussi bien l’offre que la demande de tabac, et qui concernent notamment : les prix et les taxations (article 6), l’exposition à la fumée de tabac (article 8), l’emballage et l’étiquetage des produits du tabac (article 11), la publicité et le sponsoring (article 13), l’arrêt du tabac et le traitement de la dépendance (article 14). Depuis, les mesures de lutte contre le tabagisme ont concerné les restrictions sur les emballages, la création de consultations de tabacologie, le remboursement des substituts nicotiniques et des médicaments sur ordonnance et l’interdiction de fumer dans les lieux publics. Le Plan cancer 2009-2013 français, annoncé en novembre 2009, identifie un certain nombre de mesures antitabac visant à réduire la prévalence du tabagisme de 30 % à 20 % en 2013. Ces actions consistent notamment à mettre en place des avertissements sanitaires graphiques sur les paquets de cigarettes (obligatoires à compter d’avril 2011), à mettre fin à la publicité sur les lieux de vente et lors des retransmissions sportives à la télévision, à développer l’accès aux substituts nicotiniques pour les femmes enceintes et les personnes bénéficiaires de la couverture médicale universelle complémentaire (CMUC), à interdire la vente de cigarettes par Internet, à créer des campagnes d’information sur les risques du tabagisme et à assurer l’effectivité de l’extension de l’interdiction de vente de tabac aux mineurs de 16 à 18 ans21. Prix et taxation La hausse des taxes sur les produits du tabac est considérée comme l’une des mesures les plus efficaces dans la stratégie globale de la lutte antitabac, en particulier vis-à-vis des jeunes22, 23. La Cclat incite à la mise en place de politiques de taxation et de prix, de restrictions à la vente et de limitations imposées aux voyageurs internationaux qui importent des produits du tabac taxés ou en franchise de droits. La France a augmenté le prix des cigarettes manufacturées de 8 % en janvier 2003, de 18 % en octobre 2003 et de 9 % en janvier 2004. L’augmentation suivante est intervenue en août 2007, faisant passer le prix du paquet le plus vendu de 5 euros à 5,30 euros (augmentation de 6 %), et augmentant le prix du tabac à rouler le plus vendu de 0,50 euro (augmentation de 8 %). Après un moratoire sur les droits d’accise qui a duré de 2003 à fin 2007, la France, le 1er octobre 2007, a augmenté le prix de détail minimum du paquet de cigarettes de 0,30 euro, pour le faire passer de 4,49 à 4,79 euros24. Depuis 2007, plusieurs autres légères augmentations se sont produites : une augmentation de 0,60 euro du prix du tabac à rouler en janvier 2009, une augmentation de 0,30 euro du prix du paquet de cigarettes en novembre 2009 et une autre augmentation de 0,30 euro en novembre 201025. 18. Projet ITC (Février 2009). Rapport national ITC France. Université de Waterloo, Waterloo, Ontario, Canada ; Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES), Institut national du cancer (INCa) et Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT), Paris, France. 19. Beck F., Guignard R., Richard J.-B., Wilquin J.-L., Peretti-Watel P, « Augmentation récente du tabagisme en France : principaux résultats du Baromètre santé, France, 2010 », BEH, n°20-21, numéro spécial journée mondiale sans tabac, 31 mai 2011, 230-233. 20. Beck, F. and Legleye, S. (2008). « Tabagisme passif », in Ménard C., Girard D., Léon C., and Beck, F. (dir) Baromètre santé environnement 2007, INPES, St Denis, 170-186. 21. Institut national du cancer (INCa) (2009). Le plan cancer 2009-2013. http://www.e-cancer.fr/component/docman/doc_download/4787- 7 Rapport national ITC France (2011) Interdiction de fumer dans les lieux publics Le gouvernement français a introduit une législation antitabac en deux temps, en 2007 et 2008. L’interdiction de fumer est entrée en vigueur dans les lieux publics, sur les lieux de travail, dans les hôpitaux et dans les écoles le 1er février 2007. Cette réglementation a ensuite été étendue aux restaurants, aux cafés, aux bars, aux hôtels, aux casinos et aux discothèques le 1er janvier 2008. Il est permis de fumer dans des fumoirs séparés, ventilés et dans lesquels aucun service ne peut être proposé. Le fumoir ne doit pas occuper plus de 20 % de la surface totale de l’établissement et ne doit pas dépasser 35 m2. Selon la loi, il est permis de fumer sur les terrasses dès lors qu’elles ne sont pas couvertes ou que le côté principal reste en permanence ouvert, et que l’établissement est complètement séparé de sa terrasse. Il n’est pas permis de fumer sur les terrasses couvertes ou fermées. Avertissements sanitaires Au moment de la première et de la deuxième vagues de l’enquête ITC France, les avertissements sanitaires textuels occupaient 30 % du recto des paquets de cigarettes et 40 % du verso (conformément à la directive de l’UE, qui demande aux pays européens unilingues d’utiliser des avertissements textuels occupant au moins 30 % du recto et 40 % du verso de chaque paquet et prescrit une liste de deux messages d’avertissements sanitaires pour le recto et une liste de quatorze avertissements pour le verso que les États membres doivent faire imprimer aléatoirement et en alternance26). Les 27 pays de l’Union Européenne ont la possibilité d’imposer l’usage d’avertissements sanitaires graphiques, en choisissant pour chacun des quatorze avertissements textuels l’un des trois avertissements sanitaires graphiques agréés par la Commission européenne. En avril 2010, la France a finalisé la décision d’exiger des avertissements sanitaires graphiques sur les paquets de cigarettes, avec entrée en vigueur le 20 avril 2011. Quatorze avertissements sanitaires graphiques ont été sélectionnés à partir d’une librairie de quarante-deux images de la Commission européenne. Sur les paquets, l’un des deux avertissements sanitaires textuels généraux doit occuper au moins 30 % du recto et l’un des quatorze avertissements sanitaires graphiques doit occuper au moins 40 % du verso (bords non compris). L’article 11 de la Cclat préconise l’utilisation des avertissements illustrés qui doivent occuper au moins 50 % des faces principales du paquet (c’est-à-dire l’avant et l’arrière) ; ils ne doivent en aucun cas en occuper moins de 30 %. Mentions « light/légère » L’article 11 de la Cclat recommande la non-utilisation de descriptifs trompeurs qui peuvent donner l’impression erronée qu’un produit du tabac est moins nocif qu’un autre. Ceci concerne les mentions telles que « à faible teneur en goudron », « light/légère », « ultralight/ultralégère » ou « mild /douce »27. La France, comme l’ensemble des pays de l’UE, a prohibé ces termes par la directive européenne 2001/37/CE. Les mots interdits dans l’appellation du produit sont : « light », « ultralight », « légère », « superlégère », et « extralégère ». Certaines marques ont remplacé ces mots par des noms de couleur comme « Silver ». Publicité et sponsoring La Cclat impose une interdiction totale de publicité, de promotion et de sponsoring pour les produits du tabac dans les cinq ans suivant la ratification du traité. Les définitions de « publicité », « promotion » et « sponsoring » s’entendent au sens large des termes et englobent toutes les formes indirectes. En France, l’interdiction générale de publicité est entrée en vigueur en 1991 ; elle ne concerne cependant pas les publications destinées aux professionnels du tabac, le petit affichage dans les bureaux de tabac, ni les retransmissions en direct d’événements sportifs automobiles se déroulant dans des pays où la publicité pour le tabac est légale. Le Plan cancer 2009-2013 français propose de mettre fin par voie législative à la publicité pour le tabac sur les lieux de vente et lors des retransmissions de sports mécaniques à la télévision. Arrêt du tabac et traitement L’article 14 promeut la mise en œuvre de programmes destinés aux fumeurs souhaitant arrêter, qui concernent en particulier le diagnostic, le conseil, la prévention et le traitement de la dépendance au tabac, ainsi que des traitements facilement accessibles et peu onéreux. En France ont été implantées 645 consultations de tabacologie (essentiellement dans des établissements hospitaliers), une ligne nationale d’aide à l’arrêt du tabac et un site Web de coaching par Internet (Tabac Info Service), dont la gestion est assurée par l’Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES). Depuis 1999, les substituts nicotiniques peuvent être achetés en pharmacie sans ordonnance, tandis que le bupropion (Zyban®) et la varénicline (Champix®) sont disponibles sur présentation d’une ordonnance. Depuis le 1er février 2007, les substituts nicotiniques et la varénicline sont remboursables à concurrence de 50 euros par an s’ils sont prescrits par un médecin ou une sage-femme. Le Plan cancer 2009-2013 français appelle au développement de l’accès aux substituts nicotiniques pour les femmes enceintes et les personnes bénéficiaires de la CMUC. 22. Organisation mondiale de la santé (2008). Rapport de l’OMS sur l’épidémie mondiale de tabagisme, 2008 : Brochure MPOWER. Genève, Organisation mondiale de la santé. 23. Jha, P., Chaloupka, F.J. (1999). Curbing the epidemic: governments and the economics of tobacco control. Washington, DC: World Bank. 24. Journal officiel, Arrêté du ministère du budget, des comptes publics et de la fonction publique, 26 septembre 2007. http://droit.org/jo/20070930/BCFD0763530A.html 25. Ces augmentations se sont produites après la deuxième vague du projet ITC France. 