à partir des origines de cousteau
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à partir des origines de cousteau
NUMÉRO 03 NUMÉRO 03 BLANCPAIN. UNE TRADITION D’INNOVATION. DEPUIS 1735. À PARTIR DES ORIGINES DE COUSTEAU Cage du tourbillon volant, composée de 52 pièces 2007/2008 La Manufacture Blancpain présente un contraste inédit entre la virtuose construction aérienne de son tourbillon volant et le style sportif de sa légendaire montre de plongée Fifty Fathoms. Etanche à 300 mètres, le « Tourbillon Fifty Fathoms » (réf. 5025-3630-52) est doté d’un fond saphir dévoilant une masse oscillante ciselée à la main et créée spécialement pour ce modèle. La nouvelle édition 2007 de la Fifty Fathoms LE CHRONOGRAPHE DE MICHEL-ANGE Comment Blancpain Blancpain aa réinventé réinventé Comment le concept du chronographe le concept du chronographe GRUYÈRE AOC Une force de la nature 2007/2008 ÉDITORIAL | 01 CHER AMATEUR D´HORLOGERIE, Voici le troisième numéro de Lettres du Brassus qui consacre une large place à la nouvelle collection Fifty Fathoms, dévoilée lors de la foire Baselworld 2007. Nos horlogers et nos designers ont minutieusement repensé chacun des composants de la Fifty Fathoms pour donner naissance à une famille de montres que vous découvrirez dans ces pages. À l'évidence, la présentation de ces garde-temps de légende ne serait pas complète si elle n'incluait pas une rétrospective historique consacrée aux premières Fifty Fathoms. Des réalisations horlogères d'avant-garde qui ont défini les critères des montres de plongée dès leur lancement en 1953. La dernière version de la Fifty Fathoms est animée par le tout nouveau calibre 1315, le second mouvement de base inédit présenté par la Manufacture en sept mois et qui reflète parfaitement le profond attachement de Blancpain à l'excellence technique de ses réalisations. Prenez plaisir à lire ce numéro et n'oubliez pas de jeter un coup d'œil à notre nouveau site Internet, comprenant des animations spéciales qui complètent et illustrent notre article sur les Fifty Fathoms. J'espère que vous apprécierez ce troisième numéro ! Marc A. Hayek Président et CEO Blancpain A LA UNE À PARTIR DES ORIGINES DE COUSTEAU LA NOUVELLE COLLECTION FIFTY FATHOMS 10 LE CHRONOGRAPHE DE MICHEL-ANGE L'EMBRAYAGE VERTICAL RÉVOLUTIONNAIRE DE BLANCPAIN 30 GRUYÈRE AOC UNE FORCE DE LA NATURE 38 VINS DE CLIMATS CHAUDS UNE DÉGUSTATION DE VINS FRANÇAIS, ITALIENS ET CALIFORNIENS 64 02 | 03 SOMMAIRE D A N S L’ A I R D U T E M P S L’HISTOIRE DE LA FIFTY FATHOMS page 04 D A N S L’ A I R D U T E M P S À PARTIR DES ORIGINES DE COUSTEAU page 10 GROS PLAN SALUT L’ARTISTE ! page 22 D A N S L’ A I R D U T E M P S LE CHRONOGRAPHE DE MICHEL-ANGE page 30 ART DE VIVRE GRUYÈRE AOC : UNE FORCE DE LA NATURE page 38 ART DE VIVRE DE L’OPÉRA AU PHILHARMONIQUE page 48 ART DE VIVRE LES PLAISIRS DE LA VIE EN SUISSE page 56 ART DE VIVRE VINS DE CLIMATS CHAUDS page 64 D A N S L’ A I R D U T E M P S HISTOIRES COURTES 2007 page 76 NOUVELLES MORCEAUX CHOISIS DE L’UNIVERS BLANCPAIN page 80 IMPRESSUM page 84 EN COUVERTURE : La nouvelle Fifty Fathoms Automatique Photo d'Andreas Koschate D A N S L’ A I R D U T E M P S L’HISTOIRE DE LA FIFTY FATHOMS PAR JEFFREY S. KINGSTON C omment Blancpain a-t-il créé la Fifty ment périlleuses. Peu de temps après la fin plongée (et ne pas dépasser la durée de la Fathoms, qui s’est propulsée presque de la Seconde Guerre mondiale, à l’initiative réserve en oxygène). Une autre caractéristi- aussitôt au rang d’icône et a défini depuis de deux héros des Forces françaises libres, le que de ces garde-temps spécialisés résidait lors les caractéristiques des montres de plon- capitaine Robert « Bob » Maloubier et le dans leur capacité à chronométrer le temps gée pour l’ensemble de l’industrie horlogère ? lieutenant Claude Riffaud, l’armée française nécessaire afin d’atteindre des objectifs de A l’instar des plus grandes réussites, la Fifty fonde l’unité des Nageurs de combat, pro- navigation. Après avoir longuement testé les Fathoms est le résultat d’une passion. En ce bablement son groupe le plus secret. La mis- montres alors disponibles sur le marché, cas, celle de Jean-Jacques Fiechter, PDG de sion de ce corps d’élite consistait à conduire Maloubier et Riffaud parvinrent à la conclu- Blancpain de 1950 à 1980. Comme il était des activités d’espionnage sous-marin ainsi sion qu’aucune d’entre elles n’était à la hau- lui-même plongeur, la création d’une mon- que de mener à bien des actes de sabotage teur de la tâche. Ils entrèrent alors en contact tre aux performances sous-marines excep- tels que destructions de navires, attaques de avec M. Fiechter. Plongeur et passionné par le tionnelles représentait bien davantage que ports, autant de hauts faits réalisés par des monde sous-marin, il ne fut pas long à l’habituel lancement d’un nouveau produit - hommes-grenouilles qui œuvraient le plus convaincre. Blancpain accepta rapidement de en l’occurrence, l’opportunité de réunir deux souvent de nuit. mettre au point ce garde-temps particulier aspects essentiels de son existence, l’horlo- En plus des bouteilles, des détendeurs, des destiné à l’École des Nageurs de combat, pla- gerie et la mer. Ainsi, au moment où l’armée masques, des palmes et des combinaisons, cée sous le commandement de Maloubier et française l’a contacté, il a compris qu’elle lui Maloubier et Riffaud ont saisi l’importance de Riffaud. apportait le projet qu’il attendait depuis de disposer de trois instruments robustes et Robert Maloubier décrit ainsi sa première longtemps. fiables: la montre de plongée, la boussole et rencontre avec Blancpain: « Finalement, une Même si les montres de plongée rencon- le profondimètre. La montre de plongée petite entreprise horlogère, Blancpain, trent de nos jours un engouement qui revêtait une signification particulière pour de accepta de développer notre projet qui pré- s’étend bien au-delà du cercle des explora- nombreuses qui voyait une montre avec un cadran noir, de teurs des fonds sous-marins, leur origine entraient dans leurs attributions, en premier grands chiffres et des indications claires sous remonte à des utilisations militaires réelle- lieu naturellement pour mesurer le temps de la forme de triangles, cercles et carrés ainsi missions essentielles 1953 1953 1953 1953-55 1953-55 Premier modèle de la Fifty Fathoms. Diamètre 42 mm. Modèle LIP Fifty Fathoms. Modèle LIP Fifty Fathoms. Diamètre 41 mm. Modèle LIP Fifty Fathoms avec indicateur d’humidité sur le cadran. Modèle très rare de l’École française des Nageurs de combat. 04 | 05 Le président John F. Kennedy rencontre les US Navy Seals, équipés de Fifty Fathoms « Tornek Rayville ». « Bob » Maloubier vers 1955, avec sa Fifty Fathoms. D A N S L’ A I R D U T E M P S qu’une lunette extérieure pivotante qui reprenait les repères du cadran. Nous souhaitions au début d’une plongée être en mesure de positionner la lunette en regard de la grande aiguille des minutes afin d’indiquer le temps restant. Nous voulions enfin que chacun des repères soit aussi évident qu’une étoile pour un berger ». Jean-Jacques Fiechter, plongeur expérimenté, avait également ses propres idées. En premier lieu, il décida que la lunette tournante dotée des spécifications indiquées devait connaître un perfectionnement essentiel et ne pouvoir tourner que dans une seule direction. Ainsi, à aucun moment un plongeur ne pourrait imprimer une rotation involontaire à la lunette de nature à lui faire croire que la plongée avait commencé plus tard que cela était le cas. De ce fait, toute erreur aurait pour conséquence de raccourcir le temps de plongée plutôt que de l’allonger au-delà de la réserve en oxygène disponible. À l’évidence, il savait que la montre devait être étanche. Afin d’assurer la meilleure imperméabilité possible du boîtier, il choisit de le doter d’un fond vissé. Pour Premier modèle de la Fifty Fathoms. contourner un brevet existant sur les couronnes vissées, il conçut un système de doubles joints toriques. Comme il se rendit ultérieurement compte qu’un remontage manuel À L’INSTAR DE LA PLUPART DES GRANDES ferait courir un risque d’usure non négligeable au système d’étanchéité de la couronne, RÉUSSITES, LA FIFTY FATHOMS EST LE RÉSULTAT il résolut d’équiper la montre d’un mouvement automatique pour réduire le nombre D’UNE PASSION, EN L’OCCURRENCE CELLE de fois où la couronne aurait besoin d’être dévissée. L’ensemble de ces éléments se DE JEAN-JACQUES FIECHTER, PRÉSIDENT DE conjugua pour garantir un niveau d’étanchéité exceptionnel. Finalement, il s’avisa BLANCPAIN DE 1950 À 1980. 1960 1960 1960 1960 1965-70 Modèle de l’US Navy. Modèle Mil-Spec de l’US Navy. Grande taille de 41 mm. Modèle civil de petite taille. Diamètre 35 mm. Modèle civil vendu par LIP. Modèle civil de grand format. Diamètre 41 mm. 06 | 07 Édition Anniversaire de la Fifty Fathoms de 2003, une pièce de collection très recherchée. qu’une protection contre les champs unique fournisseur, la maison Spirotechnique, magnétiques était indispensable à un garde- implantée à Paris, sur la rive gauche de la temps destiné à être utilisé à des fins militai- Seine. Cette société était liée à l’explorateur res. En associant ses propres caractéristiques Jacques-Yves Cousteau et commercialisait ses à celles de Maloubier et de Riffaud, Jean- inventions, parmi lesquelles son célèbre Jacques Fiechter poursuivait ses propres détendeur à valve. C’est par ce biais que objectifs de conception. Cousteau découvrit la Fifty Fathoms de Il est extraordinaire de constater que l’en- Blancpain et qu’il la choisit pour ses plongées semble des caractéristiques déterminées par historiques immortalisées par le film « Le Blancpain et la Marine française en 1953 ont monde du silence », qui remporta un Oscar et défini dès lors toutes les montres de plongée la Palme d’Or au Festival de Cannes en 1956. modernes : une grande étanchéité, un sys- Il n’était pas toujours aisé de recueillir l’ap- tème robuste de protection de la couronne, probation des militaires. L’armée américaine un remontage automatique, des cadrans par exemple posait une grande variété noirs avec des indications luminescentes évi- d’obstacles pour tout producteur horloger dentes, des lunettes unidirectionnelles avec qui n’était pas implanté sur le sol des États- des repères horaires, une protection antima- Unis. Selon les dispositions du « Buy gnétique. American Act » alors en vigueur, les produc- Il restait une dernière touche à ajouter à teurs nationaux bénéficiaient d’un avantage cette construction sans faille. Blancpain de prix de 25% sur leurs concurrents étran- inséra un indicateur d’humidité à six heures. gers, et les rubis utilisés dans la montre Sous la forme d’un petit cercle, il affichait devaient être achetés auprès d’un fournis- une teinte bleue si l’air dans le boîtier était seur du Missouri. Heureusement pour sec. À la moindre pénétration d’eau, la cou- Blancpain, la Fifty Fathoms disposait d’un leur passait au rose, en signal d’alarme. partisan fermement convaincu des qualités Cette réalisation d’avant-garde fut bapti- de la montre en la personne d’Allen Tornek. sée par Blancpain du nom de « Fifty Ce dernier avait fait la connaissance de Fathoms », d’après la mesure britannique de Jean-Jacques Fiechter grâce à leur passion 50 brasses, soit approximativement 91,45 commune pour la plongée. Lorsqu’il apprit mètres, considérée à l’époque comme la pro- que l’armée des États-Unis avait mis au fondeur maximale que les plongeurs pou- concours la fourniture de montres de plon- vaient atteindre compte tenu du mélange gée, il pensa immédiatement à Blancpain. oxygène – azote alors en usage. Cependant, pour se conformer aux exigen- En raison de considérations à la fois ces du processus d’adjudication, il devait commerciales et du secret défense, la Marine affronter un labyrinthe de dispositions, à française souhaitait acquérir l’ensemble de l’instar de l’obligation d’acheter les rubis ses équipements de plongée, y compris les auprès du fournisseur établi dans le montres Blancpain, par l’intermédiaire d’un Missouri. Il en fallait cependant davantage 1965-70 1965 1968 1970 1965-70 Modèle civil avec le symbole antiradiation sur le cadran. Modèle de l’armée allemande. Modèle civil de grand format, avec date. Modèle civil. Diamètre 37 mm. Modèle civil de grand format, avec contre-boîte interne. D A N S L’ A I R D U T E M P S pour détourner Allen Tornek de son objectif : constructeur retint l’idée d’un pictogramme il acheta les rubis du Missouri et, comme il particulier pour le cadran. L’insertion du les trouva de moins bonne qualité, il s’en symbole universel de la radioactivité, com- débarrassa purement et simplement. Tornek posé de trois motifs triangulaires disposés finit ainsi par remporter la mise et livrer les autour d’un cercle, barré et à une place bien montres de plongée à l’armée des États-Unis en vue sur le cadran, juste au dessus du chif- sous deux désignations : « Blancpain Tornek » fre 6, permettait de signaler l’absence de et « Rayville Tornek » (Rayville était une tout danger lié à la radioactivité. désignation utilisée par Jean-Jacques Fiechter Alors que la Fifty Fathoms s’imposait pour une partie de la production Blancpain). d’elle-même comme la référence mondiale Comme de nombreuses autres montres pour les montres militaires de plongée, elle militaires, les séries Tornek observaient des acquit un succès semblable dans le domaine spécifications particulières et portaient l’indi- civil. À cette époque, les montres de plongée cation « Mil Spec 1 » sur leur cadran. Un élé- n’attestaient nullement d’un quelconque ment essentiel habituellement contenu dans luxe horloger et étaient ainsi vendues par les les listes des desiderata militaires concernait la magasins d’équipement sous-marin. Ces luminosité des repères portés sur le cadran et articles arboraient fièrement le nom donné la lunette. À cet effet l’armée américaine, ainsi par Jacques Cousteau à son matériel de que beaucoup d´autres, stipulait que Blancpain plongée, conçu pour s’adapter à la première utilise sur la Fifty Fathoms du matériel radio- valve à détendeur qui peut être légitime- actif, comme le tritium, afin que les indications ment considérée comme l’ancêtre des appa- restent parfaitement lisibles dans les conditions reils de plongée moderne. Et les montres de nocturnes prévues pour une grande partie des plongée Blancpain vendues dans ces établis- opérations sous-marines. Ces matériaux adap- sements portaient le label « Aqualung ». tés aux exigences militaires étaient effrayants, Si les Fifty Fathoms de Blancpain ont été même au regard de la légèreté des normes qui source d’inspiration pour toutes les montres s’appliquaient alors aux éléments radioactifs. de plongée modernes qui ont reproduit leur Les boîtiers portaient une inscription qui disait liste de caractéristiques, elles sont également « DANGER – EN CAS DE DÉCOUVERTE, à l’origine de l’engouement indéfectible dont RAPPORTER À L’ÉTABLISSEMENT MILITAIRE bénéficient de nos jours les montres de gran- LE PLUS PROCHE ». de dimension. Et au fil des années, Blancpain Blancpain décela la nécessité de disposer a présenté une multitude de variations stylis- d’un moyen pour différencier la production tiques sur le thème de la Fifty Fathoms. des Fifty Fathoms militaires de leurs homolo- Certaines se distinguaient par des boîtiers au gues civils, en particulier quant à l’utilisation style de coussin, d’autres par des repères d’un revêtement radioactif. Pour distinguer en forme de bâtons plutôt que de forme les montres à usage civil, dépourvues à triangulaire, certaines par des aiguilles plus l’évidence de tout élément radioactif, le effilées. Toutes partageaient néanmoins le Nageur de combat français au milieu des années 1960. Lettre de remerciement du capitaine du voilier « Saint-Briac », qui avait utilisé des montres Fifty Fathoms pour un tour du monde à la voile. 1975 1975 1975 1975 1975 Modèle grand format, avec le mouvement automatique AS 2063. Modèle équipé du mouvement automatique R 586. Modèle de grande taille avec fond de boîtier monobloc. 42 mm. Modèle équipé du mouvement automatique AS 1902/03. Modèle de grand format Rayville avec mouvement automatique CD 2873 et couronne de remontoir à 4 heures. 08 | 09 La version de la Fifty Fathoms présentée à une exposition de matériel de plongée. Remarquez le symbole antiradiation sur le cadran. même patrimoine génétique et observaient fidèlement les spécifications formulées par Robert Maloubier et Jean-Jacques Fiechter en 1953. Il y a quelques saisons, Blancpain a présenté l’édition du 50e anniversaire de la Fifty Fathoms lors de la foire horlogère Baselworld 2003. Proposée en trois séries limitées de 50 pièces chacune, cette édition spéciale très recherchée a apporté une touche de luxe à la recette classique qui s’était imposée pendant un demi-siècle. Pour la première fois sur une montre-bracelet, la lunette était réalisée en saphir. Cette particularité lui conférait non seulement un éclat auquel aucun autre matériau ne pouvait prétendre, mais elle revêtait aussi un aspect pratique en raison de sa résistance élevée aux rayures. Le mouvement a également été modernisé par l’adoption du calibre 1150 qui offre 100 heures de réserve de marche. Finalement, Blancpain dévoilait un nouvel et ingénieux système de fixation du bracelet, tellement simple et fiable que Marc A. Hayek, président de Blancpain, a effectué un changement de bracelet sous l’eau lors d’une plongée avec Robert Maloubier en Thaïlande pour le lancement de la montre. Toutes les pièces de l’édition Anniversaire ont été vendues en un clin d’œil et certaines d’entre elles apparaissent aujourd’hui sur le marché des amateurs à un cours nettement plus élevé que leur prix d’origine. Inscrite dans le sillage d’une fabuleuse lignée qui s’étend sur plus d’un demi-siècle, AU FIL DES ANNÉES, BLANCPAIN A PRÉSENTÉ la Fifty Fathoms de 2007 démontre que la passion à l’origine de ce garde-temps d’ex- UNE MULTITUDE DE VARIATIONS STYLISTIQUES ception, conçu pour répondre aux nécessités des plongeurs les plus exigeants du monde, SUR LE THÈME DE LA FIFTY FATHOMS est restée en tous points intacte. 1999 2000 2007 2007 2007 L’édition Fifty Fathoms « Trilogy », avec un bracelet en acier. La Fifty Fathoms « Concept ». La Fifty Fathoms Automatique, dotée du nouveau et robuste calibre automatique 1315. La Fifty Fathoms Tourbillon en or avec le calibre automatique 25A, qui offre 8 jours de réserve de marche. La Fifty Fathoms Chronographe Flyback possède des poussoirs étanches. I D A N S L’ A I R D U T E M P S À PARTIR DES ORIGINES DE COUSTEAU PAR JEFFREY S. KINGSTON L PHOTOS ANDREAS KOSCHATE es classements comparatifs sont un sur leur ordinateur afin de découvrir mes domaine dangereux. Pour toute per- coordonnées au moyen d’une recherche sur sonne ravie, il y en aura des dizaines à enra- Google en guise d’aimable prélude à un lyn- ger que leurs favoris n’aient pas eu l’heur de chage en règle, permettez-moi d’énoncer les vous plaire. Une sage précaution à garder en raisons de ce classement. Non seulement le mémoire : éviter les classements à tout prix. ski et la plongée offrent les joies inhérentes à Une fois cette injonction fermement leur discipline respective, mais leur séduction ancrée dans l’esprit et inscrite en épitaphe est considérablement renforcée par le cadre avec des caractères particulièrement lisibles, il dans lequel ils se déroulent et les séjours de est grand temps de contrevenir à la règle. À vacances qui les accompagnent. cet effet, prenons l’exemple de deux discipli- Pour le ski, il vous suffit de vous rendre à nes sportives, le ski et la plongée, que leur brève distance des ateliers de Blancpain vers attractivité place en tête des sports les plus les montagnes qui entourent Zermatt (avec le appréciés au monde. Avant que les fanati- Cervin), Verbier (avec le Mont-Gelé), voire ques de crosse, boxe, rodéo ou lutte gréco- Mürren (avec l’Eiger et la Jungfrau) pour romaine, pour ne citer que quelques délasse- appréhender la force du lien qui unit un sport ments résiduels de la liste, ne se précipitent à son environnement. 