26. Directive de l’UE 2001/37/CE. 27. Article 11.1A Rapport national ITC France (2011) 8 MÉTHODE Vue d’ensemble Le projet ITC est une collaboration entre 23 pays : Canada, États-Unis, Royaume-Uni, Australie, Irlande, Thaïlande, Malaisie, Corée du Sud, Chine, Mexique, Uruguay, Nouvelle-Zélande, France, Allemagne, PaysBas, Bhoutan, Île Maurice, Brésil, Inde, Bangladesh, Kenya, Nigéria et Zambie. Le principal objectif du projet est d’évaluer de manière rigoureuse les effets psychosociaux et comportementaux des politiques nationales de lutte antitabac menées dans le cadre de la Convention cadre pour la lutte antitabac (Cclat). Pour cela, le projet ITC met en place d’importantes enquêtes par panel sur la consommation de tabac, dans des pays qui rassemblent aujourd’hui la moitié de la population mondiale des fumeurs. Pour chaque champ d’action de la Cclat, l’enquête ITC fournit des indicateurs-clés identiques ou similaires dans les 23 pays afin de faciliter les comparaisons internationales28. Les évaluations menées dans le cadre des enquêtes ITC profitent des plans quasi-expérimentaux établis lors de la mise en place d’une politique par un pays ITC : les changements observés sur les variables liées à cette politique après sa mise en application sont comparés aux changements intervenus dans d’autres pays où cette politique n’a pas été modifiée. Ce protocole d’étude garantit des niveaux élevés de validité interne, permettant ainsi des jugements plus fiables sur l’impact possible de la politique menée. Pour plus de détails sur le modèle conceptuel et les objectifs du projet ITC, voir Fong et al. (2006)29; pour une description de la méthodologie d’enquête, voir Thompson et al. (2006)30. Le projet ITC France a été créé en 2006 pour évaluer de manière rigoureuse les effets psychosociaux et comportementaux des politiques françaises de lutte antitabac au moyen de méthodes employées par le projet ITC dans de nombreux autres pays dans le monde. Le principal objectif est de fournir des arguments basés sur des preuves pour guider les politiques mises en œuvre dans le cadre de la Cclat, et de mener une évaluation systématique de l’efficacité des législations. Les première et deuxième vagues de l’enquête ITC France ont consisté en entretiens téléphoniques sur un échantillon représentatif de fumeurs et sur un échantillon témoin de non-fumeurs adultes en France. La première vague de l’enquête a été menée avant la mise en œuvre en deux temps de l’interdiction de fumer dans les lieux publics, avec d’abord l’interdiction de fumer dans les lieux publics, sur le lieu de travail, dans les hôpitaux et les écoles (1er février 2007) et, ensuite, l’interdiction de fumer dans les restaurants, les bars, les hôtels, les casinos et les discothèques (1er janvier 2008). La deuxième vague de l’enquête a débuté huit mois après l’interdiction de fumer dans les lieux de convivialité et dix-neuf mois après l’interdiction de fumer sur les lieux de travail et dans les autres lieux publics. 28. Pour les questionnaires des enquêtes ITC, voir le site web du Projet ITC, onglet « Méthodes de recherche » (www.itcproject.org/research). 29. Fong, G.T., Cummings, K.M., Borland, R., Hastings, G. et al. (2006). The conceptual framework of the International Tobacco Control (ITC) Policy Evaluation Project. Tob Control, 15 (Suppl III), iii3-iii11. 30. Thompson, M.E., Fong, G.T., Hammond, D., Boudreau, C. et al. (2006). Methods of the International Tobacco Control (ITC) Four Country Survey. Tob Control, 15 (Suppl III), iii12-iii-18. 9 Rapport national ITC France (2011) Figure 1. Calendrier des mesures de lutte contre le tabac en France en regard des enquêtes ITC France 1991: 1999: 2003: 2004: Interdiction totale de publicité. Substituts nicotiniques disponibles sans ordonnance. Les avertissements sanitaires doivent couvrir 30% de la face avant et 40% de la face arrière du paquet. Les termes « light » et « légère » sont interdits. Deux hausses de prix : 8% en janvier et 18% en octobre. Nouvelle hausse de prix de 9% en janvier. Interdiction de fumer dans les lieux publics, les lieux de travail, les hôpitaux et les écoles La Cour de Cassation interdit Les substituts nicotiniques et les les paquets de cigarettes médicaments sur ordonnance décorés comme des peuvent être remboursés à hauteur La France ratifie pièces à collectionner de 50 euros par an la Cclat Avant octobre Octobre 2004 2004 Juillet 2005 Octobre 2006 Interdiction à la vente des paquets contenant moins de 20 cigarettes Décembre 2006 Février 2007 ITC Vague 1 Interdiction de fumer dans les restaurants, cafés, bars, casinos, hôtels et discothèques Août 2007 Le prix du paquet de 20 cigarettes le plus vendu augmente de 5 euros à 5,30 euros. Janvier 2008 Septembre 2008 ITC Vague 2 Échantillonnage L’enquête ITC France est une étude longitudinale prospective, et les répondants sont régulièrement interrogés par téléphone, à l’aide d’un système de collecte assistée par informatique (Cati). Les échantillons obtenus aléatoirement sont représentatifs des fumeurs et des non-fumeurs adultes résidant en France métropolitaine. Un nombre total de 1 735 fumeurs adultes (18 ans ou plus, ayant fumé plus de 100 cigarettes au cours de leur vie, et ayant fumé au moins une fois au cours des 30 derniers jours) et de 525 non-fumeurs adultes (ces derniers étant issus pour moitié de foyers non-fumeurs, et pour moitié de foyers « mixtes » avec des fumeurs et des non-fumeurs) ont participé à la première vague du projet ITC France. L’enquête a été menée par l’Institut Atoo (basé à Paris) par une procédure de composition aléatoire des numéros de téléphone31. Elle s’est déroulée du 12 décembre 2006 au 2 février 2007. La deuxième vague a été menée par l’Institut de Sondage Lavialle (ISL), et s’est déroulée du 11 septembre 2008 au 15 novembre 2008. L’échantillon final de la deuxième vague comptait 1 704 adultes fumeurs (dont 164 fumeurs ayant arrêté de fumer entre les deux vagues) et 515 adultes non-fumeurs. Au total, 1 645 répondants de la première vague ont pu être recontactés pour la deuxième vague de l’enquête (1 231 fumeurs et 414 non-fumeurs issus pour moitié de foyers non-fumeurs, et pour moitié de foyers « mixtes »). Dans la cohorte de la première vague, 615 individus ont été perdus de vue et ont été remplacés par 574 nouveaux répondants sélectionnés de manière aléatoire (échantillon de remplacement). Le taux de réponse à la deuxième vague était de 71 % pour les fumeurs de la première vague et de 79 % pour les non-fumeurs. Le rapport technique des première et deuxième vagues de l’enquête ITC France fournit de plus amples informations sur le mode d’échantillonnage, la construction des poids de sondage et les taux de coopération et de réponse. Ce rapport est disponible à la page http://www.itcproject.org/projects/france. Caractéristiques de l’échantillon Les tableaux 1 et 2 résument les caractéristiques démographiques de la cohorte des fumeurs et des non-fumeurs de la première vague, des perdus de vue à la deuxième vague et des échantillons de remplacement de la deuxième vague. Voir les tableaux 1 et 2 page 11. La première vague de l’enquête a été menée avant la mise en œuvre en deux temps de l’interdiction de fumer dans les lieux publics. La deuxième vague de l’enquête a débuté huit mois après l’interdiction de fumer dans les lieux de convivialité et dix-neuf mois après l’interdiction de fumer sur les lieux de travail et dans les autres lieux publics. 31. Survey Sampling International, RDD telephone random digit samples, http://surveysampling.com/. Rapport national ITC France (2011) 10 Tableau 1. Caractéristiques démographiques (effectifs, pourcentages pondérés et intervalles de confiance) des fumeurs de la première vague de l’enquête ITC France, des fumeurs perdus de vue à la deuxième vague et de l’échantillon de remplacement de la deuxième vague. Fumeurs de la première vague (n = 1 735) Fumeurs perdus de vue à la deuxième vague (n = 504) Échantillon de remplacement de la deuxième vague (n = 473) N % IC à 95% N % IC à 95% N % IC à 95% Femme 898 44,3 (41,7 ; 47,0) 248 43,0 (38,2 ; 47,9) 260 44,4 (39,1 ; 49,7) Homme 837 55,7 (53,0 ; 58,3) 256 57,0 (52,1 ; 61,8) 213 55,6 (50,3 ; 60,9) 18-24 233 17,5 (15,2 ; 19,7) 82 19,9 (15,7 ; 24,2) 49 17,0 (12,1 ; 21,9) 25-39 645 35,6 (33,1 ; 38,1) 195 36,0 (31,3 ; 40,6) 163 34,9 (29,8 ; 40,0) 40-54 635 32,5 (30,1 ; 35,0) 166 29,9 (25,4 ; 34,5) 190 32,1 (27,4 ; 36,9) 55+ 222 14,4 (12,5 ; 16,3) 61 14,2 (10,5 ; 17,9) 61 16,0 (11,8 ; 20,1) Sexe Âge (années) Revenus (euros par mois) Faibles 502 25,6 (23,4 ; 27,8) 170 30,2 (25,7 ; 34,7) 97 18,9 (14,8 ; 23,0) Modérés 767 44,0 (41,4 ; 46,7) 202 40,4 (35,5 ; 45,3) 226 51,2 (45,8 ; 56,7) Élevés 413 27,0 (24,5 ; 29,4) 107 23,8 (19,4 ; 28,2) 139 27,5 (22,7 ; 32,4) Non précisés 53 3,4 (2,4 ; 4,5) 25 5,6 (3,2 ; 8,0) 11 2,4 (0,8 ; 3,9) Niveau de formation Faible 778 45,5 (42,9 ; 48,2) 242 48,9 (43,9 ; 53,8) 198 43,7 (38,3 ; 49,1) Modéré 612 35,2 (32,6 ; 37,7) 168 32,5 (27,8 ; 37,2) 166 36,0 (30,8 ; 41,2) Élevé 343 19,1 (17,5 ; 21,1) 93 18,4 (14,6 ; 22,1) 92 16,8 (12,9 ; 20,8) 2 0,2 (0,0 ; 0,6) 1 0,3 (0,0 ; 0,9) 17 3,4 (1,6 ; 5,3) Non précisé Tableau 2. Caractéristiques démographiques (effectifs, pourcentages pondérés et intervalles de confiance) des non-fumeurs de la première vague de l’enquête ITC France, des non-fumeurs perdus de vue à la deuxième vague et de l’échantillon de remplacement de la deuxième vague Non-fumeurs de la première vague (n = 525) Non-fumeurs perdus de vue à la deuxième vague (n = 111) Échantillon de remplacement de la deuxième vague (n = 101) N % IC à 95% N % IC à 95% N % IC à 95% Femme 344 55,0 (50,1 ; 59,9) 65 46,4 (36,1 ; 56,7) 59 55,3 (42,6 ; 68,0) Homme 181 45,0 (40,1 ; 49,9) 46 53,6 (43,3 ; 63,9) 42 44,7 (32,0 ; 57,4) 42 9,5 (6,6 ; 12,4) 3 3,3 (0,0 ; 7,7) 12 9,4 (3,7 ; 15,0) Sexe Âge (années) 18-24 25-39 128 22,4 (18,5 ; 26,2) 29 27,2 (17,6 ; 36,9) 27 24,7 (13,6 ; 35,7) 40-54 170 27,0 (22,9 ; 31,2) 25 16,4 (9,0 ; 23,8) 27 23,4 (13,9 ; 33,0) 55+ 185 41,1 (36,2 ; 46,0) 54 53,1 (42,7 ; 63,6) 35 42,5 (29,9 ; 55,2) Revenus (euros par mois) Faibles 138 24,8 (20,7 ; 28,9) 39 32,8 (23,6 ; 41,6) 21 22,1 (11,9 ; 32,2) Modérés 236 43,4 (38,5 ; 48,2) 46 38,4 (27,7 ; 48,9) 44 42,3 (30,5 ; 54,1) Élevés 123 25,6 (21,2 ; 29,9) 17 20,7 (12,0 ; 29,4) 29 26,3 (17,2 ; 35,4) Non précisés 28 6,2 (3,8 ; 8,7) 9 8,1 (2,4 ; 13,8) 7 9,3 (1,6 ; 17,0) Niveau de formation Faible 264 48,9 (44,0 ; 53,7) 68 55,5 (45,7 ; 65,4) 45 50,0 (37,4 ; 62,5) Modéré 159 32,6 (28,0 ; 37,4) 25 26,4 (16,7 ; 36,0) 31 27,0 (15,8 ; 38,3) Élevé 102 18,5 (14,8 ; 22,1) 18 18,1 (9,7 ; 26,4) 25 23,0 (13,2 ; 32,7) 11 Rapport national ITC France (2011) Contenu de l’enquête ITC France Le questionnaire de l’enquête ITC France a été rédigé par une équipe transdisciplinaire d’experts internationaux spécialisés dans la lutte antitabac. La plupart des méthodes d’enquête et la quasi-totalité des questions de l’enquête sont issues des protocoles standardisés qui ont été utilisés dans les enquêtes conduites dans les 22 autres pays ayant déjà participé à ITC. Les questions posées aux fumeurs portaient sur les points suivants : 1. Comportement tabagique et arrêt du tabac. Histoire et fréquence de la consommation de tabac, ainsi que statut tabagique actuel et dépendance, et comportements relatifs à l’arrêt. 