10 | 11 D A N S L’ A I R D U T E M P S 12 | 13 Pour leur part, les adeptes de plongée une telle célébrité ne saurait nous faire oublier doublent les joies que leur passion leur pro- que les origines historiques de la plongée cure par les semaines de préparation et de répondaient à des objectifs nettement moins rêve qui précèdent tout voyage de plongée. La fastueux. En effet, ce fut l’armée américaine pratique de leur sport de prédilection devient qui incita au développement d’un appareil res- ainsi synonyme des lieux prestigieux où cette piratoire sous-marin autonome, en anglais discipline se pratique. Prenez, par exemple, l'île Self-Contained Underwater Breathing Appa- australienne de Lizard, située sur la Grande ratus, d’où proviennent les lettres SCUBA uni- Barrière de Corail et dont le légendaire Clam versellement utilisées de nos jours. Christian Garden regorge de palourdes d’un mètre de Lambertson parvint, dans une certaine large, de mérous tachetés géants, aussi heu- mesure, à relever ce défi en 1939 par la mise reux d’être caressés que le seraient de paisibles au point d’un système fondé sur des réserves ruminants, sans oublier les centaines d’espè- d’air comprimé que les plongeurs emportaient ces de coraux qui encerclent ce monde insu- avec eux sous la surface des eaux. Son inven- laire. Des plongeurs venus du monde entier tion n'était cependant pas exempte d’inconvé- font surface après de telles découvertes ich- nients rédhibitoires. Pour le signifier sans tyologiques pour déguster une cuisine tropi- détour, l’absence d’un dispositif approprié cale qui mériterait deux étoiles sur trois au pour égaliser la pression interne avec celle de POUR LA NOUVELLE ÉDITION 2007 DE LA FIFTY FATHOMS, BLANCPAIN A CONSERVÉ L’ENSEMBLE DU PATRIMOINE GÉNÉTIQUE DES MODÈLES LÉGENDAIRES DES ANNÉES CINQUANTE, MAIS A REPENSÉ DE FOND EN COMBLE CHAQUE ÉLÉMENT DE LA MONTRE. guide Michelin. À moins que vous n’ayez un l’océan environnant a entraîné la mort de troisième élément essentiel, la pression de faible pour la Thaïlande et ne répondiez à l’ap- nombreux plongeurs. Et il reste difficile d’ima- l’océan. Leur valve intelligente égalisait la pel de Koh Samui où, à quelques minutes à giner qu’un tel système puisse provoquer une pression dans les poumons du plongeur avec peine de l’Imperial Tongsay Bay, de ses bunga- floraison de villégiatures sélectes tout autour celle du milieu aquatique ambiant. Et quel lows disséminés sur une plage privée et de ses du monde (« Si nos hôtes s’annoncent volon- fut le déclic qui leur permit de mettre au currys de feu, vous disposerez d’un panorama tiers à leur arrivée, ils préviennent rarement de point cette invention qui reste le fondement tout aussi éblouissant de vie sous-marine. leur départ » pourrait être un bon slogan. En de tous les systèmes de plongée actuels ? La Vous préférez jeter votre dévolu sur un autre ce cas, auriez-vous l’obligeance de régler votre valve de pression d’un générateur à gaz océan ? Qu’à cela ne tienne, prenez donc la note par avance ?). qu’ils utilisèrent dans leur premier système ! direction du Belize et de l’atoll de Turneffe. La solution survint quatre ans plus tard, Ainsi, après une journée passée dans le célè- Une journée à folâtrer avec les tortues caoua- quand Jacques-Yves Cousteau et Emile bre Cod Hole, sur l’île de Lizard, au moment nes sera suivie d’une soirée sereine dans une Gagnan présentèrent une invention baptisée où de nouvelles générations de plongeurs cabane sur la plage. Et si vous êtes attiré par « Aqualung ». Leur génie fut de concevoir sportifs attaquent joyeusement leurs filets de les endroits les plus reculés du monde, songez une valve à détenteur qui fournissait de l’air barramundi qu’ils accompagnent d’une bou- aux Maldives et à l’île de Velavaru qui compte à la demande et établissait ainsi le lien entre teille de chardonnay Penfolds Yattarna, ils plus d’un millier de criques coralliennes. la pression des réserves d’oxygène et la pres- peuvent sereinement oublier pour l’instant Il n’est donc nullement étonnant que de tels sion des poumons du plongeur. Mais si le tout ce qu’ils doivent à un générateur à gaz. lieux aient conféré à la plongée sportive une système de Lambertson se limitait à cette Si les passionnés de plongée ont désor- séduction et une aura hors pair. Cependant, fonction, Cousteau et Gagnan ajoutèrent un mais creusé la distance avec leurs prédéces- D A N S L’ A I R D U T E M P S seurs en matière d’équipement et de lieux d’une collection entière, Blancpain a assimilé port à son cousin le 13R0. Depuis la toute de séjour, leurs montres ne sont pas en reste. tous les enseignements issus de l’invention première version de la Fifty Fathoms, Développée dans un environnement mili- de la première montre de plongée moderne Blancpain a fermement établi que le remon- taire, la Fifty Fathoms de Blancpain a été et de sa longue histoire pour créer une ver- tage automatique constitue un élément conçue comme un parfait instrument de sion totalement nouvelle de la Fifty Fathoms. essentiel pour une montre de plongée. Et combat. L’article en pages 4 à 9 évoque l’his- Pour l’édition 2007 de la Fifty Fathoms, pour quelle raison ? Parce que le remontage toire de ce garde-temps d’exception. Il expli- Blancpain a, d’une part, conservé l’ensemble automatique ne requiert pas le dévissage que aussi comment elle est devenue la pre- du patrimoine génétique de la montre et de quotidien de la couronne, nécessaire au pro- mière montre de plongée moderne au point ses évolutions depuis les versions historiques priétaire pour remonter sa montre. Cette pré- d’en définir les caractéristiques pour toute des années 1950 jusqu’à l’édition limitée caution réduit l’usure des joints de la cou- l’industrie horlogère et retrace son évolution Anniversaire de 2003 et, d'autre part, minu- ronne et contribue à conserver l’étanchéité depuis plus d’un demi-siècle. tieusement remis à jour, point par point, de la montre. Le système de remontage auto- En 2007, faisant de la Fifty Fathoms la chaque élément de la montre. Mieux encore, matique du calibre 1315 possède une masse pièce centrale de Baselworld et la vedette Blancpain a hissé la Fifty Fathoms du rang de oscillante délicatement décorée d’un motif À PARTIR D’UNE MONTRE DE LÉGENDE, BLANCPAIN A ELABORÉ UNE FAMILLE COMPLÈTE, QUI INTÈGRE AUJOURD’HUI ÉGALEMENT UN TOURBILLON FIFTY FATHOMS ET UN CHRONOGRAPHE FIFTY FATHOMS. simple modèle à celui d’une famille de mon- soleil. En accord avec son caractère sportif, le tres qui intègre aujourd’hui également un rotor bimétallique assure une efficacité de Tourbillon et un Chronographe Flyback, sans remontage accrue. omettre la présence d’un proche parent, le Le calibre 1315 intègre de nombreuses nouveau Chronographe Flyback « Air caractéristiques de construction du mouve- Command ». ment 13R0. Tous deux possèdent un balancier En premier lieu, examinons les acquis que à inertie variable ainsi que des vis réglantes à ces 54 années ont apportés à la Fifty tête carrée en or massif. Comme le système Fathoms, en commençant par l’élément le de réglage à vis présente une résistance maxi- plus fondamental de tous, le mouvement. male aux chocs, il est idéalement adapté à la Cette dernière édition est dotée du mission de cette montre de plongée ultime. deuxième mouvement de la nouvelle famille Toutefois, pour accroître encore sa robus- de calibres Blancpain, qui suit les traces du tesse, le balancier est réalisé en glucydur, plus 13R0, dévoilé en octobre 2006 à Genève. Ce lourd que le titane utilisé dans le 13R0. Une mouvement entièrement inédit, qui porte la autre caractéristique de construction com- désignation 1315, a été mis au point par la mune est la présence de trois barillets, dont Manufacture parallèlement au révolution- deux possèdent des ressorts à bride glissante naire 13R0. Comme ce dernier, le calibre alors que le troisième est doté d’une 1315 est exclusif à Blancpain. fixation rigide. En raison des propriétés Dès les prémices de son développement, le spécifiques des matériaux, tous les ressorts 1315 a été conçu comme un mouvement moteurs ont été spécialement recalibrés pour robuste destiné à équiper une montre de ce mouvement. Le mouvement présente éga- sport. Le remontage automatique est la pre- lement une réserve de marche exceptionnelle mière différence qui saute aux yeux par rap- pour une robuste montre de sport qui atteint 14 | 15 D A N S L’ A I R D U T E M P S Le calibre 1315 avec ses cinq jours. Des pierres surdimensionnées approches antérieures sont devenus évi- rubis surdimensionnés, apparaissent comme une caractéristique de dents. Aussi ont-ils résolu de réintégrer cette balancier à inertie variable doté construction cependant, avec l’adjonction caractéristique au nouveau modèle. À cette de vis réglantes à tête carrée. d’un remontage automatique, le nombre de fin, ils ont opté pour un dispositif tradition- rubis s’élève désormais à 35 contre 30 dans nel qui consiste à cercler le mouvement d’un LE CALIBRE 1315 le calibre manuel 13R0. Enfin, à l’instar du contre-boîtier composé de deux plaques Hauteur : 4,57 mm 13R0, le 1315 comprend une fonction de protectrices en fer doux, l’une placée sous le Diamètre : 30,60 mm date qui est protégée contre tout endomma- cadran et l’autre entre l’arrière du mouve- gement du mécanisme si la montre est réglée ment et le fond de boîtier. sa finition soleillée et son Réserve de marche : 120 heures Rubis : 35 Composants : 222 Boîtier interne antimagnétique en sens antihoraire à minuit. En écrivant la bible des montres de plongée La finition manuelle particulière du mou- modernes, Blancpain a insisté sur l’impor- vement caractérise ce nouveau calibre de tance d’une lunette tournante. Les plongées manufacture Blancpain. La décoration soleil autonomes durent en général moins d’une prodiguée sur le pont fait en effet écho à heure et le plongeur doit pouvoir indiquer le l’apparence de la masse oscillante. début de l’immersion sur sa montre. En tour- Plusieurs versions historiques de la Fifty nant la lunette afin de placer le marqueur Fathoms offraient un bouclier antimagnéti- face à l’aiguille des minutes et grâce à la pré- que, abandonné sur les modèles plus sence de repères très lisibles sur la lunette, il récents. Lorsque les ingénieurs de Blancpain est aisé de mesurer le temps de la plongée (ou ont passé en revue l’ensemble des critères de la durée nécessaire à la décompression). plongée, les avantages spécifiques des Aussi, la Fifty Fathoms a-t-elle conservé sa 16 | 17 lunette pivotante noire munie de repères nouvelle Fifty Fathoms d’un boîtier en acier. dans une lutte inégale contre des barrettes toutes les 15 minutes. L’édition limitée De plus, en signe de reconnaissance du rôle toujours peu coopératives, l’édition Anni- Anniversaire de 2003 présentait une amélio- éminent joué par une montre de sport dans versaire facilitait le changement de bracelet ration significative de ce concept : l’introduc- les environnements les plus divers, Blancpain par l’utilisation d’un simple instrument à tion du saphir comme matériel pour la a réalisé pour la première fois une variante l’extérieur des cornes. Ce système de brace- lunette. En se présentant sous une forme déli- en or rouge. Lors de l’examen attentif des let fait partie intégrante de la collection 2007. Avec la montre, il est donc possible DÈS LES PRÉMICES DE SON DÉVELOPPEMENT, LE 1315 A ÉTÉ CONÇU COMME UN ROBUSTE d’acquérir un set composé d’un second bracelet en caoutchouc, du support et de l’instrument qui permet de changer de bracelet en un tour de main. En guise de démonstration finale que MOUVEMENT DE SPORT. Blancpain n’a négligé aucun détail, la Fifty Fathoms se présente dans un coffret extrê- catement bombée, le saphir ne donne pas divers éléments de la montre, le bracelet n’a mement solide. Il s’agit là du nec plus ultra seulement un fini prestigieux à la lunette, pas non plus échappé au regard critique des des contenants étanches et résistants aux mais, en sa qualité de second matériau sur designers de Blancpain. Afin d’offrir une lon- chocs dont le design est parfaitement l’échelle de dureté après le diamant, il lui gévité, une solidité et une résistance maxi- adapté à cette montre de sport ultime. confère une extrême résistance aux rayures males aux dommages provoqués par l’eau, Chaque Fifty Fathoms est renfermée dans un dans les conditions difficiles de la plongée ou Blancpain a réalisé le nouveau bracelet en petit écrin de voyage en toile de voile, lui- le tumulte de la vie quotidienne à l’air libre. toile de voile. Toutefois, désireux de prendre même disposé dans le coffret réalisé en Vertu essentielle reconnue de longue date, en compte le désir du possesseur de changer matériaux high-tech. la lisibilité représentait une question épineuse l’apparence de sa montre par un bracelet au La Fifty Fathoms Chronographe Flyback par faible luminosité. Dans ce domaine, design ou au matériau différent, Blancpain a comprend tous les éléments fondamentaux Blancpain a pu heureusement tirer avantage emprunté un élément à son édition du design de la Fifty Fathoms originale. Elle des nouvelles matières qui relèguent dans un Anniversaire. Pour éviter de perdre ses nerfs possède le même bouclier antimagnétique, passé révolu les composants radioactifs quelque peu effrayants utilisés par les services des armées dans les premières versions de la Fifty Fathoms. Le matériau luminova qui a fait ses débuts il y a fort longtemps dans les exécutions civiles de la montre retrouve son utilisation dans ce nouveau modèle, mais dans une autre couleur. La version 2007 offre une nuance neutre de luminova pour les chiffres, les appliques, les aiguilles et la lunette. Élément vital de tout garde-temps, la couronne requiert une attention particulière dans une montre de plongée. En reprenant une solution présente sur des éditions antérieures, Blancpain a ajouté sur le boîtier des protège-couronnes qui en accroissent encore la solidité. L’acier a toujours été le matériau par excellence pour une montre de plongée Le superbe mouvement de la Fifty Fathoms Tourbillon. C’est l’unique modèle de la famille qui n'est pas doté d’un bouclier antimagnétique afin de permettre d’admirer à travers le fond saphir classique. Dans ce domaine, Blancpain ne le mouvement délicatement s’est pas écarté de la tradition et a doté la décoré à la main. D A N S L’ A I R D U T E M P S la même lunette tournante en saphir, les Le dispositif de blocage n’assure donc pas Le tourbillon est un nouveau venu dans la mêmes nuances neutres en luminova appli- l’étanchéité, il sert uniquement à empêcher famille Fifty Fathoms. Il possède la plus plai- quées sur les chiffres, les aiguilles et la l’activation du poussoir qui, si tel n’était pas sante et la plus visuelle de toutes les compli- lunette, les protège-couronne, le bracelet en le cas, autoriserait l’irruption de l’eau à l’in- cations, le tourbillon volant de Blancpain qui toile de voile, le système de changement de térieur de la montre. A ce propos, il importe dévoile pleinement au regard les mouve- bracelet et le coffret high-tech. Toutefois, de se souvenir d’un aspect essentiel : la fonc- ments du balancier et de l’échappement, elle présente un élément additionnel qui a tion primordiale du système de blocage sans l’obstacle visuel habituellement repré- fait l’objet d’une attention particulière afin consiste à assurer que le chronographe ne senté par le pont de support. Il associe cette d’introduire la complication chronographe soit jamais effectivement utilisé sous l’eau. séduction à l’extrême robustesse du boîtier dans l’univers des montres de plongée : les poussoirs du chronographe. La Fifty Fathoms Chronographe Flyback de sportif de la Fifty Fathoms. Et afin de célébrer Blancpain n’est pas destinée à ces jeux de pleinement le mariage de la complication et A dire vrai, la grande majorité des montres salons. Ses poussoirs offrent une étanchéité à de la plongée, Blancpain a opéré une légère présentées sous la désignation de chrono- 300 mètres et peuvent donc être manipulés modification dans le boîtier. Pour dégager la graphe de plongée fait partie de ces frimeurs dans l’eau. Un tour de force rendu possible vue sur le tourbillon, il était nécessaire de qui en imposent davantage par l’apparence par des joints spéciaux installés de manière supprimer les plaques antimagnétiques qui que par les performances. Ces garde-temps invisible à l’intérieur du boîtier. Et comme les protègent le mouvement des autres mem- comportent généralement des poussoirs de poussoirs peuvent être librement actionnés bres de la collection Fifty Fathoms. Et la chronographe à vis. La seule protection afin d’offrir toutes les fonctions du chrono- Manufacture a saisi cette opportunité pour contre l’eau offerte par un poussoir vissé graphe dans un environnement liquide, les faire de la Fifty Fathoms Tourbillon le seul réside dans le fait que le système prévient vis de blocage ne répondent, par consé- modèle de la collection muni d’un fond tout enclenchement du chronographe pen- quent, plus à aucune utilité. transparent. Son mouvement doté d’une dant l’immersion de la montre, à la condi- A l’instar de sa proche parente, la Fifty réserve de marche de huit jours comprend tion préalable, naturellement, que l’utilisa- Fathoms Chronographe Flyback est disponible une masse oscillante spécialement dessinée teur de la montre n’omette pas de le visser. dans des exécutions en acier et en or rouge. pour ce tourbillon de référence. UN CHANGEMENT DE BRACELET EST SI SIMPLE À RÉALISER À L’AIDE DE L’INSTRUMENT LIVRÉ AVEC LA MONTRE QUE LE PRÉSIDENT DE BLANCPAIN MARC A. HAYEK EN A EFFECTUÉ LA DÉMONSTRATION SOUS L’EAU. Blancpain propose aux acquéreurs d’une Fifty Fathoms ce kit spécial pour changer de bracelet. 18 | 19 À cette unique exception près, l’hé- Un écrin exceptionnel accompagne tous les ritage de la Fifty Fathoms est entièrement intégré dans le membres de la collection. modèle Tourbillon, avec le même style de lunette tournante en saphir, les protègecouronne, le bracelet en toile de voile et l’utilisation de luminova. Et comme il sied à son statut de modèle le plus prestigieux de la collection, la Fifty Fathoms Tourbillon est uniquement proposée dans des exécutions en or rouge et en or blanc. Un proche parent de la ligne Fifty Fathoms est le nouveau Chronographe Flyback « Air Command ». Au premier abord, il serait presque possible de le confondre avec la Fifty Fathoms Chronographe Flyback. Une observation plus attentive permet cependant de déceler des différences significatives. Comme la mission primordiale du chronographe « Air Command » est la navigation aérienne, il comprend une échelle tachymétrique très appréciée des pilotes, car elle sert à calculer instantanément la vitesse au sol en se référant à l’aiguille des secondes du chronographe qui indique sur l’échelle le temps requis pour parcourir un mile ou un kilomètre. D’autres détails témoignent de cette inspiration aéronautique. En lieu et place des chiffres et des index appliqués sur le cadran, l’Air Command arbore des chiffres arabes peints CONÇUS POUR GARANTIR DES PERFORMANCES semblables à ceux du célèbre Chronographe Flyback de Blancpain. Les aiguilles présentent ABSOLUES D’ÉTANCHÉITÉ ET DE RÉSISTANCE aussi un caractère « Flyback » dans leur forme mais, contrairement à celles du Chrono- AUX CHOCS, CES COFFRETS CONSTITUENT L’ÉCRIN graphe Flyback, elles sont évidées pour autoriser une lecture plus aisée des sous- IDÉAL POUR CETTE MONTRE DE SPORT EXTRÊME. cadrans. Une étude encore plus attentive montre que les index principaux de la lunette sont triangulaires en contraste avec les repères traditionnels en forme de losange des Fifty Fathoms. Soulignant une différence supplémentaire entre l’air et l’eau, le Chronographe Flyback Le monde marin a apporté avec lui un air et rendent ainsi inutiles les vis de blocage « Air Command » offre une lunette tour- de famille qui séduira même le plus hydro- conventionnelles. Et précisons en guise de nante bidirectionnelle en contraste avec la phobe des pilotes. Les poussoirs du chrono- conclusion que le bouclier antimagnétique lunette traditionnelle unidirectionnelle de graphe possèdent les mêmes joints étanches révèle à l’évidence sa pleine utilité sur ce plongée sur les modèles Fifty Fathoms. que la Fifty Fathoms Chronographe Flyback modèle. I D A N S L’ A I R D U T E M P S LANCEMENT DE LA FIFTY FATHOMS À CANNES I l relève d’une simple évidence dans le garde-temps au parfait classicisme. de l’entreprise équivalait à inviter Lance Armstrong à se lancer en tricycle sur un vélo- monde des affaires et, si le lecteur m’au- Venons-en rapidement au mois de septem- torise une légère généralisation, dans la vie bre 2007. Même si la Fifty Fathoms bénéficie elle-même qu’il vaut mieux éviter de faire sui- d’une légitimité historique en plongée avec Qu’elle ait été ou non à la hauteur de ses vre un succès par une simple répétition. C’est scaphandre autonome et que le président de possibilités surhumaines, cette plongée a une option banale, qui dénote d’un manque Blancpain est lui-même un passionné de plon- permis aux hôtes de Blancpain de suivre avec d’imagination et trahit surtout un ennui cer- gée, la seconde dimension de l’aventure sous- intérêt le déroulement des opérations depuis tain. Aussi, quand il a été temps de lancer la marine, la plongée libre, était mise à l’honneur un navire qui mouillait à proximité du bateau troisième génération de Fifty Fathoms, il était pour le lancement officiel du nouveau modèle. de plongée. Par un lumineux après-midi de hors de question pour Blancpain de reprendre En choisissant le cadre du Festival de Plaisance fin d’été, un public enthousiaste a observé tout bonnement la présentation réalisée pour de Cannes, l’un des grands salons annuels Gianluca Genoni préparer sa plongée et des- ses lointains débuts. D’ailleurs, le premier consacrés au yachting, Blancpain a convié cendre sous la surface de l’eau. Accueilli sur lancement intervenu en 1953 n’aurait guère Gianluca Genoni, champion du monde de le fond de la mer par Marc A. Hayek, le pu servir de modèle car il était frappé du secret plongée en apnée, à devenir le premier pos- plongeur émérite a reçu une Fifty Fathoms en défense - aucune fanfare, pas de journalistes sesseur au monde de la Fifty Fathoms 2007. Le acier qui portait le numéro de série zéro. et à vrai dire une absence presque totale de palmarès de Gianluca Genoni est époustou- Quand il a refait surface, elle entourait déjà célébration - mais des essais cliniques, impla- flant. Il détient non moins de 12 titres mondi- son poignet. La célébration festive s’est pour- cables et militaires. Le deuxième grand lance- aux en plongée libre. Y compris le record de suivie par un lunch de caviar, saumon fumé ment pour l’édition Anniversaire de 2003 a in- profondeur en plongée libre avec 141 mètres. et champagne. versé le cours de l’histoire. Robert Maloubier, Il est capable de retenir sa respiration pendant Exposés sur les présentoirs Blancpain lors du grande figure de l’École des Nageurs de com- 7 minutes et 48 secondes (et s’il lui est permis Festival de Plaisance, les trente premiers exem- bats et membre de l’équipe qui collabora avec d’inspirer de l’oxygène pur avant la plongée, il plaires de la Fifty Fathoms ont rapidement Blancpain à la mise au point de la version de peut porter cette durée à 15 minutes). Ainsi, trouvé preneurs, comme l’attestaient les 1953 de la Fifty Fathoms, a rejoint pour l’occa- lorsque Blancpain lui a demandé d’accompa- points rouges qui se sont multipliés, indiquant sion Marc A. Hayek, président de Blancpain, gner Marc A. Hayek au fond de la mer entre le que ces premiers numéros de série se sont en Thaïlande pour une plongée mémorable, port de Cannes et les îles de Lérins, où la pro- immédiatement transformés en pièces recher- qui a tenu lieu de baptême public pour ce fondeur atteint à peine 30 mètres, la difficulté chées par les collectionneurs. drome. I 20 20 | 21 BLANCPAIN A CONVIÉ GIANLUCA GENONI, CHAMPION DU MONDE DE PLONGÉE LIBRE, À DEVENIR LE PREMIER POSSESSEUR AU MONDE DE LA FIFTY FATHOMS 2007. La Fifty Fathoms numéro Le plongeur italien Gianluca de série zéro exposée sur Genoni fait surface avec sa nouvelle son présentoir. Fifty Fathoms au poignet. GROS PLAN SALUT L’ARTISTE ! « C’EST PAS LES GRANDES SÉRIES ICI, IL Y A TOUJOURS DES NOUVEAUTÉS, ALORS POUR RÉSOUDRE LES PROBLÈMES QUE NOUS POSENT LES PROTOTYPES, IL FAUT CRÉER, INVENTER… JAMAIS JE N’AURAI CETTE CHANCE AILLEURS. » PAR DIDIER SCHMUTZ PHOTOGRAPHIES CHRISTOPHE DUTOIT 22 | 23 GROS PLAN Réflexions et partage de compétences entre le maître-horloger et le « mécanorloger » autour d’un plan de la répétition minutes étanche de Blancpain. 