2. Connaissances et opinions sur le tabagisme. Connaissances des effets du tabagisme et de la fumée de tabac sur la santé, opinions sur le tabagisme et l’arrêt du tabac, risque perçu et gravité perçue des maladies liées au tabac. 3. P olitiques antitabac. Sensibilisation, impact et opinions pour chacun des domaines de la Cclat visant la réduction de la demande (avertissements sanitaires, taxation/prix, publicité/promotion, législation antitabac, interdiction des mentions « légère/ light »). 4. Autres prédicteurs psychosociaux du comportement tabagique et variables modératrices potentielles (par exemple attitudes, opinions, représentations, auto-efficacité, intentions d’arrêt). 5. Autres variables pouvant être liées au tabagisme (par exemple détresse psychologique, stress, perspective temporelle). 6. D onnées démographiques (par exemple âge, sexe, situation de famille, niveau de formation, profession). Les questions posées aux non-fumeurs étaient similaires, à l’exception des questions portant sur le tabagisme individuel et sur l’arrêt du tabac. Des versions complètes des questionnaires de la première et de la deuxième vagues sont disponibles en français et en anglais sur le site web du projet ITC à l’adresse www.itcproject.org. Contenu du rapport Le rapport national ITC France donne une vue d’ensemble des principaux résultats de la première et de la deuxième vagues de l’enquête ITC France32. Les résultats sont discutés dans le cadre des principaux domaines définis par la Convention cadre de l’OMS pour la lutte antitabac (Cclat). À titre de repères, les résultats obtenus dans les autres pays ITC pour la vague d’enquête la plus récente figurent en regard de ceux concernant la France. Il convient de noter que, sauf indication contraire, les résultats de la deuxième phase de l’enquête sont redressés sur la structure de la population au moment de la deuxième vague. Les « fumeurs » de la deuxième vague comprennent : 1) les fumeurs de la première vague qui ont été recontactés lors de la deuxième vague, 2) les fumeurs de la première vague qui ont cessé de fumer entre les deux vagues et 3) les fumeurs recrutés dans la deuxième vague pour remplacer les fumeurs perdus de vue (échantillon de remplacement). Pour les analyses comparant les résultats de la première vague et ceux de la deuxième vague, seuls sont inclus les échantillons des fumeurs et des non-fumeurs qui ont participé aux deux vagues, et les analyses sont redressées sur la structure de la population au moment de la première vague. Pour les comparaisons internationales (sauf pour les variables qui concernent le comportement tabagique), les fumeurs de la deuxième vague de l’enquête comprennent : 1) ceux qui ont été recrutés dans la première vague et recontactés dans la deuxième vague, 2) les fumeurs de la première vague qui ont cessé de fumer dans la deuxième vague et 3) les fumeurs de l’échantillon de remplacement ; le redressement est effectué sur la structure de la population au moment de la deuxième vague. 32. Un rapport national et un résumé des résultats obtenus lors de la première vague de l’enquête ITC France, ainsi que quelques résultats de la deuxième vague, ont été publiés en février 2009 pour une évaluation de l’interdiction de fumer dans les lieux publics en France. Ces rapports sont disponibles sur http://www.itcproject.org/keyfindi. Rapport national ITC France (2011) 12 « Le second enseignement saillant de cette étude est la perte d’efficacité des avertissements sanitaires textuels sur les paquets de cigarettes. L’obligation récente d’apposer des photos chocs va ainsi dans le bon sens et devrait contribuer à relancer l’efficacité de ces messages sanitaires. » Xavier BERTRAND Ministre du travail, de l’emploi et de la santé RÉSULTATS COMPORTEMENT TABAGIQUE ET COMPORTEMENT RELATIF A L’ARRÊT Selon les résultats de cette enquête, le nombre de cigarettes fumées par jour par les fumeurs quotidiens n’a pour ainsi dire pas changé après l’interdiction de fumer en France dans les lieux publics, sur les lieux de travail et dans les lieux de convivialité ; le nombre moyen de cigarettes fumées quotidiennement apparaît toutefois bas par rapport aux autres pays européens participant à ITC. Après l’interdiction de fumer, 13 % des fumeurs de la première vague ont arrêté de fumer, et près d’un tiers de tous les fumeurs interrogés lors de la deuxième vague envisagent d’arrêter de fumer dans les six mois. L’aide au sevrage apportée aux fumeurs par les médecins et les professionnels de santé continue d’être faible puisque moins d’un tiers des fumeurs ayant consulté un médecin ou un professionnel de santé au cours des six derniers mois ont reçu des conseils pour arrêter de fumer. Les fumeurs sont encore moins nombreux (moins de 10 % de ceux ayant consulté un médecin ou un professionnel de santé au cours des six derniers mois) à avoir reçu une prescription pour un médicament d’aide à l’arrêt du tabac ou à avoir été orientés vers des services d’aide à l’arrêt du tabac. Ces résultats suggèrent la nécessité de renforcer le rôle du médecin traitant concernant l’arrêt du tabac, comme le recommandent les nouvelles lignes directrices de l’article 14 de la Convention cadre de l’OMS pour la lutte antitabac. Consommation quotidienne de cigarettes Lors de la première vague d’enquête, 91 % des fumeurs fumaient tous les jours, 6 % fumaient toutes les semaines, et 2 % fumaient tous les mois. Lors de la deuxième vague, 85 % des fumeurs quotidiens de la première vague continuent à fumer tous les jours ; 2 % ne fument plus que toutes les semaines, et moins de 1 % ne fument plus que tous les mois ; 13 % ont arrêté de fumer. Par ailleurs, 14 % de ceux qui ne fumaient pas tous les jours dans la première vague fument tous les jours dans la deuxième. La consommation quotidienne moyenne de cigarettes n’a pas changé entre la première (13,5) et la deuxième vagues (13,6). Par rapport aux autres pays européens participant à ITC, les fumeurs français enregistrent le plus bas niveau de consommation quotidienne moyenne de cigarettes. Parmi les 19 pays ITC, ce niveau se situe dans le tiers le moins élevé. La consommation quotidienne moyenne de cigarettes est plus élevée chez les hommes (14,8) que chez les femmes (12,2) ; ceci est vrai dans toutes les tranches d’âge. La consommation quotidienne moyenne est la plus élevée dans la tranche d’âge de 40 à 54 ans, les hommes et les femmes consommant en moyenne respectivement 16,5 et 13,7 cigarettes par jour. Tant chez les hommes que chez les femmes, la consommation moyenne de cigarettes est légèrement plus faible parmi les personnes d’un niveau de formation plus élevé. Rapport national ITC France (2011) 14 Type de cigarettes fumées Le type de cigarettes fumées a peu varié entre les deux vagues de l’enquête. Lors de la deuxième vague, 72 % des fumeurs fument uniquement des cigarettes manufacturées (73 % dans la première vague), 13 % fument uniquement des cigarettes de tabac à rouler (12 % dans la première vague), et 15 % fument les deux types de cigarettes (15 % dans la première vague). Ces résultats diffèrent de ceux obtenus au Royaume-Uni et aux Pays-Bas, où la proportion de fumeurs fumant soit uniquement du tabac à rouler, soit des cigarettes manufacturées et du tabac à rouler, est beaucoup plus élevée (respectivement 37 % et 55 %). Raisons de fumer du tabac à rouler La majorité des personnes qui fument du tabac à rouler expliquent leur choix par le coût moins élevé de ce produit. Au total, 91 % des personnes qui fumaient du tabac à rouler dans la première et la deuxième vagues ont déclaré que c’était l’une des raisons de leur choix. La deuxième raison avancée (72 % dans la première vague et 73 % dans la deuxième) est que le tabac à rouler fait diminuer la consommation. Près de la moitié des personnes fumant du tabac à rouler (47 % dans chacune des deux vagues) n’utilisent jamais de filtre avec ce type de cigarettes. Consommation de produits du tabac autres que la cigarette au cours du mois écoulé Moins de 10 % des fumeurs (9 % dans la première vague et 4 % dans la deuxième) déclarent avoir consommé au cours du mois écoulé des produits du tabac autres que les cigarettes ou le tabac à rouler. Parmi les 64 fumeurs ayant déclaré, dans la deuxième vague, avoir consommé d’autres produits au cours du mois écoulé, 19 (36 %) ont fumé des cigares, 9 (13 %) le narguilé, 7 (12 %) des cigarillos, et 1 (1 %) la pipe. Caractéristiques des fumeurs ayant arrêté de fumer lors de la deuxième vague Lors de la deuxième vague, 13 % (n = 164) des fumeurs de la première vague ont arrêté de fumer. La majorité (70 %) de ceux qui ont arrêté de fumer l’ont fait plus de six mois avant la deuxième vague de l’enquête. Au total, 64 % de ceux qui ont arrêté de fumer sont des hommes. Plus de 40 % d’entre eux sont âgés de 25 à 39 ans, 29 % ont entre 40 et 54 ans, 21 % ont 55 ans ou plus et 10 % ont entre 18 et 24 ans. La moitié (50 %) de tous ceux qui ont arrêté de fumer ont un revenu modéré, 32 % ont un revenu élevé, et 16 % ont un faible revenu. Leur niveau de formation est faible dans 39 % des cas, moyen dans 34 % des cas et élevé dans 27 % des cas. Parmi ceux qui ont arrêté, 85 % fumaient auparavant tous les jours. Lors de la première vague, 60 % d’entre eux fumaient 10 cigarettes ou moins par jour, 34 % entre 11 et 20 cigarettes par jour et 6 % entre 21 et 30 cigarettes par jour. Raisons d’envisager d’arrêter de fumer Tout comme dans la première vague, les raisons les plus fréquentes d’envisager d’arrêter de fumer au cours des six derniers mois sont « l’exemple à donner aux enfants » (79 %), « le prix des cigarettes » (63 %) et « l’effet du tabagisme passif sur les non-fumeurs » (55 %). Le souci concernant sa propre santé est une raison d’arrêter de fumer pour 44 % des fumeurs de la deuxième vague contre 48% de ceux de la première. Cette diminution peut s’expliquer par le fait que les fumeurs ayant abandonné le tabac entre les deux vagues étaient particulièrement soucieux de leur santé. 