24 | 25 Fraisage intérieur et extérieur de la masse oscillante en or du tourbillon calibre 25 sur la machine à pointer. AFIN DE DÉFINIR LE MÉTIER DE TOTO, IL FAUT FAIRE DANS LE NÉOLOGISME. IL SE DÉFINIT LUI-MÊME COMME ÉTANT UN « MÉCANORLOGER ». «Q uel plaisir de partager la passion, un personnage attachant qui donne réelle- vingt-deux ans de fidélité. Et, pour rien au la précision de toutes ces mains ment envie de faire plus ample connais- monde ses chefs ne le laisseraient partir. De qui aboutissent à la perfection de l’horloge- sance, que ce soit chez lui, à Bois d’Amont toute façon, il n’a aucune envie d’aller voir ail- rie et, de surcroît, dans un environnement de l’autre côté de la frontière ou dans son leurs. Avec cet accent caractéristique des gens naturel exceptionnel. » Bel éloge déposé cadre professionnel au Brassus. Afin de défi- du Haut Jura français, il l’affirme sans hésiter dans le livre de souvenirs que chaque visiteur nir son métier, il faut faire dans le néolo- une seconde. « C’est pas les grandes séries peut consulter ou compléter à l’entrée de La gisme. Rencontre et explications. ici, il y a toujours des nouveautés, alors pour Ferme, le pavillon autour duquel sont distri- En octobre 1985, année où il sort de l’École résoudre les problèmes que nous posent les bués les différents ateliers Blancpain. Bien Technique de la Vallée de Joux au Sentier prototypes, il faut créer, inventer… jamais je plus qu’une louange, une réalité. muni de son CFC d’horloger-rhabilleur, il se n’aurai cette chance ailleurs. » Parmi « toutes ces mains », nous avons fait aussitôt engager par la maison Blancpain. Toto est un homme technique doté d’un rencontré celles d’Olivier Tholomier, dit Toto, Depuis, il est au service de l’entreprise, soit esprit créatif ; il se définit lui-même GROS PLAN Vérification des différents diamètres d’une masse à l’aide d’un outil de mesure appelé « pied à coulisse ». LE MOT ROUTINE N’EXISTE PAS DANS CET ARTISANAT DE HAUT VOL. ON COMPREND DÈS LORS LE POURQUOI DE LA FIDÉLITÉ. comme étant un « mécanorloger. » Voilà le ment à répétition minutes en montre bracelet. néologisme. C’est là que nous entrons dans Il fallait quelqu’un pour trouver l’outillage le monde à la fois mystérieux et merveilleux adéquat, je m’y suis mis. Aujourd’hui, c’est de la création « mécanorlogère » comme toujours comme cela, chaque fois qu’un nou- le dit Toto. veau calibre sort - et c’est bien dans la grande Comment est-il arrivé là, en ce point qui tradition Blancpain - nous devons créer un confine à une sorte de perfection ? Le nouvel outillage. » Le mot routine n’existe hasard, comme toujours avec les artistes. En pas dans cet artisanat de haut vol. On com- toute modestie, Toto remonte le temps et prend dès lors le pourquoi de la fidélité. répond. « A mes débuts, nous n’étions Aucun diplôme ne vient couronner cette qu’une dizaine d’employés et je travaillais profession inventée de toutes pièces, aucune comme tous mes collègues. Assemblage, école ne propose un tel apprentissage. Du aiguillage, emboîtage… on faisait les mon- coup, le métier n’est pas à la portée du pre- tres à quantièmes et puis, Blancpain a mier venu. Pour devenir « mécanorloger » sorti en première mondiale le mouve- il faut certes acquérir la base technique en 26 | 27 horlogerie mais, par la suite, il faut encore Tournage à la ajouter l’esprit unique, la touche rare, ce main de l’arrondi mélange de dons et de talents particuliers d’une masse à l’aide d’un burin. que l’on reçoit mais qui ne s’enseigne pas. Si l’on veut mesurer à quel point l’entreprise tient à Toto comme à un trésor, il suffit d’écouter son responsable, Sébastien. « Monsieur Tholomier, enfin… on le surnomme Toto, est un personnage légendaire pour Blancpain. Il est doté d’une compétence exceptionnelle. Il réalise nos posages, nos outillages spéciaux. Quelquefois, nous avons des pièces que l’on souhaiterait améliorer pour travailler encore mieux, alors on lui fait un croquis de nos désirs et lui le développe. Il fait même beaucoup plus que ce que l’on souhaite, à chaque fois c’est fonctionnel, c’est parfaitement bien élaboré, on retrouve la patte de l’horloger dans la finition, dans la qualité et dans l’exécution au Décoration niveau de la fonctionnalité. Il n’y a pas de « colimaçon » sur mot pour qualifier sa compétence et celle de son collègue Claude. C’est quelqu’un d’ex- le renvoi entraîneur de rochet du calibre 13R0. traordinaire, on pense et il réalise. C’est magnifique. En plus, je disais légendaire tout à l’heure, et bien c’est vrai aussi pour son caractère, toujours de bonne humeur, accessible, disponible. » Petite parenthèse dans ce portrait dithyrambique. Toto est parfois de fort méchante humeur. Oh ! Pas pour bien longtemps, car ce n’est pas dans le caractère du bonhomme, mais Toto a horreur de voir perdre le Paris St-Germain (PSG), et comme son équipe fétiche est en passe de tomber en deuxième division française, Toto trouve quelques noms d’oiseaux pour qualifier les piètres performances des footballeurs parisiens. Et la bonne humeur revient. De Bois d’Amont au Brassus dans le petit matin Les propos de Sébastien seraient incomplets Aiguise-bûchettes de si l’on ne parlait pas de la popularité dont fabrication interne. jouit notre « mécanorloger », dans son vil- Un outil « maison » aussi utile aux lage, à l’apéro ou au boulot. Pour vérifier horlogers que le taille- cette réputation, il suffit de le suivre dans crayon à l’écolier ! GROS PLAN guigne mais Toto Blancpain au Brassus. Sur 54 employés, 49 s’en fiche, tout sont frontaliers, une précieuse main-d’œuvre. juste lâche-t-il un « Ah, voilà notre Toto national ! Qu’est-ce sonore « Quel pays de loup ici ! » qu’on peut dire de lui ? » « Rien », répond Toto. En route pour Le Brassus « Oh que si ! » rétorque Antoine. « Il y a à sous les flocons qui tombent dire ! Tout le monde le connaît, c’est drus. « Si ça continue comme quelqu’un de génial, qui a du cœur, qui aide ça toute la journée on en a une beaucoup les gens, chaque problème qui se couche de quarante centimètres ce soir, on pose à nous, il arrive à le résoudre, tout ce son quoti- pourra ressortir les skis. J’vais être un peu en qu’il fait est vraiment génial. Chaque fois dien. Ce que nous retard, je sais que c’est un comble pour un qu’il faut un outil spécial, il comprend tout de faisons au départ de Bois horloger mais on dira que c’est à cause de la suite ce dont nous avons besoin. » d’Amont avec le café matinal pris en compa- neige. » Toto fait décidément l’unanimité autour de gnie de Fanfan, son amie. Elle, elle a le droit La neige a quand même du bon lorsqu’elle de dire « MON Toto » et le doux possessif peut servir d’excuse, surtout hors saison. De Pendant que Toto poursuit sa tournée, allant montre combien les deux font belle alliance. toute façon, le travail sera fait. C’est bientôt d’établi en établi, je le rattrape devant la Le couple échange quelques mots sur le le grand rendez-vous de la foire de Bâle et la porte de l’atelier de gravure, le royaume de tournoi de pétanque qu’ils se réjouissent de manufacture est en ébullition à tous les éta- Marie-Laure. « Une véritable artiste, elle jouer ensemble durant le week-end et c’est ges, dans tous les secteurs. Il faut que tout réalise des prouesses incroyables en gravant le départ en maugréant quelque peu, tou- soit prêt dans les moindres détails. sur des pièces de 0,25 millimètres d’épais- lui, humainement et professionnellement. jours avec le sourire cependant. S’il rouspète « Merci messieurs ! » Au passage de la seur », m’explique Toto qui lui prépare par- c’est plus pour la forme que par véritable douane, Toto salue des fonctionnaires imagi- fois des fonds spéciaux afin qu’elle puisse y agacement. En cause : le brusque retour de naires. Ça l’amuse. Ici, entre le département du inscrire les motifs choisis par les clients qui l’hiver. Avant de démarrer le moteur, il s’agira Jura et la Vallée de Joux, la frontière n’existe désirent de dégager la voiture car la neige est venue presque pas, tant les deux régions s’interpénè- Totalement incrédule, je demande à voir car, en abondance et, surtout, en invitée surprise trent et se nourrissent l’une de l’autre. pour moi, un quart de millimètre ce sont personnaliser leur montre. durant la nuit, alors qu’elle a manqué tout au Neige ou pas, retard ou pas, Toto ne chan- long du temps qui lui revient habituellement. gera rien au rituel immuable de son arrivée La voici au printemps, y a plus de saison, une au travail. Comme à l’accoutumée, il fait son Marie-Laure aura tôt fait de m’enlever la petit tour dans les ateliers, serre des mains, tentation de St-Thomas, l’apôtre qui voulait dit bonjour, plaisante, prend des nouvel- toujours voir avant de croire. Elle me montre les de l’un, s’inquiète de la santé une gravure en cours de réalisation sur un de l’autre. Un des horlogers fond de boîtier de 0,7 millimètre ; selon elle, l’apostrophe. Gentiment c’est… épais ! Le dessin représente La Ferme. moqueur, il le taquine Un coup d’œil dans le binoculaire, quelques avec le Paris trois cheveux posés l’un sur l’autre, alors graver là-dessus… St- explications claires et je me rends bien compte Germain qui croupit que Toto n’est de loin pas le seul artiste ouvra- dans les profondeurs geant les montres Blancpain. Ornées de gra- du classement. « Ça vures si finement ciselées, la montre tourne au y est , c’est reparti, je chef-d’œuvre. me fais de nouveau Toto, Marie-Laure, toutes les autres mains chambrer, ça recom- encore… le visiteur du début a vu juste, mence avec le PSG » très juste même. Quant à Sébastien, il ne lance Toto qui passe outre s’y trompe pas lorsqu’il dit simplement que et s’en va vers le chef du T2 « Toto a des doigts d’or ». (Atelier de Terminaison) », Antoine, l’un des rares Suisses parmi le personnel I 28 | 29 Gravage du fond de la répétition minutes étanche par incision dans la matière à l’aide d’un petit burin. Un travail d’orfèvre réalisé à la main sous le microscope. Contrôle visuel d’une masse oscillante sur la machine à pointer. DANS L’ A I R DU TEMPS LE CHRONOGRAPHE DE MICHEL-ANGE PAR JEFFREY S. KINGSTON QUEL EST LE TRAIT DE GÉNIE DU CALIBRE 1185/86 ? DISONS SIMPLEMENT QUE BLANCPAIN A DÉJOUÉ TOUS LES PIÈGES DES CONSTRUCTIONS À EMBRAYAGE VERTICAL ucun artiste n’a fait progresser aussi A éléments constitutifs utiles pour la représen- appliquée aux mouvements des chronogra- considérablement la représentation du tation de personnages habillés, pourquoi ne phes de calibres 1185 et 1186 a servi à des corps humain que Michelangelo Buonarroti, pas plonger plus profondément encore dans fins « d’études » similaires pour plusieurs plus connu de nos jours sous le nom de la structure interne des os, des muscles, des constructeurs suisses renommés. Michel-Ange. Si elle était incontestablement tendons et des veines par la dissection de Achèvement de maître dévoilé en 1989, le due à ses prodigieux talents naturels, la maî- cadavres ? Le premier artiste à avoir pratiqué calibre 1185 se présentait comme le plus plat trise de son art provenait aussi de ses intenses de véritables autopsies fut le Florentin mouvement automatique de chronographe recherches. Dans une certaine mesure, ses Antonio Del Pollaiuolo au milieu du XVe siè- jamais réalisé - un record mondial qu’il conti- études n’étaient pas sans présenter de surpre- cle. D’autres suivirent ses traces, à l’instar de nue de détenir de nos jours. À l’heure de ses nantes analogies avec la formation académi- Signorelli. Selon une opinion largement parta- débuts sous la forme d’un mouvement à que suivie par les artistes contemporains, qui gée, Michel-Ange ne fut pas en reste. Cette remontage automatique, il était encore plus dessinent ou sculptent des modèles nus. Il méthode de recherche peu ragoûtante lui ser- mince que le plus plat des calibres à remon- tenait à rendre avec une telle précision les vit à composer un extraordinaire catalogue de tage manuel disponible sur le marché. moindres détails d’un corps qu’il recourait à l’anatomie humaine. Savants et érudits furent Toutefois, les avancées techniques liées à sa des hommes et à des femmes dévêtus, suivant en mesure d’identifier par l’étude approfon- conception ne se limitaient pas à cette stupé- en cela l’enseignement de son maître die de ses œuvres plus de huit cents compo- fiante minceur. L’usage voulait alors que les Ghirlandaio, pour peindre ou sculpter des per- sants structurels du corps humain alors que la sonnages habillés, en vertu du principe que les science médicale de nos jours ne connaît nuances d’un drapé ne pouvaient être pleine- guère que six cents os, muscles et tendons. ment restituées qu’à la seule condition d’en Il semble que l’industrie horlogère suisse, comprendre avec exactitude la structure sous- ou du moins ses éléments qui se consacrent jacente. aux chronographes haut de gamme, se soit Une autre méthode, quelque peu sca- inspirée des artistes de la Renaissance. Si la breuse, était également utilisée à cette épo- dissection s’est révélée utile pour progresser que pour étudier les détails les plus infimes dans la connaissance comme dans la restitu- avec une minutie plus grande encore. Si les tion artistique du corps humain pour modèles nus permettaient de recenser divers Signorelli et Michel-Ange, la même approche Le calibre 1185. 30 | 31 DANS L’ A I R DU TEMPS chronographes recourent à l’engagement et au désengagement des roues pour démarrer ou stopper l’aiguille des secondes du chronographe. Comme l’enclenchement et l’arrêt exigeaient l’engagement, puis le désengagement de deux rouages, une inévitable secousse se produisait dans le mouvement de l’aiguille. Considérons les dents d’une roue comme une succession « de pointes et de vallées ». L’engrènement normal de la roue est réalisé par l’engagement de la pointe d’une roue dans la vallée de l’autre. Cependant, lorsque les deux rouages s’engrènent soudainement au moment de l’actionnement du chronographe, la position de la roue d'engagement est entièrement aléatoire, de sorte que l’engagement initial peut se produire pointe contre pointe plutôt que, selon la formule sou- La platine d’embrayage est colorée en bordeaux. Remarquez les bras, en vert, qui soulèvent en position de repos la platine supérieure pour la séparer de la surface inférieure de la roue des secondes. La roue à colonnes, qui contrôle la position des bras, est également représentée en vert. haitée, pointe et vallée. La conséquence en est un saut de l’aiguille. Blancpain a résolu ce problème par le développement du premier livrent à aucune recherche sur le mouvement pour mentionner simplement que l’étude embrayage vertical perfectionné pour un chro- car, à défaut de posséder des calibres maison inversée de la construction de Blancpain leur nographe. La parfaite onctuosité du déplace- pour leurs chronographes, elles se limitent à a servi de « source d’inspiration ». ment de l’aiguille des secondes est ainsi garan- acquérir des mouvements développés par Aussi quel est donc le trait de génie présent tie à chaque instant. d’autres). Même si leur nombre respectable sur les calibres 1185/1186 qui a conduit tant n’atteint pas les 800 os, tendons et muscles de marques horlogères à leur rendre hom- recensés par Michel-Ange, il ne fait aucun mage ou à trouver leur « inspiration » dans doute que les 374 composants du calibre l’acquisition d’une Blancpain comme pre- 1185 ont été démontés et disposés sur les mière étape de leur projet de développement établis des horlogers de ces marques afin de d’un mouvement ? Indiquons simplement leur permettre de découvrir les secrets de sa que Blancpain a surmonté avec brio toutes les structure. En effet, à l’exemple d’un chrono- chausse-trapes et présenté des mécanismes graphe à embrayage vertical présenté il y a d’embrayage vertical et de rattrapante qui ne trois ans, le mouvement utilisé est dans ce fonctionnent pas uniquement de manière domaine clé presque identique, pièce pour irréprochable, mais le font sans conférer au pièce, à la construction de Blancpain (cette mouvement une épaisseur malvenue. Vue supérieure de l’embrayage, chronographe arrêté. Les bras soulèvent la platine d’embrayage. stupéfiante proximité peut être aisément véri- Avant de narrer l’évolution historique de fiée par la superposition des deux mouve- cette construction, qu’une brève mais indis- ments qui permet de se rendre compte par pensable digression nous soit accordée afin de L’industrie horlogère a reconnu depuis long- transparence que leurs composants essentiels considérer la difficulté recelée par la complica- temps les vertus des conceptions d’avant- sont en parfaite correspondance !). Une autre tion chronographe et, davantage encore, par garde de Blancpain. Au point que six rivaux marque horlogère connue a récemment con- les modèles à rattrapante. Aucune autre com- de la Manufacture du Brassus dans le fessé publiquement avoir analysé le mécanisme plication ne soumet le mouvement de la mon- domaine de la haute horlogerie ont suivi les de la rattrapante du chronographe 1186 pour tre au même type de brusques changements traces de Michel-Ange et consacré une part son modèle de montre à quantième perpétuel dynamiques que le chronographe. En effet, importante de leurs recherches sur le mouve- et rattrapante très haut de gamme. À l’évi- l’enclenchement de la fonction chronographe ment à la dissection (souvenez-vous ici que les dence, ses responsables se sont bien gardés active soudainement tout un mécanisme en marques, dans leur écrasante majorité, ne se d’utiliser le terme inconvenant de « copie » l’associant au rouage de la montre. De 32 | 33 Vue de l’embrayage vertical avec les deux bras de chaque côté (position de chronographe arrêté). Habituellement, l’assemblage de l’embrayage est dissimulé aux regards par le pont supérieur qui a été découpé pour permettre cette photographie. AUCUNE AUTRE COMPLICATION NE SOUMET LE Il semble bien que l’engouement pour l’embrayage vertical a sommeillé pendant de MOUVEMENT DE LA MONTRE AU MÊME TYPE nombreuses années après la disparition des montres Lévy. Les Japonais furent les suivants DE BRUSQUES CHANGEMENTS DYNAMIQUES QUE à s’y intéresser et leurs recherches marquèrent une progression significative par rapport LE CHRONOGRAPHE. au brevet déposé par Lévy. Plutôt que d’utiliser une plaque de métal munie de pointes et manière analogue, l’arrêt du chronographe Lévy & Frères qui déposèrent le premier brevet un disque en plastique qui s’engrenaient à entraîne la déconnexion immédiate du méca- à ce sujet en 1935. Mentionnons cependant l’image d’un embrayage, les Japonais dotè- nisme du chronographe (et de toutes les à ce point que la construction de Lévy laissait rent leur construction d’un double jeu de pla- aiguilles liées à son fonctionnement) du quelque peu à désirer, afin d’exprimer cer- ques métalliques. Leur invention comportait rouage. Les premières constructions de chro- tains manquements en termes choisis, en un élément clé sous la forme d’un ressort nographe et la plupart des chronographes signe de respect pour l’ouvrage d’artisans qui dont la fonction consistait à presser les deux actuels réalisent cette connexion et cette travaillaient en des époques désormais révo- plaques l’une contre l’autre. Quand le chro- déconnexion en séparant le rouage du chro- lues. La construction Lévy présentait un nographe était stoppé, deux bras situés à nographe du rouage de la montre, avant de embrayage composé d’une plaque métallique 180 degrés agissaient contre le ressort afin les mettre à nouveau en relation au moment dotée de pointes en forme de triangle qui, de séparer les deux plaques. Lorsque l’utilisa- où le chronographe est enclenché. L’arrêt du lorsque le chronographe était actionné, teur enclenchait le chronographe, les bras chronographe sépare une fois encore les deux entraient en contact avec un autre disque réa- étaient repoussés hors du disque pour per- rouages. Un embrayage vertical assume la lisé en matière plastique. L’inconvénient du mettre au ressort de presser les deux plaques même fonction - connexion et déconnexion - système résidait dans le fait que les pointes l’une contre l’autre, ce qui actionnait l’em- mais avec une élégance et une délicatesse métalliques finissaient inévitablement par tra- brayage et, ainsi, le chronographe. aucunement comparables à la brusque colli- cer des sillons dans la plaque de plastique plus Néanmoins, la construction japonaise sion de deux rouages. tendre et étaient à l’origine des performances n’était pas sans présenter encore quelques Blancpain ne s’arroge nullement le mérite erratiques du chronographe. Il n’est donc inconvénients. En premier lieu, le ressort d’em- d’avoir inventé la première construction à guère surprenant que seule une petite poi- brayage embrayage vertical. Cet honneur échoit à gnée de ces garde-temps a fini par voir le jour. à garantir la juxtaposition uniforme des n’était pas conçu de sorte DANS L’ A I R DU TEMPS Sur cette vue, le chronographe est enclenché. Les deux bras sont écartés de la platine d’embrayage permettant au disque d’être repoussé sur la roue de secondes constamment en mouvement située au-dessous. Deux des trois pieds du ressort d’embrayage peuvent être vus, l’un à 5 heures, l’autre à 10 heures. Remarquez le doigt du ressort au sommet de l’assemblage de l’embrayage qui commande le compteur des minutes. deux plaques. Le ressort possédait la forme L’OBJECTIF ÉTAIT DE CONCEVOIR UN NOUVEAU d’un disque, ce qui impliquait que sa surface entière était en contact avec l’un des disques. MÉCANISME QUI SOIT FIABLE ET SUFFISAMMENT PLAT La moindre distorsion ou la plus légère déformation entraînait donc une pression plus éle- POUR S’INSÉRER DANS DES BOÎTIERS ÉLÉGANTS. vée sur un côté de l’embrayage. A son tour, il exercerait une force latérale sur l’aiguille des secondes du chronographe, parfaitement connaissaient ces constructions antérieures. sort Blancpain possède donc trois pieds qui indésirable sur n’importe quel chronographe Leur objectif était de concevoir un nouveau sont en contact avec l’un des disques de l’em- et souvent fatale, ainsi que nous le verrons ci- mécanisme exempt des défauts présents sur brayage. Depuis lors, cette innovation a été dessous, sur un modèle à rattrapante. ces tentatives précoces qui ne fonctionnerait amplement et servilement copiée par toute Deuxièmement, l’aiguille des secondes et le pas uniquement de manière fiable mais pos- l’industrie. En second lieu, afin de réduire compteur des minutes du chronographe séderait un profil suffisamment plat pour l’épaisseur du mouvement, Edmond Capt a étaient dépourvus de dispositifs de blocage s’insérer dans des boîtiers élégants dotés de eu l’idée, au lieu de construire un embrayage destinés à garantir l’immobilisation des aiguil- simples chronographes et offrirait la possibi- entièrement séparé et de le relier au rouage les quand le chronographe était déclenché. Un lité d’y adjoindre des complications addition- de la montre, de disposer la roue des secon- choc violent sur la montre aurait risqué de pro- nelles, telles que quantième perpétuel ou des (lisez rouage : les horlogers utilisent le pulser les aiguilles en avant depuis leur posi- rattrapante, sans prendre inévitablement la terme de « roue » pour décrire un rouage) sur tion d’immobilisation. Enfin, la construction forme disgracieuse d’une « boîte de thon l’une des surfaces de l’embrayage lui-même. était relativement épaisse en raison de diverses pour le poignet ». Ainsi, plutôt que de mettre en contact deux options de conception, y compris la réalisation Edmond Capt a retenu l’idée du ressort plaques entièrement séparées, le ressort de la de l’embrayage sous la forme d’un composant comme pièce centrale de l’embrayage, mais construction Blancpain pousse la plaque qui entièrement séparé du train de rouages et le au lieu de conserver sa forme circulaire, il l’a entraîne l’aiguille des secondes du chronogra- déplacement de certaines pièces du mouve- monté sur le plus stable et le plus plan de tous phe (et active les compteurs des minutes et ment sur le côté cadran de la montre. les types de plateformes, un trépied (car nul des heures) directement sur la roue tournante Lorsque Edmond Capt et l’équipe de n’ignore par sa simple expérience personnelle des secondes du mouvement. Cette disposi- Blancpain se sont attelés à la création du qu’un tabouret à trois pieds est toujours plus tion, également, a suscité de nombreuses imi- calibre 1185 au début des années 1980, ils stable qu’un tabouret à quatre pieds). Le res- tations. 34 | 35 d’inspiration par les concurrents de Blancpain et il a donc fait l’objet de nombreuses copies, presque identiques à l’original. Le ressort du compteur des minutes constitue un autre élément clé de l’embrayage. Le chronographe Blancpain possède un compteur des minutes, conventionnellement désigné par le terme « semi-instantané ». À chaque fois que l’aiguille des secondes du chronographe passe le 60 (après chaque minute entière de rotation), un doigt confectionné dans un ressort précisément calibré engage une dent de la roue pour la faire sauter exactement d’une dent, de sorte que l’aiguille du compteur des minutes accomplisse un saut précis d’une minute. Le dessin de ce doigt à Ici, la roue à colonnes (en vert) a tourné en écartant les deux bras du cercle supérieur de l’embrayage (en bordeaux). En bleu, le train de rouages pour le compteur des minutes. Lorsque le doigt du ressort bordeaux de l’embrayage passe le rouage bleu adjacent, il le déplace d’une dent et avance ainsi d’une minute le compteur des minutes. ressort a exigé de longues études et recherches de l’équipe d’Edmond Capt. Le ressort devait être suffisamment fort pour faire avancer la roue entièrement et précisément d’une usqu’à présent, nous nous sommes J position adoptée par les cœurs dès qu’ils dent. Un ressort trop fort ou un engagement concentrés sur la mise en marche et l’arrêt subissent une pression devient le « zéro » lors- trop profond auraient pu provoquer un brus- du chronographe, où, naturellement, l’em- que l’aiguille est remise en place. que à-coup, suivi de l’arrêt de la montre. Un brayage tient le rôle principal. Cependant, il L’utilisation par Blancpain de cames en ressort trop faible n’aurait pas garanti le suc- convient également de considérer un autre forme de cœur pour le retour à zéro n’était cès de l’opération et le compteur des minutes élément essentiel, le retour à zéro. Après la certes pas une innovation, car elles sont n’aurait pas été fiable. En outre, le doigt à res- mise en marche du chronographe, le proprié- connues depuis deux siècles. L’aspect inédit de taire souhaite en général remettre à zéro l’ai- la construction résidait dans la conception du guille des secondes ainsi que les compteurs marteau, la pièce destinée à exercer une pres- des minutes et des heures (sur un chronogra- sion sur les cœurs lors de la remise à zéro. phe à deux poussoirs, le retour à zéro s’effec- Edmond Capt a dessiné à cet effet un simple tue par l’actionnement du poussoir inférieur). levier droit qui traversait presque tout le mou- Les chronographes de conception tradition- vement et possédait un petit doigt à la posi- nelle utilisent à cet effet une came en forme tion de chaque cœur. A chaque actionnement de cœur, simplement appelée cœur par les du poussoir qui commande le retour à zéro, la horlogers. Même si elle ressemble par sa roue à colonnes pousse ce levier latéralement forme à un bonbon de la Saint - Valentin, elle et amène chaque doigt vers son cœur, ce qui est calculée de manière logarithmique en sorte remet simultanément à zéro l’aiguille des Vue supérieure de l’embrayage vertical de toujours réagir à toute force exercée par un secondes et les deux compteurs (alors que la en position chronographe enclenché. Les levier en pivotant vers une position dans construction japonaise possédait des mar- laquelle le levier repose sur la partie supérieure teaux séparés pour le retour à zéro, ce qui ne sort devait posséder une forme qui permette du cœur. Comme la pièce tend à revenir systé- permettait pas de garantir la simultanéité de la libre rotation du rouage lors du retour à matiquement à la même position, elle repré- l’opération). De surcroît, ce marteau à trois zéro, au moment où il passait à sa hauteur sente la solution idéale pour le retour à zéro. têtes reste en place contre les trois cames en dans sa course vers le zéro. Avec intelligence, Aussi les chronographes sont-ils dotés depuis forme de cœur pendant que le chronographe l’invention d’Edmond Capt fait de ce doigt de nombreuses années d’un cœur sur chaque est arrêté et permet ainsi d’immobiliser les une partie intégrante de l’embrayage, une dis- axe - les secondes du chronographe, le comp- trois aiguilles. Le dessin particulier du marteau position à laquelle personne n’avait songé pré- teur des minutes, le compteur des heures. La a également été considéré comme une source cédemment. La dissection studieuse des chro- bras sont écartés du disque. DANS L’ A I R DU TEMPS nographes Blancpain a permis d’imiter égale- chronographe, ce qui lui a valu son nom, pour À cet égard, l’arme secrète réside dans l’em- ment cette invention. se confondre à nouveau avec sa position et ploi d’un isolateur - une nouvelle construction ses évolutions. de Blancpain qui a également servi de source L’ajout d’une nouvelle complication sous la forme d’une rattrapante entraîne un niveau Si ce principe semble aisé à décrire, sa d’inspiration à d’autres marques horlogères. de difficulté entièrement différent. Le calibre réalisation est particulièrement ardue. Les L’alignement des deux aiguilles est effectué par à rattrapante de Blancpain, le 1186, est un composants essentiels de ce mécanisme une came en forme de cœur attachée à l’axe proche parent du chronographe de base sont une autre roue à colonne, un frein et de la rattrapante. Lorsque les aiguilles coïnci- 1185. Le mécanisme de rattrapante est incor- un isolateur. L’actionnement de la com- dent parfaitement, un doigt dont la force pro- poré à l’arrière du chronographe. Le principe mande destinée à séparer les deux aiguilles vient d’un ressort exerce une pression contre fondamental semble d’une grande simplicité : des secondes provoque également le pivo- le cœur, le contraignant à se centrer lui-même il s’agit de doter le chronographe d’une tement d’une roue à colonnes qui actionne puis à se déplacer (ou, s'il est déjà immobilisé, aiguille des secondes supplémentaire qui un frein. Pensez au frein sous la forme à le rester) dans la même position que l’aiguille tourne la plupart du temps à l’unisson avec d’une pince. Le pivotement de la roue à principale des secondes du chronographe. l’aiguille principale des secondes du chrono- colonnes serre les mâchoires de la pince sur Dans la conception originale, ce doigt était graphe (dont les mouvements devraient les deux côtés d’une roue attachée à l’axe fabriqué en métal. Depuis lors, Blancpain a idéalement coïncider avec cette même de l’aiguille des secondes de la rattrapante. encore perfectionné la construction en le aiguille de telle sorte que l’œil ne soit pas en Le pincement du frein sur la roue sert à substituant par un disque pivotant en rubis mesure de percevoir sa présence) mais qui stopper la roue. Voilà qui semble parfait, pressé contre la came en forme de cœur. Pour peut être arrêtée indépendamment de l’ai- mais comme cette aiguille avance avec l’ai- les périodes où le frein est actionné, Edmond guille principale des secondes du chronogra- guille principale des secondes du chrono- Capt a conçu une autre roue, dite roue d’iso- phe afin de laisser cette dernière poursuivre graphe reliée par l’entremise de l’em- lateur, qui pivote et repousse loin du cœur le librement sa progression. Enfin, le méca- brayage au rouage de la montre, comment levier habituellement laissé en contact. Cette nisme doit permettre à l’aiguille arrêtée de empêcher ce frein d’interrompre complète- action dissocie l’aiguille désormais arrêtée de la rattraper l’aiguille principale des secondes du ment la marche de notre garde-temps ? progression de l’aiguille principale des secon- Le mécanisme de rattrapante vu par dessous. À gauche, les aiguilles sont superposées, la position de l’aiguille de rattrapante maintenue par le rubis rouge qui appuie contre le cœur bleu. À droite, les aiguilles sont séparées. La roue à colonnes a tourné, provoquant la pression des deux bras de freinage sur la roue de centre de l’aiguille de rattrapante et l’immobilisant (les flèches indiquent la direction de déplacement des bras). Remarquez la manière dont le bras à ressort vert a fait pivoter l’isolateur. Cette rotation, illustrée par une flèche dans le sens horaire, provoque l’ouverture du bras jaune portant le rubis, l’écartant du cœur bleu et isolant ainsi l’aiguille de la rattrapante, qui cesse d’accompagner celle des secondes. 36 | 37 aux utilisateurs des chronographes les plus chers au monde, fondés sur le principe des engagements de rouages, de ne pas laisser tourner le chronographe en permanence pour éviter toute usure excessive des dents fragiles de la roue de chronographe. Tel n’est pas le cas pour Blancpain et le chronographe peut continuer à fonctionner aussi longtemps que son propriétaire le désire. En offrant tous ces avantages aux passionnés d’horlogerie par la présentation des calibres 1185 et 1186, Blancpain a également Edmond Capt, le génie derrière la conception du 1185/86 QU’ONT DONC RÉALISÉ CAPT ET BLANCPAIN ? ILS ONT SURMONTÉ LES INCONVÉNIENTS DES CONSTRUCTIONS À ENGAGEMENT DE ROUAGES. COMMENT IMAGINER UN HOMMAGE PLUS SINCÈRE QUE DE VOIR LES AUTRES CONSTRUCTEURS HORLOGERS IMITER LES SOLUTIONS DE BLANCPAIN ? des du chronographe (d’où le terme d’isola- sur cet axe, qui aura pour conséquence une pulvérisé des records du monde. Ces deux teur). L’action du frein est rendue particulière- diminution de l’amplitude de la montre ou, mouvements étaient les mécanismes les plus ment précise par la présence de très petites pire encore, l’arrêt du mouvement. Toute iné- plats au monde dans leur catégorie et ils le res- dents sur sa surface de contact afin d’accroître galité dans le serrage du frein - l’un des côtés tent encore de nos jours. A l’évidence, ils ont la sécurité de sa prise sur l’extérieur de la roue de la pince exerçant une pression plus élevée tous deux mérité les plus grands honneurs, de la rattrapante. Au moment où l’utilisateur que l’autre – provoquerait de semblables qu’ils ont désormais reçus de la manière la souhaite réunir les aiguilles - c’est-à-dire déboires. plus convaincante qui soit. Comment conce- demander à l’une de rattraper l’autre - la roue Comment Edmond Capt et Blancpain sont- voir en effet meilleur et plus sincère hommage à colonnes pivote afin de relâcher simultané- ils donc parvenus à réaliser ce véritable tour de que de constater que les autres constructeurs ment le frein, faire avancer la roue d’isolation, force technique ? En maîtrisant l’embrayage horlogers sont si nombreux à avoir emprunté permettre au disque en rubis à l’extrémité du vertical, Blancpain a simultanément surmonté les solutions développées par Blancpain ? doigt d’exercer une nouvelle pression sur le les inconvénients des constructions destinées cœur et faire à nouveau coïncider l’aiguille de à engager les rouages. Les mouvements rattrapante avec l’aiguille des secondes princi- 1185/1186 assurent le départ et l’arrêt en pale du chronographe. douceur du chronographe à chacun de ses Comme il convient d’intégrer à ce processus actionnements. L’aiguille ne saute jamais. En- un incroyable degré de précision, il devient dès suite, comme le rouage de la montre est tou- lors évident que la rattrapante figure parmi les jours entraîné par la plaque la plus basse de complications horlogères dont la mise en pra- l’embrayage, de sorte que l’activation du chro- tique est la plus complexe et délicate. Le nographe ajoute uniquement l’aiguille des mécanisme de rattrapante est disposé sur l’ar- secondes du chronographe au rouage, l’am- rière du mouvement, ce qui accroît d’autant la plitude de la montre et, autre élément essen- longueur de l’axe des aiguilles. Le moindre tiel, sa précision de marche sont à peine déplacement ou le plus petit écart par rapport influencées par l’enclenchement du chrono- Calibre 1186 : le premier chronographe à à un alignement parfait entraînera une friction graphe. Il est systématiquement recommandé rattrapante automatique au monde (1989). I ART DE VIVRE GRUYÈRE AOC : UNE FORCE DE LA PAR DIDIER SCHMUTZ PHOTOGRAPHIES HUGUES DE WURSTEMBERGER ET CHRISTOPHE DUTOIT ans le précédent numéro des Lettres du D du Gruyère, autre fromage suisse classé en Brassus, nous vous présentions un tré- Appellation d’origine contrôlée (AOC1). sor de la gastronomie fromagère suisse : le Parler du Gruyère, raconter son histoire char- Vacherin Mont d’Or AOC. Digne enfant de gée de traditions, remonter à ses origines, la Vallée de Joux, ce fromage tout en finesse, apprécier ses qualités gustatives uniques, plein de délicatesse, arrive sur nos tables vers c’est entamer un voyage à travers les campa- la fin du mois d’août et disparaît en avril gnes de Suisse romande. À l’exception de avec l’installation du printemps. Une spécia- Genève et du Valais, tous les autres cantons lité saisonnière donc. Dès lors, que font les francophones sont inclus dans la zone de fromagers de la Vallée le reste de l’année, production telle qu’elle est définie dans le entre avril et septembre ? Nous l’avions dit : cahier des charges de l’AOC. 1 Ils ne sont que huit fromages à pouvoir bénéficier de cette prestigieuse reconnaissance qu’est l’AOC : L’Etivaz, Gruyère, Berner Alpkäse, Sbrinz, Vacherin Mont d’Or, Formaggio d’Alpe Ticcinese, Tête de Moine et Vacherin fribourgeois. 38 | 39 PARLER DU GRUYÈRE, RACONTER SON HISTOIRE CHARGÉE DE TRADITIONS, C’EST ENTAMER UN VOYAGE À TRAVERS LES CAMPAGNES DE SUISSE ROMANDE. ART DE VIVRE 40 | 41 Point de départ de notre périple au elles sont ensuite plongées dans un bain de Oublions les techniques de fabrication pour Brassus, à la fromagerie où travaille René sel pour vingt-quatre heures avant de pren- évoquer plutôt la poésie du lait. Quelle Piguet, chef d’exploitation au service de la dre place en cave pour des soins quotidiens. magnifique matière ! Je me souviens de cette Société de laiterie du village depuis 27 ans. Pendant ce temps, arrivent à tour de rôle les toute jeune fromagère qui disait sa passion. Nous irons ensuite sur les montagnes grué- treize producteurs de lait qui livrent la traite Fille de paysan, elle s’en allait avec son père à riennes avant de revenir sur les alpages de la du matin. C’est ce lait, ajouté à celui du soir la fromagerie et se mettait à rêver devant les Vallée de Joux. précédent, qui servira à la fabrication du jour. chaudières pleines à ras bord. « J’étais comme À l’entrée de la fromagerie du Brassus, en Entre analyses des échantillons de lait préle- ensorcelée par ce lait qui allait nous donner activité depuis 190 ans et rénovée régulière- vés sur chaque livraison, nettoyage des pla- du Gruyère, ou un Vacherin, ou une tomme, ment (la dernière fois en automne 2005) un ques marquées « Le Gruyère AOC » et sur- ou du beurre, ou de la crème. Comment panneau sévère avertit le curieux : veillance de la température du lait qui peut-on faire autant de produits différents chauffe doucement, René n’a guère le temps avec une seule matière ? C’était un mystère de parler. Il explique néanmoins que « la mar- fascinant pour la petite que j’étais. » STOP ! Zone d’hygiène. Accès interdit à toute personne non autorisée. Dehors, le froid est piquant. Munis de tou- que sur les plaques qui entoure le talon du Le dernier producteur arrive vers 7 heures. tes les autorisations, nous entrons dans cet fromage pendant le temps de presse a été Charles Rochat a ceci de particulier qu’il est univers de vapeur, de tuyaux rutilants, de introduite pour distinguer l’authentique un descendant des paysans horlogers à la robinets, de cuves. Il y en a trois, dont une sur Gruyère des copies qui circulent dans les cou- lointaine époque où les paysans se transfor- pied pour le Vacherin. Celle-ci est inactive. lisses du marché noir ». Une plaie ! Mais, maient en horlogers, une fois achevé le tra- René s’affaire. Sa journée a commencé avant comme tout produit de luxe (montres, par- vail avec le troupeau. Charles nous emmène 5 heures du matin par le démoulage des fums, maroquinerie...), le Gruyère n’est pas sur son domaine, voir la maison au style typi- meules d’une trentaine de kilos chacune ; épargné par les contrefaçons. que de la Vallée. Tout en haut de la façade, SA JOURNÉE A COMMENCÉ AVANT 5 HEURES DU MATIN PAR LE DÉMOULAGE DES MEULES D’UNE TRENTAINE DE KILOS CHACUNE. ART DE VIVRE sous le toit, une lignée de fenêtres rappelle cation ou construisent de nouvelles froma- vallées ; afin de satisfaire une demande qui ce temps aujourd’hui révolu. Exceptée une geries. À partir de là, la production de va croissant dans les pays avoisinants, les photographie, Charles n’a guère de souve- Gruyère s’implante - ou reprend durable- paysans-fromagers se mettent à fabriquer nirs à nous raconter. Nous nous contente- ment - dans le canton de Vaud. aussi durant l’hiver. Les premières fromage- rons de l’image reproduite ici. Ce bref coup d’œil en arrière montre que ries villageoises apparaissent ; elles supplantent peu à peu la production alpestre. L’ancrage du Gruyère, ou disons plutôt le nous ne sommes pas encore parvenus aux développement de sa fabrication en pays sources du Gruyère . Il faut remonter loin Etalée dans le temps, la fabrication du vaudois, remonte aux années vingt. À la fin dans le temps, jusqu’au Moyen Âge, pour Gruyère se déploie aussi dans l’espace géo- de la Grande Guerre, la production de lait trouver les premières mentions d’un fromage graphique. Son territoire court le long de grimpe en flèche alors que les exportations gras qui se fabriquait uniquement en été sur l’arc jurassien, descend vers la plaine, tra- de fromage et de lait condensé chutent. À les alpages des montagnes gruériennes. Les verse les régions de grandes cultures du can- l’étranger, les économies sont exsangues. montagnards de ce coin de pays sont indé- ton de Vaud, arrive à Fribourg - le canton qui Entre 1921 et 1922, le prix du lait s’effondre, niablement les inventeurs du Gruyère. Ils gar- assure à lui seul la moitié de la production - il passe de 36 à 19 centimes. Nestlé ferme dèrent longtemps leur secret de fabrication, et grimpe enfin dans les alpages des ses condenseries, une mesure radicale qui jusque vers le milieu du XVII siècle lorsque Préalpes fribourgeoises. Nous voilà parvenus touche de plein fouet les producteurs de lait des fromagers ambulants originaires de la en Gruyère3 au cœur du pays qui a donné dans plus de soixante villages vaudois. Face Gruyère s’en allèrent offrir leurs services sur nom et naissance à ce fromage aujourd’hui à la crise, les sociétés de laiterie cherchent à les alpages du Jura vaudois. Par la suite, la mondialement apprécié. Montons sur les remettre en état d’anciens ateliers de fabri- fabrication du Gruyère se généralise dans les sommets pour une rencontre surprenante. 2 e CHARLES ROCHAT EST UN DESCENDANT DES PAYSANS HORLOGERS À LA LOINTAINE ÉPOQUE OÙ LES PAYSANS SE TRANSFORMAIENT EN HORLOGERS, UNE FOIS ACHEVÉ LE TRAVAIL AVEC LE TROUPEAU. 2 Le site www.gruyere.com contient une partie historique très complète. 3 L’un des sept districts du canton de Fribourg. 42 | 43 ART DE VIVRE Les alpages fribourgeois : retour aux sources Interloqués par ce convoi dérapant dans la qu’il faut descendre tous les jours les meules pente, les randonneurs en sueur se deman- aux caves de la Tzintre à Charmey, que pour dent d’où il sort, si ce n’est pas un coup le transport, Marco vaut tous les hélicoptè- Sur le chemin caillouteux, Georges et monté par l’Office du tourisme pour faire res, que dans le temps c’était ainsi, en haut Marco ne passent pas inaperçus. Le pre- bien dans le paysage. « Ils vous payent com- en bas tous les jours, à dos d’homme avec mier est patron d’une fiduciaire à Genève, bien pour faire ça ? » questionnent-ils fré- l’oiseau ou sur les flancs du mulet, que la vie le second est un vaillant mulet transpor- quemment. À chaque fois, Georges rigole alpestre n’est pas l’apanage trompeur des teur de fromages. Curieux attelage. Dans avant de se fendre d’une explication. Il dit Heidi de la nature ou des champions de la les passages les plus scabreux, l’homme qu’un peu plus haut, au chalet des Morteys à grande surface. Il dit que Marco et lui trans- encourage la bête, doucement, avec la 1900 mètres d’altitude, il se fabrique deux pirent ensemble dans la sente abrupte. complicité qu’il faut, la voix qu’il faut. Il est Gruyères par jour, que l’herbe et les fleurs En homme discret ainsi que l’exige sa pro- beau de l’entendre. confèrent au fromage un goût incomparable, fession de gestionnaire financier, Georges 44 | 45 n’aime pas parler de lui. Pourquoi est-il là ? Pourquoi bredzon4 et bottes à gamaches5 au lieu du complet-veston assorti aux souliers vernis ? Pourquoi ces efforts sans confort ? Pourquoi sa limousine s’appelle-t-elle Marco ? Parce que natif d’un petit village de montagne, fils de gens de la terre, il a gardé la racine intacte. Amoureux de son pays, l’enfant de Bellegarde6 randonnait en week-end comme presque tous les fribourgeois de l’extérieur, allant par monts et par vaux, d’alpages en cabanes, de buvettes en pâturages pour un peu de rafraîchissement à grandes rasades de ressourcement. Un jour de balade sous le Vanil Noir, il croise l’armailli Bruno Gachet au travail dans sa cambuse enfumée, lui commande un fromage. Et réfléchit : dans les conditions extrêmes de cet alpage, comment fait cet homme pour descendre ses Gruyères ? Comme il peut, grâce aux amis, aux parents et puis si ça ne va pas, il faudra arrêter la fabrication. Arrêter ! Pas question, Georges propose ses services à un Bruno incrédule. Lui, le col blanc, avec moi, le paysan planté dans sa montagne ? Pas pensable, il doit confondre le bureau et l’étable ! C’était en 1999. Depuis, Georges et Marco sont indissociables de la vie au chalet des Morteys, l’homme et l’animal forment un couple d’auxiliaires incontournables ; sans eux, il n’y aurait sans doute plus de chaudière en activité dans ce vallon sauvage, trop loin de tout. Grâce à eux, là-haut la tradition dans sa plus belle expression s’accroche à la réalité. Rare. Cela fait maintenant plus de vingt ans que Bruno, sa femme Martine et leurs trois petits enfants abandonnent le confort et les facilités du bas pour se retrouver aux Morteys ; en fonction de la météo, la famille y passe quatre à six semaines. Entre juillet et août, les 40 vaches du troupeau pâturent au dernier étage d’une transhumance commencée en mai. Audelà d’un mouvement séculaire, la montée en alpage constitue une nécessité économique. À l’heure où nombre de paysans hésitent de plus en plus à alper vaches et génisses, Bruno ne saurait se passer des prairies montagneuses. 