15 Rapport national ITC France (2011) Tableau 3. Caractéristiques démographiques des fumeurs de la première vague de l’enquête ITC France ayant réussi à arrêter de fumer à la deuxième vague, et des fumeurs de la première vague continuant à fumer lors de la deuxième vague. Personnes ayant arrêté de fumer à la Fumeurs de la première vague continuant à deuxième vague (n = 164) fumer lors de la deuxième vague (n = 1 067) N Sexe Femme 73 Homme 91 Âge (années) 18-24 14 25-39 68 40-54 56 55+ 26 Revenus Faibles 28 Modérés 86 Élevés 47 Non précisés 3 Niveau de formation Faible 66 Moyen 54 Élevé 44 Non précisé 0 Statut tabagique lors de la première vague Personnes fumant tous les jours 139 Personnes fumant toutes les semaines 16 Personnes fumant tous les mois 9 Cigarettes fumées par jour à la première vague 0 - 10 100 11 - 20 54 21 - 30 10 30 + 0 % IC à 95% N % IC à 95% 36,2 63,8 (28,1 ; 44,2) (55,8 ; 71,9) 577 490 45,7 54,3 (42,3 ; 49,0) (51,0 ; 57,7) 10,0 40,8 28,7 20,5 (4,5 ; 15,4) (32,3 ; 49,2) (21,1 ; 36,4) (13,0 ; 28,0) 137 382 413 135 18,1 34,7 33,0 14,3 (15,0 ; 21,1) (31,5 ; 37,9) (29,9 ; 36,1) (11,8 ; 16,7) 16,4 50,4 32,2 1,0 (10,2 ; 22,6) (41,7 ; 59,0) (23,8 ; 40,6) (0,0 ; 2,3) 287 501 259 20 23,6 47,4 26,9 2,1 (20,9 ; 26,4) (44,0 ; 50,8) (23,7 ; 30,1) (1,0 ; 3,1) 38,6 34,3 27,0 , (30,2 ; 47,1) (26,0 ; 42,6) (19,3 ; 34,8) , 462 385 219 1 43,6 36,9 19,2 0,2 (40,2 ; 47,0) (33,6 ; 40,3) (16,6 ; 21,8) (0,0 ; 0,7) 85,4 9,2 5,4 (79,5 ; 91,2) (4,6 ; 13,8) (1,5 ; 9,4) 964 73 30 91,6 6,3 2,2 (89,8 ; 93,3) (4,7 ; 7,8) (1,3 ; 3,1) 60,3 33,6 6,3 , (51,6 ; 68,6) (25,4 ; 41,8) (1,9 ; 10,7) , 545 443 62 17 50,1 42,5 5,6 1,8 (46,7 ; 53,6) (39,1 ; 45,9) (4,1 ; 7,0) (0,9 ; 2,7) Recours aux services d’aide à l’arrêt du tabac Lors de la deuxième vague, 58 % des fumeurs ont consulté un médecin ou un professionnel de santé au cours des 6 mois précédents. Parmi ces fumeurs, moins d’un tiers (28 %) ont reçu des conseils pour arrêter de fumer. En ce qui concerne cette proportion, la France se range parmi les derniers des 19 pays ITC. Trois quarts (75 %) des fumeurs ayant reçu des conseils pour arrêter de fumer déclarent que cet avis les a conduits à envisager d’arrêter. Le pourcentage de fumeurs ayant reçu une prescription pour des médicaments d’aide à l’arrêt du tabac ou ayant été orientés vers d’autres programmes ou services est encore faible dans la deuxième vague (moins de 10 % des fumeurs ayant consulté un médecin ou un professionnel de santé). Cependant, le pourcentage de fumeurs ayant reçu une prescription pour des médicaments d’aide à l’arrêt du tabac a légèrement augmenté, passant de 4 % à 7 %. Rapport national ITC France (2011) 16 L’aide au sevrage utilisée par les ex-fumeurs Lors de la deuxième vague, 68 % (n = 110) de ceux qui ont arrêté de fumer ont consulté un médecin ou un professionnel de santé au cours des six mois précédents. Ces ex-fumeurs ont reçu les formes suivantes d’aide au sevrage au cours de la consultation : • 47 % ont reçu un encouragement ou un soutien sur le sevrage tabagique (63 % d’entre eux disent que cela leur a été utile) ; • 14 % ont reçu une ordonnance pour des médicaments d’aide à l’arrêt du tabac ; Moins d’un tiers des fumeurs ayant consulté un médecin ou un professionnel de santé dans les six derniers mois ont reçu des conseils pour arrêter de fumer. • 13 % ont reçu une brochure sur la manière de ne pas recommencer à fumer (69 % disent que cela leur a été utile) ; • 10 % ont reçu une aide supplémentaire ou ont été orientés vers un autre service pour les aider à ne pas reprendre (100 % disent que cela leur a été utile)33. Intentions d’arrêt Lors de la deuxième vague, 67 % des fumeurs ont déclaré qu’ils envisageaient d’arrêter de fumer ; 30 % ont l’intention de le faire dans les six mois à venir ou plus tôt. Un tiers (33 %) n’envisage pas actuellement d’arrêter de fumer. Les fumeurs envisageant d’arrêter de fumer au cours du mois suivant sont moins nombreux dans la deuxième vague (6 %) que dans la première (12 %)34. Lors de la deuxième vague, plus de la moitié (57 %) des fumeurs considèrent qu’ils aiment trop fumer pour arrêter de fumer. Ce résultat est comparable à celui observé aux Pays-Bas, où 53 % des fumeurs sont d’accord avec cette affirmation, mais beaucoup plus faible qu’en Allemagne, où près des trois quarts (73 %) des fumeurs sont d’accord avec le fait qu’ils aiment trop fumer pour abandonner le tabac. Opinions sur l’arrêt du tabac Lors de la deuxième vague, 7 % des fumeurs sont « extrêmement convaincus » et 18 % « très convaincus » que, s’ils décidaient d’arrêter totalement de fumer au cours des six prochains mois, ils y réussiraient. Inversement, 44 % en sont « modérément convaincus », et près d’un tiers (31 %) ne sont « pas du tout convaincus » ou seulement « un peu convaincus » qu’ils parviendraient à arrêter de fumer. Soutien du gouvernement pour l’aide à l’arrêt 33. Les pourcentages doivent être interprétés avec prudence car le nombre d’ex-fumeurs est très faible. 34. Pour cette analyse, les ex-fumeurs ont été retirés de l’échantillon de la première vague. 17 Plus de la moitié des fumeurs et de ceux qui ont arrêté de fumer lors de la deuxième vague (60 %) pensent que le gouvernement devrait agir davantage pour aider les fumeurs à abandonner le tabac, résultat comparable à celui observé dans la première vague (63 %). La majorité des fumeurs et des ex-fumeurs (79 %) pensent que le gouvernement devrait fournir gratuitement des médicaments d’aide à l’arrêt du tabac (81 % dans la première vague). Rapport national ITC France (2011) ÉTIQUETAGE DES PRODUITS Les résultats de la deuxième vague de l’enquête indiquent que les avertissements sanitaires sur les paquets de cigarettes constituent le support le plus courant pour informer les fumeurs et les ex-fumeurs sur les risques liés au tabagisme ou sur l’arrêt du tabac. Toutefois, les indicateurs d’efficacité des avertissements suggèrent que les avertissements graphiques qui sont désormais utilisés en France sont opportuns car une plus faible proportion de fumeurs ont remarqué les avertissements ou les ont lus ou examinés attentivement lors de la deuxième vague. Près de la moitié des fumeurs pensent que les mises en garde devraient contenir plus d’informations. Les avertissements sanitaires comme moyen d’information Lors de la deuxième vague, 85 % des fumeurs ont remarqué, au cours des six derniers mois, des informations ou des messages traitant des risques liés au tabagisme ou encourageant l’arrêt du tabac. Parmi une liste suggérant dix moyens d’information, les paquets de cigarettes sont le support d’information sur les dangers du tabagisme le plus fréquemment mentionné. Ainsi, 86 % des fumeurs qui ont remarqué des informations ou des messages sur les risques du tabagisme ou incitant à arrêter de fumer ont déclaré en avoir vus sur des paquets de cigarettes. Sensibilité aux avertissements sanitaires Les résultats de la deuxième vague de l’enquête suggèrent que l’impact des avertissements français exclusivement textuels sur les fumeurs a diminué entre les deux vagues d’enquête. Lors de la première vague, plus des deux tiers (69 %) des fumeurs déclaraient avoir remarqué « souvent » ou « très souvent » les avertissements. Ils ne sont plus que 55 % à répondre de la même façon dans la deuxième vague. Parmi les fumeurs qui avaient remarqué « souvent » ou « très souvent » les avertissements dans la première vague, plus d’un tiers (37 %) les ont remarqués moins souvent dans la deuxième vague. En outre, lors de la première vague, 35 % des fumeurs avaient lu les avertissements ou les avaient examinés attentivement au cours du mois écoulé. Ce pourcentage n’est plus que de 27 % dans la deuxième vague. Rapport national ITC France (2011) 18 Impact des avertissements sanitaires Les résultats de la deuxième vague de l’enquête ITC soulignent l’opportunité d’apposer des avertissements graphiques, rendus obligatoires en avril 2011 sur les paquets de cigarettes. D’autres indicateurs d’efficacité des avertissements montrent une légère diminution de leur efficacité ou, au mieux, une stabilité de leur efficacité. Lors de la première vague, 80 % des fumeurs déclaraient que les avertissements leur rappelaient les risques associés au tabagisme. Ce chiffre n’a pas changé dans la deuxième vague (77 %) pour le même groupe de fumeurs. Lors de la première vague, à la question de savoir si les avertissements augmentaient leurs chances d’arrêter de fumer, 28 % des fumeurs ont répondu par l’affirmative. Pour le même groupe de fumeurs lors de la deuxième vague, ce chiffre a diminué à 24 %. Lors de la première vague, 21 % des fumeurs ont déclaré qu’au moins une fois au cours du mois écoulé, les avertissements les avaient conduits à ne pas prendre ou rouler une cigarette alors qu’ils étaient sur le point de le faire. Pour le même groupe de fumeurs lors de la deuxième vague, ce pourcentage est resté inchangé. Le ministre français de la santé a reconnu que les avertissements graphiques étaient une composante efficace dans une politique globale de lutte antitabac, déjà mise en œuvre en Belgique, au RoyaumeUni, en Roumanie, en Suisse, ainsi que dans au moins trente autres pays dans le monde. Les nouveaux avertissements sont obligatoires à partir du 20 avril 2011 sur les paquets de cigarettes et à partir d’avril 2012 sur les autres produits du tabac. Les résultats de la deuxième vague de l’enquête ITC soulignent en effet l’opportunité d’apposer des avertissements graphiques ; cette initiative pourrait bénéficier d’un soutien important du public, car près de la moitié (46 %) des fumeurs français et 63 % des nonfumeurs pensent qu’il devrait y avoir plus d’informations concernant la santé sur les paquets de cigarettes. Les résultats des enquêtes ITC dans les autres pays apportent la preuve que les avertissements graphiques, ayant plus de poids sur le plan émotionnel, provoquent des réactions plus intenses, qu’ils stimulent davantage l’arrêt du tabac et que leur effet persiste plus longtemps que celui des avertissements exclusivement textuels35. Près de la moitié (46 %) des fumeurs français et 63 % des non-fumeurs pensent qu’il devrait y avoir plus d’informations concernant la santé sur les paquets de cigarettes. 35. Borland, R., Wilson, N., Fong, G. T. et al. (2009). Impact of graphic and text warnings on cigarette packs: findings from four countries over five years. Tob Control, 18, 358-364. 19 Rapport national ITC France (2011) PROTECTION CONTRE L’EXPOSITION À LA FUMÉE DU TABAC La France a mis en place une interdiction totale de fumer dans les lieux publics en deux phases. La première phase a eu lieu en février 2007 sur les lieux de travail et dans les centres commerciaux, les aéroports, les gares, les hôpitaux et les écoles. En janvier 2008, l’interdiction a été étendue aux lieux de convivialité (cafés, bars, restaurants, hôtels, casinos et discothèques). Le plan du projet ITC France a été conçu pour évaluer ces interdictions de fumer parmi les autres initiatives antitabac. La première vague de l’enquête ITC France a été lancée avant ces interdictions (décembre 2006 - février 2007), et la deuxième vague après leur mise en place, environ huit mois après l’interdiction de fumer dans les lieux de convivialité et environ dix-huit mois après l’interdiction de fumer sur les lieux de travail et dans les lieux publics. Les résultats de la première et de la deuxième vagues de l’enquête ITC France montrent sans conteste que l’interdiction de fumer est un réel succès. Les lois antitabac ont réduit de manière spectaculaire le tabagisme sur les lieux de travail, dans les cafés, dans les bars et dans les restaurants. Le soutien en faveur de l’interdiction de fumer dans ces lieux s’est amplifié parmi les fumeurs et les non-fumeurs. Les lois antitabac ont aidé certains fumeurs à arrêter de fumer mais surtout à réduire leur consommation de tabac. Le pourcentage de lieux de travail où l’interdiction de fumer est totale a fortement augmenté depuis la mise en place de la politique pour des lieux de travail non-fumeurs. De plus, le pourcentage de répondants dont le domicile est non-fumeur a augmenté depuis la mise en place de l’interdiction. Tabagisme sur les lieux de travail Lors de la première vague, il existait une interdiction totale de fumer sur le lieu de travail pour 48 % des fumeurs et 55 % des non-fumeurs employés à l’extérieur de chez eux36. Dans la deuxième vague, 17 à 19 mois après la mise en place de l’interdiction de fumer sur le lieu de travail, 80 % des fumeurs et 84 % des non-fumeurs déclarent que leur lieu de travail est totalement non-fumeur. Le nombre de répondants dont le lieu de travail n’impose pas de restrictions aux fumeurs ou ne leur impose que des restrictions partielles est devenu moins important après l’interdiction. Lors de la première vague, parmi les personnes employées à l’extérieur de chez elles, 37 % des fumeurs et 31 % des non-fumeurs disposaient d’une zone fumeur fermée sur leur lieu de travail. Dans la deuxième vague, ce pourcentage a diminué ; il est de 13 % pour les fumeurs et de 11 % pour les non-fumeurs. De même, la proportion de fumeurs dont le lieu de travail n’impose pas de restrictions aux fumeurs est passée de 11 % lors de la première vague à 4 % lors de la deuxième. Tabagisme dans les lieux de convivialité Lors de la première vague, des gens fumaient dans pratiquement tous les cafés, pubs et bars ; 97 % des fumeurs et 93 % des non-fumeurs avaient remarqué la présence de fumeurs à l’intérieur de ces établissements lors de leur dernière visite. Lors de la deuxième vague, 8 à 11 mois après l’interdiction, il est devenu rare que des gens fument dans ces établissements ; seulement 4 % des fumeurs et 5 % des non-fumeurs ont signalé que des gens fumaient lors de leur dernière visite. Ces résultats sont similaires pour les restaurants, avec 71 % des fumeurs et 57 % des non-fumeurs qui déclaraient avant l’interdiction avoir vu des gens fumer lors de leur dernière visite, alors que ces chiffres sont tombés respectivement à 2 % et à 3 % après l’interdiction. En comparant le tabagisme dans les pubs et les bars après l’interdiction avec la situation des autres pays ITC européens, il existe des preuves supplémentaires du succès de la mise en œuvre de l’interdiction ; en effet, environ un fumeur sur trois aux Pays-Bas et un sur deux en Allemagne ont remarqué des fumeurs dans les pubs et les bars lors de leur dernière visite. Fig 18. Pourcentage de fumeurs ayant remarqué la présence de fumeurs dans les cafés, les pubs et les bars lors de leur dernière visite, avant et après l’interdiction de fumer dans les lieux de convivialité en Allemagne, aux Pays-Bas, en Irlande et en France La majorité des répondants déclarent que les politiques antitabac interdisant de fumer à l’intérieur des lieux de convivialité sont bien appliquées : 95 % des fumeurs et 85 % des non-fumeurs déclarent en effet que l’interdiction de fumer est « totalement » appliquée dans les cafés et bars qu’ils fréquentent, et 98 % des fumeurs et 92 % des non-fumeurs déclarent qu’elle est « totalement » appliquée dans les restaurants qu’ils fréquentent37. 36. 77 % de la totalité de l’échantillon de fumeurs et 50 % de la totalité de l’échantillon de non-fumeurs sont employés à l’extérieur de chez eux. 37. Un récent rapport de DNF (Droits des Non-Fumeurs) intitulé « Le tabac en France entre 2006 et 2009 » attire l’attention sur la prolifération du tabagisme sur les terrasses des cafés. Une application stricte de l’interdiction de fumer à l’intérieur pourrait expliquer l’augmentation du nombre de terrasses entre 2007 et 2009 (passant de 30 000 à 45 000). Rapport national ITC France (2011) 20 Soutien en faveur de l’interdiction de fumer dans les lieux de convivialité En même temps que l’interdiction de fumer a entraîné une diminution spectaculaire du tabagisme dans les lieux publics, le soutien en faveur de l’interdiction a augmenté parmi les fumeurs et les non-fumeurs. Le soutien en faveur de l’interdiction de fumer dans les cafés, dans les bars et dans les pubs s’est amplifié, passant de 28 % avant l’interdiction à 60 % après parmi les fumeurs. Le soutien en faveur de l’interdiction de fumer dans les restaurants s’est également accru, passant de 51 % à 79 % parmi les fumeurs. Cette augmentation du soutien des fumeurs et des non-fumeurs en faveur de l’interdiction rejoint les résultats des enquêtes menées dans les autres pays ITC européens. Tabagisme à domicile L’enquête ITC France montre que le pourcentage de fumeurs et de nonfumeurs qui n’autorisent pas le tabagisme à domicile a augmenté après la mise en place des lois antitabac. Lors de la première vague, 39 % des non-fumeurs et 23 % des fumeurs n’autorisaient pas le tabagisme à domicile. Lors de la deuxième vague, 50 % des non-fumeurs et 26 % des fumeurs déclarent ne pas autoriser le tabagisme à domicile38. Parmi les fumeurs autorisant le tabagisme à leur domicile lors de la première vague, 15 % l’ont interdit totalement lors de la deuxième. Parmi les non-fumeurs, 26 % de ceux qui autorisaient le tabagisme à domicile lors de la première vague l’ont interdit totalement lors de la deuxième. Ceci montre qu’il peut être plus difficile pour les fumeurs que pour les non-fumeurs de rendre leur foyer tout à fait non-fumeur. Les enquêtes ITC menées aux Pays-Bas, en Allemagne et en Irlande ont également révélé des augmentations du pourcentage de fumeurs et de nonfumeurs qui déclarent ne pas autoriser le tabagisme à domicile suite à la mise en place des lois antitabac. Lors de la deuxième vague, 22 % des fumeurs, 28 % des non-fumeurs et 28 % des ex-fumeurs qui autorisent le tabagisme à domicile déclarent qu’ils prévoient de rendre leur foyer totalement non-fumeur au cours de l’année suivante. Parmi les fumeurs qui continuent à fumer à domicile lors de la deuxième vague, 24 % déclarent qu’ils fument moins de cigarettes à l’intérieur de leur logement, 68 % qu’ils en fument autant, et 8 % qu’ils fument plus de cigarettes à l’intérieur de leur logement. Le décret qui fixe les conditions de l’interdiction de fumer en France est donc associé non seulement à des réductions spectaculaires du tabagisme dans les lieux publics, mais aussi à une légère réduction du tabagisme à domicile. Ces résultats sont en phase avec les enquêtes ITC menées en Écosse et en Irlande qui ont révélé une diminution du tabagisme à domicile à l’issue de l’interdiction de fumer39, 40, 41. Cependant, cela ne signifie pas un lien de cause à effet car cette évolution fait partie du processus à long terme de dénormalisation du tabac. 38. Les chiffres concernent les personnes continuant à fumer lors de la deuxième vague. 39. Fong, G.T., Hyland, A., Borland, R., Hammond, D. et al. (2006) Reductions in tobacco smoke pollution and increases in support for smoke-free public places following the implementation of comprehensive smoke-free workplace legislation in the Republic of Ireland: findings from the ITC Ireland/UK Survey. Tob Control, 15, iii51-iii58. 40. Hyland, A., Higbee, C., Hassan, L., Fong, G.T. et al. (2007). Does smoke-free Ireland have more smoking inside the home and less in pubs than in the United Kingdom? Findings from the international tobacco control policy evaluation project. Euro J Public Health, 18, 1, 63-65. 41. Hyland, A., Hassan, L.M., Higbee, C., Boudreau, C. et al. (2009). The impact of smokefree legislation in Scotland: results from the Scottish ITC Scotland/UK longitudinal surveys. Euro J Public Health, 19, 2, 198-205. 42. Les pourcentages doivent être interprétés avec prudence car le nombre d’ex-fumeurs est très faible. 43. Les ventes globales de tabac ont légèrement diminué entre 2007 et 2008. 44. Hitchman, S.C., Fong, G.T., Zanna, M.P., Hyland, A., and Bansal-Travers, M. (2010). Support and correlates of support for banning smoking in cars with children: findings from the ITC Four Country Survey. Eur J Public Health Jul 14 (Epub ahead of print). 