4 Costume traditionnel des armaillis. 5 Grosses guêtres. 6 Village au pied du col du Jaun qui marque la frontière entre les cantons de Berne et Fribourg, entre la zone du Gruyère AOC et celle du Berner Alpkäse AOC. ART DE VIVRE GRÂCE À EUX, LÀ-HAUT LA TRADITION DANS SA En Vallée de Joux, l’été Chaque printemps, le troupeau doit quitter le lage durant l’hiver. « Sans les alpages, avec mes domaine de Mézières, petit village en contre- 13 petits hectares, mon domaine ne serait tout bas de la ville de Romont. Il le doit, en démé- simplement pas viable, il faudrait acheter tout Le feu crépite sous la chaudière. 52°, 53°, nageant trois fois d’un alpage à l’autre, pour le fourrage, ce qui est impensable économi- 54°,… la température du caillé monte dou- permettre à l’herbe de pousser, afin de pro- quement ou alors vendre une partie de mes cement ; approche le moment de la sortie, duire les tonnes de fourrage qui permettront vaches en automne et trouver un travail com- à bras et à la toile comme l’exige la section au troupeau de passer l’hiver au chaud. Bruno plémentaire en dehors de la paysannerie. C’est 4 du cahier des charges intitulée « Condi- a pleine conscience du fait que la survie de sa plus du boulot ! Et de plus, changer de métier tions spécifiques à l’obtention, l’étique- famille dans la paysannerie dépend de l’équili- trop de boulot. » Et bien non ! Paysan et éle- tage et au contrôle du Gruyère d’alpage bre plaine - montagne durant la belle saison et veur passionné, il s’accroche à son troupeau, à AOC ». Au chalet de La Combe Noire, au- par la livraison de son lait à la fromagerie du vil- ces montagnes qu’il exploite en location. dessus de la commune du Lieu en Vallée de 46 | 47 Joux, Daniel Hauser exécute les mêmes clôtures à poser et on n’y va pas en vélo ! uniquement durant l’été ; le caractère sai- gestes que son collègue Bruno. Nous som- Faut pas oublier non plus le nettoyage et sonnier nous reconduit également aux mes donc toujours dans la catégorie l’épierrage des pâturages… ». Sans parler caractéristiques de la fabrication en mon- alpage. Seul le paysage a changé, il s’est des 150 génisses qui exigent soins et sur- tagne. Fromageries villageoises comme celle du Brassus, alpages d’altitude en Gruyère ou PLUS BELLE EXPRESSION S’ACCROCHE À LA RÉALITÉ. alpages plus aisés à travailler en Vallée de Joux, multiples sont les lieux de fabrication des Gruyères AOC. Variant les goûts et les fait plus doux, plus vaste, plus accessible, veillance, le chardon tenace et la gentiane saveurs, la grande famille reste cependant plus maniable pour l’homme, moins risqué envahissante redonnent une allure d’al- unie dans ses différences. Voilà sa force. pour le troupeau. Entre l’alpage fribour- page à ces étendues naturelles, occupées geois et le vaudois, la différence apparaît dans le cadre naturel d’abord, dans les conditions d’exploitation ensuite. Au chalet de La Combe Noire, pas de Marco, ni de longues heures de marche, le camion de La matière première destinée à la fabrication du GRUYÈRE AOC est obligatoirement un Fromages Gruyère SA prend livraison de la lait cru, livré matin et soir à la fromagerie. Il provient de vaches nourries aux fourrages production devant le pas de porte avant de naturels, sans adjonction de conservateurs (herbe en été, foin et regain en hiver ainsi que rouler en direction de Froideville, là où se divers compléments strictement définis dans le cahier des charges). L’usage d’additifs lors trouvent les caves de la filiale d’un impor- de la fabrication et durant l’affinage est prohibé. Pas moins de 400 litres de lait frais sont tant nécessaires pour la fabrication d’une meule d’environ 35 kg. Durant la lente maturation commerçant affineur, Fromages Gruyère SA. La taille des estivages change aussi. Au dans les caves d’affinage - elle dure cinq mois au minimum - les meules sont régulièrement retournées et frottées à l’eau salée. L’humidité va permettre la formation de la chalet de la Grandsonnaz-Dessous, Félix morge qui favorise le processus de maturation agissant de la croûte vers l’intérieur. transforme le lait de 94 vaches, soit un Le Gruyère se présente sous forme de meules rondes avec une croûte emmorgée, grainée contingent de 170.000 kilos pour la sai- et uniformément brunâtre et saine. Le talon est légèrement convexe. Au toucher, la pâte son. À le voir à l’œuvre autour de ses deux a l’aspect d’une surface fine et faiblement humide. Elle est moelleuse, moyennement cuves, on dirait qu’un fromager de plaine a ferme et peu friable. De teinte ivoire à légèrement citronnée, la couleur de la pâte varie déménagé ses installations en montagne. selon les saisons. Les goûts sont soutenus par une note plus ou moins salée ; ils sont « C’est vrai », admet-il, « ce n´est pas vrai- francs, équilibrés et aromatiques. Les saveurs fruités dominent et varient selon les ter- ment comparable à ceux des Préalpes, roirs, restituant ainsi toute la richesse et la diversité des herbages de la zone de produc- mais nous sommes aussi des armaillis. Il y a tion. Le Gruyère est un fromage aux multiples saveurs. 280 hectares, soit plus de 30 kilomètres de I ART DE VIVRE DE L’OPÉRA AU PHILHARMONIQUE UN ENTRETIEN AVEC PAMELA ROSENBERG PAMELA ROSENBERG N’A CESSÉ D’INNOVER TOUT AU LONG DE SA CARRIÈRE MUSICALE. LES LETTRES DU BRASSUS L’ONT RENCONTRÉE RÉCEMMENT POUR CONNAÎTRE SES IMPRESSIONS SUR SES NOUVELLES FONCTIONS À BERLIN. Pamela Rosenberg a poursuivi une bril- Times qui n’a pas hésité à qualifier sa requis un grand travail de ma part car il m’a lante carrière sur deux continents. Cette mise en scène inspirée du Saint François fallu découvrir les caractéristiques et les spé- Californienne de naissance est désor- d’Assise de Messiaen de plus grand évé- cificités d’un orchestre symphonique. mais directrice exécutive – le terme offi- nement mondial de la saison d’opéra. Les modes de planification, par exemple, ciel est « Intendantin » – du célèbre Les Lettres du Brassus ont récemment sont extrêmement différents. Dans le Philharmonique de Berlin, un poste rencontré Pamela Rosenberg afin d’évo- domaine de l’opéra, il est indispensable d’éta- qu’elle quer ses nouvelles fonctions à la tête du blir des prévisions à horizon de trois ou qua- Philharmonique de Berlin. tre ans car tout projet implique de travailler occupe depuis août 2006. Auparavant, elle avait dirigé divers opé- avec plusieurs chanteurs, un chef d’orchestre, ras en Allemagne et en Californie. Elle a un metteur en scène et un décorateur. notamment présidé aux destinées du Après tant d’années consacrées à Deutsches Schauspielhaus de Hambourg, l’opéra, comment avez-vous vécu cette Pour sa part, la programmation d’un de l’Opéra de Francfort, de l’Opéra des transition pour assumer la direction de orchestre symphonique s’effectue deux ans Pays-Bas à Amsterdam et de l’Opéra de l’orchestre philharmonique de Berlin ? à l’avance, à l’exception du programme de Stuttgart. Avant de retrouver l’Europe, Sans conteste, il s’agit de deux champs d’ac- tournées. En outre, l’unité de planification elle a administré l’Opéra de San tivité différents. La direction d’un orchestre est d’une semaine car le programme change Francisco pendant six ans, au cours des- représente une tâche nettement moins com- sur une cadence hebdomadaire (en règle quels son talent a été unanimement plexe que l’administration d’une compagnie générale avec trois ou quatre concerts où reconnu, y compris par le New York d’opéra. Néanmoins, cette transition a sont exécutées les mêmes œuvres). À chaque 48 | 49 fois, il faut engager un chef d’orchestre, parfois aussi un soliste ou un chœur. Cependant, les intervenants ne sont pas aussi nombreux que dans le cas d’un opéra et le processus de programmation d’un orchestre symphonique est nettement plus flexible. Enfin, les décisions relatives à la programmation sont prises d’une autre manière au sein d’un ensemble philharmonique. Le directeur d’une compagnie d’opéra façonne dans une large mesure le profil de la troupe en choisissant le répertoire, les metteurs en scène, les décorateurs, les chanteurs et les chefs d’orchestre. Le directeur musical tient un rôle essentiel dans l’adoption d´une grande partie de ces décisions. Dans la ART DE VIVRE majorité des cas, des thèmes de prédilection d’intérêt général qui concernent l’orchestre dent que l’opéra offre une vaste et des idées dominantes sur les options dra- dans son ensemble. gamme, des œuvres lyriques baroques Cependant, il existe de nombreux domai- aux premières mondiales, mais nous culière à la composition de la saison. nes dans lesquels je suis en mesure de pren- devons effectuer des choix en nombre Dans le cas du Philharmonique de Berlin, la dre des résolutions et de façonner l’organi- nettement plus élevé car nous présen- planification relève d’un travail collectif. Sir sation. Nous donnons un nombre très élevé tons un programme différent chaque Simon Rattle, notre directeur musical, deux de concerts de musique de chambre au semaine pendant plus de dix mois par membres de l’orchestre, Stephan Gehmacher, cours d’une saison et je décide fondamenta- année. La quantité requiert aussi une directeur associé à la planification, et moi- lement du programme et des interprètes. sélection plus affinée, car nous avons maturgiques qui confèrent une forme parti- même étudions divers sujets et idées avant En plus de mes fonctions d´intendante de l’embarras du choix, un peu comme lors- de prendre une décision. Chacun de nous l’orchestre, je suis également la directrice de que nous nous trouvons dans une confi- apporte des contributions d’intensité diffé- la Philharmonie de Berlin. Elle se compose de serie. Nous souhaitons également établir rente, selon la nature du projet dont nous deux salles de concerts (qui comptent respec- des liens entre les programmes, définir discutons. Toutefois, à la fin de la journée, le tivement 2400 et 1200 fauteuils) qui accueil- les raisons qui incitent à jouer certains dernier mot revient à Sir Simon. lent près de 500 concerts chaque année. Sur morceaux au cours d’une même soirée. La forme d’administration de l’orchestre ce nombre, l’orchestre philharmonique en Nous avons aussi l’ambition de forger philharmonique de Berlin s’écarte de celle en assure près de 140. Je travaille actuellement à des associations entre certains concerts. vigueur dans la presque totalité des autres la création de nouveaux programmes, à l’ins- Nous pouvons ainsi choisir de suivre orchestres car il s’agit de l’une des trois for- tar des concerts libres à l’heure du déjeuner, l’évolution d’un compositeur, de mettre mations symphoniques au monde à se fonder afin d’ouvrir la maison sur la ville et la conver- différentes époques musicales en rela- sur une gestion démocratique. Ainsi, les musi- tir en un centre animé d’échanges culturels. tion, de créer des fils rouges au cours de ciens élisent eux-mêmes le directeur musical. la programmation d’une même saison. De la même manière, l’orchestre sélectionne Comme le répertoire est particulière- Voilà qui nous donne un vaste espace où en parfaite autonomie des interprètes qui ment vaste, apparemment beaucoup déployer notre créativité. joueront dans un concert. Chaque groupe de plus grand que celui de l’opéra, cette l’orchestre, les violons par exemple, effectue diversité s’apparente-t-elle pour vous Pendant des décennies, vous n’avez son choix en toute indépendance. à une nouvelle liberté ? cessé de voyager à travers le monde L’orchestre philharmonique de Berlin est C’est plutôt une stimulation. Nous réali- pour écouter des musiciens, des chefs et une fondation, dont le conseil comprend le sons un si grand nombre de programmes des orchestres. Au regard de cette directeur musical, l’administrateur – l´inten- que nous avons réellement la possibilité expérience et du temps que vous avez dant – et deux représentants de l’orchestre. d’effectuer des recherches à travers quatre passé à Berlin, pouvez-vous mentionner Il nous appartient de trouver ensemble un siècles de musique. Cette possibilité élargit quelques éléments caractéristiques de consensus sur les importantes questions considérablement nos horizons. Il est évi- l’orchestre philharmonique de Berlin ? LA FORME D’ADMINISTRATION DE L’ORCHESTRE PHILHARMONIQUE DE BERLIN DIFFÈRE DE LA PLUPART DES AUTRES FORMATIONS SYMPHONIQUES AU MONDE PAR SA GESTION DÉMOCRATIQUE. 50 | 51 Il est toujours délicat d’aborder un rendre compte pendant les répétitions Naturellement, l’Académie porte le nom thème aussi vague que la sonorité. et, plus particulièrement encore, au de Karajan. Quelle ombre continue-t-il à Toutefois, l’orchestre philharmonique de moment où un nouveau musicien intè- projeter aujourd’hui ? Berlin est reconnu pour posséder une gre l’ensemble. L’un de nos bassistes est Herbert von Karajan est mort en 1987. sonorité exceptionnelle. De l’avis géné- un Vénézuélien de 21 ans. Il est entré Sans aucun doute, la fabuleuse réactivité ral, elle est brillante, chaude, d’une dans notre formation à 18 ans. Il avait de l’orchestre est une qualité qu’il a lui- incroyable richesse. Au cours des derniè- déjà un grand talent, mais il lui a fallu même développée, à l’instar de la façon res années, sous la baguette de Claudio apprendre la culture musicale de l’or- dont les musiciens s’écoutent les uns les Abbado et de Sir Simon Rattle, l’orches- chestre. Ses confrères bassistes s’en sont autres. Une part de son héritage réside tre a encore étendu la renommée de son chargés au cours de la première année également dans la sonorité particulière expression stylistique. Sir Simon dirige qu’il a passée parmi nous. C’est cette de l’orchestre qui existe toujours de nos de nombreux compositeurs français. Ses proximité entre les musiciens qui main- jours. Un autre élément réside dans la interprétations de Ravel sont tout sim- tient cette tradition vivace. manière selon laquelle les musiciens plement magiques. En ce moment, la L’Académie Karajan représente un jouent chaque morceau comme s’il musicalité est si extraordinaire que de autre facteur essentiel pour le maintien s’agissait d’une question de vie ou de nombreux mélomanes estiment qu’elle de cette culture musicale unique. Les mort. La passion de l’interprétation est dépasse tout ce qu’ils ont entendu meilleurs jeunes interprètes du monde le signe distinctif de notre ensemble. jusqu’alors. souhaitent y accomplir leurs études. Les L’interprétation d’une oeuvre de Beethoven Il est aussi admirable de remarquer la représentants de l’Académie se sont ren- laisse toujours une profonde impression. manière dont les musiciens de l’orchestre dus au Venezuela et ont rencontré ce L’orchestre donne une brillance inté- s’écoutent les uns les autres. On a parfois jeune musicien extraordinaire. En effet, rieure aux œuvres de Beethoven ou de l’impression d’assister à un concert de l’Académie accueille des étudiants venus Brahms. musique de chambre donné par 80 musi- d’une vingtaine de pays. Ce bassiste a Malgré la présence vivante de l’héri- ciens ou davantage. Ils ont développé suivi pendant deux années l’enseigne- tage de Karajan dans ces aspects, l’orches- des antennes entre eux. Les musiciens ment de l’Académie avant d’obtenir le tre philharmonique de Berlin est un orga- sont très sensibles aux signaux ou à l’état statut de remplaçant afin d’engranger nisme en constante évolution. Claudio d’esprit de la personne qui les dirige. de l’expérience et de mieux comprendre Abbado a déclaré qu’il souhaitait décons- la manière dont l’orchestre joue. Et je truire cette sonorité. A ses yeux, il y avait Et comment l’expliquez-vous ? tiens à préciser que les musiciens qui ter- des éléments plus importants, parvenir à C’est une aptitude qui s’enseigne entre minent l’Académie doivent passer des une sonorité transparente par exemple. musiciens. Elle fait partie de la culture auditions à l’égal de n’importe quel Et même si Abbado a entraîné l’orchestre orchestrale du Philharmonique et les autre candidat pour les postes qui se sur des chemins très différents dans cer- musiciens la travaillent. On peut s’en libèrent au sein de l’orchestre. tains domaines, il a conservé néanmoins ART DE VIVRE Le chef d’orchestre Sir Simon Rattle. 52 | 53 cette sonorité caractéristique, brillante et membre est également choisi par l’orchestre. gagner en importance avec mon arrivée, forte. D’une manière semblable, Sir Le président de l’Académie Karajan y siège mais je ne souhaite pas augmenter leur Simon a ouvert d’autres portes. C’est un aussi de plein droit. Les autres postes revien- nombre car il ne s’agit pas de grands opéras, spécialiste des compositeurs français et de nent au directeur financier ainsi qu’à deux ou mais d’opéras de concert. Nous devons nous Haydn. Sous sa direction, l’ensemble a trois citoyens indépendants. Le conseil n’inter- souvenir que nous nous trouvons dans une joué avec plusieurs chefs experts en musi- vient jamais dans les décisions relatives au ville qui possède trois compagnies d’opéra à que baroque, ce qui a agrandi son poten- répertoire, au programme et aux représenta- temps complet. Si tel n’avait pas été le cas, tiel stylistique. Et Sir Simon lui a fait jouer tions. Ses membres ont approuvé ma nomina- mon point de vue serait différent. de nombreuses œuvres de musique tion au titre de directeur général et tranchent En décembre 2006, nous avons joué « A contemporaine dans des questions relatives au financement, Flowering Tree » (L’arbre en fleurs), un travail au budget, etc. de John Adams. En juillet 2007, nous avons (comme Abbado). Pourtant, bien que les horizons artistiques de l’orchestre se soient agrandis, il a Ce mode de fonctionnement contraste présenté « Der Ring des Nibelungen » conservé cette sonorité de base unique, fortement avec celui de nombreux conseils (L’Anneau du Nibelung) au festival d’Aix-en- qui reste présente, de manière subtile, de direction qui gèrent des orchestres sym- Provence et au Festival de Pâques de dans les profondeurs de l’orchestre. phoniques ou des compagnies d’opéra. Pas Salzbourg, des performances très émouvan- une seule fois, le conseil n’est intervenu pour tes car nous possédons aussi notre sonorité Vous avez eu affaire à des conseils contester une décision artistique ou deman- particulière pour Wagner. Nous accompa- d’administration où le critère pour der un changement de programme. gnons chaque année un opéra mis en scène lors du Festival de Pâques de Salzbourg et l’attribution d’un poste se mesure au montant des dons effectués et vous J’ai remarqué quelques œuvres d’opéra donnons plusieurs concerts. Karajan a fondé avez constaté les effets de ce mode de dans la programmation, peut-être en le Festival de Pâques et celui-ci est le gestion. Comment l’orchestre philharmo- raison de vos activités antérieures. Quel domaine exclusif de l’orchestre philharmoni- nique de Berlin est-il administré et de rôle tient l’opéra dans le répertoire ? que de Berlin depuis sa création. quelle manière cette gestion peut-elle L’orchestre est toujours très heureux, et Sir exercer une influence sur vos activités ? Simon particulièrement, de pouvoir jouer Vous mentionnez des programmes à Plus de quarante-deux pour cent du finan- des opéras. Grâce à sa sonorité d’une ri- Aix-en-Provence et à Salzbourg, ce qui cement du Philharmonique de Berlin est chesse inouïe, l’orchestre philharmonique de me fait penser aux longues tournées de assuré par la ville de Berlin. Le conseil de Berlin parvient à stupéfier les mélomanes par l’orchestre. Quelles sont les prochaines fondation se compose de douze person- ses interprétations de musique lyrique. Ce- destinations prévues à votre programme ? nes qui représentent un large éventail de pendant, notre programmation ne nous per- Nous réalisons une tournée de 40 concerts. la vie culturelle de la cité. Chaque parti met pas de présenter de grands opéras. Nous nous rendons en Asie et aux États- politique peut nommer un délégué et un Certains pensaient que l’art lyrique allait Unis en alternance, un an sur deux. En cette L’ORCHESTRE PHILHARMONIQUE DE BERLIN EST RECONNU POUR POSSÉDER UNE SONORITÉ PARTICULIÈRE. SOUS LA DIRECTION DE SIR SIMON RATTLE, LA RENOMMÉE DE SON EXPRESSION STYLISTIQUE S’EST ENCORE ÉTENDUE. ART DE VIVRE nouvelle année, nous prévoyons de jouer Istanbul au printemps 2010, en plus de la de Vienne. Nous y sommes pendant les fêtes dans les pays baltes. Au printemps dernier, tournée prévue en Australie en automne de de Pâques alors que nos confrères autrichiens nous sommes allés dans les îles Canaries, la même année. Chaque année à Pâques, s’y produisent au cours du festival d’été. puis à Paris, Londres et Bruxelles. Nous nous nous sommes à Salzbourg (pour le festival Nous avons également des projets particu- rendrons au Japon et en Corée au cours de anciennement appelé Festival Karajan). liers pour l’Afrique du Sud en 2009. Nous l’automne 2008. Puis, nous réaliserons une Actuellement, nous nous produisons à serons le deuxième orchestre européen à tournée dans les Balkans qui s’achèvera à Salzbourg avec l’orchestre philharmonique nous rendre dans ce pays. Nous avons décidé de jouer notamment dans des endroits tels que Soweto et de travailler également avec « RHYTHM IS IT » A SUSCITÉ DES DISCUSSIONS les merveilleux chœurs sud-africains. Nous avons établi un programme très spé- POLITIQUES AU SUJET DES PRIORITÉS ET DES BUDGETS cial pour notre visite à New York. Nous apporterons « Rhythm Is It » au Bronx. Ce SCOLAIRES. IL A AUSSI REPRÉSENTÉ UNE ARME projet a été développé à partir du film du même nom. Notre groupe de danse passera ESSENTIELLE DANS LE COMBAT POUR GARANTIR AUX plusieurs semaines dans les écoles du Bronx. Nous essayerons de travailler spécialement ÉCOLES DES FONDS POUR L’ENSEIGNEMENT ARTISTIQUE. Le Philharmonique de Berlin (salle de concert). avec des enfants qui n’ont jamais dansé 54 | 55 DATES DE TOURNÉE POUR LA SAISON 2008 : 25 janvier 2008 : Salle Pleyel, Paris 1er mai 2008 : Moscou* 26 janvier 2008 : Kultur & Kongress 2 mai 2008 : Riga* Zentrum, Lucerne 28 janvier 2008 : Musikverein, Vienne 4 mai 2008 : Tallin* 5 mai 2008 : Helsinki* 7 mai 2008 : Stockholm* 19 février 2008 : Stuttgart* 8 mai 2008 : Oslo, Nouvel Opéra 20 février 2008 : Francfort* 21 février 2008 : Essen, Philharmonie Du 28 juin au 6 juillet 2008 : 22 février 2008 : Hanovre* Festival d’Aix-en-Provence, Grand Théâtre de Provence (« Siegfried » Du 15 au 24 mars 2008 : Salzbourg, Festival de Pâques, Großes Festspielhaus (« La Walkyrie » et plusieurs concerts) et plusieurs concerts) * Plus d’informations sur http://www.berliner-philharmoniker.de Herbert von Karajan auparavant afin qu’ils découvrent les joies de tance véritable du projet réside dans le fait Dix-sept nationalités sont actuellement repré- l’expression corporelle. qu’il illustre la nécessité d’enseigner les arts dans sentées au sein de l’orchestre. Le public s’ima- L’origine de ce projet remonte à trois ans, les écoles. « Rythm Is It » a suscité des