21 Rapport national ITC France (2011) Association entre l’interdiction de fumer et l’arrêt du tabac La deuxième vague de l’enquête montre que 13 % (n = 164) des fumeurs de la première vague recontactés à la deuxième phase (n = 1 231) ont arrêté de fumer. Selon les déclarations des fumeurs, les lois antitabac ont eu une certaine influence car elles les ont aidés à arrêter de fumer, ou à fumer moins, et à ne pas recommencer à fumer. Parmi les 164 fumeurs ayant arrêté de fumer entre les deux vagues : • 19 (16 % des personnes employées à l’extérieur de chez elles) déclarent que l’interdiction de fumer sur les lieux de travail et dans les lieux publics, entrée en vigueur en 2007, est l’une des raisons pour lesquelles ils ont arrêté de fumer ; • 55 (46 % des personnes employées à l’extérieur de chez elles) déclarent que l’interdiction de fumer sur les lieux de travail et dans les lieux publics les a aidés à ne pas recommencer à fumer ; • 24 (15 %) déclarent que l’interdiction de fumer dans les cafés, dans les restaurants et dans les bars, entrée en vigueur en 2008, est l’une des raisons pour lesquelles ils ont arrêté de fumer ; • 71 (43 %) déclarent que l’interdiction de fumer dans les lieux de convivialité les a aidés à ne pas recommencer à fumer42. Parmi les 1 067 fumeurs recontactés pour la deuxième vague : •3 18 (40 % des fumeurs employés à l’extérieur de chez eux) déclarent que l’interdiction de fumer sur les lieux de travail et dans les lieux publics, entrée en vigueur en 2007, les a fait fumer moins ; •2 53 (24 %) déclarent que l’interdiction de fumer dans les cafés, dans les restaurants et dans les bars, entrée en vigueur en 2008, les a fait fumer moins43; • 1 31 (13 %) déclarent qu’il est plus probable qu’ils arrêtent de fumer maintenant en raison de l’interdiction de fumer dans les lieux de convivialité. Tabagisme dans les lieux de convivialité déclaré par l’enquêté Depuis l’interdiction de fumer dans les lieux de convivialité, entrée en vigueur en 2008, moins de fumeurs déclarent avoir fumé lors de leur dernière visite dans ces établissements, que ce soit à l’intérieur ou à l’extérieur. Parmi les fumeurs recontactés au cours de la deuxième vague et qui se sont rendus dans un bar au cours des six mois précédant chacune des deux vagues, 87 % y avaient fumé lors de leur dernière visite (à l’intérieur ou à l’extérieur) avant l’interdiction. Après l’interdiction, ce pourcentage a diminué pour atteindre 76 %, et la majorité d’entre eux n’ont fumé qu’à l’extérieur. De même, le tabagisme dans les restaurants a diminué, passant de 69 % des fumeurs avant l’interdiction à 59 % des fumeurs après l’interdiction, et la majorité d’entre eux ont fumé uniquement à l’extérieur à la deuxième vague. Soutien en faveur d’une interdiction de fumer dans les zones extérieures des restaurants Lors de la deuxième vague, il a été demandé à tous les répondants si la consommation de tabac devrait être autorisée dans toutes les zones extérieures des restaurants où l’on peut être servi, dans des zones spéciales type « terrasses réservées fumeurs », ou être totalement interdite dans les zones extérieures des restaurants. Un quart (25 %) des non-fumeurs, 17 % des ex-fumeurs et 13 % des fumeurs se déclarent en faveur d’une interdiction complète dans toutes les zones extérieures. Dans l’ensemble des répondants, le soutien en faveur de zones spéciales, telles que des terrasses fumeurs, est nettement plus important que celui en faveur d’une interdiction totale du tabagisme dans les zones de repas extérieures. Plus de la moitié des fumeurs (63 %), des non-fumeurs (66 %) et des ex-fumeurs (57 %) sont en faveur de zones fumeurs extérieures. L’absence de restriction sur le tabagisme dans les zones de repas extérieures reçoit le soutien de 25 % des fumeurs, de 27 % des ex-fumeurs et de 9 % des non-fumeurs. Soutien en faveur d’une interdiction de fumer en voiture en présence d’enfants Fumer en voiture engendre potentiellement une exposition élevée au tabagisme passif. Lors de la deuxième vague, il a été demandé à tous les répondants s’ils étaient favorables à une interdiction totale du tabagisme en voiture en présence d’enfants. La majorité des répondants « soutiennent fortement » une telle interdiction (72 % des fumeurs, 79 % des non-fumeurs et 75 % des personnes qui ont arrêté de fumer). En outre, 17 % des fumeurs, 11 % des non-fumeurs et 14 % des ex-fumeurs « soutiennent plutôt » cette interdiction. L’opposition à l’interdiction est faible, avec seulement 9 % des répondants à la deuxième vague de l’enquête qui « s’opposent fortement » et 5 % qui « s’opposent plutôt» à une interdiction. Les enquêtes ITC menées dans les autres pays ont également révélé un large soutien en faveur d’une interdiction de fumer en voiture en présence d’enfants44. Par exemple, 96 % des fumeurs néerlandais et 92 % des fumeurs allemands soutiennent une telle interdiction. En revanche, seuls 76 % des fumeurs britanniques déclarent qu’ils seraient en faveur d’une loi interdisant de fumer en voiture en présence d’enfants. PUBLICITÉ ET PROMOTION L’interdiction totale de publicité en faveur du tabac est en vigueur en France depuis 1992 ; elle ne concerne cependant ni les publications destinées aux professionnels du tabac, ni le petit affichage dans les bureaux de tabac, ni les retransmissions en direct d’événements sportifs se déroulant dans des pays où la publicité pour le tabac est légale. Le Plan cancer 2009-2013 français préconise d’interdire la publicité sur les lieux de vente et lors des retransmissions sportives à la télévision. L’enquête ITC France mesure les niveaux de sensibilisation aux activités de publicité et de promotion en faveur du tabac parmi les fumeurs et les non-fumeurs. Les résultats de l’enquête indiquent que, malgré l’interdiction totale, 14 % des fumeurs et 16 % des non-fumeurs remarquent fréquemment de la publicité ou de la promotion en faveur du tabagisme. Le sponsoring d’événements sportifs par l’industrie du tabac continue car 19 % des fumeurs ont vu ou entendu parler de cette forme de publicité au cours des six mois précédant la deuxième vague de l’enquête. Ceci souligne la nécessité d’étendre les restrictions relatives à la publicité et à la promotion aux événements sportifs internationaux télévisés. Publicité et sponsoring en faveur du tabac Lors de la deuxième vague, 14 % des fumeurs et 16 % des non-fumeurs ont souvent remarqué des éléments faisant la promotion du tabagisme au cours des six derniers mois45. Ces pourcentages sont légèrement plus faibles qu’en Allemagne et aux PaysBas, où 18 % des fumeurs ont remarqué des éléments faisant la promotion du tabac, mais sont deux fois plus élevés qu’au Royaume-Uni (7 %), où une interdiction totale de la publicité et de la promotion en faveur du tabac est en place depuis 2003. Parmi les fumeurs qui ont été interrogés lors des deux vagues, le pourcentage de ceux ayant souvent remarqué des éléments faisant la promotion du tabagisme a diminué de 20 % à 13 %, tandis que, parmi les non-fumeurs, le pourcentage a diminué de 26 % à 16 %46. Lors de la première et de la deuxième vagues, il a été demandé aux personnes interrogées si elles avaient vu ou entendu parler d’événements sportifs, musicaux, théâtraux, artistiques ou de mode sponsorisés par ou associés à des marques de cigarettes ou des fabricants de tabac. Lors de la deuxième vague, la promotion du tabac par le biais d’événements sportifs est restée répandue et n’a que légèrement diminué, puisque 19 % des fumeurs et 21 % des non-fumeurs interrogés au cours des deux vagues ont signalé lors de la deuxième vague avoir vu ou entendu parler de tels événements au cours des six mois précédents. Tout comme dans la première vague, la publicité et la promotion du tabac par le biais d’événements artistiques est moins répandue ; 4 % des fumeurs et 6 % des non-fumeurs interrogés dans les deux vagues ont vu ou entendu parler d’un événement musical, théâtral, artistique ou de mode sponsorisé par ou associé à des marques de cigarettes ou des fabricants de tabac au cours des six derniers mois. Ces résultats suggèrent que, malgré l’interdiction totale de publicité, des fumeurs et des non-fumeurs continuent de voir ou d’entendre parler de publicité et de promotion en faveur des produits du tabac. Il serait donc opportun d’étendre l’interdiction de la publicité pour le tabac aux événements sportifs télévisés se déroulant dans les pays où elle est actuellement permise. 45. Il ne s’agit pas nécessairement de publicité, mais de tout ce qui incite à la consommation de tabac. 46. La question a été révisée pour la deuxième vague : « faisant la promotion du tabagisme » est devenu « incitant à la consommation de tabac ». Ceci peut expliquer la différence entre les deux vagues. 23 Rapport national ITC France (2011) PRIX ET TAXATION En août 2007, le prix du paquet de vingt cigarettes le plus vendu a augmenté de 6 % (passant de 5 euros à 5,30 euros), et le prix du tabac à rouler a augmenté de 0,50 euro. La première et la deuxième vagues de l’enquête ITC permettent de mesurer l’effet de cette augmentation par le biais de questions portant sur la perception des fumeurs quant à l’argent dépensé pour du tabac et sur l’influence du prix du tabac sur les décisions d’achat et sur les intentions d’arrêt. Les résultats suggèrent que la légère augmentation a eu un impact minime sur les attitudes des fumeurs, sur leur motivation à abandonner le tabac et sur leurs perceptions concernant le coût du tabagisme. L’augmentation du prix des cigarettes en France entre 2003 et 2004 confirme qu’une augmentation d’au moins 10 % est nécessaire pour que la diminution des ventes de cigarettes soit significative. Achats de cigarettes ou de tabac La majorité des fumeurs français (76 %) ont fait leur dernier achat de cigarettes ou de tabac dans un bureau de tabac ou un bar-tabac, 17 % les ont achetés hors de France, mais dans l’UE, 2 % hors de l’UE, et 2 % dans des boutiques hors taxe. Moins de 1 % des fumeurs ont fait leur dernier achat de cigarettes ou de tabac via Internet. Au cours des six derniers mois, 44 % des fumeurs ont acheté des cigarettes hors de France, mais dans l’UE ; 14 % en ont achetées hors de l’UE ; 3 % en ont achetées chez un vendeur indépendant, et moins de 1 % en ont achetées via Internet. Le prix comme motif d’arrêter de fumer Lors de la première vague, le prix était une raison d’abandonner le tabac pour 62 % des fumeurs. Il n’y a pour ainsi dire pas eu de changement lors de la deuxième vague (63 %), et, dans une liste suggérant des raisons d’arrêter de fumer, le prix est mentionné en deuxième lieu (donner l’exemple aux enfants est la première raison citée, 79 %). Dans plus de la moitié de 19 pays où a eu lieu une enquête ITC, le pourcentage de fumeurs déclarant que le prix est une raison d’arrêter de fumer apparaît plus élevé. Penser à l’argent dépensé pour les cigarettes Lors de la première vague, 58 % des fumeurs avaient souvent pensé à l’argent dépensé dans les cigarettes au cours du dernier mois. Lors de la deuxième vague, ce chiffre est resté relativement stable (54 %). Environ un tiers des fumeurs, tant de la première vague (33 %) que de la deuxième (31 %), signalent avoir dépensé au cours des six derniers mois de l’argent pour des cigarettes sachant qu’il aurait mieux valu le dépenser pour des choses essentielles à leur foyer, comme de la nourriture. Seulement un faible pourcentage de fumeurs ayant répondu « non » à la première vague ont répondu « oui » à la seconde (15 %). Prix du tabac à rouler La majorité des personnes qui fument du tabac à rouler expliquent leur choix par le coût moins élevé de ce produit. Au total, 91 % des personnes qui fumaient du tabac à rouler lors de la première et de la deuxième vagues déclarent que c’est une des principales raisons de fumer cette forme de tabac. Ceci suggère que l’écart de prix entre le tabac à rouler et les cigarettes manufacturées pourrait être un facteur encourageant la poursuite de la consommation de tabac plutôt que son abandon. L’article 6 de la Cclat appelle à une harmonisation des politiques de taxation du tabac, de manière à ce que l’augmentation des taxes n’entraîne pas simplement un changement dans la forme du tabac consommé, mais plutôt la diminution de la prévalence du tabagisme. Les fabricants de tabac ont mis en place une augmentation de 0,60 euro du prix du tabac à rouler en janvier 2009. La troisième vague de l’enquête ITC France évaluera si cette augmentation aura eu ou non un effet sur les attitudes et les comportements des fumeurs. ÉDUCATION, COMMUNICATION ET SENSIBILISATION DU PUBLIC L’article 12 de la Convention cadre de l’OMS pour la lutte antitabac (Cclat) requiert des gouvernements qu’ils garantissent le niveau le plus élevé de sensibilisation du public sur les questions ayant trait à la lutte antitabac en proposant un large accès aux informations sur les risques sanitaires de la consommation de tabac et de l’exposition à la fumée de tabac, ainsi que sur les avantages de l’arrêt du tabac. L’enquête ITC France mesure les connaissances des fumeurs sur les risques du tabagisme pour la santé et sur les dangers associés au tabagisme passif ; elle identifie les supports utilisés pour faire passer ces informations, le niveau de sensibilisation du public aux campagnes d’éducation sur ces questions, ainsi que leur efficacité perçue. Les résultats indiquent que la majorité des fumeurs français sont conscients de la variété des risques du tabagisme pour la santé (sauf en ce qui concerne la cécité liée au tabagisme) et des dangers associés au tabagisme passif. Le paquet de cigarettes est le moyen d’information sur les dangers du tabagisme ou encourageant à arrêter de fumer le plus fréquemment mentionné par les fumeurs. C’est la preuve de l’importance des avertissements comme outils de communication des risques, la mise en place d’avertissements graphiques de grandes dimensions pourrait avoir un effet important sur les fumeurs. Connaissances sur les dangers du tabagisme L’enquête ITC France mesure le niveau de sensibilisation des fumeurs et des non-fumeurs aux divers effets du tabagisme sur la santé. Les fumeurs français sont très conscients des dangers du tabagisme et du tabagisme passif. Lors de la deuxième vague, presque tous les fumeurs se révèlent conscients que le tabagisme peut causer le cancer du poumon (99 %), les cancers de la bouche et de la gorge (99 %) et des maladies du cœur (97 %). Ils sont également très bien conscients des effets du tabagisme passif auquel les enfants et les autres non-fumeurs sont exposés ; 95 % savent que le tabagisme passif peut causer de l’asthme chez l’enfant, et 94 %, que le tabagisme passif peut causer le cancer du poumon chez les non-fumeurs. Ils sont moins conscients que le tabagisme peut causer un accident vasculaire cérébral (86 % des fumeurs le savent) ou peut causer l’impuissance chez l’homme (86 % des fumeurs le savent). En revanche, le lien entre tabagisme et cécité est nettement méconnu ; 72 % des fumeurs ne sont pas conscients d’un tel effet du tabagisme sur la santé. Perceptions des risques pour la santé Lors de la deuxième vague, près d’un tiers des fumeurs et de ceux ayant arrêté de fumer entre les deux vagues (32 %) pensent que le tabagisme n’a « pas du tout » détérioré leur santé. Ce pourcentage est comparable à celui obtenu chez les fumeurs aux Pays-Bas (33 %) et en Allemagne (32 %), mais est nettement plus élevé qu’au Royaume-Uni, où 19 % des fumeurs ont déclaré que le tabagisme n’avait pas causé de dommages à leur santé. Cependant, plus de la moitié (54 %) des fumeurs se disent « plutôt soucieux » du fait que le tabagisme puisse détériorer leur santé à l’avenir, et 16 % en sont « très soucieux ». Lors de la deuxième vague, près de la moitié (48 %) des fumeurs ont, au cours du dernier mois, souvent pensé aux dommages que le tabagisme pourrait leur causer. Environ un tiers (29 %) des fumeurs y ont parfois pensé au cours du dernier mois. Les fumeurs pensent moins souvent aux dommages que leur tabagisme pourrait faire aux autres. Un tiers (34 %) des fumeurs pensent souvent aux dommages causés aux autres, et 23 % y pensent parfois. Tandis que la majorité (82 %) des fumeurs pensent que les fumeurs ont un risque élevé de développer un cancer du poumon, ils sont moins nombreux (58 %) à penser que, s’ils continuent à fumer la même quantité qu’actuellement, ils ont un risque élevé d’en développer un. Un pourcentage plus élevé d’ex-fumeurs (90 %) et de non-fumeurs (91 %) ont répondu que les fumeurs ont un risque élevé de développer un cancer du poumon. La majorité des fumeurs n’ont pas le sentiment que le tabagisme ait diminué leur qualité de vie. Pour la moitié des fumeurs (50 %), le tabagisme n’a pas du tout diminué leur qualité de vie. Pour 35 % des fumeurs, le tabagisme a « un peu » réduit leur qualité de vie. Enfin, 16% des fumeurs considèrent que le tabagisme a nettement diminué leur qualité de vie. 25 Rapport national ITC France (2011) Cependant, plus de la moitié (52 %) sont « plutôt » inquiets que le tabagisme réduise leur qualité de vie dans le futur, et 13 % « très » inquiets ; 15 % ne sont « pas du tout » inquiets, et 20 % « plutôt pas » inquiets. Informations sur les dangers du tabagisme et sur les avantages de l’arrêt du tabac Dans la deuxième vague, près du tiers (31 %) des fumeurs et des ex-fumeurs ont, au cours des six derniers mois, souvent remarqué des informations ou des messages traitant des dangers du tabagisme ou encourageant à arrêter de fumer. Plus de la moitié des fumeurs (54 %) n’en ont remarqués que « parfois » ou « rarement ». Parmi les fumeurs qui ont remarqué ces informations au cours des six derniers mois, les paquets de cigarettes sont le support d’information le plus fréquemment cité (86 %), suivi par la télévision (79 %), les affiches/ panneaux d’affichage et les journaux/magazines (57 %). Parmi les exfumeurs, la télévision est le support d’information le plus fréquemment cité (87 %), suivi par les paquets de cigarettes (80 %) et les affiches/panneaux d’affichage (58 %). Voir la figure 12 de la section « Étiquetage des produits ». Plus des trois-quarts des fumeurs et des ex-fumeurs qui ont remarqué ces informations trouvent que ces informations sont pertinentes (76 %) et proviennent d’une source crédible (78 %). Cependant, une plus faible proportion d’entre eux (54 %) les jugent convaincantes. Informations sur les dangers du tabagisme passif Dans la deuxième vague, 22 % des fumeurs et des ex-fumeurs disent avoir, au cours des six derniers mois, souvent remarqué des informations ou des messages traitant des dangers du tabagisme passif ou de la fumée des autres ; 62 % en ont «parfois » ou « rarement » remarqués. Parmi les fumeurs et les ex-fumeurs qui ont remarqué ces informations au cours des six derniers mois, la télévision est le support d’information le plus fréquent pour les fumeurs (74 %) comme pour les ex-fumeurs (70 %). Par ordre de fréquence viennent ensuite les paquets de cigarettes (56 %) puis les affiches/panneaux d’affichage (46 %) pour les fumeurs. Parmi les ex-fumeurs, les supports suivants par ordre de fréquence sont les journaux/magazines (54 %) et les affiches/panneaux d’affichage (49 %). La majorité des fumeurs et des ex-fumeurs trouvent ces informations pertinentes (79 %) et crédibles (82 %). Les informations sur les dangers du tabagisme passif sont perçues comme plus convaincantes que celles sur les dangers du tabagisme et sur les avantages de l’arrêt du tabac ; 73 % des répondants qui ont remarqué ces informations les trouvent convaincantes (contre 54 % des répondants qui ont remarqué des informations sur les dangers du tabagisme ou encourageant à arrêter de fumer). Rapport national ITC France (2011) 26 Opinion générale sur le fait de fumer Lors de la deuxième vague, la moitié (50 %) des fumeurs ont exprimé l’opinion générale que le fait de fumer est négatif (« assez négatif » ou « très négatif »). Les non-fumeurs et les ex-fumeurs sont plus susceptibles que les fumeurs de considérer que le fait de fumer est négatif : 76 % des non-fumeurs et 64 % des exfumeurs considèrent que le fait de fumer est négatif. En France, le pourcentage des fumeurs ayant une opinion négative du fait de fumer est plus élevé qu’aux Pays-Bas et en Allemagne, où respectivement 22 % et 25 % des fumeurs ont une opinion négative du fait de fumer. Situation comparable à celle que l’on observe en France, la moitié des fumeurs au Royaume-Uni ont une opinion négative du fait de fumer. La majorité des fumeurs français sont conscients des risques du tabagisme, à l’exception de la cécité. En France, le pourcentage des fumeurs ayant une opinion négative du fait de fumer est plus élevé qu’aux Pays-Bas (22%) ou en Allemagne (25%). 