discus- gine parfois qu’un ensemble de cette renom- lorsque nous nous sommes rendus dans des sions politiques au sujet des priorités et des mée est uniquement constitué de musiciens écoles de quartiers défavorisés. Royston budgets scolaires. Pendant ses trois années d’âge mûr. L’âge moyen s’établit cependant Muldoon (de Dance United) a passé plusieurs d’existence, il a aussi représenté une arme entre 37 et 38 ans. La recomposition de l’or- mois à travailler avec des enfants qui vivent essentielle dans le combat que nous avons chestre a commencé avec Abbado quand la dans les quartiers les plus difficiles de Berlin et mené pour garantir que les écoles disposent de plupart des musiciens de l’époque Karajan a qui n’avaient jamais reçu de cours de mouve- fonds destinés à l’enseignement artistique. fait valoir ses droits à la retraite. ment. Un documentaire a retracé cette expé- Nous donnerons deux représentations de Le processus d’audition pour recruter de rience. Au début, on voit des enfants qui « Rhythm Is It » à New York. Notre équipe de nouveaux musiciens est incroyablement n’obéissent pas et montrent de faibles capaci- chorégraphes et de moniteurs travaillera rigoureux. De talentueux musiciens du tés de concentration. Peu à peu, on constate préalablement pendant plusieurs semaines monde entier viennent à Berlin pour présen- qu’ils commencent à développer un certain avec 200 enfants d’âge scolaire (aussi dans ter leur candidature aux emplois disponi- intérêt et essaient de suivre les instructions. les zones les plus difficiles de la ville). En plus bles. Actuellement, nous avons un poste Vers la fin, leur talent et leurs aptitudes appa- de ces représentations, nous jouerons de la disponible dans les violons. Hier, 38 audi- raissent alors qu’ils interprètent une ambi- musique de chambre dans six quartiers du tions ont été réalisées et nous avons reçu tieuse chorégraphie. Tout prend finalement Bronx. aujourd’hui 14 postulants, mais aucun n’a forme quand les musiciens et les enfants com- J’ai aussi découvert un autre aspect dans mencent à répéter ensemble. L’événement ce programme. Les études réalisées mon- s’est réalisé dans un ancien entrepôt devant trent que l’enseignement des arts dans les Nous avons été ravis de votre travail à deux mille personnes. Il est difficile de décrire écoles stimule la croissance et les résultats San Francisco, nous sommes heureux de l’euphorie des enfants qui venaient d’interpré- en général. Les performances scolaires l’enthousiasme et de l’énergie que vous ter le Sacre du Printemps de Stravinsky. s’améliorent quand les arts comptent au déployez à Berlin et attendons avec nombre des matières enseignées. impatience d’en découvrir les premiers Chronique de cette épopée, le film « Rhythm Is It » a rencontré un grand succès. été accepté. résultats. Veuillez accepter nos chaleureux Il a été présenté pendant une année entière et Comment l’orchestre recrute-t-il remerciements pour avoir accordé cet a remporté de nombreux prix. Mais l’impor- ses musiciens ? entretien aux Lettres du Brassus. I ART DE VIVRE Montreux est une ville de contrastes. Une végétation méditerranéenne prospère sur ses quais alors que les imposantes Alpes enneigées se dressent sur l’autre rive du lac. LES PLAISIRS DE LA VIE EN SUISSE L ’ I N C R O Y A B L E L É G È R E T É D E L A T A B L E LE PONT DE BRENT À MONTREUX SE DISTINGUE PAR UNE CARACTÉRISTIQUE UNIQUE DES AUTRES HAUTS LIEUX DE LA GASTRONOMIE. C’EST LE SEUL RESTAURANT TROIS ÉTOILES « FAMILIAL » AU MONDE. Dans un magnifique décor naturel, le Château de Chillon s’élève sur un éperon rocheux à proximité de Montreux. 56 | 57 ART DE VIVRE APPAREMMENT, LES RESTAURANTS LUTTENT SI FÉROCEMENT DANS LES SPHÈRES RARÉFIÉES DES TROIS ÉTOILES QUE L’OXYGÈNE SEMBLE FAIRE DÉFAUT DANS LA SALLE. LE PONT DE BRENT EST DIFFÉRENT. NULLE TRACE DE TENSION ICI. 58 | 59 I l est fascinant d’observer le talent humain n’est certes pas un abus de langage que de Les mets et le service répondent aux attentes dans sa plus belle expression, suivre les évo- décrire le restaurant de Gérard Rabaey comme des clients, c’est chaleureux et agréable - en lutions d’un sportif hors pair, marquant des l’unique trois étoiles « familial » au monde. un mot, familial. Il n’en va pas de même au points sans le moindre effort, être emporté par Ce n’est pas sans une certaine inquiétude sommet. Apparemment, les restaurants lut- le jeu d’un acteur émérite qui insuffle une telle que j’utilise l’adjectif « familial » car le terme tent si férocement pour parvenir à la perfec- vie à son personnage que le théâtre semble comporte des connotations diverses : il est tion dans les sphères raréfiées des trois étoiles disparaître autour de soi, écouter une grande tout autant possible de chanter les louanges - et sont souvent tellement terrifiés à l’idée du soprano qui lance sans effort la « fameuse » d’un restaurant que de le décrier à le qualifier moindre faux pas, qui serait, bien sûr, impi- note de la Reine de la Nuit dans la Flûte de familial. Seul le contexte donne une indica- toyablement châtié par tout inspecteur du Enchantée... Un restaurant peut offrir le tion sur le sens voulu par l’auteur. Veut-il sim- guide qui viendrait à passer par là - qu’il sem- même émerveillement. Un charme est jeté et plement dire que l’accueil est chaleureux et le ble que l’oxygène fait littéralement défaut vous, l’heureux client, êtes saisi et tout le reste restaurant dépourvu de tout artifice ? Ou le dans la salle. Chacun perçoit la distance qui est magie. choix de ce mot répond-il à un objectif quel- sépare le personnel et les clients. Quand il ne Il y a peu, chance m’a été donnée de retour- que peu narquois afin de suggérer que l’éta- s’agit pas d’un mur. Lorsque les serveurs sont ner au Pont de Brent à Montreux. Si les mots blissement est sommaire, dépourvu d’imagi- terrorisés à la perspective de servir le faux peinent incontestablement à décrire la perfec- nation, pour ne pas dire un peu minable ? apprêt, cette tension se transmet aux clients. tion du repas, c’est l’aisance avec laquelle la Tel ne devrait pas être le cas. L’utilisation du Et un repas ressemble dès lors à une épreuve soirée s’est déroulée qui résonne dans ma terme « familial » devrait être réservée aux cir- de patinage artistique aux Jeux Olympiques où mémoire. Gérard et Josette Rabaey, les amphi- constances où le plus grand des éloges est le monde entier guette le faux pas, les deux tryons du Pont de Brent, sont passés maîtres entendu. Un restaurant qui est familial en rai- pieds qui retombent ensemble ou, pire dans l’art d’entourer chaque convive d’un son de son accueil chaleureux, de son honnê- encore, la chute impardonnable. bien-être qui permet à la soirée de s’écouler teté et de son absence de prétention possède Le Pont de Brent est différent. Nulle trace de dans une atmosphère de paisible harmonie. de nombreuses et incontestables vertus. À tension ici. Depuis l’instant de son arrivée, le Mieux encore, ils donnent l’impression, ainsi l’évidence, ces qualités se retrouvent dans tou- convive a l’impression de dîner dans la que leur personnel, de ne consentir aucun tes les catégories de prix. Une humble tratto- demeure des Rabaey, avec Gérard à la cuisine effort pour agir de telle manière. ria toscane, un bistrot parisien ou un restau- et son épouse Josette qui accueille chaque La perfection du repas ne peut être considé- rant qui sert du poisson en plein air sur l’île de hôte et s’occupe de la salle avec le maître d’hô- rée comme une surprise. Le Pont de Brent Lantau à Hong Kong, tous sont en mesure et tel Marc J’Espère. Ses mots de bienvenue sont figure parmi l’aréopage des meilleurs restau- parviennent familiaux. empreints d’une authentique chaleur et lais- rants du monde. Il brille en effet de la meil- D’étrange manière, il devient beaucoup plus sent transparaître une joie sincère à la perspec- leure cotation que le Michelin puisse décerner, difficile pour de grands établissements de se tive de vous offrir, avec ses collègues, une mer- trois étoiles, et de la note la plus élevée attri- présenter sous un tel jour. Le personnel du res- veilleuse soirée. À l’évidence, l’effort herculéen buée par Gault&Millau, 19 points. Cependant, taurant Allard à Paris ne manifeste aucune nécessaire à la réalisation d’un repas trois étoi- cet établissement se distingue par un élément tension pour préparer des assiettes de canard les, particulièrement pour un dîner aussi léger qui lui accorde une place particulière parmi ses aux olives et les proposer sans prétention aux et frais que l’exige le style de Gérard Rabaey, pairs dans les cimes de la gastronomie. Ce convives installés à des tables de style familial. est sous - jacent, mais il n’apparaît jamais. souvent à être Le Pont de Brent se caractérise par un exceptionnel sens de l’harmonie où les mets, les vins et le décor boisé sont à l’unisson. Josette Rabaey. ART DE VIVRE Aussi l’accueil bannit-il d’emblée tout cérémonial artificiel. Dans de nombreux grands tre de ces apprêts nous conduisent aisément vers le repas. restaurants, le chef, visiblement peu à l’aise Le prodige du premier plat n’était pas entiè- dans ce rôle, imprime un sourire sur son visage rement rendu par l’annonce sur le menu et accomplit un tour d’honneur à travers la d’une terrine de foie gras et de bolets. Peut- salle en recueillant les compliments. Tel n’est être était-ce le terme de « terrine », souvent pas le cas ici. Gérard sort de la cuisine au utilisé pour de lourdes préparations, où la moment où chaque hôte se prépare à partir graisse et les nerfs sont souvent camouflés pour prendre personnellement et chaleureuse- sous la moutarde et les cornichons, qui ne ren- ment congé de lui, en l’absence de toute dait pas véritablement justice au raffinement affectation, comme si vous franchissiez le seuil de la création de Gérard. La « terrine » possé- de sa propre maison. dait des couches de bolets sauvages à la Après la journée d’activité presque fréné- saveur intense, qui alternaient avec un foie tique qui a précédé ma venue en ces lieux, la gras d’une finesse incomparable, le tout bordé chaleur de cet accueil m’a facilité le passage de poireaux. Sur le sommet, quelques grains à un état d’esprit différent. En cette embau- de gros sel étaient parsemés. Dans cette sym- mante soirée de septembre, je me suis assis phonie pour le regard, la terrine composait la sur une chaise dans le jardin avec une flûte pièce centrale d’un trio de préparations. À ses de champagne et un imposant assortiment côtés figuraient quelques bolets simplement de mignardises, j’ai résolu de déconnecter sautés et des feuilles de salade relevées à mon cerveau et de me laisser guider par le l’huile de noix. L’impression était diaphane. menu proposé. De cette manière, il m’a été Dans son essence, la terrine devenait aussi délicieux de savourer à petites gorgées un légère que l’air, à peine maintenue par une Moët millésimé, déguster de petites fritures gelée quasiment invisible. Le foie gras, lui du Lac Léman et ne rien faire, sauf songer aussi, défiait les lois de la gravité et s’évaporait aux vins destinés à accompagner cette dans la bouche, se dissolvant sur de fastueu- agape. ses notes de terre des champignons. En Les amuse-bouche plantent le décor. En contrepoint à son intensité, il semblait y avoir accord avec une nuit d’été, il s’agissait d’une uniquement quelques gouttes de vinaigre bal- petite tartelette d’anchois. Elle possédait samique. une base de minces tranches de courgettes En accompagnement, j’avais retenu une presque transparentes, supportant quelques demi-bouteille de Boillot Puligny Champ feuilles de rucola, des morceaux d’olives et Canet 2001, étonnamment riche avec des de tomates ainsi que des anchois frais, agré- tons dominants d’agrumes parfaitement équi- mentés d’un filet d’huile d’olive aux herbes. librés. D’une certaine manière, le choix d’un En fonction de la saison, Gérard offre une bourgogne blanc ne rendait pas justice à l’un variante tout aussi légère de ce mets, en pro- des atouts du Pont de Brent. Son sommelier, posant une tartelette de féra, un poisson Sébastien Lacroix, est reconnu comme l’un des souvent négligé du Lac Léman. L’un ou l’au- meilleurs de son art en Suisse pour avoir rem- Le maître d’hôtel Marc J’Espère. Un apprêt printanier, croustillant et saltimbocca de ris de veau agrémenté de morilles et d’asperges. Une entrée classique : fine tartelette de féra. LA CHALEUR DE L’ACCUEIL BANNIT D’EMBLÉE TOUT CÉRÉMONIAL ARTIFICIEL. GÉRARD SORT DE LA CUISINE AU MOMENT OÙ CHAQUE HÔTE SE PRÉPARE À PARTIR POUR PRENDRE PERSONNELLEMENT CONGÉ DE LUI, COMME SI VOUS FRANCHISSIEZ LE SEUIL DE SA PROPRE MAISON. 60 | 61 porté le Concours du Meilleur Sommelier de vins. Plus d’une fois, en dépit de mes préten- treintes destinées aux Helvètes ne finissent en Suisse en 2005 (et avoir reçu une Flyback tions œnophiles, j’ai laissé la question entière- des gosiers étrangers. Léman de Blancpain pour sa performance). Il ment entre ses mains et me suis laissé empor- Une autre merveille a suivi. Un rouget écla- a réuni une sélection spectaculaire de vins hel- ter vers la découverte de fascinants vins suis- tant de fraîcheur, rapidement sauté, disposé vétiques qui, pour la plupart d’entre eux, ne ses (très récemment un chardonnay de sur un lit de cœurs d’artichauts, relevé avec de parviennent jamais à quitter le pays qui les a Neuchâtel incontestablement digne de rivali- minuscules palourdes fraîches et parsemées vu naître. Une visite au Pont de Brent offre ser avec un bon Meursault et un pinot noir du de morceaux d’olives. Le rouget doit évoquer l’opportunité de déguster ces trésors et, Tessin empli de caractère et de complexité) la Provence et cet apprêt le faisait véritable- mieux encore, de bénéficier des services de qui ne font jamais parler d’eux hors de Suisse, ment. Gérard Rabaey est maître dans l’art de Sébastien pour s’orienter dans la carte des de crainte sans doute que les quantités res- marier de minuscules palourdes et un bouillon Gérard Rabaey. ART DE VIVRE de poisson aux meilleurs produits de la saison en poissons et en légumes. Cependant, nous n’avions tracé notre route Le jardin d’été du Pont de Brent, qui borde un ruisseau au son cristallin. que jusqu’au second plat, qui a pris la forme d’une préparation emblématique de Rabaey, croustillant et saltimbocca de ris de veau. Rabaey a orchestré un croustillant tube de pâte fine, aussi mince que de la pâte filo, entourant du ris de veau avec juste un soupçon de jambon cru et de la sauge, quelques bouchées de ris de veau sautés et un morceau plus grand avec du jambon fumé et de la sauge, une intense sauce au persil, d’un vert brillant sur l’assiette, un fonds de veau réduit d’une chaude couleur brune et, enfin, une sauce superbement mousseuse. De multiples événements se produisent ici car chaque ingrédient s’allie et contraste avec les autres. Le jambon et la sauge sont des partenaires classiques et tous deux étaient équilibrés par la purifiante fraîcheur du persil. De manière analogue, les nuances de texture embrassaient un immense éventail et jouaient les unes avec les autres : le croustillant du tube en pâte, les morceaux onctueux et aériens du ris de veau, le vaporeux de la mousse. En bref, il s’agissait de la sorte d’apprêt que seul un génie peut réaliser. Le quatrième plat était un pigeon des DeuxSèvres simplement rôti et servi avec un assortiment de légumes rôtis. Rabaey possède une source pour ses pigeons qui rivalise avec celle de Lameloise (voir le numéro 2 des Lettres du Brassus). Ces volailles possèdent une saveur radieuse de fraîcheur, sans nulle trace de cette forte saveur de foie qui gâche la plupart des pigeons et présentent, lorsqu’elles sont cuites, une texture qui devient simple transcendance en bouche : le seul défaut, j’en aurais voulu davantage. Un demi-pigeon, alors que j’en aurais volontiers savouré un entier. Et puisqu’il est question d’oiseaux entiers, mentionnons que le fait de dîner seul m’a privé de l’opportunité de savourer l’une des préparations les plus appréciées du Pont de Brent, un canard nantais rôti. Il n’y a nulle exagération à affirmer que seule une poignée de chefs (je ne me porte personnellement garant Le pigeon rôti des Deux-Sèvres, tel qu’il est présenté à la table. 62 | 63 que de cinq restaurants au monde) sont en chariot n’est cependant qu’un composant de mesure de préparer un canard rôti entier, un la présentation. Au Pont de Brent, le serveur mets aussi somptueux que rare. Un magret de en charge était manifestement ravi de faire les canard, même cuisiné, ne se mesure pas à la honneurs de son chariot. Alors que les froma- même aune. Il y a entre eux la même diffé- ges passaient d’une table à une autre, je me rence que celle qui sépare une promenade de plaisais à écouter ses recommandations vingt minutes et une course en moins de qua- enthousiastes pour chaque variété présentée tre minutes sur la même distance. Aussi, à et son plaisir à conseiller les convives qui sou- cette occasion, quel que fût mon plaisir à haitaient bénéficier d’un guide à l’instant de savourer chaque bouchée du pigeon, je me composer leurs assiettes. suis laissé allé à ressentir une envie effrénée et Le dessert se composait de deux volets. En non déguisée, lorgnant sur la volaille scintil- premier lieu, une somptueuse composition de lante aux nuances d’acajou servie sur les sorbets : melon de Cavaillon, melon vert, autres tables alentour et me surprenant à framboises, pêche blanche. Tout était parfait, contempler les délicates tranches d’un rouge mais il y avait un petit rien en plus dans la parfait déposées sur les assiettes. pêche blanche qui dénotait avec insistance Cédant une fois encore à mon profond pré- que nous nous trouvions au début du mois de jugé pour le bourgogne, j’ai jeté mon dévolu septembre, la meilleure saison pour ce fruit. sur un Corton Renardes 1996 de Rougeot. Il Puis, un crumble de pruneaux est apparu. Il se m’en est resté une impression de vin un peu composait d’une base floconneuse de noix, de CHAQUE NOTE JOUÉE AU PONT DE BRENT CE SOIR-LÀ ÉTAIT PARFAITE. LA CONCEPTION ET L’ÉQUILIBRE, L’ASSORTIMENT, LA PRÉCISION MILLIMÉTRIQUE DE LA CUISINE... jeune. Les bourgognes de 1996 semblent un pruneaux caramélisés disposés sur le sommet, peu tempérés maintenant alors que leur et s’accompagnait d’une glace à la vanille, caractère semblait s’épanouir il y a quelques parsemée de morceaux de gousse. Petits fours années. Tous les éléments étaient là. Un et chocolats ont finalement apporté le point arôme de baie souligné par des notes de d’orgue à ce dîner. vanille et le caractère animal volontiers associé à un grand Corton. Chaque note jouée au Pont de Brent ce soirlà était parfaite. La conception et l’équilibre, Ensuite sont venus les fromages, qui l’assortiment, la précision millimétrique de la incluaient un vaste assortiment de Gruyère. Si cuisine, l’harmonieuse progression du repas, vous en avez l’opportunité, recherchez un sans oublier naturellement le service et l’ac- vieux Gruyère (parfois appelé « salé »), qui cueil, amical et familial. Les plaisirs de la vie en doit être âgé au moins de trois ans. Il apporte Suisse dans leur plus belle expression. une intensité proche de celle du pecorino, mais naturellement avec le caractère de noix du Gruyère. La présentation des fromages ne LE PONT DE BRENT le cédait en rien à leur qualité et à leur sélec- 1817 Brent, Suisse tion. À l’évidence, ils étaient disposés sur un Tel +41 (0)21 964 52 30 chariot qui présentait plus d’une vingtaine de Fax +41 (0)21 964 55 30 variétés parmi lesquelles faire son choix. Le Fermé dimanche et lundi. I ART DE VIVRE LA LETTRE DE BLANCPAIN SUR LE VIN VINS DE CLIMATS CHAUDS PAR JEFFREY S. KINGSTON Le Dr. George Derbalian, l’un des experts en œnologie de LETTRES DU BRASSUS, a fondé la société Atherton Wine Imports établie en Californie septentrionale. Il n’est pas seulement devenu l’un des principaux importateurs de grands vins aux Etats-Unis, mais il a également acquis la renommée parfaitement méritée de figurer parmi les meilleurs connaisseurs en vins du monde. Dans ce numéro, George Derbalian a réuni un impressionnant florilège de Côtes-du-Rhône français, Brunello italiens et Cabernet-Sauvignon californiens et, pour les évaluer, il a fait appel à un jury composé d’experts reconnus. 