27 Rapport national ITC France (2011) IMPLICATIONS DES RÉSULTATS Les deux premières vagues de l’enquête ITC France indiquent que les politiques antitabac en France ont permis de considérablement réduire le tabagisme sur les lieux de travail, dans les lieux publics et dans les lieux de convivialité. Le soutien accru des fumeurs et des non-fumeurs pour les politiques antitabac après leur entrée en vigueur et la bonne application de ces politiques indiquent que les restrictions sur le tabagisme dans les lieux fermés à usage collectif en France ont été un succès. Les résultats de la deuxième vague soulignent aussi les occasions d’encore améliorer la lutte contre le tabagisme en France : 1. Continuer de surveiller la bonne application des lois antitabac sur les lieux de travail et dans les lieux de convivialité. Dix-huit mois après l’interdiction de fumer sur les lieux de travail, entrée en vigueur en février 2007, le pourcentage de fumeurs dont le lieu de travail est non-fumeur a augmenté de manière spectaculaire, et le pourcentage de lieux de travail disposant de zones fumeurs a diminué pour atteindre à peine plus de 10 % des lieux de travail. Toutefois, les résultats de la deuxième vague indiquent que le lieu de travail n’est pas totalement non-fumeur pour 17 % des fumeurs et 16 % des non-fumeurs employés à l’extérieur de chez eux. Les lignes directrices pour l’article 8 de la Convention cadre de l’OMS pour la lutte antitabac (Cclat), que la France a ratifiée en 2004, requièrent que tous les lieux de travail intérieurs soient totalement non-fumeurs. La question du tabagisme sur les terrasses couvertes a été identifiée par Droits des non-fumeurs (DNF) comme un problème concernant le respect de l’interdiction de fumer dans les lieux de convivialité. La poursuite de la surveillance, de la mise en application et de l’éducation des propriétaires et du public est essentielle pour faire comprendre l’importance pour la santé publique de limiter l’exposition au tabagisme passif et de renforcer le soutien en faveur du respect de la législation. La troisième vague de l’enquête ITC France continuera de collecter des informations auprès des clients pour poursuivre l’évaluation de la prévalence de ce problème. 2. Surveiller étroitement la mise en place des avertissements sanitaires graphiques. Les avertissements sur les paquets de cigarettes sont le support le plus fréquemment identifié pour informer des dangers du tabagisme, en France ainsi que dans les autres pays. Néanmoins, la proportion relativement faible de fumeurs remarquant les avertissements exclusivement textuels a rendu nécessaire la mise en place des avertissements sanitaires graphiques et la surveillance étroite de l’application de cette décision. Les lignes directrices de la Cclat de l’OMS pour l’article 11 recommandent de communiquer très activement les exigences légales aux fabricants de tabac, aux importateurs et aux détaillants avant leur entrée en vigueur, et de prévoir l’infrastructure et le budget pour les activités se rapportant au respect de la loi et à sa mise en application. 3. Renforcer les rôles des médecins généralistes dans l’arrêt du tabac de leurs patients, en leur proposant une formation en conseil sur l’arrêt du tabac. De nombreuses études ont montré qu’un bref conseil sur l’arrêt du tabac donné par un médecin au cours d’une consultation de routine peut aider les fumeurs à arrêter de fumer47. Les lignes directrices de la Cclat pour l’Article 14 adoptées en 2010 lors de la quatrième session de la Conférence des Parties (CoP) préconisent comme stratégie initiale auprès du public pour augmenter l’arrêt du tabac, que les médecins recommandent aux fumeurs d’arrêter de fumer en leur prodiguant un conseil minimal48. Il est donc important de sensibiliser les médecins sur la nécessité d’inclure dans leur pratique de routine le conseil minimum d’arrêter de fumer et de proposer aux fumeurs d’autres traitements ou services pour y parvenir. 4. Mener des analyses économiques supplémentaires au moyen des données de la première et de la deuxième vagues de l’enquête ITC pour évaluer l’impact du prix du tabac et des augmentations des taxes sur la consommation de tabac par âge et niveau de revenu. La hausse des taxes sur le tabac et la hausse du prix du tabac sont universellement reconnues comme l’instrument le plus efficace pour réduire la consommation de tabac, en particulier parmi les jeunes. Étant donné l’augmentation de la prévalence du tabagisme dans les groupes socio-économiques défavorisés et la sensibilité financière plus élevée aux changements de prix parmi les groupes à bas revenus, il est important d’examiner les données de l’enquête ITC plus en détail pour renseigner et rendre efficaces les politiques d’augmentation du prix du tabac. 47. Stead, L.F., Bergson, G., and Lancaster T. (2008). Physician advice for smoking cessation. Cochrane Database of Systematic Reviews 2008, Issue 2. Art. No.: CD000165. DOI: 10.1002/14651858.CD000165.pub3. 48. WHO Framework Convention on Tobacco Control (2010). Guidelines for implementation of Article 14 of the WHO Framework Convention on Tobacco Control (Demand reduction measures concerning tobacco dependence and cessation). http://www.who.int/fctc/guidelines/article_14/en/index.html Rapport national ITC France (2011) 28 << Contacts Contacts et sources de Pour plus d’informations sur l’enquête ITC France : Romain Guignard Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES) 42, Boulevard de la Libération 93203 Saint Denis Cedex, France Email: romain.guignard@inpes.sante.fr Tel: +33 1 49 33 22 68 www.inpes.sante.fr Pour plus d’informations sur le projet ITC : Geoffrey T. Fong Professor Department of Psychology University of Waterloo 200 University Avenue West, Waterloo, Ontario N2L 3G1 Canada Email: itc@uwaterloo.ca Tel: +1 519-888-4567 ext. 33597 www.itcproject.org Mary McNally Senior Project Manager International Tobacco Control Project Department of Psychology University of Waterloo 200 University avenue West Waterloo, Ontario N2L 3G1 Canada Email: m2mcnall@uwaterloo.ca Tel: +1 519-888-4567 ext. 38099 Pour des informations techniques sur la méthodologie ou les analyses de l’enquête ITC : Mary E. Thompson Professor Department of Statistics and actuarial Science University of Waterloo 200 University avenue West Waterloo, Ontario N2L 3G1 Canada Email: methompson@math.uwaterloo.ca Tel: +1 519-888-4567 ext. 35543 29 Rapport national ITC France (2011) << Contacts financement du projet ITC Équipe ITC France Équipe française Romain Guignard*, Pierre Arwidson, François Beck, Jean-Louis Wilquin – Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES) Antoine Deutsch – Institut national du cancer (INCa) Équipe internationale ITC Geoffrey T. Fong*, Mary E. Thompson, Christian Boudreau, Lorraine Craig (Project Manager pour ITC Europe), Sara Hitchman (Student Project Manager pour ITC France) – Université de Waterloo *Investigateurs principaux L’équipe internationale ITC L’équipe de recherche internationale ITC comporte plus de 80 chercheurs engagés pour la lutte antitabac dans 23 pays du monde. Les principaux investigateurs sont : Geoffrey T. Fong – Université de Waterloo, Canada Mary E. Thompson – Université de Waterloo, Canada K. Michael Cummings – Roswell Park Cancer Institute, États-Unis Ron Borland – The Cancer Council Victoria, Australie Richard J. O’Connor – Roswell Park Cancer Institute, États-Unis David Hammond – Université de Waterloo, Canada Gerard Hastings – Université de Stirling and The Open University, Royaume-Uni. Ann McNeill – Université de Nottingham, Royaume-Uni. Financement du projet ITC France La deuxième vague d’enquête du projet ITC France d’évaluation des politiques publiques de lutte antitabac a reçu un soutien financier de la part des organisations ci-après : • INPES, Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (France) • I NCa, Institut national du cancer (France) • Roswell Park Transdisciplinary Tobacco Use Research Center (PO1 Ca138389), financé par le National Cancer Institute, National Institutes of health (États-Unis) •Canadian Institutes of Health Research (Canada) • I nstitute of Population and Public Health (Canada) •O ntario Institute for Cancer Research (Canada) Rapport national ITC France (2011) 30 Autres références Résultats de l’enquête ITC France 2010. ITC France Survey Waves 1-2 Technical Report. Construction and Use of Sampling Weights for the International Tobacco Control (ITC) France Survey. Prepared by C. Boudreau. Department of Statistics and Actuarial Science and Data Management Core of the ITC Project. University of Waterloo, Waterloo, Canada. http://www.itcproject.org/projects/france/francew12technicalreportaug19_2010pdf 2009. Projet ITC (Février 2009). Rapport national ITC France. Université de Waterloo, Waterloo, Ontario, Canada ; Institut national de prévention et d’éducation pour la santé (INPES), Institut national du cancer (INCa) et Observatoire français des drogues et des toxicomanies (OFDT), Paris, France. http://www.itcproject.org/keyfindi 2009. INPES. Perception des Français du respect de l’interdiction de fumer dans les cafés et bars, et dans les restaurants, un an après son application. Résultats de deux enquêtes. Dossier de presse. 7 janvier 2009. http://www.sante-jeunesse-sports.gouv.fr/actualite-presse/presse-sante/dossiers-presse/perception-francais-durespect-interdiction-fumer-cafes-bars-restaurants-an-apres-son-application.html 2009. Bilan de la première année d’interdiction de fumer - Discours de Roselyne Bachelot-Narquin 7 janvier 2009. http://www.sante-jeunesse-sports.gouv.fr/actualite-presse/presse-sante/discours/bilan-premiere-annee-interdictionfumer-discours-roselyne-bachelot-narquin.html 2008. Bulletin Épidémiologique Hebdomadaire, Numéro thématique - Journée mondiale sans tabac 2008 (Special issue - World No Tobacco Day 2008), 27 Mai 2008. http://www.invs.sante.fr/beh/2008/21_22/beh_21_22_2008.pdf 31 Rapport national ITC France (2011) Autres rapports sur la politique française/européenne de lutte antitabac 2009. Institut national du cancer. 2009. Le plan cancer 2009-2013. http://www.e-cancer.fr/component/docman/doc_download/4787- 2009. DNF. Les Droits des Non-Fumeurs. Le Tabac En France entre 2006 et 2009. Évolution des comportements, Détournement de la Loi et nouvelles Menaces. http://dnf.asso.fr/-Communiques-de-Presse-.html?communique=51 2007. Alliance contre le tabac. Implementing the Framework Convention on Tobacco Control in France. Current Situation and Recommendations. Report of the French Alliance Against Tobacco. 2007. WHO. Regional Office for Europe. 2007. The European Tobacco Control Report. http://www.euro.who.int/__data/assets/pdf_file/0005/68117/E89842.pdf 2003. WHO Framework Convention on Tobacco Control (WHO FCTC) Geneva, World Health Organization. http://www.who.int/tobacco/framework/en/ Rapport national ITC France (2011) 32 « International Tobacco Control », projet d’évaluation des politiques publiques de lutte antitabac Le projet ITC : évaluer l’impact des politiques de la CCLAT dans… 23 pays • 50 % de la population mondiale • 60 % des fumeurs du monde • 70 % des consommateurs de tabac du monde Australie Bangladesh Bhoutan Brésil Canada Chine (continentale) France Allemagne Inde Irlande Kenya Malaisie Île Maurice Mexique Pays-Bas Nouvelle-Zélande Nigéria Corée du Sud Thaïlande Royaume-Uni Uruguay États-Unis Zambie