64 | 65 Montalcino, au cœur de la Toscane. ART I DE VIVRE l existe des règles et des lois fermement établies sur la manière dont il convient de procéder aux dégustations. Nous y avons contrevenu inflagrante delicto afin de les faire voler en éclats. Nous les avons piétinées tandis que notre visage s’illuminait de joie. Toutefois, s’il nous appartient de qualifier notre attitude selon les canons de la bienséance, nous avons tout bonnement agi de manière scandaleuse. Je suis désolé, Monsieur, mais je suis tenu de vous enjoindre fermement d’y mettre fin ! Rajat Parr. Voici le point litigieux. Les règles bien codifiées qui président aux dégustations de vins stipulent avec pertinence que les crus proposés lors d’une même série doivent être du même ou essentiellement du même cépage. Qui plus est, jusqu’il y a une trentaine d’années, cette section du code œnologique stipulait que les crus devaient provenir d’un même cépage issu d’une même région. Le turbot grillé à la mode du chef Michel Mina. 66 | 67 Les séquelles de notre Cette dernière disposition a été purement et dégustation. Un im- simplement abolie, de manière irréversible, pressionnant assortiment de verres pour une seule personne ! à la suite d’une fameuse dégustation qui s’est déroulée à Paris en 1976. Ce soir-là, le monde de l’œnologie a basculé sur ses bases lorsque les chardonnays et les cabernets californiens ont respectivement détrôné les bourgognes et les bordeaux blancs. Néanmoins, quelle que soit la mesure dans laquelle cette tendance vers la modernité ait assoupli le code des dégustations vinicoles par l’autorisation de la diversité géographique, la restriction essentielle demeure : un même cépage ou essentiellement un même cépage. En collaboration avec le Dr. George Derbalian, les Lettres du Brassus ont forgé un plan pour organiser une dégustation entièrement illégale, malum per se, fondée cependant sur des décisions prises par les restaurateurs dans la vie réelle. En effet, au moment de consulter la carte des vins, les convives ne sont pas soumis à l’obligation de choisir un cru ou de sélectionner un vin parmi un ensemble composé de cépages identiques ou essentiellement similaires. Ils sont libres d’élire un style de vin indépendamment du cépage, en s’interrogeant uniquement sur la manière dont ce style s’harmonisera avec les mets retenus. Aussi, pourquoi les dégustations de vins obéiraient-elles à l’ukase d’un même ou essentiellement d’un même cépage si les choix ne s’opèrent pas selon ce critère dans la plupart des cas ? L’élément de compétition inclus dans toute dégustation – à savoir la classification des vins du meilleur au plus mauvais – serait-il donc plus important que le jugement de la Larry Stone. qualité comme une fin en soi ? George Derbalian a réuni un aréopage de haut vol pour entreprendre cette dégustation hors règles. Larry Stone a forgé sa renommée il y a de nombreuses années au titre de l’un des meilleurs sommeliers de Californie. Depuis lors, Larry a poursuivi son parcours et s’est établi viticulteur dans la Nappa Valley, où il produit un exceptionnel Dr. George Derbalian. Cabernet-Sauvignon Sirita. ART DE VIVRE Rajat Parr est un sommelier de San Francisco sées autour d’un tonneau dans une cave où s’agit là de sa cuvée blanche de prestige. qui ne le cède en rien à son illustre confrère. le vin est agité, senti et mis en bouche avant Il m’a semblé que ce vin possédait un Il est actuellement le chef-sommelier de d’être recraché. Il était question ici d’un caractère de fruit exubérant empreint de tous les établissements Michael Mina à San grand dîner accompagné de nos vins d’asso- notes dominantes de confiture d’abricot, Francisco. Avec leur humble serviteur, la ciation illégale – ce qui revient à dire que ces de chêne et de vanille. dégustation s’est articulée autour de vins allaient être consommés et appréciés. la conception suivante : une comparaison Même si les vins rouges issus de climats de vins rouges, riches, mûrs, fruités, au chauds allaient représenter le clou de la soi- d’un Condrieu rare, particulièrement corps généreux, qui soient en mesure rée, nos notions d’entrée en matière idoine bien équilibré. » d’accompagner un repas spécialement et élégante nous ont enjoints de commencer GEORGE DERBALIAN : « Il ne possède conçu à cet effet, constitué de cailles, par deux vins blancs. Et, à cet effet, nous en aucune des notes finales roussies ou d’agneau et de bœuf. LARRY STONE : « Approuvé. Il s’agit sommes restés à des vins issus de climats fumées qui sont souvent le lot des vins À l’évidence, il aurait été impossible de chauds, originaires tous deux de la vallée du inférieurs de cette appellation. trouver meilleur cadre pour notre expérience Rhône, un Condrieu et un Hermitage blanc. Un grand Condrieu se distingue par un inédite que le restaurant de Michael Mina, En prélude au repas, le chef Michael Mina autre élément, le contraste entre le nez dans l’hôtel St. Francis, au cœur de San Fran- nous a proposé des coquilles Saint-Jacques et le palais. Son nez possède un caractère cisco. Intentionnellement, les vins sélection- fraîches et moussues accompagnées de tropical alors que sa bouche est nés ne provenaient pas du même cépage. petits pois et d’une purée de pois. Nous empreinte de chêne et de vanille, Leur point commun résidait dans leur prove- avons testé en premier lieu un Condrieu de presque comme un bourgogne blanc. » nance d’un climat chaud – en d’autres 2005, La Doriane de Guigal. Sans conteste, RAJAT PARR : « Tout de pêche et de termes, de conditions météorologiques qui Guigal est le plus célèbre des producteurs velours, ce vin réussit cependant à ne pas en favorisent le fruit. Nous avons opté des Côtes-du-Rhône septentrionales et il être sirupeux. » IL EXISTE DES RÈGLES ET DES LOIS FERMEMENT ÉTABLIES SUR LA MANIÈRE DONT IL CONVIENT DE PROCÉDER AUX DÉGUSTATIONS. NOUS Y AVONS CONTREVENU INFLAGRANTE DELICTO. Châteauneuf-du-Pape. pour trois régions qui produisent des vins de ce style : les appellations Châteauneuf-duPape, Gigondas et Côte-Rôtie dans la Vallée du Rhône, les Brunello di Montalcino de la Toscane méridionale ainsi que des CabernetSauvignon de Californie. Comme nous étions bien décidés à enfreindre le code de la dégustation vinicole, nous avons choisi de jouer notre va-tout en prévoyant une quantité assurément excessive pour quatre taste-vin. Rappelons à ce point que nous n’avions pas à l’esprit l’une de ces dégustations traditionnelles organi- L’âpre terre rocailleuse de Châteauneuf-du-Pape. 68 | 69 Côte-Rôtie. Vue de Gigondas (avec les Dentelles-de-Montmirail à l’arrière-plan). Le second vin blanc est arrivé avec le contraste avec la douceur des raisins, des deuxième plat de poisson, un superbe turbot carottes et du turbot. Il a suffi de quelques entier grillé servi avec une julienne de bouchées et de quelques gorgées pour que carottes et de petits bouquets de choux- nous tendions tous la main à l’unisson vers le fleurs sautés, agrémentés de raisins secs et restant de Condrieu. d’une purée de carottes. La combinaison Ces préliminaires accomplis, il devenait douce/salée formait un piètre équilibre pour temps de se tourner vers l’événement princi- le vin choisi, un Hermitage blanc 1995 de pal de la soirée, les vins rouges issus de cli- Chave. Le domaine de Gérard et Jean-Louis mats chauds. En dépit du penchant criminel Chave est réputé tant pour ses vins rouges qui préludait à l’organisation de notre que blancs. Cependant, l’Hermitage blanc dégustation, nous avons fait acte d’allé- était trop austère, trop minéral et retenu à geance à la convention pour les deux pre- l’excès pour s’inscrire en harmonieux miers rouges, un Gigondas Les Hauts-de- ART DE Montmirail VIVRE 2001 de Brusset et un ture charnue. Son caractère l’apparente à das. En 2003, la déshydratation a constitué Châteauneuf-du-Pape La Crau de ma Mère un bourgogne. Les Hauts-de-Montmirail est le plus grand problème rencontré par les 2003. En théorie, le Châteauneuf aurait dû la meilleure des deux cuvées de Brusset et viticulteurs. Cette année-là, la canicule a s’imposer. La Crau de ma Mère est l’un il démontre ce soir sa haute lignée. La Crau assoiffé toute la France. Par manque d’eau, des vignobles les plus prestigieux et les de ma Mère est un merveilleux exemple le raisin présentait à l’époque de la récolte mieux situés de Châteauneuf-du-Pape, qui d’un classique Châteauneuf-du-Pape. une abondance de sucres, naturellement regroupe le Domaine du Vieux Télégraphe Parvenu à maturité, exotique, il compte de destinés à se transformer en alcool lors de et la Cuvée des Célestins de Henri Bonneau. nombreuses notes fruitées. Ce vin est excel- la fermentation. Cependant, au moment Ce ne fut pas le cas ce soir-là. Le Gigondas lent pour sa catégorie de prix et reste en où les sucres étaient présents, les phénols était simplement superbe. Il offrait un parfait accord avec sa nature intérieure. » contenus dans le raisin n’étaient pas fruit très dense qui laissait place à une struc- LARRY STONE : « Le Gigondas présente de encore parvenus à maturité et n’y parvien- ture délicatement équilibrée. Même si le délicats accents minéraux, de mûres, de draient plus jamais. La solution aurait Châteauneuf La Crau de ma Mère possède prunes et de poivre qui évolueront de consisté à attendre. Vous pouvez faire un un délicat nez fruité, sa bouche recélait des superbe manière. Même s’il est déjà exubé- grand vin à partir de raisins complètement tanins plus âpres. rant, il est encore en enfance et ne fera que déshydratés, mais non à partir de phénols se bonifier. Le Châteauneuf-du-Pape non parvenus à maturité. Il en résulte une GEORGE DERBALIAN : « Le Gigondas pos- La Crau de ma Mère est plaisant mais son surabondance de tanins qui donnent au sède un équilibre extraordinaire et une tex- millésime, 2003, le place derrière le Gigon- vin dureté et verdeur. » LE GIGONDAS DÉMONTRAIT SUFFISAMMENT D’INTENSITÉ, DE MATURITÉ ET DE RICHESSE POUR ÊTRE BU EN PARALLÈLE AVEC SES GRANDS FRÈRES AU BÉNÉFICE DE 99 ET 100 POINTS. Le vignoble de l’Hermitage s’étend le long du Rhône. 70 | 71 D’une certaine manière, le Châteauneuf a GEORGE DERBALIAN : « Il est préférable – tous deux accompagnés des jugements les complètement justifié notre dégustation hors de servir l’Hermitage à température plus flatteurs de l’éminent expert œnologue normes : le problème de cette cuvée est bien ambiante. Il possède indubitablement des Robert Parker. Un Châteauneuf-du-Pape connu des viticulteurs californiens qui le ren- tons de vieilles vignes. Il présente en pre- 1998 cuvée Centenaire de Brunel (100 contrent toujours. Ils ont réussi à le surmon- mier lieu un caractère boisé, sans trace de points selon Parker) et un Côte-Rôtie 1991 ter il y a une vingtaine d’années par une meil- vanille mais avec un parfum de vieux La Turque Guigal (99 points selon Parker). leure maîtrise du processus de vinification. bois. Puis, le fruit apparaît progressive- Rajat a disposé deux verres entièrement dif- ment. Il aurait été plus judicieux d’asso- férents pour chacun des deux vins, à l’admi- LARRY STONE : « Les viticulteurs califor- cier ce vin avec un poisson frais, à l’exem- ration de notre groupe. niens sont accoutumés depuis longtemps ple d’un sashimi, plutôt que lui deman- aux étés chauds et secs. Ils ont découvert der d’accompagner la saveur douce/salée LARRY STONE : « Le Châteauneuf se com- qu’il est plus aisé de modifier la teneur du turbot. Sans le moindre doute, il se pose d’un assemblage de cépages, souvent en alcool des vins que les phénols. marie mieux avec la sobriété des cailles. » caractérisé par un important pourcentage Davantage habitués à gérer une carence LARRY STONE : « L’Hermitage est un vin de grenache, et il requiert un verre rond qu’un excès de maturité, les viticulteurs à la forte personnalité qui ne se prête pas pour en accentuer la douceur. Ces vins ne français auraient pu tirer profit des ensei- à une consommation quotidienne. Il est possèdent pas de puissants tanins, mais gnements de leurs confrères du nouveau élaboré de la manière dont les Romains offrent de nombreuses notes fruitées desti- monde. L’honnêteté nous contraint cepen- confectionnaient leurs vins et ne possé- nées à être exaltées par la forme du verre. dant de préciser qu’en 2003 les réglemen- dera jamais le raffinement apporté Le Côte-Rôtie est pour sa part amplement tations de l’Union Européenne comme le ultérieurement par les techniques d’éla- fondé sur le syrah, un cépage dont les système régional d’appellation contrôlée boration mises au point dans les monastè- points forts sont les tanins et la structure. » interdisaient l’adjonction d’eau. Mais res de la Bourgogne septentrionale. » Le faire-valoir pour ces héros dotés de 99 après une succession d’été chauds et secs, les règlements ont été modifiés et la Il était temps de passer dans la cour des et 100 points était un carré d’agneau à « solution californienne » est désormais à grands. Deux Côtes-du-Rhône parmi les plus nouveau apprêté par Michael Mina dans la portée des viticulteurs français. » cotés au monde sont entrés en lice un trio de saveurs. Le carré était, partielle- L’apprêt de cailles qui accompagnait les deux La Chapelle Saint-Christophe. Côtes-du-Rhône de prix raisonnable a suscité une surprise. La signature culinaire de Michael Mina consiste à préparer des variations sur un même thème et les volailles étaient proposées sous la forme de trois préparations similaires, toutes constituées de suprêmes de caille rôtis disposés sur un lit de lentilles. Elles s’accompagnaient de trois sauces, au citron Meyer, à la lime et à l’orange. Identiquement, les teintes des lentilles variaient du vert au gris sombre. Les trois thèmes à base d’agrumes se sont révélés fort agréables, le citron rehaussait le goût des lentilles, l’orange la saveur des cailles. La surprise ne résidait pas tant dans le mets que dans le vin. Face aux raisins et aux carottes du plat précédent, l’austère Hermitage donnait naissance à une confrontation. Toutefois, la subtilité des accents d’agrumes alliés à la saveur caractéristique de la caille en faisait le vin idéal pour accompagner ce mets. ART DE VIVRE ment revenu à l’huile et était servi avec une En comparaison avec le Centenaire, le Côte- sauce tomate à la féta, une sauce aux Rôtie semblait maussade et sombre. La Turque épinards et au pecorino ainsi qu’une sauce est l’un des trois meilleurs vignobles de Côte- à l’aubergine et au poivron. Qu’il s’agisse Rôtie, avec les domaines de La Mouline et de de saveur ou de tendreté, l’agneau de La Landonne. Guigal produit des vins à partir Sonoma n’a rien à envier à un agneau des trois et chacune de ses spécialités suscite de Sisteron. Et les trois variations de sauce la frénésie des consommateurs. Les domaines étaient destinées à contraster avec les sont petits et la demande énorme, particuliè- deux vins. rement pour La Turque dont la production D’emblée, le Centenaire nous a paru est presque confidentielle. magnifique. Il possédait une attaque flatteuse qui offrait des notes de café, de cho- LARRY STONE : « Parmi les trois grands colat, de mûres avec autant de force que de vignobles de Côte-Rôtie, j’ai un faible douceur en bouche qui ouvraient la voie à particulier pour La Mouline qui possède un doux fini proche d’un bourgogne. les vignes les plus vieilles avec un âge moyen de près de 40 ans. Ses vins sont LARRY STONE : « Le vignoble du Centen- les plus souples et les plus généreux aire est orienté vers le nord. D’ordinaire, du groupe. » 1997 ÉTAIT UN MILLÉSIME SPECTACULAIRE EN TOSCANE. IL A PRODUIT DES VINS DE GRANDE FORCE ET CARACTÈRE. c’est plutôt un handicap, mais à Château- GEORGE DERBALIAN : « Nous sommes neuf-du-Pape, une région chaude par en train de couper les cheveux en quatre. nature, cette exposition adoucit le vin et À mon avis, La Turque est le plus intéres- lui donne presque un caractère sant car c’est le plus exotique. Guigal éla- de bourgogne (en gardant présent à bore un vin merveilleux. » l’esprit que toute la difficulté en RAJAT PARR : « La Turque possède une Bourgogne consiste à emmagasiner une essence caractéristique de figue verte. chaleur suffisante pour parvenir à la Cet exemple de 1991 montre l’équilibre maturité requise). » et l’élégance du millésime. Cependant, GEORGE DERBALIAN : « Le Centenaire re- ce vin me déçoit quelque peu, compte tenu flète le yin et le yang d’un grand Château- de sa réputation. Il n’a jamais passé à la neuf par le mélange d’un vitesse supérieure. Pour sa part, le Cen- climat chaud et d’éléments plus froids. tenaire est délicieux. Il possède une belle Sous cet aspect, il ressemble à un précision et de superbes notes florales. autre grand Châteauneuf-du-Pape, le Même s’il ne tient peut-être pas autant la Château Rayas, dont le vignoble est distance à laquelle les crus de cette appella- également exposé vers le nord. Il est tion nous ont accoutumés. » bon pour le raisin de s’efforcer de mûrir avec une exposition plus froide. Comme nous enfreignions les règles, j’ai L’acidité qui en résulte est très décidé d’en violer une autre. Il est extrême- bénéfique pour le vin. » ment rare qu’une dégustation ne suive pas À l’approche des remparts de Montalcino. 72 | 73 Une colline plantée de cyprès, à mi-chemin entre Montepulciano et Montalcino, en Toscane. un chemin ascendant. Les vins de moindre apprêts d’agneau. Sans aucun doute, les L’Angelini était presque un bourgogne. Pour qualité sont testés avant les grands crus. Le tanins et la structure du Côte-Rôtie s’harmo- ma part, je l’ai défini comme un vin agréa- parcours inverse est généralement cho- nisaient au mieux avec la sauce à la tomate ble qui démontrait son caractère personnel quant, pour ne pas dire désagréable. Ainsi, et à la féta. Il en allait inversement pour les dès l’entrée en bouche. tendant la main vers le mur déjà imposant épinards et l’aubergine qui s’harmonisaient de verres devant moi, je me suis saisi du mieux à la douceur fruitée du Centenaire. Si l’Angelini était plaisant, le Pianrosso présentait la structure et des tons profonds de tanins et d’olive verte. Gigondas. Horreur. Même s’il n’avait pas le moi, il possédait une personnalité indiscuta- I et de servir les deux Brunello. Les deux LARRY STONE : « Même si les critiques ble. Il démontrait suffisamment d’intensité, dataient de 1997, le Brunello di Montalcino en ont fait l’éloge, le millésime 1997 a de maturité et de richesse pour être bu en Vigna Spuntali Angelini et le Brunello di suscité un problème en Toscane. Une fois parallèle avec ses grands frères au bénéfice Montalcino Ciacci Piccolomini Pianrosso. encore, il s’agissait de trouver un équili- de 99 et 100 points. Tout notre groupe est 1997 était un millésime spectaculaire en bre entre la déshydratation et les parvenu à la même conclusion qui a suscité Toscane, qui a produit des vins de grande niveaux élevés de sucre atteints avant la deux décisions immédiates. Larry et moi force et caractère, parfaitement reflétés dans maturation des phénols. Même s’il est avons commandé une caisse de Gigondas. nos deux exemples. Il était particulièrement délicat, l’Angelini est légèrement superfi- Sur-le-champ. frappant de constater la différence d’expres- ciel. Sous des dehors assurément plai- Il était fascinant d’accompagner ces deux sion de deux vins du même vignoble, de la sants ce soir, il semble avoir déjà pleine- superstars des Côtes-du-Rhône des trois même appellation et du même cépage. ment développé son potentiel. Quant au raffinement des deux grands crus devant l était désormais temps de changer de pays ART DE VIVRE La Napa Valley au début mars. Le long du célèbre Silverado Trail, à proximité d’Oakville. Pianrosso, il possède la structure néces- taient tous deux beaucoup plus de notes saire pour évoluer avec le temps. Il pos- fruitées douces, particulièrement A sède de superbes notes de cerise légère- l’Angelini. Ce sont presque comme des californiens – un Cabernet-Sauvignon Meyer ment masquées par les tanins. De sorte bordeaux adolescents qui ne développent 2003, un Cabernet Hestan 2004 et un Sirita que l’Angelini se prête parfaitement à pas entièrement leur bouquet. Je suis 2003. Fort bien. Nous avons brisé une autre être dégusté ce soir alors que le aussi d’avis que le Pianrosso se bonifiera règle en plaçant subrepticement une bou- Pianrosso mérite sans conteste de séjour- avec l’âge. Mais je pense cela chaque fois teille du vin de Larry et en lui demandant de ner encore dans une cave. » que je bois ce vin, quel qu’en soit le mil- l’évaluer. Le Meyer était élaboré en sorte de RAJAT PARR : « Il existe une véritable lésime. » plaire à un public peu exigeant. Effronté, vec le fromage, nous sommes revenus à notre pré carré avec trois cabernets fruité, exubérant. Un simple et délicieux beauté dans le Pianrosso, mais l’intérêt véritable est l’avenir de ce vin. Donnez- Naturellement, un mets était servi pour exemple du style presque liquoreux du caber- lui du temps pour voir ce qu’il deviendra accompagner les deux crus italiens, du net californien. réellement. » bœuf de style Kobe des Éstats-Unis, servi Le Hestan a fait étalage de sa belle lignée GEORGE DERBALIAN : « Ces deux vins avec des champignons shiitake, du riz pour car il est confectionné à partir de raisins cul- arrivent à un moment délicat. Tous deux sushi et des légumes. Il n’existe pas de tivés dans les excellentes terres d’Oakville. possèdent un peu de l’exubérance de la faire-valoir plus neutre pour de grands vins Même s’il s’agissait d’une bouteille proposée jeunesse et sont encore en devenir. Je me rouges que le bœuf peu saisi – meilleur en avant-première, il présentait nettement souviens que lorsque ces vins ont été encore s’il possède le moelleux caractéristi- plus de profondeur, de structure et de matu- proposés en avant-première, ils présen- que du bœuf élevé dans le style Kobe. rité que le Meyer. 74 | 75 Qu’il s’agisse ou non d’un préjugé du jury, le Sirita s’est montré le plus séduisant à des palais habitués à célébrer de grands bordeaux. Il avait le nez classique de cèdre et la retenue dans le fruit qui caractérise un vin de Médoc. Il présentait une grande profondeur, une intense concentration et était visiblement promis à un bel avenir. GEORGE DERBALIAN : « Le Hestan est incroyablement jeune. Le Hestan et le Meyer dénotent tous deux leur appartenance à l’école californienne empreinte d’une grande douceur, même le Hestan est plus complexe et réservé. Leur style fait ressortir le fruit, ce qui confère presque au cabernet le caractère d’un banyuls. » RAJAT PARR : « Le Hestan constitue presque un dessert en soi. A l’inverse, le Sirita est un vin destiné à accompagner un repas. Son raffinement et son équilibre se marient à merveille avec le fromage. » Alors que notre soirée de dégustation touchait à sa fin, le temps était venu de dresser le bilan des onze bouteilles qui nous ont accompagnés au cours de ce périple. Pour Rajat Parr, le meilleur blanc était le Condrieu 2005. Parmi les rouges, le Centenaire. LE SIRITA 2003 S’EST MONTRÉ LE PLUS SÉDUISANT À Larry Stone a refusé de nommer un « vainqueur » au sens strict. Au cours de cette DES PALAIS HABITUÉS À CÉLÉBRER DE GRANDS BORDEAUX. soirée, il a ressenti un faible pour le Centenaire, suivi de près par le Pianrosso. Il a apprécié le fruit jeune et vibrant du Centenaire ainsi que son élégance, sa complexité et sa précision. Pour le Pianrosso, il a été fasciné par les promesses recelées par son avenir. Pour George Derbalian, les lauriers allaient au Côte-Rôtie. Il lui a donné son absolution en lui trouvant un caractère aristocratique, d’une grande concentration, d’une intense complexité et d’un fruit d’une profonde densité. Un point n’a suscité aucune controverse : le Gigondas était la surprise de la soirée. Il a soutenu la comparaison avec des vins qui valaient dix fois son prix. Je ferais sans doute bien d’en commander une autre caisse. I DANS L’ A I R DU TEMPS HISTOIRES COURTES 2007 PETIT TOUR D’HORIZON DES NOUVEAUTÉS PRÉSENTES DANS LES VITRINES DE NOS CONCESSIONNAIRES. PAR JEFFREY S. KINGSTON POUR ELLE ET LUI : LÉMAN TIME ZONE ET BLANCPAIN WOMEN TIME ZONE Au cours des trente dernières années, les ensembles pour elle et lui n’ont cessé de susciter un engouement de plus en plus prononcé, au point qu’un grand magasin texan a élevé les cadeaux pour elle et lui au rang de caractéristique à part entière de son enseigne. Chaque année, les spéculations vont bon train avant la parution du catalogue de Noël : « Qu’auront-ils encore inventé cette année ? » Et la déception n’est jamais au rendez-vous. Des chameaux pour elle et lui. Des sous-marins pour elle et lui. Des momies en chocolat pour elle et lui. Et même une piste de bowling pour elle et lui ! À l’évidence, ils ont fait des émules et le marché abonde désormais d’articles coordonnés, des peignoirs de bains aux tabliers de cuisine en Ultrasuede en passant par les tirelires en forme de cochonnet. Blancpain n’a pas l’intention d’entrer en lice dans le domaine des articles pour Madame et Monsieur. En aucune manière. Cependant, au nom de l’égalité, la Manufacture a présenté lors de la foire de Bâle 2007 deux séries de montres à deuxième fuseau horaire qui peuvent être considérées comme des ensembles pour elle et lui, si tel est votre bon plaisir. L’indication d’un second fuseau horaire est l’une des fonctions les plus utiles dans le panthéon des complications. Léman Time Zone. 76 | 77 posés avec un boîtier en acier ou en or blanc. L’exécution en acier se décline en deux versions, l’une avec un cadran noir, l’autre avec un cadran champagne. Sur le modèle en or blanc, le cadran qui arbore un riche ton « marron glacé » est serti de diamants. Animées par le calibre automatique 5L60 développé sur la base du mouvement 1150, les montres Blancpain Women Time Zone offrent le précieux avantage d’une réserve de marche de 100 heures. À l’évidence, comme toutes les montres de la collection Blancpain Women, les modèles Blancpain Women Time Zone sont pourvus d’un élégant bracelet en satin à boucle déployante. Blancpain Women Time Zone. Pour le côté masculin de l’équation, BLANCPAIN A PRÉSENTÉ DEUX SÉRIES DE MONTRES Blancpain a revisité la complication du second À DEUXIÈME FUSEAU HORAIRE QUI PEUVENT un « relooking » bienvenu. Munis de boîtiers ÊTRE CONSIDÉRÉES COMME DES ENSEMBLES POUR veaux garde-temps qui possèdent les signes ELLE ET LUI, SI TEL EST VOTRE BON PLAISIR des aiguilles côniques, des appliques et index fuseau horaire de la ligne Léman en lui offrant agrandis au diamètre de 40 mm, ces nouemblématiques des modèles Léman, à l’instar « Aqua Lung » et de la gravure Blancpain sur la carrure, sont proposés en acier ou en or Elle permet non seulement de lire d’un seul que complètement absentes du panorama rouge. Sur les versions acier, le cadran est dis- coup d’œil l’heure de deux fuseaux horaires horloger conçu pour les femmes. Tel n’est ponible en blanc ou en noir laqué, alors qu’il distincts, mais offre également au voyageur plus le cas désormais. présente une nuance opaline sur le modèle en la possibilité indispensable de régler rapide- Blancpain a répondu au besoin exprimé par or rouge. Identique à celui des montres pour ment l’un d’entre eux. Il est intéressant, pour les femmes que leurs activités professionnelles dames, le mouvement possède également commencer par le côté féminin de l’équati- amènent à voyager fréquemment, en lançant 100 heures de réserve de marche. De manière on, de constater que les montres à double les modèles Blancpain Women Time Zone. D’un analogue, la Léman Time Zone possède aussi fuseau horaire étaient jusqu’à présent pres- diamètre de 34 mm, ces garde-temps sont pro- un bracelet à boucle déployante. I DANS L’ A I R DU TEMPS La version en titane de la Léman Répétition Minutes Aqua Lung. La répétition comprend un timbre cathédral pour donner le son extrêmement riche de cette complication. Le fond de boîtier gravé à la main porte l’image de la Manufacture du Brassus, lieu de naissance de chaque montre, et le guichet qui permet d’observer les marteaux de la répétition. nous avions seulement décidé d’y consacrer notre intelligence. À l’évidence, nous reconnaissons là le truc sur les trucs. Le fait que nous puissions comprendre une innovation après l’avoir vue ou après qu’elle nous ait été expliquée ne signifie aucunement que nous possédions l’acuité de pensée requise pour être à l’origine de sa découverte. Aussi des siècles peuvent-ils s’écouler avant qu’un individu se montre suffisamment perspicace et présente une véritable nouveauté que nous aurions tous souhaité inventer. Il y a deux ans, Blancpain l’a fait pour les correcteurs de quantième sur les boîtiers de montre. Aujourd’hui, les dispositions WATER MUSIC : LÉMAN RÉPÉTITION MINUTES AQUA LUNG sur la protection de la propriété intellectuelle honorent un inventeur du département Recherche & Développement de Blancpain à Paudex. Ce brillant esprit a mis au point une solution intelligente pour rendre étanche le verrou d’une répétition minutes. Cette innovation est présente pour la première fois sur la Léman Répétition Minutes Aqua Lung de Il existe un truc sur les trucs. Mais avant stupide au point de prétendre que cette affir- Blancpain, l’une des sensations de la foire de que vous ne pensiez que la confusion tauto- mation s’applique à toutes les créations - il Bâle 2007. Une fois encore, Blancpain a logique me guette ou que ma pensée a sou- suffit de passer une soirée lové sur un sofa à trouvé une solution pour un boîtier de mon- dainement pris la forme d’une bande de lire le texte d’un brevet sur la séquence du tre qui a échappé pendant des centaines Möbius, autorisez-moi à écrire encore quel- génome pour guérir de cette illusion. Ainsi, à d’années au reste de l’industrie. ques lignes. Combien de fois une invention, l’exception de ces catégories terriblement Presque toutes les montres à répétition dès qu’elle est expliquée, ne provoque-t-elle complexes, il semble raisonnable de préten- minutes possèdent un verrou. Cet organe pas la réaction suivante : « J’aurais pu y pen- dre que les tiroirs des offices de propriété qui glisse sur la carrure assume deux fonc- ser moi-même » ? C’est le truc sur les trucs. intellectuelle des nombreuses nations du tions essentielles. En premier lieu, il sert à Décortiquées, tant d’authentiques innova- monde regorgent de brevets relatifs à des enclencher le mécanisme de la montre qui tions semblent si élémentaires que nous, inventions que nous sommes nombreux à sonne les heures, les quarts et les minutes. gens du commun, pensons que nous aurions souhaiter avoir imaginées, parfaitement En second lieu, l’abaissement du verrou pu les trouver nous-mêmes. Je ne suis pas convaincus que nous aurions pu le faire si arme le ressort qui délivre l’énergie néces- 78 | 79 m’apprête maintenant à vous révéler la solution que vous pourriez avoir trouvé vousmême après qu’elle vous aura été exposée. La solution consiste à sceller la fente. Bien sûr, il est impossible de refermer hermétiquement la fente et de permettre simultanément au verrou de se déplacer librement à l’intérieur. Blancpain a donc conçu un mécanisme qui relie le mouvement du verrou à un engrenage et à un axe disposés à l’intérieur du boîtier. Le verrou et sa fente sont en effet situés sur l’extérieur du boîtier, hermétiquement Un ingénieux système de rouages transmet le mouvement scellés depuis l’intérieur. Ce n’est pas la fente du verrou au levier d’enclenchement de la répétition, au qui est étanche, mais le compartiment dans moyen de deux râteaux et de deux roues intermédiaires disposées sur un axe doté de deux joints « O-Ring » pour laquelle elle est logée. Voilà le truc. Le dépla- assurer l’étanchéité du système. cement du verrou entraîne une roue qui fait tourner un axe - qui peut être rendu étanche [1] Levier d’enclenchement de la répétition [4] Râteaux [5] Roues intermédiaires - et transmet par une autre roue la com- [2] Ressorts [6] Joints « O-Ring » mande et l’énergie nécessaires au méca- [3] Verrou de la répétition [7] Axe nisme de la répétition. Le schéma à gauche illustre cette solution qui a fait l’objet d’une BLANCPAIN A TROUVÉ UNE SOLUTION POUR UN BOÎTIER demande de brevet. DE MONTRE QUI A ÉCHAPPÉ PENDANT DES occupe une place d’exception parmi ses CENTAINES D’ANNÉES AU RESTE DE L’INDUSTRIE. type de timbre se distingue par sa longueur saire au fonctionnement du mécanisme de Jusqu’à présent, la fente au sein de laquelle de plus que les lames habituelles. Il émet de répétition. Le verrou est donc un élément clé le verrou se déplace n’offrait aucune possibi- ce fait des notes à la texture incomparable- des montres à répétition minutes depuis plu- lité de jointure hermétique. Comment donc ment plus riche à chaque fois que le méca- sieurs siècles. Et il en constitue également le rendre une fente étanche tout en permet- nisme sonne les heures, les quarts et les talon d’Achille car, contrairement à une cou- tant à un levier de s’y déplacer librement ? minutes. ronne ou à un correcteur de calendrier, les L’industrie horlogère répondait unanime- Blancpain a choisi les deux matériaux les verrous ne sont pas étanches. Même si vous ment à cette question en décrétant qu’il plus raffinés pour transmettre les harmonies êtes de la plus joyeuse des humeurs, ne vous s’agissait là d’une mission impossible. d’un timbre cathédral : l’or rouge et le Le mécanisme de répétition minutes en soi pairs en raison de son timbre cathédral. Ce considérable car il accomplit un demi-tour avisez pas de porter votre répétition minutes La Léman Répétition Minutes Aqua Lung titane. En effet, de minutieuses recherches pour une descente de rafting en eaux vives. résout ce paradoxe. Et soyez attentif car je ont démontré que ces métaux possèdent les meilleures performances sonores. Les deux modèles se présentent dans un boîtier de 40 mm avec un cadran noir aux chiffres et index appliqués. Chaque Léman Répétition Minutes Aqua Lung sera une édition limitée à un seul exemplaire. En effet, son propriétaire peut faire part d’un motif spécifique qui sera gravé sur le fond de boîtier et fera de chaque pièce une pièce unique, réalisée en La vue de côté ne révèle pas le secret de l'ingénieux système d'étanchéité mis au point par Blancpain. fonction d’un désir particulier. I CHER LECTEUR DE LETTRES DU BRASSUS Vous tenez entre les mains le troisième numéro de Lettres du Brassus et nous espérons que vous aurez autant de plaisir à le lire que nous avons eu à le concevoir ! Peut-être avez-vous reçu cet exemplaire dans votre boîte aux lettres ? Le cas échéant, nous sommes heureux de vous compter parmi nos abonnés et/ou membres du Registre du Connaisseur de Blancpain et nous tenons à vous remercier de votre intérêt et de votre confiance ! Si vous découvrez ce magazine pour la première fois et souhaitez recevoir gratuitement les prochains numéros de Lettres du Brassus, nous vous invitons à remplir le formulaire d’abonnement sur notre site Internet à l’adresse suivante : http://www.blancpain.ch/e/downloads/lettres_du_brassus Vous pouvez également nous faire parvenir votre requête par email à pr@blancpain.com ou encore, remplir le coupon joint et nous le retourner à l’adresse indiquée au dos. ÊTES-VOUS DÉJÀ MEMBRE DU REGISTRE DU CONNAISSEUR ? OUI NON (Si oui, vous recevez automatiquement LETTRES DU BRASSUS.) Mme M. Écrire en lettres majuscules S. V. P., merci. Nom Prénom Rue et n° Code postal Localité Pays Adresse email Langue: Français Allemand Anglais Espagnol Si vous ne souhaitez plus recevoir le magazine, merci de bien vouloir cocher la case correspondante: Je ne souhaite pas recevoir les prochains numéros de Lettres du Brassus, merci. Affranchir S.V.P. BLANCPAIN SA Le Rocher 12 CH-1348 Le Brassus MORCEAUX CHOISIS DE L’UNIVERS BLANCPAIN BLANCPAIN SPONSORISE LE RALLYE PÉKIN-PARIS 2007 traverser des rivières à gué, vaincre le désert de Gobi, cahoter inlassablement sur des routes Dans nos vies modernes, nous oublions sou- point, l’ancêtre du courage et de la bravoure en si mauvais état qu’il ne fait aucun doute vent que les mots « automobile » et « aven- sur quatre roues : le rallye Pékin-Paris. que la tâche du Prince Borghese était plus ture » étaient autrefois étroitement associés. Imaginez-vous grimper sur le siège du aisée, un siècle plus tôt, alors que les voies de Certains s’empresseront sans doute d’af- conducteur d’une automobile historique, communication n’existaient tout simplement firmer qu’emprunter l’autoroute du Soleil dans certains cas un modèle antérieur à 1925, pas. Bien sûr, il était téméraire pour le Prince pendant un jour rouge, se lancer dans le ajuster vos lunettes de motocycliste, peut-être Borghese de se lancer dans cette épopée en réseau des voies rapides de Los Angeles ou, glisser vos doigts dans des gants et partir de 1907 pour démontrer que ces véhicules cra- ainsi que le rapportait le Wall Street Journal Pékin pour emprunter l’itinéraire suivi par le chotants étaient capables de traverser un récemment, parcourir les ruelles de Tokyo au Prince Borghese en 1907 à destination de continent et particulièrement ahurissant pour volant d’un SUV Hummer surdimensionné Paris. Douze mille kilomètres d’une route qui un ouvrier français qui travaillait sur un constituent de véritables aventures. Si nous traverse la Mongolie intérieure et extérieure, champ de foire de décider, à la lecture des n’allons pas épiloguer sur le fait que ces les steppes d’Asie centrale, puis Moscou, intentions du prince, de le défier alors qu’il entreprises méritent ou non le titre d’aven- Riga, Vilnius, avant de descendre sur Reims et n’avait jamais tenu de volant auparavant. Il tures, nous pouvons néanmoins citer un réaliser une arrivée triomphale sur la place restait une grande part de cette volonté de se exemple incontestable où l’esprit d’aventure Vendôme à Paris. Mais avant, il faudra livrer corps et âme aux caprices du destin en lié à l’automobile au cours des premières années du XXe siècle reste vivace au plus haut Jour 2, un détour non prévu à l’itinéraire. L’édition limitée Pékin-Paris du Léman Chronographe Flyback dans le motif de couleur rouge. Le départ donné aux portes de la Grande Muraille. 80 | 81 2007 au moment d’organiser une nouvelle de cette réplique de la course de 1907, rallye historique. Inspiré par le logo jaune et édition de l’interminable course historique Blancpain était particulièrement heureux rouge du raid, l’édition spéciale Pékin-Paris a entre le Prince et le Gueux. d’être l’unique sponsor de cet événement. été présentée en deux coloris, l’un en jaune et Pour les 260 pilotes (130 voitures), cette Non seulement Blancpain a décerné le « Prix l’autre en rouge, avec des cadrans, des aiguil- aventure automobile représentait une immer- de la Bravoure » à deux pilotes pour leur les et des bracelets en accord avec le thème sion intense, absolue, totale, encore accrue exceptionnel esprit sportif sous la forme de chromatique retenu. Tous les modèles sont par sa nature exceptionnelle. Pendant un siè- garde-temps Léman Time Zone : Timothey dotés d’un rotor en or frappé du logo du ral- cle entier, le rallye Pékin-Paris n’a en effet per- Scott (qui pilotait une Mercedes 1903) et lye Pékin-Paris visible à travers le fond en mis aux valeureux conducteurs de se mesurer Peter Livanos (au volant d’une Bentley de saphir. Les séries rouge et jaune sont éditées et de tester leurs véhicules qu’à trois reprises 1929), mais a également créé une édition dans une édition spéciale strictement limitée sur un itinéraire de 12000 kilomètres. En spéciale limitée Pékin-Paris du Léman à 130 exemplaires chacune. reconnaissance de la signification historique Chronographe Flyback pour commémorer ce Blancpain a célébré à la fois le départ et l’arrivée des équipes. Alain Delamuraz, directeur marketing, et André Meier, viceprésident vente, se sont rendus à Pékin pour souhaiter bonne route aux intrépides pilotes. A l’arrivée à Paris, une réception au champagne tenue dans la boutique Blancpain de la Rue de la Paix a récompensé tous les pilotes, tant ceux des 105 automobiles qui sont parvenus à terminer la course que leurs collègues qui ont connu un karma mécanique moins favorable. Jour 10, à travers la Mongolie en direction de la frontière russe. Toutes les montres de l’édition limitée Pékin-Paris possèdent une masse oscillante en or personnalisée. Réception à l’arrivée place Vendôme à Paris. MORCEAUX CHOISIS DE L’UNIVERS BLANCPAIN BLANCPAIN LANCE UNE LIGNE DE STYLOS La reconnaissance mutuelle d’une culture et d’un esprit communs a conduit au lancement d’une édition limitée de 35 stylos Il est fréquent que les collectionneurs de haute Grayson Tighe Blancpain qui seront pro- horlogerie, dans leur amour pour un artisanat posés exclusivement dans les boutiques d’exception, soient attirés par d’autres objets Blancpain. Confectionnés en titane massif d’un grand raffinement, une catégorie qui et parfaitement équilibrés dans la main, ces comprend précisément les stylos-plumes de stylos sont ornés de la gravure manuelle de prestige. Blancpain n’apprécie pas unique- Grayson Tighe qui illustre divers motifs ment ce lien à sa juste valeur, mais a même caractéristiques de Blancpain. La pointe du décelé des affinités plus profondes en décou- bouchon reproduit le dessin de la couronne vrant le travail artisanal du Canadien Grayson Blancpain tandis que la phase de lune carac- Tighe, célèbre créateur de stylos. Aucune téristique de la marque décore l’épingle. usine au monde ne fabrique les instruments La ligne se compose de trois modèles : d’écriture Grayson Tighe. Il travaille seul dans stylo-plume, stylo-bille et stylo-feutre. Pour son atelier de Toronto et confectionne lui- les personnes qui souhaitent acquérir même, entièrement à la main, chacune de plusieurs versions, tous les exemplaires d’un ses réalisations. Il excelle notamment dans assortiment commandés simultanément la minutieuse gravure sur titane. porteront le même numéro de série. Lorsque Marc A. Hayek, président de Blancpain, a découvert le travail de Grayson Tighe, il a immédiatement apprécié la similitude d’approche et de méthode entre l’atelier de Grayson et ceux de Blancpain au Brassus – un profond attachement à la tradition et un artisan qui réalise une œuvre du début à la fin. Plus encore, la gravure à la main telle qu’elle est exercée par Grayson Tighe fait écho à la même technique pratiquée par les artisans de Blancpain qui gravent à la main platines et masses oscillantes pour des pièces spéciales. 82 | 83 RÉCEPTION DES COLLECTIONNEURS À BÂLE pressés dans la salle (où il n’y avait d’autre choix que de rester debout) afin de découvrir en avant-première la collection Fifty Fathoms qui faisait tant parler d’elle dans les couloirs de la foire. Comme à l’accoutumée, Marc A. Hayek, Président de Blancpain, était fidèle au poste, assisté de Jeffrey Kingston, pour présenter la nouvelle famille mais également informer du déroulement de l’année Blancpain. Et pour la deuxième année consécutive, tous les yeux se sont tournés sur les poignets de Marc A. Hayek dont l’un était ceint de la nouvelle Fifty Fathoms Tourbillon alors que l’autre arborait un prototype destiné à donner un avant-goût des nouveautés pré- Le point culminant de la soirée. Marc A. Hayek présente les nouveautés 2007 aux collectionneurs. Jeffrey Kingston retrace l’année Blancpain. Il s’agissait du rassemblement rituel d’une res, se transforme en « bistrot Blancpain » vues pour les prochaines saisons. Les collec- tribu. Comme la tradition l’exige désormais, afin d’accueillir chaleureusement les pas- tionneurs n’ont en effet guère tardé à appren- le stand de Blancpain à Baselworld se trans- sionnés de la marque venus du monde entier dre la leçon car l’an dernier le second poignet forme le samedi soir. Quelques instants à et qui ne rateraient pour rien au monde le portait un prototype de la montre Le Brassus peine avant l’arrivée des collectionneurs, cocktail Blancpain. « 8 jours » dont le mouvement 13R0 a été l’étage supérieur, qui sert en temps ordinaire Et à quel point la tribu s’est étoffée ! Cette tenu sur les fonts baptismaux en octobre 2006, à recevoir les journalistes et les concessionnai- année, plus de 48 collectionneurs se sont six mois après la conclusion du salon de Bâle. MORCEAUX CHOISIS DE L’UNIVERS BLANCPAIN BLANCPAIN CHRONOMÉTREUR OFFICIEL DU BOCUSE D’OR De longue date, Blancpain entretient des Éditeur BLANCPAIN SA Le Rocher 12 1348 Le Brassus Suisse Tél. : + 41 21 796 36 36 www.blancpain.com pr@blancpain.com liens étroits avec l’univers de la gastronomie. Le respect de la tradition, la quête incessante du raffinement et de la qualité ainsi que l’esprit d’inventivité sont autant de valeurs que Blancpain partage avec les plus grands chefs internationaux. Rédaction en chef Christel Räber Jeffrey S. Kingston Une fois encore, Blancpain est fière d’avoir été élue chronométreur officiel du plus pres- Secrétaire de rédaction Rachèle Mongazon tigieux concours de cuisine, le Bocuse d’Or. Portant le nom de Paul Bocuse, légendaire chef Auteurs Jeffrey S. Kingston Didier Schmutz lyonnais décoré de trois étoiles, cette manifestation bisannuelle oppose à Lyon les jeunes Adaptation française Jean-Pierre Ammon chefs les plus talentueux du monde lors d’une compétition culinaire très disputée. Pour l’édition 2007, les participants qui œuvrent dans le Paul Bocuse, un visage familier aux gourmets du cadre de strictes limites temporelles étaient monde entier. invités à créer des apprêts aux saveurs de la Volaille de Bresse AOC, du Flétan blanc de Norvège et du Crabe Royal de Norvège. Le jury se composait de chefs récompensés des plus hautes distinctions, parmi lesquels Conception, Graphisme Design, Réalisation thema communications ag, Francfort, Allemagne Direction Artistique Frank Dillmann Photolithographie Karpf Kreative Bildbearbeitung, Aschaffenburg, Allemagne Goldbeck Art, Francfort, Allemagne figuraient naturellement Paul Bocuse luimême en qualité de président du jury, ainsi que le grand chef suisse Philippe Rochat, félicité et lui a remis une montre Léman Réveil Photographies Blancpain, Valentin Blank, Gerard Brown, Communauté de Communes des Pays de Rhône et Ouvèze (CCPRO), Cru Gigondas, Pierre-Michel Delessert, Dominique Derisbourg, Christophe Dutoit, Getty Images, Grayson Tighe, Sébastien d’Halloy, Jeffrey S. Kingston, Andreas Koschate, Lausanne Tourisme, Office de Tourisme du pays de l’Hermitage, Office de Tourisme de Montreux, Office de Tourisme de Vienne, Adriano Penco, Frédéric Piguet, Monika Rittershaus, Karsten Schirmer, Stiftung Berliner Philharmoniker, US Navy, Hugues de Wurstemberger GMT afin de célébrer dignement sa victoire. Imprimé en décembre 2007 auquel nous avons consacré un article dans le premier numéro de Lettres du Brassus (et qui sont tous deux, accessoirement, propriétaires d’une Blancpain). Le lauréat de cette année est Fabrice Devignes, des Cuisines de la Présidence du Sénat à Paris. Alain Delamuraz, directeur du marketing de Blancpain, l’a Un concurrent en plein effort, chronométré par une horloge murale, réplique du célèbre Chronographe Flyback de Blancpain. Impression Caruna Druck, Kleinheubach, Allemagne UN JALON POUR LETTRES DU BRASSUS Il va de soi que nous n’avons pas créé les qu’ils partagent les mêmes affinités, nous Lettres du Brassus dans le but de récolter nous en réjouissons. Cette année, le des lauriers. C’est bien la passion des fins concours « Best of Corporate Publishing », garde-temps, du savoir-faire artisanal et de qui évalue près de 600 magazines institu- l’art de vivre qui nous guide. Cependant, si tionnels, a récompensé les Lettres du un prix nous est octroyé dans notre quête Brassus en lui décernant la médaille d’ar- d’une création qui saura plaire aux connais- gent dans la catégorie « relations avec les seurs de Blancpain, dont nous avons l’espoir consommateurs ». ÉDITORIAL NUMÉRO 03 NUMÉRO 03 BLANCPAIN. UNE TRADITION D’INNOVATION. DEPUIS 1735. À PARTIR DES ORIGINES DE COUSTEAU Cage du tourbillon volant, composée de 52 pièces 2007/2008 La Manufacture Blancpain présente un contraste inédit entre la virtuose construction aérienne de son tourbillon volant et le style sportif de sa légendaire montre de plongée Fifty Fathoms. Etanche à 300 mètres, le « Tourbillon Fifty Fathoms » (réf. 5025-3630-52) est doté d’un fond saphir dévoilant une masse oscillante ciselée à la main et créée spécialement pour ce modèle. La nouvelle édition 2007 de la Fifty Fathoms LE CHRONOGRAPHE DE MICHEL-ANGE Comment Blancpain Blancpain aa réinventé réinventé Comment le concept du chronographe le concept du chronographe GRUYÈRE AOC Une force de la nature 2007/2008